marie-france et patricia martin
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marie-france et patricia martin
PRESENTATION GENERALE Le festival Nouvelles fête en 2010 sa 20ème édition. Centré sur l’actualité chorégraphique, il est considéré comme précurseur de ce type de festivals au début des années 1990. S’intéressant dès l’origine aux artistes émergents, le festival a offert à une nouvelle génération de chorégraphes un espace leur permettant d’accélérer leur processus d’apprentissage de la scène. Aimantée par de longues fidélités, la programmation s’est enrichie au fil des saisons : tout en maintenant les principes fondateurs du festival, elle offre un panorama des différents courants, écritures et esthétiques de la danse contemporaine, renforçant depuis quelques années le rayonnement du festival par l’invitation de chorégraphes renommés qui assurent par leur présence un éclairage plus important sur des propositions moins connues. Au-delà d’une thématique stricte, les pièces sélectionnées répondent, chacune à sa manière, au mouvement et à la place de l’artiste aujourd’hui. À l’image du foisonnement des formes qui caractérise la danse contemporaine, avec l’accélération des recherches en matière chorégraphique et l’introduction des nouvelles technologies, « Nouvelles » s’inscrit dans une dynamique ancrée dans le présent. Point d’orgue d’une saison danse très riche à Pôle Sud, le festival, espace indépendant ouvert sur des formes et des formats inédits, présente chaque année une vingtaine de compagnies issues de plusieurs pays. Volontiers itinérant, il investit de nombreux espaces de la ville, publics ou privés, mais aussi des théâtres et structures pour des spectacles expérimentaux ou grand public, en salles ou dans la rue, déambulatoires ou en plein air, favorisant ainsi la circulation des publics et des œuvres, dans un climat ludique, convivial, décalé et toujours exigeant esthétiquement. L’édition 2010 répond à tous ces critères tout en renforçant un nouvel axe de programmation avec le partenariat du FRAC Alsace. Initiée en 2009, cette collaboration convoque de nouveaux artistes issus des arts visuels et de la performance, qui permet au festival de prendre un nouveau départ en s’intitulant désormais : DANSE/ PERFORMANCE - FESTIVAL NOUVELLES LA PROGRAMMATION Le festival aura lieu du 20 au 29 mai 2010. Une vingtaine de compagnies sont au programme. Répartis sur plusieurs espaces de représentations (Pôle Sud, Le Maillon Wacken, la médiathèque Malraux, le Frac Alsace à Sélestat, le théâtre de Hautepierre, la rue), les propositions artistiques vont du solo à de grandes productions internationales. Plusieurs pays en présence, la France, l’Espagne, la Suisse, la Belgique, l’Afrique du Sud, les Etats-Unis, l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Le déroulement du festival permettra au public d’accéder lors d’une même journée à différents spectacles dans des espaces très différents. Des salles pouvant accueillir entre 50 et 600 spectateurs donnent à l’ensemble une forme d’élasticité propice à des découvertes esthétiques originales. Au cœur de la programmation 2010, la résidence de la Compagnie Velvet, Joanne Leighton, permettra d’ouvrir encore le champ avec : l’animation d’un stage de dix jours pour danseurs professionnels, la présentation de sa nouvelle création et l’organisation d’une "journée particulière" en final du festival. Autre nouveauté, la mise en place de rencontres publiques intitulées "avant-propos" qui donneront l’occasion à des compagnies installées dans la région de présenter leur travail en cours et d’en expliquer au public le processus de création. CHOREGRAPHES ET ARTISTES INVITES THOMAS LEBRUN PALOMA CALLE GUILLAUME DESANGE GILLES JOBIN RUSSELL MALIPHANT JOANNE LEIGHTON VIRGINIA HEINEN AUDE LACHAISE PRINZ GHOLAM MIET WARLOP DELGADO / FUCHS ROBYN ORLIN GEORGES APPAIX MARIA LA RIBOT MIGUEL GUTIERREZ RACHID OURAMDANE MARIE France ET PATRICIA MARTIN BOUCHRA OUIZGUEN Marjorie BURGER-CHASSIGNET & Galaad LE GOASTER NICOLAS BOULARD 2 AGENDA DU FESTIVAL THOMAS LEBRUN "ALLONE#4" DANSE - PAGE 4 4 SOLI - FRANCE JEUDI 20 MAI A 20H30 A POLE SUD PLATEAU DELGADO FUCHS "MANTEAU LONG EN LAINE…" DANSE - DUO - PAGE 7 BELGIQUE - SUISSE JEUDI 20 MAI A 22H30 A POLE SUD STUDIO PALOMA CALLE "SIMPLE PRESENT" PAGE 9 PARCOURS URBAIN - ESPAGNE VENDREDI 21 MAI A 18H ET A 20H AU MAMCS SHOWING - STAGE JOANNE LEIGHTON PAGE 11 SAMEDI 22 MAI A 16H AU THEATRE DE HAUTEPIERRE ROBYN ORLIN "CALL IT ... KISSED BY THE SUN" DANSE - SOLO - PAGE 12 AFRIQUE DU SUD VENDREDI 21 MAI A 21H A POLE SUD PLATEAU GUILLAUME DESANGE "HISTOIRE DE LA PERFORMANCE EN 20 MINUTES" PAGE 14 PERFORMANCE - SOLO - FRANCE VENDREDI 21 MAI A 22H30 A POLE SUD STUDIO GEORGES APPAIX "SEXTET MOUVEMENTE POUR SALLE DE LECTURE" DANSE - PAGE 15 6 INTERPRETES - FRANCE SAMEDI 22 MAI A 14H ET A 17H A LA MEDIATHEQUE ANDRE MALRAUX GILLES JOBIN "BLACK SWAN" DANSE - PAGE 18 4 INTERPRETES - SUISSE SAMEDI 22 MAI A 20H30 A POLE SUD PLATEAU LA RIBOT "LLAMAME MARIACHI" PAGE 21 DANSE - PERFORMANCE - TRIO - SUISSE - ESPAGNE SAMEDI 22 MAI A 22H30 A POLE SUD STUDIO UNE JOURNEE PARTICULIERE - DIMANCHE 23 MAI AU FRAC A SELESTAT GUILLAUME DESANGES "HISTOIRE DE LA PERFORMANCE EN 20 MINUTES" PERFORMANCE - FRANCE PRINZ GHOLAM "EKOGPMCFAeD" PERFORMANCE - ALLEMAGNE MIET WARLOP "PROPOSITION 1 : REANIMATION" PERFORMANCE - BELGIQUE NICOLAS BOULARD "DE QUELQUES FORMES SPECIFIQUES (SPECIFIC CHEESES)" PERFORMANCE - FRANCE M. BURGER-CHASSIGNET & GALAAD LE GOASTER "CRASH ROAR DIN" PERFORMANCE - FRANCE RUSSELL MALIPHANT "CHOISE" + "AFTERLIGHT " DANSE - PAGE 14 PAGE 26 PAGE 27 PAGE 28 PAGE 29 PAGE 30 5 INTERPRETES + TRIO - G RANDE-BRETAGNE MARDI 25, MERCREDI 26 ET JEUDI 27 MAI A 20H30 AU MAILLON WACKEN VIRGINIA HEINEN "VALSE POUR UN AMOUR" PAGE 32 DANSE - AVANT PROPOS JEUDI 27 MAI A 19H AU THEATRE DE HAUTEPIERRE RACHID OURAMDANE "LOIN" PAGE 34 DANSE - SOLO - FRANCE JEUDI 27 MAI A 20H30 A POLE SUD PLATEAU MIGUEL GUTIERREZ "RETROSPECTIVE EXHIBITIONIST" DANSE - SOLO - PAGE 36 USA JEUDI 27 ET VENDREDI 28 MAI A 22H30 A POLE SUD STUDIO MARIE-FRANCE ET PATRICIA MARTIN "PATRICK TU VIENS ?" PERFORMANCE - DUO - PAGE 37 BELGIQUE VENDREDI 28 MAI A 19H A POLE SUD STUDIO JOANNE LEIGHTON "THE END" DANSE - PAGE 38 5 INTERPRETES - BELGIQUE VENDREDI 28 MAI A 20H30 A POLE SUD PLATEAU CARTE BLANCHE A JOANNE LEIGHTON GWENDOLINE ROBIN "ECHELLE" et "TERRITOIRE" PERFORMANCE - FRANCE SAMEDI 29 MAI ENTRE 19H ET 24H A POLE SUD PAGE 40 AUDE LACHAISE "MARLON" DANSE - SOLO - FRANCE PAGE 41 BOUCHRA OUIZGUEN "MADAME PLAZA" DANSE - 4 INTERPRETES - MAROC PAGE 42 SAMEDI 29 MAI A 19H A POLE SUD STUDIO SAMEDI 29 MAI A 20H30 A POLE SUD PLATEAU DANCE PARTY SAMEDI 29 MAI A 22H30 A POLE SUD 3 DANSE A POLE SUD - PLATEAU JEUDI 20 MAI / 20.30 / 4 SOLI / FRANCE / DUREE 80' / THOMAS LEBRUN CIE ILLICO /////ALLONE#4 ///// Invité en clôture du festival la saison dernière, nous lui en avons confié cette fois l’ouverture. Ce chorégraphe passionnant, sait en effet passer avec bonheur et intelligence de son attirance vers la démesure foutraque de ses personnages vers des pièces subtiles et profondes, à l’écriture ciselée et à l’interprétation bouleversante. Dans ce programme, spécialement conçu pour le festival, il nous propose quatre soli volontairement polyphoniques. LE TEMPS DE BRILLER Issue de La constellation consternée, oeuvre chorale composée de 5 pièces courtes sur le thème de l’étoile, Le temps de Briller met en scène une "Star". Figure emblématique de nos sociétés contemporaines où tout le monde veut sa part de rêve, la "vedette" de Thomas Lebrun, magnifiquement interprétée par un Raphaël Cottin au corps long et androgyne, offre à voir autant l’ombre que la lumière. Une danse étirée, coupée, résistante, qui choisit autant qu’elle subit le temps d’être sur l’instant. MANY DREAMS FOR EXERCISING WALTZ Cette pièce répond à une commande sur le thème de la valse faite par Les Subsistances de Lyon. Many Dreams for Exercising Waltz est un exercice de style sur la valse et sur les images qu’elle fait tourner… Ce solo est construit comme un rêve où plusieurs souvenirs d’autres rêves reviennent…Où le temps n’est pas clair et où le monstrueux peut être féerique. FEUE Autre pièce créée sur commande pour le festival Ardanthé de Vanves, le chorégraphe s’aventure ici dans le monde de Pina Bausch récemment disparue. Feue Pina Bausch est une pièce née des sensations que le chorégraphe garde dans son corps et dans sa tête. Une forêt en automne… Au sol, un parterre de fleurs… une pluie fracassante… Une longue robe, une longue chevelure, de longs bras aussi longs que les jambes aussi longues que les silhouettes se déhanchant sur une musette des années folles…C’est ce monde de Pina que Thomas voudrait toucher du doigt, sans l’avoir vécu, mais connu en l’ayant reçu… perçu. GWIAZDA Quand on est enfant et que l’on perd un proche, on nous dit souvent qu’il est parti au ciel, qu’il s’est transformé en étoile... En gwiazda, pour les petits polonais... Une étoile que l’on choisit en se disant que c’est elle. Une danse au rayonnement irrégulier, à l’intensité mesurée. REPERES BIOGRAPHIQUES Interprète pour les chorégraphes Bernard Glandier, Daniel Larrieu, Christine Bastin, Christine Jouve ou encore Pascal Montrouge, Thomas Lebrun fonde la compagnie Illico en 1998, suite à la création du solo Cache ta joie !. Implanté en région Nord-Pas-de-Calais, il fut d’abord artiste associé au Vivat d’Armentières (2003-2005) avant de l’être – depuis 2006 – auprès du Centre de Développement Chorégraphique/Danse à Lille. On prendra bien le temps d’y être, La Trêve(s), Les Soirées What You Want ?, Switch, Itinéraire d’un danseur grassouillet, et aujourd’hui La constellation consternée, sont autant de pièces que d’univers et d’esthétiques explorés, allant d’une danse exigeante et précise à une théâtralité affirmée. Thomas Lebrun signe également plusieurs co-écritures, notamment avec le chorégraphe suisse Foofwa d’Imobilité (Le show / Un twomen show) et la chorégraphe française Cécile Loyer (Que tal !), et donne une place forte à l’enseignement et à la transmission (Centre national de la danse de Pantin et de Lyon, Ménagerie de Verre, Conservatoire National de La Rochelle, Balletéatro de Porto, etc.). Il chorégraphie également pour des compagnies à l’étranger, comme le Ballet National de Liaonning en Chine, le Grupo Tapias au Brésil (un solo et – en 2009 dans le cadre de l’Année de la France au Brésil – un quintette), et dernièrement pour Loreta Juodkaité, danseuse et chorégraphe lituanienne, dans le cadre de l’édition 2009 du New Baltic Dance Festival de Vilnius et de l’opération FranceDanse Vilnius organisée par CulturesFrance (Vilnius, Capitale de la culture 2009). WWW.CIEILLICO.FR 4 LE TEMPS DE BRILLER (solo de La constellation consternée) Durée : 10 min Interprétation : Raphaël Cottin Chorégraphie : Thomas Lebrun Musique : Jean Sibélius - La Valse Triste Introduction musicale : David Moreau Création Lumière : Jean-Marc Serre Costume : Jeanne Guellaff Production : Compagnie Illico Coproduction : Les Subsistances, dans le cadre du Week-End "ça valse" Star... étoile en anglais. Qui désigne également pour l’ensemble du monde, "une personne médiatisée unanimement connue et reconnue de part ses qualités artistiques", homme ou femme. Une star de cinéma | Une star de la chanson Une star du théâtre | Une star de la musique Une étoile...en danse. A l’époque où l’on produit des stars à profusion, où les rêves de chaque enfant se dirigent régulièrement vers cette utopie médiatique, où même une certaine culture "d’en haut" se plaît à trouver sans répits de nouveaux espoirs... A l’heure où les dirigeants prônent le nouveau, l’innovation, mais aussi le politiquement correct... Alors que se débat une jeunesse gorgée d’espoirs et d’illusions, souvent plongée dans l’ombre de ses envies. Quel temps reste-t-il pour briller ? Noir. Mais une étoile ne s’éteint pas !... Est ce donc vraiment une star ? "On t’a lancée... alors maintenant accroche toi... ou tombe" Il y a des milliers d’étoiles, qu’on voit, qu’on ne voit pas ou qu’on ne voit plus. Un corps long, androgyne. Une représentation asexuée. Une danse étirée, coupée, résistante, qui choisit autant qu’elle subit le temps d’être sur l’instant. MANY DREAMS FOR EXERCISING WALTZ Durée : 20 minutes Chorégraphie : Thomas Lebrun Interprétation : Thomas Lebrun Création musicale : David Moreau, d’après Johann Strauss II "Le beau Danube bleu", Dimitri Dmitrievitch Chostakovitch "Valse n° 2" et Aram Khatchatourian. Lumières : Jean-Marc Serre Costumes et Accessoires : Thomas Lebrun Création : Le 10 octobre 2008, dans le cadre du "week-end ça valse" à Lyon (France) Marie-Christine VERNAY, LIBERATION, les 11-12 octobre 2008 /// "Lieu dédié à toutes les formes d’art vivant, Les Subsistances de Lyon proposent une fin de semaine viennoise : Ca valse ! Le titre est bien choisi car les spectacles programmés (...) envoient tout bousculer sur le ton de la plaisanterie ou sur fond noir de récession, de crise évidemment. C’est la valse à trois temps, déclinée autant dans l’enchantement que le désenchantement. Thomas Lebrun répond à la commande en présentant deux soli. Le premier*, interprété par Raphaël Cottin, s’interroge sur l’idée même de la star, loin de son academy. Dans des voiles blancs, le danseur donne sa définition de la grâce. Thomas Lebrun, dans le second solo, fait de même. Il se moque avec pertinence des spots de pubs et autres réclames. Lors de ce week-end danse (...) les femmes des plus belles côtoient des hommes qui se croient moches comme Thomas Lebrun, alors que sa beauté est fatale. Ca valse et ça déménage." Luc HERNANDEZ, LIBERATION – Lyon, le 11 octobre 2008 /// "(...) Thomas Lebrun était de retour pour déplacer joliment le lyrisme de la valse vers la solitude. D’abord en offrant un premier solo déférent à un jeune danseur au galbe splendide se jouant des figures classiques*. Puis en débarquant, rondouillard à souhait, annonçant de but en blanc un autre solo "qui va changer de style". Il revient accoutré en queue de pie de foire, portant un masque burlesque à triple menton de trois pieds de long. Le montage sonore superposant les musiques permet de s’affranchir des grands fleuves viennois et de jouer sur les ruptures, les manqués et les à-coups. (...)Thomas Lebrun parvient à rendre hommage au genre tout en le dépassant, transportant la valse sur le terrain de l’exercice solitaire juste bon à "se casser le menton". Splendide. (...)" (*) : il est fait référence au solo "Le temps de briller" créé dans le cadre du "Weekend Ca Valse !" sur la "Valse Triste" de Jean Sibélius. Ce solo prendra place, aux côtés de deux autres soli, un duo et un quintet, dans la pièce "La constellation consternée" dont la création finale (le quintet) verra le jour en 2010. 5 FEUE Durée : 20 min Ce solo est une commande du festival Ardanthé dans le cadre des soirées "Pina B. vue par …" Conception et interprétation : Thomas Lebrun Création vidéo : Charlotte Rousseau Musiques : Aurora in Pékin (Bolona Sexteto), Marcia Funebre (Banda Ionica), Wild is the wind (Nina Simone) Création lumière : Jean Marc Serre Costumes, accesoires et scénographie : Thomas Lebrun Création les 25 et 26 janvier 2010 Feue Pina Bausch. Au loin, une forêt en automne, une prairie verte à l’aube, une neige glaciale… Au sol, un parterre de fleurs, le piquant des cactus, une pluie fracassante… Une longue robe, une longue chevelure, de longs bras aussi longs que les jambes aussi longues que les silhouettes se déhanchant sur une musette des années folles… Un homme séduisant étriqué dans son costume s’arrosant de mondanités. Une femme perchée sur des talons, tombant dans le vide, perdue dans un monde… C’est ce monde de Pina Bausch que je voudrais toucher du doigt. Sans l’avoir vécu, mais connu en l’ayant reçu… perçu. L’émotion et les images qui me viennent sont nombreuses et nettes, des éclats de rire dans Walzer à la gorge serrée dans Café Müller. Tout doit être noir. Pour que l’éclat vienne de l’émotion, pour que les couleurs et la vivacité viennent du sensible et des souvenirs. Proposer ce que mon corps a ressenti et ressent encore pour son oeuvre. Traverser ce que j’ai reçu. Comme un rêve de gosse, vouloir être tout le monde à la fois. Comme un rêve de danseur, se voir sur scène en regardant ses pièces. Comme un rêve de chorégraphe, toucher l’humain par toutes ses failles. Thomas Lebrun GWIAZDA (solo de La constellation consternée) Durée : 18 minutes Interprétation : Anne-Emmanuelle Deroo Chorégraphie : Thomas Lebrun Chant live : Emeline Deroo Musique : Seb Martel, avec l’aimable participation de Vincent Segal et Greg Szlapczynski, Nick Cave Création lumière : Jean-Marc Serre Costume : Jeanne Guellaff Production : Compagnie Illico, avec le soutien de Danse à Lille/CDC/Roubaix Quand on est enfant et que l’on perd un proche, on nous dit souvent qu’il est parti au ciel, qu’il s’est transformé en étoile... En gwiazda, pour les petits polonais... Un solo pour Manue, sur le chant de sa soeur Emeline. Danser la perte, la disparition d’un être aimé, la naissance du souvenir, l’apparition du vide. Une danse au rayonnement irrégulier, à l’intensité émotionnelle et physique mesurée, à observer, à chercher, à deviner. Ce n’est pas une petite ou une grande étoile. Juste une étoile avec sa force et sa discrétion, sa lueur qui peut être voilée par un nuage passager, et la place qu’elle occupe au milieu de toutes les autres. Une que l’on choisit en se disant que c’est elle. 6 DANSE A POLE SUD - STUDIO JEUDI 20 MAI / 22.30 / DUO / BELGIQUE / SUISSE / DUREE 50' / DELGADO FUCHS CIE DEFU /////MANTEAU LONG EN LAINE MARINE PORTE SUR UN PULL A ENCOLURE DETENDUE AVEC UN PANTALON PEAU DE PECHE ET DES CHAUSSURES POINTUES EN NUBUCK ROUGE ///// Créée en 2007, Manteau Long… connaît un très grand succès partout dans le monde. Beaux, souples, sexys, parfaitement épilés, faussement ingénus, nos deux chorégraphes offrent à voir leurs séduisantes anatomies sur un ton neutre, distancé et flegmatique. Tour à tour ironique, grinçante ou sérieuse, la pièce joue en finesse avec les codes de la représentation. Dans cette création chorégraphique, habitée d’un humour décalé, faite de clichés et d’autodérision, les deux magnifiques interprètes parviennent à une justesse de ton et une fraîcheur étonnantes. De et avec Nadine Fuchs et Marco Delgado Création lumière Regina Meier Régie générale Vincent Tandonnet Confection costumes David Dengis, Frédéric Neuville Elément scénographique Delgado Fuchs Installation vidéo DFFM Delgado Fit Fuchs Method Concept et présentation Nadine Fuchs et Marco Delgado Vidéo Bruno Deville Musique Stéphane Veccione Voix off Sylvain Portmann Production Association Cie DeFu Coproduction L'L - lieu de recherche et d'accompagnement pour la jeune création Résidence de création Dampfzentrale Berne, Théâtre Sévelin 36 Lausanne Date de création octobre 2007 Réalisé avec l’aide de la Ville de Berne, du Canton de Berne, de Pro Helvetia - fondation suisse pour la culture, du Ministère de la Communauté française Wallonie-Bruxelles - Service de la danse, de WBTD Wallonie Bruxelles Théâtre Danse, de la fondation Ernst Göhner, de Migros Kulturprozent et de la Burgergemeinde Berne. Avec le soutien de la Commission Communautaire Française - Service de la Promotion à l'Etranger. REPERES BIOGRAPHIQUES Delgado Fuchs est un collectif constitué en mars 2002 à Berne, par les deux danseurs chorégraphes Marco Delgado et Nadine Fuchs. Ils proposent des créations qui permettent de repenser le corps et le mouvement en tant que danseurs, mais hors la danse. En marge des catégorisations habituelles, mi-sérieuses et mi-triviales, leurs créations se nourrissent de l'équivoque : en reformulant continuellement le propos, en variant les perspectives, Delgado Fuchs révèle en action le caractère versatile de l'identité soumise aux multiples mode de l'être. WWW.DELGADOFUCHS.COM 7 PRESSE ET COMMENTAIRES Dans Manteau long... Delgado Fuchs proposent leur séduisante anatomie et un ton neutre, distancié, à travers quelques exercices d’échauffement avec mouvement du bassin ad hoc, qui transforment le spectateur en voyeur devant ce couple faussement ingénu. Habillés ou pas, sur une musique parfaitement lénifiante, ils gardent un flegme sans accroc. Le paradoxe du corps qui s’exhibe, mais renferme des sentiments pudiques, est signifié par une danse où, nus, la main de l’un protège l’intimité de l’autre. Mais, en filigrane, apparaît le lien entre ces deux-là, concrétisé par un long baiser. Goutte à goutte, perle cet affect entre la fille en rose et le garçon en bleu, intimité entr’aperçue qui ne