contribution de caritas internationalis au synode des eveques sur la

Transcription

contribution de caritas internationalis au synode des eveques sur la

CONTRIBUTION
DE
CARITAS
INTERNATIONALIS
AU
SYNODE
DES
EVEQUES
SUR
LA
NOUVELLE
EVANGELISATION
POUR
LA
TRANSMISSION
DE
LA
FOI
2012
Siège social:
Palazzo della Tipografia, 00120 Cité du Vatican
Bureaux:
Palazzo San Calisto – 00120 Cité du Vatican
Tel: +39 06 698 79 799
Fax: +39 06 698 87 237
Email: [email protected]
Website: http://www.caritas.org
L’ACTION
CARITATIVE
ET
SOCIALE
DE
L’EGLISE,
DIMENSION
CONSTITUTIVE
DE
LA
NOUVELLE
EVANGELISATION
"Le
témoignage
de
la
charité
du
Christ,
à
travers
des
œuvres
de
justice,
de
paix
et
de
développement
fait
partie
de
l'évangélisation»1.
RESUME
Nous
sommes
préoccupés,
malgré
quelques
allusions
pleines
d'espoir
à
la
charité,
par
le
peu
d'attention
accordée
à
l'action
socio‐caritative
de
l'Église
dans
l'évangélisation
telle
que
présentée
dans
les
documents
préparatoires
du
Synode:
les
Lineamenta
et
l'Instrumentum
laboris.
Nous
constatons
que
n’y
est
pas
reflétée
la
place
du
service
de
la
charité
dans
le
contexte
et
le
processus
d'évangélisation
que
l'Église
est
appelée
à
mener
à
bien
et
qui
est
l’objet
de
ce
Synode.
Ce
manque
de
considération
pour
le
service
de
la
charité
nous
amène
à
exprimer
quelques
préoccupations
:
- Nous
savons
que
l'évangélisation
est
en
soi
œuvre
de
charité,
car
nous
reconnaissons
que
la
charité
ne
se
réduit
pas
à
l’action
socio‐caritative
de
l'Église,
mais
nous
souhaitons
que
ce
service
de
la
charité
soit
pris
en
considération
comme
élément
constitutif
de
la
mission
évangélisatrice
de
l'Eglise.
- La
crise
de
crédibilité
de
l'Église
et,
par
conséquent,
la
faiblesse
de
sa
mission
dans
la
société
actuelle,
est
un
fait.
Des
enquêtes
nous
disent
que
les
gens
ne
mettent
pas
leur
confiance
en
l'Eglise
des
vérités,
de
l'orthodoxie.
Par
contre,
les
institutions
ecclésiales
dédiées
à
la
«
diaconie
de
la
charité
»
suscitent
la
confiance.
Comme
si
la
diaconie
de
la
foi
était
différente
de
la
diaconie
de
la
charité.
La
nouvelle
évangélisation
doit
permettre
de
voir
qu'il
s'agit
d'une
seule
diaconie
aux
deux
visages.
Plus
encore,
la
diaconie
de
la
charité
devrait
être
le
moteur
de
la
mission,
la
porteuse
de
la
vision.
- Si
le
service
de
la
charité
n'est
pas
considéré
comme
évangélisateur
et
n'entre
pas
dans
la
réflexion
du
Synode
comme
élément
constitutif
de
l'évangélisation,
l'évangélisation
s’appauvrit
et
le
service
caritatif
est
déformé
et
se
réduit
à
une
conséquence
éthique
de
l'Évangile
et
à
une
tâche
assistantielle.
- Les
documents
présinodaux
ne
reflètent
pas
adéquatement
l'enseignement
du
magistère
pontifical
sur
le
sujet.
Ils
ne
reflètent
pas
l'enseignement
de
Benoît
XVI
qui
nous
offre
des
affirmations
claires
et
lumineuses
sur
la
dimension
évangélisatrice
du
service
de
la
charité
qui
ne
peuvent
être
ignorées.
Ils
ne
reflètent
pas
non
plus
des
affirmations
claires
du
Président
du
Conseil
pontifical
pour
la
Nouvelle
Evangélisation.
1
Benoït
XVI,
encyclique
Caritas
in
veritate,
2009,
n°15
-
-
-
Si
ces
lacunes
étaient
maintenues
au
Synode,
un
Synode
consacré
à
l'évangélisation
dans
toutes
ses
dimensions
–
et
non
seulement
à
la
catéchèse,
à
l'éducation
ou
à
la
pastorale
familiale,
nous
perdrions
une
occasion
unique
de
donner
à
la
charité
la
place
qui
lui
revient
dans
la
mission
évangélisatrice
de
l'Eglise
et
d’apporter
à
l’annonce
de
l'Evangile
la
signification
et
la
crédibilité
dont
elle
a
besoin.
Il
ya
beaucoup
de
chrétiens
dans
le
monde
qui,
comme
bénévoles
ou
salariés
engagés,
offrent
leur
vie
et
leur
contribution
à
l'Eglise
à
travers
des
institutions
et
des
œuvres
caritatives.
L’Eglise
perdrait
un
grand
potentiel
pour
l'évangélisation
si
elle
n’envisageait
pas
son
engagement
social
comme
un
véritable
instrument
d'évangélisation
et
si
elle
ne
leur
donnait
pas
de
messages
de
reconnaissance,
d’orientation
et
d'encouragement
à
ce
service.
Et
serait
perdue
une
occasion
unique
d'améliorer
et
de
renforcer
l’ecclésialité
de
Caritas
et
des
institutions
de
l’Eglise
dédiées
à
la
charité,
car
le
chemin
pour
renforcer
l’ecclésialité
de
l’action
socio‐caritative
consiste
à
donner
à
la
charité
la
place
qui
lui
revient
dans
la
mission
évangélisatrice
de
l'Église
et
dans
les
structures
pastorales
de
la
communauté
chrétienne.
Prenant
tout
cela
en
compte
et
pour
renforcer
le
dynamisme
de
la
nouvelle
évangélisation,
nous
voulons
faire
au
Synode
quelques
propositions
:
1. Présenter
l’action
socio‐caritative
de
l'Église
comme
une
dimension
constitutive
de
l'évangélisation.
2. Reconnaître
le
rôle
central
de
la
diaconie
de
la
charité
comme
un
moyen
privilégié
d'évangélisation.
3. Miser
sur
une
ecclésiologie
de
la
charité
qui
évangélise
du
social
dans
le
social.
4. Considérer
l'importance
de
l'exercice
organisé
de
la
charité
dans
le
témoignage
évangélisateur
de
l'Église.
5. Valoriser
comme
acteurs
de
l'évangélisation
ceux
qui
exercent
le
ministère
de
la
charité.
6. Animer
la
spiritualité
exigée
par
l'exercice
de
la
charité
pour
qu’elle
soit
évangélisatrice.
7. Clarifier
le
fait
que
proclamer
l'Evangile
dans
l'exercice
de
la
charité
n'est
pas
faire
du
prosélytisme.
La
question
fondamentale
dans
la
nouvelle
évangélisation
n'est
pas
seulement
de
savoir
comment
annoncer
l'Evangile,
mais
de
nous
demander
si
l'Évangile
que
nous
annonçons
est
bonne
nouvelle
pour
les
pauvres,
et
si
nous,
comme
Église,
rendons
crédible
cet
Evangile.
La
diaconie
de
la
charité
doit
être
le
moteur
de
la
mission
et
le
signe
de
sa
crédibilité.
Introduction
La
lecture
des
Lineamenta
puis
de
l'Instrumentum
laboris
sur
«
La
nouvelle
évangélisation
pour
la
transmission
de
la
foi
catholique
»
que
nous
offre
la
XIIIème
Assemblée
Générale
Ordinaire
du
Synode
des
Évêques
nous
fournit
des
allusions
nombreuses
et
pleines
d’espérance
sur
l’importance
du
témoignage
de
la
charité
pour
la
mission
évangélisatrice
de
l'Eglise
dans
le
contexte
culturel,
social
et
religieux
actuel.
