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La véridique et bienheureuse histoire de Georgia Lapoussette Véronique Ovaldé La véridique et bienheureuse histoire de Georgia Lapoussette Du même auteur Le Sommeil des poissons, Seuil, 2000 ; rééd. coll. « Points », 2009 Toutes choses scintillant, L’Ampoule, 2002 ; rééd. coll. « J’ai lu », 2005 Les hommes en général me plaisent beaucoup, Actes Sud, 2003 ; rééd. coll. « Babel », 2005, « J’ai lu », 2010 Déloger l’animal, Actes Sud, 2005 ; rééd. coll. « Babel », 2007 ; rééd. coll. «J’ai lu», 2008 Et mon cœur transparent, éditions de l’Olivier, 2008 ; rééd. coll. « J’ai lu », 2009 Ce que je sais de Vera Candida, éditions de l’Olivier, 2009 Cet inédit vous est offert par les librairies Initiales La véridique et bienheureuse histoire de Georgia Lapoussette Véronique Ovaldé Ça pourrait commencer comme ça… Jean-Marc Brunier librairie Le Cadran Lunaire, Mâcon Il était une fois une brune nana pétillante et sémillante qui racontait des histoires. Des histoires, des histoires, mais des histoires bien à elle. Figures d’ogres et de géants, princesses, sorcières et autres créatures de notre imagerie collective surgissent de l’écriture inventive de ce Grimm en jupon, notre Perrault des temps modernes, Andersen du Val-de-Marne. Mais bon Dieu, d’où lui vient ce talent ? Enfance brimée, adolescence frustrée, cerveau atrophié, imagination débridée, nous laisserons à d’autres cette psychanalyse bon marché. Nous, ce qu’on sait, c’est que toute petite, dans les livres elle est tombée et y a fait ses humanités. Et que dans son panthéon, elle y a mis les Nippons Ogawa et Murakami, le Nord-Américain Richard Brautigan, et du sud de la même Amérique, Gabriel Garcia Marquez. Ça pourrait être pire comme maîtres à écrire, non ? De la lecture à l’écriture, il n’y avait qu’un pas à franchir. Ce qu’elle a fait allégrement, naturellement, fantastiquement, effrontément même. Et c’était parti pour la grande écriture. Personnages, pays imaginés, syntaxe, elle malaxe, malaxe et recrache sur le papier de sa plume enchantée. Alors, dès les premiers mots par nous avalés, on reconnaît son phrasé, sa spontanéité, son univers si particulier et on est captivés, capturés dans ses filets, librement prisonniers. C’est pas possible, cet auteur n’est pas français sommes-nous tentés de penser. Pour sûr, par les mots elle est possédée. Et comme si ça n’y suffisait, notre « contrice » s’est faite éditrice. Guénassia et Pessan sont ses deux premières victimes. Sans aucun doute reconnaissantes, les victimes. Vous voyez, toute une vie aux livres consacrés, nous libraires, nous ne pouvons qu’aimer. Et quant à vous lecteurs adorés, avec cette nouvelle de fin d’année, soit vous découvrirez et serez à votre tour envoûtés, soit avec bonheur vous la retrouvez. Parce que dans ce texte offert avec toute sa générosité, elle y est vraiment tout entière. Allez ! À votre tour d’en profiter, de vous en délecter. Et vous en redemanderez. Pas de problème, on est là pour vous approvisionner. Maintenant embarquez, embarquez. On vous invite avec Véronique à passer Noël au pays Ovaldé. La véridique et bienheureuse histoire de Georgia Lapoussette Le 1er avril 1959, Georgia Lapoussette naît à Poindeau en Colombie Britannique. Deux choses nous semblent indispensables à préciser dès l’abord sur le patronyme de Georgia et aussi sur le nom de la ville. Les Lapoussette vivent à Poindeau depuis quatre générations. Ce sont de très petites personnes. Le père de Georgia Lapoussette a difficilement atteint le mètre cinquantecinq – et encore, lors de disputes avec sa femme, celle-ci l’a accusé d’avoir falsifié ses papiers militaires et de les lui avoir exhibés à leur rencontre afin de l’impressionner avec cette taille qu’elle devine maintenant fallacieuse. La mère de Georgia Lapoussette, Elizabeth, fait partie de la famille Grancru, ce qui a peut-être à voir avec des vignobles de l’ancien continent, mais plus certainement avec la grande taille de ses membres. Et comme dans toutes les familles où les gens sont grands, la mère de Georgia Lapoussette (qui pourtant n’affiche pas du tout une taille exceptionnelle) voit dans ce hasard génétique quelque chose révélant la supériorité intrinsèque de chacun de ses aïeux sur ceux du pauvre Jean Lapoussette qu’elle a épousé. 11 Les Lapoussette s’appellent ainsi, dit-elle, à cause de l’histoire de la petite Poucette grande comme un pouce. Elizabeth Lapoussette, née Grancru, est parfois franchement inamicale avec son petit mari. En général, quand elle commence à l’attaquer sur sa taille, Jean Lapoussette se plonge dans son journal ou dans le catalogue de gouttières que son employeur a mis à sa disposition. Jean Lapoussette est représentant en gouttières. Ce qui n’est pas pour impressionner sa femme dont la famille est dans la pomme de terre depuis six générations. Poindeau est une ville sans intérêt, elle n’a rien de remarquable. En 1959, elle abrite 8 900 âmes, essentiellement catholiques (avec une famille mormone qui s’est égarée sur le chemin de l’Utah. « Mais d’où venait-elle donc ? » est une blague récurrente à Poindeau. Venait-elle du pôle Nord ? Mais, comme la famille en question (un père, une mère, quatre enfants blonds aux cheveux propres) n’impose son mode de vie à personne, que le père n’est visiblement pas polygame et qu’elle n’a pas d’ardoise à l’épicerie, personne ne trouve à y redire). Tout le monde n’est pas d’accord sur la signification du nom de la ville. Poindeau, ce nom français que la majorité prononce Poïdow, signifie-t-il qu’il n’y a pas d’eau à Poindeau (et dans ce cas que décidément cette ville ne présente pas le moindre intérêt) ou signale-t-il que s’y situait il y a de cela quelques décennies un point de rassemblement de bisons, d’élans et de ratons laveurs près de la grande forêt de pins ? 