manque pas de charme(s). Michel Barthome, Magazine Danser, Paris, avril 2009 Tout coule de source sur leurs corps impeccables qui jouent du masculin féminin dans ses grandes lignes sans appuyer sur le champignon de la dérision mais plutôt en tournant la tête du côté de la farce, de l’humour et d’un sens tout à fait personnel donné au mot sexy. Ils racontent des histoires sans mot, cèdent une fraction de seconde à l’appel du désir, se glissent dans un total look idéal, transmettent le rire malgré leur apparent sérieux, se jettent l’un sur l’autre l’espace d’un instant, se prennent à la légère pour des phénomènes de foire et disparaissent, laissant derrière eux traîner leurs effigies placées sous une belle, très belle image. Delgado Fuchs, ne manquez pas de les retrouver où qu’ils passent, vous garderez sûrement un très très bon souvenir de ce détour… sous forme de polaroid ou pas ! Emmerentienne Dubourg pour Micadanses, Paris, décembre 2007 Le pas de deux sexy et moqueur des Delgado-Fuchs Un gars, une fille, un Ken et sa Barbie, un mec en bleu au chocolat, une quille en rose à la vanille... Le spectacle du collectif Delgado-Fuchs (les danseurs et chorégraphes Marco Delgado et Nadine Fuchs) ouvre les vannes à une ritournelle savoureuse presque aussi longue que son titre quasiment impossible à retenir Manteau long en laine marine porté sur un pull à encolure détendue avec un pantalon peau de pêche et des chaussures pointues en nubuck rouge. Sur le plateau, notre duo belgo-suisse est en slip ou en maillot de bain, en chemise de cow-girl et en short, à poil... Un vestiaire minimaliste pour costumer le plus piquant défilé de clichés sur la dictature du corps aujourd'hui, dans la danse et ailleurs, et le plus détonnant paquet-cadeau spectaculaire qu'on ait vu depuis longtemps. En tournée dans le monde entier avec un succès boule de neige depuis sa création en 2007, la pièce des Delgado-Fuchs se pose, le 27 mars, au Festival Visu, à Dieppe. Une note de musique aigrelette tombe sur le plateau vide comme une goutte d'eau sur une plaque métallique. Notre charmant petit couple fait chauffer le moteur (articulation après articulation) avant d'y aller de son pas de deux sexy et moqueur, dynamitant d'un air grave certaines attitudes de la danse contemporaine, par exemple. Le training et son rapport narcissique au corps et à l'exhibition, la mode "boîte de nuit", la tendance "sexe acrobatique" (les danseurs n'oublient jamais de prendre la pose, même en plein orgasme)... Tout est bon pour se faire du bien en solitaire (surtout) ou à deux (parfois, c'est mieux). Contempler Nadine Fuchs en grand écart facial en train de se frotter contre le sol raconte mieux que n'importe quel discours sur le sujet l'autojouissance et la pratique masturbatoire que sont la danse ou toute autre "addiction" physique. POP ET FRAÎCHE C'est en insistant tranquillement sur chaque situation, que l'humour subtil des Delgado-Fuchs en fait surgir les dessous troubles. Il leur suffit d'un coup de hanche pour que tout le sel d'un tableau - une séance de drague entre un bel "arnacoeur" et une jolie fille à qui on ne la fait plus mais qui s'en amuse encore - apparaisse. Les Delgado-Fuchs possèdent un atout majeur : faire coulisser érotisme et humour sans jamais racoler en dessous de la ceinture. Cultivant leur côté bécasson, mais tout sauf niais, ils déclinent une éducation sentimentale et chorégraphique pop et fraîche à la mode ironique d'aujourd'hui. Sourire et rire en finesse pendant un spectacle de danse contemporaine est un régal trop rare par les temps qui courent. Manteau long en laine marine... est l'exception intelligente qui confirme la règle. On y retourne immédiatement. Rosita Boisseau – Le Monde du 28 mars 2010 8 PERFORMANCE AU MUSEE D'ART MODERNE ET CONTEMPORAIN DE STRASBOURG VENDREDI 21 MAI / 18.00 ET 20.00 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE / PARCOURS URBAIN / ESPAGNE / DUREE 70' / PALOMA CALLE /////SIMPLE PRESENT / PRESENTE DE INDICATIVO ///// SIMPLE PRESENT/PRESENTE DE INDICATIVO se situe entre la performance, l’installation et le geste quotidien, en l’occurrence la déambulation, pensé comme pratique esthétique. Le titre en forme de jeu sur l’ambiguïté des mots et sur le temps grammatical du présent de l’indicatif induit que la grammaire seule pourrait organiser l’action de l’œuvre à venir. Dans ce temps-là, il s’agit en fait d’interroger la matérialité, la réalité et la temporalité d’une œuvre d’art. Pour ce faire, Paloma Calle invite le public à la suivre dans une expérience de la scène et de la salle de spectacle, puis de la ville et de la rue. Par le dialogue, la question, puis au travers d’une suite d’actions fragiles, elle incite les spectateurs à se mettre en alerte, à observer, à user d’intuition… à l’exercice actif du regard plutôt qu’à une participation passive. La performance associe sens de l’humour et simplicité poétique pour un questionnement ouvert sur le sens de la création, où légèreté et fragilité ne sont pas synonymes de vacuité, et d’où le public doit sortir un peu transformé. Tout en investiguant sur le contenu et la forme d’une œuvre, SIMPLE PRESENT/PRESENTE DE INDICATIVO interroge simultanément, la présence, le rôle, les attentes et les frustrations du public. Idée, réalisation et production : Paloma Calle Performance : Paloma Calle Voie off : Amanda Diaz Création lumière : Sergio Garcia REPERES BIOGRAPHIQUES Paloma Calle est née à Madrid e 1975. Elle a travaillé pendant 10 ans avec des compagnies de danse et de théâtre allemandes, espagnoles et italiennes, avant de développer ses propres projets en 2004. Elle puise la matière de son travail dans son autobiographie, qu'elle explore et reconstruit avec ironie. Le rôle du public est régulièrement questionné dans ses performances. Parmi ses pièces présentées dans différents festivals en Europe et en Espagne, citons : "des-trozos", "lovely epi-ladies", "parlez moi d'amour", "ZOO", "simple present", "SE-CRET", "territorio : sad y k", "DE MANO", "1, 2, 3, 4 partes", "EVEREST/principes", "100 cosas que hacer la noche en blanco mejor que ver la noche en blanco", "concierto y subasta", "hello myself". 9 A PROPOS DE LA PERFORMANCE Avant d’entrer dans la salle, le spectateur a reçu un appareil de traduction simultanée. La performance commence, dans le noir, une voix off annonce la performance ainsi qu’une série de préconisations calquées sur les recommandations de sécurité aérienne présentées par les hôtesses de l’air dans un avion. La performance s’annonce comme la représentation parodique d’un voyage. Premier échange, en off, entre le speaker et Paloma Calle : un couac sur un mot, un commentaire amusé entre les deux protagonistes, comme au cours d’une répétition. Le spectateur est plongé dans l’univers du théâtre et de la représentation, dans la construction d’une illusion. Le "générique" recommence… juste, cette fois. Le show commence, projections d’images de ciel en lent déplacement (comme vus à travers le hublot d’un avion), Paloma Calle sur scène, silencieuse. Le speaker en voix off (au casque + en audio dans la salle), annonce le son de la traduction comme une autre forme d’expérience du spectacle. Il interroge le spectateur sur ses attentes par rapport au texte et à l’actrice, à ses gestes… la voix off accompagne le spectateur dans son attente silencieuse, dans l’interrogation intérieure de son attente, par des références à de grands noms du théâtre et à la qualité d’une prestation scénique. Le jeu silencieux de la performeuse ne traduit qu’un vide, alors que le spectacle est supposé être riche d’une charge positive, de sens. Elan d’une action qui va débuter, mais qui ne commence jamais. Le silence et le commentaire décalé, en off, interrogent la présence scénique, l’éloquence, l’importance du texte et du geste, comme autant de présupposés de ce que doit être un spectacle. Jeu sur l’ennui, attente, valorisation du vide, PC sort et revient sur scène, de droite à gauche, en diagonales, , texte sur le t-shirt de l’actrice... Ce ne sont que de prétendues formes diversifiées de l’expérience. Illusion de la parole, de l’action à venir. Le spectateur est interrogé sur ses attentes en pareille situation, dans un face à face avec l’inaction, la voix off mesure sa frustration croissante. PC sort de scène, salle dans le noir, PC réapparait en projection vidéo. Elle lit un texte et les instructions des 3 parties de la performance : ennui, interaction, interrogation. C’est le début de la partie interactive. Le spectateur est invité à quitter la salle, à laisser le traducteur, à emporter un sac en papier et à suivre PC, qui décidera seule du parcours. Il devra mettre dans le sac en papier un objet ramassé durant le parcours. Explication du titre de la performance : "présent" = "cadeau", proposition de micro actions à venir et définies comme de l’art contemporain urbain et éphémère. Puis retour au théâtre, remise des sacs en papier. Appel des spectateurs un à un, ils sortent de la salle. Le parcours commence, PC indique le chemin et les actions avec un parlophone… Elle réalise des actions brèves, invite le public à faire de même, actions participatives et collectives. Divers médiums artistiques sont convoqués : photographie, installation, arts plastiques, dessin, performance, architecture…. (polaroïds, dessin des silhouettes, cerclage du groupe + déambulation …) … survient un événement : le vol du sac de PC. Course, le groupe s’affole derrière PC, PC interpelle le voleur et récupère son sac, commence avec lui un numéro de cabaret sur la musique de "There’s no business like show business"… le vol était une mise en scène ! Retour dans la salle, le public rend les sacs en papier, on lui distribue des cartons inscrits oui/non. PC sur scène, images du ciel en mouvement en projection derrière elle, aveu d’un monologue de fin malheureusement non achevé, qui oblige à inventer une autre fin. Elle pose des questions au public, auxquelles il répond en levant son carton sur oui ou non. Questions : le théâtre, rôle et importance de l’art, part dans la vie quotidienne, pratiques culturelles des spectateurs, vérité et représentation, questions et affirmations, interrogations métaphysiques individuelles… PC ouvre les sacs en papier et découvre les "cadeaux", en même temps qu’elle annonce avoir improvisé depuis le début et engage une série de commentaires sur la relativité du sens dans le théâtre, la relation entre acteurs et public, l’interrogation entre le questionnement et la réponse…. 10 SHOWING AU THEATRE HAUTEPIERRE SAMEDI 22 MAI / 16.00 / STAGE / BELGIQUE / JOANNE LEIGHTON CIE VELVET /////SHOWING ///// Les participants présenteront le travail abordé lors du stage de Joanne Leighton. 11 DANSE A POLE SUD - PLATEAU VENDREDI 21 MAI / 21.00 / SOL0 / AFRIQUE DU SUD / DUREE 50' / ROBYN ORLIN /////CALL IT... KISSED BY THE SUN... BETTER STILL THE REVENGE OF GEOGRAPHY... A SOLO FOR IBRAHIM SOSSOKO ///// Robyn Orlin, chorégraphe sud-africaine, a rencontré Ibrahim Sissoko, danseur et chorégraphe de hip hop, lors de sa résidence au Centre National de la Danse à Paris. Travaillant depuis des années sur la question des identités culturelles et des conflits qui peuvent en émaner, elle noue ici un dialogue entre cet artiste français d’origine africaine et sa propre recherche. Intéressée par les processus d’intégrations et par la porosité entre les communautés et les arts, elle évoque dans cette pièce les émeutes de banlieues en 2005 tout en élargissant son propos vers des notions plus universelles : la démystification de l’art, la question identitaire, le respect des différences. Au final, Call it… kissed by the sun… prend la forme d’une rencontre ludique entre le danseur Ibrahim Sissoko et le dessinateur Maxime Rébière qui inscrit en temps réel, des croquis, des esquisses et des images liés à la question cruciale et plus que jamais actuelle de la crise des banlieues. Une pièce de : Robyn Orlin Avec : Ibrahim Sissoko Illustration graphique en direct : Maxime Rebière Conception de la scénographie vidéo : Philippe Lainé Chorégraphie hip-hop : Ibrahim Sissoko Costumes : Olivier Bériot Lumières : Erik Houllier Régisseur général et son : Yann Le Hérissé Assistante de Robyn Orlin : Stéphanie Magnant Dramaturgie : Olivier Hespel Avec la participation de : Gérard Mendy REPERES BIOGRAPHIQUES Robyn Orlin est née d'un père lituanien et d'une mère danseuse polonaise émigrés en Afrique du sud avant la Seconde Guerre mondiale. Après une formation de danse classique, elle part, à la fin des années 1970, étudier la danse contemporaine à Londres, et fait des études d'art visuel à Chicago entre 1990 et 1995. Elle débute sa carrière de chorégraphe en 1980. Ses thèmes de prédilection ont directement à voir avec les drames qui ont parcouru et continuent de traverser son pays (apartheid, sida) en utilisant une forme de danse très théâtrale et en se servant de la vidéo. Les spectateurs sont parfois amenés à participer de manière interactive au spectacle. Elle revisite également de manière humoristique les grands classiques de l'art occidental. Longtemps perçue comme l'enfant terrible de la danse sud-africaine avant sa reconnaissance en Europe au début des années 2000, elle reste convaincue que "l'art ne sert à rien, s'il n'est pas en prise avec le réel". WWW.ROBYNORLIN.COM 12 Rencontre ludique et politique entre deux esthétiques, entre Ibrahim Sissoko et Maxime Rebière, Call it… kissed by the sun… renvoie aux leitmotive chers à Robyn Orlin : la démystification de l’art, la question identitaire, le respect des différences. Etre Noir en France, en Europe… Les émeutes de banlieue en 2005, dans la région parisienne… Deux axes de réflexion à l’origine de cette pièce. Au départ en tout cas… Comme souvent chez Robyn Orlin, ces axes ne sont pas des piliers inébranlables, des dogmes qui dictent la construction d’un projet. Ils sont davantage des points de ralliement pour l’équipe de création, les bases d’une envie "sensée" de faire ensemble. Même si les questions que ces axes restent bel et bien là. Toujours présentes, ne fût-ce que dans les coulisses… Une façon pour Robyn Orlin d’éviter d’aborder ces sujets de façon trop littérale, trop clairement discursive, voire didactique. Une façon en somme d’être libre de son propos. Liberté, précisément, une notion primordiale dans le vocabulaire de Robyn Orlin… Une question qu’elle lance non seulement à ses interprètes et collaborateurs, mais aussi à son public, ses pièces ne tissant jamais un discours linéaire/univoque mais procédant davantage du collage multi-pistes, laissant par là même le libre choix (précisément) à chacun de tisser sa propre histoire. Une démarche qui colle parfaitement à une seconde notion fondamentale chez Robyn Orlin : la "proactivité"* ; à l’opposé de la passivité, être acteur/auteur de ses propres choix. * Anglicisme. Le français connaît l'adjectif "proactif" que le Petit Robert définit comme suit : qui anticipe les attentes prend l'initiative de l'action. Chez Robyn Orlin, le processus même de création oeuvre concrètement sur ces deux notions. Qui es-tu ? Que cherches-tu, toi qui travailles avec moi ? Telles pourraient être résumées les questions premières qui sous-tendent sa démarche de travail où l’écoute de l’autre, la curiosité pour l’autre sont "vitales". Dans cet ordre d’idée, le fait même qu’elle ne domine pas le français (et le reste de l’équipe l’anglais) devient un outil pour cultiver la "proactivité" de ses collaborateurs, pour ne jamais "strictement" les diriger mais les laisser faire leur propre chemin dans les pistes qu’elle lance, dans les directions qu’elle donne. Un moyen, également, de cultiver cette nécessité d’écoute qui anime son travail et de creuser, tangiblement, cette notion de l’autre qui habite littéralement cette chorégraphe sud-africaine, blanche, d’origine juive, émigrée à Berlin… L’autre, sans doute le maître-mot de son travail, tant dans la méthode que dans l’oeuvre elle-même. Et que l’on retrouve clairement dans cette pièce. Dans son articulation même. Car au-delà de la question d’être Noir en France ou de la notion d’intégration, de porosité de la culture française à ses communautés issues de l’immigration plus ou moins lointaine, Call it… kissed by the sun… est une rencontre entre deux univers artistiques et esthétiques rarement mixés : celui du chorégrapheinterprète de hip-hop Ibrahim Sissoko et celui du dessinateur Maxime Rebière dont le trait à l’énergie vive et à la fluidité légère du croquis est loin du tag ou du graff, deux langages que certains verraient plus volontiers côtoyer celui d’Ibrahim Sissoko… Une rencontre "improbable" en somme. Mais "logique" dans le travail de Robyn Orlin. Avec, en toile de fond, une nécessité leitmotiv chez elle : "démystifier l’art, retrouver sa simplicité, sa vulnérabilité, son humanité…" Olivier Hespel, en Décembre 2009 Robyn Orlin repeint la Liberté guidant le peuple La chorégraphe sud-africaine projette un tableau de Delacroix sur la réalité française des banlieues d’aujourd’hui. La chorégraphe sud-africaine Robyn Orlin présente Call it… Kissed by the sun… Better still the revenge of geography. Robyn Orlin, cette provocatrice née, surnommée "l’irritation permanente", s’attaque cette fois à la réalité française, en prenant comme sujet la crise des banlieues de l’automne 2005. Cela donne un solo d’Ibrahima Sissoko, l’un des maîtres du hip-hop, qui évolue en mouvements breakés (saccadés) devant un mur fait de cartons empilés. Sur cet espace neutre comme une toile blanche, Maxime Robière, hors scène, à l’aide d’un pinceau électronique, inscrit des esquisses virtuelles. Il y a d’abord une projection de la toile fameuse de Delacroix, la Liberté guidant le peuple. On sait qu’il s’agit d’une représentation symbolique des Trois Glorieuses de 1830. Dans les mains de Maxime Robière, relayé par le vidéaste Philippe Lainé, le tableau de Delacroix s’actualise. Les insurgés, blancs sur la toile, deviennent de jeunes Noirs encagoulés. La Liberté troque son drapeau pour le poing levé, et la baïonnette disparaît au profit d’une matraque et d’un casque de CRS. Zyed Benna et Bouna Traoré. Tandis que le dessinateur s’active, Ibrahima Sissoko, drapé dans une couverture de survie, semble être télétransporté en d’autres lieux au gré de successifs changements de décor virtuel. Il tambourine sur les murs supposés de la prison de la Bastille, qui finissent par s’écrouler sous ses coups. Puis le voici au pied d’un centre commercial, tirant un chariot virtuel. C’est enfin Clichy-sous-Bois. Le dessinateur en coulisse tague les noms de Zyed Benna (dix-sept ans) et Bouna Traoré (quinze ans), morts électrocutés dans l’enceinte d’un poste électrique, le 27 octobre 2005, après une course-poursuite avec la police. On entend aussi la voix de Sarkozy, à l’époque ministre de l’Intérieur, utilisant le terme de "racaille". Le spectacle s’achève dans les rangs du public sur l’injonction de mettre nos téléphones portables sur le mode alarme. Call it… Kissed by the sun… Better still the revenge of geography pratique intelligemment la tactique du puzzle, en mêlant plusieurs disciplines artistiques. Quant au message, il n’est pas neuf jusque dans sa radicalité systématique. Il a du moins le mérite d’attirer l’attention sur un problème brûlant de notre société. Robyn Orlin, forte de l’expérience de son pays, s’est ainsi fait un devoir de le traiter en regard des normes républicaines qui sont les nôtres, et qui demeurent constamment mises à mal. Muriel Steinmetz, l'Humanité, le 23 janvier 2010 13 PERFORMANCE A POLE SUD - STUDIO VENDREDI 21 MAI / 22.30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE 23 MAI UNE JOURNEE PARTICULIERE AU FRAC DIMANCHE / DUO / FRANCE / DUREE 20' / GUILLAUME DESANGES /////UNE HISTOIRE DE LA PERFORMANCE EN 20 MINUTES ///// UNE HISTOIRE DE LA PERFORMANCE EN 20 MINUTES est bien entendu un historique, bref, de la représentation du corps dans l'art. Mais c’est aussi un objet ambigu, un peu autoréférentiel et insaisissable, dont la réalité naît du face à face avec le spectateur et du présent de l’événement scénique : une performance en forme de conférence, une conférence comme un spectacle, peut-être même comme une performance, dans le cadre d’un festival de danse, sur la place du corps dans l’art ! Cette conférence est née d’une lecture parallèle de l’histoire de l’art occidental, puisant dans les positionnements et écrits théoriques que cette histoire a produits comme fondements scientifiques. Plus qu’une histoire du corps, c’est une histoire des gestes, des gestes engendrés par la théorie, là où la théorie n’a pas produit d’objets. La