Développement de guides d`onde IR à base de couches épaisses
Transcription
Développement de guides d`onde IR à base de couches épaisses
UNIVERSITE MONTPELLIER II SCIENCES ET TECHNIQUES DU LANGUEDOC THÈSE pour obtenir le grade de Docteur de l’Université Montpellier II Discipline : Chimie et Physico-chimie des Matériaux École Doctorale : Sciences Chimiques présentée et soutenue publiquement le 9 décembre 2010 Développement de guides d’onde IR à base de couches épaisses de verres tellurures pour l’interférométrie spatiale par Éléonore BARTHÉLÉMY Composition du jury : Mme Virginie NAZABAL, Chargée de Recherche, Univ. Rennes 1 Rapporteur M. Eugène BYCHKOV , Professeur, Univ. du Littoral Côte d'Opale Rapporteur M. Jean-Emmanuel BROQUIN , Professeur, Univ. Grenoble 1 Examinateur M. Philippe VINATIER, Maitre de Conférences, Univ. Bordeaux1 Examinateur M. Michel RIBES, Professeur, Univ. Montpellier II Président M. Marc BARILLOT, Thales Alenia Space Invité Mme Annie PRADEL, Directrice de Recherches, Univ. Montpellier II Directeur de Thèse Mme Caroline VIGREUX, Maitre de Conférences, Univ. Montpellier II Directeur de Thèse UNIVERSITE MONTPELLIER II SCIENCES ET TECHNIQUES DU LANGUEDOC THÈSE pour obtenir le grade de Docteur de l’Université Montpellier II Discipline : Chimie et Physico-chimie des Matériaux École Doctorale : Sciences Chimiques présentée et soutenue publiquement le 9 décembre 2010 Développement de guides d’onde IR à base de couches épaisses de verres tellurures pour l’interférométrie spatiale par Éléonore BARTHÉLÉMY Composition du jury : Mme Virginie NAZABAL, Chargée de Recherche, Univ. Rennes 1 Rapporteur M. Eugène BYCHKOV , Professeur, Univ. du Littoral Côte d'Opale Rapporteur M. Jean-Emmanuel BROQUIN , Professeur, Univ. Grenoble 1 Examinateur M. Philippe VINATIER, Maitre de Conférences, Univ. Bordeaux1 Examinateur M. Michel RIBES, Professeur, Univ. Montpellier II Président M. Marc BARILLOT, Thales Alenia Space Invité Mme Annie PRADEL, Directrice de Recherches, Univ. Montpellier II Directeur de Thèse Mme Caroline VIGREUX, Maitre de Conférences, Univ. Montpellier II Directeur de Thèse Remerciements Merci qui ? Merci MOI ! Ramener tout à soi n’est pas mon genre. Une thèse ne se réalise pas tout seul. Il y a les personnes avec qui l’on travaille et celles que l’on retouve après le travail. Toutes ces personnes sont importantes et nous font avancer. Je vais donc reprendre mes remerciements en essayant de n’oublier personne… Les travaux présentés dans ce manuscrit ont été réalisés au sein de l’équipe PhysicoChimie des Matériaux Désordonnés et Poreux de l’Institut Charles Gerhardt de Montpellier, UMR 5253, à l’Université de Montpellier II. Je remercie Monsieur François Fajula pour m’avoir acceptée au sein de son unité de recherche. Mes premiers remerciements vont à tous les membres du jury pour avoir accepté de juger mon travail de thèse : Madame Virginie Nazabal, Chargée de recherche au sein de l’unité Sciences Chimiques de Rennes, et Monsieur le Professeur Eugène Bychkov de l’Université du Littoral Côte d’Opale, qui ont accepté de « rapporter » cette thèse ; Monsieur Philippe Vinatier, Maître de conférences à l’Université de Bordeaux 1, et Monsieur le Professeur Jean-Emmanuel Broquin de l’Institut de Microélectronique Électromagnétisme et Photonique de Grenoble. Je remercie Monsieur Marc Barillot, de Thales Alenia Space, d’avoir accepté de participer à mon jury de thèse. Je remercie également Monsieur le Professeur Michel Ribes pour avoir présidé ce jury. Je remercie tout particulièrement Madame Caroline Vigreux, « ma petite chef », et Madame Annie Pradel, « ma grande chef », pour leur soutien et leurs conseils durant cette thèse. Je les remercie pour la confiance qu’elles m’ont accordée notamment en me permettant de présenter notre travail « en solo » lors de réunions officielles avec les industriels ou lors de congrès internationaux, et tout cela en anglais s’il vous plait ! Un merci tout particulier à Caroline pour sa patience et son aide précieuse lors de la rédaction. Je tiens également à remercier tous les membres du projet « Integrated Optics for the Darwin mission ». Merci à Marc Barillot (à nouveau !), mon directeur « industriel » de thèse, pour m’avoir permis de faire connaissance avec le milieu industriel mais aussi avec celui de l’optique. Merci à Stéphane Ménard qui m’a initiée à la méthode des m-lines. Re-Merci à Jean-Emmanuel Broquin pour ses conseils scientifiques et autres (merci aussi pour la visite de San Francisco !). Merci à Lionel Bastard, Xiang-Hua Zhang et Gilles Parent. Je remercie également Volker Kirschner de l’ESA dont les remarques pertinentes lors des réunions officielles nous ont bien fait avancer dans le projet. Un grand merci à Monsieur Patrick Smutek sans qui le bâti de co-évaporation thermique ne fonctionnerait pas aussi bien. Merci pour sa disponibilité et pour ses précieux conseils qui nous ont permis d’obtenir de tels résultats. Je tiens également à remercier Thierry Billeton, opticien de précision, pour m’avoir initiée à l’art du polissage en m’accueillant dans son laboratoire. Je le remercie également pour sa disponibilité et pour nous avoir accordé de son temps lorsque nous avions besoin d’échantillons. Je remercie les personnes qui ont contribué à ce travail de thèse. Par ordre chronologique, je remercie Jérôme Frayret qui a contribué à l’amélioration du bâti de coévaporation au début de ma thèse. Son travail m’a servi de base tout au long de ces trois ans. Je remercie Stéphanie Albert-Gascoin, femme officielle d’Elmer, qui a participée de très prés à mon travail de thèse. Je la remercie pour son soutien et son amitié. Merci Madame ! Enfin, je remercie Raphael Escalier, nouveau gardien d’Elmer, pour avoir pris la suite des opérations au niveau des couches épaisses lors de la rédaction. Je remercie également les différents stagiaires qui ont travaillé sur le projet et qui ont contribué à le faire avancer. Je remercie les différentes équipes techniques de l’institut et des services communs de l’université, et plus particulièrement : Claude Merlet et Bernard Boyer (Microsonde et SIMS), Frédéric Pichot (gravure RIE), Jean Lyonnet et Jean-Marie Peiris (salle blanche), Dominique Granier (DRX), Bruno Navarra et Gilbert Compan, Pierre Sans, et bien d’autres…Merci également à l’équipe du secrétariat : Claudette Blavignac, Véronique Siadoux et Magali Rouzaud. Je n’oublie pas de saluer et d’adresser toute mon amitié à l’ensemble des chercheurs du laboratoire, toutes équipes confondues. Je remercie en particulier Pascal Yot qui m’a supportée lors de mon stage de master 2, et Andrea Piarristeguy pour les nombreux midis « La redoute » passés ensemble. Je tiens à remercier les autres, ceux qui n’ont pas participé à mon travail de thèse mais qui pourtant en sont les acteurs ! Tout d’abord je remercie les « anciens » docteurs : Guillaume le maître du solitaire (mais pas du Mahjong !), Audrey, Vincent et les discussions sans allusions, Andrea et les débats footballistiques, Nicolas, et enfin Cyril un peu moins ancien que les autres. Je remercie particulièrement Nathalie ma fidèle voisine de bureau pour son aide et son soutien, mais aussi pour tous les bons moments passés ensemble. Je remercie également : Pierre-André l’homme en noir dit PAC, Milos, Gopal, Marco et Isabelle (vive le basket le soir après le travail). Je remercie les futurs nouveaux docteurs : Bérangère, Arthur (dit Tutur et les minimoys : c’est trop facile !), Igor qui sait aussi bien que moi lire dans les nuages, Amory, Frédérico, Adrien…Je remercie particulièrement Laure, avec qui j’ai eu pas mal de bons délires (vive la Pie Curry !), et Lydie dite « La petite » avec qui j’ai passé de bons moments (J’attends ta « cérémonie » de thèse avec impatience !). Pour finir, je tiens à remercier toute ma famille, en particulier mes parents Mum et Dad, et mes petites sœurs (j’ai bien dit « petites ») Manon et Cloé, qui ont cru en moi, m’ont soutenue, m’ont supportée et qui continue de le faire…Un merci spécial à Pierre qui a été là bien avant le début de cette thèse et qui est toujours là après. Je le remercie pour son soutien, ses encouragements et surtout son amour. Merci à tous ! Sommaire INTRODUCTION GENERALE 1 CHAPITRE A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale INTRODUCTION L’interférométrie spatiale I. I.1. 11 11 I.1.1. L’objectif du projet Darwin 11 I.1.2. Le principe de détection des exoplanètes 12 I.2. II. Le projet Darwin 9 L’optique intégrée pour le projet Darwin Choix des matériaux 14 17 II.1. Les critères de choix des matériaux 17 II.2. Les principaux matériaux pour l’optique intégrée IR 17 II.2.1. Les matériaux cristallins 18 II.2.2. Les verres 19 II.3. III. Le matériau retenu pour le projet Darwin 20 II.3.1. Les verres du système Te-As-Se 20 II.3.2. Les verres des systèmes Te-I et Te-Ge-I 21 II.3.3. Les verres du système Te-Ge-Ga 23 Les guides d’onde IR III.1. Qu’est-ce qu’un guide d’onde ? 25 25 III.1.1. Approche d’optique géométrique 26 III.1.2. Approche électromagnétique 28 III.2. Les principales méthodes de fabrication des guides 30 III.2.1. La photoinscription 31 III.2.2. Le dopage à l’argent 31 III.2.3. L’implantation ionique 32 III.2.4. Le thermomoulage 33 III.2.5. Fibre enterrée monomode 34 III.2.6. L’empilement de couches et gravure 34 III.3. Les types de guides d’onde retenus 36 III.3.1. La méthode de réalisation retenue 36 III.3.2. Le matériau retenu 37 III.3.3. Les types de guides d’onde retenus 37 CONCLUSION 39 CHAPITRE B : De l’obtention l’interférométrie spatiale des couches tellurures pour INTRODUCTION 43 I. 44 Dépôt des couches Te-Ge-Ga par co-évaporation thermique I.1. 44 I.1.1. Principales méthodes de dépôt des matériaux chalcogénures 44 I.1.2. Choix de la co-évaporation thermique 46 I.1.3. La co-évaporation thermique 47 I.2. Etablissement des conditions de dépôt 49 I.2.1. Choix des différentes sources (matériaux/creusets) 49 I.2.2. Conditions de dépôt 51 I.3. Couches Te-Ge-Ga : dépôt et caractérisation 56 I.3.1. Dépôt des couches Te-Ge-Ga 56 I.3.2. Caractérisation des couches Te-Ge-Ga 57 I.4. II. Choix de la méthode de dépôt Conclusion Les couches Te-Ge pour l’optique intégrée IR 65 67 II.1. Dépôt des couches Te-Ge 67 II.2. Caractérisation des couches Te-Ge 69 II.2.1. Caractéristiques générales 69 II.2.2. Homogénéité des couches Te-Ge 71 II.2.3. Morphologie 73 II.2.4. Comportement thermique 74 II.2.5. Propriétés optiques 78 CONCLUSION 84 CHAPITRE C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux INTRODUCTION 89 I. 90 Choix de la méthode de gravure I.1. Les différentes méthodes de gravure 90 I.1.1. La gravure chimique 90 I.1.2. La gravure physique 91 La méthode de gravure retenue 94 I.2. I.2.1. Pourquoi la gravure physique réactive ? 94 I.2.2. II. La gravure ionique réactive pour les couches binaires Te-Ge Établissement des conditions de gravure 95 97 II.1. La photolithographie 97 II.2. Influence des différents paramètres 98 II.2.1. Mélange de gaz réactifs : CHF3 + O2 II.2.2. Mélange de gaz réactifs : CHF3 + O2 + Ar II.3. Choix des conditions de gravure CONCLUSION 99 103 109 113 CHAPITRE D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge INTRODUCTION Dimensionnement des guides d’onde I. 117 118 I.1. Dimensions optimisées 118 I.2. Marge de tolérance 122 I.2.1. Au niveau des dimensions 122 I.2.2. Au niveau de l’angle 123 Fabrication des guides d’onde II. 125 II.1. La préparation du substrat 125 II.2. Le dépôt de la couche de cœur 127 II.2.1. Quelle composition ? 127 II.2.2. Quelle épaisseur ? 131 II.3. 131 II.3.1. Réalisation du masque en vue de la réalisation des différentes structures guidantes 132 II.3.2. Gravure partielle pour la fabrication des structures chargées (RIB) 133 II.3.3. Gravure totale pour la fabrication des structures rubans (STRIP) 134 II.4. III. La gravure de la couche de cœur Le dépôt du superstrat pour les structures rubans 137 II.4.1. Quelle composition ? 137 II.4.2. Quelle épaisseur ? 137 II.4.3. Qualité du recouvrement 137 Caractérisation optique des guides d’onde III.1. Préparation des faces d’entrée et de sortie du guide 140 140 III.1.1. Le clivage 140 III.1.2. Le polissage 141 III.2. Caractérisation optique des guides d’onde réalisés 145 III.2.1. Transmission dans les guides planaires 145 III.2.2. Guidage dans les structures chargées 148 III.2.3. Filtrage modal 150 CONCLUSION 152 CONCLUSION GENERALE 155 ANNEXES 161 Annexe A : Les balances à quartz 163 Annexe B : Synthèse de verres massifs Te-Ge par la méthode d’ultra-trempe 165 BIBLIOGRAPHIE 167 Introduction générale Introduction générale 1 Introduction générale 2 Introduction générale Depuis de nombreuses années, le domaine de la Science de l’Espace est en pleine expansion. Différents projets visant à l’exploration de l’univers et la recherche de nouvelles planètes ont vu le jour, à l’initiative de la NASA (National Aeronautics and Space Administration) et de l’ESA (Agence Spatiale Européenne). Le projet Darwin, initié par l’ESA et dans lequel ce travail de thèse s’inscrit, en est un exemple. Il vise la découverte de nouvelles planètes extrasolaires puis l’étude de leur atmosphère pour vérifier l’éventuelle présence d’activité photosynthétique, signature de la vie. La réussite du projet est conditionnée par la mise au point d’un dispositif capable de récolter des informations issues de la planète à étudier, malgré sa faible luminosité par rapport à celle de l’astre autour duquel elle gravite. Le domaine spectral retenu est celui du moyen infrarouge où le contraste lumineux entre l’astre et la planète n’est que de 106 à comparer aux 109 existants dans le visible. La méthode d’exploration retenue est l’interférométrie annulante qui permet d’ « éteindre » artificiellement la lumière issue de l’astre, afin de ne récolter que celle issue de la planète. Elle requiert le développement de filtres modaux, filtres qui auront pour objectif une extinction du flux lumineux astral d’un facteur compris entre 105 et 106. Deux solutions peuvent être envisagées pour la réalisation de ces filtres modaux : une solution d’optique massive avec la fabrication de fibres optiques monomodes, et une solution d’optique intégrée avec la conception de guides d’onde canaux monomodes. Mon travail de thèse s’inscrit dans le deuxième axe à savoir l’optique intégrée. Il se déroule dans le cadre d’un projet « Integrated optics » soutenu par l’ESA et dont le management est assurée par Thales Alenia Space, et avec le concours de quatre laboratoires universitaires. Il vise la réalisation de filtres modaux, basés sur des guides d’onde d’optique intégrée. Le domaine spectral à explorer, défini par l’ESA s’étend de 6 à 20 µm, domaine dans lequel on trouve des signatures spectrales de molécules liées à une activité photosynthétique, telles que l’eau, le dioxyde de carbone ou l’ozone. Or, jusqu’à présent les filtres modaux ont exclusivement été développés pour la longueur d’onde 1,55 µm, utilisée pour les télécommunications optiques. Ils sont donc basés sur la « technologie silicium » et ne sont donc pas adaptés au développement de composants fonctionnant dans le domaine s’étendant de 6 à 20 µm. Le but ultime de mon travail de thèse était donc de prouver la faisabilité de filtres modaux et de développer des guides d’onde canaux monomodes pouvant fonctionner dans ce domaine spectral étendu de l’infrarouge. Le développement de tels guides passait tout 3 Introduction générale d’ abord par le choix du matériau. De par leurs propriétés de transparence dans l’infrarouge, leurs pertes intrinsèques faibles, leur facilité de mise en forme et leurs faibles énergies de phonons, les verres chalcogénures et plus précisément les verres tellurures se sont avérés des matériaux prometteurs. Il fallait ensuite choisir une technologie pour la fabrication des guides ; plusieurs options étaient en effet envisageables, comme par exemple le thermomoulage ou la photoinscription. La méthode retenue a été « l’empilement et la gravure » de couches. Cette technique, classiquement utilisée pour la fabrication de composants en microélectronique et fonctionnant aux longueurs d’onde des télécommunications, n’était toutefois pas mûre pour des applications en infrarouge moyen. En effet, des guides d’onde de taille beaucoup plus importante (de l’ordre de dizaines de microns) devaient être réalisés pour une utilisation dans cette gamme spectrale, ce qui impliquait le dépôt de couches de plusieurs micromètres d’épaisseur et des gravures de quelques microns de profondeur. Pour réaliser ces guides d’onde répondant aux exigences de l’interférométrie annulante pour le projet Darwin, un gros travail technologique était donc indispensable. Il fallait en effet maîtriser : (i) le dépôt de couches épaisses de verres tellurures avec des indices de réfraction contrôlés, (ii) la gravure profonde de ces couches avec de bons profils de gravure et (iii) la préparation des faces d’entrée et de sortie des guides pour l’injection de la lumière. Le manuscrit est découpé en quatre parties principales. Le chapitre A introduit le projet Darwin et ses exigences. Il fait état des différents types de matériaux pouvant être utilisés en optique intégrée infrarouge et justifie notre choix des verres tellurures. Il décrit également les différentes méthodes de réalisation de guides d’onde et explique pourquoi nous nous sommes orientés vers la technologie « empilement et gravure de couches ». Le chapitre B traite du dépôt de couches épaisses de verres tellurures. Il présente quelques techniques classiques d’obtention de couches et justifie notre choix de la coévaporation thermique. Il fait état de toutes les étapes qui ont été nécessaires pour aboutir au choix de la composition de la couche de cœur et pour obtenir des couches épaisses présentant des propriétés compatibles avec le projet. Le chapitre C traite de la modification de la géométrie de la couche de cœur par gravure. Dans une première partie, les différentes techniques de gravure envisagées pour les couches chalcogénures sont présentées et le choix de la méthode retenue discuté. Dans une seconde partie, nous présentons l’étude de l’influence des différents paramètres sur la gravure de la couche de cœur. 4 Introduction générale Enfin, dans le chapitre D, nous décrivons la dernière étape dans la réalisation des guides d’onde, à savoir la préparation des faces d’entrée et de sortie des guides. La dernière partie de ce chapitre présente la caractérisation optique des différents guides d’onde réalisés. 5 Introduction générale 6 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Chapitre A Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale 7 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale INTRODUCTION L’interférométrie spatiale I. I.1. 11 11 I.1.1. L’objectif du projet Darwin 11 I.1.2. Le principe de détection des exoplanètes 12 I.2. II. Le projet Darwin 9 L’optique intégrée pour le projet Darwin Choix des matériaux 14 17 II.1. Les critères de choix des matériaux 17 II.2. Les principaux matériaux pour l’optique intégrée IR 17 II.2.1. Les matériaux cristallins 18 II.2.2. Les verres 19 II.3. III. Le matériau retenu pour le projet Darwin 20 II.3.1. Les verres du système Te-As-Se 20 II.3.2. Les verres des systèmes Te-I et Te-Ge-I 21 II.3.3. Les verres du système Te-Ge-Ga 23 Les guides d’onde IR III.1. Qu’est-ce qu’un guide d’onde ? 25 25 III.1.1. Approche d’optique géométrique 26 III.1.2. Approche électromagnétique 28 III.2. Les principales méthodes de fabrication des guides 30 III.2.1. La photoinscription 31 III.2.2. Le dopage à l’argent 31 III.2.3. L’implantation ionique 32 III.2.4. Le thermomoulage 33 III.2.5. Fibre enterrée monomode 34 III.2.6. L’empilement de couches et gravure 34 III.3. Les types de guides d’onde retenus 36 III.3.1. La méthode de réalisation retenue 36 III.3.2. Le matériau retenu 37 III.3.3. Les types de guides d’onde retenus 37 CONCLUSION 39 8 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Introduction Depuis de très nombreuses années l’exploration de l’univers suscite un grand intérêt. La science de l’espace est devenue l’un des domaines de recherche les plus populaires et fascinants notamment grâce à la NASA (National Aeronautics and Space Administration) aux USA et à l’ESA (European Space Agency) en Europe. Le projet spatial Darwin, initié par l’ESA, s’inscrit dans cette dynamique. Ce projet devrait permettre d’ici 2020 de découvrir et d’étudier de nouvelles planètes extrasolaires. L’interférométrie spatiale est la seule méthode qui permet une détection directe des exoplanètes et le sondage de leur atmosphère par spectroscopie afin de trouver d’éventuelles traces de vie primitive. Les éléments recherchés, tels que l’eau, le dioxygène via la présence d’ozone et le dioxyde de carbone, sont caractérisés par des signatures spectrales comprises entre 6 et 20 µm, soit dans l’infrarouge moyen. La collecte de toutes les informations concernant la planète étudiée nécessite donc la réalisation de composants fonctionnant dans la bande spectrale [6–20 µm]. L’une des techniques envisagées dans le cadre du projet Darwin est l’optique intégrée infrarouge qui permet la réalisation de fonctions optiques sur de faibles volumes. La première étape dans la réalisation de composants à géométrie complexe est la fabrication de guides d’onde droits fonctionnant dans toute la fenêtre spectrale. Ces composants serviront de filtres modaux qui doivent permettre un taux de rejection de l’interféromètre sur la lumière de l’étoile d’environ 10-5. Le taux de réjection est défini comme le rapport entre le maximum de transmission de l’instrument et de son minimum. De par leur propriété de transparence dans l’infrarouge, les verres chalcogénures s’avèrent être de bons candidats pour la réalisation de composants d’optique intégrée infrarouge. Les verres tellurures sont les verres chalcogénures les plus intéressants pour le projet Darwin puisque leur domaine de transparence peut s’étendre jusqu’à 28 µm. Dans la première partie, nous présenterons l’interférométrie spatiale au travers du projet spatial Darwin ainsi que l’optique intégrée infrarouge. Dans la partie II, nous passerons brièvement en revue les différents types de matériaux pouvant être utilisés en optique intégrée infrarouge et les raisons pour lesquelles les verres chalcogénures, et plus précisément les verres tellurures, ont été retenus. Enfin, dans la partie III, nous évoquerons les différentes méthodes possibles pour la réalisation de guides d’onde infrarouge à base de ces verres 9 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale chalcogénures. Nous présenterons la méthode choisie ainsi que les types de guides d’onde envisagés. 10 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale I. L’interférométrie spatiale I.1. Le projet Darwin Le projet spatial Darwin devrait permettre, d’ici 2020, de détecter et d’étudier de nouvelles planètes extrasolaires (de taille comparable à celle de la Terre) mais aussi d’y découvrir d’éventuelles traces de vie primitive. [1] La flottille de Darwin devrait être composée : - d’au moins trois télescopes de 1,5 m de diamètre constituant l’interféromètre et appelés free flyers, - d’une entité centrale hexagonale appelée hub, servant à recombiner la lumière provenant des télescopes et simulant un miroir aux dimensions beaucoup plus grandes que celles d'un simple télescope, - d’un satellite de communication entre le hub et la Terre. I.1.1. L’objectif du projet Darwin L’objectif de la mission Darwin est de détecter des exoplanètes, planètes qui sont en orbite autour d’une étoile autre que le Soleil, et d’y découvrir la présence éventuelle de vie en procédant à une spectroscopie de leur atmosphère. Le contraste lumineux entre la planète étudiée et son étoile est plus faible dans l’infrarouge (106 à 10 µm) que dans le visible (109) : c’est pourquoi l’observation et l’étude de la planète se feront dans l’infrarouge moyen. Les éléments recherchés pour confirmer la présence d’éventuelles traces de vie primitive sur l’exoplanète étudiée sont les suivants : l’eau H2O, le dioxygène O2 via la présence d’ozone O3 et le dioxyde de carbone CO2. Ces molécules sont en effet caractéristiques d’une activité photosynthétique. Elles sont caractérisées par des signatures spectrales observables dans l’infrarouge moyen et clairement identifiables (Figure A. 1) : - les bandes relatives à l’eau (H2O) sont observables dans le proche infrarouge aux alentours de 1,9 µm, dans le moyen infrarouge entre 6-8 µm et enfin dans l’infrarouge lointain à 19,6 µm, 11 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale - la signature spectrale du dioxygène (O2) est observable à 0,7-0,8 µm et 1,2 µm mais pas dans l’infrarouge lointain. La présence de dioxygène sera donc confirmée via la présence d’ozone (O3) qui a une signature spectrale observable à 9,6 µm, - le dioxyde de carbone (CO2) a une signature spectrale observable dans l’infrarouge Flux à 10 pc (photons m-2 h-1 µm-1) à 15 µm. Longueur d’onde (µm) Figure A. 1 : Spectres infrarouges de trois planètes : Vénus, Mars et Terre ; et signatures spectrales de l’eau H2O, de l’ozone O3 et du dioxyde de carbone CO2. I.1.2. Le principe de détection des exoplanètes Il existe deux principales catégories de méthodes pour la détection des exoplanètes : les méthodes indirectes qui recherchent, sur l’étoile, un effet engendré par la présence d’une planète, et les méthodes directes. Les méthodes utilisées de nos jours pour détecter les exoplanètes sont des méthodes indirectes : on étudie le mouvement que la planète induit sur l’étoile mère autour de laquelle elle gravite. Grâce à la flottille de Darwin, l’observation des exoplanètes sera directe : c’est-à-dire que l’on cherchera à analyser directement la lumière émise par ces planètes. La difficulté dans la détection des exoplanètes réside dans le fait que le flux de l’étoile mère « masque » le flux de la planète. En effet, l’observation d’une exoplanète revient à observer un ver luisant à côté du phare de Marseille depuis Paris. Afin de pouvoir observer une exoplanète, il faut donc séparer le flux lumineux de la planète de celui de l’étoile centrale. 12 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Le principe de détection de la flottille de Darwin est basé sur celui du coronographe interférométrique de Bracewell ou interféromètre en frange noire. Dans le cas d’un interféromètre à deux télescopes, le principe est simple : chaque télescope pointe en direction de l’étoile à observer (Figure A. 2). Figure A. 2 : Coronographe interférométrique dans le cas simple à deux télescopes Les faisceaux issus de l’étoile arrivent en phase sur les télescopes. En introduisant sur un des bras de l’interféromètre un déphasage de , les faisceaux de l’étoile arrivent en opposition de phase sur le recombineur. Les interférences sont donc destructives. La lumière de l’étoile est éteinte. L’étoile et la planète sont séparées d’un angle ce qui introduit une différence de chemin optique = D.sin entre les rayons issus de l’étoile et ceux issus de la planète, D étant la base de l’interféromètre. Connaissant , on peut régler la distance D entre les télescopes afin d’obtenir une différence de chemin optique égale à /2. Les faisceaux issus de la planète arrivent donc en opposition de phase sur les télescopes. Le déphaseur de placé sur l’un des bras de l’interféromètre remet les faisceaux en phase. Ils forment donc des interférences constructives sur le recombineur. On ne détecte ainsi que les photons issus de la planète. C’est sur ce principe qu’est basée l’interférométrie en frange noire (nulling interferometry) avec les télescopes de la flottille Darwin. La collecte de toutes les informations concernant la planète étudiée et provenant de tous les télescopes se fera au niveau de l’entité centrale (hub), de la flottille de Darwin. La collecte de ces informations nécessite la réalisation de composants fonctionnant dans la 13 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale fenêtre spectrale [6-20 µm] où le contraste lumineux entre la planète et son astre est le plus faible, et où l’on retrouve des raies caractéristiques des éléments recherchés. I.2. L’optique intégrée pour le projet Darwin Le satellite « recombineur », ou hub, est composé de quatre bancs optiques qui ont des fonctions telles que, par exemple, la métrologie, la séparation, la recombinaison et la détection… Comme nous l’avons dit précédemment, le taux de luminosité entre une planète et son astre dans l’infrarouge est estimé à 106 à 10 µm. Afin de pouvoir observer la planète, il faut que l’interféromètre réalise une extinction de l’étoile entre 10-6 et 10-5. Il est donc nécessaire d’ajouter des filtres modaux (Figure A. 3). L’utilisation d’optique guidée monomode est une des solutions envisagées pour le filtrage des fronts d’onde [2]. Figure A. 3 : Schéma de principe d’un filtre modal. En effet, à l’entrée du guide, le faisceau est réduit à son mode fondamental. Quelle que soit la forme de l’onde d’entrée, le guide d’onde va perdre sa mémoire et seulement propager une onde plane progressive, c’est-à-dire un mode avec ses deux polarisations : le mode fondamental du guide. L’intensité à la sortie du guide est directement liée aux conditions d’injection de la lumière. Le profil d’amplitude du mode est déterminé par les propriétés physiques du guide. La forme de l’onde initiale va uniquement affecter le taux d’énergie couplée dans le guide. Les défauts d’amplitude et de phase sont théoriquement transformés à la sortie du guide en une variation globale d’amplitude et de phase de mode du guide. Ce type de filtre optique permet de corriger les défauts optiques sur la totalité de la gamme spectrale envisagée. Ces propriétés sont cruciales pour l’interférométrie annulante. 14 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale L’optique intégrée qui est une technologie prometteuse dans le développement de l’optoélectronique, est un domaine en pleine expansion. Les circuits optiques présentent de nombreux avantages : - insensibilité aux bruits électromagnétiques à cause de la très haute fréquence de la lumière ; - sécurité et fiabilité d’acquisition et de transport des informations en environnement sévère ; - possibilité de traitement de l’information en temps réel ; - accroissement du nombre d’informations transportées grâce au multiplexage en longueur d’onde ; - possibilité de mesures sans contact ; - possibilité de réalisation de têtes de mesure ou de dispositifs de traitement de l’information ne faisant pas intervenir localement de puissance électrique. Aux avantages des circuits optiques traditionnels, l’optique intégrée ajoute les avantages apportés par la mise en œuvre des techniques d’intégration : - miniaturisation des circuits optiques ; - suppression des problèmes traditionnels d’alignement entre composants ; - possibilité de développer des techniques de fabrication compatibles avec les objectifs de faible coût et de production de masse. L’optique intégrée est une technologie microélectronique qui utilise la lumière guidée pour traiter les signaux optiques par intégration du guidage de la lumière sur la surface d’un matériau. Elle permet de réaliser sur de faibles volumes des fonctions optiques élémentaires ou complexes, impossibles à réaliser par d’autres technologies. La technologie de l’optique intégrée permet de combiner sur un seul composant l’ensemble des faisceaux issus d’un grand nombre de télescopes dans le cadre d’une observation interférométrique. Dans le cadre du projet Darwin, les composants d’optique intégrée à développer (Figure A. 4) doivent être capables de fonctionner dans la bande spectrale allant de 6 à 20 µm. 15 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Première étape: Savoir fabriquer des guides droits Figure A. 4 : Schéma du composant final pour le projet Darwin (de dimensions 4,2*2,5 cm²). La première étape dans le développement de composants à géométrie complexe, comme le composant final (Figure A. 4), est la réalisation de guides d’onde monomodes droits fonctionnant dans la fenêtre spectrale [6-20 µm]. Ces guides d’onde seront utilisés comme filtres modaux afin de mettre en place l’interférométrie annulante. Dans le cadre du projet, le taux de réjection sur la lumière de l’étoile que l’interféromètre doit permettre est de l’ordre de 10-5 – 10-6, ce qui implique une extinction de l’étoile par le guide d’onde de l’ordre de 10-3. 