12 Parce qu’étrangement Poindeau est une ville qui a quelques soucis d’humidité mais pas de réel point d’eau. Poindeau est entourée de marécages où les pêcheurs du coin installent des cabanes sur pilotis pour s’isoler, picoler, médire de leurs femmes et pêcher des poissons-chats et des anguilles épaisses comme ma cuisse. Georgia Lapoussette est la plus jeune d’une fratrie de trois sœurs. Ses sœurs aînées ont déjà treize et onze ans quand elle naît. Elle vient sur le tard, et comme tous les enfants qui viennent sur le tard, on ne sait si elle est venue égayer les jours mâtures de ses parents ou si elle est arrivée de manière impromptue. Au regard des relations d’Elizabeth Lapoussette et de son époux, je dirais que la naissance de Georgia Lapoussette n’a rien de prémédité et qu’elle est née d’un frisson d’enthousiasme bien légitime lors d’un début d’été près des Grands Lacs (où monsieur et madame Lapoussette passent tous leurs mois de juillet dans le chalet de chasse de monsieur Grancru père – un chalet minuscule, mais qui a l’immense double avantage de disposer de moustiquaires à chaque fenêtre et de ne pas coûter un kopek à la bourse légèrement dégarnie de la famille Lapoussette (la vente de gouttières n’étant plus ce qu’elle était)). Et quand Georgia Lapoussette naît, elle sait, comme tous les nouveau-nés, très précisément ce qu’on attend d’elle ; elle va s’atteler à sa tâche avec bonne volonté ; elle est là pour réconcilier monsieur et madame Lapoussette. Elle y mettra réellement du sien, gazouillera et sourira à qui mieux mieux, sera le bébé le plus charmant et le plus docile de tout Poindeau, ne fera jamais une bêtise, endossant son rôle de réconciliatrice si joyeusement que les voisines 13 de madame Elizabeth Lapoussette trouveront toujours un prétexte pour passer la voir l’après-midi (et viseront comme par hasard entre les siestes) juste pour le plaisir de voir ce bébé rayonnant et tranquille. « Elle est si apaisante » est la phrase qu’on entendit le plus souvent dans le salon des Lapoussette pendant des années. Ce qui ne laisse pas de surprendre madame Elizabeth Lapoussette dont les deux filles aînées, si elles n’ont pas été à proprement parler des teignes, se sont plutôt comportées comme des enfants difficiles (ces enfants dont on dit qu’ils ont du caractère – comme si les autres n’en avaient pas – pour se consoler de leur nature capricieuse ou tracassière). Les deux sœurs de Georgia Lapoussette n’aiment pas particulièrement leur petite sœur, ce qui les rapproche pendant un temps (alors que leurs relations ont toujours été houleuses et plutôt basées sur le calcul précis du nombre de boulettes dans l’assiette de l’autre). La famille Lapoussette vit dans une petite maison du centre avec un jardinet pourvu d’un zuma (dont les fruits rouge sombre, veloutés et coniques fascinent Georgia Lapoussette comme s’il s’agissait d’un élément de décoration égaré qui aurait plus sa place dans un salon que sur les branches d’un arbre). Mais quand le père de madame Elizabeth Lapoussette meurt ils héritent (en plus de la cabane de chasse avec les moustiquaires) d’une maison plus spacieuse, légèrement excentrée mais non loin de l’exploitation de pommes de terre qu’a reprise le frère de madame Lapoussette à la mort du patriarche. (Le garçon en question, Martin Grancru, se met à cultiver des pommes de terre de toutes les couleurs et de toutes les saveurs, ce qui lui vaut assez vite d’être mis au ban de la société 14 bienveillante mais un brin conventionnelle de Poindeau. Les pommes de terre qu’il cultive ne sont plus vendues aux éleveurs de porcs mais aux restaurants de Vancouver – les meilleures tables veulent leurs pommes de terre Grancru, ce qui enchante notre jeune cultivateur, lui qui a toujours rêvé de devenir coiffeur pour le cinéma s’il n’était pas né lui-même embourbé dans un endroit marécageux comme Poindeau. Cette petite notoriété de coulisse le comble.) Georgia Lapoussette grandit harmonieusement jusqu’à ses huit ans. Elle promet même d’être plus une Grancru qu’une Lapoussette, ce qui transporte d’aise sa mère. Elle est longue, fine, ses muscles sont admirablement déliés et ses cheveux aussi blonds et souples que ceux de madame Elizabeth Lapoussette, alors que ses sœurs sont courtaudes et noiraudes et qu’elles ont définitivement cessé leur croissance. Or Georgia Lapoussette arrête de grandir à huit ans. Elizabeth Lapoussette panique, elle y voit un sortilège puis un effet des déchets toxiques que rejette dans la partie nord des marécages de Poindeau l’usine de pesticides de Braum, elle s’insurge, appelle à une pétition, crée un comité de vigilance (dont le mot d’ordre est « Pas de lilliputiens à Poindeau »), songe à se présenter aux élections communales (sur une liste « En avant toujours ») et fait dormir sa fille les chevilles attachées par des cordes aux barreaux du lit (cordes qu’elle écourte légèrement tous les deux jours afin de lui étirer les os), système qu’elle perfectionne quand elle remarque que sa fille s’est mise à dormir recroquevillée au pied de son lit. Monsieur Jean Lapoussette, qui a toujours été d’un stoïcisme à toute épreuve face aux bizarreries de sa femme, 15 s’énerve et la menace de quitter la maison (il ne peut décemment lui promettre de la mettre dehors puisque la maison appartient à madame) si elle ne cesse ses dangereuses manipulations. Madame Elizabeth Lapoussette hausse les épaules et le regarde comme si elle ne se souvenait pas à coup sûr de son prénom. Tandis que Georgia Lapoussette gagne encore un ou deux centimètres grâce aux étirements que lui inflige sa mère, la discorde gagne, elle, la famille, et monsieur Jean Lapoussette finit par quitter le foyer avec ses échantillons de gouttières et sa Ford marron glacé. Madame Elizabeth Lapoussette fait comme si ça lui était égal. Puis sombre dans une dépression hostile. L’expression est du médecin de Poindeau qui se targue d’être allé à un congrès de psychiatrie à Buenos Aires en 1953. La dépression hostile porte évidemment sur ou plutôt contre monsieur Jean Lapoussette, madame Elizabeth Lapoussette ne se préoccupant à aucun moment du confort moral de sa dernière fille mais bien plutôt de régler ses comptes (et particulièrement de faire payer la honte d’avoir été abandonnée) avec monsieur. Madame Elizabeth Lapoussette n’a pas supporté d’être quittée. Elle pleure pendant des mois après les premiers jours de stupeur puis entreprend de harceler son mari avec des lettres incohérentes et revanchardes ; il demande tout de même le divorce, quitte l’hôtel de Vancouver où il vit, et s’installe avec une femme charmante d’origine mexicaine, elle-même divorcée, dans la banlieue de cette grande ville. 16 Madame Elizabeth Grancru (elle reprendra bien entendu son nom de jeune fille) ne cessera jamais de lui faire parvenir ses courriers nauséabonds, et monsieur Lapoussette ne cessera jamais de les lire malgré la sollicitude de sa nouvelle femme qui tente de le convaincre que ce n’est bon ni pour son ulcère ni pour ses tendances insomniaques. Alors que nous sommes en 1972 et que l’air s’emplit d’un parfum de subversion et de rock’n roll, tandis qu’ailleurs certaine guerre tourne boue, la petite Georgia Lapoussette, hermétique pour le moment aux mouvements floraux et contestataires du reste du monde, découvre les riches. Son professeur de piano – chez les Grancru, on apprend le piano dès le plus jeune âge et les fermes à pommes de terre de la famille ont toutes abrité un piano dans une des chambres glaciales qu’on trouve à leur étage (les Grancru ont toujours, selon l’expression de monsieur Jean Lapoussette, pété légèrement plus haut que leur cul) –, son professeur de piano donc convie Georgia chez les de la Ferrière pour leur présenter sa jeune élève qu’il trouve prometteuse. Les de la Ferrière habitent le château de Poindeau – en fait, une grosse maison avec une allée en gravier blanc et quelques arbres de belle tenue – et ne font pas grandchose depuis plusieurs générations. Ils ont participé à la libération de Poindeau un siècle auparavant – mais on ne sait pas exactement de quoi, de la grippe espagnole ou des Indiens Chottewa, mystère. Et chacun à Poindeau leur voue un respect mélancolique comme lorsqu’on regarde au zoo le dos taché de l’ours blanc. Quand Georgia est invitée chez eux elle est subjuguée. Non par la richesse des lieux qui sombrent doucement dans 17 une décrépitude augmentée et diversifiée par la proximité des marais, mais par la bonne éducation. Et même quand Georgia Lapoussette sera à l’université de Mexico DF, quelques années plus tard, meneuse de grève et égérie d’un mouvement gauchiste, elle ne perdra jamais son immense tendresse pour les gens bien éduqués – elle dira toujours que c’est ce qu’il y a de mieux chez les riches, on leur apprend à se soucier de l’autre dès leur plus jeune âge ou du moins on leur en donne la possibilité, puisqu’on les élève sans doute aussi à devenir des requins. Et elle ne pourra jamais s’empêcher d’apprécier qu’on lui tienne la portière quand elle sortira de voiture, qu’on lui prenne le coude pour traverser la rue, et que son convive lui serve du vin au restaurant sans qu’elle ait à le demander. Georgia sera tellement reconnaissante aux de la Ferrière de leur accueil (leur jardin qu’ils appellent un parc et leur château lui seront toujours ouverts pendant les années où elle restera encore à Poindeau. « Viens donc faire du piano quand tu le désires, ma fille, la porte t’est grande ouverte », répétera souvent madame de la Ferrière depuis le canapé où elle se tient comme une odalisque – canapé couleur zuma, ce qui charme bien évidemment notre Georgia), Georgia leur sera donc tellement reconnaissante qu’elle perdra sa virginité en 1975 dans la chambre bleue avec Alban de la Ferrière, le fils cadet de la famille, qui portera ce jour-là sa tenue habituelle et étrangement inappropriée de skipper, tenue qui fera que cette première expérience se teintera dans la mémoire de Georgia d’une singulière couleur nautique. En 1976, ne s’entendant