conférence est simultanément donnée et performée, devant un auditoire de spectateurs auditeurs. Au discours sur l’art se coordonne ainsi le discours du corps, entendu comme discours du silence, interrogé comme une forme et une écriture du savoir autant que pour la vérité de sa présence éphémère. De l’usage de la performance comme réflexion sur l’espace et sur la matérialité de l’art. Performance de Guillaume DESANGES avec Hélène Meisel le 21 mai et avec Frédéric CHERBOEUF le 23 mai. REPERES BIOGRAPHIQUES Guillaume Désanges est critique d’art et commissaire d’exposition. Cofondateur de Work Method, structure indépendante de production. Membre du comité de rédaction de la revue Trouble et correspondant français pour les revues Exit Express et Exit Book (Madrid). Il a coordonné les activités artistiques des Laboratoires d’Aubervilliers (2001-2007), et organisé les expositions Pick-Up à Public (Paris), Intouchable, l’Idéal Transparence à la Villa Arson (Nice) et au Musée Patio Herreriano (Valladolid), Jiri Kovanda vs Reste du monde, galerie gb agency (Paris), De Appel (Amsterdam), La Passerelle (Brest), Centre d’Art Santa Monica (Barcelone), Child’s Play, Biennale Periferic, (Iasi, Roumanie), Nam June Paik Center (Corée du Sud), Michel François, Plans d’évasion at SMAK (Belgique). Il a également développé plusieurs projets curatoriaux de type performatifs comme "Une histoire de la performance en 20 minutes" (Centre Pompidou, Paris / De Appel, Amsterdam / Artists Space, New York / MacVal, Paris / U-Turn, Copenhagen, etc..), "Vox Artisti, la voix de ses maîtres" (Halles de Schaerbeek, Bruxelles / University of Chicago / Bétonsalon, Paris), "Signs and Wonders" (Tate Modern, centre Pompidou). En 2007-2008, il est commissaire invité, chargé de la programmation du centre d’art la Tôlerie, à Clermont-Ferrand. En 20092011, il est commissaire invité du centre d’art le Plateau-Frac Ile de France, Paris. GUILLAUMEDESANGES.COM "Tenter une histoire du corps dans l’art comme une histoire du silence face au discours sur l’art. Décontextualiser la performance de son environnement historique. Simplement montrer comment l’histoire de l’art a – à un moment donné et pour certains – engendré des gestes, et non plus des objets. Et surtout, non plus des discours. Ainsi observée, de façon purement formelle, l’histoire de la performance ou du body art, n’est pas alors, une histoire de représentation du corps mais exclusivement une histoire de gestes. A peine esquissés : déjà morts. Une histoire de la performance en 20 minutes est une conférence qui vise à séparer en 10 gestes l’histoire de la performance : 1. Apparaître, 2. Recevoir, 3. Retenir, 4. Fuir, 5. Viser, 6. Chuter, 7. Crier, 8. Mordre, 9. Se vider, 10. Disparaître. La forme elle-même de la conférence est importante : le lecteur est passivement assis tandis qu’un acteur joue sur scène tous les gestes des performances présentées. Cette conférence peut-être considérée comme une exposition vivante." Guillaume Désanges Depuis 2004, la conférence a été présentée dans des institutions comme : Artists Space (New York), U-TURN (Copenhague), Centre Pompidou (Paris), De Appel (Amsterdam), Centre d’Art Santa Monica (Barcelone), Cooper Union (New York), WIELS (Bruxelles), Frankfurt Kunstverein (Francfort), Musée des Abattoirs (Toulouse), MAC-VAL (Paris), Le Magasin (Grenoble), FRAC PACA (Marseille), STUK (Louvain), Nam June PAi,k Center (Séoul), GAsworks (Londres) Ecole des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand, Ecole des Beaux-Arts de Lyon, Ecole des Beaux-Arts de Bordeaux), etc. 14 DANSE A LA MEDIATHEQUE ANDRE MALRAUX SAMEDI 22 MAI / 14.00 ET 17.00 PRESENTE PAR POLE SUD ET LES MEDIATHEQUES DE LA VILLE DE STRASBOURG / 6 INTERPRETES / FRANCE / DUREE 40' / GEORGES APPAIX CIE LA LISEUSE /////SEXTET MOUVEMENTE POUR SALLE DE LECTURE ///// Georges Appaix est de ces chorégraphes obstinés qui pièces après pièces déploie son imaginaire entre la danse et le mot. Incapable de choisir entre ces deux formes d’expression, il met en scène des univers métisses, où la langue et le geste cohabitent avec bonheur. Dans ce tout nouveau projet, il va encore plus loin dans sa quête en proposant la danse dans un espace de lecture. Tel un amoureux du livre, Georges Appaix a eu envie de perturber, brièvement, provisoirement, son espace de rêverie et de silence. Et si certains livres, certains lecteurs aussi, étaient tout à coup pris d’agitation, d’agitation sonore qui plus est ? Les spectateurs, assis aux tables d’une salle de lecture, vont assister à un phénomène inédit : six danseurs, acteurs, liseurs, un manipulateurs d’objets, un percussionniste, vont faire circuler un texte, une phrase, des mots et des livres, en passant d’un interprète à l’autre. Georges Appaix est décidément passé maître dans l’art de la variation thématique. Création 2010 durée : 30 à 40 minutes Conception et mise en scène de Georges Appaix Avec Georges Appaix, Séverine Bauvais, Jean-Paul Bourel, François Bouteau, François Combemorel (percussions), Jean-Pierre Larroche (machinerie, objets) Régie générale : Xavier Longo Costumes : Michèle Paldacci et Tristan Bezandry au Petit Atelier Coproduction : Compagnie La Liseuse, Scène Nationale de Mâcon, Marseille Provence 2013 Création 20 avril 2010 : à la bibliothèque de l’Alcazar à Marseille et 22 avril 2010 à la bibliothèque Départementale des Bouches du Rhône à Marseille en partenariat avec le théâtre de la Minoterie et Marseille Objectif Danse Diffusion au Festival Paris Quartier d’Eté 2010 (en cours). La Liseuse est une compagnie chorégraphique résidant à la Friche la Belle de Mai à Marseille. Elle est conventionnée par le Ministère de la Culture et de la Communication (DRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur), subventionnée par la Ville de Marseille, le Conseil Général des Bouches-du-Rhône et le Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur. REPERES BIOGRAPHIQUES Né en 1953 à Marseille, diplômé de l'Ecole Nationale Supérieure des Arts et Métiers, Georges Appaix suit en parallèle une formation de saxophoniste au Conservatoire d'Aix-en-Provence et les ateliers de danse contemporaine d’Odile Duboc. En 1984, il crée sa propre compagnie qu'il intitule La Liseuse, en raison de sa passion pour la littérature. En 1995, il inaugure les studios de La Liseuse à Marseille où il travaille depuis. Ses chorégraphies privilégient la langue (écrite, orale, voire chantée) comme moteur rythmique, où se mêlent humour et poésie. Les titres de ses spectacles depuis 1985 sont créés, normalement, par ordre alphabétique. WWW.LALISEUSE.ORG 15 Quatre danseurs, un scénographe et un musicien viennent troubler le silence et la quasi immobilité de la salle de lecture. Ils font entendre des textes, des polyphonies de textes aussi et se mettent en mouvement dans les allées de la salle au milieu des spectateurs assis. Ils font sortir des livres un peu de leur énergie pour la transcrire en mouvement et font entendre des musiques de mots. Parmi eux, autour d’eux, un dispositif de machinerie très légère qui fait apparaître, disparaître, chuter ou s’envoler quelques beaux livres débordant de liberté ! Le Silence de la Bibliothèque ?? C’est assez beau le silence de la bibliothèque, le recueillement moins le religieux ! La concentration... la pensée... la rêverie... Et si tout cela venait à être perturbé, brièvement, provisoirement, ça va de soi ? Si certains livres, certains lecteurs aussi étaient tout-à-coup pris d’agitation, d’agitation sonore qui plus est ? Nous sommes six dans l’espace de la salle de lecture, plus les spectateurs, assis aux tables. Six danseurs, acteurs, liseurs, diseurs ; diseurs et demi, comme disait l’autre ! Six dont un qui s’y entend pour mettre en mouvement des objets, en l’occurrence des livres, et un musicien, percussionniste, pour en faire entendre le son ! Du texte circule, ou bien un texte circule, un texte ou une phrase ou un mot, tout autour de la salle et passant d’un interprète à un autre. Changeant de forme aussi peut-être, d’une forme sonore à une forme écrite, d’une forme musicale à une forme plastique, du parler au chanter, d’un individu à un choeur. Sortant des livres ou de nos mémoires, une arborescence ; les choses s’appellent, s’induisent les unes les autres ; par des rapports de sens ou de son, de rythme ; Les livres nous emmènent, se mettent à avoir leur vie propre, si ce n’était pas déjà le cas. Des livres qui bougent comme d’eux mêmes, des livres enchantés !! Georges Appaix, novembre 2009 C’est un livre, ceci est un livre. C’est un livre à lire, A voir, livre à voir Ou à avoir. Livre ouvert à voir Ou à avoir ouvert, pour voir, Pour lire, pouvoir lire. C’est un bouquin Un bouquin Sorti par conséquent, pas forcément Mais fréquemment, De chez le bouquiniste, Un bouquiniste ! C’est une somme, un ouvrage, un recueil Une anthologie, toute une vie, Un livre de chevet A emporter sur l’île A déguster sur place, A dévorer, j’ai adoré ! Georges Appaix, mars 2009 Bon, alors là Bon, alors là, c’est Zola, en bas En haut, Hugo, Giono, Michaux, Rimbaud et Le Clezio. Aussi en haut, La Fontaine et Verlaine, Flaubert et Prévert, Quignard et Bachelard, Lucrece et Cervantes. Pichette et Beckett, Sur les tablettes. Mallarmé, là, posé. Proust, sur une longue étagère Sarraute, à lire, sans faute ! Séneque, c’est’l nec ! Shakespeare dans le théâtre, Spinoza, là Villon, Lautréamont, Simon, Bergson Bon ! Diderot, en haut De Luca, là Queneau, en haut Reda, là Ponge, Perec, Musil Monge, Purec, Pesil Mongec, Puril, Pese Megilpuperonsec…….. ……. Gertrud Stein ? Georges Appaix, mars 2009 16 EXTRAITS DE PRESSE, EN GENERAL MAIS EN PARTICULIER Il a le verbe chantant et le corps musical, cet humaniste sans fioriture, unique en son genre. L’alchimie des sons, des mots, des gestes et des pas est construite sur des rythmes et tempos convergents et divergents, avec une finesse légère qui produit une grande délectation. Sa désinvolture est trompeuse ; il faut tout percevoir en même temps : l’humour subtil, le comique de situation, l’ironie tendre mais non moins lucide, la poétique du quotidien, les éclairs de tristesse ou de révolte, les pieds de nez rieurs aux faux-semblants... C’est l’expression d’un regard sensible et philosophique sur notre monde, la perpétuation savoureuse et chaleureuse d’une tradition orale revivifiée en les corps. Nadine Raso Mais s’il a choisi de vivre et travailler à Marseille, c’est surtout dans les vagues du langage que Georges Appaix prend plaisir à naviguer. Cela débute par des propos encore flous, un peu vagues qui finissent pas s’insinuer au coeur du travail avant de peu à peu prendre corps et composer le spectacle. Car à chaque fois, Georges Appaix a “sa petite idée” qui s’éveille entre les objets et les choses, surtout dès lors qu’il se trouve en affinités. Affinités qui se sont développées au fil du temps avec des interprètes qu’il retrouve régulièrement depuis ses débuts... Irène Filiberti Léger comme toujours et comme toujours grave à la fois… L’air de ne pas y danser, il poursuit d’ailleurs avec un entêtement discret la même interrogation. Mais ce qui paraissait seulement voici dix ans un flirt souriant entre danse et texte, est devenu, au fil des spectacles, oeuvre portant réellement sens. Linguistes et philosophes pourraient en faire leur miel, car parfois la danse éclaire bien mieux que tous les traités du monde sur ce que le corps produit et sur tout ce qui lui échappe, mots, gestes, vrais et faux mouvements. Chantal Aubry, La Croix. Et l’on rit car le chorégraphe a une manière bien à lui de pointer les maladresses de corps, les maladies de la langue (du bégaiement à l’aphonie, du psittacisme au trou de mémoire). Danse, texte, rythme font partition commune, portée par une compagnie ludique. Les danseurs sont toujours déplacés, peu enclins à rejoindre les rangs d’une danse académique. Entre Duchamp et Oulipo, Georges Appaix poursuit sa réflexion sur une danse de proximité, sur l’intérêt général. Marie-Christine Vernay, Libération 17 DANSE A POLE SUD - PLATEAU SAMEDI 22 MAI / 20.30 / 4 INTERPRETES / SUISSE / DUREE 55' / GILLES JOBIN /////BLACK SWAN ///// Chorégraphe, co-directeur du Théâtre de l’Usine à Genève, Gilles Jobin affirme une écriture chorégraphique hors des cadres esthétiques établis. Précurseur d’une nouvelle génération d’artistes européens, il revisite et interroge sans cesse ses propres productions par des incursions dans le domaine des arts visuels et du "live art". Pour cette toute nouvelle création, il s’agit pour lui, non pas de construire ou d’inventer une histoire, ni d’illustrer une idée, mais de tirer un fil à partir d’une intuition et d’aller jusqu’au point d’exténuation d’un mouvement ou d’un imaginaire. Le sens : c’est le geste lui-même, et l’improbable qu’il fait surgir. A partir de ce postulat très ouvert, il nous offre une danse fluide, une succession de phrases dansées méticuleusement écrites, qui se déroulent sans fin. Une danse douce, nourrie des sentiments de celui qui la porte. Le chorégraphe donne l’impulsion, suggère un geste, introduit des objets, des peluches, et nous assistons à une troublante métamorphose du mouvement et des corps, formes humaines confondus aux formes animales. Une pièce qui "ose l’enfance" : ses étonnements, ses jeux et qui renoue avec le plaisir simple du mouvement libéré du discours. REPERES BIOGRAPHIQUES Gilles Jobin (1964) Vit et travaille à Genève Après un début de carrière comme interprète au sein de plusieurs compagnies helvétiques, Gilles Jobin prend en 1993 la co-direction du Théâtre de l’Usine à Genève. Entre 1995 et 1996 à Madrid, il fait ses débuts de chorégraphe avec une trilogie, série de solos qui portent sur l’identité : Bloody Mary, Middle Suisse et Only You. En 1997, il déménage à Londres avec sa compagne l’artiste espagnole La Ribot. En 1998, il crée le duo Macrocosm au Place Theater à Londres et devient chorégraphe résident à l’Arsenic à Lausanne et artiste associé d’Artsadmin à Londres. Gilles Jobin affirme alors une écriture chorégraphique hors des cadres esthétiques établis. Une écriture qu’il remet en question en permanence par des incursions dans les arts visuels et le live art. En 1999, il présente A+B=X au festival Montpellier Danse et crée Braindance qui sera présenté au Théâtre de la Ville de Paris la saison suivante. Son travail désormais plébiscité internationalement et la radicalité de sa démarche font de lui l’un des précurseurs d’une nouvelle génération de chorégraphes européens. Suivront les pièces The Moebius Strip (2001) présentée dans le monde entier et Under Construction créée à la Schaubuehne à Berlin en 2002. En 2003, il crée TWO-THOUSAND-AND-THREE pour les 22 danseurs du Ballet du Grand Théâtre de Genève, pièce qui « transcende classique et contemporain » (M.C. Vernay - Libération) et Delicado pour le Ballet Gulbenkian de Lisbonne en 2004. La même année, il s’installe avec sa famille à Genève. En 2005, il signe Steak House qui sera présenté dans toute l’Europe et au Brésil. En 2006, il devient artiste associé à Bonlieu Scène nationale à Annecy où il crée Double Deux pour 12 danseurs. En 2008, il produit Text To Speech qui se tourne vers de nouveaux enjeux comme l’information et les nouvelles technologies. Avec Black Swan, créée en 2009 et déjà acclamée partout dans le monde, Gilles Jobin ose l’enfance et l’inquiétante étrangeté de l’improbable. Outre ses propres productions, Gilles Jobin a fait de sa compagnie et des studios 44 où elle est basée un lieu pionnier pour la formation professionnelle du danseur, la reconnaissance de la danse contemporaine en Suisse et la stimulation des échanges internationaux à travers de nombreuses initiatives : entraînement quotidien du danseur, actions pédagogiques et de sensibilisation, workshops, résidence d’artistes, projets avec les pays du Sud. WWW.GILLESJOBIN.COM Chorégraphie : Gilles Jobin Assistante chorégraphie : Isabelle Rigat Danse : Susana Panadès Diaz, Hildur Ottarsdottir/Isabelle Rigat (cast2), Gilles Jobin, Gabor Varga Lumière : Daniel Demont Musique : Cristian Vogel Production Cie Gilles Jobin - Genève Coproduction Bonlieu Scène nationale, Annecy – Théâtre de la Ville, Paris - Dampfzentrale, Berne - Theater Chur Avec le soutien de La Loterie Romande, Pour-Cent Culturel Migros, Corodis Donation Zuger Kulturstiftung Landis & Gyr, Fondation Ernst Göhner Avec la collaboration de Beirut International Platform of Dance, Beyrouth - Les Rencontres Chorégraphiques de Carthage, Tunis – Dance Week Festival, Zagreb - Latitudes Contemporaines, Lille Gilles Jobin bénéficie d’une convention de soutien conjoint pour la période 2007-2009 de la Ville de Genève, de la République et Canton de Genève et de Pro Helvetia Gilles Jobin est artiste associé à Bonlieu Scène nationale, Annecy 18 ECRITS ET PRESSE La langue-geste des corps Par Sylviane Dupuis, écrit le 28 février 2009 pendant les répétitions J’ai essayé de me servir d’une langue-geste […] où la logique cède le pas au rythme même des images. C. F. Ramuz Si on commence à réfléchir, les jambes s’arrêtent. […] Il n’y a rien d’autre à faire que danser. Et danser du mieux qu’on peut. Haruki Murakami "Eviter ce qui est prévisible dans le vocabulaire de la danse comme dans les structures de composition" : ce postulat esthétique de Gilles Jobin, que chacune de ses créations vérifie en se démarquant fortement des précédentes et en incitant son public à "casser ses habitudes", on pourrait dire que Black Swan en fait son objet même ; à tout moment, sa nouvelle pièce étonne, surprend, bifurque dans une direction inattendue ; et paradoxalement, il se pourrait aussi qu’elle amorce, chez ce créateur en perpétuelle recherche, un regain d’intérêt pour l’écriture chorégraphique. Gilles Jobin, s’il est radicalement de son temps et ne fuit aucune des questions qui se sont posées à la danse au cours de ces dernières années, ne s’enferme dans rien (pas même dans ses propres "systèmes") et avance, interrogeant chaque fois un peu plus loin son matériau : le corps, et sa pratique ; mais aussi le monde réel, qui ne cesse de fluctuer, de s’entrechoquer, de se faire et de se défaire devant nous. Pour lui, la danse est une philosophie de l’existence en acte. Emprunté à Karl Popper, le titre de sa dernière création renvoie à l’improbable. Comme il suffit de l’émergence d’un seul cygne noir (ou de "l’impossible") au cœur de la série pour modifier notre définition du cygne et, par conséquent, notre approche rationnelle de la réalité, il suffit d’introduire de "l’inquiétante étrangeté" ou simplement un décalage au sein de l’habitude pour que notre regard en soit changé. C’est ce qui arrive à tout instant à l’enfant découvrant le monde : tout le surprend, le désoriente ; accroît ou modifie son expérience. Et c’est la force de l’art – où Baudelaire voyait l’enfance retrouvée à volonté – que de nous contraindre à ces déplacements qui ébranleront quelque chose dans nos catégories mentales, ou notre lecture du monde. Dans Black Swan, Gilles Jobin s’est justement donné pour mot d’ordre d’"oser l’enfance" : ses étonnements, ses jeux, que l’adulte retrouvera plus tard au-delà de l’innocence. Au cours de la première répétition à laquelle j’assiste, fin février, on voit coexister jouets en peluche, petits chevaux et marionnettes – merveilleux objets de réminiscence mais aussi troublants prolongements du corps humain qu’ils animalisent et soumettent aux métamorphoses : changé en tête de lapin à son extrémité, où commence et où finit le bras de la danseuse ? "Don’t play with the rabbit, just move it" indique Gilles Jobin ; parce que c’est à l’imagination du spectateur, ensuite, de s’emparer de la proposition pour "jouer" à son tour avec elle, et pour la prolonger… Le chorégraphe donne l’impulsion, suggère un geste, dicte une consigne, puis laisse faire les danseurs ; et soudain lance un jouet, puis un autre, dans la forme mouvante des corps entremêlés (comme on plonge un bâton dans la fourmilière) pour observer leur réaction. De l’aléatoire naît alors la troublante image de ces formes humaines confondues aux formes animales et roulant pêle mêle, comme rendues à l’indifférencié primordial… A l’opposé de ce chaos, le premier moment de la chorégraphie, très écrit, est une véritable épure : une femme seule, puis deux, déroulent sous nos yeux une calligraphie de gestes ininterrompue qui tantôt emprunte aux arabesques de la danse classique, tantôt suggère l’art du kabuki ou de la danse orientale, et tantôt se fragmente ou se brise pour mieux rejaillir. Puis survient un corps masculin – mais au lieu (comme on s’y attendrait) de porter la