Dans
le
n°
7
de
l’Instrumentum
Laboris,
il
est
écrit
que
dans
le
3ème
chapitre
on
fait
une
analyse
des
lieux,
sujets,
instruments
et
actions
à
travers
lesquels
la
foi
est
transmise,
et
on
parle
concrètement
de
trois
:
la
liturgie,
la
catéchèse,
la
charité.
Dans
le
n°
71,
on
reconnaît
que
«
quelques
réponses
(aux
Lineamenta)
ont
demandé
que
soit
davantage
soulignée
la
charité
comme
instrument
d’évangélisation
»
et
que
«
le
dévouement
et
la
solidarité
avec
les
pauvres
vécus
par
de
nombreuses
communautés
(…)
sont
vraiment
un
instrument
valide
pour
annoncer
l’Evangile
».
Il
est
même
écrit
dans
le
n°
124
que
«
la
charité
est
le
langage
de
la
nouvelle
évangélisation,
qui
mieux
qu’en
paroles
s’exprime
dans
des
œuvres
de
fraternité,
de
proximité
et
d’aide
aux
personnes
qui
ont
des
besoins
spirituels
et
matériels
».
Qui
plus
est,
en
se
référant
à
des
mots
de
Caritas
in
Veritate,
il
est
dit
dans
l'Instrumentum
laboris,
au
n°
130,
que
«
le
témoignage
de
la
charité
du
Christ,
à
travers
des
œuvres
de
justice,
de
paix
et
de
développement
fait
partie
de
l'évangélisation,
parce
que
Jésus­Christ,
qui
nous
aime,
s’intéresse
à
l'homme
tout
entier.
Ces
enseignements
importants
fondent
l'aspect
missionnaire
de
la
doctrine
sociale
de
l'Église,
comme
un
élément
essentiel
de
l'évangélisation.
Il
est
annonce
et
témoignage
de
la
foi.
Il
est
instrument
et
socle
indispensable
de
la
formation
dans
la
foi
».
Il
est
aussi
écrit
:
«
Ce
sont
des
questions
qui
doivent
être
approfondies
dans
la
nouvelle
évangélisation
».
Cependant,
après
avoir
lu
ces
documents,
les
références
à
la
charité,
isolées
et
diluées,
et
le
manque
d’approfondissement
de
l'importance
et
du
sens
de
la
charité
dans
la
nouvelle
évangélisation
nous
laissent
des
sentiments
mitigés
que
nous
voulons
partager
et
qui
nous
conduisent
à
oser
présenter
quelques
apports
complémentaires.
1.
QUELQUES
PREOCCUPATIONS
SOULEVEES
PAR
LES
LINEAMENTA
ET
L’INSTRUMENTUM
LABORIS
Nous
partons
du
principe
que
la
charité
dans
la
vie
chrétienne
et
ecclésiale
est
plus
que
l’action
socio‐caritative
de
l’Eglise.
Toute
évangélisation
est
une
expression
de
l'amour
de
notre
Dieu.
C’est
par
amour
que
Dieu
nous
a
envoyé
Jésus,
l'Evangile
de
Dieu.
C’est
par
amour
qu’il
continue
de
rendre
présente
la
bonne
nouvelle
de
l'Evangile
par
l'action
du
Saint
Esprit.
C’est
par
amour
que
l’Eglise
continue
d’annoncer,
de
célébrer
et
de
rendre
présente
l’action
salvatrice
de
Dieu
dans
l'histoire.
Dans
ce
sens,
la
charité
est
le
moteur
de
l'évangélisation
et
s’exprime
dans
l'annonce,
la
célébration,
en
particulier
dans
l'Eucharistie,
et
dans
le
service
aux
pauvres.
Cependant,
nous
pensons
nécessaire
une
plus
grande
attention
au
rôle
évangélisateur
de
l’action
socio‐caritative
de
l’Eglise
et
à
la
place
essentielle
que
l'exercice
de
la
charité
doit
également
occuper
dans
l’annonce
même
de
la
Parole
et
dans
la
célébration
de
la
foi,
car
la
Parole
sans
la
charité
sonne
creux
(cf.
1
Co,
13,1‐13)
et
la
célébration
qui
n'implique
pas
l'exercice
pratique
de
la
charité
est
«
fragmentaire
»,
comme
le
dit
Benoît
XVI2,
et
même
«
scandaleuse
»,
selon
Paul
(cf.
1
Co,
11,
21).
Nous
pensons
également
nécessaire
de
faire
mûrir
dans
le
Peuple
de
Dieu
la
conscience
de
la
force
révélatrice
du
mystère
de
Dieu
qui
contient
la
charité,
ainsi
que
de
révéler
la
force
révélatrice
de
son
action
salvatrice
dans
l'histoire,
car
c'est
l'amour
qui
sauve3.
«
Tu
vois
la
Trinité
si
tu
vois
l'amour
»,
dit
saint
Augustin.
Dieu
se
révèle
comme
amour
et
dans
l'amour,
nous
dit
Saint
Jean
(cf.
1
Jn
4,
8).
Benoît
XVI
nous
dit
que
lorsque
n'est
pas
possible
l'annonce
explicite
de
Jésus
Christ,
«
nous
devons
laisser
l'amour
parler
»4.
De
cette
optique
de
base
et
de
la
place
accordée
à
l'exercice
de
la
charité
dans
les
documents
présinodaux,
nous
voulons
exprimer
quelques
préoccupations
:
1. Nous
avons
l'impression
que
l'exercice
de
la
charité
n'est
pas
suffisamment
pris
en
compte
ni
valorisé
comme
un
élément
essentiel
et
constitutif
de
l'évangélisation,
comme
le
souligne
Benoît
XVI
dans
ses
encycliques.
En
fait,
malgré
qu’il
y
soit
fait
référence
à
plusieurs
reprises,
il
n’est
jamais
traité
et
développé
de
manière
explicite.
Par
exemple,
quand
on
parle
de
Jésus
évangélisateur
(Ch.
1),
on
ne
parle
pas
de
l'option
préférentielle
pour
les
pauvres
ni
de
son
action
avec
les
pauvres
comme
signe
de
son
identité.
Et
quand
on
parle
des
instruments
de
l'évangélisation
(Ch.
3),
on
parle
de
la
catéchèse,
de
la
famille,
de
la
liturgie,…
mais
la
charité
est
à
peine
mentionnée.
2. On
ne
donne
pas
à
la
charité
la
centralité
qu’elle
doit
avoir
dans
l'évangélisation.
La
crise
de
crédibilité
de
l'Église
et,
par
conséquent,
la
faiblesse
de
sa
mission
dans
la
société
d'aujourd'hui,
est
un
fait.
Des
enquêtes
nous
disent
que
les
gens
ne
mettent
pas
leur
confiance
en
l'Eglise
des
vérités
et
de
l'orthodoxie.
Par
contre,
les
institutions
ecclésiales
dédiées
à
la
«
diaconie
de
la
charité
»
suscitent
la
confiance.
Comme
si
la
diaconie
de
la
foi
était
différente
de
la
diaconie
de
la
charité.
La
nouvelle
évangélisation
doit
permettre
de
voir
qu'il
s'agit
d'une
seule
diaconie
aux
deux
visages.
Plus
encore,
la
diaconie
de
la
charité
devrait
être
le
moteur
de
la
mission,
la
porteuse
de
la
vision
et
le
lieu
où
est
enseigné
le
message
chrétien
de
manière
pratique.
La
«
Caritas
»
devient
ainsi,
dans
une
véritable
perspective
théologique,
une
clé
pour
comprendre
notre
foi,
notre
morale
et
notre
mission
évangélisatrice.
3. L'exercice
organisé
de
la
charité
n’est
pas
non
plus
suffisamment
pris
en
compte
comme
canal
privilégié
d'évangélisation
dans
cette
culture
sécularisée,
en
particulier
pour
les
nombreux
hommes
et
femmes
non
croyants.
Qui
plus
est,
il
n’est
même
pas
2
Ibid
n°
14
3
Benoît
XVI,
Encyclique
Spes
Salvi,
2006,
n°
26
4
Benoït
XVI,
Encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
31c
question
de
l'exercice
de
la
charité
organisée,
qu’il
s’appelle
Pastorale
Sociale,
Caritas,
Secours
Catholique
ou
autres
qui
sont
l’expression
organisée
de
l'exercice
de
la
charité
dans
les
Églises
particulières.