16 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale II. Choix des matériaux Afin de réaliser des guides d’onde monomodes droits fonctionnant dans la fenêtre spectrale [6-20 µm], il faut trouver des matériaux transparents dans cette bande de l’infrarouge et répondant à tous les critères imposés par le projet Darwin. Dans les paragraphes suivants, nous rappellerons les critères de choix des matériaux pour la réalisation de guides d’onde IR. Nous présenterons les principaux matériaux pouvant être envisagés pour le projet. Nous justifierons notre choix d’utiliser les verres tellurures pour la réalisation de guides d’onde et plus précisément le choix du verre Te75Ge15Ga10 comme substrat. II.1. Les critères de choix des matériaux Pour le projet Darwin, plusieurs critères sont à prendre en compte. Le premier critère dont il faut tenir compte, est la fenêtre de longueurs d’onde dans laquelle le matériau doit être transparent. Dans le cadre du projet Darwin, la fenêtre de transparence du matériau doit s’étendre de 6 µm jusque 20 µm. Plus le matériau aura de faibles énergies des phonons, donc contiendra des atomes de masse élevée, plus il transmettra loin dans l’infrarouge thermique. Les pertes optiques sont également à prendre en compte. Elles regroupent les pertes intrinsèques, pertes liées à la structure même du matériau, et les pertes extrinsèques dues aux défauts et impuretés introduits lors de la fabrication. Un autre critère important porte sur la qualité même du matériau, à savoir : ses stabilités chimique, mécanique et thermique mais aussi son homogénéité. Enfin, il faut s’assurer que nous pouvons réaliser des structures guidantes à partir du matériau retenu. II.2. Les principaux matériaux pour l’optique intégrée IR La fenêtre de transmission d’un matériau est déterminée par le gap électronique dans la région des courtes longueurs d’onde et par les vibrations des liaisons chimiques dans la région des grandes longueurs d’onde. Le matériau retenu pour ce projet doit avoir une fréquence de vibration faible aux grandes longueurs d’onde. Les matériaux transparents dans 17 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale l’infrarouge lointain sont donc exclusivement constitués d’atomes lourds. Plusieurs catégories de matériaux peuvent être considérées. II.2.1. Les matériaux cristallins Le silicium (Si) a été utilisé pour la réalisation de guides d’onde par diffusion thermique et par implantation ionique [3] à travers un masque. Une autre méthode consiste à créer une variation d’indice en induisant une nanostructuration dans le réseau cristallin par attaque chimique [4]. Mais il s’avère que le silicium présente des bandes d’absorption audessus de 7 µm. Son domaine de transmission est donc trop restreint par rapport aux critères de choix établis précédemment. Le germanium (Ge) est transparent entre 2 et 14 µm. Il est aussi caractérisé par un indice de réfraction élevé, de l’ordre de 4. C’est le matériau le plus utilisé pour l’infrarouge, spécialement pour l’imagerie thermique entre 8 et 12 µm [5] [6]. A notre connaissance, il y a peu de travaux sur la fabrication de guides d’onde en optique intégrée à partir de ce matériau, et le domaine spectral [6-20 µm] ne peut être couvert entièrement avec ce type de matériau. GaAs présente une fenêtre de transmission comprise entre 1 et 17 µm. Bien que des guides canaux et plans aient déjà été réalisés pour une longueur d’onde de 10,6 µm [7], ce matériau est rarement utilisé pour des applications infrarouge. CdTe, qui est exclusivement composé d’atomes lourds, présente une large fenêtre de transparence allant de 1 à 20 µm. Son indice de réfraction est de l’ordre de 2,6. Rams et al. ont réalisé des guides plans à base de couches CdTe obtenues par épitaxie en phase vapeur sur des substrats de verre [8]. Cependant, si l’on veut réaliser des guides d’onde uniquement à base de CdTe, il sera difficile de moduler l’indice de réfraction du fait de la composition « fixe » du matériau, ce qui ne permet pas l’obtention de structures guidantes. ZnS et ZnSe sont des matériaux polycristallins. ZnS voit sa transmission diminuer après 10 µm tandis que ZnSe présente un large domaine de transmission allant du visible à l’infrarouge lointain, de 0,6 à 15 µm environ. Ce matériau est particulièrement utilisé pour la fabrication d’éléments optiques pour des lasers CO2 haute puissance, car il est caractérisé par de très faibles absorptions à λ = 10,6 µm [9]. Les halogénures cristallins d’argent, tels que AgCl, AgClBr, présentent de bonnes propriétés de transmission pouvant aller jusqu’à 30 µm. Ces matériaux ont déjà été utilisés pour la fabrication de fibres transmettant dans l’infrarouge [10], mais aussi pour la réalisation de guides d’onde plans ou canaux [11] [12]. Cependant, les halogénures d’argent sont des 18 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale matériaux mous qui peuvent donc être endommagés durant la réalisation des guides ce qui peut engendrer une augmentation de leurs pertes optiques. Les halogénures alcalins (KBr, CsCl, KCl) ont des fenêtres de transparence qui commencent à 1 µm et peuvent s’étendre jusqu’à 15-50 µm. Ce sont des matériaux solubles dans l’eau, mous et fragiles. Leurs excellentes qualités optiques risquent donc d’être détériorées pendant la fabrication et l’utilisation. Ces matériaux cristallins ne sont pas retenus pour la réalisation de guides d’onde pouvant fonctionner de 6 à 20 µm pour des applications en interférométrie spatiale. Le domaine de transmission du silicium est restreint. Les halogénures d’argent et les halogénures alcalins sont des matériaux mous qui risquent d’être endommagés et donc de voir leurs qualités optiques diminuer. Pour les matériaux tels que CdTe, GaAs ou encore ZnS/Znse, la composition est quasiment fixe, ce qui rend difficile la variation d’indice de réfraction nécessaire pour l’obtention du guidage de la lumière. Un autre type de matériau a donc été envisagé : il s’agit des verres. II.2.2. Les verres Les verres présentent de nombreux avantages par rapport aux matériaux cristallins. Leur synthèse est plus simple. Ils peuvent être facilement mis en forme. Leur composition peut être continuellement changée dans la mesure où celle-ci se trouve dans le domaine vitreux. Il est facile de réaliser deux compositions ayant des indices de réfraction appropriés pour la fabrication de guides d’onde. Comme nous l’avons déjà expliqué, pour transmettre dans l’infrarouge lointain, il faut que le matériau soit composé d’atomes lourds. Parmi les différentes familles de verres, seuls les verres chalcogénures entrent dans cette catégorie. Nous ne présenterons pas les verres oxydes qui transmettent jusqu’à 5 - 7 µm uniquement, ni les verres halogénures dont le domaine de transparence peut s’étendre jusque 30 µm environ selon l’halogène qui les constitue mais qui présentent des problèmes d’instabilité, de toxicité entre autres. Les verres chalcogénures sont des matériaux vitreux qui contiennent au moins un des éléments chalcogènes qui sont le soufre (S), le sélénium (Se) et le tellure (Te), ainsi que des éléments des groupes 14 et 15 de la classification périodique. Il existe un grand nombre de système vitreux à base de chalcogènes. Parmi eux nous pouvons citer les systèmes As-S, 19 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale As-Se, Ge-S, Ge-Se, Ge-As-Se, Te-As-Se, Ge-Sb-Se, Ge-Se-Te, Te-Ge-Ga, Te-Se-I, Ge-As-Se-Te, Te-Ge-Ga-I. Les verres chalcogénures sont pour la plupart opaques dans le visible mais transparents dans l’infrarouge. Plus les éléments qui constituent le verre seront lourds plus ce dernier sera transparent loin dans l’infrarouge. Les verres à base de soufre, élément le plus léger des chalcogènes, sont transparents jusqu’à 10 µm environ, tandis que ceux à base de sélénium voient leur domaine de transparence s’étendre jusqu’à 14 µm. Les études menées dans l’unité des Sciences Chimique de Rennes ont permis de déterminer la fenêtre de transmission des verres à base de tellure, élément le plus lourd des chalcogènes. Cette fenêtre peut s’étendre jusqu’à 28 µm selon le verre tellurure étudié. Les verres chalcogénures sont caractérisés par des indices de réfraction élevés (entre 2 et 4 selon la composition du verre et le domaine spectral considéré) et par de faibles énergies de phonons. Ils présentent des propriétés non linéaires intéressantes et sont également photosensibles. Les verres chalcogénures sont enfin faciles à mettre en œuvre sous forme de couche mince, si bien qu’ils constituent des matériaux très attractifs pour l’optique intégrée infrarouge. II.3. Le matériau retenu pour le projet Darwin Nous allons présenter brièvement quelques systèmes de verres à base de tellure et expliquer notre choix pour les verres du système Te-Ge-Ga comme matériaux pour la réalisation de guides d’onde infrarouge. II.3.1. Les verres du système Te-As-Se Les verres Te-As-Se ont une fenêtre de transmission qui s’étend de 2 à 18 µm environ (Figure A. 5). Les verres du système Tex-As40-Se60-x sont stables thermiquement. Par exemple, le verre de composition Te25As40Se35 est caractérisé par une température de transition vitreuse Tg = 140°C et une température de cristallisation Tx = 290°C, et donc un T (Tx – Tg) = 150°C qui confirme la bonne stabilité thermique de ce verre [13]. 20 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure A. 5 : Transmission d’un verre Te-As-Se Ces verres sont étudiés pour la réalisation de fibres optiques transparentes dans le domaine 3 – 12 µm [14, 15] mais ils sont aussi étudiés pour la réalisation de guides d’onde IR [16]. Ces verres sont synthétisés sous forme de massifs par la méthode classique de synthèse des verres, et peuvent être déposés sous forme de couches minces par des méthodes de dépôt telles que l’évaporation thermique ou la pulvérisation cathodique. Cependant leur domaine de transmission ne s’étend que jusque 17 µm environ, ce qui nous a amené à chercher parmi d’autres systèmes tellurures. II.3.2. Les verres des systèmes Te-I et Te-Ge-I Les verres du système Te-I présentent un très large domaine de transmission qui s’étend jusque 24 µm (Figure A. 6). Même si la stabilité thermique de ces verres est améliorée en diminuant le caractère métallique du Te par l’ajout d’iode (élément électronégatif) dont le rôle est de stabiliser les électrons libres et d’ouvrir le réseau du verre, elle reste trop faible. En effet, ces verres sont caractérisés par une température de transition vitreuse relativement basse autour de 60°C et une température de cristallisation proche de 100°C soit une stabilité thermique de 40°C seulement [17]. 21 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure A. 6 : Transmission du verre Te3I2 [17] Les verres du système Te-Ge-I ont un domaine de transparence qui s’étend jusqu’à la région des 20 µm. La stabilisation thermique de ces verres par rapport aux verres Te-I est due à l’ajout de germanium. Le verre de composition Te79Ge20I1 est caractérisé par une température de transition vitreuse Tg = 149°C et une température de cristallisation Tx = 258°C, et donc un T (Tx – Tg) = 110°C qui confirme la bonne stabilité thermique de ce verre [18]. Figure A. 7 : Transmission d’un verre Te-Ge-I [18] Ces matériaux peuvent servir à la fabrication de guides d’onde mais du fait de la difficulté à évaporer des matériaux contenant de l’iode, ils sont plus adaptés à la fabrication de fibres optiques. 22 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale II.3.3. Les verres du système Te-Ge-Ga Les verres du système Te-Ge-Ga ont été largement étudiés à l’Université de Rennes sous forme de verres massifs essentiellement [19]. Ils peuvent être déposés sous forme de couches minces par évaporation thermique simple [20-22]. Les verres du système Te-Ge-Ga présentent un large domaine de transmission pouvant aller jusqu’à 28µm. L’insertion du gallium dans les verres du système Te-Ge permet d’augmenter la stabilité thermique du verre. Les verres du système Te-Ge-Ga répondent donc aux critères de choix établis précédemment et s’avèrent être de bons candidats pour l’optique intégrée infrarouge. Il s’avère quand même que le domaine amorphe des verres massifs du système Te-Ge-Ga est relativement étroit (Figure A. 8) comparativement aux autres domaines vitraux des systèmes envisageables. Figure A. 8 : Diagramme de phase du système ternaire Te-Ge-Ga limité à un pourcentage atomique de tellure supérieur à 50% pour les matériaux massifs. La zone violette délimite le domaine de compositions où les échantillons obtenus présentent un caractère amorphe. Le verre de composition Te75Ge15Ga10, synthétisé en utilisant des méthodes de purifications chimique et physique au sein de l’unité des Sciences Chimiques de Rennes [23], présente de bonnes propriétés comme un domaine de transmission allant jusqu’à 20 µm (Figure A. 9). 23 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure A. 9 : Transmission d’un verre Te75Ge15Ga10. Ce verre est caractérisé par une température de transition vitreuse Tg = 172°C, par une température de cristallisation Tx = 285°C et donc par un T = Tx – Tg = 113°C supérieur à 100°C prouvant sa stabilité thermique. L’indice de réfraction du verre de composition Te75Ge15Ga10 est de 3,399 à λ = 10,6 µm et reste stable sur une longue période (+ de 500 jours) [23]. Les pertes optiques sont proches de 0,6 dB/cm dans la gamme de longueur d’onde allant de 6 à 20 µm. Les verres du système Te-Ge-Ga ont déjà été étudiés sous forme de couches minces. Les quelques travaux ont été effectués sur des couches amorphes déposées par évaporation thermique simple et d’épaisseurs inférieures au micron. Sripathi et al. ont étudié les propriétés structurales et optiques de couches minces Te50Ge30Ga20 d’épaisseur optimale de 0,7 µm pour des applications en stockage de données optiques [22]. Petkov et al. ont déjà étudié l’influence du pourcentage de gallium sur les propriétés structurales et optiques des couches Te-Ge-Ga d’épaisseurs comprises entre 0,07 et 0,5 µm [20]. 24 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale III. Les guides d’onde IR Le projet Darwin requiert la réalisation de composants d’optique intégrée à géométrie complexe et fonctionnant dans la fenêtre spectrale [6–20 µm]. La première étape dans le développement de ces composants est donc de prouver la faisabilité de guides d’onde monomodes canaux. Les verres chalcogénures, et plus précisément les verres du système Te-Ge-Ga, sont de bons candidats pour la conception de composants fonctionnant dans l’infrarouge thermique. Dans les paragraphes suivants, nous expliquerons ce qu’est un guide d’onde. Nous présenterons les principales méthodes de fabrication des guides d’onde à base de verres chalcogénures. Nous justifierons le choix de la méthode dite « d’empilement et de gravure des couches » et présenterons les types de guides d’onde retenus. III.1. Qu’est-ce qu’un guide d’onde ? En optique guidée, au contraire de l’optique de volume, on impose des conditions aux limites transversales de telle sorte que l’énergie reste confinée à l’intérieur d’un espace plus restreint. On peut considérer deux types de systèmes d’optique guidée : - la fibre optique qui est le système le plus connu. Elle est largement utilisée dans les télécommunications. - les composants d’optique intégrée qui sont développés pour répondre à des besoins de miniaturisation des systèmes optiques. Le principe fondamental de l’optique intégrée est le confinement de la lumière qui est possible grâce aux guides d’onde. Dans le cadre de notre étude, nous avons décidé de nous intéresser uniquement aux composants d’optique intégrée infrarouge. La propagation de la lumière peut être décrite à l’aide d’un modèle simple de guide d’onde plan diélectrique. Les lois de l’optique géométrique peuvent décrire les principes de fonctionnement des guides d’onde. Cependant, cette approche n’explique pas de nombreux effets que peuvent décrire les lois de la théorie électromagnétique, c’est-à-dire par les équations de Maxwell. 25 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale III.1.1. Approche d’optique géométrique L’optique géométrique permet de se faire une bonne idée des propriétés des guides optiques en représentant les rayons optiques se propageant dans le milieu : c’est-à-dire en prenant l’image physique d’une onde se réfléchissant totalement aux interfaces et interagissant sous certaines conditions de manière constructive. Dans sa forme la plus simple, un guide d’onde plan peut être défini par un film diélectrique d’indice de réfraction nc et d’épaisseur d entouré de deux milieux, appelés substrat et superstrat, d’indices de réfraction (ns et nsup) plus faibles. La lumière est confinée dans un guide d’onde grâce au phénomène de réflexion totale interne avec comme condition nc > ns, nsup. La lumière se propage dans la direction de l’axe z par réflexions totales internes sur les deux interfaces limitant la structure guidante d’épaisseur d suivant les lois de Snell-Descartes. n sup x z y nc d ns Figure A. 10 : Représentation géométrique d’un mode guidé suivant la direction z d’un guide d’onde plan. La réflexion totale du signal n’est possible que si l’angle de propagation de l’onde θ est supérieur aux angles critiques θs et θsup définis par : Équation A. 1 et Équation A. 2 Pour simplifier encore l’analyse on peut présumer que la direction de propagation de la lumière dans un guide est z, que le confinement se produit transversalement dans la direction x et enfin que la structure et la lumière sont uniformes dans la direction y perpendiculaire au plan xz. Dans ce cas on considère des ondes stationnaires dans la direction x et des ondes progressives dans la direction z. Ces dernières sont supposées monochromatiques et cohérentes, avec une pulsation ω, une longueur d’onde dans le vide λ0, et un vecteur de 26 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale propagation dans la direction da la normale à la surface d’onde, dont la valeur absolue est défini comme : Équation A. 3 avec : : vecteur d’onde dans le vide, et : vecteur d’onde dans le guide, λ0 : longueur d’onde dans le vide, et λ : longueur d’onde dans le guide, vc : vitesse de propagation dans le guide, ω : fréquence de propagation du signal. Les angles θm pour lesquels il y a guidage de la lumière (mode guidé), correspondent à des valeurs discrètes de la constante de propagation βm, qui est définie par : Équation A. 4 avec : ω : fréquence de propagation du signal, vp : vitesse de propagation de phase du mode guidé m, : vecteur d’onde dans le vide, θm : angle de propagation du mode m. La constante de propagation doit être bornée, kns < β < knf. En introduisant la notion d’indice effectif, défini comme : Équation A. 5 on a donc ns < neff < nc. Cette approche géométrique ne permet pas de rendre compte de la distribution des champs électromagnétiques, et donc de l’énergie véhiculée pas les modes, dans les trois milieux constitutifs du guide. La description par l’optique géométrique est valide quand les dimensions du guide sont beaucoup plus grandes que la longueur d’onde considérée. Quand ces valeurs deviennent comparables, comme dans le cas des composants d’optique intégrée, il est nécessaire d’utiliser la théorie électromagnétique, les équations de Maxwell, pour décrire le processus de propagation de la lumière dans le guide. 27 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale III.1.2. Approche électromagnétique L’approche électromagnétique permet de rendre compte de phénomènes tels que le couplage des modes, les déphasages induits lors des réflexions aux interfaces du guide, ou encore les effets liés à la longueur d’onde du signal. La lumière est décrite par deux champs vectoriels : le champ électrique et le champ magnétique . Ces deux vecteurs sont perpendiculaires entre eux et à l’axe z. Ils sont gouvernés par les équations de Maxwell qui, dans un diélectrique isotrope et sans perte, s’expriment comme suit : Équations A. 6 et Équations A. 7 avec : μ0 : perméabilité du vide, ε : permittivité diélectrique du milieu. En tenant compte de l’invariance suivant la direction Oy, la résolution des équations de Maxwell permet de grouper les solutions couplées en deux systèmes. Pour chaque système de solution les champs et sont dans des états de polarisation orthogonaux. Les deux types de modes qui sont généralement définis sont : - les modes transverses électriques TE : parallèle à l’interface, Ez = 0, en considérant les composantes Ey, Hx et Hz ; - les modes transverses magnétiques TM : parallèle à l’interface, Hz = 0, en considérant les composantes Hy, Ex et Ez. La Figure A. 11 représente ces deux types de polarisations. 28 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale a b Figure A. 11 : Deux types de polarisations dans un guide : a) le mode TE et b) le mode TM. Les faisceaux polarisés rectilignement, TE ou TM, sont les seuls faisceaux qui conservent leur polarisation lors d'une réflexion totale ou partielle dans un guide. Un mode guidé sera donc forcément polarisé rectilignement sur l'une ou l'autre de ces deux polarisations. Chaque mode guidé d'ordre m, composé à la fois d'un mode TE et d'un mode TM, doit vérifier les équations de dispersion du guide plan exprimées ci-dessous : - pour la polarisation TE : Équation A. 8 - pour la polarisation TM : Équation A. 9 avec : d : épaisseur du guide, nc : indice de la couche ; neff : indice effectif ; ns : indice du substrat ; nsup : indice du superstrat. 29 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Ces équations de dispersion des modes montrent que la propagation dans le guide plan, en polarisation TE ou TM, ne peut se faire que pour des valeurs discrètes de la constante de propagation βm (comme expliqué précédemment dans la partie III.1.1). Pour un guide défini par les paramètres (d, nc, ns, et nsup) dans lequel doit se propager un signal de longueur d’onde λ, on distingue deux cas : le guide monomode qui n’admet qu’un seul mode guidé et le guide multimode qui admet plusieurs modes guidés. La limite des conditions de guidage est atteinte lorsque l’indice effectif est égal à l’indice du substrat : c’est-à-dire lorsque l’on ne vérifie plus la condition de réflexion totale interne guide-substrat. Pour chaque valeur de m, il existe une valeur d’épaisseur d minimale appelée épaisseur de coupure dm. Cette épaisseur correspond à l’épaisseur minimale du guide plan asymétrique en dessous duquel le mode n’est plus propagé. L’épaisseur de coupure associée au mode m, dans le cas de modes TE, est donnée par : Équation A. 10 A chaque guide correspond également une longueur d'onde de coupure λc pour laquelle les équations de dispersion (Équation A. 8) et (Équation A. 9) n'admettent aucune solution. En effet, la longueur d'onde est dans ce cas trop grande par rapport à l'épaisseur du guide. III.2. Les principales méthodes de fabrication des guides Il existe plusieurs méthodes de fabrication de guides d’onde d’optique intégrée monomodes à base de verres chalcogénures pour l’infrarouge telles que la photoinscription, le photodopage à l’argent, l’implantation ionique, le thermomoulage, les fibres monomodes enterrées ou encore la méthode retenue à savoir la méthode dite « d’empilement et gravure de couches ». Dans les paragraphes suivants, nous décrirons brièvement chacune de ces méthodes. 30 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale III.2.1. La photoinscription Les changements photo-induits des propriétés optiques (changement d’indice de réfraction) des verres chalcogénures sont à la base de la réalisation de guides d’onde par photoinscription. Cette méthode consiste à illuminer, à une longueur d’onde appropriée, un endroit spécifique de la surface de la couche ou du massif afin de changer son indice de réfraction (Figure A. 12). L’amplitude du changement de l’indice ( n) dépend du temps d’exposition aux radiations mais la forme et l’épaisseur du guide ne sont pas bien définies. Cette méthode présente l’avantage de ne pas avoir besoin d’une étape préliminaire de masquage des couches (photolithographie) et a déjà fait ses preuves pour les verres à base de soufre et de sélénium. Insolation n2 + n Couche n2 Substrat n1 n2 Effet photoinduit n1 Figure A. 12 : Principe de la photoinscription Elle a été appliquée avec succès pour la réalisation de guides à base de verres des systèmes As-S-Se [24] et As2Se3 [25-27] avec de faibles pertes optiques (<0,5 dB/cm). Turnbull et al. ont également utilisé l’illumination avec un laser à 514,5 nm pour réaliser des guides d’onde à partir de couches Ge5As34Se61 déposées par pulvérisation cathodique, et caractérisés par des pertes comprises entre 3,5 et 6,5 dB/cm [28]. Des guides à base de verres du système Ge-Sb-Se ont également été réalisés en changeant l’indice de réfraction de la couche guidante par illumination avec un laser à 808 nm. Le guidage de la lumière dans ces guides a été démontré à une longueur d’onde de 1,56 µm [29]. III.2.2. Le dopage à l’argent Cette méthode consiste à augmenter l’indice de réfraction de la couche par dopage de la couche avec de l’argent (Figure A. 13). La diffusion de l’argent peut être activée par illumination grâce à un laser [30, 31]. Une autre procédure consiste à activer thermiquement 31 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale la diffusion de l’argent [32]. La profondeur de diffusion de l’argent est difficilement contrôlable tout comme la différence d’indice obtenue. Insolation n2 + n Ag Couche n2 Substrat n1 n2 Diffusion de l’argent n1 Figure A. 13 : Principe du photodopage à l’argent La faisabilité de guides d’onde canaux en utilisant le dopage à l’argent a été démontrée par Fick et al. [32]. Leur méthode consiste à déposer une couche d’argent sur un substrat (lame de microscope). Cette couche d’argent est ensuite gravée puis recouverte d’une couche mince chalcogénure (As2Se3). L’échantillon est ensuite recuit afin que l’argent diffuse. L’augmentation de l’indice de réfraction peut atteindre n = 0,4 selon la proportion d’argent. L’autre méthode de dopage à l’argent utilisée par Huang et Hewak [31] consiste à photolithographier la couche de cœur du système Ge-S puis à y déposer une couche d’argent par évaporation thermique. Enfin les ions argent sont introduits dans la couche par le processus de photo-dissolution : c’est-à-dire en illuminant la couche d’argent avec une lumière blanche (lampe au tungstène 150W) au travers d’un filtre infrarouge qui absorbe la chaleur (pour éliminer la diffusion thermique). L’indice de réfraction de la couche de cœur augmente de 0,02. Les pertes de ce type de guides sont de l’ordre de 0,63 dB/cm à 632,8 nm. III.2.3. L’implantation ionique L’implantation ionique consiste à implanter des ions dans un matériau afin de changer ses propriétés notamment optiques (augmentation de l’indice de réfraction) (Figure A. 14). La profondeur de pénétration des ions dépend de la nature du matériau implanté, de la nature de l’ion et de l’énergie d’accélération. Cette technique est surtout utilisée pour de faibles changements de propriétés car limités par l’énergie d’accélération des ions. 32 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Source d’ions n2 + n Couche n2 n2 Implantation ionique Substrat n1 n1 Figure A. 14 : Principe de l’implantation ionique Des travaux ont déjà été effectués sur la réalisation de guides d’onde à base de verres chalcogénures par implantation ionique. On peut citer les travaux de Viens et al. qui ont réalisé des guides d’onde multimodes en implantant des ions hélium dans des couches As2Se3 au travers de masques de géométrie appropriée [24]. III.2.4. Le thermomoulage Cette méthode consiste à réaliser un motif par pression après chauffage, sur une couche ou un substrat à partir d’un moule de géométrie appropriée (Figure A. 15). Presse en acier inoxydable Couche n2 Thermomoulage Substrat n1 Moule Figure A. 15 : Principe du thermomoulage [33] Le thermomoulage est une technique récente qui est notamment étudiée pour la réalisation de guides à base de verres chalcogénures par Seddon et al [33]. Pour la première fois, l’« estampage » de marches a été réalisé avec succès pour des couches Ge15As15Se17Te53 33 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale déposées par pulvérisation cathodique sur un substrat GaAs [33]. De par sa simplicité, cette technique s’avère être prometteuse pour la réalisation de composants d’optique intégrée. III.2.5. Fibre enterrée monomode La première étape dans la fabrication d’une fibre monomode enterrée est la réalisation d’une « préforme » : c’est-à-dire d’un barreau du matériau retenu pour le cœur de la fibre d’un diamètre de plusieurs centimètres. La seconde étape consiste à placer la préforme en haut d’une tour de fibrage. L’extrémité de cette préforme est alors chauffée dans un four porté à une température jusqu’au « ramollissement » du matériau. La préforme est alors transformée en une fibre de plusieurs centaines de mètres, à une vitesse de fibrage adaptée au diamètre de fibre désiré. La dernière étape consiste à entourer la fibre de cœur d’une gaine (substrat ayant un indice de réfraction permettant le guidage monomode de la structure) par pression dans un four (Figure A. 16). Pression Fibre de cœur n2 Substrat n1 Figure A. 16 : Principe de réalisation d’une fibre enterrée monomode L’équipe de Rennes travaille actuellement sur la réalisation de fibres enterrées constituées d’un cœur du système Ge-As-Se et d’une gaine du système As-Se-S qui représentent une autre alternative à la réalisation de composants d’optique intégrée infrarouge. III.2.6. L’empilement de couches et gravure Cette technique consiste à déposer une ou plusieurs couches de verres chalcogénures sur un substrat qui peut être soit un wafer silicium soit un verre chalcogénure. La couche de cœur est ensuite gravée pour obtenir un confinement bidimensionnel de la lumière. 34 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Dans le cas de la réalisation d’un guide d’onde entièrement à base de verres chalcogénures de structure chargée ou ruban (partie III.3), on va déposer une couche épaisse de verre chalcogénure d’indice de réfraction supérieur à celui du substrat chalcogénure, puis graver cette couche pour confiner la lumière latéralement (Figure A. 17). Un superstrat, de même nature et de même indice de réfraction que le substrat, peut éventuellement être déposé afin de symétriser la structure. UV Résine Couche UV n2 Substrat n1 n2 Insolation, Développement n1 Gravure, Enlèvement de la résine Figure A. 17 : Fabrication d’un guide d’onde entièrement à base de verres chalcogénures par la technologie « empilement et gravure » Des guides d’onde à base de verres chalcogénures ont déjà été réalisés par la méthode d’empilement et gravure de couches. On peut notamment citer les travaux de Ruan et al. qui ont réalisé avec succès des guides d’onde chargés à base de couches chalcogénures (des systèmes As-S-Se, Ge-As-Se et As2Se3) gravées physico-chimiquement avec un mélange de gaz CF4/O2, caractérisés par des pertes de 0,25 dB/cm à 1,55 µm [34]. Madden et al. ont réalisé des guides rubans constitués d’une couche de cœur de composition As2S3 déposée sur un substrat silicium et recouverte d’un superstrat (verre inorganique polymère). Ces guides sont caractérisés par des pertes de 0,05 dB/cm à 1,55 µm [35]. Ces deux types de guides d’onde fonctionnent aux longueurs d’onde des télécommunications. D’autres types de guides, tels que les guides ARROW, structures guidantes dans lesquelles la lumière se propage non pas par des réflexions totales internes mais par des réflexions antirésonantes, ont été réalisés et caractérisés à 1,55 µm. Ces guides sont constitués d’un substrat en silicium sur lequel on dépose trois couches de verre chalcogénure de deux compositions différentes (la couche prise en sandwich a une composition différente des deux autres) puis on grave la dernière couche qui constitue le cœur du guide. Ce type de guide a été réalisé à partir de verres chalcogénures des systèmes Ge-As-Se et Ge-Sb-Se [36]. Des travaux plus récents ont permis de démontrer la faisabilité de guides d’ondes chargés constitués d’une couche Te2As3Se5 déposée sur un substrat commercial As2Se3 et 35 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale gravée physiquement. Ces guides ont été caractérisés dans le moyen infrarouge à λ = 10,6 µm avec des pertes de l’ordre de 10 dB/cm [37]. Cette méthode présente de nombreux avantages pour la réalisation de guides d’onde : elle est compatible avec les méthodes de photolithographie, elle permet une grande latitude au niveau du ∆n car en variant la composition de la couche de cœur, on change son indice. Elle a par ailleurs déjà permis la démonstration du guidage de la lumière à différentes longueurs d’onde dans l’infrarouge y compris à λ = 10,6 µm. III.3. Les types de guides d’onde retenus III.3.1. La méthode de réalisation retenue Parmi toutes les méthodes présentées, peu ont permis la réalisation de guides d’onde fonctionnant dans l’infrarouge lointain. En effet, la plupart des guides d’ondes réalisés par les méthodes telles que la photo-inscription, le dopage à l’argent ou encore l’implantation ionique, n’ont fait leurs preuves qu’aux longueurs d’onde des télécommunications (λ = 1,55 µm). D’autres méthodes récentes telles que le thermomoulage ou les fibres enterrées monomodes, s’avèrent être des méthodes prometteuses pour la réalisation de composants d’optique intégrée mais ne sont pas encore assez matures. Nous avons donc retenu la méthode d’empilement et de gravure des couches pour la réalisation des guides. Cette méthode a déjà permis la réalisation de guides d’onde qui ont été caractérisés dans le moyen infrarouge à λ = 10,6 µm. Cette méthode est facile à mettre en œuvre. Elle permet d’obtenir de grandes différences d’indice de réfraction (Δn) entre la couche de cœur et le substrat, et éventuellement le superstrat. On peut donc moduler facilement le Δn en faisant varier la composition de la couche de cœur, ce qui représente un avantage important pour des applications dans le moyen infrarouge et dans le lointain infrarouge comme pour l’interférométrie spatiale. 36 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale III.3.2. Le matériau retenu Comme nous l’avons vu dans le paragraphe II.3, les matériaux les plus adaptés pour la réalisation de guides d’onde fonctionnant dans la gamme spectrale [6–20 µm] sont les verres chalcogénures et plus précisément les verres tellurures. Parmi eux les verres du système Te-Ge-Ga sont les plus prometteurs, notamment le verre de composition Te75Ge15Ga10, qui présente de bonnes propriétés en termes de transmission, d’indice de réfraction et de stabilité thermique. III.3.3. Les types de guides d’onde retenus Parmi les différents types de guides pouvant être envisagés, nous avons retenu les structures les plus simples : guides planaires et guides canaux (Figure A. 18). Ces guides d’onde seront réalisés par la méthode d’empilement et de gravure des couches. Nous avons choisi d’utiliser un substrat Te75Ge15Ga10 et une couche de cœur à base de verres du système Te-Ge-Ga de compositions proches de Te75Ge15Ga10, afin d’avoir les mêmes propriétés (substrat-couche). En variant la composition de la couche de cœur nous pourrons ainsi obtenir des indices de couches différents et donc ajuster le n pour obtenir une bonnee efficacité de couplage et un guidage monomode. Les guides planaires seront obtenus en déposant une ou plusieurs couches du système Te-Ge-Ga sur le substrat Te75Ge15Ga10 d’indice de réfraction n1 (en l’occurrence 3,399 à = 10,6 µm). La couche guidante, dite couche de cœur, devra être caractérisée par un indice de réfraction n2 supérieur aux indices de réfraction du substrat et du superstrat. Cette couche sera éventuellement recouverte d’un superstrat constitué d’une couche du système Te-Ge-Ga de composition différente de celle de la couche de cœur, de sorte à ce qu’elle soit caractérisée par un indice n1 identique à celui du substrat (Figure A. 18 a). Les guides canaux (dans lesquels on attend un confinement bidimensionnel de la lumière) seront obtenus après modification de la géométrie de la couche de cœur déposée sur le substrat Te75Ge15Ga10, par gravure chimique, physique ou physico-chimique. Dans le cas de guides droits chargés, la couche de cœur sera partiellement gravée (Figure A. 18 b) tandis que dans le cas des guides rubans enterrés la couche de cœur sera totalement gravée et recouverte d’un superstrat (Figure A. 18 c). 37 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale a Guides planaires b Guides droits chargés c Guides rubans enterrés Superstrat (n 1) Superstrat (n 1) Substrat ) 10 (n 1) Substrat Te 75Ge(n151Ga Substrat Substrat Te 75Ge(n 1) 10 (n 1) 15Ga Substrat (n 1) Couche guidante (n 2 avec n 2 > n 1) Figure A. 18 : Schémas types (a) des guides planaires, (b) des guides droits chargés et (c) des guides rubans enterrés à base de verres tellurures. Dès que l’on travaille vers les grandes longueurs d’onde, les contraintes technologiques sont différentes des contraintes de fabrication de guides pour les longueurs d’onde des télécommunications. En effet, il est nécessaire (i) de déposer des couches de cœur très épaisses (typiquement de l’ordre de grandeur de la longueur d’onde d’utilisation, qui sera comprise entre 6 et 20 µm pour ce projet) de qualité optique, et homogènes en épaisseur, en composition et en indice de réfraction sur des substrats de grande taille, (ii) de modifier la géométrie des couches sur une profondeur importante (et donc de procéder à de la gravure profonde), tout en conservant la qualité optique initiale, et enfin (iii) de déposer éventuellement des superstrats d’épaisseur très importante (jusque 100 µm), tout en préservant l’adhérence de la structure (couche + superstrat) sur le substrat. . 