LES VIRUS EN PATHOLOGIE APICOLE
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LES VIRUS EN PATHOLOGIE APICOLE
LES VIRUS EN PATHOLOGIE APICOLE Actuellement environ vingt espèces de virus pathogènes ont été identifiés dans les colonies d’abeilles mais le diagnostic des viroses au rucher et même au laboratoire est toujours assez délicat . Les virus existent souvent à l’état latent dans les colonies et c’est leur association avec d’autres facteurs qui déclenche la maladie virale et les mortalités dues aux virus sont souvent insidieuses. Quelques virus des abeilles : Abréviations Noms de ces virus ( anglais et français ) APV ou ABPV CPV ou CBPV SPBV SBV EgBV KBV ABV BBPV CWV DWV BQCV BXV BYV IBV Acute bee paralysis virus Chronic bee paralyssis virus Slow bee paralysis virus Sackbrod virus Egypt bee virus Kashmir bee virus Arkansas bee virus Berkeley bee picorna virus Cloudy wing virus Deformed wing virus Black queen cell virus Bee virus X Bee virus Y Irido bee virus Qu’est-ce qu’un virus ? Un virus est un agent infectieux de très petite taille, parasite obligatoire de la cellule. Il utilise pour se reproduire les composants de la cellule qu’il infeste. Les virus possèdent une structure définie avec ou sans enveloppe et un matériel génétique formé d’un seul acide nucléique. Multiplication d’un virus : le virus pénètre dans la cellule il libère son matériel génétique le matériel génétique est intégré aux chromosomes cellulaires les chromosomes multiplient le matériel génétique viral les nouveaux virus se constituent à l’intérieur de la cellule infestée les nouveaux virus s’échappent de la cellule ( qui généralement meure ) ces nouveaux virus parasitent d’autres cellules , … Quelques informations sur le virus de la paralysie aiguë des abeilles ou APV A.P.V. = Acute Paralysis Virus Ce virus a probablement toujours existé dans certaines colonies d’abeilles mais il se répand actuellement et provoque de graves pertes de colonies à cause des varroas . Symptômes : A.P.V. atteint les abeilles adultes ainsi que le couvain ( operculé ou non ). Les abeilles adultes atteintes quittent la ruche pour mourir, ce qui explique la dépopulation rapide et l’appellation « maladie de disparition ». En effet les ruches se vident de leurs abeilles et à l’intérieur il ne reste que quelques plaques de couvain et les provisions de pollen et de miel ( sauf si le pillage a déjà tout vidé ). Ce couvain présente quelques analogies avec les symptômes de loques ( couvain en mosaïque, larves mortes, opercules percés, … ) mais les analyses ne révèlent aucune présence de bactéries ( pas de Paenibacillus larvae ! ). A la fin de l’été ( août , septembre ) et en automne les colonies fortement atteintes meurent en une à trois semaines, d’autres meurent en hiver incapables de maintenir une température suffisante au sein de la grappe d’abeilles trop réduite. Au cours de la phase d’affaiblissement on peut constater que les abeilles ne défendent plus le trou de vol. A ce moment, par exemple les guêpes rentrent et sortent à leur guise. Dans ces conditions il n’est pas rare que le pillage se déclenche et que des butineuses récupèrent les réserves de miel et risquent ainsi de propager la maladie. Quelques données historiques : - En 1979 le virologue russe BATUEV a communiqué que l’A.P.V. était présent dans les abeilles mortes provenant de ruches varoasées. D’après ses expériences les abeilles mouraient en 2 à 3 jours après une phase de paralysie ( incapable de voler ) et les varroas observés sur les abeilles infestées artificiellement émigraient sur des abeilles saines dans les 24 heures. - Déjà en 1983 des prélèvements effectués au Japon et en Allemagne suite à l’effondrement de colonies ont montré que les varroas n’étaient pas seuls en cause mais qu’il y avait une association varroa-virus ( maladie intercurrente ).A.P.V. et C.P.V. ( Chronic Paralysis Virus ) ont été mis en évidence dans des colonies infestées par varroa mais d’apparence