4. Parmi
les
scénarios
d’évangélisation
présentés
se
trouvent
les
migrations,
le
monde
économique
et
le
politique,
avec
d'évidentes
implications
sociales,
ainsi
que
les
médias
sociaux
et
le
champ
de
la
recherche
scientifique
et
technologique,
mais
nous
considérons
qu'il
est
nécessaire
d'élargir
le
spectre
à
un
scénario
spécifique
aux
graves
problèmes
sociaux
du
moment.
Car
c’est
là
que
se
vivent
la
plupart
des
drames
humains,
c’est
de
là
que
surgissent
les
questions
majeures
pour
la
foi,
c’est
là
où,
selon
les
mots
du
Pape,
se
manifeste
l’«
anesthésie
sociale
»5
qui
nous
rend
insensibles
aux
exigences
de
l'amour
fraternel.
S’il
faut
évangéliser
à
partir
des
défis
socioculturels
auxquels
nous
sommes
confrontés,
comme
on
le
dit
dans
ces
documents,
c’est
la
pauvreté
et
l'injustice
qui
la
crée
qui
sont
l’un
des
plus
grands
défis.
Et
c’est
dans
l'exercice
de
la
charité
que
se
vérifie
l'authenticité
de
la
foi
que
nous
professons
et
annonçons.
C’est
pour
cela
qu’il
nous
paraît
nécessaire
d’entrer
dans
le
scénario
de
la
réalité
sociale,
de
la
pauvreté
et
des
causes
qui
la
génèrent,
comme
scenario
important
de
la
nouvelle
évangélisation,
parce
que
la
charité
commence
par
ouvrir
les
yeux
sur
les
autres
et
prendre
en
charge
les
autres,
ceux
qui
sont
poussés
sur
le
bord
du
chemin
et
les
mendiants
aux
pieds
des
tables
des
Epulons,
comme
nous
l’a
rappelé
avec
une
clarté
éloquente
Benoît
XVI6.
5. Dans
l’exercice
de
la
charité,
nous
devons
accorder
une
attention
particulière
à
trois
éléments
:
l'animation
de
la
charité
dans
la
communauté
chrétienne,
l'importance
de
l’exercice
organisé
de
la
charité
et
le
témoignage
évangélisateur
de
ceux
qui
consacrent
leur
vie
dans
l'Église
au
service
des
pauvres.
Dans
les
documents
présentés
par
le
Secrétariat
du
Synode
(les
Lineamenta
et
l'Instrumentum
laboris),
il
est
fait
de
fréquentes
allusions
à
l'amour
fraternel,
à
l’attention
aux
pauvres,
à
l'importance
du
témoignage,
à
la
nécessité
pour
l'Église
d’annoncer
ce
qu'elle
est
et
ce
qu’elle
vit.
Mais
aucune
référence
n'est
faite
à
l'exercice
organisé
de
la
charité,
comme
si
la
charité
était
une
question
individuelle,
et
non
une
tâche
de
l'ensemble
de
la
communauté,
comme
si
ce
n’était
pas
la
mission
de
toute
la
communauté
de
proclamer
l'évangile
à
partir
de
l'expérience
de
la
charité.
On
parle
aussi
de
la
catéchèse,
de
la
première
annonce,
des
sacrements
de
l'initiation,
de
l'éducation,
de
la
famille,
etc.
comme
moyens
nécessaires
d'évangélisation
à
prendre
en
considération.
Mais
on
ne
parle
pas
de
la
charité
de
la
communauté,
de
l'exercice
organisé
de
la
charité,
comme
canal
privilégié
et
dans
certains
contextes
quasi
unique,
pour
rendre
présentes
l’annonce
de
l'Evangile
et
l'expérience
chrétienne
de
la
foi.
De
la
même
manière,
il
n’est
jamais
fait
allusion
aux
travailleurs
de
la
charité,
aux
bénévoles
comme
aux
employés,
comme
évangélisateurs
au
nom
de
la
communauté.
5
Benoît
XVI,
Message
de
Carême
2012
«
soyons
attentifs
les
uns
aux
autres
pour
nous
inciter
à
l'amour
et
aux
bonnes
œuvres
»
(Héb.
10,
24)
6
Ibid.
6. La
charité
n’est
pas
prise
en
considération
comme
critère
de
crédibilité
pour
l'Eglise
dans
sa
mission
d'annoncer
l'Evangile,
bonne
nouvelle
pour
les
pauvres.
Nous
sommes
appelés
à
rechercher
des
«
parvis
des
gentils
»
ou
des
«
déserts
»
où
la
Parole
se
fait
non
seulement
audible,
mais
significative
et
salvatrice
pour
l'humanité.
Nous
croyons
que
l'un
des
parvis
des
gentils
ou
un
des
déserts
où
la
Parole
est
la
plus
audible,
la
plus
crédible
et
salvatrice
est
pour
l'Eglise
le
domaine
de
la
pauvreté.
Quand
l'Église
se
rend
présente
à
travers
l'exercice
de
la
charité,
sa
Parole,
et
lorsque
la
Parole
ne
peut
être
proclamée,
son
action
silencieuse,
devient
audible,
crédible
et
salvatrice
pour
l'humanité.
C’est
pourquoi
nous
estimons
qu'il
est
nécessaire
pour
l'évangélisation
de
renforcer
l’animation
de
la
charité
dans
la
communauté
et
l'exercice
organisé
de
la
charité
comme
critère
de
crédibilité.
2. QUELQUES
CONTRIBUTIONS
POUR
RECONNAITRE
ET
RENFORCER
LE
DYNAMISME
EVANGELISATEUR
DE
LA
CHARITÉ
A
partir
des
préoccupations
ci‐dessus,
nous
avons
quelques
propositions
à
présenter
concernant
l'exercice
de
la
charité
dans
l'évangélisation,
dont
nous
pensons
qu'il
faudrait
leur
accorder
plus
d'attention
et
de
considération
dans
les
délibérations
du
Synode.
2.1. Présenter
l’action
caritative
de
l'Église
comme
dimension
constitutive
de
l'évangélisation
Le
Synode
de
1971
nous
a
dit
très
clairement
que
«
l'action
pour
la
justice
et
la
participation
à
la
transformation
du
monde
nous
apparaissent
clairement
comme
une
dimension
constitutive
de
la
prédication
de
l'Evangile
»7.
De
la
même
manière,
le
Synode
de
1974
quand
il
parle
de
l’exercice
de
la
charité
et
du
travail
pour
la
justice
nous
a
dit
que
«
ils
ne
sont
pas
seulement
cause
de
crédibilité
pour
l'Eglise,
mais
qu’ils
sont
partie
intégrale
de
l'évangélisation
»8.
Benoît
XVI
nous
dit
que
c'est
un
service
qui
appartient
à
la
nature
même
de
la
communauté
chrétienne
:
«
La
nature
profonde
de
l'Église
s'exprime
dans
une
triple
tâche
:
l’annonce
de
la
Parole
de
Dieu
(kerygma­martyria),
la
célébration
des
sacrements
(leiturgia)
et
le
service
de
la
charité
(diakonia).
Ce
sont
trois
tâches
qui
s'appellent
l'une
l'autre
et
sont
inséparables
les
unes
des
autres.
Pour
l'Eglise,
la
charité
n'est
pas
une
sorte
d'activité
d'assistance
sociale
qu'on
pourrait
aussi
laisser
à
d'autres,
mais
elle
appartient
à
sa
nature
et
est
une
expression
incontournable
de
son
être
même
»9.