38 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Conclusion Le projet Darwin, projet d’interférométrie spatiale, devrait permettre de découvrir et d’étudier des planètes extrasolaires. L’optique intégrée infrarouge est une des solutions envisagées pour ce projet qui nécessite la réalisation de composants à géométrie complexe fonctionnant dans la fenêtre spectrale [6–20 µm]. La première étape dans la réalisation de ces micro-composants consiste à démontrer la faisabilité de guides d’onde monomodes canaux fonctionnant dans ce domaine spectral. Le choix des matériaux pour la réalisation de ces guides est une étape importante. Le matériau retenu doit répondre à différents critères de sélection : fenêtre de transmission, indice de réfraction, stabilités thermique, mécanique et optique, facilité de mise en œuvre… Parmi tous les matériaux évoqués, les verres chalcogénures et notamment les verres tellurures semblent être les plus adaptés pour des applications dans l’infrarouge lointain comme l’interférométrie spatiale. La méthode d’empilement et de gravure des couches est la méthode que nous avons retenue pour la réalisation des guides d’onde. Elle consiste à déposer une couche sur un substrat avec une différence d’indices de réfraction permettant un guidage monomode. La géométrie de la couche peut éventuellement être modifiée par gravure de sorte à obtenir un confinement latéral de la lumière. Le substrat retenu est le verre de composition Te75Ge15Ga10 étudié et synthétisé à l’Université de Rennes. Il présente de bonnes propriétés de transmission allant jusque 20 µm. Il est stable thermiquement. Peu de travaux sont reportés sur l’étude de verres du système Te-Ge-Ga déposés sous forme de couches. Néanmoins, nous avons choisi de déposer des couches du même système que celui du substrat afin d’avoir des propriétés similaires : une fenêtre de transmission identique, des indices de couches élevés et des comportements physiques proches. En vue d’applications dans l’infrarouge lointain, les dimensions des guides à réaliser (épaisseurs de la couche, profondeurs de gravure) sont plus importantes que pour des applications en télécommunication par exemple. Pour réaliser ce type de guides d’onde, il faut donc maîtriser : (i) le dépôt de couches épaisses du système Te-Ge-Ga avec des compositions et des indices de réfraction contrôlés, (ii) la gravure profonde de ces couches avec de bons profils de gravure et (iii) la préparation des faces d’entrée et de sortie des guides pour 39 Chapitre A : Guides d’onde à base de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale l’injection de la lumière. Ce travail passe donc par une étude approfondie des couches du système Te-Ge-Ga. Le but final de notre travail est la réalisation d’un guide d’onde entièrement à base de verres chalcogénures, capables de guider la lumière dans la bande spectrale [6-20 µm]. Pour arriver à cet objectif, notre travail a consisté : en l’étude des couches du système Te-Ge-Ga (chapitre B) : La première étape a été de trouver la méthode de dépôt la mieux adaptée à ce type de couches puis de les déposer avec des épaisseurs élevées. Différentes caractérisations ont été réalisées au niveau de l’adhérence, de la composition, de la structure, des propriétés thermiques et optiques. Cette étape cruciale dans la compréhension des couches tellurures nous a permis de déterminer la composition de la couche qui servira de couche de cœur dans la réalisation des guides d’onde. en la gravure des couches tellurures (chapitre C) : Le choix du type de gravure adaptée aux couches tellurures a été réalisé à partir de la littérature. Une fois la méthode de gravure retenue, notre travail s’est orienté vers l’influence des différents paramètres sur la gravure des couches tellurures de sorte à être capables de modifier profondément la couche de cœur. en la réalisation de guides d’onde à base de verres tellurure (chapitre D) : Une fois le dépôt et la gravure des couches tellurures maîtrisés, la dernière étape a été de réaliser des guides d’onde en utilisant tout le savoir et les compétences acquises tout au long des précédentes études. La dernière étape de ce travail concerne la caractérisation optique des guides d’onde réalisés en vue d’une application en interférométrie spatiale. 40 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Chapitre B De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale 41 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale INTRODUCTION 43 I. 44 Dépôt des couches Te-Ge-Ga par co-évaporation thermique I.1. 44 I.1.1. Principales méthodes de dépôt des matériaux chalcogénures 44 I.1.2. Choix de la co-évaporation thermique 46 I.1.3. La co-évaporation thermique 47 I.2. Etablissement des conditions de dépôt 49 I.2.1. Choix des différentes sources (matériaux/creusets) 49 I.2.2. Conditions de dépôt 51 I.3. Couches Te-Ge-Ga : dépôt et caractérisation 56 I.3.1. Dépôt des couches Te-Ge-Ga 56 I.3.2. Caractérisation des couches Te-Ge-Ga 57 I.4. II. Choix de la méthode de dépôt Conclusion Les couches Te-Ge pour l’optique intégrée IR 65 67 II.1. Dépôt des couches Te-Ge 67 II.2. Caractérisation des couches Te-Ge 69 II.2.1. Caractéristiques générales 69 II.2.2. Homogénéité des couches Te-Ge 71 II.2.3. Morphologie 73 II.2.4. Comportement thermique 74 II.2.5. Propriétés optiques 78 CONCLUSION 84 42 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Introduction Le chapitre A montre que les verres tellurures sont des matériaux prometteurs pour l’interférométrie spatiale de par leur transparence dans le domaine spectral allant de 6 à 20 µm. Il explique également que parmi les différentes techniques de réalisation des guides d’onde monomodes droits, nous avons choisi la méthode dite d’« empilement et gravure » de couches. Comme présenté dans le chapitre A, le substrat retenu est un verre du système Te-Ge-Ga, dont le domaine de transparence s’étend de 6 à 20 µm. Le choix des couches du système ternaire Te-Ge-Ga s’est donc imposé. La première étape clé a été l’étude des ces couches, et ainsi démontrer la possibilité d’obtenir des couches tellurures qui soient épaisses, de compositions et d’indices de réfraction contrôlés, homogènes et adhérentes sur une grande surface de dépôt. Dans la partie I, nous évoquerons les différentes techniques de dépôt qui peuvent être envisagées pour le dépôt de couches tellurures. Nous présenterons la méthode choisie ainsi que les différentes conditions de dépôt établies. Nous discuterons, également, des différentes caractéristiques des couches ternaires du système Te-Ge-Ga et nous justifierons notre choix de s’affranchir du gallium et de nous limiter à des couches du système binaire Te-Ge. Enfin, dans la partie II, nous présenterons les caractéristiques des couches Te-Ge obtenues après optimisation de tous les paramètres de dépôt et nous montrerons en quoi elles sont satisfaisantes pour la réalisation de guides d’onde IR pour l’interférométrie spatiale. 43 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale I. Dépôt des couches Te-Ge-Ga par co-évaporation thermique I.1. Choix de la méthode de dépôt Il existe plusieurs procédés pour le dépôt des couches minces : le dépôt par voie physique (PVD), le dépôt par voie chimique (CVD) et le spin-coating. Même si le dépôt par voie chimique [38-40] et le spin-coating [41-43] sont utilisés pour le dépôt des verres chalcogénures, nous ne présenterons, dans le premier paragraphe, que les méthodes de dépôt par voie physique qui sont les plus utilisées. I.1.1. Principales méthodes de dépôt des matériaux chalcogénures Parmi toutes les techniques de dépôt de couches chalcogénures, l’évaporation thermique sous vide est la méthode la plus simple. Elle est aussi une des plus utilisées. La majorité des travaux sur les couches minces chalcogénures concernent en effet des films obtenus par cette technique. Les systèmes As-S [24, 25, 35, 44] ainsi que les systèmes As-S-Se [24, 44, 45] et Ge-As-Se donnent lieu à de nombreux travaux. D’autres systèmes ont également été étudiés comme les systèmes : Ge-Sb-S [46, 47], Ge-Sb-Se [29], Ge-S, Ge-As-Te, Ga-As-Te [48], Ge-Se-Tl, Ge-Se-Te, Ge-Te-In et Ge-Te-Cu, Sb-Te, Te-As-Se [37], ou encore Ga-Se-Te [49]. On trouve également quelques travaux sur le système Te-Ge-Ga qui nous intéresse tout particulièrement [20, 22]. Cette méthode de dépôt qui procède par condensation de la vapeur du matériau à déposer sur le substrat à recouvrir est caractérisée par des vitesses de dépôt élevées comparées aux vitesses de dépôt obtenues par d’autres techniques telles que la pulvérisation cathodique. Elle est donc intéressante pour obtenir des dépôts épais. Par contre, l’évaporation thermique sous vide présente un inconvénient majeur : il est difficile de maintenir la stœchiométrie entre le matériau évaporé et la couche obtenue, surtout lorsque les systèmes évaporés contiennent des éléments ayant des tensions de vapeur saturante très différentes. Dans la littérature citée précédemment, on ne trouve pas d’études de reproductibilité des films obtenus par évaporation thermique. Par contre, on trouve dans certains papiers des comparaisons entre la composition des films et celle du matériau massif utilisé. Dans le cas du système As-S, très largement étudié, des variations de la composition de ± 1,5 % atomique ou des pertes en 44 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale soufre de 3 % sont mentionnées [50, 51]. Il existe quelques solutions pour remédier au problème lié aux différentes tensions de vapeur des éléments constitutifs de la couche : l’utilisation d’un excès de l’élément le plus volatil [52], ou l’utilisation d’une des techniques dérivées de l’évaporation sous vide, comme l’évaporation flash. On trouve quelques travaux sur des couches chalcogénures déposées par évaporation flash : on peut citer ceux de Okabe et al. qui ont étudié les couches du système Te-Ge qui nous intéresse dans le cadre de cette thèse [53]. Une autre méthode dérivée de l’évaporation thermique qui doit permettre de résoudre le problème des différentes tensions de vapeur est la co-évaporation. Cette technique, qui consiste à évaporer séparément les différents éléments constitutifs de la couche, est classiquement utilisée pour les dépôts des alliages métalliques. En revanche, il n’existe pas de travaux concernant le dépôt de couches chalcogénures. On trouve uniquement des travaux utilisant cette technique pour le dopage terre rare des couches chalcogénures : dans ce cas-là, c’est l’élément terre rare qui est évaporé séparément. Parmi les techniques largement utilisées pour le dépôt des couches chalcogénures, on trouve également la pulvérisation cathodique radio-fréquence et la pulvérisation cathodique magnétron. On trouve par exemple des articles portant sur l’obtention de couches des systèmes suivants : Te-As-Se [16, 37], Ge-Sb-Te [54-56], Ge-Se-Te [57], Ge-As-Se [28, 33, 36], Ge-As-S-Se, As-S, As-Se, Ge-Sb-Se [36], Ga-Ge-Sb-S [58-60]… Cette technique, à l’inverse de l’évaporation thermique, présente un avantage majeur puisqu’en principe elle préserve la stœchiométrie entre la source de départ et le film déposé. Cependant elle nécessite l’élaboration de cibles massives pour chaque composition de couches à synthétiser, ce qui ne facilite pas le changement de compositions des couches à déposer. De plus, les vitesses de dépôt des verres chalcogénures sont beaucoup plus lentes par cette technique que par évaporation thermique simple, car le caractère isolant des verres chalcogénures impose l’utilisation de puissances de travail réduites. Ce n’est donc vraisemblablement pas une méthode de choix pour déposer des couches épaisses. Le dépôt laser pulsé (PLD : pulsed laser deposition) est de plus en plus utilisé pour le dépôt de couches chalcogénures [26, 27, 34] car cette méthode présente, elle aussi, l’avantage de conserver une stœchiométrie proche de celle de la cible. Mais là aussi, il est nécessaire de fabriquer des cibles massives. Par ailleurs, cette méthode présente l'inconvénient d'être très directive ce qui engendre une inhomogénéité en épaisseur et une limitation à des dépôts sur des substrats de petites tailles. 45 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale I.1.2. Choix de la co-évaporation thermique La couche tellurure déposée qui servira de couche de cœur dans la réalisation des guides d’onde, doit avoir des caractéristiques voisines de celles du verre Te75Ge15Ga10 qui sert de substrat. En effet, cette couche doit être au moins aussi transparente dans l’IR que le substrat (de 6 à 20 µm), elle doit avoir un comportement thermique proche et un indice de réfraction voisin. La différence d’indice de réfraction entre le substrat (n = 3,399 à λ = 10,6 µm) et la couche nécessaire à l’obtention d’un guidage monomode de la lumière doit être relativement faible : dans le cas qui nous intéresse, l’indice de la couche devra être plus élevé que celui du substrat de ~ 4.10-2. De ce fait, notre choix s’est orienté vers une couche du système ternaire Te-Ge-Ga. Cependant, comme les propriétés des couches peuvent différer de celles des matériaux massifs correspondants (Tg = 172°C, bonne stabilité thermique avec un ΔT = 113°C, n = 3,399 à λ = 10,6 µm pour le substrat Te75Ge15Ga10 [19]), le choix de la composition exacte n’était pas acquis. Différents dépôts étaient nécessaires pour sélectionner la couche présentant les propriétés recherchées. La méthode de dépôt choisie devait donc permettre de changer facilement la composition du film en plus d’être rapide et facile à mettre en œuvre. Elle devait également permettre de déposer des couches épaisses, denses, et homogènes en termes d’épaisseur et de composition. Le laboratoire était initialement équipé d’un bâti permettant le dépôt de couches chalcogénures par pulvérisation cathodique mais aussi par évaporation thermique sous vide. Comme nous l’avons précisé dans le paragraphe précédent, la pulvérisation cathodique impose la fabrication de cibles du matériau à déposer. Comme la composition n’était pas arrêtée, il aurait fallu un grand nombre de synthèses de verres tellurures. Par ailleurs, des travaux antérieurs portant sur des verres chalcogénures de différentes compositions ont montré que, dans la plus part des cas, les couches déposées par pulvérisation présentent une structure colonnaire, structure impliquant des porosités importantes et donc une baisse considérable de l’indice de réfraction de la couche obtenue par rapport au matériau massif correspondant [36]. Ceci représente un inconvénient majeur puisque nous souhaitons réaliser des couches d’indice de réfraction contrôlé et élevé (de l’ordre de 3,4). Cette méthode a donc été écartée. 46 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Nous avons donc réalisé de premiers tests par évaporation thermique. Cette méthode a permis d’obtenir des couches épaisses avec des durées de dépôt courtes, comme attendu. Les quelques papiers présentant des travaux concernant les films du système ternaire Te-Ge-Ga évaporés par cette technique ne mentionnent pas de différence significative entre la composition du film obtenu et le matériau massif de départ [20-22]. Or, dans notre cas, une importante différence de compositions entre le matériau massif de départ et les films obtenus a été observée : une verre de composition Te81,9Ge13,8Ga4,2 a conduit après évaporation thermique à une couche de composition Te80,3Ge19,5Ga0,2 [61]. En particulier, les couches étaient systématiquement beaucoup plus pauvres en gallium que le matériau de départ : une différence de pourcentage atomique pouvant aller jusqu’à 95% a été observée. Enfin, cette méthode n’était pas reproductible pour le dépôt de couches du système ternaire Te-Ge-Ga. Ni la pulvérisation cathodique ni l’évaporation thermique ne répondaient donc à tous nos critères. Il a donc fallu envisager une autre technique pour mener à bien notre projet. Nous avons écarté l’ablation laser puisque comme nous l’avons dit précédemment, cette technique est très directive et ne permet pas de déposer des couches sur des substrats de grande taille. Notre choix s’est alors porté sur la co-évaporation thermique. I.1.3. La co-évaporation thermique a. Principe de la co-évaporation thermique Le principe de la co-évaporation thermique sous vide est le même que celui de l’évaporation thermique sous vide. Cette méthode de dépôt procède par condensation de la vapeur du matériau à déposer sur le substrat à recouvrir. La différence avec l’évaporation thermique simple réside dans le fait que chaque élément constitutif de la couche est évaporé séparément à partir d’une source particulière. Ceci doit permettre de s’affranchir des problèmes liés aux tensions de vapeur saturantes des différents éléments, tout en gardant les avantages de l’évaporation thermique simple, à savoir : la facilité de mise en œuvre et les vitesses de dépôt élevées. Le fait d’utiliser des sources différentes pour chacun des éléments porte également un intérêt majeur : celui de pouvoir varier facilement la composition des différentes couches. Il suffira de changer les vitesses d’évaporation des éléments. 47 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Tout comme l’évaporation thermique simple, la co-évaporation thermique sous vide comporte quatre phases : - l’établissement d’un vide secondaire dans l’enceinte (typiquement entre 5.10-7 à 5.10-6 mbar) pour réduire la contamination, - l’évaporation simultanée des éléments à partir des différentes sources, - le transport des espèces des différentes sources vers le substrat, - la condensation des vapeurs des éléments constitutifs de la couche sur le substrat. b. Le bâti de co-évaporation thermique Dans le cadre de notre travail, les éléments constituant les couches à réaliser sont le tellure (Te), le germanium (Ge) et le gallium (Ga). Le tellure est un élément pour lequel la littérature préconise une évaporation par effet Joule [62]. En ce qui concerne le germanium, les évaporations à la fois par effet Joule et par bombardement électronique sont possibles [62]. Enfin, pour ce qui est du gallium, la littérature recommande une évaporation par bombardement électronique [62]. Compte tenu de ces données, le laboratoire s’est donc équipé d’un bâti (Plassys MEB 500) disposant de trois sources : deux sources à effet Joule pour l’évaporation du tellure et du germanium et un canon à électrons pour l’évaporation du gallium (Figure B. 1). Porte-substrat rotatif Substrat Chauffage par effet Joule Te Ge Ga Bombardement canon à électrons Figure B. 1 : Schéma de principe de la co-évaporation thermique sous vide pour le dépôt de couches tellurures du système ternaire Te-Ge-Ga Le positionnement des trois sources (Figure B. 2) a été choisi de sorte à obtenir un bon compromis en termes de vitesse d’évaporation et d'homogénéité des couches. 48 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Creusets chauffés par effet Joule Creuset en cuivre recouvert d’une couche d’aluminium pour l’évaporation par bombardement électronique Figure B. 2 : Positionnement des trois sources à l’intérieur du bâti de co-évaporation thermique. Les deux sources chauffées par effet Joule ont été placées à une distance de 20 cm du substrat alors que le canon à électrons a été placé à une distance de 29 cm. Les trois sources ont été séparées les unes des autres par des caches métalliques afin d’éviter toute contamination due à l’évaporation d’un élément sur l’autre. I.2. Etablissement des conditions de dépôt La première étape du travail a été de mettre en place la co-évaporation thermique sous vide mais surtout de l’optimiser tant au niveau des différentes sources (choix des creusets, méthode de chauffage en fonction du matériau évaporé…) qu’au niveau des paramètres de régulation des vitesses d’évaporation pour chacun des éléments (temps et température de préchauffe, gain, DT et TC). I.2.1. Choix des différentes sources (matériaux/creusets) Pour l’évaporation du gallium, effectuée par bombardement électronique, nous avons utilisé un creuset en cuivre (Figure B. 3) que nous avons recouvert d’une couche mince d’aluminium qui doit permettre de protéger le cuivre vis-à-vis du gallium qui a un point de fusion très bas (30°C). Une charge de gallium, c’est-à-dire un bloc massif de matériau, a été formée directement dans le creuset à partir de morceaux de gallium pur chauffés par bombardement électronique. Ainsi la charge de gallium est aux dimensions du creuset. Le fait 49 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale d’utiliser une charge de gallium permet d’assurer une meilleure stabilité des vitesses d’évaporation par rapport à l’utilisation de morceaux de gallium qui en fondant pendant le processus de dépôt pourraient entraîner de grandes variations de vitesses. Un refroidissement du creuset au cours du dépôt est indispensable afin d’éviter au maximum la formation d’amalgames entre le gallium et l’aluminium. Après chaque dépôt, la charge de gallium est « décollée » du creuset et conservée à une température de 10°C afin d’éviter qu’elle ne se déforme sous l’effet de la chaleur. Figure B. 3 : Creuset en cuivre utilisé pour l’évaporation du gallium par bombardement électronique. Pour l’évaporation du germanium obtenue par effet Joule, des premiers tests ont été réalisés en utilisant un creuset en tantale. La vitesse d’évaporation était relativement stable, mais après quelques dépôts, le creuset se perçait suite à une attaque du tantale par le germanium. Nous nous sommes donc orientés vers un autre type de creuset à savoir : un creuset en carbone graphite (usiné au laboratoire), inséré dans une nacelle en molybdène (fabriquée par pliage à partir d’une feuille de molybdène de 0,127 mm d’épaisseur). Les résultats étaient satisfaisants mais du fait de la température d’évaporation élevée du germanium, ce type de creuset nécessitait l’application d’intensités beaucoup trop importantes (de l’ordre de 350A), proches de la limite de l’appareillage (400A). Pour diminuer la puissance de chauffe nécessaire à l’évaporation du germanium, nous avons finalement opté pour un creuset en carbone graphite inséré entre deux demi-creusets en molybdène, comme illustré sur les photographies suivantes (Figure B. 4). Cette solution permet d’évaporer le germanium avec des intensités de l’ordre de 200A. 50 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure B. 4 : Creuset utilisé pour l’évaporation du germanium par effet Joule : creuset en carbone inséré entre deux demi-creusets en molybdène. Pour l’évaporation du tellure, obtenue également par chauffage par effet Joule, des premiers essais ont été effectués en utilisant un creuset en tantale, comme pour le germanium. La vitesse d’évaporation obtenue, même à faible puissance de chauffe, était beaucoup trop rapide et impossible à stabiliser. La tension de vapeur du tellure étant très élevée, nous avons également été amenés à modifier le creuset. Nous avons réalisé un creuset en carbone de plus grande contenance que celui du germanium (le tellure étant l’élément majoritaire de nos couches), et qui plus est compartimenté afin d’augmenter les zones de contact du tellure avec le creuset et ainsi pouvoir mieux contrôler l’évaporation. Nous avons inséré ce creuset en carbone dans une nacelle en molybdène. Après différents tests, nous avons également été amenés à ajouter au système un couvercle en molybdène, perforé de trous de 1 mm de diamètre, le but étant toujours de ralentir et de mieux contrôler l’évaporation du tellure (Figure B. 5). Figure B. 5 : Creuset utilisé pour l’évaporation du tellure par effet Joule : creuset en carbone compartimenté, inséré dans une nacelle en molybdène et recouvert d’un couvercle perforé. I.2.2. Conditions de dépôt a. Choix des vitesses d’évaporation Afin de réaliser des couches homogènes en composition et en épaisseur, les vitesses d’évaporation des différents éléments doivent être stables tout au long de la procédure de dépôt. Des balances à quartz permettent de contrôler l’épaisseur déposée et la vitesse 51 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale d’évaporation pour chacun des éléments. Des contrôleurs automatiques ont été installés de sorte à réguler les vitesses d’évaporation de chaque élément durant le dépôt. Méthode de mesure par balances à quartz La composition d’une couche Te-Ge-Ga dépend de la vitesse d’évaporation de chacun des trois éléments. Ces vitesses sont contrôlées grâce à trois balances à quartz placées en regard de chacun des trois creusets, à proximité du porte-substrat et protégées les unes des autres afin que chacune ne « voit » le dépôt que d’un seul élément (Figure B. 6). Balances à quartz Source Te Source Ge Source Ga Figure B. 6 : Positionnement des trois balances à quartz placées en regard de chacune des trois sources. Chaque balance à quartz permet de connaitre l’épaisseur déposée et la vitesse d’évaporation d’un des éléments. La somme des trois épaisseurs rend compte de l’épaisseur totale de la couche obtenue. Cette épaisseur totale estimée par la somme des épaisseurs de chaque élément déposé, doit être en accord avec l’épaisseur de la couche mesurée par profilométrie. Afin que cela soit possible, nous devons corriger les valeurs indiquées par chacune des balances à quartz d’un facteur géométrique appelé tooling factor. Il est défini comme un coefficient géométrique de correction qui permet d’obtenir une concordance entre l’épaisseur mesurée et l’épaisseur annoncée par les balances à quartz et s’exprime en %. A titre d’exemple si le tooling factor est égal à 100% cela signifie que l’épaisseur indiquée par la balance à quartz est égal à celle mesurée sur le substrat. Ce facteur géométrique dépend de la 52 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale position de la balance à quartz, de la taille et de la forme du creuset (dimension du cône de matière évaporée) (Figure B. 7). Balance à quartz Porte-substrat Substrat Figure B. 7 : Représentation schématique de la position des balances à quartz par rapport à la source du matériau à évaporer et au substrat à recouvrir. Les balances à quartz utilisées ont une durée de vie limitée. En effet elles perdent de leur précision après plusieurs dépôts, surtout s’il s’agit de dépôts de couches épaisses. Ainsi il sera primordial de changer les têtes à quartz avant chaque nouveau dépôt. Choix des vitesses d’évaporation Deux paramètres sont à considérer lors des choix des vitesses d’évaporation de chacun des éléments : la composition de la couche que l’on souhaite déposer (et donc un rapport des vitesses adéquat pour y parvenir) et la stabilité des vitesses durant toute la durée du dépôt. Le tellure étant l’élément majoritaire des couches étudiées, nous avons décidé de fixer sa vitesse d’évaporation et d’ajuster, en fonction de celle-ci, celle des deux autres éléments. Après de nombreux tests sur les vitesses d’évaporation du tellure (comprises entre 0,6 et 4 nm/s), nous avons établi que des vitesses de dépôt rapides étaient plus stables que des vitesses de dépôt lentes. Nous avons donc fixé la vitesse d’évaporation du tellure à 3 nm/s pour tous les dépôts. Selon la composition de couche visée, on a ensuite adapté la vitesse de dépôt du germanium (comprise entre 0,6 et 1,5 nm/s) et celle du gallium (comprise entre 0,4 et 1 nm/s). b. Contrôle des vitesses d’évaporation Afin d’obtenir des vitesses d’évaporation stables pour chacun des trois éléments, et ce durant toute la procédure de dépôt (soit environ 40 min pour une couche de 10 µm 53 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale d’épaisseur), il est impératif de bien choisir les paramètres permettant d’accéder aux bonnes vitesses (préchauffe) et de les maintenir stables (régulation). Préchauffe Une des étapes importantes consiste à préchauffer les éléments afin de stabiliser la vitesse d’évaporation au plus proche de celle visée pour le dépôt. Tant que les trois vitesses d’évaporation ne sont pas stabilisées, le dépôt ne peut se faire. La préchauffe du gallium, évaporé par bombardement électronique, se fait donc en deux étapes (Figure B. 8) : un palier de puissance P1 est appliqué pendant un temps t1 de sorte à homogénéiser thermiquement la charge de gallium, puis un deuxième palier de puissance P 2 supérieure à P1 et d’une durée t2 est effectué de manière à atteindre une vitesse d’évaporation proche de celle désirée. Les puissances (P1 et P2) et temps (t1 et t2) sont différents selon la vitesse d’évaporation désirée. Pour une puissance de chauffe appliquée, la vitesse d’évaporation se stabilise autour d’une valeur. Il suffit donc d’adapter la puissance de chauffe du palier P2 pour que la vitesse qui se stabilise soit proche de la vitesse d’évaporation visée durant toute la procédure de dépôt. La préchauffe du germanium, évaporé par effet Joule, est basée sur le même schéma que la préchauffe du gallium (Figure B. 8) : deux paliers de puissance P1 puis P2 (>P1) de Puissance (%) durées respectives t1 et t2. Préchauffage du matériau Régulation de la vitesse d’évaporation P2 (%), t2 (min) P1 (%), t1 (min) Temps (min) Figure B. 8 : Schéma des étapes de préchauffe pour l’évaporation du gallium et du germanium. 54 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale La préchauffe du tellure est différente de celles du gallium et du germanium. Après avoir testé le procédé de préchauffe utilisé pour les deux autres éléments, nous nous sommes finalement orientés vers un processus différent que nous avons optimisé et qui donne de meilleurs résultats (Figure B. 9). La préchauffe du tellure se fait également en deux étapes : un palier de puissance P1 est appliqué pendant un temps t1 de sorte à homogénéiser thermiquement le matériau et à enclencher l’évaporation, puis un deuxième palier de puissance P2 inférieure à P1 et d’une durée t2 est effectué de manière à « couper » l’augmentation de la vitesse d’évaporation et à stabiliser la vitesse autour de la valeur désirée Puissance (%) durant le dépôt. Préchauffage du matériau Régulation de la vitesse d’évaporation P1 (%), t1 (min) P2 (%), t2 (min) Temps (min) Figure B. 9 : Schéma des étapes de préchauffe pour l’évaporation du tellure. Régulation Après l’étape de préchauffe du matériau et de stabilisation de la vitesse d’évaporation autour de la valeur visée, il faut réguler la vitesse d’évaporation de sorte à ce qu’elle soit stable tout au long du dépôt. Pour cela, nous avons optimisé trois paramètres importants qui sont dépendants de la source. Ces trois paramètres de régulation sont les suivants : - Le gain : il s’agit d’un rapport entre la vitesse de dépôt et la puissance de chauffe. Plus le gain est élevé plus on aura des oscillations au niveau de la vitesse d’évaporation. Pour éviter le régime oscillatoire, il faut abaisser le gain. Le gain est également lié au paramètre de régulation TC. 55 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale - Le TC (Control Time Constant) : il correspond à une compensation qui permet d’atteindre la vitesse d’évaporation désirée. Si le TC est trop élevé, le système répondra avec du retard : il faudra trop de temps pour atteindre la vitesse de consigne. - Le DT (Control Dead Time) : il s’agit du délai entre un changement de puissance et un changement notable de la vitesse de dépôt. Si un DT trop élevé est appliqué, cela engendre des oscillations au niveau de la vitesse de dépôt. Une fois ces paramètres optimisés pour chacun des éléments, la vitesse d’évaporation est régulée et est stable tout au long du dépôt. Les évaporations des différents éléments (montée en température pendant la préchauffe, régulation des vitesses pendant le dépôt…) sont assurés par des contrôleurs automatiques. Toutes les informations relatives aux dépôts (évolution des vitesses d’évaporation, des puissances, suivi des épaisseurs déposées …) sont enregistrées sur ordinateur par une « routine » mise en place au laboratoire. I.3. Couches Te-Ge-Ga : dépôt et caractérisation Le verre Te75Ge15Ga10 retenu en tant que substrat est caractérisé par une transmission remarquable entre 6 et 20 µm. Il est par ailleurs caractérisé par un indice de réfraction de 3,399 à 10,6 µm. L’étude des couches du système Te-Ge-Ga doit nous permettre d’identifier la composition qui répondra aux exigences en terme de transmission et qui sera également caractérisée par un indice de réfraction compatible avec les contraintes du projet (~4.10-2 plus élevé que l’indice du substrat). La prochaine étape a donc été de déposer des couches de compositions assez différentes (avec un pourcentage atomique en tellure supérieur à 50% pour assurer une transmission correcte) et de les caractériser. I.3.1. Dépôt des couches Te-Ge-Ga Les conditions de dépôt sont celles décrites dans le paragraphe I.2. Nous avons fait varier les vitesses d’évaporation du germanium et du gallium de sorte à obtenir des couches de compositions différentes. La Figure B. 10 regroupe les compositions des différentes 56 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale couches étudiées dans le diagramme ternaire du système Te-Ge-Ga, limité à 50 % atomique en tellure. Ce diagramme sera commenté plus en détail dans les paragraphes suivants. Figure B. 10 : Diagramme ternaire du système Te-Ge-Ga, limité à 50% atomique en tellure, présentant les compositions des couches de ce système étudiées. L’épaisseur des couches déposées est de l’ordre de 2 µm. Les épaisseurs de couches ont été mesurées à l’aide d’un profilomètre Dektak 3 Veeco (résolution verticale : 10 nm ; résolution horizontale : 2000 points/balayage, sensibilité verticale : 10 nm). Quelques tests de couches plus épaisses (jusque 13 µm environ) ont aussi été réalisés pour vérifier la limite en épaisseur des couches que l’on peut obtenir par cette méthode : il est à noter que durant le dépôt des couches épaisses, les vitesses d’évaporation étaient stables durant les trente premières minutes environ (ce qui correspond à une épaisseur de couche de 6 µm environ) mais qu’elles l’étaient moins après. Deux types de substrats ont été utilisés : des lames de microscope et des verres As2Se3 commerciaux. I.3.2. Caractérisation des couches Te-Ge-Ga L’adhérence contrôlée par un « test au scotch » classique est bonne quelle que soit la couche et le substrat (Figure B. 11). 57 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure B. 11 : Test au scotch réalisé sur une couche du système Te-Ge-Ga d’épaisseur 10 µm déposée sur une lame de microscope. Photographie de gauche : le scotch est collé sur la surface de la couche. Photographie au centre : le scotch est décollé. Photographie de droite : aucune trace de la couche n’est visible sur le scotch. Les couches sont denses quelles que soient leur épaisseur et leur composition comme nous pouvons le voir sur la Figure B. 12 qui montrent les micrographies obtenues par microscopie à balayage (Microscope à Balayage Hitachi S2600N) en observant les sections d’échantillons constitués d’une couche Te-Ge-Ga déposée sur une lame de microscope, et fracturés grâce à une pointe diamant. (a) (b) (c) 12.8 2.8 µm 1.6 µm Figure B. 12 : Images MEB des sections des échantillons : (a) Te62,2Ge11,8Ga26,0, et (b) Te65,2Ge27,3Ga7,4 déposées sur lames de microscope après fracture. Ces images MEB confirment également la bonne adhérence des couches Te-Ge-Ga sur les substrats. Après fracture de l’échantillon, on s’aperçoit en effet que la couche est restée solidaire du substrat quelle que soit l’épaisseur de la couche. 