danseuse ou d’en devenir le partenaire, il se laisse manipuler par elle, devenu pur objet, ou marionnette, ou encore – enveloppé d’une couverture qu’on lui jette – caillou, rocher, montagne… Rappelant ces étranges pierres aux allures mouvantes qui paraissent flotter sur le gravier strié des jardins japonais, suspendues entre nature et culture, ou illusion. Comme, ailleurs, pour que s’accomplisse le poème, il s’agit pour Gilles Jobin, non de construire ou d’inventer une histoire, non d’illustrer une idée, mais de tirer un fil à partir d’une intuition et d’aller jusqu’au point d’exténuation d’un mouvement et d’un imaginaire, sans savoir à l’avance où cela le conduira ni ce que cela veut dire. Le sens : c’est le geste lui-même, et l’improbable qu’il fait surgir. La danse opaque de Black Swan Par Andréia Nhur* Black Swan paraît traiter d’un ensemble de sujets, révéler un ensemble de concepts et produire mille ressemblances. Par ailleurs, à rebours des convictions nées de l’apparence, le chorégraphe Gilles Jobin y absente la couleur. Rien n’interdit de lire dans le titre de l’oeuvre une référence au philosophe Karl Popper et à sa critique des processus d’induction. Pendant plusieurs années, l’existence de cygnes blancs dans l’Europe a en effet induit cette convention, cette règle générale : “tous les cygnes sont blancs”. Cependant, telle exploration en Australie révéla un jour l’existence de cygnes noirs. À la lumière de cet 19 exemple, Popper a défendu l’idée que les processus inductifs sont nécessairement limités, en ceci qu’il se trouvera toujours une possibilité future de défaire toute généralisation antérieure. Le fondement de l’oeuvre de Gilles Jobin se déploie dans l’énigmatique opacité d’une blanche transparence absorbée par le noir. Rompant avec ces illusionnismes qui font le lit des conclusions hâtives, Black Swan fait droit à l’imprévu, émancipé de toute “logique cohérente”, de tout récit linéaire. Les notions d’opacité et de transparence, provenues de la physique et appliquées à l’étude des signes, constituent ici autant de connexions permettant de penser ce qu’il en est du corps tel qu’il est mis en jeu. Il est de la transparence de mettre en évidence ce qui est dissimulé, et d’annuler sa propre matérialité. L’opacité, au contraire, attirant à elle l’attention sur sa propre matérialité, subit en quelque sorte sa propre évidence. Telle qu’elle est ici saisie, elle en vient à provoquer la perception par le regard - celui du public - l’incitant à ne pas chercher quelque idée cachée derrières une corporéité transparente. Avec la scène que construit Jobin, en effet, rien ne transparaît. Tout est au contraire livré à l’opacité et se voit soumis à de constantes mutations. Dans un premier temps, les accessoires scéniques - longues protubérances qui prolongent les bras des danseurs ; peluches nombreuses - semblent offrir la possibilité d’une lecture linéaire. Ainsi pourrions-nous penser que le concept se construit à partir d’une idée initiale qui s’acheminerait vers un futur attendu. Deux danseurs manipulent des lapins en peluche. Par cette action, cette manipulation, les lapins s’individualisent, se personnifient devant nous face à leurs manipulateurs transparents. C’est ainsi que Jobin en vient à défaire le postulat initial. Les protubérances qui prolongent les bras ne signifient ni ne révèlent rien. Elles ne sont là que pour créer ces prolongements qui médiatisent des corps s’assumant en tant que moyen, message, extension et compression de leurs propres parties. Les lapins et chevaux en peluche ne sont pas animés à des fins mimétiques par d’invisibles marionnettistes. Au contraire, l’immobilité et l’inactivité constitutives de la nature de ces jouets quelconques, de ces peluches, manifeste avec évidence que le discours produit par cette pièce se déploie à partir de l’idée d’un corps conçu comme chair qui, du fait de son mouvement, ne se prête pas à devenir un mécanisme générateur d’illusions. Par un jeu de dialogue entre divers registres de perception, les décisions du corps extérieur - celui du public - sont alors partagées avec celles des corps des danseurs. C’est qu’au plan de la perception, les décisions d’un corps, quel qu’il soit, ne sont jamais prévisibles ni transparentes. Elles sont au contraire toujours matérialisées. Et fluides. Ainsi, dans Black Swan, la fluidité est l’objet d’une danse qui s’assume en tant que matière opaque s’écoulant dans le temps. Un mouvement conduit à un autre, ouvrant des pistes, engendrant des précédents, sans jamais s’enfermer dans des règles générales. À tel moment, les chevaux en peluche se font jouets, douces poignées de poils synthétiques. À tel autre, ils se font éléments autonomes d’une foule. Et lorsque l’oeuvre touche à sa fin, c’est avec des lumières clignotantes qui se reflètent sur les taches blanches des petits chevaux bruns disséminés sur la scène. Lumière, ombre ; lumière, ombre. Opacité, transparence... D’innombrables associations peuvent alors intervenir. Par cette pluralité de rapports que la pièce nous propose, il devient impossible de boucler son sens sur quelque généralité que ce soit. * Andréia Nhur est danseuse, actrice et doctorante dans le cadre du cursus de communication et de sémiotique de l’Université Pontificale Catholique de São Paulo (PUC-SP). Gilles Jobin volatile Un curieux "Cygne noir" du Suisse à Annecy. Quand il s’agit de danse, un cygne noir fait directement référence à la méchante Odile du blanc Lac. A propos de géographie, on pense tout de suite aux volatiles du lac d’Annecy. Artiste associé à Bonlieu, scène nationale de la ville haut-savoyarde, le chorégraphe suisse Gilles Jobin ne renvoie pourtant ni à l’une, ni à l’autre de ces références. Son Black Swan emprunte au philosophe contemporain Karl Popper son image d’un cygne noir, symbole de l’événement dérogatoire qui déstabilise tout esprit de système. Hors système, donc, sans illustrer une idée, ni raconter une histoire, Jobin se laisse guider par le geste qui est le sens luimême. Cela donne une pièce des plus curieuses, avec des directions mais sans objectif. Une première partie pourrait rappeler l’écriture des postmodernes américains, comme Merce Cunningham. De la couleur pour les danseuses et du noir pour les danseurs, avec le parti pris d’individualiser les interprètes. Les formes sont claires, les mouvements doux, coulants, tournoyants. Les entrées sont particulièrement soignées et le tout apaise. Une seconde partie donne dans la peluche et la manipulation sans que l’on sache bien pourquoi. Gilles Jobin retrouve peutêtre les terrains vierges de l’enfance et les jeux des petits chevaux. Les lapins frétillants sont particulièrement réussis, interprétés par des danseurs dévergondés, dont le chorégraphe. Les chevaux manipulés à distance par de grandes perches finiront par tomber. Les peluches seront alors enchevêtrées aux corps des danseurs pour de sensuelles roulades. En dehors de tout schéma, ce Black Swan n’a peut-être pas encore toute son envergure, mais il est sûr que ses plumes sont chatouilleuses. On le retrouvera en mai, à Annecy, dans le cadre du premier festival transfrontalier proposé par Bonlieu, l’ADC et le théâtre Saint-Gervais de Genève. Et en mars 2010 à Paris, au Théâtre de la Ville. Marie-Christine Vernay, le 23 avril 2009 20 DANSE / PERFORMANCE A POLE SUD - STUDIO SAMEDI 22 MAI / 22.30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE / TRIO / SUISSE / ESPAGNE / DUREE 30' + FILM 30' / LA RIBOT /////LLAMAME MARIACHI ///// Chorégraphe et artiste visuelle, Maria La Ribot a contribué au développement de la nouvelle danse en Espagne dès le milieu des années 80. En 1991, sous le nom de La Ribot, l’artiste madrilène engage son travail dans une nouvelle voie, en créant des œuvres scéniques au statut mouvant, entre spectacle, performance et vidéo. Humour et excentricité caractérisent son propos qui couvre un large champ artistique. La Ribot expose et interroge le regard à partir du corps, de l’espace, de l’image et du mouvement. Dynamiteuse des conventions chorégraphiques, elle poursuit avec cette pièce sa recherche sur l’interférence entre les arts vivants et visuels et met en jeu notre propre perception de l’espace et du temps. Llamame Mariachi réunit, dans un premier temps, trois interprètes qui interagissent autour d’une large table recouverte d’objets et de livres. Elles provoquent notre regard par des actions décalées et répétitives dans une esthétique un peu sixties, proche du dadaïsme. Dans la seconde partie, un film, retranscrit, en un seul long plan de séquence, l’expérience de la danse du point de vue de l’interprète. La vidéo, utilisée comme un prolongement du corps s’attarde sur des détails du parcours tout en filmant dans un flux continu les différentes perspectives qui se multiplient jusqu’au vertige. WWW.LARIBOT.COM Direction La Ribot Interprétation Marie-Caroline Hominal, La Ribot, Delphine Rosay Création lumière Daniel Demont Technicien lumière et vidéo Sandrine Faure Technicien son David Scrufari mariachi 17 film Réalisation, chorégraphie et scénographie La Ribot Camerawomen Marie-Caroline Hominal, Delphine Rosay, La Ribot Directeur de la photographie Daniel Demont Musique atom™ Supervision musicale et mixage son Clive Jenkins Post-production Sylvie Rodriguez Etalonnage Massimiliano Simbula Techniciens lumière, son et vidéo Stéphanie Rochat, David Scrufari Construction décors Victor Roy Photographies de chantiers en Espagne Miguel de Guzmán Assistants de plateau Pablo Jobin, Laure Fauser Fauconnerie Les Aigles du Léman, Jacques-Olivier Travers et Babette Tournage Salle Santa Caecilia – La Comédie de Genève – juin/juillet 2009 Production La Ribot – Genève Coproduction La Comédie de Genève - Centre dramatique (Genève), La Bâtie - Festival de Genève (Genève), Festival d’Automne à Paris, Les Spectacles vivants - Centre Pompidou (Paris), Fundação Caixa Geral de Depósitos – Culturgest (Lisbonne), Réseau Open Latitudes Avec le soutien de la Ville de Genève, de la République et canton de Genève, de Pro Helvetia - Fondation suisse pour la culture, du Pour-cent culturel Migros, de la Corodis et de la Loterie Romande. Ainsi que de la Fondation Leenaards et de la Fondation Ernst Göhner Avec le concours du Fresnoy, Studio national des arts contemporains. Remerciements Luc Peter, Gilles Jobin, Edwin Culp, Mélanie Rouquier, Fafa, Olivier Devin, Florent Leduc, Pascale Pronnier, Anne et Nicola Marangon, Emilie Nana, Claude Bourgeois, Heleen Treichler, Lorena Ribera, Family Déco, Théâtre de Carouge, Oskar Gomez-Mata. 21 ECRIT Llámame Mariachi (2009) Par José A. Sánchez Directeur du département d’Histoire de l’art à l’Université de Castilla-La Mancha et directeur de ARTEA. Madrid, 30 novembre 2009. Traduction : Marine Magnin. Une multitude conflue vers le Centre Georges Pompidou à Paris. Pendant toute la journée, citadins et étrangers ont fait la queue sur la place, face aux portes de verre de la grande structure, et plus tard, ont tourbillonné dans l’immense foyer, indécis devant l’offre multiple, ou cherchant simplement la meilleure pour un long samedi de loisir. C’est un jour pour partager la culture publique. Et le Nouveau Festival est proposé comme un cadre ajouté, un cadre perméable pour la cohabitation du permanent et de l’éphémère, de l’artistique et du non artistique, du réflexif et du ludique, du populaire et du sacré. Dans l’espace réservé à l’exposition de Vidéo Danse est projetée La Rencontre, un documentaire sur la collaboration entre Mathilde Monnier et Seydou Boro en 2000. Un peu au-delà, dans la Grande Salle, llámame mariachi de La Ribot est annoncé. Le public occupe peu à peu les sièges, ici aussi une multitude se réunit. Sur la scène dénudée, une table couverte de livres et quelques objets : un ours en peluche, une tarte, une trompette… Trois chaises derrière elle. Et au fond, un écran de cinéma, un peu laid. L’espace a davantage l’aspect d’une salle de conférence que d’un vrai théâtre. La lumière s’obscurcit et un film est projeté. Il s’agit d’un plan séquence de plus de vingt minutes tourné successivement par les trois interprètes qui entreront en scène plus tard. Ce que l’on voit est l’image d’un espace intérieur, un vieux théâtre. La caméra corps nous montre l’image qui résulte de son mouvement, de ses déplacements, d’une attention qui n’est pas dirigée par l’oeil sinon plutôt par le ventre, auquel se prête la main qui dirige la caméra. A certaines occasions, celle-ci recueille des fragments du corps qui filme : un pied qui marque la marche, la main gauche qui indique la direction, une jambe, partie du tronc… Le changement de main de la caméra est un changement de corps, visible aux pieds, aux vêtements, mais surtout visible au corps, à la calligraphie du corps, à son rythme, à son poids, à son attention… Le première caméra est légère, rapide, agile. La seconde est un peu plus posée, sûre, attentive. La troisième est subtile, élégante et adroite. Ce sont trois mouvements d’une composition unique, quasiment parfaite, étonnante, qui trouble le regard du public sans le plonger dans un chaos, mais qui décompose de manière effective sa notion d’espace, qui l’oblige à danser imaginairement avec les corps invisibles et à pénétrer dans le mécanisme de construction. L’espace s’est relativisé, en tant qu’observateurs du film, nous sommes incapables de nous y orienter et nous nous voyons obligés de faire confiance à ce corps qui nous guide et qui, avec son évolution apparemment capricieuse, nous transporte d’une salle à une autre, d’un coin à un autre, mais s’attarde aussi sur des détails, rentre dans des moniteurs ou des photographies et des plans architectoniques. L’espace euclidien est seulement visible sur ces images secondaires : les photographies, les moniteurs camouflés qui exhibent de vieux films édités à souhait, et moins sur les photographies d’architecture car elles sont montrées dans des plans obliques, toujours par l’intermédiaire de la main qui les caresse, qui les parcourt. Les architectures réelles surgissent d’autres objets : des cartons empilés, des grilles de stockage…Les lignes dessinées ou formées peuvent conditionner le déplacement de la caméra et un signe ou un objet la fixer momentanément. L’expérience de l’espace est contradictoire à l’architectonique : le corps, le mouvement vainc pour une fois la fixation que tout architecture impose. Mais le corps attaque aussi la narration du cinéma et déploie sa propre logique, ou plutôt son illogique que de laquelle résulte, paradoxalement, une composition cohérente, implacable, presque nécessaire. Des fragments d’anciens films marquent les transitions entre les trois caméras : il s’agit d’un théâtre dans un cinéma dans un théâtre dans un cinéma. Et les premières références sont celles de la théâtralité, mais soumises à un traitement artificiel, cinématographique. Le déplacement de notre regard de spectateur au regard du ventre modifie la gravité associée à la construction habituelle de l’espace. En modifiant la sensation de gravité, nous observons l’importance qu’elle a et ce qu’il y a d’artificiel dans une construction visuelle de l’espace : l’artificiel de la perspective Renaissance et l’artificiel de l’absolutisation de la vue au détriment du pied, du dos, du ventre, de la main. La main, quasiment invisible dans le tournage du film, constitue une des clés de ce travail. "La vraie condition de l’homme – assure Godard – c’est de penser avec ses mains". 22 Traditionnellement, le cinéma a prétendu effacer de ses expositions les marques de l’intervention manuelle dans son processus de la même manière que l’appareil spectaculaire de la danse prétendait effacer les marques de la gravité corporelle en inscrivant le corps matériel et capricieux dans un espace géométrisé et artificiellement vide. Il y a des échos du montage godardien dans ces travellings brusques réalisés par les danseuses-manipulatrices qui nous font passer sans transitions d’une pièce à une affiche, d’un pied à un édifice, d’un film à une ligne, dans la transition de la fiction volée à la fiction construite, du graphisme au corps, du mouvement à la parole. Dans Eloge de la main Henri Focillon affirme : "L’art se fait avec les mains. Elles sont l’instrument de la création, mais d’abord l’organe de la connaissance". Dans la texture du "collage" ou des "papiers collés" du cinéma godardien, la main est rendue visible de la même manière que dans le film réalisé par les interprètes-manipulatrices de llámame mariachi, à la différence près que dans ce cas-là la main n’est pas libre, la main est collée à un corps, et même forcée à ne pas se distancier d’un corps qui est la condition de la visibilité et jamais l’objet de la visibilité, mais qui est seulement montré fragmentairement : dans des cadrages partiels de lui-même ou à travers des vitres (miroirs, loupe, aquarium). En reprenant Focillon, Païni (dans son livre Le temps exposé) suggère que de la même façon que le "montage est un des outils décisifs pour sculpter le sentiment de la durée", pour convertir le temps en matière, le ralenti produit instantanément des "sensations malléables du réel" ; le ralenti serait le procédé utilisé par les réalisateurs cinématographiques pour produire un sentiment de plasticité : il permet d’imaginer les mains de l’artiste et constitue en ce sens une aberration. Malgré les multiples échanges et coïncidences qui se sont produits tout au long de l’histoire entre le cinéma et le théâtre, l’espace-temps des deux est absolument divers. Dans un exercice de simplification, on pourrait considérer que le cinéma est dans le temps, alors que le théâtre est dans l’espace. L’espace de l’écran n’est pas pertinent pour la pratique cinématographique : ses espaces sont toujours ceux du temps, et le temps se construit par l’intermédiaire du montage, en soumettant la vision à une multiplicité de perspectives seulement possibles dans une structure temporelle. Pour le théâtre, par contre, l’espace de la scène (et ce quelle que soit la scène) est décisif et conditionne un temps présent qui peut seulement être altéré ou mobilisé par un montage intérieur qui ressemble beaucoup plus au caractère d’un plan séquence qu’à un montage par coupe, alternance et fondu ; l’auteur scénique ne peut pas multiplier les perspectives ni les espaces car ces derniers sont la propriété des spectateurs et c’est seulement en changeant les spectateurs de place et en les faisant parler entre eux qu’il pourrait aussi mobiliser le temps. Dans Llámame Mariachi, deux aberrations se produisent donc. La première est cinématographique, et se réfère à l’usage du plan séquence non dirigé par la vision mais par le ventre, produisant une perception et compréhension altérée de l’espace. La seconde est scénique, conséquence du mouvement ralenti des interprètes, d’un "ralenti" qui rend visible la main de l’auteur, mais pas sur le support cinématographique sinon sur les corps mêmes des interprètes : elles se manipulent elles-mêmes comme si elles étaient des objets. En faisant ceci, elles défient le présent propre au théâtral et inscrivent dans leurs actions une temporalité différente de celles des spectateurs. Il ne s’agit pas d’un "ralenti" rituel, ni perceptif, il ne s’agit pas non plus d’augmenter la conscience : il s’agit d’altérer la temporalité du spectateur et de l’obliger à avancer et à reculer à la recherche d’une action qui (et c’est là la surprise) échappe aux mains du spectateur avec une plus grande facilité que si elle prenait place dans un temps "quotidien". Pour effacer les traces de la main, le cinéma utilisait le montage. Pour effacer les traces de la gravité, la danse utilisait la vitesse. Mais comment un corps peut-il sauter et voler avec une caméra lente ? Non, ces corps ne peuvent plus voler : ces danseuses ont définitivement désappris leur fonction sur scène. Pour que ce soit clair, à peine entrée sur scène, la première des interprètes tombe absurdement de sa chaise, interrompant le flux gracieux des autres et affirmant ainsi un des traits de style de La Ribot : sa chorégraphie de la chute. Cependant, le mouvement ralenti des interprètes pourrait rappeler l’apesanteur réelle, en rien artificielle, des voyageurs spatiaux et de ceux qui ont eu accès aux chambres de gravité zéro. Ceux-ci sont les seuls qui ont expérimenté de manière effective un corps en absence de gravité. Alors peut-être que l’absence de gravité n’a rien à voir avec la rapidité nécessaire pour la feindre, mais a à voir avec la lenteur que le corps expérimente. Le corps en apesanteur n’est pas léger, mais très lourd ! Il peut voler sans impulsion mais il lui