Le
Président
du
Conseil
Pontifical
pour
la
Promotion
de
la
Nouvelle
Evangélisation
nous
dit,
lui
aussi,
que
«
un
domaine
particulier
de
la
nouvelle
évangélisation
est,
sans
aucun
doute,
celui
de
la
charité
»,
où
de
nombreux
hommes
et
femmes,
fidèles
à
l’Esprit,
présentent
de
multiples
signes
concrets
qui
rendent
«
visible
»
et
«
actuelle
»
7
Synode
des
Evêques,
La
justice
dans
le
monde,
1971,
Introduction
8
Synode
des
Evêques,
L’évangélisation
dans
le
monde
moderne,
1974
9
Benoît
XVI,
Encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
25
la
Parole
du
Seigneur
et
offrent
un
témoignage
«
dans
lequel
se
joue,
de
fait,
sa
crédibilité
dans
ce
qui
constitue
le
cœur
même
de
l’annonce
:
l’amour
»10.
Si
la
charité
est
constitutive
de
la
nature
de
l'Église
et
de
sa
mission
d'évangélisation,
et
est
un
champ
propre
de
la
nouvelle
évangélisation,
on
ne
peut
pas
la
prendre
en
compte
seulement
de
manière
anecdotique
dans
la
réflexion
sur
la
nouvelle
évangélisation.
Elle
devrait
avoir
une
considération
et
un
traitement
spécifiques
dans
son
étude.
2.2. Reconnaître
la
centralité
de
la
diaconie
de
la
charité
comme
un
moyen
privilégié
d'évangélisation
«
Voyez
comme
ils
s’aiment
!
»11.
Ces
paroles
mises
par
Tertullien
dans
la
bouche
des
ennemis
de
l'Église
restent
pleinement
d’actualité
aujourd'hui.
Malgré
les
changements
et
les
transformations
sociales
et
culturelles
que
vit
notre
monde,
le
témoignage
de
l'amour
gratuit,
du
service
désintéressé,
reflet
de
Dieu
Amour
que
l'Eglise
offre
en
Jésus
Christ
et
par
la
puissance
de
l'Esprit,
ce
témoignage
est
un
moyen
privilégié
d'évangélisation.
Il
faut
se
rappeler
qu'il
n'y
a
pas
de
proclamation
de
Jésus
Christ
si
nous
ne
sommes
pas
des
témoins
transparents
de
son
amour
fidèle,
dans
l'esprit
du
Bon
Samaritain,
c'est
à
dire
en
regardant
avec
une
attention
solidaire
les
blessés
et
les
rejetés
au
bord
de
la
route
de
la
marginalisation,
en
les
accueillant,
les
soignant
et
leur
offrant
l'auberge
d'une
communauté
qui
les
aide
à
sortir
de
leur
situation.
À
cet
égard,
nous
apprécions
l'affirmation
fondamentale
faite
au
n°
130
de
l'Instrumentum
laboris,
dont
nous
avons
déjà
parlé
:
«
Le
témoignage
de
la
charité
du
Christ
à
travers
des
œuvres
de
justice,
de
paix
et
de
développement
fait
partie
de
l'évangélisation
(...).
Il
est
annonce
et
témoignage
de
la
foi.
Il
est
un
instrument
et
une
source
indispensables
pour
la
formation
dans
la
foi.
Ce
sont
des
questions
qui
doivent
être
approfondies
dans
la
nouvelle
évangélisation
».
Nous
croyons
que
le
développement
de
ce
principe
intéressant
est
très
limité
et
nous
proposons
que
le
Synode
approfondisse
la
question
de
la
charité
comme
vecteur
essentiel
et
privilégié
de
la
nouvelle
évangélisation.
Ou,
en
d'autres
termes,
que
«
la
charité
soit
davantage
prise
en
compte
comme
instrument
de
la
nouvelle
évangélisation
»,
ainsi
qu’il
est
indiqué
dans
le
n°
71,
ce
qui
ensuite
n’est
pas
repris.
La
communauté
ecclésiale
doit
être
un
lieu
où
«
Jésus
peut
être
vécu
à
notre
époque
»12.
Si
nous
sommes
son
corps
et
qu’il
est
la
tête
(Col.
1,18),
Jésus
doit
pouvoir
vivre
en
nous.
Sa
mission
devrait
se
refléter
dans
la
nôtre.
Et
la
mission
de
Jésus
était,
avant
tout,
la
diaconie
de
l'amour
envers
les
plus
démunis
:
«
Je
suis
venu
pour
qu'ils
aient
la
vie
et
qu'ils
l'aient
en
abondance
»
(Jn
10,10).
La
diaconie
de
la
foi
doit
être
de
cette
«
foi
opérant
dans
l'amour
»
(Gal.
5,6).
Les
œuvres
de
miséricorde
et
de
justice
rendent
crédibles
la
vie
et
le
message
(Mt
24,1
à
10
Rino
Fisichella,
La
nouvelle
évangélisation,
Santander,
2012,
pp.
68
et
69
11
Apologiste,
39,
7,
CCL
151
12
Expression
du
Cardinal
Rodriguez
Maradiaga,
Président
de
Caritas
Internationalis
25,46).
Le
témoin
devient
crédible
par
sa
gratuité
:
«
ce
que
vous
avez
reçu
gratuitement,
donnez
le
gratuitement
».
La
charité
de
Jésus
n'a
pas
de
frontières,
c’est
pour
cela
qu’elle
est
missionnaire,
incluante,
dialoguante.
Dans
le
domaine
de
la
diaconie
de
la
charité,
l’attention
missionnaire
au
monde
de
la
douleur,
la
maladie
et
la
souffrance
occupe
une
place
toute
particulière.
Et
une
vraie
évangélisation
intégrale
nécessite
de
proclamer
le
commandement
nouveau
dans
la
promotion
du
développement
humain
intégral
et
de
la
justice
et
de
la
paix.13
2.3. Miser
sur
une
ecclésiologie
de
la
charité
qui
évangélise
depuis
le
social
dans
le
social
La
tâche
de
rendre
présente
la
bonne
nouvelle
de
l'Evangile
à
travers
l'exercice
de
la
charité
est
quelque
chose
qui
appartient
à
l'Eglise
tout
entière
et
à
tous
dans
l'Église.
L'expérience
et
le
témoignage
de
l'amour
n'est
pas
optionnel
ou
marginal,
mais
un
élément
central
de
la
foi
que
l'Eglise
vit
et
transmet.
Il
s'agit
d'une
dimension
essentielle,
constitutive
de
notre
vie
chrétienne
et
ecclésiale,
responsabilité
de
chacun
d'entre
nous
et
de
la
communauté
tout
entière.
C'est
ainsi
que
le
dit
Benoît
XVI
:
«
L'amour
du
prochain,
enraciné
dans
l'amour
de
Dieu
est
avant
tout
une
tâche
pour
chaque
fidèle,
mais
elle
l’est
aussi
pour
toute
la
communauté
ecclésiale
...
L'Église
en
tant
que
communauté
doit
mettre
l'amour
en
pratique
»14.
Il
ajoute
:
«
lorsque
l'activité
caritative
est
assumée
par
l'Église
comme
initiative
communautaire,
la
spontanéité
de
l'individu
doit
être
associée
à
la
planification,
la
prévision,
la
collaboration
avec
d'autres
institutions
»15.
L'amour
est
avant
tout
une
tâche
pour
chaque
fidèle.
Elle
nous
revient
à
nous
tous
à
cause
de
notre
identité
chrétienne.
Mais
la
charité
est
la
tâche
de
toute
la
communauté.
Et
une
Église
de
la
charité
est
une
Eglise
qui
se
sent
messagère
de
l'amour
de
Dieu
pour
tous
les
hommes.
Mais
elle
a
des
destinataires
préférentiels
établis
selon
la
façon
d’agir
de
Dieu
manifesté
en
Christ.
Ces
destinataires
préférentiels
sont
les
pauvres.
L'Église,
comme
Jésus,
a
été
envoyée
pour
évangéliser
les
pauvres.
C'est
ce
que
dit
l'Évangile
de
Jésus
et
l'Église
l’a
aussi
reconnu
pour
elle‐même16.
Proclamer
Jésus‐
Christ
est
le
plus
grand
service
que
l'Eglise
peut
rendre
aux
hommes,
à
tous
les
hommes,
ceux
d’aujourd’hui
et
ceux
de
toujours.
Et
cette
annonce
de
Jésus‐Christ
Sauveur
doit
être
dirigée
d'une
manière
privilégiée
vers
les
pauvres.
