Interactions communicatives dans le talk-show culturel - DOCT-US

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Interactions communicatives dans le talk-show culturel - DOCT-US
Interactions communicatives dans le talk-show culturel
Lăcrămioara COCÎRLĂ
Université « Stefan cel Mare »
Suceava, Roumanie
[email protected]
Abstract: The talk-show is a media product, structured on the basis of the communicative interactions
which take place between the direct participants to the event, but also between them and the TV audience.
Starting with the definition of the ‘interaction’ term, our study tries to analyse this linguistic phenomenon in the
cultural talk-show where the interlocutor validation focuses on the transmitter, represented by the show
moderator and his guests, who address a receptor represented by the TV spectator but also by the guest or the
show moderator (changing roles between locutor and alocutor).
The analysis the basic components of cultural talk-show leads us to discover that the show moderator is a
master of the interlocutory game in which his guests become actors in a theatre they know nothing about, and
the TV viewers overcome their condition of mere passive receivers; thus, the televised discourse becomes a
collective co-construct of a large cultural orchestra where each member performs a score adjusting himself after
the others.
Key-words: interaction, interactional synchronization, communicative frame, space frame, temporal
frame, participative frame, receivers.
1. Délimitations conceptuelles
Le talk-show est un produit média construit
autour des interactions des protagonistes par
leur spectacle de la parole»1 qui se trouve
en même temps en interaction avec le
téléspectateur (celui-ci, le plus souvent, privé de
la parole). Il se construit autour des interactions
communicatives, qui sollicitent tant la parole que
le corps, l’interrogation avec autrui et leurs
intentions peuvant être explicites ou implicites,
prévisibles ou imprévisibles.
L’interaction, est perçu comme un concept
nomade2, qui est né dans le domaine des
sciences de la nature et utilisé plus tard dans les
sciences humaines; elle est définie, en général,
comme « toute action conjointe, conflictuelle ou
coopérative, mettant en présence deux ou plus
de deux acteurs »3.
En excluant les interactions à distance ou
différées, le sociologue Erving Goffman propose
une définition plus restrictive des interactions:
1
P. Charaudeau, R. Giglione, Talk-show-ul. Despre libertatea
cuvântului ca mit, Trad. din fr. Oana Pocovnicu, Tit. orig. La
parole confisquée. Un genre télévisuel : le talk show, Armand
Colin, Paris, 2005, p. 112.
Cf. P. Charaudeau, D. Maingueneau, 2002, Dictionnaire
d’analyse du discours, p. 318.
3
R. Vion, 1992, La communication verbale. Analyse des
interactions, Hachette, Paris, p. 17.
2
« Par interaction (c’est-à-dire l’interaction
face à face) on entend à peu près l’influence
réciproque que les participants exercent sur leurs
actions respectives lorsqu’ils sont en présence
physique immédiate les uns des autres; par une
interaction, on entend l’ensemble de l’interaction
qui se produit en une occasion quelconque
quand les membres d’un ensemble donné se
trouvent en présence continue les uns des
autres; le terme ‘rencontre’ pouvant aussi
convenir »4.
Les interlocuteurs, participants à une
interaction communicative, coordonnent leurs
actions d’une certaine manière:
« Ils essaient de se communiquer l’un l’autre
le sens de leurs actions ainsi que la
compréhension qu’ils ont du processus dans
lequel ils sont inscrits. Pour ce faire, ils doivent
maîtriser un certain nombre de règles, de
méthodes, qui leur permettent de déterminer
dans quel type d’interaction ils sont engagés et
d’agir en conséquence »5.
En ce sens, Goffman remarquait que dans un
échange communicatif il ne suffit pas que deux
locuteurs parlent alternativement, mais qu’ils se
parlent, c’est-à-dire qu’ils soient engagés dans
4
E. Goffman, apud Cf. P. Charaudeau, D. Maingueneau, op.
cit. , pp. 318-319.
5
G. Siouffi, D. van Raemdonck, 1999, 100 fiches pour
comprendre la linguistique, Bréal, Rosny, p. 68.
Ştiinţe socio-umane
cet échange et qu’ils produisent les signes d’un
engagement mutuel par l’utilisation des procédés
de validation interlocutoire:
« Les participants se servent d’un ensemble
de gestes significatifs, afin de marquer la période
de communication qui commence et de
s’accréditer
mutuellement.
