Chili : un modèle de développement à l`épreuve de la crise

Transcription

Chili : un modèle de développement à l`épreuve de la crise
Chili : un modèle de
développement à l’épreuve
de la crise
Sylvain Bellefontaine
V
ingt ans après la fin du régime militaire, à l’aube
de son adhésion probable à l’OCDE et au
moment où le monde subit sa plus profonde crise
économique depuis la grande dépression des années
1930, il apparaît opportun de revenir sur la trajectoire du
Chili, pays considéré comme un modèle de
développement économique en Amérique latine voire
au-delà, bien que ses dotations et atouts initiaux
apparaissaient loin d’être évidents. En effet, doté d’un
marché domestique étroit (16 millions d’habitants), a
priori « isolé » des grands centres économiques
mondiaux, bénéficiant d’une façade maritime immense
mais acculé à la Cordillère des Andes et dont le cuivre
constitue l’unique et importante ressource naturelle, le
Chili a su démythifier la « fatalité » de la malédiction des
matières premières.
Le Chili est présenté comme un exemple de réussite
de programme de stabilisation macroéconomique
combinant libéralisation commerciale et financière et
profondes réformes structurelles. Une maîtrise de
l’inflation et une crédibilité de la politique monétaire
obtenues de longue lutte grâce notamment à une
discipline budgétaire et une gestion parcimonieuse de la
manne cuprifère, le tout adossé à un cadre institutionnel
et juridique stable sont les bases de ce succès. Bien
entendu, la trajectoire économique et socio-politique du
pays depuis les années 1970 n’a pas été linéaire. Petite
économie ouverte, par définition vulnérable aux chocs
externes, le Chili a toutefois incontestablement mieux su
tirer les enseignements des épisodes de crise que
d’autres pays au cours des trois dernières décennies,
notamment en Amérique latine.
Septembre 2009
Après avoir présenté les fondements du modèle de
développement chilien au travers de l’analyse de
l’histoire économique contemporaine du pays, nous
tenterons de dresser un bilan économique et social ainsi
que les perspectives à court terme (en lien avec la crise
économique) et les enjeux à moyen long terme du pays.
Libéralisme, orthodoxie
économique et rupture du
compromis institutionnel (1973-89)
Entre 1940 et 1970, le modèle institutionnel chilien
était le plus développé d’Amérique latine. Il se
caractérisait par un régime démocratique, un clivage
politique bipartisan avec une gauche puissante, une
politique sociale avancée, un régime universel de
retraites par répartition, le développement d’une classe
moyenne et d’un niveau d’organisation et de
représentativité syndicale non négligeable. Toutefois,
ces avancées indéniables sur le plan institutionnel
contrastaient avec des structures productives inefficaces, à l’origine de divergences entre un pays
socialement avancé mais économiquement peu
dynamique et fragile.
Au début des années 1970, après trois décennies
de politique de substitution aux importations, l’économie
Chilienne était exsangue, caractérisée par une
croissance atone et de profonds déséquilibres macroéconomiques domestiques (inflation galopante de
l’ordre de 500% et déficit public de 21% du PIB en
Conjoncture
15
1973) et externes se traduisant par des crises
récurrentes de balance des paiements. Le modèle
chilien butait sur une insertion commerciale monoexportatrice, la faiblesse de l’épargne et de l’investissement, et la sur-indexation des salaires par rapport à
la productivité.
Le dogme ultralibéral institué sous la dictature
militaire…
Au même titre que ses voisins argentins et
uruguayens, le Chili a été, dans les années 1970, un
laboratoire pour les idées chères aux théoriciens de
l’Ecole de Chicago, s’apparentant à une « révolution
capitaliste », prémices du consensus de Washington.
Outre la priorité donnée à la libéralisation des marchés
de biens & services et de capitaux devant permettre une
allocation optimale des ressources, les monétaristes
prônaient la fixation du taux de change (effective en
1979 au Chili) comme aiguillon incitant les producteurs
locaux à maintenir des prix bas pour concurrencer les
importations et servir d’ancrage nominal pour la
formation des anticipations d’inflation.
Le cadre institutionnel a donc subi une rupture
radicale par la libéralisation des prix et la remise en
cause du pouvoir de négociation salariale permettant
d’imposer un compromis dans le partage des gains de
productivité et de la valeur ajoutée, au profit des
entreprises(1).