Cependant,
ceci
n'est
pas
toujours
exprimé
clairement
et
quand
cela
se
fait,
cela
n’est
pas
toujours
assumé
comme
responsabilité
de
toute
la
communauté.
Nous
devons
reconnaître
que
l'option
préférentielle
pour
les
pauvres
n'a
pas
vraiment
été
assumée
par
la
communauté
chrétienne
dans
son
ensemble,
de
sorte
qu'il
n’y
a
pas
de
participation
suffisante
des
fidèles
dans
les
diverses
actions
socio‐caritatives
qui
13
Paul
VI,
lettre
apostolique
Evangelii
Nuntiandi,
1975,
n°
31
;
Jean
Paul
II,
encyclique
Centesimus
Annus,
1991,
n°
58
14
Benoît
XVI,
encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
20
15
Ibid.
n°
31b
16
Lc
4,18
;
Lumen
Gentium
nn.
8.23.41.42
paraissent
alors
non
pas
comme
des
options
ecclésiales
mais
des
engagements
de
certains
groupes
ou
individus
qui
ont
un
attachement
particulier
à
ces
questions.
Dans
un
Synode
sur
l'évangélisation,
il
est
nécessaire
d'affirmer
clairement
que
:
- nous
sommes
une
Eglise
sacrement
de
communion
des
hommes
avec
Dieu
et
de
tous
les
hommes
entre
eux
- nous
sommes
une
Eglise
envoyée
pour
évangéliser
les
pauvres
- nous
sommes
appelés
à
nous
laisser
évangéliser
par
les
pauvres
- les
pauvres
doivent
trouver
une
place
privilégiée
dans
l'Eglise
- l'Eglise
doit
être
une
Eglise
pauvre
et
pour
les
pauvres
Les
pauvres
interpellent
l'Église
en
permanence
l'invitant
à
se
laisser
convertir
et
évangéliser
elle‐même.
Dieu
parle
à
l'Eglise
à
travers
les
pauvres.
S’il
y
a
dans
les
pauvres
une
présence
spéciale
du
Seigneur,
l'Église
doit
être
particulièrement
attentive
à
leurs
cris.
L'existence
des
pauvres
témoigne
de
ce
que
la
fraternité
humaine
n'est
pas
réelle
et
que
ce
monde
n'est
pas
le
Royaume
de
Dieu
attendu.
Leur
présence
et
leurs
cris
sont
un
appel
à
la
conversion
de
l'Eglise,
pour
qu’elle
soit
signe
réel
et
visible
de
la
présence
du
Royaume.
Aujourd'hui,
nous
ne
pouvons
pas
vivre
loin
de
ce
monde
injuste
et
peu
solidaire
que
nous
avons
construit,
loin
du
drame
de
ceux
qui
sont
sans
emploi,
des
entreprises
vouées
à
réduire
leur
activités
ou
à
fermer
leurs
portes,
loin
des
familles
avec
tous
leurs
membres
au
chômage,
loin
des
jeunes
exclus
du
marché
du
travail.
Nous
ne
pouvons
pas
non
plus
être
insensibles
aux
salaires
exorbitants
des
dirigeants
des
institutions
financières
soutenues
par
des
fonds
publics
ni
aux
millions
et
milliards
de
bénéfices
que
déclarent
certaines
entreprises
alors
qu’elles
licencient
leurs
employés
et
réduisent
les
salaires.
Tout
comme
nous
ne
pouvons
pas
être
aveugles
et
vivre
le
dos
tourné
au
génocide
des
peuples
autochtones,
à
la
faim,
à
la
violence,
au
manque
de
soins
et
d'éducation,
au
trafic
des
armes
et
des
personnes
ni
à
l’exploitation
dont
sont
victimes
tant
de
millions
d’hommes
et
de
femmes
dans
notre
monde.
Comme
l’a
dit
Jean‐Paul
II
:
«
nous
devons
agir
pour
que
les
pauvres,
dans
chaque
communauté
chrétienne,
se
sentent
comme
à
la
maison.
Ne
serait­ce
pas
là
la
présentation
la
plus
grande
et
la
plus
efficace
de
la
bonne
nouvelle
du
Royaume
?
Sans
cette
forme
d'évangélisation
réalisée
grâce
à
la
charité
et
au
témoignage
de
la
pauvreté
chrétienne,
l'annonce
de
l'Évangile,
qui
est
la
première
charité,
court
le
risque
d'être
mal
comprise
ou
de
se
perdre
dans
l'océan
de
mots
à
laquelle
nous
expose
tous
les
jours
la
société
de
communication
d'aujourd'hui.
La
charité
des
œuvres
soutient
la
charité
des
mots
»17.
C’est
là
un
grand
défi
pour
l’Eglise
d’aujourd’hui
:
pour
son
identité
et
pour
la
crédibilité
de
son
message.
2.4. Prendre
en
compte
l’importance
de
l’exercice
organisé
de
la
charité
pour
le
témoignage
évangélisateur
de
l'Eglise
Pour
que
le
service
aux
personnes
défavorisées
soit
ordonné,
mobilise
la
communauté,
réponde
aux
besoins
de
chaque
moment
historique
et
social
et
soit
en
17
Jean
Paul
II,
Lettre
apostolique,
Novo
Millenio
Ineunte,
2001,
n°
50
même
temps
témoin
évangélisateur
de
l’être
de
la
communauté
chrétienne,
il
faut
une
organisation.
C'est
ainsi
que
le
dit
le
Saint‐Père
:
«
L'amour
a
aussi
besoin
d’organisation
comme
présupposé
pour
un
service
communautaire
ordonné
»18.
Par
conséquent,
«
à
la
spontanéité
de
l'individu
doivent
également
s’adjoindre
des
programmes,
des
prévisions,
des
collaborations
avec
d'autres
institutions
similaires
»19.
Et
ce,
non
seulement
pour
des
raisons
d'efficacité,
mais
aussi
pour
des
raisons
de
communion
ecclésiale,
car
c'est
seulement
ainsi
que
l’action
caritative
et
sociale
de
l'Église
sera
signifiante
et
expression
communautaire
de
l'amour
préférentiel
pour
les
pauvres
et
du
visage
samaritain
de
l’Eglise.
Ce
service
organisé
pour
les
pauvres
n'est
pas
un
service
ou
une
mission
de
plus
parmi
les
diverses
missions
complémentaires
de
l'Eglise,
c'est
une
mission
que
nous
considérons
comme
primordiale,
permanente,
générale
et
indispensable.
Et
elle
doit
être
également
la
mission
qui
marque
et
configure
l'Église
dans
toute
sa
structure,
ses
traditions
et
son
organisation
comme
Eglise
de
la
Charité20.
Par
conséquent,
nous
pouvons
affirmer
que
«
l'Église
ne
peut
jamais
se
dispenser
de
l’exercice
de
la
charité
en
tant
qu'activité
organisée
des
croyants
»21
et
qu'il
n'y
a
pas
de
vraie
communauté
chrétienne
là
où
il
n'y
a
pas
et
où
l’on
ne
voit
pas
–
parce
que
nous
sommes
sacrement
–
l’exercice
organisé
de
la
charité.
Le
service
de
la
charité
est
celui
de
l'Église
toute
entière,
de
tout
le
monde
dans
l'Eglise
et
il
a
besoin
d'être
ordonné,
organisé,
planifié.
Par
conséquent,
la
pratique
de
la
charité
exige
de
construire
une
bonne
communauté,
et
une
bonne
communauté
ne
peut
pas
ne
pas
s’exprimer
dans
un
exercice
organisé
de
la
Charité.
L'Église
doit
structurer
et
visibiliser
l'exercice
organisé
de
la
charité
et
celui‐ci
doit
structurer
l'Église
en
Église
de
la
charité.
Cela
implique,
ad
intra,
d’accroître
la
communion
dans
nos
communautés
et
la
coordination
entre
les
différents
groupes
ou
communautés
et
les
différents
services
pastoraux22
pour
que
la
charité
soit
assumée
par
tout
le
monde
dans
la
communauté
et
que
nous
soyons
vraiment
une
Eglise
communion.