coûte beaucoup d’obéir aux ordre de mouvement qu’il se dicte lui-même ! Ces corps en apesanteur et lents habitent un théâtre aussi irréel que l’espace découvert par les corps soumis à la gravité et légers qui manipulaient la caméra dans la première partie de la pièce. Et ils se situent de plus dans un espace abstrait, dans lequel flottent les livres, les mots et les objets, de la même façon que semblaient flotter les murs, les moniteurs et les jambes dans un espace privé aux références rendues statiques avec l’effet du film réalisé en mouvement. Le théâtre abandonne sa place du présent physique et se déplace vers un non-lieu de références textuelles. C’est comme si les paragraphes flottaient et que les interprètes s’en emparaient brièvement avant de s’occuper d’une trompette qui flotte également ou d’une tarte, qui, dans sa glisse, finit, cependant, par tomber (N’étions-nous pas restés sur le fait que la gravité avait disparu ?). Et ainsi la haute culture dérive vers la salle de bain, les livres d’aide personnelle sont posés sur la table de l’académique, l’histoire de la danse se lit dans la cuisine et les gâteaux cherchent le lieu de paroles écrites par les grands masturbateurs. Cette centrifugation de la culture, ce ludique Auto de fe dans lequel les trois interprètes semblent se venger du personnage misogyne de Une tête sans monde et de Un Monde sans tête en substituant l’angoisse par la désorientation et le feu par l’apesanteur. Dans quelle direction s’inscrit la digitalisation féroce de la culture ? Nos corps y sont-ils préparés ? Le corps de Peter Kein ne l’était pas, puisque il n’a pas reconnu en lui le corps des autres. Les interprètes de Llámame Mariachi pourraient être considérées comme les exploratrices d’une nouvelle corporalité qui n’est plus conditionnée par la relativisation physique de l’espace temps, mais par la distorsion que les corps-foule provoquent dans notre conscience du présent. Les théâtres se retournent, leurs murs s’affinent et se transforment en bristol ; les bibliothèques s’ouvrent, les rayons se désintègrent et les livres s’étendent dans l’espace ouvert ; les musées, stupéfaits, implosent, et tout l’art pourrait arriver à être concentré dans un grain de café. 23 ENTRETIEN AVEC MARIA LA RIBOT Paris Art Par Smaranda Olcèse-Trifan, le 02 déc. 2009 Avec Llamame mariachi, La Ribot approfondit sa réflexion sur le mouvement par le biais de la vidéo. Dans la lignée des Pièces Distinguées, la chorégraphe espagnole provoque les genres et expérimente de nouvelles formes, dans une versatilité intarissable, source renouvelée de création. ENTRE LA PERFORMANCE, LA DANSE, LES ARTS VISUELS, COMMENT VOUS SITUEZ-VOUS DANS LE CHAMP ARTISTIQUE ? Llamame mariachi est un projet intimement lié à la danse. Pour moi, la vidéo, c'est une vision de l'espace et du temps et elle m'intéresse dans son rapport à la danse, au corps, au mouvement - la vidéo comme vision du corps au milieu des choses. Llamame mariachi parle de notre perception dans le mouvement. J'ai déjà utilisé plusieurs fois ce type de caméra à la main. La dernière de mes Pièces Distinguées était déjà une pièce filmée. Je maniais la caméra selon un principe similaire. Paamb tomaquet (Tartine Catalane) partait d'une recette de cuisine et le rôle de la musique était très important. Dans cette vidéo il y avait un rapport (bien sûr) à la danse et au corps de la danse, mais je n'étais pas encore assez mélodique - je ne veux pas dire que la danse doit être mélodique tout le temps, mais dans ces recherches par rapport à la vidéo et par rapport à la perception du corps, la mélodie est nécessaire. Par la suite, en 2003, 2005 et 2008, j'ai passé la caméra à Gilles Jobin, Olga Mesa et Cristina Hoyos et j'ai fait plusieurs essais. J'ai beaucoup pratiqué la "vision" de cette caméra, mais Llamame mariachi est le plus complexe, le plus ambitieux de tous ces projets. LES PIECES DISTINGUEES AURAIENT DONC ETE A L'ORIGINE DE CETTE IDEE D'INTEGRER LA CAMERA A LA DANSE ? Les 34 Pièces Distinguées font partie d'un projet global qui continue encore aujourd'hui. L'année prochaine je commence une nouvelle série avec la Pièce n° 35… Les thèmes et la forme de chaque série évoluent dans la durée. Avec Pa amb tomaquet et l'utilisation de la vidéo, j'ai ouvert de nouvelles possibilités de travail, expérimenté une autre façon de voir la danse, par le biais de cette petite caméra portative qui est complètement intentionnelle, pas du tout accidentelle. Elle n'est pas fixée au corps, mais manipulée, elle suit complètement la vision du corps. Elle a un regard. QUEL A ETE LE PROTOCOLE D'ECRITURE DE LLAMAME MARIACHI ? C'est la musique qui a structuré tout le plan séquence. Le musicien, atom™ a mis des pistes sonores à ma disposition et j'ai organisé les morceaux comme j'ai voulu. J'ai beaucoup coupé à l'intérieur des chansons, pour éviter l'effet collage, et j'ai composé cette bande son qui s'est organisée selon une structure, par systèmes. En même temps, il fallait travailler l'espace. La Comédie de Genève a mis à ma disposition, pendant deux mois, un théâtre que je connaissais bien pour y avoir créé Gustavia, avec Mathilde Monnier en 2008. UN ESPACE QUE VOUS AVEZ RECONSTRUIT, PERSONNALISE… J'ai utilisé les panneaux et châssis qui s'y trouvaient pour donner des couleurs à l'espace et, finalement, j'ai obtenu quelque chose de vivant et de rythmique. Dans ce travail avec la caméra, j'avais besoin de contraste, j'avais besoin de placer les corps dans un décor formel, sur un fond plastique. Mais avant de pouvoir rentrer dans l'espace proprement dit, il y a eu tout un travail de construction mentale à partir d'une maquette. J'ai imaginé comment rythmer cet espace, je l'ai pensé en termes de plans horizontaux, verticaux, puis en termes de trajectoires et de déplacements… Parallèlement à ça, dans mon petit studio, j'ai commencé avec Marie-Caroline et Delphine à faire des exercices pour qu'elles comprennent comment manipuler cette caméra, de manière physique, avec l'intention de l'inscrire dans les mouvements du corps, non pas comme objet de saisie accidentelle et naïve, mais comme regard. Une fois dans les lieux, il fallait tracer un parcours pour Marie, un autre pour Delphine, un parcours pour moi, en suivant la musique. Des détails, des objets plus petits et très personnels ont commencé à intégrer le décor. Autant de sources qui puisent dans la mémoire, le désir et le rêve. C'est la partie la plus sensuelle, onirique, la partie la plus émotionnelle de tout le travail. COMMENT S'EST MIS EN PLACE LE TRAVAIL AVEC LA CAMERA ? VOUS AVEZ FAIT DE NOMBREUSES PRISES ? Dans Llamame mariachi l'espace est très construit et le corps, un medium pour regarder et concevoir cet espace. Le jeu se complexifie par rapport à mes vidéos plus anciennes. Ce sont les mêmes corps qui dansent et qui regardent. Il y a beaucoup plus de place pour le regard. Il y a une histoire liée aux objets, aux photos. Cela pourrait invoquer la mémoire. C'est une pensée plus qu'un regard. La personne qui tient la caméra fait la séquence, on la regarde ensemble, je la dirige et petit à petit on construit le plan et la danse. On enregistre plusieurs fois. La vidéo nous permet de travailler de cette manière. 24 EN MEME TEMPS VOUS AVEZ UN RAPPORT TRES DIRECT A LA TECHNOLOGIE : VOUS TRAVAILLEZ TOUJOURS AVEC DES PETITES CAMERAS DV ? C'est vrai. La technologie peut être insolite. Je dois domestiquer les choses pour pouvoir les manipuler. La petite caméra, la handycam, est finalement un objet domestique et c'est exactement ce dont j'ai besoin. LA SECONDE PARTIE DE LLAMAME MARIACHI FAIT PENSER AUX INTERVENTIONS DES AVANT-GARDES, AU SURREALISME, AU LETTRISME… DEFINISSEZ-VOUS PAR RAPPORT A CES MOUVEMENTS, QUELS SONT VOS REPERES ? COMMENT VOUS J'ai essayé de construire cette seconde partie de la même façon que le film, mais le travail avec le texte donne un résultat très différent, plus proche du dadaïsme, plus sixties aussi. D'un côté, il y a la technologie, de l'autre, il y a la présence, la parole, le corps. Il y a cette intention de ne pas entrer dans une linéarité. La relation entre les deux parties n'est pas évidente, car j'essaie de les séparer le plus radicalement possible. L'avantage et le désavantage d'une chose comme le film, c'est qu'il est un objet fini et autonome, à un moment donné il existe. La seconde partie de la pièce, quant à elle, change, me pose plein de questions, je ne la comprends jamais assez pour pouvoir la considérer comme définitive. Le film est beaucoup plus affirmé, c'est la conséquence d'une recherche de 10 ans sur le corps dans son rapport à la caméra. La seconde partie vient de se faire. C'est la première fois que je prends un texte et que j'essaie d'écrire. C'est quelque chose de tout nouveau pour moi. Je la laisse encore un peu Dada, très brute. DANS LLAMAME MARIACHI LA VIDEO OCCUPE LA SCENE PENDANT A LA SCENE ? 25 MINUTES. COMMENT S'EST OPERE CE BASCULEMENT DANS LE RAPPORT AU PUBLIC ET Je suis très versatile, j'explore différents médiums, il y a des choses que je peux trouver dans une situation et pas dans une autre, alors je cherche. Pour parler de la danse, de la manière dont je la comprends, la façon la plus juste que j'ai trouvée, c'est la caméra à la main. Llamame mariachi est un projet de danse. C'est un film, mais pour moi, la danse y est plus présente que jamais ! Je suis versatile, je dois changer les médiums, et donc la relation au public, pour aller au bout de mes recherches. JUSTEMENT, IL EST INTERESSANT DE SUIVRE L'EVOLUTION DE VOS RAPPORTS AVEC LE PUBLIC, DEPUIS LE STRIPTEASE A L'ORIGINE DES PIECES DISTINGUEES... Si on regarde les Pièces Distinguées de la première jusqu'à la 34e, selon leur ordre de création - qui n'est pas celui des séries, ni celui de Panoramix - on comprend parfaitement l'évolution. La première pièce est très théâtrale, très Dada, pourrait-on dire, et les suivantes évoluent vers quelque chose qui relève davantage de l'installation, qui parle du "live" et de la relation au spectateur. Dans les premières pièces par exemple, le corps est nu, mais caché. Il entre en composition avec d'autres choses. Dans la dernière série, le corps est complètement visible, participatif, vulnérable, ouvert d'une certaine façon, très perméable. LE PUBLIC EST AUSSI DAVANTAGE PRESENT ET D'UNE CERTAINE MANIERE IL FAIT PARTIE DU DISPOSITIF... Absolument. La relation au corps ne se situe plus dans la représentation, elle est dans l'idée de présence. Le public appartient nécessairement à cette présentation des choses. Les premières Pièces Distinguées sont beaucoup plus dans la séduction, la représentation du corps féminin. Les pièces suivantes évoluent vers quelque chose de beaucoup plus plastique. Je commence maintenant une nouvelle série de pièces et je voudrais refaire toute cette évolution en sens inverse, aller de l'espace et de l'art visuel au théâtre. V O U S A I M E Z B R O U I L L E R L E S P I S T E S, D E J O U E R C E T O R D R E C H R O N O L O G I Q U E, AUSSI BIEN DANS LE F I L M, TREINTAYCUATROPIECESDISTINGUEES&ONESTRIPTEASE, QUE DANS P ANORAMIX, PERFORMANCE REGROUPANT L'ENSEMBLE DES P IECES D ISTINGUEES, PRESENTEE POUR LA PREMIERE FOIS A LA TATE MODERN A LONDRES. Il ne s'agit pas de brouiller les pistes. C'est vraiment essayer de comprendre le monde et les choses telles qu'elles me semblent être. Cela me permet de sortir de la linéarité, d'aller vers quelque chose de tridimensionnel. Les Pièces Distinguées parlent de ça. C'est la complexité du projet lui-même : il y a certes la chronologie, mais si j'assemble les séries, elles vont se parler, s'intercaler les unes dans les autres. Pour le montage du film, je ne pouvais pas suivre l'ordre de Panoramix, qui est un ordre "live". Il fallait que je trouve l'ordre juste, adapté. Dès que je fais quelque chose avec les Pièces Distinguées, une réflexion se met en place et me conduit vers une organisation différente. Il s'est passé la même chose pour Despliegue, un plan séquence de 45 minutes, où, caméra à la main, je décompose complètement les Pièces Distinguées, des éléments de décor, et je les assemble de manière assez chaotique. C'est un chaos et en même temps ça prend une autre dimension. Au départ, je voulais appeler Despliegue la 35e Pièce Distinguée. Mais j'ai compris que les Pièces Distinguées devaient être "live", alors j'ai arrêté la série à la 34e pièce, avec Pa amb tomaquet. V OUS VOUS ETES TOUJOURS IMPLIQUEE DANS DES PROJETS DE RECHERCHE, QUE CE SOIT A M ADRID AVEC L'ASSOCIATION UVI-LA INESPERADA, A LONDRES DANS LE CADRE D'ARTSADMIN OU A GENEVE EN TANT QU'ENSEIGNANTE A L'ECOLE D'ART ET DE DESIGN… La recherche m'intéresse, mais je la préfère toujours intégrée au travail artistique. Il y a des projets annexes à ma pratique qui sont également nécessaires et qui doivent être faits. Par exemple cette programmation à Madrid où j'ai pu montrer la danse contemporaine qui m'intéresse, et qui se voyait très peu et très mal. J'ai aussi été invitée à intégrer l'école des Beaux-Arts de Genève, lors de la mise en place d'un département dédié à l'art performatif. Je pense que la danse et les arts vivants doivent absolument trouver une place dans l'université et dans les écoles d'art, surtout d'arts visuels. Ce sont des projets plus politiques et je trouve nécessaire de m'y engager. 25 PERFORMANCE / UNE JOURNEE PARTICULIERE A SELESTAT DIMANCHE 23 MAI / DE 12H15 A 17H30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE / DUO / ALLEMAGNE / DUREE 30' / PRINZ GHOLAM /////EKOGPMCFAeD ///// Le duo Prinz Gholam travaille à partir d’un geste d’appropriation, situant son œuvre entre peinture et photographie, image et performance. La recherche scientifique montre combien nombre d’œuvres d’art se construisent par emprunt, citation ou reprise d’éléments d’autres œuvres. Prinz Gholam réinvestissent ainsi dans l’instantané de la photographie ou dans le présent de la performance les gestes, poses et expressions de la peinture classique. Dégagées de leurs décors, costumes et signes de leur époque, les figures se réincarnent en objets plastiques, en corps en tension dans l’espace. Soumises au régime de l’immobilité et de la gravité, elles déconstruisent la rhétorique picturale et les règles de composition, au profit d’une expérience sensible inattendue. EKOGPMCFAeD joue de manière explicite avec l’espace. A partir de poses empruntées au langage allégorique de la danse classique, c’est un dialogue de la lenteur entre le corps et l’espace, par l’intermédiaire d’une série d’objets à peine visibles, à la fois objets du regard en même temps que points d’attraction des corps en mouvement. Un espace immatériel et presque méditatif s’invente dans une tension à la fois physique, émotionnelle et mentale. 26 PERFORMANCE / UNE JOURNEE PARTICULIERE A SELESTAT DIMANCHE 23 MAI / DE 12H15 A 17H30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE / SOLO / BELGIQUE / DUREE 35' / MIET WARLOP /////PROPOSITION 1 : REANIMATION ///// Scénographe, plasticienne, spécialiste en images 3D, cette jeune artiste flamande reconstitue sous nos yeux un rituel étonnant. Loin de toute technologie, avec quelques vêtements et des objets usuels, nous assistons à la reconstitution lente d’une scène de crime. Grâce à une série de manipulations minutieuses, les protagonistes de chiffons se transforment en personnages en chair et en os qui se laissent emporter par leurs émotions. Quelques ajustements subtils suffisent à pousser progressivement la tension à son paroxysme. Tout en travaillant lentement, à vue, sans éclairage, avec uniquement des objets qu’elle habille ou déshabille avec une étonnante tranquillité, Miet Warlop parvient à créer un univers à la fois inquiétant et empreint d’une grande douceur, un petit théâtre sans parole. Cette "ré-animation" qui joue sur la perception ouvre aux spectateurs des perspectives imaginaires insoupçonnées : ici, chacun est invité "à jouer" et à développer ses constructions mentales. (…) Je pars toujours de l’espace vide, avec quelques objets que je commence à changer de place. Je les manipule de façon très précise (…) C’est un peu comme si je dessinais : les spectateurs ne voient que les gestes et ensuite le dessin prend forme. Je m’intéresse à la façon d’animer l’inanimé. Les objets sont fatigués, "travaillent"… On peut construire des histoires, des parcours avec des éléments très simples, des objets très usuels.(…) Miet Warlop REPERES BIOGRAPHIQUES En 2003, Miet Warlop (°1978) décroche un diplôme de 3D/Multimedia (option performance et scénographie) à l’Académie de Gand. Son travail de fin d’études Huilend Hert, Aangeschoten Wild lui vaut de remporter le prix du jeune théâtre au festival Theater aan Zee à Ostende. Cette reconnaissance lui permet en 2005 de monter, avec le soutien du centre d’art Vooruit et de Villanella, sa deuxième production intitulée Sportband, Afgetrainde Klanken. La même année, elle a assure la scénographie de spectacles de Dominique Hoste, Pieter Genard et Raven Ruëll (Caligula, Théâtre Antigone). En 2006 et 2007, elle adhère à DE BANK, une initiative de Victoria (aujourd’hui CAMPO) qui donne à de jeunes artistes l’occasion d’élaborer pendant deux ans des projets artistiques sous son aile. Durant cette période où elle a largement le temps d’expérimenter, Miet explore les rapports entre la mémoire collective et les souvenirs personnels et se forge un langage imager intuitif bien à elle. Cette résidence chez Victoria se solde par une série de court-métrages et trois performances : Proposition 1: Reanimation, Proposition 2: Reconstructie et Proposition 3: Play the life - Rode lopers. Miet s’est désormais forgé un style propre et est prête à affronter un public international. À l’issue de DE BANK, elle est invitée à faire une tournée européenne dans le cadre du festival IETM. Spingville, une installation vivante où l’image prime sur la performance, est son dernier bébé. 27 PERFORMANCE / UNE JOURNEE PARTICULIERE A SELESTAT DIMANCHE 23 MAI / DE 12H15 A 17H30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE / SOLO / FRANCE / PERFORMANCE AU JARDIN / NICOLAS BOULARD /////SPECIFIC CHEESES ///// Une conférence performance, accompagnée d’une dégustation, sur les liens entre les formes des fromages et celles de l’art minimal, en hommage à l’artiste américain Donald Judd, l’auteur avec ses "specific objects" des œuvres emblématiques de l’art minimal. En quoi les formes des fromages et celles de l’art minimal sont-elles proches ? Comment la norme influe-t-elle sur la forme ? Nicolas Boulard croise les modèles, ceux de l’art et de la culture, avec ceux d’autres univers, comme souvent le vin et la viticulture, dont il est un expert. Cette hybridité revendiquée dote son travail d’un bel humour, en même temps qu’elle invite à repenser nos codes de communication et de construction de sens. Nicolas Boulard propose cette conférence en relation au lancement du projet de jardin qu’il a conçu pour le Frac Alsace à Sélestat : Clos du Frac est une parcelle plantée de cépages bordelais… une parfaite parcelle de Mouton-Rothschild à Sélestat ! Ce sera l'unique parcelle bio de Bordeaux, en Alsace, l'Alsace étant la région de France qui regroupe le plus grand nombre de producteurs biologiques. De ces vignes plantées en 2010 et en s'appuyant sur la tradition et l’expérience alsacienne, pourra-t-on réaliser dans quelques années à Sélestat du Bordeaux meilleur qu'à Bordeaux ? Olivier Grasser REPERES BIOGRAPHIQUES Le travail de Nicolas Boulard se déploie sous des formes hétérogènes : clips vidéos, photos numériques, sculptures inspirées de mobiliers, jeux… Doublement diplômé en art et en design graphique, Nicolas Boulard a été “résident” du Collège Invisible, réseau d’enseignement artistique sur Internet, créé par Paul Devautour. Il collabore régulièrement avec de grands talents de la musique électronique tels que Joachim Montessuis ou Ikko Yamagochi et réalise des clips qui interrogent chacun à leur façon, la persistance obsédante avec laquelle les signes et les images de communication marquent la conscience. Nicolas Boulard s’est fait connaître par un travail très singulier sur le vin. Authentique spécialiste, issu lui-même d’une famille de la Champagne, il réalise des vins et projets vinicoles pour lesquels la générosité, la convivialité, le sens du partage, rencontrent une position critique, parfois provocatrice, mettant en jeu les fragilités et les préjugés de cette industrie. Le H 20 ou H2 O, suivant sa prononciation, est un vin sans raisin, uniquement constitué d’eau et des correcteurs de goût plus ou moins autorisés par la loi. Le Grand Vin de Reims, oeuvre - multiple créée pour