Parallèlement à une politique monétaire restrictive,
le régime du Général Pinochet a appliqué dès 1974 une
politique d’austérité budgétaire, une limitation de
l’interventionnisme étatique, une remise en cause des
principes de redistribution, ainsi que la privatisation
d’entreprises publiques (excepté quelques banques,
sociétés en charge des infrastructures et Codelco, la
société cuprifère) et du système de pensions en faillite
(1980), participant à l’élévation du niveau d’épargne et à
l’expansion des marchés de capitaux domestiques.
La réforme des procédures de contrôle monétaire
s’est traduite par une libéralisation des taux d’intérêt
monétaires à court terme et des taux d’intérêt bancaires,
une suppression de la politique quantitative du crédit et
une réduction des réserves obligatoires. Dans le même
temps, des mesures ont été prises afin de limiter les
barrières à l’entrée de nouveaux acteurs domestiques et
étrangers dans le secteur financier et de faciliter l’accès
Septembre 2009
des banques domestiques aux financements
internationaux par une libéralisation du compte de
capital de la balance des paiements.
Après plusieurs années « florissantes » (+7,5% de
croissance annuelle entre 1976 et 1981, une inflation
tombée de 212% à 20% et des comptes publics
excédentaires dès 1979), la surévaluation du taux de
change réel est devenue patente compte tenu d’une
inflation domestique toujours supérieure à l’inflation
mondiale. Ceci a induit une dégradation importante des
comptes externes en lien avec la dégradation des
termes de l’échange et l’essor des importations
destinées notamment à alimenter le boom des
dépenses en investissement.
…à l’origine du choc de la crise de 1982 caractérisée
par un excès de financiarisation et d’endettement
privé…
Le « premier miracle chilien » a été emporté dans la
tourmente de la crise de la dette latino-américaine,
conséquence d’un triple choc externe constitué par
l’augmentation des taux d’intérêt aux Etats-Unis, la
chute du prix du cuivre et la hausse de celui du pétrole.
Cet épisode a mis en lumière les failles d’une
libéralisation financière sans garde-fous en matière de
gestion des risques, de supervision et de régulation
passant par l’établissement d’un système prudentiel
strict encadrant l’allocation et le provisionnement du
crédit au secteur privé.
La crise chilienne a préfiguré celle subie par les
pays d’Asie du sud-est à la fin des années 1990. A la
différence des autres pays d’Amérique latine, le « pêché
originel » chilien était largement imputable au secteur
privé. Le mirage de la stabilité monétaire conféré par la
fixité du régime de change et un cadre réglementaire
non contraignant ont facilité un excès de financiarisation
et d’endettement externe et domestique du secteur privé
(le ratio crédit domestique/PIB est passé de 20% en
1977 à plus de 80% en 1982). Les banques et grandes
entreprises se sont endettées lourdement en dollars et à
court terme (42% de la dette externe totale en 1982
contre 19% en 1978), sans qu’elles ne soient en
capacité de faire face à leurs engagements après la
dévaluation forcée de 50% et l’abandon du taux de
change fixe comme ancrage nominal en juin 1982.
Conjoncture
16
Croissance et inflation
Amérique latine : évolution du PIB réel
40
35
30
25
20
15
10
5
0
-5
-10
-15
420
Croissance du PIB réel (%)
Inflation (%)
Chili
Mexique
Colombie
340
300
Argentine
Brésil
Venezuela
Crise
mexicaine
Crise
Crises argentine
asiatique
et russe
260
220
Crise de la dette
latino-américaine
180
140
100
60
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Graphique 1
Sources : IFI, Banque centrale
Taux de change nominal et taux d'intérêt
Amérique latine : solde du compte courant
CLP/USD (fin d'année)
80
20
Taux prêteur (%, annuel)
70
15
60
10
50
40
30
-5
10
-10
0
-15
Amélioration des
termes de l'échange
et dépréciation du
TCER
10
5
0
-5
Compte courant
IDE (flux nets)
Taux de change effectif réel
Termes de l'échange
-10
-15
Mexique
Venezuela
Source : IFI
Graphique 5
Amérique latine : dette externe
200
180
160
140
120
100
80
60
40
20
0
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Graphique 3
Argentine
Colombie
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Compte courant, IDE, termes de l'échange et TCER
Indice Base 100 en 2000
Chili
Brésil
0
20
Sources : IFI, Banque centrale, BNP Paribas
% du PIB
% du PIB
5
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Graphique 2
Sources : IFI, BNP Paribas
Graphique 4
90
750
700
650
600
550
500
450
400
350
300
250
200
150
100
50
0
15
Indice base 100 = 1978
380
Sources : IFI, Banque centrale, BNP Paribas
Septembre 2009
160
% du PIB
Chili
Mexique
Colombie
140
Argentine
Brésil
Venezuela
120
100
80
60
40
20
0
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Graphique 6
Conjoncture
Source : IFI
17
Face à l’ampleur de la crise bancaire, l’Etat est
intervenu massivement, le coût du sauvetage du
système financier dépassant 25% du PIB, mais sans
détérioration majeure des comptes publics. Soutenue
par le Fonds Monétaire International et la Banque
Mondiale, la stratégie des autorités chiliennes s’est
centrée sur le renforcement de la régulation bancaire,
un programme de réduction du service de dette du
secteur privé non financier et un renflouement du
système financier à travers la reprise d’actifs bancaires
par la banque centrale et la recapitalisation des
banques.