Ad
extra,
nous
avons
besoin
d’une
pastorale
de
la
Charité
très
ouverte
et
sensible
à
la
situation
sociale,
capable
d'analyser
la
réalité
à
partir
de
l'Evangile
et
avec
la
médiation
des
sciences
sociales,
et
qui
nous
mène
à
la
dénonciation
des
causes
de
la
pauvreté
et
de
l'oppression
et
à
promouvoir
des
actions
de
transformation
des
personnes
et
des
structures.23
2.5. Reconnaître
comme
agents
de
l'évangélisation
ceux
qui
exercent
le
service
de
la
charité
dans
l'Église
18
Benoît
XVI,
Encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
20
19
Ibid
n°
31b
20
Ibid
21
Ibid
n°
29
22
Instrumentuml
Laboris,
n°
80
23
Ibid
n°
56
Nous
avons
déjà
parlé
du
fait
que
aussi
bien
dans
les
Lineamenta
que
dans
l’Instrumentum
laboris,
on
mentionne
de
nombreux
agents
de
l'évangélisation
sans
inclure
parmi
eux
les
travailleurs
de
la
charité.
Nous
considérons
les
agents
de
Caritas,
bénévoles
comme
employés,
comme
un
véritable
instrument
de
l'annonce
chrétienne.
Le
bénévolat
est
souvent
considéré
comme
une
activité
louable
et
admirable,
gratuite
et
généreuse,
et
elle
l’est.
Mais,
pour
cette
raison,
elle
possède
une
force
particulière
pour
proclamer
et
professer
la
foi.
L'amour
inconditionnel
des
pauvres,
la
reconnaissance
et
le
respect
de
la
dignité
de
chaque
personne,
la
gratuité
de
l’engagement,
le
travail
pour
un
monde
meilleur
qui
participe
à
la
construction
du
Royaume,
le
témoignage
caché
et
discret
que
suppose
la
conscience
d'aimer
et
de
servir
Jésus
Christ
lui‐même
dans
la
personne
des
plus
démunis
font
du
bénévolat
une
proclamation
authentique
de
l'Evangile
et
une
excellente
façon
de
rendre
visible
la
foi
dans
le
contexte
de
la
nouvelle
évangélisation.
Mérite
également
considération
et
encouragement
le
travail
d’un
grand
nombre
de
personnes
embauchées
qui
font
de
ce
service
un
choix
de
vie
et
leur
champ
d’engagement
chrétien
au
service
de
l'évangélisation,
fidèles
au
projet
de
Dieu
dans
leur
vie
et
mettant
au
service
des
pauvres
leurs
dons
et
talents,
leurs
connaissances
professionnelles
et
leur
vocation
personnelle.
Avec
un
tel
horizon,
«
le
signe
du
volontariat
acquiert
également
une
consistance
comme
vrai
message
chrétien
»
affirme
le
président
du
Conseil
pontifical
cité
ci‐
dessus.24
Et
ce
qui
se
dit
du
volontariat
s’applique
aussi
au
personnel
salarié.
Lorsque
le
ministère
de
charité
est
exercé
avec
un
esprit
évangélique,
le
service
lui‐même
est
vraie
proclamation
de
l'Evangile.
Il
serait
donc
bon
pour
la
nouvelle
évangélisation
de
présenter
le
travail
avec
les
pauvres
comme
un
chemin
de
découverte
et
de
rencontre
de
Jésus
Christ.
Caritas
est
certainement
l'Eglise
dans
l'exercice
organisé
de
la
charité,
du
commandement
d'amour
que
le
Seigneur
nous
a
donné.
Et
pour
ceux
qui
sont
en
recherche
spirituelle
et
de
la
foi,
ce
doit
aussi
être
un
chemin
de
découverte
et
de
rencontre
avec
Jésus
Christ.
Dans
l'esprit
de
l'apôtre
Pierre
dans
sa
Lettre,
nous
pourrions
dire
à
certains
de
nos
frères
:
Si
tu
ne
peux
toujours
pas
croire
dans
le
Christ,
reste
à
son
service
dans
les
pauvres,
là
où
il
est
présent
;
et
si
tu
ne
peux
toujours
pas
faire
le
pas
de
la
foi
ou
te
sentir
membre
à
part
entière
de
l'Eglise,
regarde
le
visage
du
Seigneur
en
celui
du
pauvre,
et
atténue
grâce
à
ton
engagement
sa
souffrance
et
sa
pauvreté
(1
Pe
4,
8).
Tous
ceux
qui
travaillent
dans
l’action
caritative
et
sociale
de
l'Église,
évêques,
prêtres,
religieux
et
laïcs,
ont
besoin
de
grandir
dans
le
témoignage
de
la
charité
pour
que
son
exercice
soit
mené
en
conformité
avec
les
exigences
de
l'Évangile
et
de
la
doctrine
sociale
de
l’Eglise.
Pour
cela,
il
est
nécessaire
de
consacrer
des
gens
et
des
ressources
à
la
formation
et
à
l’accompagnement
des
travailleurs
de
la
charité
et
à
l'information
et
à
la
sensibilisation
de
toute
la
communauté.
24
Rino
Fisichella,
o.c.
p.
70
Ce
serait
bien,
d'autre
part,
qu’en
plus
d’appeler
à
la
cohérence
personnelle
ceux
qui
mettent
la
charité
en
pratique,
l'Eglise
en
tant
qu'institution
envisage
un
signe
public
et
visible
qui
montre
son
désir
sincère
de
conversion
et
de
charité
envers
les
plus
pauvres.
Un
geste
communautaire,
«
institutionnel
»
qui
invite
à
rendre
crédible
son
engagement
envers
les
plus
pauvres
comme
condition
première
de
la
nouvelle
évangélisation.
Un
synode
universel
offre
une
bonne
occasion
pour
cela.
2.6. Animer
la
spiritualité
exigée
par
l'exercice
de
la
charité
pour
qu’elle
soit
évangélisatrice
Dans
l'exercice
de
la
charité,
nous
devons
être
très
attentifs
à
l'esprit
qui
l'anime
et
l’enrichit,
car
la
charité
ou
bien
est
basée
et
inspirée
par
le
Saint‐Esprit
ou
elle
n’est
pas
charité,
parce
que
dans
le
langage
chrétien,
il
ne
peut
y
avoir
plus
de
spiritualité
que
celle
qui
vient
de
l'Esprit
Saint.
Caritas
existe
parce
que
nous
avons
été
oints
par
l'Esprit
pour
porter
la
bonne
nouvelle
aux
pauvres.
«
Le
même
Esprit
qui
a
oint
Jésus
pour
l'envoyer
annoncer
l'Evangile
aux
pauvres
conduit
ses
disciples
à
la
mission
de
poursuivre
le
travail
du
salut
parmi
les
plus
abandonnés
»25.
«
L'Esprit
est
aussi
la
force
qui
transforme
le
cœur
de
la
Communauté
ecclésiale
afin
que
le
monde
soit
témoin
de
l'amour
du
Père,
qui
veut
faire
de
l'humanité,
dans
son
Fils,
une
seule
famille
»26.
Nous
tous,
avec
la
force
du
Saint
Esprit
qui
nous
engage
dans
cette
mission,
nous
pouvons
faire
nôtre
la
proclamation
de
Jésus
dans
la
synagogue
de
Nazareth
:
«
L'Esprit
du
Seigneur
est
sur
moi,
/
parce
qu'il
m'a
oint
/
pour
annoncer
aux
pauvres
la
bonne
nouvelle
/
il
m'a
envoyé
proclamer
aux
captifs
la
libération
/
et
rendre
la
vue
aux
aveugles
/
donner
la
liberté
aux
opprimés
et
/
proclamer
une
année
de
grâce
du
Seigneur
».
(Lc
4,18
à
21).