plus du tout avec sa mère et malgré la pacification de ses relations avec ses sœurs, elle décidera de quitter Poindeau pour rejoindre la banlieue de Vancouver et son père. Sa mère prendra ce départ comme 18 une trahison, elle ne cessera de dire que son père a monté Georgia contre elle, détruisant par là même l’image de la mère, ne se rendant pas compte un seul instant qu’ellemême n’a eu besoin de personne pour détruire l’image de la mère, qu’elle s’y est appliquée avec un art consommé depuis la plus petite enfance de Georgia. Georgia partira placidement pour Vancouver en empruntant le car puis le train. Elle détient cette faculté particulière qui permet les départs sans pleurs ni culpabilité, comme si, au moment où la décision est entérinée, décision parfois difficile et longue à prendre, le petit fil qui la reliait à un lieu ou une personne se rompait avec un minuscule claquement, la libérant, et la laissant filer dans le vent, légère et sans douleur. * Quand Georgia rejoint son père et sa belle-mère, Maria Teresa de la Villacampa y Bormano, en octobre 1976, elle n’a d’abord dans l’idée que de se reposer quelque temps auprès d’eux (elle se rend compte que la cohabitation ces dernières années avec sa mère n’a pas été de tout repos) avant de faire un choix pour ses études. Jean Lapoussette est devenu représentant en pneus cloutés, ce qui a plus de sens sur ces territoires que de vendre des gouttières. Et sa femme, Maria Teresa de la Villacampa y Bormano, mais appelons-la Maria, travaille à mi-temps auprès de petits enfants immigrés en difficulté scolaire. Le reste du temps, elle écrit des poèmes, activité qui ne charrie pas 19 dans son Mexique natal une imagerie de désœuvrement mou et d’inadéquation au monde, mais bien plutôt de subversion un brin radicale. Maria est une femme bienveillante et drôle que Georgia se met à apprécier infiniment ; Maria n’a pas eu d’enfants parce qu’elle ne le pouvait pas et ne voit aucun inconvénient à accueillir chez elle la cadette de son époux. C’est elle qui fait germer dans la tête de Georgia l’idée de partir pour Mexico DF et de s’inscrire à l’université ; elle a pour les langues le don adéquat, lui dit-elle, elle appréciera la vie dans un pays plus chaud et plus poussiéreux, elle pourra être accueillie, en partie du moins, par sa famille et elle aura, ajoute-t-elle en clignant de l’œil, un immense succès avec sa petite taille de princesse de conte et sa longue chevelure blonde et lisse. Jean Lapoussette, entendant ces remarques, émet quelques réserves. La petite taille de sa fille lui donnant sans doute l’impression qu’elle est plus vulnérable qu’une autre. Maria lui rétorque qu’ainsi elle peut se faufiler partout et elle ne croit pas si bien dire. Devant la détermination de sa femme et de sa fille, Jean Lapoussette bat en retraite et apporte sa bénédiction à Georgia. Il lui dira même : « Je sentais en toi une vraie Lapoussette, une grande âme d’aventurière » (faisant peut-être allusion à l’un de ses ancêtres qui plusieurs siècles auparavant quitta sa Vendée natale pour traverser l’océan et traquer l’ours au Canada – ancêtre d’une bonne partie des Lapoussette de ce continent, puisqu’il eut une petite tendance à folâtrer à droite à gauche quand son activité de trappeur lui en laissait le loisir). Georgia Lapoussette quitte Vancouver, son père et sa bellemère en avril 1977 sans avoir revu sa mère. 20 Elle traverse les États-Unis en car, appelant une fois par jour depuis les cabines des relais routiers – sa bellemère considérant que les États-Unis sont l’endroit le plus dangereux du monde et que tant qu’elle n’aura pas atteint la frontière mexicaine, elle ne sera pas en sécurité. Pendant son trajet, Georgia découvre Tennessee Williams, le Jefferson Airplane et les morpions, les trois à cause de son voisin de banquette, un jeune comédien aux yeux aussi sombres que ceux d’un faon, qui s’arrête à la NouvelleOrléans (le car zigzague légèrement) et l’embrasse sur les paupières en lui disant qu’il commençait à s’attacher à elle. Georgia lui sourit sans la moindre tristesse et continue son périple jusqu’à Ciudad Juarez. Là, elle change de car et atteint Mexico DF. Hébergée par une tante de Maria (Guadalupe Peres Cardinal y Bormano), Georgia s’inscrit en littérature à l’université du DF. Elle prend aussi des cours d’espagnol municipaux – en général avec des paysans venus de provinces éloignées qui ne savent ni écrire ni parler un espagnol convenable. À l’université du DF elle rencontre Arturo Filomeno qui va devenir très vite son amant et l’entraîner dans ses nombreuses réunions ultragauchistes. L’insurrection gronde à l’université du DF, section littérature. Après une manifestation particulièrement houleuse, ils se retrouvent à soixante enfermés dans les locaux de l’université, sans possibilité de s’échapper, le bâtiment étant ceinturé par des militaires en kalachnikov (c’est l’arme à la mode à ce moment-là, pas chère, facile de maniement et follement efficace) qui les empêchent de sortir et de se ravitailler. La presse est présente mais sans assiduité, la version officielle expliquant qu’une poignée (quatre ou cinq) de 21 militants même pas inscrits à l’université et bardés d’explosifs menacent de faire sauter le bâtiment de littérature pour réclamer (les versions divergent) la libération d’un pacha du cartel, l’arrêt des tortures systématiques pendant les interrogatoires ou leur propre extradition vers Cuba. lui distille chaque mois et qu’il y a des façons simples de ne pas se compromettre dans l’existence. Et c’est Georgia Lapoussette qui réussit à se faufiler dehors, grâce à sa si harmonieuse petite taille, par le soupirail des sanitaires, qui avertit les médias en produisant des polaroïds de ses compagnons, clichés les montrant désarmés, nombreux et déterminés (et tous étudiants de l’université) en train de s’étioler tranquillement puisque l’eau a même été coupée dans le bâtiment où ils sont retranchés. Elle s’installe avec Esteban de Heredia dans sa grande hacienda sur les collines et assiste son bien-aimé qui a quelques difficultés pour trouver du travail – l’argument qu’il avance pour justifier ses difficultés est toujours qu’il est le fils de son père et non pas, bien entendu, qu’il manque singulièrement de talent. Les médias s’enflamment et l’affaire a un énorme retentissement. Les étudiants mal en point mais satisfaits sont libérés, toutes les télés les montrent exténués et victorieux, Georgia est portée en triomphe, elle se retrouve à devoir répondre à des dizaines d’interviews, ce que prend plus ou moins bien Arturo Filomeno qui finit par considérer qu’elle a juste servi de pigeon messager et ne devrait pas être autant mise en avant. À ce moment-là, Georgia croise le chemin d’un journaliste, Esteban de Heredia, qui la subjugue par son attention, sa douceur, sa finesse, la beauté de son profil et son aisance de riche. Les membres militants lui expliquent alors qu’elle ne peut faire partie de leur mouvement tout en fréquentant Esteban de Heredia qui, même s’il a des sympathies pour eux, est tout de même le fils de son père – un dignitaire ayant eu des accointances avec les nazis venus s’installer post-bellum. Georgia s’insurge. On n’est pas responsable de ses parents, dit-elle. Les militants lui rappellent gentiment qu’Esteban de Heredia vit avec l’argent que son père 22 Ils lui demandent de choisir. Georgia choisit. Georgia l’aide, lui écrit même quelques-uns de ses textes, Esteban fait semblant de ne pas le remarquer, il s’occupe par ailleurs plutôt bien de sa princesse (il l’appelle Raiponce à cause de la longueur de ses cheveux et de sa culture européenne). Georgia tombe enceinte. Elle annonce la bonne nouvelle à son père et à sa bellemère qui lui répondent qu’ils sont enchantés et qu’ils vont venir la voir ; sa belle-mère, dans la même lettre, lui écrit que sa mère est décédée, elle a glissé sur une petite pomme de terre rouge (une roseval) en haut des escaliers de la cave de chez son frère et elle s’est brisé la nuque quand elle est arrivée en bas des marches. Georgia en apprenant la nouvelle n’a pas une larme, mais elle secoue la tête, simplement affligée pour sa mère, répétant tout bas, Quelle triste vie, quelle triste vie. Puis elle se concentre, pendant les mois qui suivent, sur sa grossesse et le 26 septembre 1979 naît sa fille, Consuelo Lapoussette y Heredia. 23 Le couple Lapoussette-Heredia ne va pas bien. Esteban trouve difficilement où placer ses articles mais continue de vivre dans la maison invraisemblable que son père lui alloue. Il se raidit de plus en plus, s’assombrit, il devient taciturne et dégringolerait peut-être carrément dans la dépression (ou l’extrémisme) si Georgia n’était pas aussi encourageante et attentionnée et si la petite Consuelo ne se comportait pas avec autant de grâce. Mais un jour qu’il s’est encore énervé contre le Mexique, le gouvernement, les riches, les pauvres, les femmes canadiennes et les Juifs, Georgia lui dit gentiment : « Heureusement que tu as raté ta vie professionnelle sinon tu serais encore plus donneur de leçons. » Esteban de Heredia ne prend pas très bien la chose. Il s’enferme pendant trois jours dans son bureau en refusant de s’alimenter. Et Georgia Lapoussette étrangement décide que c’en est trop. Elle habille sa petite fille d’un poncho, l’enturbanne dans une écharpe autour de son buste et remplit son sac des nécessités premières puis quitte l’hacienda, les cactus, l’espagnol, la poussière du chemin, la chaleur et le Mexique. Elle va à l’aéroport (elle n’a déjà plus l’impression d’être au Mexique, ne lui a-t-on pas toujours répété que les aéroports étaient des lieux au statut particulier, où l’on n’est plus tout à fait ici et pas encore là-bas ?), elle appelle son père, lui annonce qu’elle arrive par le premier vol et embarque avec sa petite Consuelo au moment même où Esteban de Heredia sort le nez de son bureau pour vérifier que tout le monde souffre beaucoup de son enfermement. 