Lorsque
des
personnes
effectuent
cette
ratification
réciproque, on peut dire qu’elles sont en
conversation: autrement dit, elles se déclarent
officiellement ouvertes les unes aux autres en
vue d’une communication orale et garantissent
conjointement le maintien d’un flux de parole »6.
2. Approche des interactions dans le
talk show culturel
Dans le talk-show culturel, les moyens de
réalisation de cette validation interlocutive vise
d’une part l’émetteur (le modérateur ou l’invité
de l’émission) qui doit s’adresser à un récepteur
(l’invité ou l’animateur et les téléspectateurs) et
signaler ce fait par l’orientation de son corps, la
direction du regard, la production des marqueurs
verbaux de l’allocution et maintenir l’attention
par des captateurs comme: uite, ce zici de asta,
ştii, ia să vedem, hai să-ncercăm, etc.
Fig. 1. Régulateurs ou signes d’écoute (l’émission
Garantat 100%).
Le récepteur, à son tour, produit des
régulateurs ou signes d’écoute, procédés de
feed-back ou de back-channel7. Ces régulateurs
connaissent de multiples réalisations : verbaux
(de-acord, da, etc.), vocaux (hmm !) et
nonverbaux (la direction du regard, le
froncement des sourcils, le haussement de la
tête, le souris, le changement de la posture, etc.
- ex. Fig. 1) capables d’influencer d’une manière
positive le déroulement de l’interaction
communicative dans laquelle se laissent
entraîner les deux protagonistes.
E. Goffman, 1974, Les rites d’interaction, Minuit, Paris, p.
33.
7
Cf. K. Kerbrat-Orecchioni, op. cit., p. 17.
81
La production de ces signes dépend de ces
deux participants qui sont dans une certaine
mesure des copilotes en interaction. F. Jacques,
dans son ouvrage, Dialogiques. Recherches
logiques sur le dialogue, soutient que :
« le moindre dialogue (...) est littéralement
porté par les deux partenaires qui ont
nécessairement
partie
prenante
à
son
déroulement,
et
acceptent
d’être
coresponsables de son succès et de son échec »8.
On sait que dans tout échange linguistique les
rôles de locuteur et d’allocutaire échangent : « le
locuteur est son propre auditeur et anticipe
constamment sur le dire de son allocutaire. En
outre, la situation d’énonciation est partagée: le
moment et le lieu de la parole sont ces deux
protagonistes. »
Les activités phatiques ou régulatrices ne sont
pas indépendantes l’une de l’autre, mais
solidaires, les signes régulateurs paraissent
comme une réponse à la sollicitation du locuteur:
le regard, les gestes réalisés avec les mains, les
mouvements de la tête, les formules phatiques
ou les simples pauses. Ces influences mutuelles
exercées par les participants au dialogue, par
lesquelles
ils
ajustent,
coordonnent
et
harmonisent en permanence les comportements,
sont appelées par A. Kendon synchronisation
interactionnelle ou intersynchronisation qui se
manifeste aux plusieurs niveaux:
♦ Un premier niveau est celui des prises de
parole (tours de parole) dans lesquelles les
sujets parlants s’assument des règles précises
qui organisent le système de la prise de la parole
en l’appliquant d’une manière inconsciente:
„A.P.: Ţi-aduci aminte cum a dispărut Marian
Papahagi
H.P.: în plină activitate, la 50 de ani şi el
A.P.: ...şi tot după ce el însuşi, şi mama lui
spunea tot timpul, era în ofensivă...
H.P.: cei care au vorbit la moartea lui Mihai
au evocat viaţa lui, realizările lui, un om eficace.
Şi Marian a Papahagi a fost un om eficace...”
(Înapoi la argument)
♦ Un deuxième niveau est constitué par les
comportements corporels manifestés par des
comportements proxémiques, posturales ou
mimo-gestuelles:
6
8
F. Jacques apud ibidem, p. 20.
sémiotique
hétérogène:
unités
paraverbales et nonverbales.
verbales,
3.1. Le cadre communicatif
Fig.
corporels.
2.
Manifestation
des
comportements
La littérature de spécialité utilise en ce sens la
métaphore un ballet qui a la puissance de
connoter
éfficacement
la
notion
d’intersynchronisation comportamentale;
♦ L’intersynchronisation se manifeste aussi au
niveau vocal comme un phénomène d’imitation,
d’empathie vocale et au niveau verbal par les
phénomènes d’écho ou d’enchaînement des
répliques:
a) „ H.P.: –Sunt două situaţii: distingem
situaţia în care sociateatea fiind anormală joci
după un program de impuse...