58 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale La rugosité des couches a été étudiée par AFM (Digital Instruments D3100). Toutes les mesures ont été effectuées en sondant des surfaces de 5*5 µm². Un exemple de profil obtenu par AFM est présenté sur la Figure B. 13. Quelles que soient l’épaisseur et la composition de la couche, la rugosité est comprise entre 0,5 et 10 nm. Figure B. 13 : Image AFM d'une couche Te74,0Ge12,0Ga14,0 de 2 µm d'épaisseur déposée sur une lame de microscope et caractérisée par une rugosité de 0,8 nm. Le caractère amorphe ou cristallin des couches a été étudié par diffraction des rayons X avec un diffractomètre PANalytical XPERT en utilisant la raie K du cuivre, une tension de 40 kV et une intensité de courant de 30 mA. La composition des couches a été déterminée par microsonde électronique en utilisant un CAMECA SX-100. Les couches déposées sont amorphes, quelle que soit leur épaisseur, sur un large domaine de composition, contrairement à ce qui est obtenu pour les matériaux massifs du même système ternaire. A titre d’illustration, la Figure B. 14 compare les domaines amorphes pour les couches et les massifs du système ternaire Te-Ge-Ga. Alors que pour les massifs il se limite à un petit domaine autour de la composition Te75Ge15Ga10 (retenue pour le substrat), il s’étend quasiment à tout le diagramme pour un pourcentage atomique en tellure supérieure à 50% dans le cas des couches. Seules les compositions contenant plus de 90% de tellure, et quelques compositions exemptes de gallium autour de la composition Te50Ge50 sont cristallisées. Il est à noter que les couches du système binaire Te-Ge présentent un large domaine amorphe pour un pourcentage atomique en tellure compris entre 64 et 90%. 59 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure B. 14 : Diagrammes de phase du système ternaire Te-Ge-Ga limités à un pourcentage atomique de tellure supérieur à 50% : (a) pour les couches, (b) pour les matériaux massifs. Les zones violettes délimitent les domaines de compositions où les échantillons obtenus présentent un caractère amorphe. Les couches ont également été caractérisées par spectrométrie UV-visible-NIR (CARY VARIAN 50 UV-vis-NIR) dans le domaine de transmission [800-2500 nm]. Une courbe de transmission typique est présentée sur la Figure B. 15. 100 Transmission (%) 80 60 40 20 Eg 0 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000 2200 2400 Longueur d'onde (nm) Figure B. 15: Spectre de transmission de la couche Te74,5Ge15,9Ga9,6 d’épaisseur 3,6µm. Les oscillations observées dans la partie transmittive sont caractéristiques de la transmission au travers des couches d’indice supérieur au substrat et à l’air. Elles sont dues à des interférences entre la lumière transmise directement et celle qui subit une ou plusieurs réflexions à l’intérieur de la couche avant d’être transmise. La périodicité des oscillations dépend de l’épaisseur optique de la couche analysée, c’est-à-dire du produit n*e, n étant l’indice de réfraction de la couche et e son épaisseur. 60 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Trois grandeurs peuvent être estimées à partir de ces courbes de transmission : le gap optique, l’épaisseur et l’indice de réfraction de la couche. Le gap optique noté Eg est déterminé soit de manière graphique par la méthode des tangentes comme l’illustre la Figure B. 15, soit en considérant l’Équation B. 1, appliquée à la zone de forte absorption : Équation B. 1 où est une constante qui dépend de la probabilité de transition. Le gap optique des couches Te-Ge-Ga déposées par co-évaporation thermique et calculé grâce à Équation B. 1, est compris entre 1,20±0,05 et 0,70±0,05 eV, quelle que soit la composition. Aucune tendance concernant la variation du gap optique avec la composition n’a pu être mise évidence, les compositions des couches analysées étant trop différentes les unes des autres. En revanche, les valeurs ont été comparées avec celles de la littérature. Par exemple, Petkov et al. [20] qui ont étudié les propriétés optiques des films du système ternaire Te-Ge-Ga déposés par évaporation thermique, reportent une valeur de gap optique de 1,01 eV pour un film de composition Te71Ge14Ga15. Un film de composition relativement proche (Te74Ge12Ga14) obtenu par co-évaporation thermique est caractérisé par un gap optique de 0,91±0,05 eV. Les indices de réfraction des couches en fonction de la longueur d’onde ont été calculés en utilisant la méthode décrite par Swanepoel [63]. La méthode de Swanepoel ne doit être utilisée que sur des couches homogènes en épaisseur, ce qui est le cas des couches étudiées. La comparaison de l’épaisseur calculée avec celle mesurée par profilométrie permet de valider les résultats obtenus quant aux indices de réfraction. A titre d’exemple, les différentes épaisseurs pour les couches Te-Ge-Ga sont données dans le Tableau B. 1. 61 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Epaisseur mesurée Epaisseur calculée (µm) (±1%) (µm) (±2%) Te61.0 Ge22.2 Ga 16.8 2.27 2.09 Te65.3 Ge27.3 Ga 7.4 2.88 2.71 Te74.0 Ge12.0 Ga 14.0 1.98 1.93 Te50.9 Ge36.8 Ga 12.3 1.56 1.24 Couches Tableau B. 1 : Tableau récapitulatif des épaisseurs mesurées par profilométrie et celles calculées par la méthode de Swanepoel pour des couches ternaires Te-Ge-Ga. Les spectres de transmission sont délimités par deux courbes TM(λ) et Tm(λ) qui sont déterminées en utilisant une fonction d’interpolation des valeurs maximum et minimum, TM et Tm, des interférences de départ, comme décrit sur la Figure B. 16 : Figure B. 16 : Courbe de transmission délimitée par les deux courbes TM(λ) et Tm(λ). Après avoir déterminé TM(λ) et Tm(λ), les indices de réfraction peuvent être calculés en utilisant l’Équation B. 2 : Équation B. 2 où ns est l’indice de réfraction du substrat et N est calculé par l’Équation B. 3 : 62 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Équation B. 3 Comme approximation, l’indice du substrat (lame de microscope) ns est considéré constant et égal à 1,51. Les variations des indices de réfraction en fonction de la longueur d’onde de quelques couches Te-Ge-Ga dont le pourcentage en tellure est compris entre 50 et 75 % sont données sur la Figure B. 17. Dans tous les cas, nous observons une diminution de l’indice de réfraction lorsque l’on se déplace vers les grandes longueurs d’onde. Pour des couches de compositions différentes, nous obtenons des indices de réfraction différents : par exemple à λ = 1500 nm les indices de réfraction des quatre couches étudiées sont compris entre 3,8 et 4,4. Les valeurs obtenues sont du même ordre de grandeur que celles obtenues pour des couches du même système réalisées par d’autres méthodes de dépôt. Par exemple, la couche Te50Ge30Ga20 déposée par évaporation thermique est caractérisée par un indice de réfraction de 3,5 à λ = 1500 nm [22]. Les variations des indices de réfraction de deux films du système binaire Te-Ge et de deux films du système binaire Te-Ga ont également été comparées (Figure B. 18 a et b). Quelque soit le système binaire étudié, Te-Ge ou Te-Ga, les couches les plus riches en tellure, Te84,0Ga16,0 et Te80,4Ge19,6, ont des indices de réfraction plus élevés que les couches moins riches en tellure, Te64,5Ga35,5 et Te64,1Ge35,9. A λ = 1500 nm, les indices de réfraction sont compris entre 3,5 et 4,3 pour le système Te-Ga et entre 3,8 et 4 pour le système Te-Ge. L’augmentation de l’indice de réfraction en fonction du pourcentage atomique en tellure peut être corrélée avec l’augmentation de la polarisabilité αp, lors du remplacement des atomes de germanium (de rayon atomique de 122 pm) ou de gallium (de rayon atomique 130 pm) par des atomes de tellure de plus grosse taille (rayon atomique de 142 pm). Les variations d’indice de réfraction de deux couches de compositions proches mais appartenant à un système différent, Te64,5Ga35,5 et Te64,1Ge35,9, ont également été comparées (Figure B. 18 c). Le remplacement du germanium par le gallium est responsable d’une diminution de l’indice de réfraction. 63 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale 4.4 4.2 Te50,9Ge36,8Ga12,3 n 4.0 Te74,0Ge12,0Ga14,0 3.8 Te65,3Ge27,3Ga7,4 Te61,0Ge22,2Ga16,8 3.6 1000 1500 (nm) 2000 2500 Figure B. 17 : Variations de l’indice de réfraction en fonction de la longueur d’onde pour différentes couches Te-Ge-Ga. 4,2 4,4 4,2 Te84,0Ga16,0 a b n 3,8 n 3,8 3,6 3,4 Te80,4Ge19,6 4,0 4,0 Te64,5Ga35,5 Te64,1Ge35,9 3,6 3,2 1000 1500 2000 (nm) 2500 1000 1500 2000 (nm) 2500 4,0 Te64,1Ge35,9 c 3,8 3,6 n 3,4 Te64,5Ga35,5 3,2 1000 1500 2000 (nm) 2500 Figure B. 18 : Variations de l’indice de réfraction en fonction de la longueur d’onde pour différentes couches : a) deux couches Te-Ga, b) deux couches Te-Ge et c) comparaison des couches Te64,5Ga35,5 et Te64,1Ge35,9. 64 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale I.4. Conclusion Nous avons choisi de déposer les couches du système Te-Ge-Ga par co-évaporation thermique sous vide. Ces couches se sont avérées être adhérentes aux différents substrats utilisés (lames de microscopes et verres chalcogénures), et sont caractérisées par une haute densité et par une faible rugosité quelles que soient l’épaisseur et la composition de la couche. Le résultat le plus important de cette étude préliminaire a été l’obtention d’un très large domaine amorphe, couvrant la quasi-totalité du ternaire pour des pourcentages en tellure supérieurs à 50 %. Le choix en termes de composition pour le projet était donc large. Une étude des indices de réfraction de couches de compositions très différentes a par ailleurs permis de montrer que les indices de réfraction étaient compris entre 3,5 et 4,4 à 1,55 µm, ce qui est compatible avec l’indice de réfraction du verre Te75Ge15Ga10 choisi comme substrat qui est de 3,445 à 3,0 µm et de 3,399 à 10,6 µm. Au cours des différentes étapes d’établissement des conditions de dépôt, nous nous sommes toutefois aperçus de deux points importants : (i) la manipulation du gallium est délicate, et l’optimisation de ses paramètres d’évaporation difficile. En effet, les couches de gallium pur ne sont pas du tout adhérentes, si bien que le tooling facteur ne peut être ajusté convenablement (l’épaisseur de la couche ne peut être mesurée correctement par profilométrie pour cause de décollement de la couche durant la mesure). Par ailleurs, le gallium endommage les balances à quartz du fait de la formation d’amalgames avec l’or. (ii) le domaine amorphe des couches binaires Te-Ge est large, contrairement à celui des matériaux massifs correspondants, et l’indice de réfraction des couches Te-Ge déposées est du même ordre de grandeur que celui des couches Te-Ge-Ga à teneur en tellure équivalente. Ces deux remarques nous ont amenés à nous orienter vers des couches Te-Ge plutôt que vers des couches Te-Ge-Ga. Le paragraphe suivant porte donc sur l’étude des couches binaires de composition Te1-xGex. Un des challenges importants était cette fois-ci de démontrer la faisabilité de couches épaisses (≥10 µm). Nous avons en effet indiqué dans les paragraphes précédents qu’en utilisant la configuration de dépôt présentée au paragraphe I.2, des 65 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale fluctuations des vitesses d’évaporation étaient observées après une demi-heure de dépôt, correspondant au dépôt de couches de 6 µm d’épaisseur environ. 66 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale II. Les couches Te-Ge pour l’optique intégrée IR D’après les premiers résultats concernant l’étude des couches du système ternaire Te- Ge-Ga, nous avons vu que les couches binaires Te-Ge étaient très attractives comparées aux couches ternaires. En effet, cela permet d’une part de s’affranchir du gallium et d’autre part d’avoir un meilleur contrôle de la composition et de la reproductibilité des dépôts. Comme on peut le voir sur la Figure B. 14, il existe pour le système Te-Ge un large domaine amorphe qui s’étend entre 65 et 90 % environ en pourcentage atomique en tellure. D’après les études préliminaires par transmission UV-vis-NIR, les couches Te-Ge sont par ailleurs caractérisées par des indices de réfraction de l’ordre de 4 à 1500 nm. On a donc bon espoir d’identifier parmi elles une composition qui sera compatible avec le projet en termes d’indices de réfraction : c’est-à-dire une couche caractérisée par un indice de réfraction supérieur d’environ 4.10-2 à celui de substrat. Le challenge majeur ici était donc d’identifier cette composition et d’être en mesure de déposer des couches très épaisses qui soient d’indice homogène sur une grande surface et dans la profondeur de la couche. La première étape a donc été de déterminer et d’optimiser les conditions de dépôt de sorte à être capable d’obtenir de telles couches (épaisses et homogènes). C’est ce dont nous discuterons dans le paragraphe II.1. Ensuite, il a fallu s’assurer que les couches ainsi obtenues répondaient aux critères d’utilisation en tant que couches guidantes pour l’infrarouge. Ceci fera l’objet du deuxième paragraphe. II.1. Dépôt des couches Te-Ge Pour pallier le problème de limitation de l’épaisseur des couches Te-Ge, nous avons opté pour une configuration de dépôt différente de celle décrite dans la partie précédente. La littérature préconise pour le tellure une évaporation par effet Joule. L’évaporation du germanium est possible à la fois par effet Joule et par bombardement électronique. Nous avons donc décidé d’utiliser les deux sources chauffées par effet Joule pour l’évaporation du tellure, et le canon à électrons pour l’évaporation du germanium. Comme nous l’avons vu dans le paragraphe I.2.1, le tellure est évaporé par effet Joule dans un creuset en carbone compartimenté inséré dans une nacelle en molybdène et recouvert 67 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale d’un couvercle en molybdène percé de trous de 1 mm de diamètre. Un deuxième creuset a été usiné au laboratoire sur le même modèle que le premier. Afin de pouvoir évaporer le germanium par bombardement électronique, nous avons fabriqué une charge de germanium aux dimensions du creuset en cuivre comme expliqué pour le gallium au paragraphe I.2.1. Dans ce cas, le creuset en cuivre n’est pas recouvert d’une couche d’aluminium car il ne peut former d’amalgame avec le germanium. Tout un travail d’optimisation des paliers de préchauffe et des paramètres de régulation des vitesses d’évaporation a été effectué pour la deuxième source de tellure et pour la source de germanium. La Figure B. 19 montre un exemple type de comportement des différentes sources pendant le dépôt d’une couche binaire Te-Ge déposée en utilisant les deux sources chauffées par effet Joule pour l’évaporation du tellure et le canon à électrons pour 20 15 10 Dépôt 5 vmoy= 6,99Å/s (+/-0,03) 0 0 500 1000 1500 Source Te2 Source Te1 2000 Temps (s) 2500 50 40 Dépôt 30 20 vmoy= 30,04Å/s (+/-0,05) 10 0 0 500 1000 1500 Temps (s) 2000 2500 Vitesse (Å/s) - Puissance (%) Source Ge Vitesse (Å/s) - Puissance (%) Vitesse (Å/s) - Puissance (%) l’évaporation du germanium. 50 40 Dépôt 30 vmoy= 30,06Å/s (+/-0,02) 20 10 0 0 500 1000 1500 2000 Temps (s) Figure B. 19: Comportement des différentes sources Ge et Te lors du dépôt d’une couche binaire Te-Ge après optimisation des différentes conditions de dépôt en utilisant une source Ge évaporé par bombardement électronique et deux sources Te évaporés par effet Joule. Il est à noter que, dans ces conditions de dépôt optimisées, nous sommes capables de déposer des couches de 18 µm d’épaisseur avec des vitesses d’évaporation stables pendant toute la procédure de dépôt. 68 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale II.2. Caractérisation des couches Te-Ge L’étape suivante a été de déposer des couches de compositions différentes comprises dans le domaine amorphe, c’est-à dire pour des pourcentages en tellure compris entre 65 et 90% environ. Une fois ces couches déposées, nous les avons caractérisées de sorte à vérifier leur homogénéité en termes de composition et d’épaisseur, leur densité, leur adhérence, mais aussi leur indice de réfraction à = 10,6 µm. Ces caractérisations doivent nous permettre de vérifier la qualité des couches et de déterminer la composition de la couche de cœur qui aura un indice de réfraction plus élevé de 4.10-2 environ que celui du substrat Te75Ge15Ga10. II.2.1. Caractéristiques générales Les couches déposées dans des conditions de dépôt satisfaisantes ont une épaisseur pouvant aller jusqu’à 18 µm. Au-delà, des fluctuations des vitesses d’évaporation sont observées, qui ne permettent plus d’assurer une parfaite homogénéité des dépôts. Les couches discutées dans les paragraphes suivants ont toutes des épaisseurs comprises entre 7 µm et 18 µm. a. Structure Les couches obtenues ont été caractérisées par diffraction des rayons X (avec un diffractomètre PANalytical XPERT) pour confirmer leur nature amorphe. Leur composition a été déterminée par microsonde électronique. Comme on peut le voir sur la Figure B. 20 où sont superposés les diffractogrammes de différentes couches, le domaine amorphe des couches binaires Te-Ge s’étend au moins de 64 à 86% atomique en tellure, confirmant les résultats préliminaires présentés dans le paragraphe précédent. 69 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale GeTe Te Te49,7Ge50,3 Te55,5Ge44,5 Intensité [u.a.] Te64,1Ge35,9 Te71,4Ge28,6 Te74,8Ge25,2 Te80,4Ge19,6 Te85,8Ge14,2 Te91,4Ge8,6 Te93,6Ge6,4 10 20 30 40 50 60 70 80 2 Figure B. 20 : Diffractogrammes de différentes couches binaires Te-Ge. b. Adhérence L’adhérence des couches, contrôlée par un « test au scotch » classique, est bonne, quels que soient la couche (épaisseur et composition) et le substrat. Les couches Te-Ge, en plus d’être adhérentes aux différents substrats utilisés, sont également adhérentes les unes aux autres comme nous pouvons le voir sur la Figure B. 21 qui représente les différentes étapes du « test au scotch » pour un empilement de trois couches Te-Ge déposées sur un substrat commercial As2Se3 et caractérisé par une épaisseur totale de 41,5 µm. 70 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Figure B. 21 : Test au scotch réalisé sur un empilement de trois couches Te-Ge déposées sur un substrat As2Se3 caractérisé par une épaisseur totale de 41,5 µm. Photographie de gauche : le scotch est collé sur la surface de l’empilement de couches. Photographie au centre : le scotch est décollé. Photographie de droite : l’empilement de couches ne s’est pas décollé du substrat (pas de trace des couches sur le scotch). II.2.2. Homogénéité des couches Te-Ge Des études d’homogénéité des couches ont été réalisées notamment en termes d’épaisseur, par profilométrie, et de composition (en surface et en profondeur), par microsonde électronique et par SIMS. Nous avons déposé sur une lame de microscope de dimensions 5,5 * 5 cm² une couche binaire que nous avons ensuite caractérisée en plusieurs points sur toute sa surface. Ce travail nous a permis d’obtenir un profil en épaisseur et en composition (Figure B. 22). La Figure B. 22a présente un exemple de profil en épaisseur. Elle démontre une très bonne homogénéité de la couche en termes d’épaisseur sur une zone de 4,8 cm de diamètre avec une erreur par rapport à la valeur mesurée au centre de la couche (13,2 µm) de 2,5%. La Figure B. 22b présente un exemple de profil en composition obtenu en mesurant la composition en différents points de la même couche. Nous pouvons voir que l’homogénéité en composition de la couche est excellente ( 1%) sur une région de 4,8 cm de diamètre et reste bonne sur une région d’environ 6 cm de diamètre ( 2%). Ce résultat est en adéquation avec la bonne homogénéité de la couche en termes d’épaisseur. Il a été vérifié sur plusieurs couches d’épaisseurs différentes, de 7 à 15 µm. 71 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale 13,5 µm (-2,5%) 13,9 µm (-2,5%) 13,2 µm 12,9 µm 12,5 µm ≤11,9 µm (0%) (+2,5%) (+5%) (≤10%) ( ≥ 10%) 0 -1 14 -3 10 µm) seur ( Epais Y (cm) -2 12 8 -4 6 4 2 0 0 a -5 -6 1 2 3 4 5 6 X (cm) 84,2% (-2%) 83,3% (-1%) 82,5% (0%) 81,7% (+1%) 80,9% (+2%) -1 84 -2 -3 n Tellu -4 80 re -5 b 78 Y (cm) %. at. e 82 -6 76 0 1 2 3 4 5 6 X (cm) Figure B. 22 : Profils a) en épaisseur et b) en composition de la couche Te82,5Ge17,5 caractérisée par une épaisseur de 13,2 µm. Les nombres entre parenthèses correspondent à l’erreur par rapport à la valeur moyenne a) de l’épaisseur (13,2 µm) et b) de la composition (82,5 % atomique en tellure). Le fait d’avoir démontré la bonne homogénéité en termes de composition de surface ne prouve pas que la couche ait une composition homogène en profondeur. L’homogénéité en profondeur de la composition peut être démontrée par des mesures de SIMS (microsonde ionique CAMECA IMS5f). La Figure B. 23 présente un profil typique en composition sur toute l’épaisseur d’une couche Te-Ge. 72 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Substrat Surface de la couche 1E+05 Te 1E+04 Ge 1E+03 c/s O +Si 1E+02 1E+01 1E+00 1E-01 0 500 1000 1500 2000 Temps (s) Figure B. 23 : Analyse SIMS de la Te82,5Ge17,5 caractérisée par une épaisseur de 10 µm. On peut voir l’évolution de la concentration en tellure et en germanium dans la profondeur de la couche. Il est à noter que les concentrations en Si et en O sont dues à la contribution de la lame de microscope utilisée comme substrat. On peut voir que la concentration des différents éléments reste constante de la surface de la couche (à gauche de la courbe) jusqu’à la surface du substrat (à droite). Cela démontre la bonne homogénéité en profondeur de la couche. II.2.3. Morphologie Les couches ont été observées par microscopie électronique à balayage à l’aide d’un microscope Quanta FEG 200. La Figure B. 24 présente les résultats obtenus en observant la section d’une même couche Te-Ge épaisse déposée sur une lame de microscope (Figure B. 24 a et b) et sur un verre chalcogénure commercial As2Se3 (Figure B. 24 c et d) après fracture des échantillons à l’aide d’une pointe diamant. Comme en témoignent les photographies des Figure B. 24a et c, les couches sont denses, même si elles présentent une structure colonnaire mise en évidence à plus fort grossissement (Figure B. 24 b et d). Les colonnes sont caractérisés par une taille de l’ordre de 22 nm ce qui reste faible comparé à l’épaisseur soit 11 µm. 73 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale a b c d Figure B. 24 : Images MEB de la section d’une couche Te87,6Ge12,4 d’épaisseur 11 µm déposée a) et b) sur une lame de microscope, et c) et d) sur un verre chalcogénure commercial As2Se3, après fracture. La rugosité des couches a été étudiée par AFM (Digital Instruments D3100). Toutes les mesures ont été effectuées en sondant des surfaces de 5*5 µm². Quels que soient la couche (composition et épaisseur) et le substrat sur lequel elle est déposée, la rugosité est inférieure à 15 nm. Néanmoins, la rugosité de la couche dépend fortement de la rugosité du substrat sur lequel elle est déposée : en effet une couche déposée sur une lame de microscope (dont la rugosité est de l’ordre de 0,5 nm) a une rugosité plus faible qu’une couche déposée sur un verre chalcogénure poli optiquement. Une couche déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 poli (de rugosité 5 nm) au laboratoire est caractérisée par une rugosité de l’ordre de 12 nm contre 2 nm pour une couche déposée sur une lame de microscope. II.2.4. Comportement thermique Les propriétés thermiques des couches déposées par co-évaporation thermique, ont été étudiées par DSC (Mettler DSC 30). A partir des courbes DSC, nous pouvons déterminer la température de transition vitreuse notée Tg, la température de cristallisation notée Tx et la 74 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale température de fusion notée Tm. Nous pouvons également en déduire la stabilité thermique des couches qui peut être estimée grâce à la différence T = Txmin - Tg. Nous avons caractérisé des couches de différentes compositions. Les courbes sont superposées sur la Figure B. 25. A titre de comparaison, les courbes d’analyse thermique enregistrées dans les mêmes conditions pour trois verres obtenus par ultra-trempe (méthode de synthèse décrite en annexe), sont données sur la Figure B. 26. On peut voir que le même comportement thermique est observé, à savoir : une diminution de la température de transition vitreuse Tg quand le pourcentage atomique en tellure augmente et l’apparition d’un deuxième pic de cristallisation autour de 80% en tellure [64]. Tg = 189 °C Tg Te73,1Ge26,9 Te77,0Ge23,0 Te79,5Ge20,5 120 Apparition d’un nouveau pic de cristallisation Tx2 130 140 150 160 170 180 190 Te80,2Ge19,8 Te81,7Ge18,3 200 Te83,1Ge16,9 Température (°C) Te83,7Ge16,3 Heat Flow (u.a.) Te85,0Ge15,0 Te85,9Ge14,1 Te86,4Ge13,6 Te88,5Ge11,5 Tx 100 200 Tm 300 400 Température (°C) Figure B. 25 : Courbes DSC de plusieurs couches Te-Ge de compositions différentes déposées par co-évaporation thermique. 75 Heat Flow (u.a.) Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Tg+ T exo Tg Tg Te78,0Ge22,0 Tg+ T Te83,5Ge16,5 Tg+ T Tg 100 Te88,3Ge11,7 200 300 Température (°C) 400 Figure B. 26 : Courbes DSC de différents verres massifs Te-Ge synthétisés par la méthode d’ultra-trempe. En effet, pour les couches ou les massifs caractérisés par un pourcentage atomique de tellure inférieur à 80%, un seul pic de cristallisation est observé alors que pour les matériaux contenant des pourcentages en tellure supérieurs, un nouveau pic de cristallisation apparaît avec une position qui varie selon la composition de la couche. D’après la littérature [53, 57, 65], on peut dire que la cristallisation des matériaux vitreux Te-Ge de pourcentage atomique en tellure inférieur à 80% se fait en une seule étape avec la formation simultanée de Te et de Te-Ge à une température d’environ 230°C, tandis que pour des matériaux dont le pourcentage atomique en tellure est supérieur à 80% la cristallisation se fait en deux temps avec la formation de Te en premier (Tx2) et d’un mélange de Te et de Te-Ge en second (Tx1). Il est à noter que la température du pic de cristallisation du Te (Tx2) diminue quand le pourcentage atomique en tellure augmente, tout comme la température de transition vitreuse Tg (Figure B. 27). 220 200 Tx2 T (°C) 180 160 Tg 140 120 100 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 % at. en tellure Figure B. 27 : Evolution de la température de transition vitreuse Tg et de la température de cristallisation Tx2 en fonction du pourcentage atomique de tellure. 76 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale La différence T = Txmin - Tg permet de déterminer la stabilité thermique des couches. Comme on peut le voir sur le Tableau B. 2, la différence T est faible quelle que soit la composition de la couche. Cela confirme l’instabilité thermique des films Te-Ge riches en tellure vis-à-vis de la cristallisation, un phénomène qui a déjà été observé pour les verres massifs de composition équivalente. Film composition Tg (°C) Tx1 (°C) Tx2 (°C) Te73,1Ge26,9 189 232 - 43 Te77,0Ge23,0 172 234 - 62 Te79,5Ge20,5 170 232 - 62 Te80,2Ge19,8 161 228 212 51 Te81,7Ge18,3 156 226 210 54 Te83,7Ge16,3 141 221 191 50 Te85,0Ge15,0 137 220 188 51 Te85,9Ge14,1 135 222 189 54 Te86,4Ge13,6 130 225 173 43 Te88,5Ge11,5 118 226 161 43 T = Txmin - Tg (°C) Tableau B. 2 : Température de transition vitreuse Tg, principaux pics de cristallisation Tx1 et Tx2 et stabilité thermique T = Txmin - Tg pour différentes couches Te-Ge. Il est à noter que les valeurs de T obtenues pour les couches sont du même ordre de grandeur que pour le verre massif Te80Ge20 ( T ~ 77°C) obtenu par la méthode classique de synthèse des verres. L’ajout de gallium dans le verre massif permet une augmentation de la stabilité thermique : un verre de composition Te80Ge10Ga10 a par exemple un T de 89°C, soit une valeur supérieure de 12°C environ par rapport au verre Te80Ge20 [19]. Cela a justifié le choix d’un verre du système Te-Ge-Ga plutôt qu’un verre du système Te-Ge comme substrat dans le cadre du projet. Le verre Te75Ge15Ga10 effectivement retenu est celui dont la stabilité thermique est la plus élevée : T = 112 °C. Comme les valeurs des T étaient faibles pour les couches Te-Ge déposées par coévaporation thermique, nous avons testé leur recuit à une température inférieure de 10°C par 77 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale rapport à leur température de transition vitreuse. Les couches restant amorphes après un recuit de 24h, le choix d’une utilisation des couches Te-Ge pour la fabrication de guides d’onde pour de futures applications dans l’infrarouge a été validé. La température d’utilisation de ces couches ne doit cependant pas dépasser une température de l’ordre de Tg - 20°C approximativement si on veut être sûr d’éviter la cristallisation des couches. II.2.5. Propriétés optiques Dans un premier temps, nous avons déterminé le gap optique des différentes couches binaires à partir des courbes de transmission UV-visible-NIR. Ensuite nous les avons caractérisées en termes d’indice de réfraction à = 10,6 µm par la méthode des m-lines sur un banc de caractérisation (présenté dans le chapitre D) installé à Thales Alenia Space (Cannes). Certaines couches ont été caractérisées par cette méthode avant et après recuit afin de vérifier l’évolution de l’indice de réfraction. a. Gap optique Eg Comme pour les couches ternaires, les couches binaires ont été caractérisées par spectrométrie UV-visible-NIR dans le domaine de transmission compris entre 800 et 2500 nm. Une courbe de transmission typique est présentée sur la Figure B. 28. Transmission (%T) 100 80 60 40 20 0 1000 1500 2000 Longueur d'onde 2500 (nm) Figure B. 28 : Spectre de transmission de la couche Te87,6Ge12,4 d’épaisseur 11 µm. A partir des courbes de transmission, nous avons déterminé le gap optique Eg des couches binaires en utilisant la méthode des tangentes. La détermination du gap optique de 78 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale couches de compositions différentes nous a permis d’établir que plus le pourcentage atomique de tellure est important au sein des couches plus le gap optique est faible : ce qui signifie que la transmission débute pour des longueurs d’onde plus élevées. Les valeurs du gap optique sont comprises entre 1240 nm et 1410 nm, soit entre 1,00 eV et 0,88 eV, pour des pourcentages atomiques de tellure respectivement compris entre 76,6% et 88,6%. b. Indice de réfraction à = 10,6 µm Des couches de différentes compositions ont été caractérisées en termes d’indices de réfraction à = 10,6 µm par la méthode des m-lines. Les échantillons caractérisés par cette méthode sont constitués d’une couche épaisse Te-Ge déposée sur un substrat commercial As2Se3 dont on connait l’indice de réfraction (n = 2,7775 à 10,6 µm). La méthode des m-lines consiste à approcher de la surface d’un guide d’onde planaire (couche + substrat), un prisme de fort indice de réfraction en germanium dans notre cas (np = 3,399 ± 0,001 à 10,6 µm) et caractérisé par un angle A, de sorte à ce qu’il se crée un gap d’air entre la base du prisme et la surface du guide. Quand un faisceau incident provenant d’une source infrarouge (laser CO2) atteint la base du prisme avec un angle plus petit que l’angle critique défini par l’indice de réfraction du prisme (θp plus petit que θc), il est totalement réfléchi. La lumière peut donc être couplée dans le guide planaire, au travers du champ évanescent créé dans le gap d’air, si la condition suivante est obtenue : Equation B. 4 où np et nc sont respectivement les indices de réfraction du prisme et de la couche épaisse constituant le guide, et θp et θm sont les directions angulaires des faisceaux comme illustré sur la Figure B. 29. 79 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Prisme np θout θin θp Couche nc θc A θm Gap d’air Substrat Figure B. 29 : Principe typique du couplage par prisme. Tous les faisceaux incidents qui vérifient la condition ci-dessus sont couplés dans le guide d’onde planaire au lieu d’être réfléchis à la base du prisme. Ceux qui correspondent à des modes guidés restent confinés dans le guide si bien que des « lignes noires » sont observées à la sortie du prisme (Figure B. 30) grâce à une caméra infrarouge. Figure B. 30 : Observation d’une ligne noire lors de la caractérisation par la méthode m-lines à λ = 10,6 µm d’une couche Te-Ge. L’image du réticule est utilisée pour pointer les lignes noires en variant la position du prisme. A la sortie du prisme il y a donc autant de lignes noires que de modes excités dans le guide d’onde. L’indice effectif de la couche est obtenu grâce à une routine de calcul, à partir de la mesure des angles θout correspondant à la position des lignes noires, et à partir de l’angle A et de l’indice du prisme np, d’après l’équation suivante : Équation B. 4 Connaissant ensuite l’indice de réfraction du substrat, on remonte à l’indice de réfraction de la couche guidante. 80 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale La Figure B. 31 montre les variations d’indices de réfraction à λ = 10,6 µm en fonction du pourcentage atomique en tellure de différentes couches Te-Ge. Une dépendance quasi linéaire est observée. Plus le pourcentage de tellure dans la couche est important plus l’indice de réfraction est élevé. Les valeurs des indices de réfraction des couches sont plus élevées que l’indice de réfraction du verre Te75Ge15Ga10 retenu comme substrat (3,399 à λ = 10,6 µm), quelle que soit la composition des couches pour des pourcentages atomique en tellure supérieurs à 80%. Cela assure la possibilité de trouver une composition pour la couche de cœur qui sera compatible avec le projet. Cela confirme également le fait qu’il est aisé de faire varier la différence d’indice de réfraction entre le substrat et la couche de cœur (Δn) en changeant le pourcentage atomique de tellure dans la couche. Pour un Δn de 4.10-2 imposé par le projet, on peut estimer que le pourcentage en tellure de la couche de cœur doit être de 82% Indice de refraction nTE approximativement. 3.58 3.56 3.54 3.52 3.50 3.48 3.46 3.44 3.42 3.40 y = 0.0181x + 1.9592 R² = 0.98053 ncoeur = 3,44 nsubstrat 80 82 84 86 88 % at. Te Figure B. 31 : Dépendance de l’indice de réfraction n (±10-3) à λ = 10,6 µm en fonction du pourcentage atomique en tellure des couches Te-Ge. L’augmentation de l’indice de réfraction en fonction du pourcentage atomique en tellure peut être corrélée avec l’augmentation de la polarisabilité αp, lors du remplacement des atomes de germanium (de rayon atomique de 122 pm) par des atomes de tellure de plus grosse taille (rayon atomique de 142 pm). La polarisabilité est la somme de deux contributions : la polarisabilité électronique (de loin la plus importante) et la polarisabilité atomique. L’indice de réfraction et la polarisabilité électronique sont reliés par la relation de Lorentz-Lorenz : 81 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Équation B. 5 où 0 est la permittivité du vide, Nj le nombre d’unité polarisables de type j par unité de volume et αpj la polarisation électronique (en Å3). Pour les films TexGe100-x, on peut écrire : Équation B. 6 En considérant la stœchiométrie particulière des films TexGe100-x, on a alors : Équation B. 7 où N = NTe-NGe est une constante et NTe = (x/100) N. D’après la dernière équation, le rapport (n2-1)/(n2+2) doit donc dépendre linéairement de x (la quantité de tellure). Nous avons donc établi le rapport (n2-1)/(n2+2) à partir des indices de réfraction déterminés par la méthode des m-lines à λ = 10,6 µm et nous avons porté les valeurs obtenues en fonction du taux de tellure dans la couche (Figure B. 32). 