Plus
d'une
fois
dans
l'Eglise,
nous
avons
été
tentés
d’opposer
la
vie
active
et
la
vie
contemplative,
l'engagement
et
la
prière,
et
en
particulier,
nous
avons
considéré
la
lutte
pour
la
justice
sociale
et
la
vie
spirituelle
comme
deux
réalités
non
seulement
différentes
–
ce
qu’elles
sont
effectivement
quant
à
leur
objet
immédiat
–
mais
indépendantes
et
même
contraires,
quand
elles
ne
le
sont
en
aucune
façon,
car
elles
sont
complémentaires
et
reliées,
interdépendantes.
Il
serait
important
que
le
Synode
nous
donne
les
clés
de
la
spiritualité
d’une
charité
évangélisatrice,
car
la
charité,
quand
elle
est
animée
par
l'Esprit
est
en
elle‐même
évangélisatrice.
Par
exemple
:
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
est
enracinée
au
cœur
de
notre
Dieu
et
se
transforme
en
transparence
de
l'amour
de
Dieu
et
en
source
de
fraternité
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
relie
les
uns
aux
autres
et
les
fait
se
prendre
en
charge
mutuellement
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
nous
aide
à
découvrir
le
visage
de
Dieu
dans
le
visage
de
chaque
être
humain
et
nous
conduit
à
promouvoir
son
développement
intégral
25
Caritas
Espagne,
Réflexion
sur
l’identité
de
Caritas,
1977,
p.
21
26
Benoît
XVI,
Encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
19
elle
est
évangélisatrice
quand
elle
dénonce
l'injustice
et
transforme
les
personnes
et
les
structures
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
mise
sur
les
faibles,
les
personnes
fragiles,
les
derniers
là
où
la
culture
ambiante
est
celle
de
la
réussite
et
de
la
rentabilité
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
se
vit
comme
un
don
et
aide
à
dépasser
la
logique
du
marché
avec
la
logique
du
don
et
de
la
gratuité
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
se
vit
en
communion,
quand
elle
contribue
à
former
une
Église
samaritaine
et
serviteur
des
pauvres
et
conduit
au
partage
des
biens
et
services
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
sait
discerner
avec
l'Esprit
ce
que
Dieu
nous
demande
ici
et
maintenant
et
quand
elle
répond
sur
cette
base
aux
défis
sociaux
et
culturels
du
moment
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
transmet
la
force
et
l'espérance
nées
de
Pâques
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
se
fait
vie
librement
donnée,
nourrie
et
célébrée
dans
l'Eucharistie
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
nous
rend
simples
et
pauvres
pour
être
disponibles
à
Dieu
et
aux
pauvres
- elle
est
évangélisatrice
quand
elle
fait
de
nous
des
témoins
d’une
expérience
d'amour
dont
nous
sommes
devenus
les
acteurs
et
quand
elle
ouvre,
à
travers
des
actes
et
des
paroles,
des
chemins
qui
permettent
l'expérience
de
la
rencontre
avec
Dieu
en
Jésus
Christ
Toutes
ces
manifestations
de
la
charité
sont
évangélisatrices,
car
elles
font
partie
des
étapes
d'un
processus
d'évangélisation
tel
que
nous
l’a
présenté
Jean‐Paul
II
27:
-
-
-
elles
sont
les
témoins
de
l'amour
de
Dieu
et
de
la
communauté
chrétienne
et
le
témoignage
est
la
première
étape
de
l'évangélisation
elles
sont
révélatrices
des
mots
et
des
attitudes
de
Jésus
et
constituent
une
première
annonce
de
sa
personne
et
de
son
message
elles
sont
un
appel
à
la
conversion,
à
nous
conformer
au
Christ
et
à
la
transformation
des
personnes
et
des
structures
si
elles
se
réalisent
dans
le
cadre
d’un
vrai
accompagnement,
elles
offrent
la
possibilité
d'une
annonce
explicite
sur
les
motivations
et
le
sens
de
notre
service
:
la
Foi
et
la
suite
de
Jésus.28
et
si
elle
sont
œuvre
de
la
communauté
chrétienne,
elles
sont
une
invitation
à
l'intégration
dans
la
communauté
fraternelle
qui
est
l'Eglise.
27
Encyclique
Redemptoris
missio,
1990,
nn
42‐46
Le
chapitre
V
nous
offre
les
éléments
d’un
processus
d’évangélisation.
28
Instrumentum
Laboris,
nn
28‐32.
Le
but
ultime
de
toute
action
d'évangélisation
est
la
rencontre
personnelle
avec
Jésus‐Christ,
car
il
est
l'Evangile,
la
bonne
nouvelle
de
l'amour
de
Dieu
dont
l’être
humain
a
besoin.
Elle
doit
être,
autant
que
possible
et
sachant
que
la
foi
se
propose
et
ne
s’impose
pas,
le
but
ultime
de
toute
action
socio‐
caritative
de
l'Église.
Cela
signifie
que
nous
devons
être
très
attentifs
à
«
une
confusion
croissante
qui
conduit
certains
à
ignorer
et
à
rendre
inopérant
le
commandement
missionnaire
du
Seigneur
(cf.
Mt
28,
19).
On
pense
souvent
que
toute
tentative
de
convaincre
les
autres
sur
des
questions
religieuses
est
une
entrave
à
la
liberté.
Il
ne
serait
légitime
que
d'exposer
ses
idées
et
inviter
les
gens
à
agir
selon
leur
conscience,
sans
favoriser
leur
conversion
au
Christ
et
à
la
foi
catholique
:
il
est
dit
qu’il
suffit
d’aider
les
hommes
à
devenir
plus
humains
ou
plus
fidèles
à
leur
propre
religion,
qu’il
suffit
de
bâtir
des
communautés
capables
de
travailler
pour
la
justice,
la
liberté,
la
paix,
la
solidarité.
En
outre,
certains
soutiennent
qu'on
ne
devrait
pas
annoncer
le
Christ
à
ceux
qui
ne
le
connaissent
pas,
ni
encourager
l'adhésion
à
l'Église,
car
il
serait
possible
d'être
sauvé
sans
la
connaissance
explicite
du
Christ
et
sans
intégration
formelle
dans
l'Eglise
»(Congrégation
pour
la
Doctrine
de
la
Foi,
Note
doctrinale
sur
certains
aspects
de
l'évangélisation,
2007,
3).
En
d'autres
termes,
nous
avons
besoin
de
grandir
dans
la
conscience
de
ce
que
l'action
caritative
et
sociale
de
l'Eglise
peut
être
évangélisatrice
de
nombreuses
manières
:
par
ce
que
nous
faisons
et
la
façon
dont
nous
le
faisons,
par
la
motivation
et
le
sens
de
ce
que
nous
faisons,
par
les
effets
de
ce
que
nous
faisons,
par
ce
que
nous
dénonçons
et
pour
les
changements
que
nous
promouvons,
par
l’accompagnement
que
nous
faisons,
par
le
message
de
l'Evangile
que
nous
proclamons
dans
ce
que
nous
faisons.
De
manière
toute
particulière,
elle
doit
être
évangélisatrice
par
la
spiritualité
qui
l'anime.
Une
spiritualité
trinitaire,
profondément
enracinée
dans
le
mystère
de
notre
Dieu,
et
une
spiritualité
eucharistique,
parce
que
l'Eucharistie
est
le
sacrement
du
don
:
don
de
Jésus
et
don
de
nous‐mêmes.29
2.7
Annoncer
l’Evangile
dans
l’exercice
de
la
charité
n’est
pas
faire
du
prosélytisme.
Lorsque
l'on
considère
la
dimension
évangélisatrice
de
l’action
socio‐caritative,
on
attire
parfois
l’attention
sur
le
risque
d'instrumentaliser
la
charité
pour
faire
du
prosélytisme.
Ce
risque
peut
exister,
mais
il
ne
doit
pas
nous
inviter
à
renoncer
à
la
mission
évangélisatrice
de
la
charité.30
Il
y
a
des
principes
inaliénables.
L’un
d’entre
eux
est
que
la
mission
de
l'Eglise
est
d'évangéliser,
que
nous
sommes
tous
en
Eglise
appelés
à
évangéliser31,
et
tout
dans
l'Église,
y
compris
l'exercice
de
la
charité
«
qui
ne
prend
tout
son
sens
que
quand
il
se
transforme
en
témoignage,
provoque
l'admiration
et
la
conversion,
et
devient
prédication
et
annonce
de
l'Évangile
de
la
part
de
l'Église
et
de
tous
les
baptisés
»32.