A.P.: –Da...
H.P.: –şi unul în care societatea fiind normală
ai libertatea să-ţi alegi tu programul.
A.P.: –Da şi eşti un agitat care...în...
H.P.: –Da, dar problema nu e similară?
A.P.: –Da.” (Înapoi la argument)
b) „M.C.: –Dar ce te faci cu cei care trăiesc în
mijlocul naturii şi se întorc cu spatele la ea şi
acceptă acest model pe care televizoarele...
E.C.: –nu sunt eu specialist dar...
M.C.: –sau imaginea o aduc ...o aduce în
casele lor...
E.C.: –da, cred pur şi simplu că este urmarea
culturii comuniste care a pus accentul pe cultura
urbană, pe peisajul urban cu cultura blocului ca
să zic aşa... ” (Nocturne)
♦ Au niveau des états émotionnels le
phénomène d’intersynchronisation se manifeste
par un réglage affectif par lequel les partenaires
tendent se mettre à un même niveau. Dans les
talk-show culturels, les relations fonctionnent
d’une manière harmonieuse et les sujets
impliqués dans cette relation se conduisent
synchroniquement.
3. Les composantes de base de
l’interaction
Dans le talk-show, les interactions se
construisent et peuvent être interprétés à l’aide
d’un ensemble de règles appliquées dans un
cadre contextuel donné, sur un matériel
Comme discours télévisuel, le talk-show se
déroule dans une spatialité et une temporalité
définies; son contexte doit être compris comme
l’environnement extralinguistique de l’énoncé, en
opposition avec le cotexte linguistique. Ses
composantes sont:
♦ le cadre spatial considéré sous ses angles
purement physiques9: les caractéristiques du
studio où on déroule l’action mais aussi le décor,
toute l’organisation proxémique (le studio de
télévision étant un espace fermé, controlé par le
modérateur qui invite ses interlocuteurs). Cet
espace est transmis par la caméra en images
parfois globales (Fig. 3), parfois partielles (Fig.
4).
Fig. 3. Image globale (l’émission Profesioniştii).
L’organisation
proxemique
favorise
l’interaction directe entre le modérateur et ses
invités qui voient plus que les téléspectateurs,
c’est-à-dire le studio dans son ensemble avec les
techniciens et les cameras qui réalisent les prises
de vue.
Fig. 4. Image partielle (l’émission Nocturne).
♦ le cadre temporel est déterminant pour le
déroulement de l’interaction, de l’echange
9
Cf. D. Rovenţa-Frumuşani, Analiza discursului. Ipoteze şi
ipostaze, Ed. Tritonic, Bucureşti, p. 77.
Ştiinţe socio-umane
langagier. Dans les talk-shows il s’agit d’une
mise en images d’une scène réelle, par des
procédés de spectacularisation réalisés en direct.
La transmission d’un dialogue en direct crée au
public le sentiment de proximité, de contact,
d’intimité qui détient un pouvoir persuasif par
excellence. Sur l’axe temporel on distingue la
diffusion du talk-show au moment du filmage et
la durée chronologique intégrale de l’événement
qui font de l’emission un veritable document
authentique.
♦ le but de l’interaction occupe une place très
importante dans le système global et il est
associé à une finalité intrinsèque; il se réjouit
d’une certaine autonomie, pouvant être quelque
part dans le cadre spatio-temporel et les
participants. Le but est, dans une certaine
mesure construit pendant l’interaction et négocié
sans cesse par les participants. Dans le talk-show
il s’agit d’une interaction gratuite en apparence,
ayant comme but la rencontre, où on parle pour
parler, pour maintenir une relation ou pour
imposer à l’autrui une image de soi, inconnue ou
peu connue jusqu’à ce moment-là. En ce sens,
Goffman affirmait:
« un des buts qui semble sous-tendre toute
interaction sociale, et par conséquant, toute
conversation, est la présentation mutuelle de
soi. »10
Dans le talk-show culturel il y a les quatre
buts globaux de tout discours télévisuel: faire
savoir, faire comprendre, faire plaisir et faire
faire11 qui réalisent la fonction informative,
explicative, émotionnelle et factitive.
La fonction informative est accomplie par le
projet global du modérateur qui se propose de
promouvoir un autre genre de talk-show: le
débat culturel, qui met en circulation des idées,
des discours expressifs et intéressants, des
personnalités représentatives de la culture. La
présence de ces personnalités dans le plateau
crée chez le spectateur le sentiment de coconstruction du discours.