24 Comme il ne voit personne, il imagine que Georgia est sortie faire une course avec Consuelo, la domestique n’est pas là, alors il se précipite à la cuisine pour grignoter un bout de gratin de nopal dans le garde-manger. Et ce n’est qu’après s’être sustenté qu’il remarque le petit mot de Georgia posé sur la table et maintenu dans l’angle gauche pour ne pas qu’il s’envole par un joli vase bleu dans lequel elle a placé deux œillets rouges. Elle l’a écrit en espagnol et il dit juste : « Je pars avec Consuelo. Nous ne reviendrons sûrement pas. Prends grand soin de toi. » Il n’en revient pas de son laconisme, il lit le mot 230 fois. Il appelle son père pour l’empêcher de quitter le territoire (il se doute qu’elle repart au Canada) mais il est trop tard. Il se rend compte avec stupeur qu’il n’avait pas évalué le manque de sentimentalité de cette femme, sa façon d’être sans nostalgie, cette manière d’être tendre et douce, mais comme si elle disposait d’un réservoir précis et mesuré de tendresse et de douceur et que lorsque ce réservoir était épuisé eh bien, rien à faire, il était impossible de le remplir à nouveau. Georgia Lapoussette et Consuelo arrivent à Vancouver le 22 juin 1980. Jean Lapoussette et Maria les accueillent, les consolent même si ce n’est pas nécessaire, les cajolent et s’occupent si parfaitement d’elles qu’on peut se demander ce qui pousse Georgia à repartir si vite. Elle emmène Consuelo voir son oncle, Martin Grancru, qui s’occupe toujours de l’exploitation de pommes de terre à Poindeau mais qui en a fait quelque chose de fort personnel puisqu’il ne produit plus que de la pomme de terre élégante et vieillotte, rouge, violette, noire ou verte, au goût de châtaigne, de framboise ou de truffe. Georgia se prend de passion pour ces multiples variétés et pour cet 25 homme au physique de vieux jeune homme efféminé. De fil en aiguille il lui parle d’un de ses amis qui aimerait ouvrir un restaurant dans le Maine et Georgia trouve l’idée merveilleuse et part derechef avec sa Consuelo pour rencontrer l’ami de son oncle et l’aider dans son entreprise. La si petite Georgia Lapoussette (n’oubliez jamais qu’elle assume avec grâce ce physique empêché et que cette personne qui sillonne le continent ne mesure, à tout casser, qu’un mètre trente-cinq) convainc l’ami de son oncle de s’associer avec elle et les voilà qui montent un restaurant gastronomique à Wiscasset dans la baie du Muscongus dans un endroit un peu frisquet certes, mais propice aux migrations d’intellectuels et de pédants qui sauront apprécier, chacun à leur façon, une cuisine sophistiquée et goûteuse. Les plats arborent des noms français de quatre ou cinq lignes. On croirait un exercice pour les enfants afin de déterminer les groupes nominaux et leur nature. Georgia devient vite l’égérie de Wiscasset, minuscule fée blonde nourricière, accompagnée en permanence de sa Consuelo mexicaine, fillette si à l’aise avec les adultes qu’elle en oublie parfois le plaisir de jouer aux Barbie putes (pourquoi sont-elle si souvent habillées en skaï noir ?, se demande régulièrement Georgia) et aux baigneurs chauves avec les autres petites filles de Wiscasset. Georgia Lapoussette a enfin pense-t-elle trouvé un endroit pour elle et sa fille. Elle aime le vent de l’Atlantique et les hommages rendus à ses pommes de terre multicolores, elle aime l’océan froid et les maisons en bois, elle aime la relation qu’elle entretient avec son amant Roger Dickson, chirurgien à New York, qui vient le week-end et pendant la moitié des vacances scolaires (il a deux fils d’un premier lit), qui est un homme cultivé, fumant des Panther, conduisant de petites voitures silencieuses, et aimant 26 par-dessus tout la tarte meringuée aux airelles ainsi que les longues promenades sur les plages désertées de la baie de Muscongus. Georgia Lapoussette est plutôt une femme heureuse. Elle dirait cela, je pense, si on le lui demandait. * Wiscasset a toujours été une ville sujette aux secousses sismiques et en 2008 (le 1er avril, le jour des quarante-neuf ans de Georgia Lapoussette – et cette date restera toujours gravée dans sa mémoire à cause de son anniversaire, tout comme la vue de ce qui est proche altère le lointain), Wiscasset est véritablement ébranlée par un tel tremblement de terre avec réplique furieuse et inattendue que les maisons en bois de toute la baie s’affaissent comme des Kapla. Le restaurant de Georgia Lapoussette ne fait pas exception à la règle. Il s’effondre, rien à faire, après s’être fissuré comme un encéphalogramme, avoir paru hésiter un instant et puis avoir abandonné la partie comme on finit par s’assoupir. La chose a pris huit secondes et demie. Georgia Lapoussette semble prendre conscience de quelque chose (la précarité des choses ? La nécessité de repartir ?), elle quitte gentiment Roger Dickson, appelle sa fille qui vit à Montreal et les prévient qu’elle s’en va avec l’argent de l’assurance peindre des aquarelles à Cape Cod. Des aquarelles ? s’étonne Roger Dickson. Des aquarelles, répète Consuelo sceptique comme si elle essayait de visualiser à quoi ressemble une aquarelle (elle est elle-même directrice d’école maternelle à Mont-Royal 27 et se retrouve en général trop vite submergée par le réel pour s’intéresser à autre chose qu’aux subventions de la ville et à la qualité des repas au restaurant scolaire). C’est ainsi que Georgia se voit, dans la belle lumière de Cape Cod, habillée en blanc, scrutant l’horizon et les bosses des baleines, vivant de presque rien, dans une ascèse tranquille et pacifique, dans une sorte d’accord avec le monde. Pour s’installer dans cette vie à laquelle elle aspire avec tant d’appétit (et pour s’y habituer elle prend au début du Prozac), Georgia se déniche une petite maison en bardeaux au milieu des dunes de Cape Cod, adopte un chien noir qu’elle appelle Roberto, s’achète du matériel, des couleurs et