0,800 2 2 (n -1)/(n +2) 0,795 y = 0,0019x + 0,6264 2 R = 0,9844 0,790 0,785 0,780 0,775 78 80 82 84 86 %at. en tellure, soit x 88 90 Figure B. 32 : Facteur d’indice de réfraction des couches Te-Ge en fonction du pourcentage atomique en tellure en utilisant la relation de Lorentz-Lorenz à λ = 10,6 µm. 82 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Les résultats expérimentaux sont en accord avec le comportement linéaire prévu par l’Équation B. 7 [45]. Nous avons également vérifié l’influence du recuit à une température Tr = Tg – 10°C sur l’indice de réfraction des couches Te-Ge. Différents temps de recuit ont été réalisés sur une couche Te-Ge déposée sur un verre chalcogénure commercial As2Se3 puis ces échantillons ont été caractérisés par la méthode des m-lines. La Figure B. 33 présente les résultats obtenus sur la couche Te84,4Ge15,6 de 13 µm d’épaisseur. Indices de réfraction n 3,51 3,50 3,49 3,48 3,47 0 8 16 Temps de recuit (en heure) 24 Figure B. 33 : Évolution des indices de réfraction de la couche Te84,4Ge15,6 de 13 µm d’épaisseur en fonction du temps de recuit. L’indice de réfraction de la couche augmente après un recuit de 8h à Tr = Tg – 10°C puis se stabilise. L’augmentation de l’indice de réfraction peut être due à la diminution de la structure colonnaire de la couche : c’est-à-dire sa densification. L’étude de l’influence du recuit sur la structure de la couche n’a pas été réalisée pour appuyer cette hypothèse dans le cadre de ce travail de thèse. 83 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Conclusion Après avoir étudié les techniques de dépôt pouvant être envisagées pour la réalisation de couches tellurures, notre choix s’est finalement porté sur une méthode de dépôt plus classiquement utilisée pour le dépôt d’alliages métalliques mais qui répond à toutes nos exigences : il s’agit de la co-évaporation thermique. Cette méthode présente deux avantages majeurs qui sont une vitesse de dépôt élevée et la possibilité de changer facilement la composition des couches obtenues. La première étape de notre travail a consisté à mettre en place la co-évaporation thermique puis à l’optimiser tant au niveau des différentes sources qu’au niveau des paramètres de régulations des vitesses d’évaporation des différents éléments. Au cours d’une étude préliminaire, nous avons déposé et caractérisé des couches du système Te-Ge-Ga de différentes compositions de sorte à valider la méthode. Le tellure et le germanium ont été évaporé par effet Joule et le gallium par bombardement électronique. Les couches Te-Ge-Ga se sont avérées denses, adhérentes aux différents substrats utilisés et caractérisées par une faible rugosité quelles que soient l’épaisseur et la composition de la couche. A partir des résultats obtenus par diffraction des rayons X et par microsonde électronique, nous avons établi le diagramme ternaire des couches du système Te-Ge-Ga. Ces couches sont amorphes sur un large domaine de composition ce qui permet d’avoir un grand éventail d’indices de réfraction. A 1,55 µm, ils sont compris entre 3,5 et 4,4. L’étude préliminaire des couches ternaires Te-Ge-Ga a finalement débouché sur la conclusion que l’on pouvait s’affranchir du gallium. Nous nous sommes alors concentrés sur une étude plus détaillée des couches du système binaire Te-Ge, afin d’identifier quelle composition serait caractérisée par un indice de réfraction compatible avec les contraintes du projet (~4.10-2 plus élevé que l’indice du substrat). Afin de déposer des couches de 12 µm d’épaisseur (et plus) avec des vitesses d’évaporation stables durant toute la procédure de dépôt, nous avons changé la configuration de dépôt et décidé d’utiliser les deux sources chauffées par effet Joule pour l’évaporation du tellure et le canon à électrons pour l’évaporation du germanium. 84 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale Après optimisation des différents paramètres de dépôts, des couches de compositions différentes ont été déposées et caractérisées afin de s’assurer de leur grande qualité mais aussi dans le but d’identifier la composition de la couche de cœur qui répondra aux exigences du projet. Des couches Te-Ge ayant des épaisseurs pouvant atteindre 18 µm ont été obtenues dans de très bonnes conditions de dépôt. Elles sont adhérentes quelle que soit la nature du substrat utilisé et sont caractérisées par de faibles rugosités. L’homogénéité en épaisseur des couches est bonne ( 2,5%) sur une zone de 4,8 cm de diamètre. Leur homogénéité en composition est quand à elle excellente ( 1%) sur une zone de 4,8 cm de diamètre et reste bonne ( 2%) sur une zone de 6 cm de diamètre. Les couches sont également homogènes en termes de composition en profondeur : c’est-à-dire sur toute l’épaisseur de couche déposée. Le comportement thermique des couches binaires Te-Ge a également été étudié afin de déterminer leur température limite d’utilisation. L’augmentation du pourcentage atomique de tellure au sein des couches engendre une diminution de la température de transition vitreuse Tg et l’apparition d’un deuxième pic de cristallisation pour des pourcentages supérieurs à 80%. Ces deux phénomènes ont pour effet de diminuer la stabilité thermique des couches. Bien que les couches gardent leur caractère amorphe après des recuits de 24h à une température de Tg - 10 °C, nous avons estimé que la température limite d’utilisation de ces couches ne devait pas dépasser une température de Tg - 20 °C approximativement pour éviter tout risque de recristallisation. Les caractérisations optiques des couches Te-Ge ont permis de déterminer leur gap optique et leur indice de réfraction à λ = 10,6 µm. Plus la couche est riche en tellure plus la valeur de son gap optique est faible et plus son indice de réfraction est élevé. Une dépendance quasi linéaire de l’indice de réfraction en fonction du pourcentage atomique de tellure a été observée. A partir des résultats obtenus et en fonction des contraintes imposées par le projet (indice de la couche supérieur à celui du substrat de 4.10-2), nous avons pu estimer que la composition de la couche de cœur devait contenir environ 82% en tellure. La prochaine étape de notre travail consiste à démontrer que l’on peut modifier la géométrie de ces couches par gravure afin d’être capable de réaliser des guides d’onde monomodes droits. Cette étude fait l’objet du chapitre C. 85 Chapitre B : De l’obtention de couches tellurures pour l’interférométrie spatiale 86 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Chapitre C Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux 87 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux INTRODUCTION 89 I. 90 Choix de la méthode de gravure I.1. 90 I.1.1. La gravure chimique 90 I.1.2. La gravure physique 91 La méthode de gravure retenue 94 I.2. II. Les différentes méthodes de gravure I.2.1. Pourquoi la gravure physique réactive ? 94 I.2.2. La gravure ionique réactive pour les couches binaires Te-Ge 95 Établissement des conditions de gravure 97 II.1. La photolithographie 97 II.2. Influence des différents paramètres 98 II.2.1. Mélange de gaz réactifs : CHF3 + O2 II.2.2. Mélange de gaz réactifs : CHF3 + O2 + Ar 7II.3. Choix des conditions de gravure CONCLUSION 99 103 109 113 88 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Introduction Dans le chapitre B, nous avons présenté la réalisation de couches épaisses binaires Te-Ge déposées par co-évaporation thermique, leurs propriétés structurales, morphologiques, chimiques, et optiques. Nous avons démontré que le dépôt de ces couches a été optimisé de sorte à obtenir des couches de grande qualité, d’épaisseur et d’indice de réfraction contrôlés. Désormais, nous nous intéressons à la modification de la géométrie de ces couches pour la réalisation de guides d’onde. En vue d’applications dans l’infrarouge lointain, nous devons être capables de maîtriser la gravure profonde des couches Te-Ge avec de bons profils de gravure. Dans la partie I, nous décrirons les différentes méthodes de gravure, chimique ou physique, pouvant être utilisées pour graver les couches à base de verres chalcogénures. Nous justifierons notre choix de la gravure physique réactive pour modifier la géométrie des couches binaires Te-Ge. Dans la partie II, nous présenterons les résultats obtenus. En particulier, nous discuterons de l’influence des différents paramètres de gravure : gaz réactifs utilisés (nature, proportions), puissance RF, pression dans l’enceinte… 89 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux I. Choix de la méthode de gravure I.1. Les différentes méthodes de gravure La gravure d’une couche consiste à retirer une partie du matériau dans le but de créer un motif. Il existe deux types de gravure : la gravure chimique (voie humide) par immersion de l’échantillon dans une solution appropriée, et la gravure physique (voie sèche) qui se fait dans un bâti de pulvérisation. Ces deux processus de gravure sont décrits dans les paragraphes suivants. Il est à noter qu’avant chaque gravure une étape de masquage des couches appelée photolithographie (dont le principe est décrit en détail au paragraphe II.1.), doit être effectuée. I.1.1. La gravure chimique La gravure chimique consiste à immerger l’échantillon dans un bain acide ou basique (selon la nature de la couche mince) qui va attaquer chimiquement la surface de l’échantillon non protégée par la résine servant au masquage de la couche. Quelques travaux traitent de la gravure chimique de couches chalcogénures. La gravure humide sélective de couches des systèmes As-S, As-Se et As-S-Se, a été étudiée par Orava et al. dans des solutions alcalines inorganiques (NaOH, Na2S, Na2CO3 + Na3PO4) [44]et dans des solutions amines organiques [66]. Les vitesses de gravure s’avèrent être plus élevées dans les solutions amines organiques que dans les solutions alcalines inorganiques : par exemple, pour le verre As33S67, la vitesse de gravure est de 8220 nm/min dans une solution 1,2-Diaminopropane alors qu’elle n’est que de 492 nm/min dans une solution de NaOH. La surface de la couche est moins rugueuse après une gravure dans une solution organique [66]. Les travaux de Riley et al. portent sur la gravure chimique de verres chalcogénures de compositions As40S60 et As24S38Se38 dans un bain composé d’hydroxyde de sodium (NaOH), d’isopropanol (IPA) et d’eau distillée (avec un rapport volumétrique de 1:2 entre l’IPA et l’eau distillée) [67]. Pour une même composition du bain (1:25:50), les vitesses de gravure des deux verres ont été comparées : la vitesse de gravure du verre As40S60 (654 132 nm/min) est environ 30 fois plus élevée que celle du verre As24S38Se38 (21,6 3,9 90 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux nm/min). Il existe une relation linéaire entre la concentration en NaOH dans le bain et la vitesse de gravure du verre As40S60, ce qui n’est pas le cas pour le verre As24S38Se38. La gravure chimique est facile à mettre en œuvre. Les vitesses de gravure obtenues avec ce processus sont rapides. Le plus gros avantage de la gravure chimique reste sa sélectivité (rapport entre la vitesse de gravure du matériau et celle de la résine de masquage) qui dépend de la composition du film à graver et de celle du bain. Par exemple, pour une couche riche en As, la sélectivité la plus élevée est observée dans un solvant aqueux alors que pour une couche riche en Ge c’est dans un solvant non aqueux qu’elle est la plus élevée [68]. La gravure chimique présente en revanche un inconvénient important : ce processus est fortement isotrope. Le matériau est attaqué avec la même vitesse dans toutes les directions, même les parties protégées par la résine sont attaquées (Figure C. 1). Résine photosensible Couche Figure C. 1 : Profil d’une gravure chimique fortement isotrope I.1.2. La gravure physique La gravure physique consiste pour l’essentiel en un bombardement de la surface à graver par des ions qui sont généralement issus d’un plasma. Deux types de gravure physique existent : la gravure plasma inerte et la gravure ionique réactive (souvent appelée par son acronyme anglais RIE pour Reactive Ion Etching). a. La gravure plasma inerte La gravure plasma inerte est similaire au dépôt par pulvérisation cathodique à l’exception près que la cible de pulvérisation est remplacée par l’échantillon à graver. Elle s’effectue généralement sous atmosphère d’argon. Les ions inertes sont générés dans un 91 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux plasma et accélérés vers l’échantillon à graver qui constitue la cathode. Les ions inertes viennent bombarder la surface de l’échantillon en pulvérisant les atomes qui le constituent. La gravure physique sous atmosphère d’argon présente donc l’avantage de permettre la modification géométrique des couches indépendamment de leur nature. Cette technique est par ailleurs anisotrope ce qui permet la gravure des couches chalcogénures avec des angles quasi-verticaux pour de petites profondeurs de gravure. Ces avantages justifient son utilisation pour la réalisation de guides d’onde à base de couches chalcogénures pour le proche ou moyen infrarouge. Des guides d’onde à base de couches As2Se3 gravées ont par exemple été fabriqués par Ruan et al., avant d’être caractérisés à 1,55 µm [34]. D’autres encore ont été récemment réalisés à base de couches As2S3 déposées sur des substrats LiNbO3, pour une utilisation à 4,8 µm [69]. Il a été observé lors de travaux antérieurs que plus la profondeur de gravure était importante, plus l’angle de la marche gravée diminuait. Vigreux et al. ont en effet étudié la gravure physique sous atmosphère argon de couches minces de composition Te2As3Se5 : un angle supérieur à 71° a été obtenu pour une profondeur de gravure de 0,73 µm alors que pour une profondeur de 2,78 µm un angle de 47° a été mesuré [16]. Ces résultats ont été attribués à un transfert de l’angle des motifs de résine (qui n’étaient pas verticaux après l’étape de photolithographie) au matériau. La gravure physique inerte étant en effet une méthode de gravure non sélective, la résine est gravée en même temps que la couche. Cette méthode présente donc également des limites quant à l’obtention de marches très profondes, du moins lorsque l’on utilise des résines standard (dont les épaisseurs sont de l’ordre de 2,2 µm après étalement et recuit). En effet, la résine est gravée quasiment à la même vitesse que le matériau. L’épaisseur des motifs de résine détermine donc la profondeur limite de gravure. Les vitesses observées lors de la gravure physique inerte sont enfin relativement faibles. Par exemple, elles sont de l’ordre de 46 nm/min pour des couches de Te2As3Se5 dans les conditions suivantes : une pression dans l’enceinte fixée à 5 Pa et la puissance RF égale à 25W [16]. b. La gravure ionique réactive (RIE) La gravure ionique réactive est une technique dérivée de la gravure plasma inerte à laquelle on ajoute une composante chimique en remplaçant l’atmosphère inerte par une 92 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux atmosphère dite réactive. Cette méthode met en jeu des radicaux créés dans le plasma qui réagissent avec les atomes de la surface pour former des espèces volatiles. La composition du plasma, gaz ou mélange de gaz réactifs, doit être choisie convenablement, de façon à produire des radicaux actifs qui réagiront avec tous les éléments qui constituent le matériau, mais qui par contre ne réagiront pas avec ceux qui constituent la résine de masquage. En appliquant un fort champ électrique en radio-fréquence entre le porte-échantillon et l’électrode supérieure, on amorce un plasma dans lequel sont générés des espèces réactives. Le champ électrique est réglé à une fréquence de 13,56 MHz et à une puissance RF, typiquement de l’ordre d’une centaine de watts. Ce champ électrique oscillant ionise les molécules de gaz en leur arrachant certains de leurs électrons, créant ainsi un plasma d’atomes ionisés et de radicaux libres capables de graver les couches. Le procédé de gravure ionique réactive peut être résumé par les étapes suivantes : - génération d’un plasma qui va engendrer la création d’espèces réactives, - diffusion des espèces réactives du plasma vers la surface de la couche à graver, - absorption des espèces réactives à la surface de la couche, - actions physique et chimique : réaction entre les espèces réactives et les éléments constituant la couche, - désorption des espèces volatiles créées, - diffusion dans l’environnement gazeux. De nombreux travaux portent sur la gravure ionique réactive de couches chalcogénures de différents systèmes : Te-As-Se [16, 37], Ge-Sb-Te [54-56], Ge-Sb-S [46, 47], Ge-Sb-Se [36], Ga-Ge-Sb-S (Se) [58-60], As-S [34, 35, 70, 71] avec, dans la majorité des cas, du tétrafluorométhane (CF4), du trifluorométhane (CHF3) et de l’hexafluorure de soufre (SF6) ou des mélanges de gaz réactifs constitués de CF4 ou CHF3 avec du dioxygène (O2) ou de l’argon (Ar). Dans ce cas, il y a en effet formation de radicaux F• qui forment des composés volatils avec les éléments de la couche. La RIE regroupe les avantages de la gravure physique et de la gravure chimique, c’està-dire allie le caractère anisotrope de la gravure physique et les vitesses de gravure élevées de la gravure chimique. La vitesse de gravure des couches As2S3 par voie physico-chimique sous 93 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux atmosphère CF4 + Ar (210 nm/min) est par exemple environ 10 fois plus importante que celle obtenue par voie inerte sous argon (20 nm/min) [71]. La sélectivité, dont on a dit qu’elle était le point limitant de la voie inerte, peut être augmentée par le choix des gaz ou du mélange de gaz réactifs. Par exemple, Yoon et al. ont montré que la sélectivité, lors de la gravure de couches Ge2Sb2Te5 vis-à-vis du substrat SiO2/Si était environ 5 fois plus élevée avec un mélange de gaz réactifs 60 % Cl2+ 40 % Ar qu’avec 60 % CHF3 + 40 % Ar [56]. En jouant sur les proportions de gaz dans le mélange réactif, on peut non seulement augmenter la sélectivité mais aussi faire varier les angles des marches gravées afin d’obtenir différents types de profil de gravure des couches. On peut par exemple citer les travaux de Feng et al. qui ont étudié l’effet du pourcentage d’argon dans le mélange CF4 + Ar sur le profil des motifs créés dans des couches Ge2Sb2Te5 [55]. Contrairement à ce qui a été observé pour les gravures inertes, l’angle peut être obtenu vertical même pour des profondeurs de gravure importantes. C’est ce qu’ont montré Vigreux et al. pour des couches de composition Te2As3Se5 gravées sous une atmosphère constituée de CF4 + O2 [16]. I.2. La méthode de gravure retenue I.2.1. Pourquoi la gravure physique réactive ? La méthode retenue doit répondre à tous les critères permettant la réalisation de guides d’onde pouvant fonctionner dans la gamme spectrale [6 – 20 µm] à savoir : une vitesse de gravure rapide, une profondeur de marche contrôlée pouvant dépasser les 10 µm selon le type de guides d’onde à réaliser, un profil de gravure de qualité et un bon état de surface après gravure. La sélectivité, notée s, de la gravure de la couche par rapport à celle de la résine de masquage, qui correspond à s = ecouche gravée / erésine gravée, doit être élevée (supérieure à 5) de sorte à pouvoir graver des couches sur des profondeurs dépassant les 10 µm, puisque l’on sait que ces profondeur de gravure sont limitées par l’épaisseur de résine déposée. Il est à noter que l’épaisseur de résine déposée est typiquement de l’ordre de 2 µm. 94 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Parmi les trois méthodes de gravure décrites précédemment, seule la gravure physique réactive répond à tous ces critères. En effet, la gravure chimique est isotrope ce qui ne permet pas d’obtenir des profils de gravure de qualité. La gravure physique inerte est non sélective : la profondeur de gravure par cette méthode est donc limitée par l’épaisseur de résine déposée lors de l’étape de photolithographie. Bien que ces deux méthodes présentent des avantages certains, elles n’ont pas été retenues pour notre étude. Nous avons opté pour la gravure physique réactive qui présente à la fois les avantages de la gravure chimique et ceux de la gravure physique inerte, à savoir : de grandes vitesses de gravure, une grande sélectivité, l’obtention de profils de gravure de qualité … I.2.2. La gravure ionique réactive pour les couches binaires Te-Ge Comme nous l’avons décrit précédemment, la gravure ionique réactive dont la mise en œuvre est similaire à la pulvérisation cathodique, est une technique de gravure physique à laquelle on rajoute un aspect chimique. En plus de réagir physiquement avec la surface du matériau à graver, le plasma réagit aussi chimiquement avec cette même surface afin de retirer les éléments qui la constituent. Pour cela le choix du gaz ou du mélange de gaz réactifs est primordial : il doit permettre de former des espèces volatiles avec les éléments constituant la couche. Notre travail porte sur la modification de la géométrie des couches du système Te-Ge. Le gaz ou mélange de gaz réactifs doit permettre de former des composés volatils à la fois avec le tellure et avec le germanium. Dans la majorité des travaux réalisés sur la gravure de couches chalcogénures [16, 34-37, 46, 47, 54, 56, 58-60, 70, 71], ce sont des gaz fluorés (CF4, CHF3 ou SF6) qui sont utilisés. Il est possible d'ajouter au gaz choisi du dioxygène afin de rendre le plasma plus réactif en augmentant le nombre de radicaux, ou de l’argon afin d’augmenter le caractère anisotrope de la gravure. Dans notre cas, le tellure et le germanium réagissent avec les ions fluorures pour former respectivement les composés volatils suivants : TeF6 (Teb = -37.6°C) et TeF4 (Teb = 195°C), GeF4 (Teb = -36,5°C) et GeF2 (Teb = 130°C). Le bâti de RIE - ICP (Inductively Coupled Plasma) CORIAL 200 IL (Figure C. 2) dont est équipé le service commun de microélectronique de l’Université Montpellier II a été utilisé pour toutes les expériences de gravure effectuées lors de ce travail. Ce bâti est équipé 95 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux de deux systèmes : un système à plaques parallèles classiques et un système de torche à plasma qui permet de générer un plasma en appliquant un fort champ magnétique en basse fréquence (LF). Dans ce type de bâti, l’ICP est utilisé comme source de haute densité en ions, ce qui augmente la vitesse de gravure, alors qu’une différence de potentiel en radio-fréquence (RF) est appliquée au substrat afin de créer un champ électrique directionnel près du substrat, ce qui tend à rendre la gravure anisotrope. Ce bâti est caractérisé par une puissance RF maximale de 200 W et une puissance LF maximale de 1000 W. Le flux des gaz réactifs est contrôlé par des contrôleurs de débits massiques et la pression de gaz dans l’enceinte est contrôlée par une valve à clapet. Les échantillons sont collés sur le porte-échantillon avec de l’huile à vide et refroidis par un transfert de fluide (hélium). ICP Matching network ICP Reactor Load-lock Matching Network HT/BT Power Supplies Throttle Valve Gas box TMP Lift Electronic Control RF Generator TMP Control ICP Generator Load-lock Valve Figure C. 2 : Schéma du bâti RIE-ICP Corial 200IL Le service commun de microélectronique de l’Université Montpellier II ne dispose que de cinq gaz utilisés pour différents procédés de gravure : CHF3, O2, Ar, H2 et CH4. Un mélange de trois gaz au maximum peut être utilisé durant une même gravure. Notre choix s’est porté vers un mélange de trifluorométhane (CHF3) comme gaz fluoré, de dioxygène (O2) et d’argon (Ar). 96 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux II. Établissement des conditions de gravure Dans un premier temps nous décrirons la photolithographie, étape préalable à la gravure des couches, qui consiste au masquage des couches afin de pouvoir reproduire un motif sur cette dernière durant la gravure. Nous discuterons ensuite les résultats obtenus lors de l’étude de l’influence de différents paramètres de gravure (choix des gaz, puissance RF, pression de l’enceinte…) sur la vitesse mais aussi sur la sélectivité de la gravure et le profil de marche obtenu. II.1. La photolithographie Cette opération consiste tout d’abord à déposer une résine photosensible en film mince uniforme, de grande qualité et fortement adhérent. Cette résine est ensuite insolée par rayonnement UV au travers d’un masque. Les motifs sont obtenus par dissolution sélective des zones exposées au rayonnement (Figure C. 3). Figure C. 3 : Principe de la photolithographie La résine utilisée dans notre cas est une résine positive S.18.18, étalée à l’aide d’une platine rotative dont la vitesse de rotation a été fixée à 4000 tr.min-1 pendant 30 s avec une 97 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux accélération de 5 s. Dans ces conditions, on s’attend à avoir une épaisseur de résine de l’ordre de 2,2 µm. La résine photosensible, visqueuse après son étalement sur l’échantillon, est alors durcie par un recuit de 1 min à 115°C sur une plaque chauffante de façon à éliminer toutes traces de solvant avant son insolation. Il est à noter que ce traitement permet également d’augmenter l’adhérence de la résine sur la couche mince mais aussi sa photosensibilité. Le temps et la température du recuit agissent directement sur la photosensibilité de la résine. L’échantillon recouvert de résine est installé dans la machine à insoler. L’échantillon est positionné avec précision par rapport au masque sous un microscope. Lorsque le positionnement est correct, l’échantillon est mis en contact avec le masque métallique par aspiration et est insolé pendant une durée de 4 secondes par une lampe UV à vapeur de mercure (λ = 350 - 500 nm ; 400 W). Il est à noter que pour toutes les expériences décrites dans les paragraphes suivants, le masque utilisé présente des bandes métalliques de 15 µm de large espacées de 400 µm. Après insolation, la résine est développée par immersion dans une solution basique adaptée à la résine choisie et appelée développeur (MF319 pur pour la résine S.18.18) pendant 1 min. L’échantillon est rincé à l’eau puis recuit à 115°C pendant 2 min sur plaque chauffante afin d’augmenter l’adhérence ainsi que la résistance de la résine à la gravure ultérieure. Les couches minces ainsi masquées peuvent être gravées. II.2. Influence des différents paramètres Les paramètres de gravure que nous pouvons faire varier sont : - la nature du gaz ou du mélange de gaz réactifs – dans le cadre de notre étude nous avons choisi trois gaz qui sont : CHF3, O2 et Ar ; - les débits de gaz (ou proportions) - le débit total de gaz a été fixé à 100 sccm pour toutes les gravures réalisées ; - la pression dans l’enceinte du réacteur de gravure ; - la puissance RF appliquée à l’électrode du bas ; - et la puissance LF. 98 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Dans un premier temps, nous avons décidé d’utiliser un mélange des gaz réactifs CHF3 et O2 : nous avons étudié l’influence du taux de dioxygène sur la vitesse de gravure mais aussi l’influence de la nature et de l’épaisseur du substrat. Afin de rendre la gravure plus anisotrope nous avons ensuite ajouté de l’argon au mélange de gaz réactifs. Nous avons étudié l’influence du taux d’argon, de la pression dans l’enceinte et de la puissance RF appliquée à l’électrode basse, sur la vitesse de gravure, la sélectivité par rapport à la résine de masquage (sélectivité que nous voulons supérieure à 5 afin de pouvoir graver des profondeurs de couche de plus de 10 µm), et le profil de gravure (angle et dimension). II.2.1. Mélange de gaz réactifs : CHF3 + O2 La première étape de notre travail a été de déterminer le taux de d’oxygène optimum dans le mélange de gaz réactifs CHF3 + O2 de sorte à avoir une vitesse de gravure relativement élevée, avec une sélectivité importante, mais une contamination à l’oxygène moindre. a. Détermination du taux d’O2 optimal Les premières gravures ont été réalisées sur des couches Te-Ge en faisant varier le pourcentage de dioxygène dans le mélange de gaz réactifs CHF3 + O2, et en fixant les autres paramètres : puissances RF = 50 W et LF = 600 W, et pression dans l’enceinte de 30 mTorr. La vitesse de gravure de la couche augmente avec le taux de dioxygène dans le mélange de gaz jusqu’à un pourcentage d’O2 de 17% approximativement. Ensuite, la vitesse de gravure décroît avec les taux de dioxygène élevés (Figure C. 4). Ce comportement a déjà été observé dans le cas de la gravure ionique réactive de films du système Te-As-Se sous une atmosphère constituée d’un mélange de gaz CF4 + O2 avec une vitesse de gravure maximale à 15% d’O2 [37] mais aussi pour les couches de composition As2Se3 [34, 70]. 99 Vitesse de gravure (nm/min) Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux 500 430 nm/min 400 300 200 100 0 5 10 15 20 25 30 35 Pourcentage d'O2(%) Figure C. 4 : Vitesse de gravure d’une couche Te-Ge en fonction du taux d’O2 dans le mélange de gaz réactif CHF3 + O2 Les pourcentages de dioxygène qui permettent d’obtenir des vitesses de gravure rapides sont compris entre 15 et 20 %. Ces résultats suggèrent que la concentration en radicaux F• est maximale entre 15 et 20 % d’oxygène dans le mélange de gaz, puisque ces radicaux sont les principaux agents de la gravure chimique dans le plasma. Les réactions entre l’oxygène et CHF3 (ou CF4) qui engendrent la formation de COF2, CO et CO2, sont responsables d’’une augmentation de la concentration de radicaux F• pour de faibles concentrations d’oxygène [72, 73]. À des taux d’oxygène élevés, la concentration en radicaux F• est diluée et la vitesse de gravure décroît. Prenant en compte l’évolution de la vitesse de gravure en fonction du taux d’oxygène présent dans le mélange, nous avons décidé de fixer le pourcentage de dioxygène à 15 % afin d’avoir une vitesse de gravure rapide de l’ordre de 430 nm/min tout en minimisant au maximum une éventuelle contamination de la surface de la couche par l’oxygène. Nous avons donc fixé les paramètres de gravure suivants : mélange de gaz 85 % CHF3 + 15 % O2, flux total de gaz à 100 sccm, puissances RF = 50 W et LF = 600 W, et pression dans l’enceinte de 30 mTorr. Nous avons ensuite effectué des tests sur des couches Te-Ge de compositions différentes et pour des temps de gravure différents. On peut voir que la profondeur de gravure en fonction du temps de gravure a un comportement quasi-linéaire quelle que soit la composition (Figure C. 5). En l’absence d’une étude systématique de l’effet de la composition sur la gravure, on constate que la profondeur de gravure est peu affectée par la composition de la couche (qui, il est vrai varie de 83,3 à 89.8 % atomique en tellure). Par 100 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux exemple, les couches de compositions Te83,3Ge16,7 et Te89,8Ge10,2 déposées sur un substrat de nature et d’épaisseur identiques ont été gravées pendant 1200 s mais sur des profondeurs différentes, respectivement 8,2 µm et 9,1 µm (Figure C. 5). Pour conclure définitivement quant à l’effet de la composition sur la profondeur de gravure, il aurait fallu vérifier que pour une même composition, la profondeur de gravure est obtenue de manière reproductible. Ce Profondeur de gravure (µm) travail n’a pas été fait dans ces conditions de gravure. 12 10 8 6 4 2 0 0 200 400 600 800 1000 1200 Temps de gravure (s) Figure C. 5 : Profondeur de gravure en fonction du temps de gravure pour des couches Te71,8Ge28,2 (carrés), Te83,3Ge16,7 (ronds) et Te89,8Ge10,2 (triangle). Nous avons ensuite étudié la sélectivité de la gravure de la couche par rapport à la gravure de la résine. La Figure C. 6 présente les résultats obtenus sur une même couche Sélectivité = ecouche gravée- erésine gravée Te83Ge17 de 12,4 µm d’épaisseur gravée pendant des temps de gravure différents. 15 14 13 12 11 10 9 8 7 6 5 200 400 600 800 1000 1200 Temps (s) Figure C. 6 : Sélectivité de la gravure ionique réactive avec un mélange de gaz réactif 85 % CHF3 + 15 % O2 en fonction du temps de gravure pour une couche Te83Ge17 de 12,4µm d’épaisseur. 101 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux La sélectivité de la gravure ionique réactive avec un mélange de gaz 85 % CHF3 + 15 % O2 par rapport à la résine de masquage est élevée mais diminue avec le temps de gravure. Néanmoins, elle est de l’ordre de 7 pour un temps de gravure de 1200 s ce qui nous a permis de graver la couche sur une profondeur de 11,6 µm. Après différentes gravures, une analyse en composition a révélé la présence d’oxygène à la surface de la couche. Le taux d’oxygène augmente avec le temps de gravure : cela est prévisible compte tenu de l’atmosphère de gravure utilisée (présence d’O2 dans le mélange de gaz réactifs). Par exemple le taux d’oxygène est de l’ordre de 0,45 % massique pour un temps de 255 s contre 1,7 % pour un temps de gravure de 560 s. Une des solutions qui permettrait d’éviter la contamination à l’oxygène serait de procéder à une gravure physique inerte sous atmosphère d’argon pendant quelques minutes après la gravure ionique réactive. b. Influence du substrat : nature et épaisseur Le dépôt des couches Te-Ge est fait sur des substrats de natures différentes afin de pouvoir réaliser différentes caractérisations (par exemple, les couches déposées sur As2Se3 servent à caractériser la couche en terme d’indice de réfraction par la méthode des m-lines alors que celles déposées sur lame de microscope servent à la détermination de la composition et de l’épaisseur de la couche entre autres). Nous avons donc vérifié l’influence de la nature du substrat mais aussi de son épaisseur sur la vitesse de gravure des couches Te-Ge. Ces tests ont été réalisés sur des couches de même nature et de compositions similaires (Tableau C. 1). Substrat Lame de microscope Épaisseur du substrat (mm) Vitesse de gravure (nm/min) 0,9 224 4 0,3 227 3 0,8 261 9 1 328 2 3 343 7 Si As2Se3 Te75Ge15Ga10 1 475 26 2 579 29 Tableau C. 1 : Vitesses de gravure des couches Te-Ge obtenues pour des substrats de nature et d’épaisseur différentes 102 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux L’épaisseur du substrat est un paramètre important à prendre en compte puisque pour un même substrat, la vitesse de gravure est différente selon son épaisseur. Par exemple, la vitesse de gravure d’une couche Te-Ge déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 de 2 mm d’épaisseur est 1,2 fois plus rapide que celle d’une même couche déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 d’1 mm d’épaisseur (Tableau C. 1). Cela peut s’expliquer par le fait qu’en augmentant l’épaisseur du substrat, on diminue le libre parcours moyen des particules chargées ce qui entraine une augmentation de la vitesse de gravure. La nature du substrat a une influence encore plus importante sur la vitesse de gravure. Les vitesses de gravure de couches déposées sur des substrats Te75Ge15Ga10 et As2Se3 d’1 mm d’épaisseur sont différentes : celle obtenue avec le substrat Te75Ge15Ga10 est environ 1,4 fois plus rapide que celle obtenue avec le substrat As2Se3. Dans la suite de notre travail, les expériences de gravure ont été réalisées sur des couches déposées sur des substrats identiques (nature et épaisseur) afin de pouvoir comparer les différents résultats obtenus. II.2.2. Mélange de gaz réactifs : CHF3 + O2 + Ar Après avoir étudié la gravure ionique réactive des couches Te-Ge avec un mélange de gaz réactifs 85 % CHF3/15 % O2, nous avons décidé de rajouter de l’argon au mélange de gaz afin d’augmenter le caractère anisotrope de la gravure. a. Influence du taux d’argon La première étape dans l’étude de la gravure ionique réactive des couches Te-Ge avec un mélange de gaz CHF3/O2/Ar a été de déterminer le taux d’argon approprié pour avoir une vitesse de gravure rapide. Nous avons fixé le rapport de gaz CHF3/O2 à 85/15, le flux gazeux total à 100 sccm, la pression dans l’enceinte à 30 mTorr, les puissances RF et LF respectivement à 50 W et 600 W. Nous avons étudié les effets de l’introduction d’argon dans le mélange de gaz réactifs sur trois couches Te-Ge de compositions et d’épaisseurs différentes (Figure C. 7). 