La fonction explicative se réalise par les
interventions des invités qui se proposent
d’expliquer leurs positions par rapport au sujet
en discussion.
Dans les talk-shows culturels, la fonction
émotive s’accomplit par la présentation et le
discours des grandes personnalités de la culture
roumaine, qui ont un statut de formateurs
d’opinions de la société contemporaine; le plaisir
est éprouvé par un public cultivé qui se réjouit
83
de la richesse d’expression des invités, qui
mettent en valeur des discours forts de la
culture.
3.2. Le cadre participatif
Pour parler du cadre participatif, il faut
premièrement clarifier la notion de participation
framework12:
« Chaque fois qu’un mot est prononcé, tous
ceux qui se trouvent à la portée de l’événement
[…] possèdent, par rapport à lui, un certain
statut de participation. La codification de ces
diverses positions et la spécialisation normative
de ce qui est une conduite convenable au sein
de chacune constituent un arrière-plan essentiel
pour l’analyse de l’interaction – dans notre
société comme (je suppose) dans toute
autre »13.
Dans toute interaction linguistique, les rôles
de locuteur et d’allocutaire échangent:
« le locuteur est son propre auditeur et
anticipe constamment sur le dire de son
allocutaire. En outre, la situation d’énonciation
est partagée: le moment et le lieu de la parole
sont ces deux protagonistes »14.
3.2.1. Les participants
Les participants à un talk-show incluent le
modérateur et ses invités qui se trouvent dans
cet
espace
participatif
et
dévoilent
involontairement
leurs
caractéristiques
individuelles (physiques, biologiques, sociales et
psychologiques), leurs relations mutuelles et
affectives. Ils font circuler leurs messages
« ayant un projet de parole personnel inscrit
dans une finalité d’influence, et une instance
globale de production, qui confisque, à son
propre bénéfice, la pluralité des projets
personnels des acteurs, toujours dans une
finalité, cette fois-ci globale, d’influence »15.
Au niveau global, le schéma participatif peut
varier d’un talk-show à l’autre :
♦ dans tout talk-show le rôle du modérateur
est celui d’administrer les prises de parole des
participants;
a) „H.P.: –Ce aş vrea să facem în încheierea
acestor cinci ani de Idei în libertate şi Înapoi la
argument ar fi, dragă Andrei, să ne oprim puţin
în loc, să tragem aer în piept şi să încercăm să
răspundem la întrebarea: « Dacă trăim cum
10
12
11
13
apud C. Kerbrat-Orecchioni, op. cit., p. 80.
Cf. S. Coculescu, Stratégies de communication :
coopération et polémique dans le débat télévisuél, Ed.
Universităţii din Ploieşti, 2004, p. 51.
14
15
Cf. C. Kerbrat-Orecchioni, op. cit., p. 82.
E. Goffman, 1981, Façons de parler, Minuit, Paris, p. 9.
D. Maingueneau, op. cit., p. 22.
S. Coculescu, op. cit., p. 22.
trăim, unde mai e viaţa noastră? »” (Înapoi la
argument)
b) „E. V. : –Dar vă mai amintiţi plecarea de la
ţară?
A.P.: – Era un amestec de dramă şi de
curiozitate, de excitaţie faţă de ce urmează...”
(Profesioniştii)
♦ parfois, à côté de la diade modérateurinvité il y a une assise de récepteurs
additionnels-témoins de la mise en scène et qui
n’ont pas le droit à la parole (ce public du
plateau on le trouve seulement dans le talk-show
Garantat 100%):
deuxième personne accompagné par un
appelatif), indices verbaux qui concernent
directement un certain interlocuteur potentiel,
indices de nature nonverbale (l’orientation du
corps, la direction du regard).
Fig. 6. Les participants ratifiés (l’émission Inapoi
la argument).
Fig. 5. Récepteurs additionnels
(l’émission Garantat 100%).
-
temoins
3.2.2. Les récepteurs
Les récepteurs et les émetteurs ne se
trouvent pas dans un rapport symétrique l’un visà-vis de l’autre, parce que les récepteurs ne
peuvent être considérés des décodeurs passifs
du message des émetteurs. Le récepteur
accomplit un travail langagier différent de
l’émetteur, tous les deux se trouvant dans un
processus de co-énonciation.16 En analysant les
talk-shows culturels, nous allons faire des
distinctions entre différents types de récepteurs.