L’universalité
de
la
charité
est
également
fondamentale.
Nous
sommes
au
service
des
pauvres,
de
tous
les
pauvres,
sans
distinction
de
race
et
de
confession
religieuse.
Maintenir
ces
principes,
comme
nous
l’avons
dit
dans
un
point
précédent33,
nous
conduit
à
distinguer
évangélisation
et
prosélytisme,
comme
l'a
fait
Benoît
XVI
:
«
La
charité
ne
doit
pas
être
un
vecteur
de
ce
que
l'on
appelle
aujourd'hui
prosélytisme.
L'amour
est
gratuit,
on
ne
le
pratique
pas
à
d'autres
fins.
(...)
Celui
qui
pratique
la
charité
au
nom
de
l'Église
ne
cherchera
jamais
à
imposer
aux
autres
la
foi
de
l'Eglise.
Il
est
conscient
que
l'amour,
pur
et
généreux,
est
le
meilleur
témoignage
du
Dieu
auquel
nous
croyons
et
qui
nous
pousse
à
aimer.
Le
chrétien
sait
quand
le
temps
est
venu
de
parler
de
Dieu
et
quand
il
est
préférable
de
ne
rien
dire,
de
laisser
parler
l'amour
seul
»34.
Une
autre
question
est
de
savoir
distinguer
quand
il
est
temps
de
parler
et
quand
il
est
temps
de
se
taire,
mais
le
témoignage
sera
toujours
évangélisateur.
Il
y
a
des
cas
où
nous
pourrons
expliquer
les
raisons
pour
lesquelles
nous
faisons
ce
que
nous
faisons
et,
quand
cela
est
possible,
nous
ne
pouvons
pas
renoncer
à
l’annonce
explicite
de
l’Evangile.
29
Benoît
XVI,
encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
13
30
Nota
y
cita
n°28
31
Paul
VI,
exhortation
apostolique
Evangelii
nuntiandi,
1975,
n°
13
32
Ibid
15
33
Cf
pt
2.6
34
Benoît
XVI,
encyclique
Deus
caritas
est,
2005,
n°
31
La
dimension
spécifique
de
l’action
socio‐caritative
dans
le
champ
de
l'évangélisation
est
le
témoignage
et
l’appel
à
être
et
à
vivre
différemment,
mais
pas
seulement.
Si
possible,
nous
témoignerons
de
nos
motivations
et
du
sens
de
ce
que
nous
faisons.
Et
là
où
c'est
possible,
nous
annoncerons
explicitement
Jésus
et
son
Évangile
comme
le
meilleur
service
que
nous
pouvons
offrir
à
nos
frères,
et
en
particulier
aux
pauvres.
Enfin,
il
est
bon
de
noter
que
si
annoncer
l'Evangile
présente
le
risque
du
prosélytisme,
ne
pas
l’annoncer
présente
le
risque
de
devenir
une
ONG.
CONCLUSION
L’exercice
de
la
charité
est
un
élément
constitutif
de
la
nature
de
l'Église
et
de
sa
mission
d'évangélisation,
et
tous
dans
l’Église
sommes
impliqués.
Ceci
devrait
être
bien
clair
dans
le
Synode.
La
nouvelle
évangélisation
doit
montrer
que
la
diaconie
de
la
foi
et
la
diaconie
de
la
charité
ne
sont
pas
séparées
et
indépendantes,
mais
qu’il
est
question
d’une
seule
diaconie
avec
deux
volets.
Même
plus
:
le
moteur
de
la
mission,
la
porteuse
de
la
vision
devrait
être
la
diaconie
de
la
charité.
La
charité,
par
conséquent,
doit
être
un
élément
structurant
de
la
nature
même
de
l'Eglise
si
elle
veut
être
évangélisatrice.
Il
vaut
la
peine
que
le
Synode
lui
donne
la
place
qui
lui
revient
dans
la
réflexion
sur
la
nouvelle
évangélisation
et
qu’il
encourage
et
renforce
son
dynamisme
évangélisateur.
La
Charité
vécue
dans
l'Esprit
non
seulement
nous
rend
missionnaires,
mais
nous
évangélise
nous‐mêmes.
Et
aujourd'hui,
nous
reconnaissons
avec
joie
qu’ils
sont
nombreux,
tous
les
jours
plus
nombreux,
les
ouvriers
de
la
charité,
bénévoles
et
employés,
qui
font
de
leur
travail
dans
l’action
socio‐caritative
de
l’Eglise
le
champ
explicite
de
leur
engagement
dans
l'évangélisation.
Nous
aimerions
qu’ils
aient
une
place
parmi
les
sujets
traités
sur
la
manière
dont
la
foi
chrétienne
est
transmise
aujourd'hui.
Nous
reconnaissons
que
l'exercice
de
la
charité
est
l'un
des
signes
de
la
crédibilité
de
l'Eglise.
Nous
constatons
que
souvent,
dans
nos
Caritas,
des
frères
et
sœurs
qui
viennent
à
nous
de
l'indifférence,
de
l'agnosticisme
ou
de
l'incroyance,
à
travers
le
service
socio‐caritatif
découvrent
ce
que
signifie
la
joie
de
croire
et
de
mettre
sa
vie
en
phase
avec
Jésus‐Christ
au
sein
de
l'Eglise.
Nous
aimerions
que
soit
reconnu
le
caractère
évangélisateur
que
portent
en
elles‐mêmes
un
grand
nombre
des
actions
qui
se
réalisent
au
service
de
la
charité
et
la
façon
de
les
exécuter.
Cela
ne
veut
pas
dire
que
nous
ne
reconnaissions
pas
le
besoin
de
soigner
à
la
fois
la
dimension
évangélisatrice
de
la
charité
et
notre
formation
en
ce
domaine
afin
que
nous
sachions
faire
en
sorte
que
notre
service
soulève
des
questions
sur
la
motivation
et
le
sens
de
ce
que
nous
faisons,
invite
à
la
conversion
et
facilite
l’annonce
de
Jésus
et
de
son
Evangile.
Tout
comme
nous
devons
cultiver
la
spiritualité
qui
peut
donner
de
la
consistance
au
caractère
évangélisateur
de
la
charité.
Le
Synode
fournirait
un
bon
service
à
la
nouvelle
évangélisation
s’il
nous
donnait
des
orientations
positives
sur
le
soin
à
apporter
à
la
formation
et
à
la
spiritualité
dans
l'action
caritative
qui
permette
d’aviver
en
elle
sa
force
évangélisatrice.
Nous
vivons
un
moment
privilégié,
un
vrai
moment
de
l'Esprit,
pour
que
l'exercice
de
la
charité
nous
évangélise
et
fasse
de
nous
toujours
plus
des
évangélisateurs.
Vivons
cela
avec
un
cœur
reconnaissant
et
généreux,
et
faisons
de
notre
vie,
comme
Marie,
un
hymne
au
Seigneur
qui
a
exprimé
dans
notre
faiblesse
sa
force
évangélisatrice
et
libératrice
en
faveur
des
plus
pauvres
et
des
opprimés
(Lc
1,
46‐55).
Et
ne
permettons
pas,
autant
que
faire
se
peut,
que
l'exercice
de
la
charité
soit
exclu
de
la
mission
évangélisatrice
de
l'Eglise
ou
relégué
au
second
plan.
Nous
rendrions
un
mauvais
service
à
l'évangélisation
et
l’ecclésialité
de
la
charité.
La
question
fondamentale
dans
la
nouvelle
évangélisation
n'est
pas
seulement
de
savoir
comment
annoncer
l'Evangile,
mais
de
nous
demander
si
l'Évangile
que
nous
annonçons
est
bonne
nouvelle
pour
les
pauvres,
et
si
nous,
comme
Église,
rendons
crédibles
cet
Evangile.
Le
service
de
la
charité
doit
être
le
moteur
de
la
mission
et
son
signe
de
crédibilité.
Cité
du
Vatican,
septembre
2012