103 Vitesse de gravure du film (nm/min) Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Figure C. 7 : Vitesse de gravure de couche en fonction du taux d’argon dans le mélange Ar/CHF3/O2. Le rapport CHF3/O2 est constant et fixé à 85/15. Les carrés, les ronds et les triangles correspondent aux expériences réalisées, respectivement, sur la couche Te80,7Ge19,3 d’épaisseur 10,9 µm, sur la couche Te84,1Ge15,9 d’épaisseur 11,2 µm et sur la couche Te84,3Ge15,7 d’épaisseur 13,3 µm. Quelles que soient l’épaisseur et la composition de la couche gravée, la vitesse de gravure est quasi-constante pour un pourcentage d’argon inférieur à 20 % mais diminue lorsque l’on augmente le taux d’argon dans l’enceinte. Les vitesses de gravure les plus élevées sont obtenues pour des pourcentages d’argon compris entre 0 et 40 %. L’augmentation de l’argon dans le mélange de gaz CHF3/O2 est accompagnée d’une diminution du taux de CHF3 et par conséquent d’une diminution du taux de radicaux libres fluorés. La diminution de la vitesse de gravure quand le taux d’argon augmente confirme que la gravure ionique assistée est effective pour les films Te-Ge, avec la formation de composés volatils tels que TeF4, TeF6, GeF2 et GeF4 pendant la procédure. Des résultats similaires ont été reportés dans la littérature [55]. La rugosité de la couche Te84,3Ge15,7 d’épaisseur 13,3 µm après trois gravures où le taux d’argon dans le mélange de gaz réactifs diffère, a été mesurée afin de voir l’influence du taux d’argon sur la morphologie de la couche (Figure C. 8). Il est à noter que la rugosité de la couche avant gravure est de l’ordre de 5 nm. 104 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Figure C. 8 : Images AFM (5 x 5 µm²) de la couche Te84,3Ge15,7 d’épaisseur 13,3 µm après gravure en utilisant un mélange de gaz de : a) 0 % Ar + 85 % CHF3 + 15% O2, egravée = 7,7µm ; b) 20 % Ar + 68 % CHF3 + 12 % O2 egravée = 7,4µm ; c) 40 % Ar + 51 % CHF3 + 9 % O2, egravée = 8,8µm . La rugosité de la couche a donc augmenté après la gravure. Par contre, il ne semble pas y avoir d’effet notable du pourcentage d’argon (en tous les cas tant qu’il est compris entre 0 et 40 %) sur la rugosité de la couche qui reste de l’ordre de 40 nm. Les images MEB des marches obtenues après gravure d’une couche de composition Te84,3Ge15,7 et d’épaisseur 13,3 µm, sous différents taux d’argon dans le mélange de gaz réactifs (0 % Ar, 20 % Ar et 40 % Ar) révèlent qu’il n’y pas d’influence du taux d’argon sur l’angle de gravure (Figure C. 9). Cet angle est mesuré lors de l’analyse en microscopie électronique à balayage (FEI). Il est de l’ordre de 82,2° 0,3°. En revanche il y a un effet de l’argon sur les dimensions des marches. En effet, comme on peut le voir sur la Figure C. 9, les dimensions des marches (à la base comme sur la partie supérieure) sont différentes selon le pourcentage d’argon utilisé pour la gravure. Si l’on se souvient que le masque utilisé lors de l’étape de photolithographie était composé de bandes métalliques de 15 µm de large, on en conclut qu’en l’absence d’argon, la gravure latérale est importante, alors qu’elle diminue avec l’introduction d’argon. En effet l’image MEB de la Figure C. 9c révèle un motif qui ne fait plus que 11,9 µm de large à la base après gravure sans argon, alors qu’il est caractérisé par une largeur de 14,3 µm sous un mélange de gaz contenant 40 % d’argon. Ces résultats confirment que l’introduction d’argon dans le mélange CHF3 + O2 augmente le caractère anisotrope de la gravure. 105 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Figure C. 9 : Images MEB des marches obtenues après gravure de la couche Te84,3Ge15,7 d’épaisseur 13,3 µm en utilisant un mélange de gaz de : a) 0 % Ar + 85 % CHF3 + 15% O2 ; b) 20 % Ar + 68 % CHF3 + 12 % O2 ; c) 40 % Ar + 51 % CHF3 + 9 % O2. La valeur de la sélectivité a été contrôlée : elle est de l’ordre de 6 ± 0.6 pour les différents taux d’argon testés. Cela est un résultat satisfaisant puisque la sélectivité s’avère être élevée quel que soit le taux d’argon (compris entre 0 et 40 %) dans le mélange. Ce résultat confirme qu’il est possible de graver des couches Te-Ge sur des profondeurs dépassant les 10 µm sans que l’on soit limitée par l’épaisseur de résine. b. Influence de la pression de travail Nous avons étudié l’influence de la pression dans l’enceinte sur la gravure des couches Te-Ge. Nous avons donc fixé les paramètres suivants : un rapport Ar/CHF3/O2 de 30/59,5/10,5 ; les puissances RF et LF respectivement à 50 W et 600 W. Nous avons fait varier la pression dans l’enceinte de 10 à 40 mTorr. La vitesse de gravure augmente avec la Vitesse de gravure du film (nm/min) pression comme le montre la Figure C. 10. Pression de travail (m Torr) Figure C. 10 : Vitesse de gravure en fonction de la pression dans l’enceinte. Les différentes gravures ont été réalisées sur une couche Te83,0Ge17,0 d’épaisseur 14,6 µm. 106 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Un résultat similaire pour une pression dans l’enceinte inférieure à 80 mTorr a été observé par Feng et al. [55]. Pour de faibles pressions, l’augmentation de la vitesse de gravure avec la pression peut être attribuée à une augmentation des radicaux accompagnée d’une diminution du libre parcours moyen des particules chargées, et par conséquent à une augmentation de la contribution « chimique » de la gravure. La rugosité de la couche après gravure ne semble pas être affectée par la pression dans l’enceinte : elle est de l’ordre de 40 nm quelle que soit la pression appliquée durant la gravure. Comme précédemment nous avons vérifié l’influence de la pression dans l’enceinte sur les profils de gravure obtenus (angles et dimensions) sur une couche de composition Te83,0Ge17,0 et d’épaisseur 14,6 µm (Figure C. 11). Figure C. 11 : Images MEB des profils de gravure obtenus sur la couche Te83,0Ge17,0 d’épaisseur 14,6 µm avec différentes pressions dans l’enceinte : a) 20 mTorr ; b) 30 mTorr et c) 40 mTorr. Il s’avère que l’angle de gravure diminue avec la pression : il est respectivement de 84,7°, 82,4° et 81,0° pour des pressions de 20 mTorr, 30 mTorr et 40 mTorr. Les dimensions des marches obtenues, que ce soit à la base ou sur la partie supérieure, sont aussi affectées par la pression dans l’enceinte. Elles diminuent avec la pression (Figure C. 11). Ceci est cohérent avec l’augmentation de la contribution « chimique » et donc isotrope de la gravure au détriment de la contribution « physique » et donc anisotrope de la gravure. L’influence de la pression dans l’enceinte sur la valeur de la sélectivité a également été contrôlée. La sélectivité reste supérieure à 5 quelle que soit la pression fixée dans l’enceinte de gravure ce qui répond à nos attentes. 107 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux c. Influence de la puissance RF Nous avons également étudié l’influence de la puissance RF appliquée à l’électrode inférieure sur la gravure des couches Te-Ge. Nous avons donc fixé les paramètres suivants : un rapport Ar/CHF3/O2 de 30/59,5/10,5 ; la pression dans l’enceinte à 30 mTorr ; la puissance LF à 600 W. Nous avons fait varier la puissance RF de 20 à 150 W et nous avons étudié son influence sur la vitesse de gravure de la couche, sur le profil des marches obtenues après gravure et sur la sélectivité. Nous reportons sur la Figure C. 12 les résultats obtenus sur deux couches TeGe de composition et d’épaisseur différentes. Dans un premier temps la vitesse de gravure augmente avec la puissance RF puis se stabilise voire diminue pour des puissances RF supérieures à 100 W. Les vitesses de gravure les plus élevées sont obtenues pour des puissances RF comprises entre 80 et 100 W. Ce résultat peut être expliqué par l’augmentation de la concentration en radicaux fluorés et par l’augmentation de l’énergie du bombardement ionique. Un Vitesse de gravure du film (nm/min) comportement similaire a été décrit dans la littérature [55]. Puissance RF (W) Figure C. 12 : Vitesse de gravure de couche en fonction de la puissance RF appliquée à l’électrode inférieure pendant la gravure. Les carrés et les ronds correspondent aux expériences réalisées, respectivement, sur la couche Te80,5Ge19,5 d’épaisseur 11,9 µm et sur la couche Te82,0Ge18,0 d’épaisseur 8,7 µm déposées sur un même substrat (nature et épaisseur). L’angle de gravure diminue lorsque l’on augmente la puissance RF : ceci est dû à la diminution de la largeur supérieure de la marche alors que la base de la marche est quasisimilaire quelle que soit la puissance appliquée (Figure C. 13). La diminution de l’angle de 108 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux gravure et l’augmentation de la gravure latérale sont des conséquences de l’augmentation de l’activité « chimique » et donc isotrope de la gravure. Figure C. 13 : Images MEB des profils de gravure obtenus sur la couche Te80,5Ge19,5 d’épaisseur 11,9 µm avec différentes puissances RF : a) 50 W ; b) 70 W et c) 90 W. Nous avons vérifié la valeur de la sélectivité pour trois puissances RF (50 W, 70 W et 90 W) appliquées lors de la gravure de la couche Te80,5Ge19,5 d’épaisseur 11,9 µm. La sélectivité est supérieure à 5 pour des puissances comprises entre 50 et 70 W mais elle est de l’ordre de 4 pour une puissance de 90 W. II.3. Choix des conditions de gravure Comme nous le verrons dans la chapitre D, les guides d’onde peuvent être de différents types. Dans certains cas, la gravure de la couche de cœur doit être partielle ; dans d’autres cas, elle doit être totale. Les profondeurs de gravure qu’il faudra produire pourront donc varier considérablement d’un guide à l’autre. Par ailleurs, dans certains types de guides, la couche de cœur gravée doit être recouverte d’un superstrat. Dans ce cas, le recouvrement se fera d’autant plus facilement que les profils auront des angles faibles. L’étude de l’influence des différents paramètres sur la vitesse de gravure, la sélectivité et le profil de gravure détaillée dans les paragraphes précédents nous a permis de voir que nous pouvions modifier les dimensions des marches mais aussi les angles de gravure en changeant de manière adaptée les différents paramètres de gravure. Grâce à cette étude, nous pouvons choisir les conditions de gravure en fonction du motif que nous souhaitons réaliser. Si l’on veut réaliser un guide d’onde avec des angles quasi-verticaux, les paramètres suivants peuvent par exemple être fixés : le mélange de gaz réactif CHF3 + O2 + Ar dans les 109 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux proportions respectives 59,5/10,5/30, le flux total de gaz fixé à 100 sccm, la pression dans l’enceinte fixée à 30 mTorr, les puissances RF et LF fixées à 50 W et 600 W respectivement. Pour valider la pertinence de ces paramètres de gravure, nous les avons appliqués à la gravure d’une couche de composition Te84,1Ge15,9 et d’épaisseur 11,2 µm. Après 16 minutes de gravure, des motifs de 6,9 µm de profondeur, caractérisés par un bon état de surface (Figure C. 14a), par un angle de 82,4 ° (Figure C. 14b) et par une bonne résolution (Figure C. 14c) ont été obtenus. Figure C. 14 : Images MEB obtenues pour la couche Te84,1Ge15,9 d’épaisseur 11,2 µm après une gravure de 6,9 µm de profondeur en utilisant un mélange de gaz réactif CHF3 + O2 + Ar dans les proportions suivantes 59,5/10,5/30 : a) vue du dessus d’une marche, b) marche observée après clivage, c) vue du dessus d’un motif original qui montre la bonne qualité en terme de résolution de la gravure ionique réactive. 110 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Avec ces mêmes conditions de gravure, mais en utilisant des temps de gravure différents (12 minutes et 32 minutes), on peut obtenir des motifs de profondeur variable (4,3 µm ± 0,2 µm et 11,1 µm ± 0,2 µm, respectivement), tout en maintenant des angles quasiment verticaux et une qualité tout à fait satisfaisante, comme illustré sur la Figure C. 15. 83,7° 4,3 µm 11,1 µm 84,7° 12,1 µm 12,5 µm Figure C. 15 : Images MEB de deux couches gravées dans les mêmes conditions : proportions CHF3/O2/Ar respectivement 59,5/10,5/30, flux total gazeux 100 sccm, pression dans l’enceinte de 30 mTorr, puissances RF et LF respectives de 50 W et 600 W, et temps de gravure de a) 12 min pour la couche Te81,4Ge18,6 d’épaisseur 12 µm et b) 30 min pour la couche Te82,5Ge17,5 d’épaisseur 12,5 µm. Les résultats obtenus confirment que les paramètres choisis sont adaptés pour la gravure de couches Te-Ge visant l’obtention de marches aux angles quasi-verticaux quelle que soit la profondeur de gravure visée. En revanche si l’on veut des guides dont les angles de marche soient inférieurs à ceux obtenus précédemment, en vue d’un recouvrement par un superstrat notamment, nous devrons modifier les paramètres de gravure. Comme nous l’avons vu dans la partie précédente (II.2), pour diminuer l’angle de gravure il faut soit diminuer la proportion d’argon, soit augmenter la pression dans l’enceinte et/ou soit augmenter la puissance RF appliquée à l’électrode du bas. En jouant sur ces différents paramètres, on peut réaliser des marches dont les angles de gravure différents. De premières expériences ont été réalisées sur trois couches différentes mais de composition similaire (81,4 % ±0,1 % at. en Te) dans les conditions décrites dans le Tableau C. 2. Le flux total de gaz a été fixé à 100 sccm et la puissance LF à 600 W. Pour les trois expériences, le temps de gravure est de 25 min. Ces gravures ont conduit aux résultats présentés sur la Figure C. 16. 111 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Tableau C. 2 : Tableau récapitulatif des différents paramètres de gravure appliqués aux trois couches suivantes : a) la couche Te81,3Ge18,7, b) la couche Te81,4Ge18,6, c) la couche Te81,5Ge18,5, pour l’obtention de marche aux angles de gravure faibles. 71° a 66° b 61° c Figure C. 16 : Marches obtenues après gravures ioniques réactives de 25 min des couches TeGe suivantes : a) la couche Te81,3Ge18,7, b) la couche Te81,4Ge18,6, c) la couche Te81,5Ge18,5, avec des paramètres différents Nous avons réussi à créer des marches dont les angles de gravure atteignent 61° mais ayant des profils « atypiques ». Il semble que toute la résine de masquage ait été entièrement gravée (dû à un temps de gravure trop long) ce qui a engendré la forme « quasi-triangulaire » des deux dernières couches. Cependant, cela prouve que le choix de paramètres de gravure judicieux permet de varier considérablement les profils de gravure obtenus. 112 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux Conclusion Dans ce chapitre, nous nous sommes intéressés à la modification de la géométrie de couches Te-Ge déposées par co-évaporation thermique. La première étape de ce travail a été de choisir la méthode de gravure la mieux adaptée à la gravure des couches tellurures, parmi celles évoquées dans la littérature pour les couches chalcogénures (gravure chimique, gravure physique inerte et gravure ionique réactive). Notre choix s’est orienté vers la gravure ionique réactive avec un mélange de gaz réactifs constitué de CHF3, O2 et Ar. Cette technique regroupe les avantages de la gravure chimique et de la gravure physique inerte à savoir : une sélectivité et des vitesses de gravure élevées, un caractère anisotrope qui limite la gravure latérale. Nous avons ensuite étudié l’influence des différents paramètres de gravure (proportion des gaz réactifs utilisés, puissance RF, pression dans l’enceinte) sur les vitesses de gravure, sur la sélectivité et sur le profil des marches obtenues. Nous avons enfin discuté du choix des conditions de gravure, selon le profil de marche souhaité. A l’issue de cette étude, nous avons montré que nous étions capables : (i) de graver des couches Te-Ge sur des profondeurs de gravure dépassant 10 µm, (ii) et de modifier le profil des marches obtenues en adaptant les différents paramètres de gravure. La suite de notre travail va consister à fabriquer différents types de guides d’onde en utilisant tous les résultats acquis en termes de dépôt et de gravure de couche. Ce travail est présenté dans le chapitre suivant (Chapitre D). 113 Chapitre C : Modification de la géométrie des couches Te-Ge pour la réalisation de guides canaux 114 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Chapitre D Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge 115 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge INTRODUCTION Dimensionnement des guides d’onde I. 117 118 I.1. Dimensions optimisées 118 I.2. Marge de tolérance 122 I.2.1. Au niveau des dimensions 122 I.2.2. Au niveau de l’angle 123 Fabrication des guides d’onde II. 125 II.1. La préparation du substrat 125 II.2. Le dépôt de la couche de cœur 127 II.2.1. Quelle composition ? 127 II.2.2. Quelle épaisseur ? 131 II.3. 131 II.3.1. Réalisation du masque en vue de la réalisation des différentes structures guidantes 132 II.3.2. Gravure partielle pour la fabrication des structures chargées (RIB) 133 II.3.3. Gravure totale pour la fabrication des structures rubans (STRIP) 134 II.4. III. La gravure de la couche de cœur Le dépôt du superstrat pour les structures rubans 137 II.4.1. Quelle composition ? 137 II.4.2. Quelle épaisseur ? 137 II.4.3. Qualité du recouvrement 137 Caractérisation optique des guides d’onde III.1. Préparation des faces d’entrée et de sortie du guide 140 140 III.1.1. Le clivage 140 III.1.2. Le polissage 141 III.2. Caractérisation optique des guides d’onde réalisés 145 III.2.1. Transmission dans les guides planaires 145 III.2.2. Guidage dans les structures chargées 148 III.2.3. Filtrage modal 150 CONCLUSION 152 116 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Introduction La réalisation des guides d’onde entièrement à base de verres tellurures consiste à déposer une couche épaisse de verres tellurures sur un substrat du système Te-Ge-Ga, à modifier la géométrie de la couche de cœur et à déposer éventuellement un superstrat. La dernière étape de cette réalisation concerne la préparation des faces d’entrée et de sortie des guides d’onde de sorte à les caractériser. Nous avons démontré dans les chapitres B et C que nous étions capables : (i) de déposer des couches du système Te-Ge d’épaisseurs et d’indices de réfraction variables, qui sont adhérentes au substrat, homogènes et denses ; et (ii) de modifier de manière satisfaisante la géométrie de ces couches par gravure physique réactive sur des profondeurs de gravure pouvant dépasser les 10 µm. Maintenant, nous devons être capables d’injecter la lumière dans les guides pour pouvoir les caractériser. Deux techniques peuvent être envisagées pour préparer les faces d’entrée et de sortie du guide d’onde : le clivage et le polissage. Cette étape de préparation est une étape cruciale dans la réalisation des guides d’onde et demande un gros effort technologique pour arriver à un résultat satisfaisant. Les tests optiques seront ensuite effectués au LEMTA à Nancy et à Thales Alenia Space à Cannes. Dans la première partie de ce chapitre, nous rappellerons les types de guides d’onde retenus (guides chargés et guides rubans). Nous présenterons le dimensionnement de ces guides ainsi que les différentes tolérances tant au niveau des dimensions que des angles de gravure. Dans une deuxième partie, nous décrirons la fabrication de ces guides d'onde en commençant par le dépôt de la couche de cœur puis la gravure de cette couche. Nous évoquerons le problème de recouvrement dans le cas de guides de structure ruban (STRIP). Enfin, dans une troisième partie, nous décrirons la préparation des faces d’entrée et de sortie des guides et présenterons les premiers résultats en termes de caractérisations optiques des structures guidantes réalisées. 117 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge I. Dimensionnement des guides d’onde Les guides d’onde à réaliser doivent avoir des dimensions appropriées pour pouvoir fonctionner dans la gamme de longueurs d’onde imposée par une application donnée. Dans notre cas, la gamme de longueurs d’onde dans laquelle doivent fonctionner les guides se trouve dans l’infrarouge moyen et est comprise entre 6 et 20 µm. L’IMEP (Institut de Microélectronique Électromagnétisme et Photonique de Grenoble), qui participe également au projet Darwin, a fourni les designs des différents guides d’onde à réaliser. I.1. Dimensions optimisées La réalisation d’un seul guide d’onde pour toute la gamme spectrale est difficile : la gamme spectrale a donc été divisée en deux fenêtres spectrales [6–11 µm] et [10–20 µm]. Deux structures de guides peuvent également être envisagées : la structure chargée (RIB), où la couche de cœur est partiellement gravée, et la structure ruban (STRIP) où la couche de cœur est totalement gravée et recouverte d’un superstrat de même indice que le substrat (Figure D. 1) Figure D. 1 : Schéma des différents types de guides chargés (RIB) ou rubans (STRIP) à réaliser selon la bande spectrale visée [6 -11 µm] et [10 – 20 µm], constitués d'un substrat Te75Ge15Ga10 d'indice de réfraction de 3,399 (à = 10,6 µm) et d'une couche du système Te-Ge caractérisée par un indice de réfraction de 3,440 (à = 10,6 µm). 118 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Il est à noter que pour les simulations (comme celles présentées ci-dessous) une différence de ∆n = 4.10-2 entre la couche de cœur et le substrat (et superstrat pour les structures rubans) a été choisie. Cette différence d’indice a été maintenue constante quelle que soit la longueur d’onde. Cela suppose que les dispersions des indices de réfraction sont les mêmes pour les différentes parties (substrat, couche et éventuellement superstrat), ce qui n’a pu à l’heure actuelle être vérifié expérimentalement. Par contre, comme on peut le voir sur la Figure D.1, les dimensions des guides changent d’une structure de guide à l’autre mais aussi d’une bande spectrale à l’autre. Elles ont été définies de sorte à obtenir un guidage monomode (i) et une bonne efficacité de couplage (ii) sur toute la bande spectrale étudiée ([6-11 µm] ou [10-20 µm]) : (i) Concernant l’obtention d’un guidage monomode, la Figure D.2 présente les résultats obtenus à = 10 µm pour un guide chargé pour la bande spectrale [6–11 µm], lorsque ses dimensions sont en accord avec celles de la Figure D. 1, c’est-à-dire une épaisseur de couche de 12 µm et une profondeur de gravure de 4,5 µm. Le guidage est monomode : seul le mode (0 0) est présent. Figure D. 2 : Exemple de simulation d'un guide d'onde chargé pour la bande spectrale [6–11 µm] avec les dimensions optimisées: épaisseur de la couche de cœur de 12 µm et une profondeur de gravure 4,5 µm. Le guidage de la lumière est monomode. Si maintenant on modifie les dimensions dans une certaine mesure, d’autres modes guidés viennent s’ajouter au mode fondamental (0 0), ce que l’on souhaite éviter : - par exemple si l’on choisit une profondeur de gravure de 8 µm au lieu de 4,5 µm (toujours avec une couche de cœur d'épaisseur 12 µm) : le mode (0 1) s’ajoute au (0 0) (Figure D. 3) ; 119 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Figure D. 3 : Exemple de simulation d'un guide d'onde chargé pour la bande spectrale [6–11 µm] avec des dimensions différentes de celles optimisées: épaisseur de la couche de cœur de 12 µm et une profondeur de gravure 8 µm. Le guidage de la lumière est bimode : le mode (0 1) représenté ici s’ajoute au mode fondamental (0 0). - et si l’on choisit une épaisseur de couche de cœur de 20 µm au lieu de 12 µm (en gardant une profondeur de gravure de 4,5 µm), le mode (1 0) s’ajoute au (0 0) (Figure D. 4). Figure D. 4 : Exemple de simulation d'un guide d'onde chargé pour la bande spectrale [6–11 µm] avec des dimensions différentes de celles optimisées: épaisseur de la couche de cœur de 20 µm et une profondeur de gravure 4,5 µm. Le guidage de la lumière est bimode : le mode (1 0) vient s’ajouter au mode fondamental (0 0). (ii) Concernant l'efficacité de couplage des guides d'onde, elle a été calculée pour les différentes structures présentées sur la Figure D. 1 (structures chargées et rubans, pour les deux bandes spectrales [6–11 µm] et [10–20 µm]). Les résultats obtenus sont présentés sur les figures suivantes (Figure D. 5 pour les guides chargés et Figure D. 6 pour les guides rubans). 120 Efficacité de couplage (%) Efficacité de couplage (%) Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Longueur d’onde (µm) Longueur d’onde (µm) Efficacité de couplage (%) Efficacité de couplage (%) Figure D. 5 : Efficacité de couplage en fonction de la longueur d'onde, pour les guides chargés fonctionnant dans les deux bandes spectrales: à gauche pour la bande [6–11 µm]; à droite pour la bande [10–20 µm]. Longueur d’onde (µm) Longueur d’onde (µm) Figure D. 6 : Efficacité de couplage en fonction de la longueur d'onde, pour les guides ruban fonctionnant dans les deux bandes spectrales: à gauche pour la bande [6–11 µm]; à droite pour la bande [10–20 µm]. Dans le cas des guides chargés, l'efficacité de couplage diminue avec l'augmentation de la longueur d'onde mais reste néanmoins supérieure à 50%. Dans le cas des guides rubans, contrairement aux guides chargés, l'efficacité de couplage augmente avec la longueur d'onde. Et elle est également toujours supérieure à 50%. Les dimensions des guides présentés dans la Figure D. 1 ont donc été optimisées de sorte à obtenir non seulement un guidage monomode sur toute la gamme de longueur d’onde étudiée, mais également une efficacité de couplage satisfaisante. Bien entendu, il sera difficile par l’expérience d’obtenir une telle précision sur ces dimensions. Aussi était-il important d’étudier la marge de tolérance sur chacune des grandeurs. 121 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge I.2. Marge de tolérance Dans cette partie, nous allons présenter les tolérances au niveau des dimensions théoriques données dans le paragraphe précédent. Nous présenterons également les tolérances au niveau des angles des marches. I.2.1. Au niveau des dimensions La tolérance au niveau des dimensions a été estimée de sorte à garder un guidage monomode de la lumière et une bonne efficacité de couplage sur toute la bande spectrale étudiée. A titre d’exemple, la Figure D. 7 montre l’effet d’un écart de la profondeur de gravure par rapport à la profondeur de gravure théorique pour un guide d’onde chargé pour la bande spectrale [6-11 µm] (Figure D. 7.a) et pour la bande spectrale [10-20 µm] (Figure D. 7.b). Il est à noter qu’encore une fois la différence d’indices de réfraction entre le substrat et la Efficacité de couplage (%) Efficacité de couplage (%) couche a été fixée à n = 4.10-2. Écart de profondeur de gravure (µm) Écart de profondeur de gravure (µm) Figure D. 7 : Influence de la profondeur de gravure de la couche de cœur sur l’efficacité de couplage dans le cas des structures chargées : à gauche pour la bande spectrale [6-11 µm] et à droite pour la bande spectrale [10-20 µm]. Sur les courbes présentées sur la Figure D. 7, seuls les points correspondant à l’obtention d’un guidage monomode ont été retenus. Pour des déviations trop importantes, des modes supplémentaires viennent en effet s’ajouter au mode fondamental. Ceci a permis de déterminer une tolérance sur la profondeur de gravure de ± 0,15 µm pour la bande spectrale [6 – 11 µm] et de ± 0,30 µm pour la bande spectrale [10 – 20 µm]. 122 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Le même travail a été effectué pour l’épaisseur de la couche de cœur, la largeur des guides et l’indice de réfraction du superstrat (dans le cas des guides rubans). Les résultats sont résumés dans la Figure D. 8. Figure D. 8 : Tolérances sur les dimensions de sorte à avoir un guidage monomode et une bonne efficacité de couplage dans les différents guides d'onde. I.2.2. Au niveau de l’angle L'angle de gravure de la couche de cœur peut également avoir un effet sur l'efficacité de couplage. Une tolérance sur la valeur de ces angles de gravure a été estimée de sorte à avoir une efficacité de couplage satisfaisante sur toute la largeur de la bande spectrale correspondante. Comme on peut le voir sur la Figure D. 9, dans le cas des guides d'onde chargés où les angles de gravure doivent être quasi-verticaux, l'efficacité de couplage reste constante quelle que soit la valeur de l'angle de gravure de la couche de cœur comprise entre 70° et 90° pour les deux longueurs d'onde extrêmes: 6 µm et 11 µm pour la bande spectrale [6-11 µm] et 10 et 20 µm pour la bande spectrale [10-20 µm]. La tolérance a donc été estimée à une valeur d'angle de 80° ± 10°. 123 Efficacité de couplage (%) Efficacité de couplage (%) Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Angle de marche ( ) Angle de marche ( ) Figure D. 9 : Tolérances sur les angles de gravure de la couche de cœur de sorte à avoir une bonne efficacité de couplage: à gauche pour les guides chargés fonctionnant dans la bande spectrale [6–11 µm]; à droite pour les guides chargés fonctionnant dans la bande spectrale [10– 20 µm] Dans le cas des guides rubans où les angles de gravure doivent avoir des valeurs plus faibles que pour les guides chargés (<70°) à cause des problèmes de recouvrement, le guidage n’est plus monomode aux grandes longueurs d’onde (11 µm pour la première bande spectrale et 20 µm pour la deuxième bande spectrale) pour des angles inférieurs à 70 °, comme l’illustre la Figure D. 10. Par ailleurs l'efficacité de couplage n’est plus satisfaisante entre 70 et 80 ° pour la longueur d’onde de 11 µm dans le cas de la structure de la première bande spectrale [6-11 µm]. Aussi la tolérance a été estimée à une valeur d'angle de 85° ± 5° pour la structure Apparition de modes guidés supplémentaires Angle de marche ( ) Efficacité de couplage (%) Efficacité de couplage (%) ruban [6-11 µm] et à une valeur d’angle de 80° ± 10° pour la structure ruban [10-20 µm]. Apparition de modes guidés supplémentaires Angle de marche ( ) Figure D. 10 : Tolérances sur les angles de gravure de la couche de cœur de sorte à avoir une bonne efficacité de couplage: à gauche pour les guides rubans fonctionnant dans la bande spectrale [6–11 µm]; à droite pour les guides rubans fonctionnant dans la bande spectrale [10–20 µm] 124 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge II. Fabrication des guides d’onde Dans cette partie, nous allons présenter la fabrication des guides d'onde : la préparation du substrat (polissage de la surface), le dépôt et la gravure de la couche de cœur, et le dépôt éventuel d'un superstrat. Concernant le dépôt de la couche de cœur, nous nous sommes basés sur les résultats présentés dans le chapitre B. Pour ce qui est de la modification de sa géométrie par gravure physique réactive, nous nous sommes appuyés sur l’étude décrite dans le chapitre C. II.1. La préparation du substrat La première étape dans la fabrication d'un guide d'onde concerne la préparation du substrat. Cette préparation consiste à polir optiquement sa surface afin d'augmenter l'adhérence et la qualité de la couche qui sera déposée dessus. La procédure de polissage que nous avons établie pour nos matériaux est présentée sur la Figure D. 11. Il est à noter que le polissage des surfaces a été réalisé par T. Billeton, opticien de précision au sein de l’Institut Galilée (Villetaneuse). Cette méthode a spécialement été mise en œuvre pour les verres chalcogénures et plus particulièrement les substrats Te75Ge15Ga10. Ces matériaux peuvent s’avérer friables, c’est pourquoi nous réalisons des biseaux sur la surface à polir. Cela évite que des fragments de matériaux ne se détachent pendant le processus de polissage et ne viennent rayer la surface des échantillons. Le choix de la cire arcanson est justifié par le fait qu’elle fond à une température de l’ordre de 90 °C, température qui n’a pas d’effet sur nos matériaux. Le polissage d’un grand nombre d’échantillons sur un même support permet d’augmenter la surface de polissage et ainsi d’assurer une meilleure planéité. Le pré-polissage et le polissage sont les étapes les plus longues. La finition est une étape rapide du moment que les deux précédentes ont été bien réalisées. 125 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Étape 1: Doucissage de la surface arrière • Cela consiste à enlever les marques de scie et à uniformiser la surface arrière de l’échantillon qui sera collée pendant la procédure de polissage. • Un p lateau en laiton ainsi que des grenats abrasifs sont utilisés. Étape 2: Formation de biseaux • Un biseau avec un angle de 45 ° est réalisé afin d’éviter que des fragments d’échantillon ne se détachent, en utilisant soit un plateau rotatif en laiton soit un cylindre de polissage avec du grenat abrasif. • Les substrats sont nettoyés avec de l’eau, puis de l’alcool et enfin séchés à l’air sec. Étape 3: Collage des échantillons • Dans un premier temps, la planéité du support doit être contrôlée. • Les échantillons et le support de polissage sont chauffés pour éviter les chocs thermiques. •Les échantillons sont collés avec de la cire Arcanson. L’excès de cire est enlevé en pressant légèrement sur les échantillons. • L’ensemble est refroidi à température ambiante. Étape 4: Pré-polissage des échantillons • Cela consiste à doucir la surface de l’échantillon en utilisant un plateau tournant et du grenat abrasif. Étape 5: Polissage des échantillons • Le polissage est réalisé sur un drap de polissage avec de l’alumine en suspension de granulométrie 1 µm. Étape 6: Finition des échantillons • La finition (polissage optique) se fait en utilisant un drap de polissage avec de l’alumine en suspension de granulométrie 0,3 µm. Étape 7: Décollement des échantillons • L’ensemble est chauffé afin de pouvoir décoller les échantillons du support. Étape 8: Nettoyage des échantillons • Les échantillons sont nettoyés avec un mouchoir imbibé d’un peu d’alcool puis séchés. Figure D. 11 : Méthode établie pour le polissage de la surface des substrats Te75Ge15Ga10. 126 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Le dépôt de la couche de cœur II.2. Une fois la préparation du substrat terminée, il faut déposer une couche de cœur qui soit à la fois adhérente, dense, homogène et caractérisée par un indice de réfraction adaptée à l’application visée. La première étape dans le dépôt de cette couche est donc la détermination de sa composition. La deuxième étape est le dépôt de la couche avec l’épaisseur appropriée, fonction de la structure que l’on souhaite réaliser. La troisième étape, enfin, est la vérification des spécifications (épaisseur, composition, indice de réfraction) et de leur adéquation avec les designs théoriques. II.2.1. Quelle composition ? Choix de la composition de la couche de cœur L’étude des couches binaires Te-Ge présentée dans le chapitre B a permis de déterminer l’évolution de l’indice de réfraction à = 10,6 µm en fonction de la teneur en tellure. Nous avons dit précédemment que la différence d’indices entre le substrat et la couche de cœur avait été fixée à 4.10-2, valeur optimisée pour assurer un guidage monomode, une ouverture numérique satisfaisante et une bonne efficacité de couplage. L’indice du substrat étant de 3,399 à = 10,6 µm, cela impose un indice pour la couche de cœur de 3,44 environ (à la même longueur d’onde). On voit sur la Figure D. 12 que cette valeur peut être obtenue Indice de refraction nTE pour une couche contenant 82 % de tellure environ. 