l’Association des Amis du Frac Champagne-Ardenne, est le fruit de vendanges sur la totalité des “parcelles” de la ville de Reims : grandes surfaces, épiceries diverses, voire même les vignes décoratives des ronds-points. Que ce soit pour les films, les objets, les vins, c’est avant tout l’oeuvre d’un hacker de la pensée, qui s’infiltre et pénètre les systèmes ou les savoir-faire, en disloque les composantes structurelles pour en proposer des alternatives et d’autres perspectives. NICOLASBOULARD.FREE.FR DE QUELQUES FORMES SPECIFIQUES (SPECIFIC CHEESES) CONFERENCE - PERFORMANCE DE NICOLAS BOULARD Les formes des fromages et les formes de l’art minimal. Le mot fromage vient du mot forme. Forme et fromage ont la même étymologie grecque. A l’origine, on disait formage, puis c’est devenu fromage. A travers une série d’exemples, nous verrons en quoi les formes des fromages et les formes de l’art minimal sont proches. Nous analyserons également ce qui différencie les deux. Nous étudierons le rapport entre Forme et Norme, où comment la norme influe sur la forme. Nous analyserons des oeuvres de Sol Lewitt, Donald Judd, Claude Rutault, Michael Heizer, Lawrence Weiner. Nous analyserons les formes des fromages Valençay, Emmental, Comté, Vieux Lille, Tomme de Savoie. "La qualité essentielle des formes géométriques vient de ce qu’elles ne sont pas organiques, à la différence de toute autre forme dite artistique." Donald Judd (entretien avec Lucy Lippard) Art in America, juillet-août 1967 "Une toile tendue sur châssis peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est accrochée. Sont utilisables tous les formats standards disponibles dans le commerce qu’ils soient rectangulaires, carrés, ronds ou ovales. L’accrochage est traditionnel." Claude Rutault Toile à l’unité, définition/méthode n°1, 1973 "Un objet rectangulaire quelconque placé sur une frontière internationale laissé pour un temps puis tourné horizontalement afin que la partie du rectangle se trouvant d’un côté de la frontière passe de l’autre côté et vice versa" Lawrence Weiner - Opus 15 - 1968 – Dimensions variables Nicolas Boulard 28 PERFORMANCE / UNE JOURNEE PARTICULIERE A SELESTAT DIMANCHE 23 MAI / DE 12H15 A 17H30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE 3 DANSEURS + 1 MUSICIEN / FRANCE / DUREE 30' / MARJORIE BURGER-CHASSIGNET & GALAAD LE GOASTER CIE SOMEBODY /////CRASH ROAR DIN ///// Crash Roar Din est une pièce pour danseurs et musiciens qui prend le rock comme source d’inspiration, comme énergie, comme matière première. Crash Roar Din se composera dans l’instant, mais travaillera sur la mémoire, immédiate et profonde. Comment les corps cheminent, entrent en conversation, plongés dans un espace modelé, résonnant, sans cesse réactivé par les scansions, les rythmes et les mélodies. Un groupe d’individus au fil des années s’est constitué pour réinterroger les interactions danse/musique par un travail approfondi sur les perceptions, le temps et la dramaturgie. Par le mouvement, requestionner l’essence du rock, sans les atours et afféteries qui parfois lui sont accolées. Basée à Strasbourg, la compagnie SomeBody (Marjorie Burger-Chassignet & Galaad Le Goaster) développe depuis 4 ans un travail où la danse se frotte à son environnement, à la musique et à la poésie. Danse : Marjorie Burger-Chassignet, Sébastien Dupré, Galaad Le Goaster Musique : Vincent Posty Production : SomeBody Avec le soutien du Théâtre Pôle Sud La compagnie SomeBody est aidée par la Ville de Strasbourg REPERES BIOGRAPHIQUES SomeBody est né de la rencontre de deux personnes, Marjorie Burger-Chassignet, danseuse et chorégraphe, et Galaad Le Goaster, réalisateur et performer, et du désir de développer et de concrétiser une réflexion sur la danse en la nourrissant d'autres pratiques, notamment le cinéma, la musique et la poésie. Dix pièces, deux soirées de performances, trois films et IMPRéVU (festival dédié à la composition instantanée) signent l’activité de la compagnie depuis sa création en novembre 2005. Nourri par l'enseignement de danseurs-pédagogues comme Julyen Hamilton, Simone Forti, Steve Paxton ou Anna Halprin ainsi que par les œuvres de quelques cinéastes (de John Ford à Johan Van Der Keuken en passant par John Cassavetes), leur travail s’articule autour de la responsabilité du danseur, de sa conscience du temps, de l’espace et de la structure interne d'une pièce. Les compositions, écrites ou instantanées, prennent leur source dans une recherche constante sur l’anatomie vécue et les perceptions comme supports principaux de l’imaginaire. La volonté de faire se rencontrer des artistes d'horizons différents et de sans cesse confronter les divers éléments pour mieux les réagencer (la voix comme geste, le geste comme musicalité etc.) caractérise aussi leur démarche. Leurs créations cinématographiques abritent des préoccupations similaires. Ce travail se concentre sur la dimension tant poétique que politique du mouvement des corps et sur comment ceux-ci prennent le temps d'investir l'espace qui leur est donné. Comment aussi ils s’emparent de l'idée sur le papier et l'amènent ailleurs, sans la trahir, pour qu'elle devienne chair. Les Pièces et Performances : I love you rock'n'rolly - Duo (2005), The Art of dead Birds - Duo (2006), Tani nananah - Trio (2006) Kaléidoscope - Trio (2007), Huddle, d’après Simone Forti (2009), Projet Canon - Quintet (2009), Movie - Trio (2009), Saltimbocca - Trio ( 2009), Crash Roar Din - Quartet (2010), They live by night, suites - Septet (création en cours 2010) Les Evénements : … they live by night… – Danse Musique Ici Maintenant – (octobre 2006 ; mai 2007), Festival Imprévu (1ère édition mai 2009), IMPRéVU (2ème édition novembre 2010) Les Films : Nous ne sommes rien, c’est ce que nous cherchons qui est tout (2005), Je suis un Naufrageur (2007), Les plus grands Esprits de ma Génération ? (2009) 29 DANSE AU MAILLON - WACKEN MARDI 25 MERCREDI 26 JEUDI 27 MAI / 22.30 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE MAILLON / 5 INTERPRETES / TRIO / GRANDE-BRETAGNE / DUREE 100' AVEC ENTRACTE / RUSSELL MALIPHANT COMPANY & COBOSMIKA COMPAGNY /////CHOISE /////AFTERLIGHT ///// Considéré comme le chorégraphe anglais le plus marquant de sa génération, Russell Maliphant est qualifié par certains critiques comme le "Schubert de la danse moderne", et ce par sa capacité à sculpter les mouvements du corps en une fascinante combinaison gestuelle. Imposant son style, il l'explore sans relâche, poussant toujours plus loin la recherche d'un équilibre entre gravité et dynamique, fluidité et tension des corps. AfterLight, a été créé suite à une commande du Sadler’s Wells à Londres en octobre 2009 dans le cadre d’un programme intitulé : dans l'esprit de Diaghilev. Inspiré par les dessins et les photographies de Nijinski, le chorégraphe crée un espace cerné par les lumières de Michael Hulls, le son de Daniel Proietto et le décor de Es Evelin où les danseurs se jouent des formes et de l’imaginaire expressionniste de l’artiste. Choice est une pièce de Russell Maliphant créée pour la Cobosmika Company, compagnie fondée en Catalogne par Olga Cobos et Peter Mika, anciens danseurs du chorégraphe. Une pièce pour cinq danseurs où les lumières, les mouvements, et l’environnement sonore emprunt de rythmes asiatiques donnent à l’ensemble une voluptueuse combinaison de corps dans l’espace. COMPAGNIE RUSSELL MALIPHANT La compagnie a été créée en 1996. Sa recherche s’est nourrit d’une grande variété de techniques : ballet classique, danse contact, yoga, capoeira et tai chi. La compagnie a beaucoup tourné nationalement et internationalement et fut tout récemment la première compagnie d’Europe de l’Ouest à danser en Uzbekistan. En 2002, Russell Maliphant Company a reçu le "Time Out Live Award" à l’occasion de la pièce Sheer et également le "Peoples Choice Award", dans le cadre du Festival de la Nouvelle Danse de Montréal. Russell Maliphant a reçu en 2003 un "South Bank Show Award for Dance" et sa pièce Broken Fall chorégraphiée pour Sylvie Guillem, Michael Nunn et William Trevitt. En décembre 2003 il reçoit "l’Olivier Award" de la meilleure production de danse. RUSSELL MALIPHANT Il est né à Ottawa en 1961, vivant à Cheltenham pendant son enfance où il a étudié le ballet. A l’âge de 16 ans, il devient élevé du Royal Ballet School et, après trois ans, est promu dans le Sadler’s Wells Royal Ballet. Il demeure avec la compagnie jusqu’en 1988 puis il part pour élargir son expérience d’interprète indépendant. A cette époque, Maliphant évolue vers la danse contemporaine, et pendant les années suivantes, travaille avec une palette de chorégraphes indépendants tels que Michael Clark, Laurie Boothe et Rosemary Butcher, ainsi que Lloyd Newson (directeur de DV8 Physical Theatre). Maliphant danse dans Dead Dreams of Monochrome Men (1988) pour ce dernier. Il a pu ainsi appréhender une large gamme de techniques. Sa formation classique est complétée par l’improvisation de contact, la capoeira, le tai-chi et l’acrobatie. Une qualité que ces chorégraphes avaient en commun, était leur dépendance de l’apport d’idées des danseurs pendant le processus créatif. En 1991, il a créé ses deux premières œuvres, un solo pour lui-même, Evolving Paradigm et un duo sans titre avec le danseur Scott Clark. Ces œuvres lui ont apporté sa première commande en 1992, un quartet intitulé Relative Shift pour le Richochet Dance Company. Son solo de 1996, Shift, est exemplaire dans sa prolifération de mélodies physiques intimes qui construisent un aria élégiaque de la danse. Dans son duo Critical Mass (1999), est devenue partie intégrante de l’œuvre de Maliphant. Il ne crée pas toujours sur la musique directement. En revanche, il choisit ses compositeurs avec attention pour l’atmosphère qu’ils apporteront à l’œuvre. Ses récents collaborateurs sont Andy Cowton, Richard English, Mukul, Sarah Sarhandi, Shirley Thompson, Matteo Fargian et, pour Broken Fall, Barry Adamson. WWW.RMCOMPANY.CO.UK COMPAGNIE COBOSMIKA Peter MIKA est originaire de Slovaquie où il suit les cours de musique, théâtre et danse à l’Université de Bratislava. Il danse avec Bruno Genty à Paris, Rui Horta à Munich, Russel Maliphant et a été membre du S.O.A.P. à Francfort. Il reçoit le Prix Rudolf Noureïev en 1998. Olga Cobos a été danseuse soliste pour Rui Horta et Russel Maliphant. En 2000, ils créent ensemble la compagnie"Cobosmika". 30 AFTERLIGHT Pièce pour 3 danseurs / Création 2010 / 40 minutes Chorégraphie : Russell Maliphant Lumières : Michael Hulls Musique : Andy Cowton & Erik Satie Pianiste : Dustin Gledhill Costumes : Stevie Stewart Animation : Jan Urbanowski Concept & design par Es Devlin Film par Onedotzero Industries ltd Pièce interprétée par la Russell Maliphant Company Danseurs : Daniel Proietto and Silvina Cortes & 3ème danseur à confirmer AfterLight, nouvelle création 2010 de Russell Maliphant, trouve son origine dans une commande du Sadler’s Wells d’un solo créé pour le danseur Daniel Proietto et présenté dans le cadre de la première de “In The Spirit of Diaghilev” en October 2009, soirée d’hommage à Diaghilev et aux Ballet Russes. Ce solo, point de départ de la chorégraphie d’Afterlight sera enrichi de 2 autres parties. Tout au long de sa vie Vaslav Nijinski créa des centaines de dessins géométriques et peintures avec des motifs circulaires, très souvent avec un oeil très stylisé au centre. Maliphant est intéressé par l’idée de fluidité évidente dans ces formes et par les photographies de Nijinski. Inspiré par les dessins et les photographies de Nijinski, le chorégraphe crée un espace cerné par les lumières de Michael Hulls et un décor de Ed Devlin où les danseurs se jouent des formes et de l'imaginaire expressionniste de l'artiste. "Nous vivons dans une société mondiale; comme jamais auparavant, nous avons la possibilité de voyager et de nous confronter à l’art et à la culture de différents continents. La capoeira, à mi-chemin entre l’art et la danse, fut amenée au Brésil par des esclaves d’Angola et possède un style et des mouvements dont la beauté m’inspire. Le taï-chi venant de Chine et le yoga d’Inde apportent des éléments différents, des qualités, des formes et des mouvements. La danse contact créée par Steve Paxton aux Etats-Unis et la richesse du savoir émanant des thérapies corporelles du monde entier, chacune avec sa propre façon de « voir le mouvement » sont des sources qui m’inspirent constamment et qui enrichissent mon travail depuis longtemps. Ce sont le mouvement et l’énergie qui unissent toutes ces disciplines. C’est cela mon étude ; je ne souhaite pas me limiter à un style de danse particulier, que ce soit classique, contemporain ou autre. Mon travail doit beaucoup à la vision du mouvement à travers l’oeil du sculpteur, sans se limiter à l’idéal gréco-romain ou à celui des positions de la cour classique, mais en intégrant les nombreuses techniques de mouvement que j’ai explorées. Les formes, les vitesses et les dynamiques qui nous influencent sont vastes et variées et je pense que c’est cela qui influence ma vie et mon travail." Russell Maliphant CHOICE Pièce pour 5 danseurs (2 hommes et 3 femmes) / création 2003 / Reprise 2009 / 30 minutes Chorégraphie : Russell Maliphant Lumières : Michael Hulls Musique : mukul (ambientTV.NET) Rencontre avec la Cie Russel Maliphant Mercredi 26 mai au Maillon wacken CobosMika Company Danseurs : Olga Cobos, Peter MIka, Laura Vilar, Iker Arrue & Anna Òdena (CobosMika Company) Dans ce quintet, l'association des lumières et des mouvements résulte en une combinaison voluptueuse des corps et de l'espace - le tout enveloppé par un environnement sonore influencé de rythmes asiatiques. La reprise de Choice a été présentée en première au Mercat de les Flors à Barcelona le 27 Octobre 2009. EXTRAITS DE PRESSE "Autant le dire bien fort, Maliphant est l’une des meilleures nouvelles chorégraphiques parvenues de Grande-Bretagne ces dernières années. Formé à la danse classique et contemporaine, adepte du yoga, Russell Maliphant a imposé sa voix, celle d’un chorégraphe qui repense l’équilibre du corps et porte le pas de deux à des sommets d’inventivité." Philippe Noisette L’envol de Maliphant par Dominique Simonnet "Il monte, il monte le chorégraphe britannique. Adoubé par l’étoile Sylvie Guillem, il repousse encore les limites. Très loin. Chez lui, les danseurs ne dansent pas. Ils volent, ils planent, ils fusent, ils décollent. Ils se hissent vers le ciel, le corps tendu comme un I, s’enroulent dans d’invraisemblables torsions des épaules, se jettent dans le vide en tourbillonnant et parcourent la scène sur les genoux comme des toupies folles..." L’Express, le 13/09/2004 31 DANSE AU THEATRE DE HAUTEPIERRE JEUDI 27 MAI / 19.00 / AVANT-PROPOS / FRANCE / ALLEMAGNE / DUREE 40' / VIRGINIA HEINEN CIE BLIKE /////VALSE POUR UN AMOUR ///// C’est avec la chorégraphe Virginia Heinen que nous inaugurons un nouveau rendez-vous du festival : les avant-propos. Inspiré du modèle "les 19h de Contrejour" mis en place par le Centre Chorégraphique National de Belfort depuis de nombreuses années, nous avons eu envie d’inviter le public à entrer dans le processus de création d’une œuvre à venir. La pièce, Valse pour un amour sera créée en juillet 2010 à Perpignan. Deux mois avant cette création, Virginia Heinen et Martin Grandperret vont nous faire partager leur approche au travers de courts extraits dansés et d’explications en direct. La matière gestuelle de ce duo est composée en grande partie de "portés". Un travail avec des équilibres fragiles, souvent sans prises de mains, fluides et apparemment sans pesanteur. La manipulation, la répétition, l’abandon et la sensation physique de cette dynamique complètent une structure dramatique qui prend sa source dans des textes de la mythologie, des poèmes lyriques ou des images de sculptures de Rodin. Chorégraphie : Virginia Heinen, en étroite collaboration avec Martin Grandperret Interprètes : Martin Grandperret, Virginia Heinen Collaboration artistique : Giulio De Leo Musiques originales et bande-son : Filippo Zapponi Décor : Jean-François Frering Création lumière : Damiano Foà Coproduction : Centre Chorégraphique de la ville de Strasbourg, Cie Blicke, Cie Menhir Accueil en résidence : Agence culturelle d’Alsace à Sélestat, Fabrique de Théâtre à Strasbourg, Centre Chorégraphique de la Ville de Strasbourg, Le Pacifique - CDC de Grenoble Prêt de studios : CND de Lyon et de Pantin, Micadanses à Paris Avec le soutien de la DRAC Alsace et de la Ville de Strasbourg REPERES BIOGRAPHIQUES Virginia Heinen a été formée à l'école Folkwang d'Essen en Allemagne. Avec Jean Cébron, elle étudie le répertoire et la composition et devient ensuite son assistante. Comme interprète, elle danse dans Orphée et Eurydice de Pina Bausch, dans la création Tu Wa Ga de Susanne Linke ainsi que dans le projet Die Küche de Felix Ruckert. A son arrivée en France, elle est engagée par la compagnie Blanca Li, puis elle danse avec Marilèn Breucker, Luc Petton, Laura Simi & Damiano Foà et Laura Scozzi. En 2005 elle travaille avec Renate Pook qui lui transmet le solo Hiver 42. Elle crée weg nach et instant de rencontre, des pièces courtes qui tournent en France, en Allemagne, en Italie et en Corée du Sud. Elle réalise en collaboration avec Enrico Tedde le duo entre deux en 2002, ainsi que deux pièces pour groupe passi en 2004 et living room en 2005. Elle chorégraphie également ailes (solo) et fragile (pièce pour 5 interprètes) en 2003 et les solos stella en 2006 et la perfection du cercle en 2007. Sa dernière pièce Memoria a été créée à Pôle Sud en février 2009. Pédagogue, elle a enseigné à l'école supérieure le CNDC d'Angers, à l'école supérieure de la Scala de Milan en Italie, à l'école supérieure El Barco au Taller National de San José au Costa Rica, au Ballet du Nord / CCN de Roubaix Nord - Pas de Callais, à l'Atelier de Paris-Carolyn Carlson, à Danse à Lille, à Danse au Coeur de Chartres, au Pacifique / Cie Christiane Blaise à Grenoble, à la Ménagerie de Verre à Paris…. En tant que formatrice, elle intervient régulièrement au CND à Paris et à Lyon, au Cefedem de Nantes. L A COMPAGNIE B LIKE a été créée en 2002 sous l'impulsion des deux danseurs chorégraphes Virginia HEINEN et Enrico TEDDE. Depuis, BLICKE a signé une dizaine de chorégraphies. Dans leur écriture chorégraphique émerge l'influence de l'école allemande de laquelle sont issus les deux chorégraphes de la Cie. Le Kinomichi, un art du mouvement japonais et un travail sur l'énergie, est également une source importante dans leur recherche sur le mouvement. Ils ont auprès de leurs maîtres, appris puis développés de manière singulière, les fondements du théâtre-dansé. Leurs spectacles sont en prise directe avec la réalité. Au travers de petites scènes, ils proposent un univers profondément optimiste, plein de poésie, de rêve, d'humour. Ainsi, quand la musique fluidifie les corps, naît une danse qui révèle une expérience humaine fondamentale. WWW.BLICKE.FR/COMPAGNIE.HTM 32 SUR LA PIECE C'est une histoire… Celle d'un homme et d'une femme, une histoire d'un couple, une histoire d'amour… Cela peut être une journée dans leur vie comme l'arc de toute une vie. Ça se passe dans un salon où l'espace peut se transformer, où tout est mobile… et ça se passe à l'intérieur d'eux. Dans l'intimité d'une relation, ils évoluent dans un temps suspendu, en absence de pesanteur, avec insouciance, dans une harmonie parfaite. Pourtant la perception des choses est bien différente pour chacun d'eux: elle vit dans un monde de rêves, lui dans la réalité… C'est la rupture de la beauté des gestes suspendus. La routine, la répétition des gestes, de manière obsessionnelle jusqu'à l'épuisement, se heurtent à la poésie et la tuent. Et voilà que la réalité les rattrape, le quotidien prend le dessus. Comme un cri silencieux l'individualité de chacun avec ses multiples facettes tente désespérément de s'exprimer, d'exister. Pourtant profondément liés, ils finissent par contempler leur destin de la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie. Avec pudeur et une touche d'ironie, ils racontent une histoire d'amour merveilleuse et unique, et son renversement… POUR L’AVANT PROPOS À travers des extraits de la pièce (travail en cours- la chorégraphie sera présentée en juillet 2010 aux Estivales de Perpignan dans le cadre des Scènes Ouvertes) nous allons expliquer le processus de création, ses sources d’inspiration et le cheminement vers une dramaturgie et comment nous avons placé notre recherche gestuelle et physique, qui a été le point de départ, dans un contexte théâtral. QUELQUES NOTES SUR LA DEMARCHE Une partie importante de son vocabulaire corporel est le travail sur les portés : avec des équilibres fragiles, souvent sans prises des mains, fluides et apparemment sans pesanteur, dans un temps suspendu comme les portés avec les risques de l'oblique, de plein vol mais sans dureté. Nous avons également travaillé sur la manipulation à deux et en solo sur le souvenir de la sensation physique de la manipulation, et sur la répétition, en partant toujours d'un même point de départ avec des évolutions différentes. La qualité du mouvement est axée sur l'abandon et la fluidité sans lui enlever pour autant la dynamique et le physicalisme. Autres sources d'inspiration sont apportées par des textes de la mythologie, de poèmes lyriques et d’images d’oeuvres d’art, notamment de Rodin, ainsi que par le décor et la scénographie. Cela nous fait placer la danse dans un contexte théâtral où le rôle de chacun est clairement défini et nous amène vers une dramaturgie. 