une petite voiture marron (qui lui rappelle la voiture de son père quand elle était enfant), elle se met à porter de grands chapeaux de paille ou des foulards et s’inscrit à la bibliothèque municipale. yeux humides et clignotants et à sa gauche un Roger éploré mais tapotant. Elle laisse sa fenêtre grande ouverte, elle dit qu’elle veut sentir le vent sur ses paupières. Elle pense que son âme s’en ira en longs filaments scintillants par la fenêtre. Elle a cette drôle de pensée Georgia, elle se dit au moment crucial, Parce que sinon à quoi bon tout cela ? Et Roger lui fait la piqûre adéquate, il pleure ce pauvre Roger, il regarde le tout petit corps de sa doucette qui s’est encore un peu plus étiolée ces dernières semaines, il pleure parce qu’il ne peut s’en empêcher et que Georgia a toujours choisi des hommes sensibles et tendres, parfois peu vaillants ou carrément défaillants, mais des hommes moelleux et un brin tristounets, il pleure mais il se dit quand il la voit s’en aller, Quel homme tout de même, ne prenant conscience qu’après coup d’avoir eu cette drôle de pensée déplacée. Elle laisse tomber le Prozac et fréquente les extravagants de la ville – Mimi la potière, Gianpaolo le peintre, Jo l’ancien mormon toxicomane, et Lulu la serveuse gay. Georgia se construit une nouvelle vie heureuse. Georgia fait partie de ces gens qui savent s’organiser, placer leurs armées, consolider les contreforts, surveiller les brèches afin de ne jamais plonger dans la dépression et ne jamais se laisser aller à une nostalgie de mauvais aloi. Quand on lui apprend qu’elle a un cancer en juillet 2011 elle n’en fait pas une histoire, elle refuse poliment l’aide de la médecine (Georgia a toujours eu l’intuition de ce qu’elle était capable de supporter ou non), elle appelle son bon vieux Roger Dickson, lui demande de venir la retrouver avec de quoi finir tranquille si les choses se précipitaient ou si la douleur lui retirait sa dignité et elle décide de mourir paisiblement avec à sa droite Roberto le chien noir qui la regarde de ses 28 29 Pourquoi le prix unique du livre ? La loi du 10 août 1981 pose le principe d’un prix unique de vente du livre fixé par l’éditeur ou par l’importateur. Le prix unique signifie que le même livre sera vendu au même prix par tous les détaillants, quelle que soit la période de l’année concernée – à concurrence, cependant, de la remise légale de 5 % que tous les détaillants peuvent pratiquer. Que l’on soit à Paris, dans une petite ville ou dans une zone rurale, le même livre sera donc vendu au même prix dans les grandes surfaces spécialisées, dans un hypermarché, dans une maison de la presse ou dans une librairie indépendante. Ainsi, le prix unique du livre a-t-il permis de préserver la richesse et la diversité de la création littéraire en garantissant sa diffusion par un réseau de librairies à la fois dense et de qualité. Qu’est-ce qu’une librairie indépendante ? Une librairie indépendante est une librairie n’appartenant ni à groupe industriel ou commercial, ni à une chaîne. C’est un lieu où travaillent des libraires qui ont à cœur de diffuser les livres qu’ils aiment – et non ceux que d’autres auront choisis pour eux et le public. C’est un espace à taille humaine où les mots proximité, diversité et service prennent tout leur sens. C’est le carrefour de la création littéraire, le garant de la liberté de toutes les lectures. 30 L’association de librairies indépendantes Initiales Depuis 1997, l’association Initiales rassemble des libraires indépendants partageant la même passion de leur métier. Par leurs actions communes, ils souhaitent réaffirmer le rôle essentiel du livre comme outil de connaissance, de réflexion et de liberté et œuvrer collectivement pour la diversité éditoriale et la liberté de toutes les lectures. Initiales a également pour but de mettre en réseau les librairies afin de partager la connaissance d’un même métier qui, s’il peut s’exercer de façon très différente d’une librairie à une autre, œuvre cependant dans un même sens pour la défense d’une identité culturelle et plurielle. Nous sommes aujourd’hui trente-six librairies réparties dans vingtdeux départements de France et en Belgique. Chaque librairie est un lieu d’échanges, de rencontres et de débats. De plus, Initiales édite et distribue dans chacune des librairies adhérentes des dossiers thématiques, une revue bibliographique, ainsi que des nouvelles inédites d’écrivains. Le prix Initiales a pour mission de faire découvrir une fois par an un roman français et un roman étranger. Il est décerné au printemps par un jury composé de tous les libraires du groupement. Le prix Mémorable récompense, lui, la réédition d’un auteur malheureusement oublié, d’un auteur étranger décédé encore jamais traduit en français, d’un inédit, ou d’une traduction révisée et complète d’un auteur. Retrouvez l’actualité des librairies, les rencontres, les coups de cœur, les dossiers... sur initiales.org. 31 Les librairies Initiales ANTIPODES 8, rue Robert-Schuman 95880 Enghien T : 01 34 12 05 00 F : 01 34 17 69 26 [email protected] ATOUT-LIVRE 203, bis avenue Daumesnil 75012 Paris T : 01 43 43 82 27 F : 01 43 43 82 73 [email protected] www.atoutlivre.com LIBRAIRIE DES CORDELIERS 13, côte des Cordeliers 26100 Romans-sur-Isère T : 04 75 05 