3.58 3.56 3.54 3.52 3.50 3.48 3.46 3.44 3.42 3.40 y = 0.0181x + 1.9592 R² = 0.98053 ncoeur = 3,44 nsubstrat 80 82 84 86 88 % at. Te Figure D. 12 : Indices de réfraction à atomique en tellure. = 10,6 µm des couches Te-Ge en fonction du pourcentage 127 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Reproductibilité e (profilometrie) e (M-lines) n 2,10-3 Les conditions de dépôt ont été optimisées déposer µm donc 0,5 µm µm de sorte @ à10,6 µm des couches de Echantillons 9,6un indice de 9,72 3,451à 10,6 µm. Plusieurs composition Te82GeTeGe159 réfraction de 3,44 18, en vue d’obtenir TeGe160dans ces mêmes 12,5 conditions,12,33 3,436 la reproductibilité en couches ont été déposées de sorte à estimer TeGe161 10,6 10,76 3,419 TeGe162 11,0 11,12 3,418 TeGe163 10,9 10,91 3,428 TeGe164 Echantillons TeGe165 13,1 e (profilometrie) µm 11,9 0,5 µm 12,88 e (M-lines) µm 11,67 n 3,440 2,10-3 @ 10,6 3,459µm TeGe159 TeGe147 TeGe160 TeGe148 9,6 12,5 12,5 12,0 9,72 12,38 12,33 11,69 3,451 3,450 3,436 3,431 TeGe161 TeGe149 Echantillons TeGe162 TeGe150 TeGe163 TeGe159 10,6 13,2 e (profilometrie) µm 11,0 0,5 µm 10,2 10,9 9,6 10,76 12,95 e (M-lines) 11,12 µm 10,38 10,91 9,72 3,419 -3 n 3,458 2,10 3,418 @ 10,6 3,436µm 3,428 3,451 TeGe164 TeGe160 TeGe165 TeGe161 13,1 12,5 11,9 10,6 12,88 12,33 11,67 10,76 3,440 3,436 3,459 3,419 TeGe147 TeGe162 TeGe148 TeGe163 12,5 11,0 12,0 10,9 12,38 11,12 11,69 10,91 3,450 3,418 3,431 3,428 TeGe149 TeGe164 TeGe150 TeGe165 13,2 13,1 10,2 11,9 12,95 12,88 10,38 11,67 3,458 3,440 3,436 3,459 TeGe147 12,5 12,38 3,450 termes d’indice de réfraction. Elles ont donc été caractérisées par la méthode des m-lines à λ = 10,6 µm. Les résultats obtenus sont présentés sur le Tableau D. 1. TeGe148 12,0 11,69 couches 3,431 Tableau D. 1 : Indices de réfraction obtenus pour différentes Te-Ge déposées dans les mêmes conditions enTeGe149 visant un indice de réfraction de 3,440. 13,2 12,95 3,458 TeGe150 10,2 10,38 3,436 En faisant la moyenne des indices de réfraction obtenus pour les différentes couches obtenues en utilisant les mêmes paramètres de dépôt, nous avons déterminé l’incertitude sur l’indice des couches déposées par co-évaporation thermique. Nous sommes donc capables de déposer une couche d’indice de réfraction de 3,440 avec une incertitude de ± 2.10-2. Prise en compte de l’incertitude sur ncœur pour le dimensionnement Le dimensionnement des guides d'onde a été revu en tenant compte de l’incertitude sur l’indice de réfraction des couches déposées par co-évaporation thermique. Dans un premier temps, l'efficacité de couplage a été vérifiée pour chaque type de guide et pour chaque bande spectrale avec un indice de réfraction de 3,440 ± 2.10-2 (Figure D. 13 pour les guides chargés et Figure D. 14 pour les guides rubans) par simulation. 128 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Figure D. 13 : Efficacité de couplage des guides chargés pour les deux bandes spectrales: à gauche [6–11 µm] et à droite [10–20 µm]. Concernant les guides chargés pour la bande spectrale [6–11 µm], l'efficacité de couplage diminue très rapidement avec la longueur d’onde et est nulle à partir de 7 µm pour un indice de réfraction n cœur = n indice de réfraction n cœur = n c0 c0 – 2.10-2 (Figure D. 13 à gauche, courbe bleue). Pour un + 2.10-2, les performances du guide restent par contre tout à fait acceptables (Figure D. 13 à gauche, courbe rouge). Concernant les guides chargés pour la bande spectrale [10 - 20 µm], l’incertitude sur l’indice de réfraction de ± 2.10-2 ne semble pas avoir un impact important : l’efficacité de couplage reste supérieure à 50 %, comme illustré dans la Figure D. 13 (à droite). Figure D. 14 : Efficacité de couplage des guides rubans pour les deux bandes spectrales: à gauche [6–11 µm] et à droite [10–20 µm]. 129 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Concernant les guides rubans, l'efficacité de couplage diminue fortement pour un indice de réfraction n cœur = n c0 – 2.10-2 quelle que soit la bande spectrale étudiée (Figure D. 14). De plus, pour les longueurs d'onde 10 µm et 11 µm de la seconde bande spectrale, le guidage de la lumière n'est plus monomode. L’incertitude sur l’indice de réfraction de la couche de cœur a donc un effet plus ou moins important d’une structure à l’autre, et elle peut entraîner une perte considérable d’efficacité de couplage. Toutefois, les simulations montrent qu’en « jouant » sur les largeurs des guides, on peut compenser l’effet d’une variation de l’indice de réfraction (Figure D. 15 et Figure D. 16]. Par exemple, dans le cas des guides chargés pour la bande spectrale [6 - 11 µm], il suffit de réaliser des guides de 20 µm de large (au lieu de 15 µm) pour que, pour un indice n cœur = n c0 – 2.10-2, l’efficacité de couplage soit bonne dans toute la gamme de longueurs d’onde (Figure D. 15). Pour les guides rubans, la diminution de l’efficacité de couplage observée pour n cœur = n c0 – 2.10-2 dans la Figure D. 14 peut être corrigée en utilisant une largeur de guide de 14 µm (au lieu de 6 µm) pour la bande spectrale [6 – 11 µm] et une largeur de guide de 20 µm (au lieu de 12 µm) pour la bande spectrale [10 – 20 µm] (Figure D. 16). En changeant la largeur des guides, on peut donc compenser l’effet d’un indice trop faible ou trop important : cela nous a amené à concevoir un masque présentant des structures de largeur variable (voir paragraphe II.3.1). Figure D. 15 : Efficacité de couplage en fonction de la largeur des marches gravées pour un guide de structure chargée pour la première bande spectrale [6-11 µm] 130 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Figure D. 16 : Efficacité de couplage en fonction de la largeur des marches gravées pour les structures rubans pour les deux bandes spectrales: à gauche [6–11 µm] et à droite [10–20 µm]. II.2.2. Quelle épaisseur ? On a vu dans les paragraphes précédents que l’épaisseur de la couche de cœur dépendait de la structure du guide (chargé ou ruban) et de la gamme de longueurs d’onde ([6 – 11 µm] ou [10 – 20 µm]). Nous avons donc déposé des couches de 12 µm d’épaisseur pour les structures chargées [6 – 11 µm] et les structures rubans [10 – 20 µm] et des couches de 6 µm d’épaisseur pour fabriquer des structures rubans [6 – 11 µm], en accord avec les dimensions indiquées sur la Figure D. 1. Concernant les couches de 24 µm requises pour la fabrication des guides chargés [10 – 20 µm], il est à noter que nous avons été obligés d’avoir recours à une superposition de plusieurs couches (deux dans le meilleur des cas). En effet, comme nous l’avons montré dans le chapitre B, nous ne pouvons obtenir des couches de plus de 18 µm tout en maintenant stables les vitesses d’évaporation des trois sources. Nous nous sommes assurés que l’adhérence de telles superpositions de couches était bonne, et nous avons observé au microscope électronique à balayage leur tranche. Dans la plupart des cas, on ne distingue même pas les interfaces entre les différentes couches déposées. II.3. La gravure de la couche de cœur La gravure de la couche de cœur permet le confinement bidimensionnel de la lumière dans les guides d’onde. Le dimensionnement de ces guides tient compte de l’incertitude sur 131 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge l’indice de réfraction précédemment déterminée. En pratique cela se traduit par la réalisation de marches avec des largeurs différentes de sorte avoir une bonne efficacité de couplage et un guidage monomode de la lumière selon l’indice de réfraction de la couche déposée. La première étape a été la fabrication d’un nouveau masque de photolithographie prenant en compte les différentes contraintes de dimensionnement des guides. Ensuite, nous avons gravé la couche de cœur, partiellement ou totalement, avec les paramètres de gravure optimisés dans le chapitre C. II.3.1. Réalisation du masque en vue de la réalisation des différentes structures guidantes Un nouveau masque de photolithographie a été réalisé par l’IMEP en tenant compte des différentes contraintes de dimensionnement des guides. Tous les motifs de gravures, que ce soit pour les structures chargées ou les structures rubans, ont été insérés sur ce masque comme décrit sur la Figure D. 17. De forme carrée de dimensions 9 cm * 9 cm, il a été divisé en 9 zones, de 2,5 cm de coté, comprenant chacun un type de motif de gravure. Ces compartiments permettent un alignement facile avec l’échantillon lors du masquage de la couche. Les quatre premiers compartiments sont ceux qui nous intéressent à l’heure actuelle pour la réalisation des différentes structures chargées et rubans. La largeur des marches est différente selon la structure de guide et la bande spectrale envisagées. Les autres compartiments sont dédiés à des motifs tels que des jonctions Y ou des guides courbes qui seront utilisés ultérieurement. 132 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Figure D. 17 : Représentation schématique du masque de photolithographie réalisé par l’IMEP de sorte à tenir compte des différentes contraintes de dimensionnements des guides d’onde pour l’obtention d’une bonne efficacité de couplage et un guidage monomode de la lumière. II.3.2. Gravure partielle pour la fabrication des structures chargées (RIB) Dans les structures chargées, la gravure de la couche de cœur est partielle. Les profondeurs de gravure sont différentes selon la bande spectrale visée : 4,5 µm pour la bande [6–11 µm] et 9 µm pour la bande [10–20 µm]. Les conditions établies pour la gravure de couche sur une profondeur de 4,5 µm sont les suivantes : un mélange de gaz réactifs Ar/CHF3/O2 dans les proportions 30/59,5/10,5, un flux total gazeux de 100 sccm, une pression dans l’enceinte de 30 mTorr, des puissances RF et LF respectivement de 50 W et 600W, et un temps de gravure de 12 min. Les guides obtenus sont présentés sur la Figure D. 18. La profondeur et l’angle de gravure sont respectivement de 4,7 µm et de 77°. Le résultat obtenu est satisfaisant même si la profondeur de gravure est légèrement supérieure à celle qui était visée (4,5 ± 0,15 µm). Concernant l’épaisseur de la couche, on peut voir sur la Figure D. 18 qu’elle est égale à 11,9 µm : elle répond donc bien aux exigences du design (12 ± 0,2 µm). 133 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge 24 µm 11,9 µm 22 µm 20 µm 18 µm 16 µm 14 µm 4,7 µm 12 µm 11,9 µm 4,7 µm Figure D. 18 : Images MEB de la couche Te-Ge d’épaisseur 11,9 µm gravée sur une profondeur de gravure de 4,7µm après polissage de l’échantillon (tel que décrit dans les paragraphes suivants). Les conditions établies pour la gravure de couche sur une profondeur de 9 µm sont les même que précédemment, seul le temps de gravure change. Dans ce cas il est doublé et passe de 12 min à 24 min. Les guides obtenus sont présentés sur la Figure D. 19. La profondeur et l’angle de gravure sont respectivement de 8,8 µm et de 82°. L’épaisseur de la couche de cœur (obtenue en superposant 3 dépôts successifs) est de 23,4 µm. Seule cette grandeur n’est pas entièrement satisfaisante, puisque l’épaisseur visée était de 24 ± 0,4 µm. 34 µm 36 µm 38 µm 40 µm 8,8 µm 23,4 µm 8,8 µm 23,4 µm Figure D. 19 : Images MEB d’un empilement de trois couches Te-Ge d’épaisseur totale 23,4 µm gravé sur une profondeur de gravure de 8,8 µm après polissage de l’échantillon (tel que décrit dans les paragraphes suivants). 134 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge II.3.3. Gravure totale pour la fabrication des structures rubans (STRIP) Dans les structures rubans, la gravure de la couche de cœur est totale. Les profondeurs de gravure sont différentes selon la bande spectrale visée : 6 µm pour la bande [6–11 µm] et 12 µm pour la bande [10–20 µm]. Les conditions de gravure sont les mêmes que précédemment. Seul le temps de gravure change : il est de 16 min pour une profondeur de gravure visée de 6 µm (pour la bande spectrale [6 – 11 µm]) et de 32 min pour une profondeur de gravure visée de 12 µm (pour la bande spectrale [10 – 20 µm]). Les guides obtenus sont présentés sur les figures suivantes : Figure D. 20 et Figure D. 21 pour les bandes spectrales [6-11 µm] et [10-20 µm], respectivement. Figure D. 20 : Images MEB d’une couche Te-Ge d’épaisseur 5,8 µm totalement gravée après clivage de l’échantillon. 135 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Figure D. 21 : Images MEB obtenus après clivage d’une couche Te-Ge d’épaisseur initiale de 11,9 µm totalement gravée. Pour les guides rubans de la bande spectrale [6 – 11 µm] (Figure D. 20), l’épaisseur de la couche initiale était de 5,8 µm, la profondeur de gravure est de 5,8 µm ; les largeurs des guides sont variables, en accord avec le design du masque. Les résultats sont donc tout à fait satisfaisants puisque nous souhaitions une épaisseur de couche et une profondeur de gravure de 6 ± 1 µm. Pour les guides rubans de la seconde bande spectrale (Figure D. 21), l’épaisseur de la couche initiale était de 11,9 µm, or les motifs obtenus en fin de gravure ne font plus que 10,6 µm de profondeur. En fait, une partie des guides a été gravée, suite à une consommation totale de la résine avant la fin de la gravure. Ceci explique le profil particulier des guides obtenus, c’est-à-dire le fait que la surface des guides ne soit pas plane. Après photolithographie, l’épaisseur de résine est légèrement plus importante sur les bords : la résine est donc consommée plus rapidement au centre. Pour des profondeurs de gravure de cet ordre de grandeur (environ 12 µm), notre procédé n’est plus approprié : il faudrait soit augmenter la sélectivité, soit changer de résine de photolithographie et s’orienter vers une résine plus épaisse. 136 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge II.4. Le dépôt du superstrat pour les structures rubans Le rôle du superstrat est l’obtention d’un guide « symétrique » : guide de géométrie carrée, entouré d’un environnement de même indice de réfraction dans toutes les directions. L’obtention d’un superstrat caractérisé par le même indice de réfraction que le substrat est donc importante. Comme on peut le voir sur la Figure D. 8, la tolérance sur l’indice de réfraction du superstrat est de ± 2.10-3 pour la première bande spectrale et de ± 5.10-3 pour la deuxième bande spectrale. On voit alors qu’il sera difficile de satisfaire aux contraintes des designs, puisque l’incertitude sur l’indice de réfraction de nos couches a été évaluée à ± 2.10-2. Nous avons quand même fait des essais de recouvrement de couches gravées par des superstrats, afin de vérifier si celui-ci se fait correctement et si la structure complète reste adhérente au substrat (malgré l’épaisseur totale importante). II.4.1. Quelle composition ? Pour définir la composition du superstrat à déposer, nous avons procédé comme pour le choix de la composition de la couche de cœur, en utilisant la courbe n=f(%Te) à 10,6 µm. Cela nous a permis d’estimer la composition à environ 80 % de tellure, pour obtenir un indice de 3,4 environ (le substrat a un indice de 3,399 à 10,6 µm). II.4.2. Quelle épaisseur ? Comme le montre la Figure D.8, il faut au minimum 15 µm d’épaisseur de superstrat au-dessus des guides. Cela impose donc des épaisseurs de superstrat d’au moins 21 µm pour la première bande spectrale et d’au moins 27 µm pour la deuxième bande spectrale. Les superstrats seront donc obligatoirement des superpositions de plusieurs couches (deux au minimum). II.4.3. Qualité du recouvrement Quelle que soit la profondeur de gravure envisagée, nous devons nous assurer que le recouvrement, par le superstrat, de la couche totalement gravée est de bonne qualité pour juger de la faisabilité des structures rubans. Nous avons donc déposé un superstrat sur une 137 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge couche gravée et caractérisée par des angles de gravure quasi-verticaux. Le résultat est présenté sur la Figure D. 22. Le recouvrement de la couche gravée n’est pas de bonne qualité : en effet, l’image MEB de l’échantillon vu du dessus montre la présence d’un espace qui confirme un mauvais recouvrement sur les flancs de la marche gravée. Superstrat Mauvais recouvrement Couche gravée Substrat Mauvais recouvrement Figure D. 22 : Images MEB d’une couche Te-Ge gravée et recouverte d’un superstrat. De sorte à améliorer le recouvrement des couches gravées, nous avons décidé de diminuer l’angle de gravure. Nous avons vu dans le chapitre C que nous étions capables d’obtenir des profils de gravure avec des angles plus faibles pouvant aller jusque 61° en jouant sur les différents paramètres de gravure. Les couches ainsi gravées ont été recouvertes d’un superstrat afin de vérifier la qualité du recouvrement pour des angles de gravure différents (Figure D. 23). Plus l’angle de gravure est petit, meilleur est le recouvrement de la couche par le superstrat. La vue du dessus des différents échantillons le confirme : le vide précédemment observé sur la Figure D. 22 se réduit avec la diminution de l’angle de gravure jusqu’à disparaitre. Afin de pouvoir réaliser des guides d’onde de structure ruban de bonne qualité, nous devons donc graver la couche de cœur, non pas avec des angles de gravure quasi138 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge verticaux comme les structures chargées, mais avec des angles inférieurs à 70°. Or le fait de diminuer l’angle des guides rubans n’est pas compatible avec les marges de tolérances présentées dans les paragraphes précédents : en effet, nous avons montré avant que pour les guides rubans l’angle devait être compris entre 80 et 90 ° pour assurer un guidage monomode et une bonne efficacité de couplage dans toute la gamme spectrale (que ce soit [6 – 11 µm] ou [10 – 20 µm]). Les designs des guides rubans sont donc à réviser en introduisant toutes les contraintes technologiques : en particulier, indice de réfraction du superstrat avec une tolérance de ± 2.10-2 et angle des guides inférieur à 70 °. a b c Figure D. 23 : Recouvrement par un superstrat des couches Te-Ge suivantes : a) la couche Te81,3Ge18,7 gravée avec un angle de 71°, b) la couche Te81,4Ge18,6 gravée avec un angle de 66°, c) la couche Te81,5Ge18,5 gravée avec un angle de 61°. 139 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge III. Caractérisation optique des guides d’onde III.1. Préparation des faces d’entrée et de sortie du guide La qualité des faces d’entrée et de sortie des guides d’onde est très importante dès lors que l’on veut effectuer des caractérisations optiques. En effet, l’obtention d’un couplage efficace avec la source lumineuse dépend de cette qualité. Deux méthodes de préparation de ces faces peuvent être envisagées : le clivage et le polissage. III.1.1. Le clivage Le clivage est une méthode de préparation des faces d’entrée et de sortie simple et rapide. Cependant, elle est généralement utilisée pour les substrats cristallisés, caractérisés par des plans selon lesquels le clivage est orienté préférentiellement. Dans le cas des verres chalcogénures qui sont des matériaux amorphes, on ne peut pas réellement parler de clivage, mais plutôt de fracture, et le résultat risque d’être plus aléatoire. Cette méthode a tout de même été testée sur différents types d’échantillons : - sur des guides plans : guides constitués d’un substrat Te75Ge15Ga10 et d’une couche du système Te-Ge (Figure D. 24), Couche Figure D. 24 : Image MEB après clivage d’un guide plan constitué de la couche Te84.8Ge15.2 et d’un substrat Te75Ge15Ga10. - sur des guides de structure RIB : guides constitués d’un substrat Te75Ge15Ga10 et d’une couche du système Te-Ge gravée partiellement (Figure D. 25). 140 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge a Couche Couche b c Figure D. 25 : Images MEB après clivage d’un guide de structure RIB constitué de la couche Te81.4Ge18.6 gravée et d’un substrat Te75Ge15Ga10 : a) vue d’ensemble de trois marches ; b) clivage satisfaisant d’une marche ; c) mauvais clivage d’une marche. Les résultats obtenus avec cette méthode de préparation sont assez satisfaisants dans l’ensemble, puisque lorsque la fracture est nette, les profils observés sont propres. Néanmoins le « clivage » est effectivement aléatoire, ce qui mène à des résultats variables d’un échantillon à l’autre, mais également au sein d’un même échantillon comme illustré dans la Figure D. 25 : selon où l’on observe la tranche, la fracture est satisfaisante (image b), ou mauvaise (image c) avec notamment un « recul » de la couche qui ne va donc plus jusqu’au bord de l’échantillon. III.1.2. Le polissage Une autre méthode de préparation des faces d’entrée et de sortie du guide que nous avons explorée est le polissage. Diverses pistes ont été testées pour essayer d’obtenir deux faces d’entrée et de sortie parallèles (et perpendiculaires aux guides), pour éviter d’endommager la surface de la couche et pour obtenir des faces d’entrée et de sortie de bonne qualité. Une des solutions testées et finalement écartées est illustrée sur la Figure D. 26. L’échantillon recouvert de cire pour protéger la couche a été collé sur un porte-échantillon présentant deux faces parfaitement parallèles et d’épaisseur correspondant à la longueur des 141 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge guides souhaités. Il a ensuite été poli des deux côtés en utilisant des papiers SiC de granulométrie décroissante (800, 1000, 1200 et 2400) avec de l’eau distillée puis avec des draps de polissage et de l’alumine en suspension (5 µm, 3 µm, 1 µm puis 0,3 µm). Echantillon Cire protectrice recouvrant la couche Porte-échantillon Polissage Figure D. 26 : Schéma représentant la première méthode de polissage utilisée pour la préparation des faces d’entrée et de sortie du guide. Cette méthode de polissage n’a pas donné de résultats satisfaisants : d’une part la surface des faces d’entrée et de sortie était arrondie après la procédure et d’autre part les conditions de polissage étaient trop énergiques si bien que la couche était arrachée durant le polissage (Figure D. 27). Couche Couche Substrat Substrat Figure D. 27 : Images MEB de la couche Te82.5Ge17.5 après polissage : image de gauche, la couche a été arrachée durant le polissage ; image de droite, la couche présente une forme arrondie. Les résultats n’étant pas satisfaisants, un nouveau protocole a été mis en place pour assurer une meilleure planéité des faces d’entrée et de sortie d’une part et pour que le polissage soit plus doux vis-à-vis de nos matériaux d’autre part. Cette nouvelle procédure consiste à polir simultanément plusieurs échantillons en formant un « barreau d’échantillons » de sorte à augmenter la surface de polissage et donc augmenter la planéité des faces d’entrée et de sortie (Figure D. 28). Elle s’applique aussi bien 142 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge aux guides planaires qu’aux guides de structures chargées ou rubans. La cire utilisée pour coller les échantillons entre eux est de la cire arcanson qui a aussi pour rôle de protéger la couche pendant toute la procédure de polissage. La contrainte la plus importante de cette procédure est le positionnement des échantillons les uns par rapport aux autres. En effet, les guides doivent être perpendiculaires aux faces d’entrée et de sortie, et doivent donc tous êtres parallèles entre eux d’un échantillon à l’autre. Cela nous a amené à prévoir un méplat identique sur tous les substrats, que nous avons usiné avant le dépôt des couches de cœur. Ce méplat a ensuite été utilisé pour l’étape de photolithographie : le masque a été positionné de sorte à obtenir des guides perpendiculaires au méplat. Ainsi, en faisant se correspondre les méplats de tous les échantillons au moment de la formation du barreau, on s’assure du parallélisme entre les différents guides. Substrat Cire Arcanson Couche gravée ou non Figure D. 28 : Schéma d’un « barreau » d’échantillon pour la préparation des faces d’entrée et de sortie des guides par polissage. Le barreau d’échantillons est ensuite poli sur un tour d’opticien avec des draps de polissage et de l’alumine en suspension de granulométrie décroissante (de 5 µm à 0,3 µm). Nous avons abandonné le polissage sur papiers SiC car il était trop agressif pour nos matériaux. Le polissage est réalisé jusqu’à l’obtention d’un poli optique des faces d’entrée et de sortie du guide (Figure D. 29). Figure D. 29 : Photographie d’un barreau constitué de 12 échantillons après polissage. 143 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge A l’heure actuelle, nous avons uniquement appliqué cette méthode au polissage des faces d’entrée et de sortie des guides chargés, aussi bien pour la bande spectrale [6 – 11 µm] que pour la bande spectrale [10 – 20 µm]. Les résultats obtenus se sont avérés être encourageants et satisfaisants, comme en témoignent les Figures D.30 et D.31. Les guides ne sont pas toujours parfaitement perpendiculaires aux faces d’entrée et sortie, comme le montrent clairement les photographies optiques présentées sur la Figure D. 30. En revanche, la majorité des guides va bien d’un bout à l’autre de l’échantillon, et les faces sont propres. 0,8 cm Figure D. 30 : Images optiques, après polissage, d’un guide de structure RIB pour la bande spectrale [10 - 20 µm]. Figure D. 31 : Images MEB d’un guide chargé constitué d’une couche de cœur TeGe gravée et déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 après polissage. 144 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Cette procédure de polissage, mise au point durant les derniers mois de la thèse, est donc actuellement la meilleure méthode que nous ayons identifiée, qui nous permette d’obtenir un résultat homogène sur l’ensemble de l’échantillon, contrairement au « clivage » qui se fait de manière aléatoire sur nos matériaux. III.2. Caractérisation optique des guides d’onde réalisés Une fois que les faces d’entrée et de sortie des guides d’onde sont préparées, les guides d’onde peuvent être caractérisés optiquement. Dans un premier temps, nous avons enregistré la transmission au sein d’un guide planaire constitué du substrat Te75Ge15Ga10 et d’une couche de cœur d’épaisseur 12 µm de composition théorique Te82Ge18. Le but était de vérifier la bonne transmission des couches dans toute la bande spectrale de 6 à 20 µm. Ensuite nous avons testé le guidage à 10,6 µm des structures réalisées répondant à tous les critères requis (dimensions en accord avec les design, faces d’entrée et de sortie satisfaisantes). Enfin, nous avons vérifié l’efficacité du meilleur guide réalisé en tant que filtre modal. III.2.1. Transmission dans les guides planaires Avant de démontrer la transmission des couches dans la bande spectrale [6–20 µm], nous nous sommes assurés qu’elles guidaient la lumière à λ = 10,6 µm. Cette caractérisation a été réalisée à Thales Alenia Space (TAS) à Cannes avec un laser CO2. Le montage expérimental est présenté sur la figure suivante (Figure D. 32) : on utilise le banc de m-lines pour réaliser cette caractérisation. 145 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge He-Ne Alignment laser CO2 laser with periscope Polarizers M-line stage Lasers Sources Bean expander stages Diaphragm (for alignment) purpose) Figure D. 32 : Banc de caractérisation des guides d’onde à λ = 10,6 µm. Le banc est constitué d’un laser CO2, de différents composants optiques (lentille, polariseur, diaphragmes…), d’une platine de rotation avec un prisme en germanium et d’une caméra infrarouge pour visualiser les images en sortie de guide. Après ajustement jusqu’à ce qu’une ligne soit centrée à l’écran, la caméra infrarouge est tournée de sorte à ce que son axe soit aligné avec le plan de l’échantillon. Une lentille ZnSe est ensuite insérée afin de pouvoir obtenir une image du prisme et de l’échantillon. Lorsque l’on met en marche le laser CO2, caractérisé par une longueur d’onde de 10,6 µm, une bande lumineuse apparait à l’écran (Figure D. 33). Figure D. 33 : Observation d’une bande lumineuse à la sortie du guide d’onde planaire constitué d’une couche Te82,5Ge17,5 déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 prouvant ainsi le guidage de la lumière à λ = 10,6 µm. 146 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge L’observation de cette bande lumineuse à la sortie du guide d’onde planaire prouve le guidage de la lumière à λ = 10,6 µm. Il est à noter que l’intensité du point lumineux dépend entre autres des paramètres de couplage et de la qualité de l’échantillon. La mesure de transmission de la même couche dans toute la bande spectrale [6 – 20 µm] a ensuite été réalisée au LEMTA à Nancy. Le banc utilisé pour cette caractérisation optique est construit autour d’un spectromètre FTIR (Bruker IFS66 v/S). La disposition optique de ce banc est constituée d’un faisceau parallèle arrivant du spectromètre, d’une unité de couplage, d’un porte-substrat, d’une unité de collecte des informations, d’une unité de focalisation et enfin d’un détecteur HgCdTe (Figure D. 34). Une caméra infrarouge est utilisée pour voir la lumière en sortie du guide. f) d) b) e) c) a) Figure D. 34 : Disposition optique du banc constitué : a) d’un faisceau parallèle arrivant du spectromètre, b) d’une unité de couplage, c) d’un porte substrat, d) d’une unité de collecte des informations, e) d’une unité de focalisation et f) d’un détecteur HgCdTe. Le résultat obtenu est présenté sur Figure D. 35 (image de gauche) où l’on observe à la sortie du guide d’onde planaire une ligne rouge discontinue qui prouve que la lumière est bien guidée. La finesse de la ligne observée montre clairement qu’il s’agit bien du guidage de la lumière dans la couche et non de la lumière transmise au travers du substrat. La discontinuité de la ligne de lumière observée en sortie du guide est probablement due aux défauts des faces d’entrée et de sortie. Il faut noter que le guide utilisé n’avait pas été préparé avec la méthode de polissage optimisée. Le spectre de transmission a été mesuré pour le même guide planaire (Figure D. 33 image de droite). L’échantillon transmet la lumière de λ = 2 µm à λ = 20 µm. Il est important de noter que la transmission est supérieure à 3,5 % dans le domaine spectral [6 – 20 µm]. Un 147 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge maximum de transmission d’environ 5 % a été obtenu mais notons que la fente de référence est deux fois plus large que la couche : la transmission est donc plus proche de 10 % si l’on compare uniquement la lumière transmise et celle qui illumine la couche. Enfin, il est à noter qu’il y a environ 50 % de pertes de Fresnel dues aux réflexions sur les faces d’entrée et de sortie du guide, pertes pouvant être réduites par recouvrement des faces avec une couche antireflet. Dans ces conditions et en optimisant le couplage de la lumière à l’entrée de l’échantillon, la transmission devrait atteindre une valeur approchée de 60 % de transmission. Transmission Lumière guidée dans la couche Figure D. 35 : Première observation du guidage de la lumière jusque 20 µm dans un guide d’onde planaire constitué d’une couche Te82,0Ge18,0 déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 (image de gauche) ; Spectre de transmission ( en u.a.) mesuré sur ce même guide (image de droite). Nous avons donc démontré le guidage de la lumière dans les guides d’onde planaires constitués d’une couche Te-Ge déposée sur un substrat Te75Ge15Ga10 dans toute la bande spectrale [6 – 20 µm]. III.2.2. Guidage dans les structures chargées Après avoir démontré le guidage de la lumière dans des guides planaires, nous avons caractérisé les guides d’onde chargés présentés dans les Figures D.18 et D.19. A l’heure actuelle, deux types de caractérisations ont été effectuées : des tests de guidage à λ = 10,6 µm (à Cannes) et de tout premiers tests de guidage dans la bande spectrale [1,5 – 5,5 µm] (à Nancy). Concernant les tests de guidage à 10,6 µm effectués à Cannes sur le banc de m-lines, les premiers bons résultats ont été obtenus pour un échantillon présentant des guides chargés optimisés pour fonctionner dans la première bande spectrale (de 6 à 11 µm). Ses faces d’entrée et de sortie ont été polies optiquement, comme décrit dans la partie II.2, de sorte à 148 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge permettre un bon couplage de la lumière dans les guides d’onde. La lumière a été injectée et un point lumineux a bien été observé lorsque le point d’injection était centré dans les guides d’onde, comme l’illustre la Figure D. 36. Cela prouve le bon confinement bidimensionnel de la lumière. a c b a) b) c) Figure D. 36 : Guide d’onde de structure RIB et les différents points d’injection (schéma du haut) ; a) Image de la face de sortie de l’échantillon obtenu pour le premier point d’injection. La surface de l’échantillon est située au dessous du point de couplage optique. b) Image de la face de sortie de l’échantillon obtenu quand le point d’injection est situé dans le guide RIB. c) Image de la face de sortie obtenue quand le point d’injection est situé dans le substrat. Concernant les tests de guidage dans la bande spectrale [1,5 – 5,5 µm] effectués à Nancy, les tout premiers résultats ont été observés pour un échantillon présentant des guides chargés optimisés pour fonctionner dans la deuxième bande spectrale (de 10 à 20 µm) (Figure D. 36). Ses faces d’entrée et de sortie avaient également été préparées selon la procédure décrite dans le paragraphe II.2. Même si cet échantillon a été testé dans une gamme de longueurs d’onde ne correspondant pas à celle pour laquelle il a été optimisé, les résultats n’en sont pas moins intéressants. En effet, contrairement au cas des tout premiers échantillons que nous avions tenté de caractériser, cet échantillon présente plusieurs guides successifs dans lequel le guidage est effectivement observé, prouvant l’efficacité du couplage et donc la qualité des faces d’entrée et de sortie. Des tests complémentaires de guidage dans la bande spectrale [10 – 20 µm] sont actuellement en cours de réalisation. 