33 DANSE A POLE SUD - PLATEAU JEUDI 27 MAI / 20.30 / SOLO / FRANCE / DUREE 60' / RACHID OURAMDANE CIE L'A /////LOIN... ///// Chorégraphe associé au Théâtre 2 Gennevilliers, Rachid Ouramdane a créé, avec Loin…, une extraordinaire œuvre intime et poétique. Il met en scène un homme seul qui s’empare d’une partie cachée de son histoire familiale et la confronte à la répétition de la grande Histoire. De son père, algérien, incorporé aux corps expéditionnaires français en Indochine, il retrace l’itinéraire et les déplacements militaires, par le biais de témoignages qu’il a recueilli auprès de sa mère et de personnes vivants aujourd’hui à Saïgon, Haiphong et Hanoï. Lors d’entretiens filmés, il tente de les questionner. Le mutisme, le souhait d’amnésie ou au contraire le besoin de parler soulignent la formidable nécessité de repenser la mémoire officielle. Quand Rachid se met soudain à danser, il le fait avec une énergie transformée, inquiétante. Une danse mystérieuse, sensuelle, convulsive parfois, une plongée hypnotique dans les méandres de sa pensée. Solo conçu et interprété par Rachid Ouramdane Musique : Alexandre Meyer Vidéo : Aldo Lee Lumières : Pierre Leblanc Décor : Sylvain Giraudeau Production L’A. Coproducteurs : Théâtre Bonlieu Scène nationale Annecy, Théâtre de la Ville – Paris, Biennale de danse de Lyon Avec l’aide du Fanal, Scène nationale de Saint-Nazaire, dans le cadre d’une résidence de création Avec le soutien de Cultures France, Wonderful district à Hô-chi-minh – Vietnam, L’Ambassade de France au Vietnam – L’Espace, Centre culturel à Hanoï et le service de coopération et d’action culturelle à Hô-Chi-Minh Théâtre 2 Gennevilliers PORTRAIT PAR ROSITA BOISSEAU "Le chorégraphe Rachid Ouramdane aime dissimuler son visage derrière des masques. Qu’il s’agisse d’un maquillage de clown, d’une sculpture de fer ou d’un casque de moto intégral, le visage, ce grimoire de la personne, est occulté pour déplacer le regard ailleurs. Si le masque est selon le chorégraphe une manière de valoriser les mille facettes de sa personnalité éclatée, il dit aussi combien l’identité est un puits noir, sans fond, une illusion à laquelle le visage donne une lecture univoque. Trafiquant l’apparence, le masque permet aussi au corps de développer de nouvelles stratégies pour exister autrement et gratter les contours trop lisibles. Depuis la création de sa compagnie l’association Fin Novembre, cofondée avec Julie Nioche, Rachid Ouramdane, longtemps interprète auprès des chorégraphes Odile Duboc, Hervé Robbe, Meg Stuart, Emmanuelle Huynh, tente de soulever le voile d’évidence qui recouvre toute chose. Pour cet homme pudique, fils d’Algériens réfugiés dans le mutisme, la parole confisquée des pères sur la guerre d’Algérie reste une blessure ouverte que la scène permet à sa façon de panser. Dans Au bord des métaphores (2000), il chargeait la vidéo de triturer les identités au risque de se perdre dans des effets de surface. Pour + ou – là (2002), il s’inspire de la télévision et de ses icônes, du narcissisme des nouveaux médias. Directement connecté sur internet, Les Morts pudiques (2004), solo autoportrait nourri d’une recherche autour de la jeunesse et de la mort, faisait courir la sang de la vie dans les tubes en plastique d’une beauté toute médicalisée. Jouer sur les images, les signes, leur ambivalence électrise les spectacles de Rachid Ouramdane, souvent comparables à des cérémonies secrètes pour mutants en rupture de ban. Pour l’exemple, Cover (2005), monochrome précieux conçu après une série de séjours au Brésil, fait circuler des hommes badigeonnés de peinture noire de la tête aux pieds, idoles contemporaines aspirées par un crépuscule sans retour." Panorama de la danse contemporaine, éditions textuel, 2006 WWW.RACHIDOURAMDANE.COM 34 Le voyage est souvent l’occasion de se revisiter, le moment pour faire le point sur son identité ou plutôt nos identités. Celles dont on hérite, que l’on porte dans le regard de l’autre et celles qu’on se projette, qu’on tente d’émanciper. Qu’elle soit nationale, économique, ethnique, minoritaire, culturelle, médiatique, sexuelle, psychologique, affective ; le voyage questionne ces strates identitaires qui se reconfigurent lors de tous nos déplacements. Ces différents visages de nous-mêmes ont alors souvent à négocier entre l’héritage d’un passé et une identité qui se construit au présent. C’est lors de ces voyages qu’apparaît le sentiment d’être étranger. Nos différences assumées et notre méconnaissance de l’ailleurs créent le lieu pour que notre regard puisse se repenser. Lors d’un premier voyage au Vietnam et au Cambodge il y a environ deux ans, il m’est apparu une autre façon de creuser ce sentiment d’être étranger. À l’occasion d’une discussion sur les violences des conflits qui ont secoué ces pays je me suis souvenu des pages du carnet militaire de mon père qui avait eu à fouler cette ex-Indochine. Au fur et à mesure de cette discussion, du fait de ma nationalité française je voyais qu’on me donnait la place d’un fils d’ancien colon alors que ce qui liait mon père à cette Indochine était l’héritage d’une autre colonisation, la sienne en Algérie. Une fois de plus lors de cet entretien m’apparaissaient les bouleversements et les traces occasionnés par la violence de conflits armés et auxquels on ne peut échapper quand on réfléchit la figure de l’étranger dans de nombreux endroits du monde. Comment la violence des conflits armés nous rend-elle étranger ? Quelle sensibilité naît de cette violence ? C’est la question qu’abordera ce projet itinérant sur les pas d’un parcours effectué il y a plus de 50 ans. Rachid Ouramdane, mai 2007 Reprenant comme itinéraire, les déplacements militaires de mon père lors de la guerre d’Indochine à Saigon, Haiphong, Hanoï et dans le Nord-Ouest du pays, je suis allé à la rencontre de personnes vivant au Vietnam. Lors de ces entretiens filmés, j’ai tenté de questionner leur mémoire et l’attitude créée par l’héritage des conflits qui ont traversé le Vietnam depuis les années cinquante. Cette mémoire s’est révélée être souvent éloignée de la mémoire officielle aujourd’hui soutenue par le gouvernement vietnamien. Le mutisme des anciennes générations, le déracinement de familles en fuite ou disloquées ont occulté tout un pan de l’histoire des personnes rencontrées. Toutes à leur manière, que ce soit dans la difficulté de parler, dans le souhait d’amnésie, ou à l’inverse dans le besoin exacerbé de faire face à son passé, montrent la nécessité de reconstruire leur propre mémoire et ainsi de repenser la mémoire officielle. Avoir organisé ces rencontres le long d’un parcours dans un pays, à l’époque, colonisé, effectué par un soldat algérien luimême colonisé, est bien sur une façon d’établir des parallèles dans des géographies éloignées. C’est pourquoi dans le travail de ce solo à forte dimension autobiographique, je me suis autorisé de pleinement m’identifier à ce que j’entendais. J’ai tenté de construire un espace où ma présence orchestrerait l’ensemble de ces paroles dans lesquelles je me suis reconnu. La recomposition de ces interviews pilotées par mes mouvements sur scène écrira l’histoire d’un individu dont on retiendra la nécessité de reconstruire une mémoire. Utilisant la forme solo comme lieu de résonance de multiples individus, il s’agit de construire un portrait qui nous confronte à la répétition de l’Histoire. Rachid Ouramdane, décembre 2007 Ce n’était pas prémédité mais, en une soirée à Bonlieu, scène nationale d’Annecy, on a vite compris que le politique se frayait une nouvelle place sur la scène contemporaine. Avec Loin… autoportrait de Rachid Ouramdane et Text to Speech de Gilles Jobin, le public est propulsé sur les autoroutes de l’information, de la propagande. Les deux spectacles sont très différents dans la facture, l’esthétique, et pourtant ils se saisissent l’un et l’autre de la question de l’engagement, comme s’il s’agissait de réinjecter du politique sur le plateau pour ramener la culture dans le débat. Le Suisse Gilles Jobin donne dans la politique fiction, imaginant, sans doute pour mieux prouver que son pays n’est pas si neutre, qu’une guerre entre catholiques et protestants se déclenchait à Genève. A partir de cette blague suisse, le chorégraphe met en scène sa table rouge, en référence à la prémonitoire Table verte de Kurt Jooss (1932). Elle est encombrée d’ordinateurs qui traitent l’info en direct. Cette autoroute de l’information traverse les salons les plus feutrés. Les écrans diffusent, outre les nouvelles les plus morbides, de bonnes flambées qui crépitent dans l’âtre. La scène est encombrée, les corps sont exposés, dans tous les sens du terme. Au tohu bohu des news et autres brèvouilles qui annoncent les morts à Bagdad, Jobin oppose le luxe, le calme et la volupté de la flambée sur ordi. Evidemment c’est une blague suisse. Le solo de Rachid Ouramdane (photo), qui utilise aussi le texte et le reportage, lie l’histoire personnelle et la grande histoire. Il s’agit aussi de guerre, de son père algérien raconté par sa mère, intégré aux corps expéditionnaires français en Indochine. Et voilà que le corps du danseur et chorégraphe français retrouve son étrangeté parce qu’il est choqué, parce qu’il est secoué, parce qu’il ne jure que par une sensualité retrouvée. Les mains sont si belles. Un solo du colonisé qui devient colon. Toute une expédition ! On retrouvera ces spectacles en mars à Paris au théâtre de la Ville. Marie-Christine Vernay - Libération, le samedi 8 mars 2008 35 DANSE A POLE SUD - STUDIO JEUDI 27 ET VENDREDI 28 MAI / 22.00 / SOLO / ETATS-UNIS / DUREE 60' / MIGUEL GUTIERREZ /////RETROSPECTIVE EXHIBITIONIST ///// Artiste pluridisciplinaire Newyorkais, Miguel Gutierrez a dansé pour Jennifer Lacey, Deborah Hay, Alain Buffard, a chanté entre autres aux côtés d’Anthony and the Johnsons, mais c’est en solo qu’il présente son univers débridé aux quatre coins du globe. Prenant appui sur sa propre histoire, Retrospective Exhibitionnist est une sorte d’autofiction du danseur, une incroyable entreprise d’autopromotion folle et sensible. Utilisant la danse, la vidéo, le texte, le chant, Miguel Gutierrez nous fait pénétrer dans sa vie, son histoire, anecdotes après anecdotes, saynètes après saynètes. Ce voyage déroutant, inattendu, drôle, profond et totalement déjanté nous permet de mesurer le talent de ce performeur hors pair et de partager ses inquiétudes sur le temps qui passe et sur ses conséquences sur le corps du danseur. "Ce solo est ce qu’il montre : mon cœur déchiré et qui vous est offert. Pourquoi fais-je ce que je fais ? Danse, temps, corps, vieux, dur, mouvement, danse, art, représentent tout, mais je suis plus que tout. Je suis parfait, vous m’adorerez et chacun dans cette pièce joue dans cette danse." Miguel Gutierrez Interprétation : Miguel Gutierrez Musique : U2, Interpol, Irene Cara, Kate Bush and Miguel Gutierrez Lumières Lenore Doxsee Vidéo Miguel Gutierrez (son père), Miguel Gutierrez REPERES BIOGRAPHIQUES Miguel Gutierrez vit à Brooklyn. Il fonde en collaboration avec d’autres danseurs, musiciens ou artistes visuels, et dirige le collectif Miguel Gutierrez and the Powerful People. Par ailleurs, il crée ses propres solos. Enter the seen, I succumb, dAMNATION rOAD, Retrospective Exhibitionist and Difficult Bodies, Myendlesslove, Everyone, Nothing, No thing et dernièrement Last Meadow ont été présentés à New York, San Francisco, Minneapolis, Burlington, Houston... mais aussi Hamburg, Bucarest, Vienne, Berlin, Bologne... Il a été l’interprète de John Jasperse, Jennifer Lacey, Ann Liv Young, Deborah Hay et Alain Buffard. Pédagogue, il enseigne et mène des ateliers internationaux en technique de la composition et du processus créatif. Il est également inventeur du Death Electric Emo Protest Aerobics, dit DEEP AEROBICS. En tant que chanteur, il s’est produit avec My Robot Friend, Antony and the Johnsons et Speller. Par ailleurs, il a enregistré une collection de musiques issues de ses performances et écrit un recueil When you rise up, you must sing songs, publié aux éditions53rd State Press. * Il jouait dans (Not) a Love song d’Alain Buffard au festival Nouvelles Strasbourg Danse 2008. WWW.MIGUELGUTIERREZ.ORG 36 PERFORMANCE A POLE SUD - STUDIO VENDREDI 28 MAI / 19.00 PRESENTE PAR POLE SUD ET LE FRAC ALSACE / DUO / BELGIQUE / DUREE 30' / MARIE-FRANCE ET PATRICIA MARTIN /////PATRICK, TU VIENS ? ///// Patricia & Marie-France Martin sont jumelles, et inévitablement duelles. Elles assument le fait biographique comme constitutif de leur démarche singulière, à la lisière de la littérature et des arts visuels : une œuvre protéiforme, obsessionnelle et troublante, qui amalgame réalité et fiction, procède par incorporations et transmutations. Ce questionnement dépasse la seule introspection pour induire une distanciation critique, interroger les concepts identitaires, et notamment l’identité féminine, le rapport à soi et à l’autre. Amoureuses des mots, du langage et de l’écrit, perfectionnistes dans tous les détails, elles s’engagent, physiquement et psychiquement. Patrick, tu viens ? est un discours sur la contre-quête de l’âme sœur, avec en scène Patrick, le costume, le rugby, la Suisse, les amours littéraires, la chanson, la psychanalyse… Mélange des genres, paroles structurées sur le mode de la répétition et de la reprise, brouillage des catégories, dérapage pour de vrai dans une mise en abîme de la relation entretenue à la présence – celle de l’artiste, du public. À la mi-temps, Rocco & Rokocoko s’entraînent à la mêlée… du noir dans le rouge idyllique de l’amour ? …tout n’est pas joué d’avance ! REPERES BIOGRAPHIQUES Nées à Sienne (Suisse), Marie-France & Patricia Martin sont soeurs jumelles. Elles exposent régulièrement dans de nombreuses villes d'Europe depuis 10 ans. Elle vivent et travaillent à Bruxelles et ont développé une démarche artistique originale où la création a lieu à deux. Leur pratique regroupe objets-sculptures en dentelles, photographies, vidéos, vêtements, son, scénographie et performance. Réflexion sur l'identité, leur travail présente une distanciation critique sur leur origine unique, sur la condition féminine et sur notre environnement urbain. Parmi leurs récentes performances, citons : Poetic’Puzzle, J’aime pas la poésie ? (Poème 2, Bruxelles), Patrick, c’est ou bien ou bien, TROUBLE (Festival/performance, Halles de Schaerbeek, Bruxelles), Patrick, tu viens ? (Nuit curieuse zig zag, La Ferme du Buisson, scène Nationale de Marne La Vallée, Noisiel, France), C’est noir comment ? (Deuxième de trois monstrations dans le cadre d’une résidence (P), La Bellone, Bruxelles), Faux-semblant, les confidences (Festival TEMPS D’IMAGES, CCA Ujazdowsky Castle, Varsovie, Pologne)… 37 DANSE A POLE SUD - PLATEAU VENDREDI 28 MAI / 20.30 PRESENTE PAR POLE SUD ET L'AUDITORIUM DES MUSEE DE LA VILLE DE STRASBOURG / 5 INTERPRETES / BELGIQUE / DUREE 60' / JOANNE LEIGHTON /////THE END ///// En résidence depuis janvier 2010 à Pôle Sud, Joanne Leighton, chorégraphe d’origine australienne vient d’être nommée directrice du Centre Chorégraphique National de Franche-Comté à Belfort. Cette reconnaissance nationale salue son parcours et ses qualités de chorégraphe. Très impliquée dans cette vingtième édition du festival Nouvelles, elle nous livre ici sa toute dernière création : The End. Inspirée par le texte de Lecture on Nothing, conférence donnée par John Cage en 1950 à l’Artist Club à New York, la création introduit un parallèle entre la poésie et le sens de ce texte/musique mais aussi un commentaire sur les différents états que suggère l’auteur. Sur un ton à la fois amusant et ludique, Cage développe plusieurs thèmes sur ses expériences de créateur pour aboutir peu à peu à une véritable partition pour une voix. Seule source musicale de la pièce, le texte, interprété sur le plateau par la magnifique chorégraphe Odile Duboc, sert d’écrin à un sextet de danseurs qui revisitent une série de références incontournables de la danse actuelle. Chorégraphie Joanne Leighton Créée en collaboration et interprétée par Nora Alberdi, Odile Duboc, Claire Laureau, Bruno Péré, Taka Shamoto, Katrien Vandergooten Musique Conférence sur Rien, lu et interprété par Odile Duboc, (Traduction Vincent Barras, avec l’accord du John Cage Trust et des Editions Héros-Limite Genève) Lumières Maryse Gautier Décor La toile peinte est réalisée par Tomoyo Funabashi, Maxime Kurvers, Anne Lezervant, Camille Vallat, élèves de l'école du Théâtre National de Strasbourg en stage de peinture avec Alwyne de Dardel au Théâtre des Amandiers à Nanterre Conception sonore Peter Crosbie Direction technique Manu Van de Velde The End est une production de Velvet, coproduit par la Biennale du Val de Marne, le Ministère de la Communauté Française-Service de la Danse, par le Centre Chorégraphique National de Franche-Comté à Belfort dans le cadre l'accueil/studio, Ministère de la Culture/DRAC Franche-Comté et de la convention Région Franche-Comté / CULTURESFRANCE / DRAC Franche-Comté, avec l'aide de l'Agence WBT/D, de WBI et de la SACD. REPERES BIOGRAPHIQUES La compagnie Velvet a été créée en 1994 par Joanne Leighton. De nationalité belgo-australienne, Joanne Leighton a été formée à la danse à Melbourne. Elle a ensuite dansé au sein de l'Australian Dance Theater, avant de s'installer à Londres, où elle crée plusieurs spectacles accueillis au Place Theater. Connue pour ses qualités de pédagogue, elle est invitée à donner des cours au Théâtre Royal de La Monnaie. Elle rencontre alors les chorégraphes émergeants de l'époque : Wim Vandekeybus, Anne-Thérèse De Keersmaeker, Michèle-Anne De Mey, Nadine Ganase… Depuis 2009 Joanne Leighton est chorégraphe associée au CDWEJ, projet Danse à l'école, de la Communauté française de Belgique. Pour la saison 2010 la compagnie est en résidence à Pôle Sud et à la Scène Nationale d’Orléans. En février 2010, Joanne Leighton vient d'être nommée directrice du CCN de Franche Comté à Belfort. Les pièces Display/Copy Only et Made in Taiwan ont été présentées à Strasbourg lors des festivals Nouvelles Strasbourg Danse 2007 et 2008, ainsi que 5 Easy Pieces en septembre dernier. La dernière pièce de la compagnie, The End, inspirée d’un texte de John Cage, répond à une commande de la Biennale du Val de Marne à Paris et a été créée lors de la Biennale de Charleroi/Danses en novembre dernier. WWW.VELVETVELVET.BE 38 Ce projet est inspiré par le texte de Lecture on Nothing, conférence donnée par John Cage en 1950 à l'Artist’s Club à New York, événement incontournable de l'art du XXe siècle. John Cage y livre un exposé particulièrement lucide sur le statut de l'art de son époque, non sous la forme proprement dite d'un manifeste mais par l'élaboration d'une réflexion précise sur notre rapport au sens. Cette création, intimement liée à cette œuvre de Cage, introduit un parallèle entre la poésie et le sens de ce texte/musique mais aussi un commentaire sur les différents états que suggère l’auteur. Joanne Leighton, pour faire écho à ce texte, revisite une série de références incontournables de la danse actuelle. Elle utilise les procédés ludiques qu’elle a développés depuis plusieurs années entre autre la copie, la rature, la reconstruction ou la citation. Aussi, le spectacle est illustré par une série de fins : les dernières notes d'un morceau musique, le dernier mouvement dansé, la fin d’une histoire, la sortie du plateau, la fin de la pièce, la perte de la conscience, la fin d’un état ou le passage d’un état à un autre… Loin d’un constat ou d’une prise de position, The End se veut un questionnement sur nos attitudes et habitudes face à la danse, au spectacle ... LECTURE ON NOTHING Le texte donne