saines. L’effet létal dépend de la pénétration des virus dans l’hémolymphe où la multiplication est effective dans les cellules sanguines de l’abeille. Cette pénétration est possible grâce aux aux perforations des membranes intersegmentaires causées par les varroas. - En 1988 Mme BALL de la Station expérimentale de Rothamsted ( G.B.) confirme que les virus sont la cause majeure de la mortalité des abeilles adultes dans les colonies fortement infestées de varroas. Des expériences ont permis de montrer que l’injection de 100 virus A.P.V. dans des abeilles adultes ou des nymphes peut causer la mort en 4 jours. Par contre des abeilles d’été pouvaient contenir jusqu’à un million de varroas sans présenter de symptômes. Donc A.P.V. ne cause de dégats mortels que s’il s’installe dans des sites vitaux et s’y multiplie ( hémolymphe, système nerveux, glandes salivaires thoraciques, … ). Mme BALL a pu montrer que certains varroas renferment jusqu’à 10 milliard de virus. Or 100 virus injectés à une abeille sont suffisants pour causer sa mort. Que faire ? Il n’existe aucun traitement médicamenteux pouvant éliminer les virus ( les antibiotiques sont inefficaces ), il faut donc avant tout limiter le nombre de varroas dans les colonies. La période critique se situe à la fin de l’été et au début de l’automne car les surfaces de couvain diminuent mais le nombre de varroas augmente. Il faut intervenir ! A ce moment de la saison, après la dernière extraction et le retrait des hausses un traitement vétérinaire est nécessaire . L’introduction de deux inserts ou l’utilisation d’acides organiques ou d’huiles essentielles permet de traiter en présence de couvain. Bien sûr les nuclei peuvent être traité avant fin août, de même que les essaims que l’on peut déparasiter quelques jours après leur enruchement. On peut également mettre en œuvre des techniques biologiques ( découpe des cadres mâles, blocage de ponte, … ) et surveiller la chute naturelle des varroas à travers le fond grillagé pour intervenir à bon escient. Quelques informations sur le virus de la paralysie chronique des abeilles ou CPV C.P.V. = Chronic Paralysis Virus Ce virus est à l’origine de la maladie noire. Cette maladie cosmopolite est connue depuis longtemps sous différents noms ( mal de mai, mal des forêts, … ) C’est une maladie infectieuse, contagieuse, atteignant lies abeilles adultes. Elle est liée à la multiplication du CPV dans les tissus nerveux et l’intestin. Le système nerveux de l’abeille est composé d’un cerveau, de deux ganglions thoraciques, de cinq ganglions abdominaux et de nerfs. Symptômes : Les deux symptômes principaux sont : le tremblement des abeilles malades leur rejet devant la ruche Un diagnostic de laboratoire peut confirmer la présence des virus dans le corps des abeilles rejetées. La maladie noire peut se manifester cliniquement selon deux modes qui peuvent coexister : type 1 ( selon le Traité Rustica de l’Apiculture p. 108 ) On ne voit pas d’abeilles noires mais des abeilles incapables de voler, rampantes, présentant des tremblements saccadés des ailes et du corps. Devant les ruches on observe des milliers d’abeilles tremblantes et on constate le rejet de nombreux cadavres. Les colonies s’affaiblissent mais toutes ne meurent pas. On constate des guérisons spontanées et des améliorations en particulier après traitement antivarroa, mais la maladie peut aussi s’aggraver jusqu’à la perte de certaines colonies. type 2 Surtout au printemps ou après des récoltes importantes de miellat en forêt on observe des abeilles noires, polies, brillantes, dépilées, tremblantes et incapables de voler. Les abeilles mortes ont les ailes écartées et la langue en extension. Au trou de vol on constate que les abeilles saines chassent les abeilles malades. Expérimentalement CPV tue les abeilles en 8 jours après injection tandis que APV le fait en moitié moins de temps à cause de son taux de multiplication plus rapide. ( BALL 1988 ) Que faire ? On sait que les piqûres provoquées par les ponctions alimentaires des varroas sont une des sources de contamination et que les varroas eux mêmes sont des vecteurs de ce type de virus. Il n’existe aucun moyen vétérinaire d’éliminer les virus donc il faut avant tout limiter le nombre de varroas dans les colonies. D’autre part la prévention consiste à ne pas hiverner les colonies avec des provisions constituées de miellat. Par sélection des reines et des souches d’abeilles il faut essayer d’éliminer les colonies présentant une sensibilité à cette maladie. Quelques informations sur le virus des ailes déformées ou D.W.V. D.W.V. = Deformed Wing Virus On sait que le DWV persiste dans les colonies grâce à une infection latente sans signes cliniques. On a pu le retrouver dans des varroas dont l’action vectrice n’est plus à démontrer. Symptômes : Au cours des contrôles des colonies on observe la présence d’abeilles aux ailes déformées. Mais le virus associé au varroa cause aussi des mortalités de couvain, d’abeilles naissantes et d’abeilles adultes. Les abeilles malformées sont rapidement éliminées de la ruche par les abeilles saines. Dans le pire des cas l’action combinée virus-varroa peut aboutir à l’écroulement des colonies. Des analyses effectuées en Allemagne en 2003 ( Land HESSEN info MULLER ) ont montré que de multiples virus peuvent cohabiter au sein d’une même colonie. Il a ainsi été découvert 5 espèces de virus différents dans une colonie dont le DWV . Quelques informations sur le virus du Cachemire ou K.B.V. K.B.V. = Kashmir Bee Virus Ce virus a été isolé la première fois sur Apis cerena au Cachemire et depuis peu aux EtatsUnis et en Europe sur Apis mellifera. Sa propagation est vraisemblablement en relation avec les échanges apicoles. Attention aux importations d’abeilles ! Il serait, selon certains chercheurs, le virus de l’abeille le plus virulent en laboratoire. Il cause des mortalités importantes sans symptômes particuliers. Il est présent dans les abeilles de façon latente et provoque des troubles chez l’abeille adulte seulement s’il est associé à varroa ( d’après le Traité Rustica de l’Apiculture ) Quelques informations sur le virus du couvain sacciforme ou S.B.V. S.B.V. = Sackbrood Bee Virus Le couvain sacciforme est une maladie contagieuse du couvain . L’origine virale de cette maladie est connue depuis 1917. L’agent causal était d’abord appelé Murator acetulae . Symptômes : Les larves meurent dans les cellules . Ces larves mortes se présentent sous forme d’un petit sac rempli de liquide que l’on peut facilement extraire des cellules à l’aide d’une pincette. En général, c’est seulement une seule ou quelques colonies dans un rucher qui sont atteintes. Le couvain apparaît en mosaïque avec mortalité des larves avant et après operculation. Les larves, pleine de liquide, deviennent jaunes puis grises et enfin brunes dans leur partie céphalique. Le dessèchement progressif des larves aboutit à la formation d’une écaille incurvée en forme de barque. La maladie apparaît souvent au printemps, favorisée par de mauvaises conditions climatiques. Elle peut être associée à la loque européenne. Certaines souches d’abeilles seraient plus sensibles que d’autres à la virose. D’autre part le virus persiste dans les colonies, en dehors des phases d’évolution clinique et peut se multiplier chez les abeilles adultes sans signe visible. La dissémination des virus dans une ruche atteinte est le fait des abeilles nettoyeuses ou des nourrices. L’infection des larves se produit au début Que faire ? Souvent cette virose disparaît spontanément durant la miellée, sans aucune intervention de l’apiculteur. Par contre l’infection se développe si la colonie est fortement varroasée. Aucun traitement ne permet d’éradiquer la maladie. Seules des mesures générales, comme le changement de reine et le nourrissement, peuvent être envisagées. Comme pour les autres viroses il faut également maîtriser la lutte antivarroa .