149 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge III.2.3. Filtrage modal L’interférométrie spatiale est la seule méthode directe qui permette une détection directe de planètes et le sondage de leur atmosphère par spectroscopie. Un interféromètre spatial travaillant dans l’infrarouge et utilisé en mode annulant est particulièrement adapté pour cette tâche lorsqu’il est associé à des filtres modaux. Comme nous l’avons expliqué précédemment, les guides d’ondes monomodes peuvent être utilisés comme filtres modaux. En pratique, et plus particulièrement pour le projet Darwin, il est nécessaire d’avoir un guide d’onde monomode qui permette un taux de réjection sur la lumière de l’étoile d’un facteur de l’ordre de 10-3. Bien que nos guides d’onde transmettent la lumière sur toute la gamme spectrale, il faut vérifier les capacités de filtrage modal en vue d’une application en interférométrie spatiale. Un premier résultat concernant la capacité de filtrage modal des composants d’optique intégrée Te-Ge/Te-Ge-Ga a été obtenu récemment en utilisant un interféromètre annulant de type Mach-Zehnder, qui fonctionne à λ = 10,6 µm. Le banc d’interférométrie annulante est présenté sur la Figure D. 34. Figure D. 37 : Banc d’interférométrie annulante de type Mach-Zehnder utilisé avec un laser CO2 pour la démonstration de l’efficacité de filtrage modal des guides d’onde. 150 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Nous avons démontré un taux de rejection de la lumière par l’interféromètre de l’ordre de 6.10-5 en utilisant un composant non optimisé au niveau de la préparation des faces d’entrée et de sortie du guide. L’efficacité de filtrage modal du guide d’onde a été estimée à une valeur atteignant presque 10-3. Il est important de noter que l’efficacité annulante du montage sans échantillon est de 4,4.10-2. Ce résultat est très important et encourageant concernant l’utilisation de nos guides d’onde monomodes à base de verres tellurures pour des applications en interférométrie spatiale. 151 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge Conclusion La réalisation de guide d’onde pour des applications dans l’infrarouge lointain impliquait la maitrise (i) du dépôt de couches d’épaisseur et d’indice de réfraction contrôlés, (ii) de la gravure profonde de ces couches et (iii) la préparation des faces d’entrée et de sortie par polissage. Une fois ces trois points maitrisés, nous avons pu réaliser différents types de guides d’onde. Nous avons vu qu’à l’heure actuelle nous n’étions pas en mesure de réaliser des guides de structure ruban de bonne qualité. En effet, nous avons rencontré un problème de recouvrement de la couche gravée par le superstrat. Pour pallier ce problème, la gravure de marche avec des angles plus faibles a été envisagée. Or la tolérance sur les angles de gravure pour les guides rubans est faible et de l’ordre de 80° ± 5°. Le respect de cette tolérance ne permet pas d’abaisser suffisamment l’angle des marches de sorte à obtenir un bon recouvrement du superstrat. Nous nous sommes donc focalisés sur la réalisation de guides chargés, plus facile à mettre en œuvre. Nous avons réalisé deux types de guides d’onde afin de les caractériser optiquement : des guides planaires et des guides de structure chargée. La caractérisation du guide planaire a permis de prouver le guidage de la lumière dans toute la bande spectrale [6 – 20 µm] ce qui n’avait jamais été réalisé auparavant pour des guides d’onde à base de verres chalcogénures. Des guides plans à base de verres chalcogénures ont déjà été caractérisés mais aux longueurs d’onde des télécommunications à λ = 1,55 µm. Parmi les différents travaux, on peut citer par exemple ceux de Seddon et al. qui ont caractérisé à λ = 1,55 µm des guides plans constitués d’une couche Ge17As18Se65 de 6 µm d’épaisseur déposée sur un substrat silicium [33]. On peut également faire état des travaux de Anne et al. portant sur des guides plans constitués d’une couche Ge20Ga5Sb10S65 d’épaisseur 6µm déposée sur un wafer silicium ont également été caractérisés à cette même longueur d’onde [60]. Nous avons ensuite démontré le bon confinement bidimensionnel de la lumière à λ = 10,6 µm dans un guide de structure chargée. Les pertes optiques intrinsèques au matériau et 152 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge les pertes optiques de couplage n’excèdent pas 4 dB. L’objectif à atteindre étant 3 dB, ce premier résultat est très encourageant. La plupart des guides chargés sont caractérisés aux longueurs d’onde des télécommunications à savoir à λ = 1,55 µm : c’est le cas des guides constitués de couches du système As2Se3 [34, 74] et As2S3 [32] [27]. Récemment, des guides à base de couches As2S3 ont été caractérisés à une longueur d’onde de λ = 4,8 µm avec des pertes de propagation de 4,5 dB/cm [75]. Les seules caractérisations à une longueur d’onde plus importante dont nous avons connaissance ont été réalisées sur un composant fabriqué au laboratoire. Ce composé était constitué d’une couche du système Te-As-Se déposée sur un substrat chalcogénure As2S3 et a en effet caractérisé à 10,6 µm avec des pertes de propagation de l’ordre de 10 dB/cm [37]. La différence majeure entre ce composant et ceux que nous avons réalisés dans le cadre de cette thèse est le domaine spectral pouvant être couvert : [6-20 µm] pour les verres du système Te-Ge contre [2-16 µm] pour les verres Te-As-Se. Un premier résultat concernant la capacité de filtrage modal de nos échantillons a été obtenu. L’efficacité de rejet de la lumière des guides chargés composés uniquement de verres chalcogénures (couche Te-Ge déposée sur substrat Te75Ge15Ga10) a été estimée à environ 10-3. Ce résultat crucial pour l’utilisation des guides d’onde en vue d’application en interférométrie spatiale s’avère très encourageant. 153 Chapitre D : Des couches Te-Ge vers les guides d’onde infrarouge 154 Conclusion générale Conclusion générale 155 Conclusion générale 156 Conclusion générale Le but de ce travail était de démontrer la faisabilité de filtres modaux basés sur la technologie d’optique intégrée, pour une application en interférométrie spatiale. Il a donc consisté en l’étude de guides d’onde canaux monomodes pouvant fonctionner dans toute la bande spectrale allant de 6 à 20 µm, imposée par l’application. La première partie du travail a permis d’identifier les matériaux adéquats et de choisir la méthode de réalisation des guides. Les verres tellurures, et plus précisément les verres de composition proche du verre remarquable Te75Ge15Ga10, ont été retenus. La technique de fabrication des guides que nous avons retenue est basée sur l’empilement et la gravure de couches, méthode déjà utilisée au laboratoire pour fabriquer des guides à base de matériaux chalcogénures. L’originalité du travail a été de fabriquer des guides d’onde de grandes dimensions (épaisseur des couches et profondeur de gravure) pour satisfaire aux exigences du projet. La deuxième partie du travail a porté sur l’étude des couches du système ternaire Te-Ge-Ga. La première étape a consisté à mettre en place la technique de dépôt choisie, à savoir la co-évaporation thermique. Des couches de compositions très différentes ont ensuite été déposées en évaporant le tellure et le germanium par effet Joule et le gallium par bombardement électronique. A partir des résultats issus des caractérisations des couches (diffraction des rayons X et microsonde électronique), nous avons pu établir le domaine amorphe du diagramme ternaire Te-Ge-Ga. En particulier, nous avons mis en évidence que le domaine amorphe du système Te-Ge était particulièrement large comparé à celui qui est obtenu pour les matériaux massifs correspondants. Les indices de réfraction à 1,55 µm des couches Te-Ge étaient par ailleurs du même ordre de grandeur que ceux des couches Te-Ge-Ga. Cela nous a amené à nous affranchir du gallium et à concentrer notre étude sur des couches binaires. Afin de déposer des couches binaires épaisses (typiquement de l’ordre de la dizaine de micromètres), nous avons été amenés à changer et à optimiser la configuration de dépôt : les couches Te-Ge ont finalement été déposées en évaporant le tellure depuis deux sources à effet Joule simultanément, et le germanium par bombardement électronique. Dans ces conditions, des couches Te-Ge d’épaisseurs pouvant atteindre 18 µm ont été obtenues. Elles se sont avérées adhérentes, homogènes en composition et en épaisseur et caractérisées par de faibles rugosités. Malgré une structure colonnaire, elles sont denses : la taille des colonnes est négligeable par rapport à l’épaisseur de la couche. Ces couches présentent un comportement thermique similaire à celui des verres massifs avec l’apparition d’un deuxième 157 Conclusion générale pic de cristallisation au-delà de 80 % atomique en tellure, et une diminution de la température de transition vitreuse avec l’augmentation du pourcentage atomique en tellure. Les caractérisations optiques des couches ont permis de mettre en évidence un comportement quasi-linéaire de l’indice de réfraction, mesuré à λ = 10,6 µm par la méthode des m-lines, en fonction du taux de tellure dans la couche. A partir de ce résultat, et compte tenu du choix du substrat, à savoir le verre de composition Te75Ge15Ga10, nous avons pu déterminer que la composition de la couche de cœur devait être de 82 % atomique en tellure, tandis que celle du superstrat éventuel devait être de 80 % atomique en tellure. La troisième partie du travail concerne la modification de la géométrie de la couche de cœur par gravure de cette dernière. Après avoir choisi la gravure physique réactive et un mélange de gaz réactifs constitué d’argon, d’oxygène et de trifluorométhane, nous avons étudié l’influence des différents paramètres (proportions des gaz réactifs dans le mélange, pression dans l’enceinte, puissances RF…) sur la gravure des couches Te-Ge, notamment sur la vitesse, la sélectivité et le profil obtenu. Nous avons ainsi démontré que nous étions capables de graver sur des profondeurs pouvant dépasser 10 µm mais aussi de modifier le profil de marche en faisant variant les différents paramètres de gravure. La dernière partie du travail concerne la réalisation et la caractérisation de différents guides d’onde. Deux types de structures guidantes ont été envisagées : les guides chargés pour lesquels la couche de cœur est gravée partiellement et les guides rubans pour lesquels la couche de cœur est gravée entièrement et recouverte par un superstrat. Du fait d’une incompatibilité entre les marges de tolérance concernant l’indice de réfraction du superstrat et l’angle des marches avec la réalité expérimentale, l’étude des structures rubans n’a pu être menée jusqu’à son terme. Les principaux guides réalisés sont donc de type chargé. Une des étapes cruciales pour caractériser optiquement les guides est la préparation de leurs faces d’entrée et de sortie. Deux méthodes ont été explorées : le clivage et le polissage. Après un gros travail technologique, le polissage a conduit à des résultats satisfaisants permettant la caractérisation optique des différents guides réalisés. Le guidage de la lumière dans tout le domaine spectral [6-20 µm] a été prouvé dans un guide d’onde plan, ce qui n’avait jamais été réalisé auparavant. Nous avons également démontré le bon confinement de la lumière à λ = 10,6 µm dans un guide d’onde chargé avec des pertes inférieures à 4 dB. Enfin, l’efficacité de réjection de ces guides a été estimée à.10-3, valeur compatible avec les exigences du projet. 158 Conclusion générale En conclusion, ce travail a permis de démontrer la faisabilité de filtres modaux fonctionnant dans toute la gamme spectrale du projet Darwin, ce qui représente une première dans le domaine de l’optique intégrée. Tous ces résultats ont été obtenus après de nombreux efforts technologiques tant au niveau du dépôt des couches tellurures que de leur gravure. Ils sont très encourageants. Ils ouvrent la porte au développement de composants à géométrie plus complexe, mais aussi à la réalisation de micro-capteurs notamment pour la métrologie de l’environnement ou dans le domaine de la biologie. 159 Conclusion générale 160 Annexes Annexes 161 Annexes 162 Annexe A : Les balances à quartz Annexe A Les balances à quartz Le contrôle de l’épaisseur de l’élément évaporé (tellure, germanium ou gallium dans notre cas) est réalisé au moyen d’une microbalance piézoélectrique dont la fréquence propre d’oscillation est fonction de sa masse et donc de l’épaisseur de l’élément déposé dessus. Une microbalance à quartz est un cas particulier de microbalance piézoélectrique dans lequel le matériau piézoélectrique utilisé est le quartz. Elle est classiquement réalisée en déposant deux électrodes conductrices de part et d'autre du quartz (Figure Annexe A. 1). Face avant Face arrière Electrode avant Zone de dépôt Electrode arrière Figure Annexe A. 1 : Schéma typique d’une balance à quartz. Le quartz est représenté en gris, les deux électrodes en jaune. Le principe de la balance à quartz consiste à détecter la dérive de la fréquence d’oscillation du quartz par la modification de sa masse lors du dépôt de la couche. C’est donc une mesure électrique qu’il faut bien évidemment étalonner. La fréquence de référence est définie au début du dépôt. En mesurant le décalage de fréquence en fonction du temps, on peut aussi déterminer la vitesse d’évaporation des couches déposées. 163 Annexe A : Les balances à quartz L’équation de Sauerbrey lie la variation de masse Δm sur les électrodes avec la variation Δf de fréquence de résonance : avec : Δf : la variation de fréquence de résonance, f0 : la fréquence de résonance intrinsèque du quartz, A : la surface active du quartz (entre les deux électrodes), ρq : la densité du quartz (ρq = 2.648 g/cm3), µq : le module de cisaillement du quartz (μq = 2.947x1011 g/cm.s2), Δm : la variation de masse sur les électrodes. Le quartz doit être maintenu à une température constante pour éviter la dérive de sa fréquence de résonance avec la température, c’est pour cela que les balances à quartz sont refroidies par circulation d’eau tout au long de la procédure de dépôt. Comme nous l’avons dit dans le chapitre B, nous devons appliquer un coefficient géométrique, appelé « tooling factor », à la balance à quartz de sorte à ce que l’épaisseur annoncée par cette dernière soit en accord avec l’épaisseur mesurée par profilométrie sur le substrat. 164 Annexe B : Synthèse de verres massifs Te-Ge par la méthode d’ultra-trempe Annexe B Synthèse de verres massifs Te-Ge par la méthode d’ultra-trempe La méthode de synthèse par ultra-trempe a été utilisée pour l’élaboration de verres massifs du système Te-Ge. Le matériau étudié est fondu sous atmosphère inerte et de petites gouttelettes tombent entre deux rouleaux tournant rapidement. La température diminue très rapidement dissipé et des vitesses de trempe très élevées peuvent être obtenues. Cela permet de préparer des verres amorphes qui, par une méthode de trempe conventionnelle, cristalliseraient. C’est pour cela que nous avons utilisé cette méthode pour synthétiser des verres massifs Te-Ge afin de pouvoir comparer leurs propriétés avec les couches Te-Ge correspondantes. Dans un premier temps, les verres Te-Ge sont synthétisés par la méthode classique de synthèse des verres, à partir d’un mélange de poudre de tellure et de germanium dans des proportions stœchiométriques. Le mélange est placé dans un tube de silice puis scellé sous vide. Le mélange est chauffé à 660°C. Il est maintenu à cette température pendant 24h de sorte à l’homogénéiser avant d’effectuer une trempe dans un mélange d’eau, de glace et de sel. Le matériau ainsi obtenu est écrasé sous forme de petits morceaux qui sont à nouveau fondus en utilisant la méthode d’ultra-trempe. Cette synthèse est effectuée dans une boite à gant sous atmosphère d’argon. La Figure Annexe B. 1 présente le montage expérimental. De petits morceaux de matériaux sont introduits dans un tube de quartz troué en son fond. Le tout est ensuite chauffé en utilisant un four à induction, qui permet une augmentation très rapide de la température du mélange. Une pression, induite par un jet d’argon, est appliquée au mélange fondu pour forcer de petites gouttes à passer au travers du trou situé au fond du tube de quartz. Ces gouttes tombent ensuite entre les deux rouleaux tournants. Les matériaux obtenus, comparables à de petites flaques (de quelques cm² de surface et d’épaisseur de l’ordre de 45 à 85 µm), sous récupérés dans un collecteur en aluminium. 165 Annexe B : Synthèse de verres massifs Te-Ge par la méthode d’ultra-trempe Figure Annexe B. 1 : Montage expérimental de la synthèse des verres Te-Ge par la technique d’ultra-trempe. 166 Bibliographie Bibliographie 167 Bibliographie 168 Bibliographie [1] http://www.esa.int/science/darwin [2] B. Mennesson, M. Ollivier and C. Ruilier, "Use of single-mode waveguides to correct the optical defect of a nulling interferometer", Journal of Optical Society America, (2002), 19 (3), 596 [3] J. D. B. Bradley, P. E. Jessop and A. P. Knights, "Silicon waveguide-integrated optical power monitor with enhanced sensitivity at 1550 nm", Applied Physics Letters, (2005), 86 241103 [4] E. Laurent "Premiers développements de l'optique intégrée planaire monomodes pour les longueurs d'onde entre 2 et 20 µm. Applications à l'interférométrie stellaire." Thèse, Institut National Polytechnique de Grenoble (2003) [5] K. L. Wang, J. L. Liu and G. Jin, "Self-assembled Ge quantum dots on Si and their applications", Journal of Crystal Growth, (2002), 237-239 1892-1897 [6] S. Famà, L. Colace, G. Masini, G. Assanto and H. C. Luan, "High performance germanium-on-silicon detectors for optical communications", Applied Physics Letters, (2002), 81 (4), 586-588 [7] M. S. Chang, W. S. C. Chang, B. L. Sopori, H. R. Vann, M. W. Muller, M. G. Craford, D. Finn, W. O. Groves and A. H. Herzog, "GaAs optical waveguide structures at 10.6-µm wavelength", Applied Optics, (1975), 14 1572 [8] J. Rams, N. V. Sochinskii, V. Munõz and J. M. Cabrera, "CdTe epilayers for uses in optical waveguides", Applied Physics A, (2000), 71 277-279 [9] E. M. Gavrushchuk, "Polycrystalline Zinc Selenide for IR Optical Applications", Inorganic Materials, (2003), 39 (9), 883-898 [10] A. Millo, L. Lobachinsky and A. Katzir, "Single-mode octogonal photonic crystal fibers for the middle infrared", Applied Physics Letters, (2008), 92 021112 [11] B. Dekel, Z. Barkay and A. Katzir, "The study of waveguides made by diffusion of Br into AgCl substrates and the transmission of mid-IR radiation through these waveguides", Optics Communications, (2001), 199 383-388 169 Bibliographie [12] R. Grille, G. Martin, L. Labadie, B. Arezki, P. Kern, T. Lewi, A. Tsun and A. Katzir, "Single mode mid-infrared silver halide asymmetric flat waveguide obtained from crystal extrusion", Optics Express, (2009), 17 (15), 12516 [13] V. S. Shiryaev, J. L. Adam, X. H. Zhang and M. F. Churbanov, "Study of characteristic temperatures and nonisothermal crystallisation kinetics in As-Se-Te glass system", Solid State Sciences, (2005), 7 209-215 [14] V. S. Shiryaev, C. Boussard-Plédel, P. Houizot, T. Jouan, J. L. Adam and J. Lucas, "Single-mode infrared fibers on Te-As-Se glass system", Materials Science and Engineering B, (2006), 127 138-143 [15] M. F. Churbanov, V. S. Shiryaev, A. I. Suchkov, A. A. Pushkin, V. V. Gerasimenko, R. M. Shaposhnikov, E. M. Dianov, V. G. Plotnichenko, V. V. Koltashev, Y. N. Pyrkov, J. Lucas and J. L. Adam, "High-Purity As-S-Se and As-Se-Te Glasses and Optical Fibers", Inorganic Materials, (2006), 43 (4), 441-447 [16] C. Vigreux, V. Ranieri, L. Labadie, J. E. Broquin, P. Kern and A. Pradel, "Waveguide based on Te2As3Se5 thick films for spatial interferometry", Journal of Non-Crystalline Solids, (2006), 352 2416 [17] B. Bureau, S. Danto, H. L. Ma, C. Boussard-Plédel, X. H. Zhang and J. Lucas, "Tellurium based glasses: A ruthless glass to crystal competition", Solid State Sciences, (2008), 10 427-433 [18] X. H. Zhang, L. Calvez, V. Seznec, H. L. Ma, S. Danto, P. Houizot, C. Boussard-Plédel and J. Lucas, "Infrared transmitting glasses and glass-ceramics", Journal of Non-Crystalline Solids, (2006), 352 2411 [19] S. Danto, P. Houizot, C. Boussard-Pledel, X. H. Zhang, F. Smektala and J. Lucas, "A Family of Far-Infrared-Transmitting Glasses in the Ga-Ge-Te System for Space Applications", Advanced Functional Materials, (2006), 16 1847 [20] P. Petkov, M. Wuttig, P. Ilchev and T. Petkova, "Optical band gap of gallium containing telluride thin films", Journal of Optoelectronics and Advanced Materials, (2003), 5 (5), 1101 [21] P. Petkov, V. Ilcheva, D. Wamwangi, M. Wuttig, P. Ilchev and T. Petkova, "Phase transition of gallium containing telluride thin films", Journal of Optoelectronics and Advanced Materials, (2009), 11 (9), 1261-1264 170 Bibliographie [22] Y. Sripathi, L. K. Malhotra and G. B. Reddy, "GaGeTe films as phase-change optical recording media", Thin Solid Films, (1995), 270 60 [23] S. Zhang, X. H. Zhang, M. Barillot, L. Calvez, C. Boussard, B. Bureau, J. Lucas, V. Kirshner and G. Parent, "Purification of Te75Ge15Ga10 glass for far infrared transmitting optics for space application", Optical Materials, (2010), 32 1055-1059 [24] J. F. Viens, C. Meneghini, A. Villeneuve, T. V. Galstian, E. J. Knystautas, M. A. Duguay, K. A. Richardson and T. Cardinal, "Fabrication and Characterization of Integrated Optical Waveguides in Sulfide Chalcogenide Glasses", Journal of Lightwave Technology, (1999), 17 (7), 1184 [25] N. Hô, M. C. Phillips, H. Qiao, P. J. Allen, K. Krishnaswami, B. J. Riley, T. L. Myers and N. C. Anheier, "Single-mode low loss chalcogenide glass waveguides for the mid-infared", Optics Letters, (2006), 31 (12), 1860 [26] A. V. Rode, A. Zakery, M. Samoc, R. B. Charters, E. G. Gamaly and B. Luther-Davies, "Laser-deposited As2S3 chalcogenide films for waveguide applications", Applied Surface Science, (2002), 197-198 481-485 [27] A. Zakery, Y. Ruan, A. V. Rode, M. Samoc and B. Luther-Davies, "Low-loss waveguides in ultafast laser-deposited As2S3 chalcogenide films", Optical Society of America, (2003), 20 (9), 1844 [28] D. A. Turnbull, J. S. Sanghera, V. Q. Nguyen and I. D. Aggarwal, "Fabrication of waveguides in sputtered films of GeAsSe glass via photodarkening with above bandgap light", Materials Letters, (2003), 58 51-54 [29] A. Ganjoo, H. Jain, C. Yu, R. Song, J. V. Ryan, J. Irudayaraj, Y. J. Ding and C. G. Pantano, "Planar chalcogenide glass waveguides for IR evanescent wave sensors", Journal of Non-Crystalline Solids, (2006), 352 584 [30] M. Frumar and T. Wagner, "Ag doped chalcogenide glasses and their applications", Current Opinion in Solid State and Materials Science, (2003), 7 117-126 [31] C. C. Huang and D. W. Hewak, "Silver-doped germanium sulphide glass channel waveguides fabricated by chemical vapour deposition and photo-dissolution process", Thin Solid Films, (2006), 500 247-251 171 Bibliographie [32] J. Fick, B. Nicolas, C. Rivero, K. Elshot, K. A. Richardson, M. Fischer and R. Vallée, "Thermally activated silver diffusion in chalcogenide thin films", Thin Solid Films, (2002), 418 215-221 [33] A. B. Seddon, W. J. Pan, D. Furniss, C. A. Miller, H. Rowe, D. Zhang, A. McBrearty, Y. Zhang, A. Loni, P. Sewell and T. M. Benson, "Fine embossing of chalcogenide glasses - a new fabrication route for photonic integrated circuits", Journal of Non-Crystalline Solids, (2006), 352 2515-2520 [34] Y. Ruan, W. Li, R. Jarvis, N. Madsen, A. Rode and B. Luther-Davies, "Fabrication and characterization of low loss rib chalcogenide waveguides made by dry etching", Optics Express, (2004), 12 (21), 5140-5145 [35] S. J. Madden, D. Y. Choi, D. A. Bulla, A. V. Rode, B. Luther-Davies, V. G. Ta'eed, M. D. Pelusi and B. J. Eggleton, "Long, low loss etched As2S3 chalcogenide waveguides for all-optical signal regeneration", Optics Express, (2007), 15 (22), 14414 [36] V. Balan, C. Vigreux, A. Pradel, A. Llobera, C. Dominguez, M. I. Alonso and M. Garriga, "Chalcogenide glass-based rib ARROW waveguide", Journal of Non-Crystalline Solids, (2003), 326 455 [37] C. Vigreux, E. Bonhomme, A. Pradel, J. E. Broquin, L. Labadie and P. Kern, "Transmission at 10.6 µm of Te2As3Se5 rib-waveguides on As2S3 substrate", Applied Physics Letters, (2007), 90 011110 [38] A. Abrutis, V. Plausinaitiene, M. Skapas, C. Wiemer, O. Salicio, M. Longo, A. Pirovano, J. Siegel, W. Gawelda, S. Rushworth and C. Giesen, "Chemical vapor deposition of chalcogenide materials for phase-change memories", Microelectronic Engineering, (2008), 85 2338-2341 [39] C. C. Huang, K. Knight and D. W. Hewak, "Antimony germanium sulphide amorphous thin films fabricated by chemical vapour deposition", Optical Materials, (2007), 29 1344-1347 [40] J. M. Gonzalez-Leal, R. Prieto-Alcon, M. Vleck and E. Marquez, "Structural and optical characterization of amorphous As40Se60 and As40S60 films prepared by plasma-enhanced chemical vapor deposition ", Journal of Non-Crystalline Solids, (2004), 345-346 88-92 [41] S. Song, N. Carlie, J. Boudies, L. Petit, K. A. Richardson and C. B. Arnold, "Spin-coating Ge23Sb7S70", Journal of Non-Crystalline Solids, (2009), 355 2272-2278 172 Bibliographie [42] T. Kohoutek, T. Wagner, J. Orava, M. Krbal, A. Fejfar, T. Mates, S. O. Kasap and M. Frumar, "Surface morphology of spin-coated As-S-Se chalcogenide thin films", Journal of Non-Crystalline Solids, (2007), 353 1437-1440 [43] T. Wagner, T. Kohoutek, V. Perina, A. Mackova, V. Hnatowitz, T. Wagner, S. O. Kasap, M. Krbal, M. Frumar and M. Vlcek, "Rutherford backscattering spectroscopy of amorphous films of Ag-As-S system prepared by spin-coating technique", Nuclear Instruments and Methods in Physics Research B, (2004), 219-220 875-879 [44] J. Orava, T. Wagner, M. Krbal, T. Kohoutek, M. Vleck and M. Frumar, "Selective wet-etching of undoped and silver photodoped amorphous thin films of chlacogenide glasses in inorganic alkaline solutions", Journal of Non-Crystalline Solids, (2006), 352 1637-1640 [45] J. M. Gonzales-Leal, R. Pietro-Alcon, J. A. Angel and E. Marquez, "Optical properties of thermally evaporated amorphous As40S60-xSex films", Journal of Non-Crystalline Solids, (2003), 315 134-143 [46] J. Hu, V. Tarasov, A. Agarwal, L. Kimerling, N. Carlie, L. Petit and K. Richardson, "Fabricating and testing of planar chalcogenide waveguide integrated microfluidic sensor", Optics Express, (2007), 15 (5), 2307 [47] J. Hu, V. Tarasov, N. Carlie, L. Petit, A. Aggarwal, K. Richardson and L. Kimerling, "Exploration of waveguide fabrication from thermally evaporated Ge-Sb-S glass films", Optical Materials, (2008), 30 1560-1566 [48] M. A. Abdel-Rahin, "Annealing dependence of optical and electrical properties of Ga8As46Te46 thin films", Journal of Physics and Chemistry of Solids, (1999), 60 29 [49] S. A. Fayek, "Study of non-isothermal kinetics, electrical and optical properties of (GaSeTe) films", Vacuum, (2004), 72 11 [50] K. A. Cerqua-Richardsona, J. M. McKinley, B. Lawrencea, S. Joshia and A. Villeneuve, "Comparison of nonlinear optical properties of sulfide glasses in bulk and thin film form ", Optical Materials, (1998), 10 155-159 [51] H. Ticha, L. Tichý, P. Nagels, E. Sleeckx and R. Callaerts, "Temperature dependence of the optical gap in thin amorphous films of As2S3, As2Se3 and other basic non-crystalline chalcogenides ", Journal of Physics and Chemistry of Solids, (2000), 61 545-550 173 Bibliographie [52] J. M. Merino, M. León, F. Rueda and R. Diaz, "Flash evaporation of chalcogenide thin films ", Thin Solid Films, (2000), 361-362 22-27 [53] T. Okabe and M. Nakagawa, "Crystallisation behavior and local order of amorphous GexTe1-x films", Journal of Non-Crystalline Solids, (1986), 88 182-195 [54] C. Xu, B. Liu, Z. Song, S. Feng and B. Chen, "Reactive-ion etching of Sn-doped Ge2Sb2Te5 in CHF3/O2 plasma for non-volatile phasechange memory device", Thin Solid Films, (2008), 516 7871-7874 [55] G. Feng, B. Liu, Z. Song, S. Feng and B. Chen, "Reactive-ion etching of Ge2Sb2Te5 in CF4/Ar plasma for non-volatile phase-change memories", Microelectronic Engineering, (2008), 85 1699-1704 [56] S. M. Yoon, N. Y. Lee, S. O. Ryu, Y. S. Park, S. Y. Lee, A. J. Choi and B. G. Yu, "Etching characteristics of Ge2Sb2Te5 using high-density helicon plasma for non-volatile phase-change memory applications", Japanese Journal of Applied Physics, (2005), 44 (27), 869-872 [57] D. J. Sarrach, J. P. DeNeufville and W. L. Haworth, "Studies of amorphous Ge-Se-Te alloys (I): Preparation and calorimetric observations", Journal of Non-Crystalline Solids, (1976), 22 245-267 [58] V. Nazabal, P. Němec, A. M. Jurdyc, S. Zhang, F. Charpentier, H. Lhermite, J. Charrier, J. P. Guin, A. Moreac, M. Frumar and J. L. Adam, "Optical waveguide based on amorphous Er3+-doped Ga–Ge–Sb–S(Se) pulsed laser deposited thin films ", Thin Solid Films, (2010), 518 4941-4947 [59] J. Charrier, M. L. Anne, H. Lhermite, V. Nazabal, J. P. Guin, F. Charpentier, T. Jouan, F. Henrio, D. Bosc and J. L. Adam, "Sulphide GaxGe25−xSb10S65(x=0,5) sputtered films: Fabrication and optical characterizations of planar and rib optical waveguides", Journal of Applied Physics, (2008), 104 073110 [60] M. L. Anne, V. Nazabal, V. Moizan, C. Boussard-Plédel, B. Bureau, J. L. Adam, P. Nemec, M. Frumar, A. Moreac, H. Lhermite, P. Camy, J. L. Doualan, J. P. Guin, J. L. Person, F. Colas, C. Compere, M. Lehaitre, F. Henrio, D. Bosc, J. Charrier, A. M. Jurdyc and B. Jacquier, "Chalcogenide waveguide for IR optical range", Proceedings SPIE, (2007), 174 Bibliographie [61] E. Barthélémy, C. Vigreux, P. Yot and A. Pradel, "Co-thermal evaporation: a new method to deposit telluride films", Optoelectronics and Advanced Materials, (2007), 1 (10), 487 [62] A. Richardt and I. Richardt "Les évaporations sous vide" E. InFine (2000) [63] R. Swanepoel, "Determination of the thickness and optical constants of amorphous silicon", Journal of Physics E: scientific instruments, (1983), 16 1214 [64] A. A. Piarristeguy, E. Barthélémy, M. Krbal, J. Frayret, C. Vigreux and A. Pradel, "Glass formation in the GexTe100-x binary system: Synthesis by twin roller quenching and cothermal evaporation", Journal of Non-Crystalline Solids, (2009), 355 2088-2091 [65] J. P. DeNeufville, "Chemical aspects of glass formation in telluride systems", Journal of Non-Crystalline Solids, (1972), 8-10 85-105 [66] J. Orava, T. Wagner, M. Krbal, T. Kohoutek, M. Vleck, P. Klapetek and M. Frumar, "Selective dissolution of Agx(As0.33S0.67-ySey)100-x chalcogenide thin films", Journal of Non-Crystalline Solids, (2008), 354 533-539 [67] B. J. Riley, S. K. Sundaram, B. R. Johnson and L. V. Saraf, "Differential etching of chalcogenide for infrared photonic waveguide structures", Journal of Non-Crystalline Solids, (2008), 354 813-816 [68] M. Vleck, S. Schroeter, J. Cech, T. Wagner and T. Glaser, "Selective etching of chalcogenide and its applicatin for fabrication of diffractive optical elements", Journal of Non-Crystalline Solids, (2003), 326-327 515-518 [69] X. Xia, Q. Chen, C. Tsay, C. B. Arnold and C. K. Madsen, "Low-loss chalcogenide waveguides on lithium niobate for the mid-infrared", Optics Letters, (2010), 35 (19), 3228 [70] D. Y. Choi, S. Maden, A. Rode, R. Wang and B. Luther-Davies, "Plasma etching of As2S3 films for optical waveguides", Journal of Non-Crystalline Solids, (2008), 354 3179-3183 [71] W. Li, Y. Ruan, B. Luther-Davies and A. Rode, "Dry-etch of As2S3 thin films for optical waveguide fabrication", Journal Vacuum Science Thechnology A, (2005), 23 (6), 1626 175 Bibliographie [72] C. J. Mogab, A. C. Adams and D. L. Flamm, "Plasma etching of Si and SiO2—The effect of oxygen additions to CF4 plasmas", Journal of Applied Physics, (1978), 49 3796 [73] D.-Y. Choi, S. Madden, A. Rode, R. Wang and B. Luther-Davies, "Plasma etching of As2S3 films for optical waveguides ", Journal of Non-Crystalline Solids, (2008), 354 3179-3183 [74] W. J. Pan, H. Rowe, D. Zhang, Y. Zhang, A. Loni, D. Furniss, P. Sewell, T. M. Benson and A. B. Seddon, "One-step hot embossing of optical rib waveguides in chalcogenide glasses", Microwave and Optical Technology Letters, (2007), 50 (7), 1961-1963 [75] C. Tsay, E. Mujagic, C. K. Madsen, C. F. Gmachl and C. B. Arnold, "Mid-infrared characterization of solution-processed As2S3 chalcogenide glass waveguides", Optics Express, (2010), 18 (15), 15523 176 ABSTRACT Development of IR waveguides based on telluride thick films for spatial interferometry. The Darwin mission, an interferometric spatial project initiated by ESA, requires modal filters being able to work in the whole spectral range [6-20 µm]. In the framework of this work, we propose the realization of modal filters based on waveguides obtained by stacking and etching chalcogenide films. The originality of this work lies in the fact that the realized waveguides have large dimensions (thick films and deep etching), to satisfy the project requirements. The first step consisted in choosing the deposition method which allows obtaining thick films. The thermal co-evaporation was setting up and the deposition parameters were optimized. Films with thickness which can reach 17 µm, of good quality (adhesive, amorphous, dense and homogeneous), transparent from 6 to 20 µm and with controlled refractive index were obtained. The physical reactive etching of these films, by using a gas mixture CHF3/O2/Ar, constituted the second part of this work. The obtaining of deep rib which can exceed 10 µm, presenting etching profiles of good quality was demonstrated. The elaborated IR waveguides were optically characterized after preparation of their entrance and exit faces. The observation of light confinement on a guiding bench at λ = 10.6 µm and the obtaining of a rejection rate of 10-3 on a nulling interferometry bench allowed confirming that the waveguides based on the stacking and etching of telluride films was a choice solution as modal filters for the spatial interferometry. Keywords: Telluride glasses, IR waveguides, Thermal co-evaporation, Reactive Ion Etching RÉSUMÉ La mission Darwin, un projet d’interférométrie spatiale initié par l’ESA, nécessite l’utilisation de filtres modaux fonctionnant dans la gamme spectrale [6-20 µm]. Dans le cadre de ce travail, nous proposons la réalisation de filtres modaux basés sur des guides d’onde « tout tellurures » obtenus par la méthode d’empilement et de gravure. L’originalité de ce travail réside dans le fait que les guides réalisés sont de grandes dimensions (couches épaisses et profondeurs de gravure importantes), pour satisfaire aux exigences du projet. La première étape a donc consisté à choisir une méthode de dépôt qui permette d’obtenir des couches épaisses. La co-évaporation thermique a ainsi été mise en place et les paramètres de dépôt optimisés. Des couches d’épaisseur pouvant atteindre 17 µm, de bonne qualité (adhérentes, amorphes, denses et homogènes), transparentes de 6 à 20 µm et d’indice de réfraction contrôlé ont pu être obtenues. La gravure physique réactive (RIE) de ces couches, en utilisant un mélange gazeux CHF3/O2/Ar, a constitué la deuxième partie de ce travail. L’obtention de marches de profondeur pouvant dépasser 10 µm, présentant des profils de gravure de qualité, a été démontrée. Les différents guides d’onde IR réalisés ont été caractérisés optiquement après préparation de leurs faces d’entrée et de sortie. L’observation d’un bon confinement de la lumière sur un banc de guidage à λ = 10,6 µm et l’obtention d’un taux de réjection de 10 -3 sur un banc d’interférométrie annulante nous ont permis de confirmer que les guides d’onde à base de couches tellurures et réalisés par la méthode d’empilement et de gravure constituaient une solution de choix en tant que filtres modaux pour l’interférométrie spatiale. Mots clés : Verres tellurures ; Guides d’ondes IR ; Co-évaporation thermique ; Gravure RIE ___________________________________________________________________________ Équipe Physico-chimie des Matériaux Désordonnés et Poreux Institut Charles Gerhardt Montpellier - UMR 5253 Université Montpellier 2, CC 1503, Place Eugène Bataillon, 34095 Montpellier Cedex 5