15 55 F : 04 75 72 50 56 [email protected] GWALARN 15, rue des Chapeliers 22300 Lannion TéL : 02 96 37 40 53 F : 02 96 46 56 76 [email protected] AU MOULIN DES LETTRES 50, quai des Bons-Enfants 88000 Epinal T /F : 03 29 82 62 89 [email protected] www.aumoulindeslettres.fr L’ARBOUSIER 1, avenue Abdon-Martin 04700 Oraison T /F : 04 92 78 61 08 [email protected] larbousier.blogspot.com AU POIVRE D’ÂNE 9, place de l’Hôtel-de-Ville 04100 Manosque T : 04 92 72 45 08 F : 04 92 72 40 03 librairiepoivredane @wanadoo.fr L’ÉCRITOIRE 30, place Notre-Dame 21140 Semur-en-Auxois T : 03 80 97 05 09 F : 03 80 97 19 89 [email protected] www.ecritoire-semur.com AU POIVRE D’ÂNE 12, rue des Frères-Blanchard 13600 La Ciotat T : 04 42 71 96 93 F : 04 42 73 19 68 [email protected] LA LIBRAIRIE DES HALLES 1bis, rue Thiers 79000 Niort T : 05 49 04 05 03 F : 05 49 17 18 80 www.lalibrairieniort.com COMME UN ROMAN 39, rue de Bretagne 75003 Paris T : 01 42 77 56 20 F : 01 42 77 56 20 [email protected] www.comme-un-roman.com LA LIBRAIRIE DU RIVAGE 82, boulevard Aristide-Briand 17200 Royan T /F : 05 46 22 05 16 [email protected] www.librairie-du-rivage.fr LA RÉSERVE 81, avenue Jean-Jaurès 78711 Mantes-la-Ville T : 01 30 94 53 23 F : 01 30 94 18 08 [email protected] LE BATEAU LIVRE 154 rue Gambetta 59800 Lille T :03 20 78 16 30 F : 03 20 78 16 45 [email protected] LE CADRAN LUNAIRE 27, rue Franche 71000 Mâcon T : 03 85 38 85 27 F : 03 85 40 92 16 [email protected] LE CYPRÈS 17, rue du Pont-Cizeau 58000 Nevers T : 03 86 57 53 36 F : 03 86 59 59 24 LE GRAIN DES MOTS 13, boulevard du Jeu-de-Paume 34000 Montpellier T : 04 67 60 82 38 F : 04 67 60 82 91 [email protected] www.legraindesmots.com LE LIVRE PHARE 8, rue Dumont-D’Urville 29900 Concarneau T : 02 98 50 68 11 [email protected] LE MERLE MOQUEUR 51, rue de Bagnolet 75020 Paris T : 01 40 09 08 80 F : 01 40 09 86 60 [email protected] www.lemerlemoqueur.fr LUCIOLES 13-15, place du Palais 38200 Vienne T : 04 74 85 53 08 F : 04 74 85 27 52 [email protected] www.librairielucioles.fr LE MERLE MOQUEUR Librairie du Centquatre 104, rue d’Aubervilliers 75019 Paris T : 01 40 38 85 65 www.lalibrairiedu104.fr LUNE ET L’AUTRE 19, rue Pierre-Bérard 42000 Saint-Étienne T /F : 04 77 32 58 49 [email protected] LE SCRIBE 115, faubourg Lacapelle 82000 Montauban T : 05 63 63 01 83 F : 05 63 91 20 08 [email protected] www.lescribe.com LE SQUARE (L’université) 2, place du docteur Léon-Martin 38000 Grenoble T : 04 76 46 61 63 F : 04 76 46 14 59 [email protected] www.librairielesquare.fr LES SAISONS 2, rue Saint-Nicolas 17000 La Rochelle T : 05 46 37 64 18 F : 05 46 34 05 58 www.lessaisons.fr [email protected] LIVRE AUX TRÉSORS 4, rue Sébastien-Laruelle 4000 Liège Belgique T : +32 04 250 38 46 F : +32 04 250 38 46 [email protected] MAUPETIT 142-144, La Canebière 13001 Marseille T : 04 91 36 50 50 F : 04 91 36 50 79 [email protected] M’LIRE 3, rue de la Paix 53000 Laval T : 02 43 53 04 00 F : 02 43 53 23 52 [email protected] MOTS ET IMAGES 10, rue Saint-Yves 22200 Guingamp T : 02 96 40 08 26 F : 02 96 40 08 27 [email protected] NORDEST 34 bis, rue de Dunkerque 75010 Paris T /F : 01 48 74 45 59 [email protected] OBLIQUES 68, rue Joubert 89000 Auxerre T : 03 86 51 39 29 F : 03 86 52 11 83 [email protected] PASSAGES 11, rue de Brest 69002 Lyon T : 04 72 56 34 84 F : 04 72 56 34 85 [email protected] POINT-VIRGULE 1, rue Lelièvre 5000 Namur Belgique T : +32 081 22 79 37 F : + 32 081 22 79 37 [email protected] QUAI DES BRUMES 120, Grand’Rue 67000 Strasbourg T : 03 88 35 32 84 F : 03 88 25 14 45 [email protected] VENT D’OUEST 5, place du Bon-Pasteur BP 31626 44016 Nantes Cedex T : 02 40 48 64 81 F : 02 40 47 62 18 [email protected] www.librairie-nantes.fr VENT D’OUEST (au lieu unique ) 2, rue de la Biscuiterie 44000 Nantes T : 02 40 47 64 83 F : 02 40 47 75 34 [email protected] Les publications Inédits Dany Laferrière, Je suis fatigué, 2000 ¦¦ Philippe Claudel, Carnets cubains, 2002 Elwood Reid, Territoire, 2002 ¦¦ Hubert Mingarelli, Sur la mer, 2003 Christian Garcin, Fragments oubliés, 2005 ¦¦ Patrick Deville, Une photo à Montevideo, 2004 ¦¦ Russel Banks, La Réserve, 2005 ¦¦ Initiales a 10 ans et autres bonnes nouvelles, 2007 ¦¦ René Vasquez Diaz, Villes en bord de mer / Ciudades junto al mar, 2009. Dossiers Algérie, 1997 ¦¦ Humour, 1997 ¦¦ Jørn Riel, 1998 ¦¦ Samuel Beckett, 1998 Raymond Carver, 1999 ¦¦ Julien Gracq, 1999 ¦¦ René Fallet, 2000 A comme amour, 2000 ¦¦ Nancy Huston, 2001 ¦¦ Mario Rigoni Stern, 2001 Sombre Afrique, 2002 ¦¦ Annie Saumon, 2002 ¦¦ Raymond Queneau, 2003 Littérature de l’imaginaire, 2003 ¦¦ Pierre Michon, 2003 ¦¦ André Dhôtel, 2004 Nos Amériques, 2004 ¦¦ Jacques Séréna, 2005 ¦¦ Littérature de voyage, 2006 Americanada, 2006 ¦¦ Le Roman noir, 2007 ¦¦ Guy Goffette, 2008 Figures italiennes, 2008 ¦¦ Reportage, 2009 ¦¦ Les Points sous les i n°1 Le Conte, 2010 ¦¦ Les Points sous les i n°2 Le rire en plus. À paraître Écrire le travail, février 2011 Les points sous les i n° 3 Poésie contemporaine, mars 2011 Achevé d’imprimer en décembre 2010 Relecture et correction : Jeanne Labourel Conception graphique : Atelier Poste 4 Photos de la page suivante © Daniel Schwen et Bill B. Impression : Ott Imprimeurs ISBN 9782953612325 Initiales 51, rue de Bagnolet 75020 Paris www.initiales.org G.L.