l’impression d’une conversation, comme une histoire personnelle racontée à la première personne par John Cage lui-même, sur un ton à la fois amusant et ludique. John Cage développe différents thèmes, commençant par de petites observations plutôt légères sur la vie, des anecdotes personnelles pour ensuite parler de musique, de ses propres expériences de professeur et de créateur de musique, en citant différents compositeurs du passé (Bach, Beethoven, Satie, Debussy, etc.). Cage continue à parler de la composition et ensuite glisse vers une discussion sur la pièce qu’il est en train de lire, Lecture on Nothing (Conférence sur Rien). Peu à peu, nous perdons ce contact avec la première personne et le narrateur du texte pourrait être aussi bien le compositeur nous parlant, le récitant ou même les pensées de l’auditeur. Tout cela fonctionne comme une histoire mais est en réalité écrit selon les procédés musicaux que Cage utilise dans ses compositions – il s’agit en fait d’une partition musicale pour une voix. Cage avait une grande expérience de l’utilisation de procédés alternatifs d’écriture et de création de partitions sonores et de musiques. Il faisait couramment appel au hasard (Yi-king) pour faire des choix dans son travail, libérant ainsi "l’acte du Créateur" et laissant les décisions créatives à des principes aléatoires. En consacrant son œuvre au travail du son et particulièrement du silence, inventant de nouvelles voies dans l’émission et la perception du son, Cage a été un innovateur majeur en son temps et son travail reste pertinent même dans le paysage culturel d’aujourd’hui. Lecture on Nothing / Conférence sur Rien sera une partition parallèle à la partition chorégraphique, notre but étant de réaliser un travail basé sur le mouvement, possédant une structure indépendante de celle du texte ou de la "musique". Il ne devrait pas y avoir de hiérarchie entre danse et bande sonore chacun ayant sa place en termes d’exécution et de structure. Le mouvement est développé avec les danseurs sur base de recherches spécifiques, concentrées sur la manière de générer et construire le matériel. POURQUOI JOHN CAGE ? J’ai trouvé extrêmement libérateur d’observer et de travailler l’univers de John Cage – son œuvre a une telle dynamique d’invention et de renouvellement – un désaveu des conventions musicales, une remise en question de la forme elle-même. Ces questions restent d’actualité dans le monde d’aujourd’hui. J’ai été frappée à la première écoute de Lecture on Nothing par la pertinence du texte. C’est un travail enthousiasmant et magnifique à écouter. J’aime aussi la capacité de Cage de montrer dans son travail un grand sens de l’humour. Il était ainsi à l’opposé de l’élitisme et du cynisme froid du monde de la musique contemporaine. Le texte est une de mes bandes-son préférées pour accompagner le mouvement dans notre travail. Je pense qu’avec notre structure de mouvement parfois plutôt complexe, il y a là une libération du mouvement, de l’espace et de la scène. Le spectateur regarde un spectacle mais est aussi entraîné à l’écoute d’un texte. Le but n’est pas d’expliciter ce qui nous entendons mais plutôt de tenter d’établir des connections et parfois des recherches d’un aspect plus dissociatif. Dans Conférence sur Rien, nous nous exprimerons en effet sur le même sujet, à la fois sur le point de vue sonore et visuel, de manière à commenter le spectacle et le représenter – thème récurent dans l’histoire de Velvet dans des pièces telles que Display/Copy Only, où le sujet ou le thème est la danse, la chorégraphie et la représentation elle-même. Mon objectif n’est pas seulement de faire usage du texte de Cage, mais d’investiguer plus avant dans ses techniques et ses processus, de les appliquer directement à la réalisation de la pièce. On ne peut jamais isoler la fabrication d’une pièce du contexte de sa fabrication, de sa représentation. Tout cela devient partie du discours. Joanne Leighton 39 PERFORMANCE A POLE SUD SAMEDI 29 MAI / ENTRE 19.00 ET 21.00 / FRANCE / DUREE INDETERMINEE / GWENDOLINE ROBIN /////ECHELLE /////TERRITOIRE ///// Gwendoline Robin vit et travaille à Bruxelles où elle collabore avec de nombreux chorégraphes et metteurs en scène en tant que performeuse et plasticienne. Diplômée en Arts Plastiques, Gwendoline Robin s’oriente très vite vers l’installation éphémère et la performance autour du corps et des matériaux explosifs. Elle associe l’objet au corps et à l’espace pour créer des événements de plus en plus complexes, où elle affronte le danger et le feu de manière ludique et contrôlée. "Il y a dans le travail de Gwendoline Robin une immédiateté, un rapport à l’instant présent donné par la soudaineté de l’explosion, l’essence même du feu, l’évanescence de la fumée. On y est confronté à la surprise, à la peur, au danger, au soulagement, à l’émerveillement aussi, et à l’humour décalé que provoque l’artiste par la dérision." Tania Nasielski – Monographie d’artiste 00+7’ REPERES BIOGRAPHIQUES Artiste Belge, Gwendoline Robin est diplômée en Arts Plastiques à L’Ecole Nationale Supérieure des Arts Visuels de la Cambre à Bruxelles (1992). Depuis 1997, elle réalise des installations et performances autour du corps, de l’espace et des matériaux explosifs. Gwendoline Robin vit et travaille à Bruxelles. WWW.GWENDOLINEROBIN.BE Les Subsistance en flammes Gwendoline travaille depuis toujours avec les explosifs, les fumigènes, et divers artifices qui nécessitent un savoir-faire et une complète connaissance de la pyrotechnie. Avec la plus grande concentration, elle prépare son matériel bien avant son action, et surtout ne doit pas oublier de se protéger, c’est indispensable pour sa sécurité. L’artiste joue vraiment avec le feu. Ce processus peut déstabiliser, rien n’est totalement calé puisque tout peut exploser de façon aléatoire. Cela demande un don d’adaptation, c’est une recherche perpétuelle, un défi entre elle et le matériau et bien sûr la confrontation brutale des deux. Ce qui peut parfois occasionner de belles déceptions, de vilains hématomes, voire de cuisantes brûlures. Éternelle inquiéte, dans la conscience de l’hypothétique résultat final, celle qui doit tout prévoir, choisit de faire face à la possible imperfection que peut générer ce sacré challenge,… cela peut ne pas fonctionner, trop d’humidité ou une mauvaise connexion vont, par exemple, nuire au bon déroulement de la performance. Il est arrivé une fois que rien ne se soit passé, et cela peut se reproduire. L’artiste en a tiré la leçon et sait s’adapter. En accepter le risque aussi. Et, aux Subsistances, le déroulement des actions sera sans problèmes. L’audacieuse Gwendoline pendant ces trois jours laissera une trace insolite certainement plus (sur)prenante que ne le feront la plupart des spectacles présentés. (…) Territoire # 6899, sa dernière intervention, aura lieu en plein jour. Ce détail, non dénué d’intérêt, laisse voir la préparation de l’artiste et sa transmutation enlevant son côté spectaculaire. Comme un retour à l’essence même de la performance. Gwendoline a reproduit minutieusement la maquette des Subsistances en papier blanc. Elle verse autour un produit inflammable et revêt sa combinaison blanche, masque, lunettes et casque, le tout bardé d’explosifs. Ainsi prête, elle allume la mèche qui va peu à peu mettre le feu aux Subsistances, flammes et fumée s’élèvent. Fumigène aux pieds, l’artiste marche vers le dernier bâtiment demeuré intact. Sa combinaison flambe par endroits. Ainsi, symboliquement, elle ira l’incendier. Quelques minutes plus tard, elle dépose son casque noirci et son vêtement encore fumeux. De toute évidence, à travers ses doutes, Gwendoline prend la mesure de ses incertitudes, et, pour ne pas en perdre une étincelle, elle s’en sert pour trouver l’émulation nécessaire à la construction de son oeuvre. Sylvie Ferré, Blocs-Notes 280, Septembre 2009 40 DANSE A POLE SUD - STUDIO SAMEDI 29 MAI / 19.00 / SOLO / FRANCE / DUREE 40' / AUDE LACHAISE /////MARLON ///// Après avoir traversé les univers de chorégraphes tels que Félix Ruckert, Estzer Salomon, Olga Mesa ou Robyn Orlin, Aude Lachaise présente aujourd’hui sa première pièce et ose la forme du "one-woman show". Une pièce performative sur la question des femmes, du désir, de la sexualité, du travail et de l’intimité. Prenant appui sur le personnage mythique et inaccessible de Marlon Brando, Aude Lachaise parle de ce désir tout-puissant qui nous aliène et nous frustre comme support à une réflexion sur les rapports de pouvoir entre le désirant et désiré. Une pièce déclinée à la première personne, sur un ton libre et assumé. REPERES BIOGRAPHIQUES Aude Lachaise a suivi la formation Ex.erce en 2000. Depuis elle a travaillé comme danseuse performeuse pour Didier Théron, Laure Bonicel, Félix Rückert, Geisha Fontaine et Pierre Cotreau, Estzer Salamon, Nathalie Pernette, Kataline Patkaï, Robyn Orlin et Olga Mesa. Elle a joué dans la série de court-métrage du plasticien et photographe Noritoshi Hirakawa. Elle est aussi l’une des quatre chanteuses, performeuses, auteures compositrices, du fameux girls band les Vraoums. Aude Lachaise a un sacré culot. Pour son premier solo de chorégraphe, elle ne danse pas, ou si peu. Mademoiselle donne dans la conférence dansée, le one-woman show, le cours de philosophie. Pleine d'une tranquille inconscience, elle affronte les écueils tranchants de la gestuelle et de l'éloquence, et n'en sort pas totalement déchirée. Elle fait mentir outrageusement ceux qui pensent que les danseurs ne savent que danser et les bimbos que sourire. Elle sait parler et écrire, et avec un brio certain (avis aux éditeurs !). Aude est belle mais ne se tait pas. Enfin elle parle cul sans se mettre à poil. En danse contemporaine, une vraie provocation. Et se dévoile d'autant moins que, sous l'apparente confession, elle se cache. Cette midinette qui fantasme sur Brando, voudrait succomber au marlou Marlon ce n'est pas elle, au mieux qu'un grossier doublage. Et à qui s'adresse-t-elle dans cet incessant va-et-vient du tu au vous, est-ce à nous public, à un homme, à son homme, à une copine ? Tous à la fois, sans doute. Directe et stylée, sans doute belle amoureuse, et au dedans bouillante et survoltée, cette petite bonne femme en jupe et au texte bien troussé pratique l'humour de race. A coup sûr, Aude Lachaise a encore beaucoup à dire et à montrer. Jérome Delatour Aude Lachaise : un Marlon nommé désir C'est bien joué. Elle nous a pris à contrepied: ni bal, ni danse ni tango, ou si peu, et tant de mots. Au pied des lettres, a onewoman show. Pour aborder des sujets dont la danse parle souvent mais presque tout aussi souvent sans en parler vraiment: l'amour et le désir. "Sexe", "cul"... les mots crus sont lachés, avec toutes leurs sonorités. Savourés avec gourmandise, decortiqués, avec une naïveté feinte mais quand même désarmante. De quoi faire ensuite accepter de la lucidité à haute dose. Juste des mots joués: tout se tend et se developpe à partir de cette frustration initiale dont la danseuse s'amuse à nous distraire. Et y réussit. A force de pirouettes et reflets dans un oeil d'or. On écoute: seduit et agacé, amusé dans l'attente d'une danse qui ne vient toujours pas. Ou juste à l'improviste: à travers un self- portrait drolatique et pâmé d'Aude en Audition. Mais- rendons à Cesar ce qui est à Cesar- une fois le sujet bien posé, le corps revient dans le jeu, suit les mots, pour un traité des parties molles, une invitation à la contact improvisation. Texte et corps également maitrisés : deux visages de la séduction et un partout pour le score... La mayonnaise prend. Mais a-t'on parlé de Marlon Brando, sinon par allusion ? Ni Superman ni Don Juan, plutot son ombre, un invisible partenaire, nous sommes tous des Marlons. Guy Degeorges 41 DANSE A POLE SUD - PLATEAU SAMEDI 29 MAI / 20.30 / 4 INTEPRETES / MAROC / DUREE 55' / BOUCHRA OUIZGUEN CIE ANANIA /////MADAME PLAZA ///// Echouées là, quatre femmes s’étirent dans la lumière grise, roulent et tournent, allongées sur de vieux sofas, prolongeant des courbes de leurs bras le moment entre le jour et le sommeil. Atmosphère lourde et moite, langueur féminine savamment calculée, immobilisme hiératique, Madame Plaza de la chorégraphe marocaine Bouchra Ouizgen, nous ouvre les portes d’un univers âpre, fort et puissant, entre voix et corps. Au cœur du projet : les Aïtas, ces chanteuses de cabaret marocaines, dépositaires à la fois d’un art venu du fond des temps et femmes reniées par leurs familles pour avoir choisi cette voie. Les préjugés dont sont victimes ces artistes les ont mis dans une position paradoxale, à la fois objets d’admiration, de fascination et de rejet, leur art est souvent relégué au rang de folklore, dénigrant leur contemporanéité extraordinaire et leur immédiateté farouche. Bouchra Ouizgen chorégraphie avec audace ces quatre femmes tout en les accompagnant sur le plateau. Une rencontre exceptionnelle, une pièce dérangeante et émouvante. (…) "Quand elles jouent, je vois que nous ne sommes pas si éloignées dans notre quête de liberté. Leur langage - oralité, cri, nostalgie, et amour - est aussi le mien (…)." Bouchra Ouizgen REPERES BIOGRAPHIQUES Fondatrice, avec Taoufiq Izeddiou et Saïd Ait El Moumen, de ANANIA, première compagnie de danse contemporaine de Marrakech, Bouchra Ouizguen est l'une des plus célèbres ambassadrices de la scène chorégraphique marocaine. Formée auprès de grands noms de la danse comme Bernardo Montet, Georges Appaix, Salia Sanou, la jeune femme a notamment suivi les stages de Mathilde Monnier à Montpellier. Sous la direction artistique de cette dernière, Bouchra Ouizguen présente en 2002 le solo 'Ana Ounta', dans le cadre du projet 'Prière de regarder'. Le succès est au rendez-vous et son solo créé en 2005 'Mort et moi', est présenté à Marrakech, au Centre chorégraphique national de Tours, à la Fondation Cartier ainsi qu'au Festival Montpellier Danse. Même réussite pour 'Déserts, désirs', chorégraphié avec Taoufiq Izeddiou, présenté lors d'une tournée en 2006. Cherchant à renouer avec la danse et la culture traditionnelle de son pays, la chorégraphe s'inspire des Aïtas, danseuses et chanteuses de cabaret au Maroc, pour son spectacle 'Madame Plaza', monté en 2009. Rencontre entre le corps et le chant, réflexion sur la liberté et la féminité, cette pièce confirme la singularité du travail de Bouchra Ouizguen, qui s'inscrit entre tradition et modernité. Chorégraphie : Bouchra Ouizguen Interprètes et musique : Fatima El Hanna, Fatima Aït Ben Hmad, Naïma Sahmoud, Bouchra Ouizguen “Ahat” chanté et composé par Youssef El Mejjad Lumière : Hamid Fardjad Costumes : Nouredine Amir 42 CELA POURRAIT ETRE UNE CHAMBRE. OU LA SALLE D’UN CABARET APRES LA FERMETURE. IL S'APPELLE “MADAME PLAZA”, C'EST LE PLUS VIEUX CABARET DE MARRAKECH. Echouées là, quatre femmes s’étirent dans la lumière grise, roulent et tournent, allongées sur des lits, ou de vieux sofas, prolongeant des courbes de leurs bras le moment entre jour et sommeil. La nuit remue. Leurs mains accrochent le temps, leurs corps révèlent un monde où le regard s’abolit dans leur solitude d’après tout. Se cherchant l’une l’autre, leurs flancs se frôlent, leurs mains s’enlacent, esquissant des rencontres empreintes d’une sensualité furtive. Leurs gestes creusent le vide qui les enveloppe avant que leurs voix, soudain, n’ancrent ces corps dans le sol, ne les fassent surgir, indomptées, libres, fières. Prêtes à ravager la scène de leur existence, épaississant l’air qui les entoure d’un parfum charnel et capiteux par le chant qui soulève leurs gorges et pince le coeur. C’est en regardant un documentaire à la télévision que Bouchra Ouizguen a découvert les Aïta, ces chanteuses de cabaret, dépositaires à la fois d’un art venu du fond des temps et de l’histoire récente de son pays, le Maroc. Elle se lance alors dans une recherche pour retrouver ces femmes, libres, qui sont un peu l’équivalent des geishas japonaises, au chant puissant et séduisant. Madame Plaza est l’aboutissement de toute cette histoire, faite d’un lent processus pour trouver un langage entre voix et corps, où ces femmes, lourdes, lentes, magnifiques par la justesse de leurs gestes et la densité de leur présence, laissent librement leurs voix s’enfler dans les airs. Atmosphère lourde et moite, langueur féminine savamment calculée, immobilisme hiératique, Madame Plaza, de la chorégraphe marocaine Bouchra Ouizguen, propose un langage entre voix et corps qui se veut aussi un apprentissage de la liberté. Au cœur de ce projet : les "aïtas", ces chanteuses de cabaret marocaines, dépositaires à la fois d'un art venu du fond des temps et de l'histoire récente du Maroc, "des femmes d'une autre génération" nous dit Bouchra Ouizguen, qui ont choisi leur art au prix du reniement familial, des coups et des insultes parfois. Composées de chants, de clameurs, d'incantations et de danses, leurs performances suscitent adulation aussi bien que mépris et sont le plus souvent assimilées à du folklore. Une lecture à laquelle Bouchra Ouizguen ne souscrit pas : "Il est ici des femmes dérangeantes qui ne font pas de l'art contemporain, et il est faux de les enfermer dans un folklore car leur présence est profondément actuelle. Cela fait deux ans que je voyage au Maroc à la rencontre de ces femmes. Quand elles jouent, je vois que nous ne sommes pas si éloignées dans notre quête de liberté. Leur langage, oralité, cri, nostalgie, et amour est aussi le mien." Montpellier se pare de féminité Tendance majeure du début de l’édition 2009 : des œuvres avec ou autour des femmes. (…) Bouchra Ouizguen, chorégraphe marocaine de 29 ans. Sa pièce, Madame Plaza, est toute une aventure. Pendant trois ans, elle est partie à la rencontre de chanteuses et danseuses populaires qui accompagnent les fêtes, les mariages, et qui sont les héritières des aïtas, sortes de geishas nord-africaines. Danseuse orientale de 1995 à 2000, elle avait déjà eu l’occasion de les fréquenter, avant de se tourner vers la danse contemporaine, via une formation chez Bernardo Montet et Mathilde Monnier. Travestie. Sa démarche n’a donc rien de nostalgique, ou folklorisant. Avec trois divas, Fatima El Hanna, Fatima Aït Ben Hmad, Naïma Sahmoud, toutes la cinquantaine et encore dans le circuit cabaret de Marrakech, elle s’est mise à l’écoute. Tout est imposant dans son spectacle, ces corps qui ont de la bouteille et font face au public en pyjama. Le silence est chargé, lourd de conséquence. «Pendant le protectorat, explique Bouchra Ouizguen, ces femmes ont été parquées, mélangées avec les prostituées. Elles subissent régulièrement des injures et des coups ; certaines ont été rejetées par leur famille. Alors, elles font tout ce que l’on ne peut pas faire. C’est pour cela que j’ai toujours fréquenté les bars pourris, c’est un espace démocratique.» Cela se sent dans le spectacle, ce désir de liberté, cette complicité aussi, de femmes qui depuis longtemps luttent et dansent ensemble. Le personnage de la travestie qui adopte des attitudes d’homme, volontairement vulgaires, est des plus réussis. Sinon, la danse est calme, ample, secrètement et intimement gardée, même si toutes sont des bêtes de scène qui savent, par petits gestes et œillades, prendre le public aux couilles. Lorsque les voix s’élèvent a cappella, elles déchirent le silence. Avec juste trois matelas comme décor. Ouf ! On échappe aux gâteaux sucrés et au thé à la menthe. La gourmandise se déguste ici de manière plus secrète, jouissive aussi. Et tout se termine par un éclat de rire. (…) Marie-Christine Vernay, Libération, 25 juin 2009 43 44 INFO PRATIQUES BILLETTERIE ✿ Pôle Sud ✿ Boutique Culture ✿ Fnac - France Billet ✿ Kiosque Culture TARIFS De 5,5 à 19 euros. Différents tarifs réduits : forfait soirée, abonnement, adhérent Pôle Sud, chômeur, intermittent, cartes culture et atout voir, tarifs – de 16 ans. LOCATIONS – RESERVATIONS ✿ Par téléphone : 03 88 39 23 40 aux horaires de billetterie. ✿ Réservation par fax : 03 88 40 04 27 ✿ Réservation par e-mail : [email protected] ✿ Réservation directement sur notre site : www.pole-sud.fr RENSEIGNEMENTS Pôle Sud - 1 rue de Bourgogne - 67100 Strasbourg Tél : 03 88 39 23 40 - Fax : 03 88 40 04 27 - e-mail : [email protected] - www.pole-sud.fr LES LIEUX DU FESTIVAL ✿ Pôle Sud - 1 rue de Bourgogne, Strasbourg ✿ Le FRAC - 1 espace Gilbert Estève, route de Markolsheim, Selestat ✿ Le-Maillon - place de la Foire Exposition, Strasbourg ✿ Le MAMCS - 1 place Hans Jean Arp, Strasbourg ✿ Médiathèque André Malraux - Presqu'île André Malraux Strasbourg CONTACT PRESSE : PATRICIA JACOPIN TEL : 03 88 39 76 07 E-MAIL : [email protected] 45 46