Ainsi, il y a des récepteurs présents auxquels on
s’adresse (ici on inclut les participants ratifiés17,
intégrés vraiment dans le groupe conversationnel
et qui produisent des signes de leur engagement
dans l’interdiscours – Fig. 6) et d’autres
récepteurs présents auxquels on ne s’adresse
pas directement (le public présent dans le studio
– Fig. 7) :
Ces destinataires directs sont les « addressed
recipients »18 que le locuteur les admettent
comme principaux partenaires de l’interaction. Ils
sont identifiables selon un certain nombre
d’indices d’allocution produits par le parleur:
indices discrets et décisifs de nature verbale (la
séquence métacommunicative, le pronom de la
16
17
18
Cf. P. Charaudeau, D. Maingueneau, 2002, op. cit., p. 482
C. Kerbrat-Orecchioni, op. cit., p. 86.
Idem, p. 86.
Fig. 7. Les récepteurs présents auxquels on ne
s’adresse pas directement (l’émission Garantat 100%).
Le modérateur et son invité deviennent, à
tour de rôle, des récepteurs investis avec le droit
de prendre la parole tandis que les autres
récepteurs n’ont pas la possibilité de répondre
(le public du studio, qui a l’accès à une façon
différée de répondre par leurs applaudissements,
et les téléspectateurs qui se trouvent seulement
en position de vue et d’écoute). Ce grand
consommateur de produit médiatique – les
téléspectateurs, représente une entité qui est
physiquement absente de la situation de
communication. Pour le modérateur et ses
invités, le grand public reste inconnu du point de
vue social et alors, pour exercer l’influence visée
par ce type de débat culturel, ils forment des
hypothèses sur le possible récepteur. « Ainsi
peut-on distinguer l’instance-cible supposée
comme cible intellective (à laquelle on attribue la
faculté de penser) ou comme cible affective (à
laquelle on attribue des réactions émotionnelles)
et l’instance public celle qui réellement existe et
subit les influences. »19
19
S. Coculescu, op. cit., p. 22.
Ştiinţe socio-umane
4. Conclusions
« Imaginaire de mise en scène du discours »,
le talk-show culturel nous révèle sa propre
manière de traiter des thèmes qui concernent le
rapport entre l’individu et la société sous la
forme de l’échage d’opinions, en privilégeant
aussi la relation intersubjective que l’apport
cognitif. On a vu que le modérateur est un
maître du jeu interlocutif, il propose des univers
de référence par ses questions et des
conclusions finales par ses assertions ; pendant
que l’invité se voit pris entre les univers imposés
et la dramatisation du talk-show, il devient un
acteur d’un théâtre dont il ne sait rien, étant à la
portée de l’animateur/metteur en scène. Le talkshow culturel nous offre une mise en scène
emblématique qui développe une interaction
consensuelle et coopérative entre les participants
et l’accumulation de leur diversité. Les invités
parlent quand ils sont sollicités, le modérateur
est omniprésent et domine les échanges
verbaux; ses interventions d’ouverture, de
continuité
ou
de
clôture
exploitent
admirablement l’humour, la connivence ou
l’ironie.
Au-délà du transfert des informations, par
lequel la dimension relationnelle de la
communication est consolidée, les discours
deviennent des co-constructions collectives, les
participants à l’interaction pouvant être
comparés avec les interprètes d’une partition
musicale où chacun chante en s’accordant selon
l’autre:
« dans ce vaste orchestre culturel, il n’y a ni
chef, ni partition. Chacun joue en s’accordant sur
l’autre. Seul un observateur extérieur, c’est-àdire un chercheur en communication, peut
progressivement élaborer une partition écrite,
qui se révélera sans doute hautement
complexe ».
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comprendre la linguistique, Bréal, Paris, 1999.
Vion, Robert, La communication verbale, Hachette
Université Communication, Paris, 1992.
Corpus
Les talk-shows
♦ Garantat 100% (le modérateur Cătălin Ştefănescu,
l’invité, Cristi Puiu).
♦ Înapoi la argument (le modérateur Horia-Roman
Patapievici, l’invité Andrei Pleşu).
♦ Nocturne (le modérateur Marina Constantinescu,
l’invité Eugen Ciocan).
♦ Profesioniştii (le modérateur Eugenia Vodă, l’ invité
Andrei Pleşu).
Lăcrămioara COCÎRLĂ
Etudiant doctorant, Université « Stefan cel
Mare » de Suceava, Faculté de Lettres et
Sciences de la Communication, Domaine de
doctorat : Linguistique, Directeur de thèse :
prof. univ. dr. Sanda-Maria ARDELEANU