Le maintien d’une politique budgétaire restrictive a
plongé l’économie chilienne dans une dépression plus
sévère que dans les principaux pays de la région avec
un effondrement du PIB réel de 16% en 1982-83 (contre
-3% au niveau régional) et le quasi-doublement du taux
de chômage officiel à 20%.
…requérant une approche économique plus
pragmatique couronnée de succès…
Suite à l’échec de la politique de change fixe, les
autorités chiliennes ont opté pour une politique
délibérée de taux de change réel compétitif en
élargissant progressivement la bande de fluctuation du
peso par rapport au dollar. La politique de change a
donc été, notamment de 1983 à 1989, un instrument
décisif du processus de réallocation des ressources
vers les secteurs exposés.
Cette stratégie, conjuguée à la levée des taxes sur
les exportations, la signature de nombreux accords
commerciaux bilatéraux et la baisse des salaires réels
favorable à la compétitivité des exportations, a facilité et
accompagné l’insertion internationale du Chili.
L’« offensive exportatrice » a consisté en une diversification progressive des exportations en termes de
débouchés (des marchés traditionnels européen et
nord-américain vers l’Asie) et de produits.
Tout en continuant à valoriser la manne cuprifère, le
choix d’axer la spécialisation sur le secteur agricole et
agro-industriel (aquaculture, sylviculture, fruits,
viticulture,…) intensif en main d’œuvre a dégagé des
effets d’entraînement sur le reste de l’économie, et
permis d’affranchir quelque peu celle-ci vis-à-vis de la
mono dépendance au cuivre(2). Après la récession de
Septembre 2009
1982-83, le secteur agricole a bénéficié d’une plus
grande protection que le reste de l’économie et d’une
politique fiscale avantageuse. Le processus de reprivatisation des entreprises et des banques a repris à
partir de 1984. Parallèlement, les droits de douane,
relevés en 1983, ont été progressivement réduits de
1985 à 1988.
Tirant enseignement de l’échec de la libéralisation
du compte de capital en partie à l’origine de la crise de
1982, les autorités chiliennes ont adopté une approche
graduelle en matière de contrôle des capitaux,
globalement plus restrictif sur les sorties que sur les
entrées de capitaux au cours des années 1980.
A partir de 1987, la stabilisation macroéconomique
et financière a autorisé la banque centrale à réintroduire
un mécanisme de pilotage indirect de la politique
monétaire via des opérations d’open market à travers
l’émission d’instruments financiers indexés(3). La banque
centrale est devenue statutairement indépendante en
1989 avec pour mandat de préserver la stabilité de la
monnaie et le bon fonctionnement du système de
paiements domestique et externe, assorti de prérogatives étendues en termes de politiques monétaire,
financière et de change. Sur fond de regain d’inflation
généré par une surchauffe économique et des tensions
sur les prix du pétrole associées à la guerre du Golfe, la
banque centrale a adopté une cible d’inflation annuelle
comme ancrage nominal avec un objectif de long terme
fixé à 3%.
…sans pour autant réduire la « dette sociale »
accumulée par le régime militaire
Même si après sa période dite « répressive » et
socialement « régressive », le régime militaire a eu, à
partir de 1984-85, une « politique sociale » ayant permis
des avancées dans certains domaines (retraites privées,
éducation, mortalité, notamment infantile, espérance de
vie), d’autres ont été largement négligés. Le système
privé de santé disposait ainsi en 1988 de 52% des
ressources financières disponibles pour couvrir
seulement 16% de la population. A la fin des années
1980, les dépenses sociales par habitant étaient
inférieures de 20% à leur niveau de 1970.
Au cours des années 1980, le niveau moyen des
salaires réels a chuté de plus de 6% pendant que la
Conjoncture
18
richesse nationale progressait de 20%. La réduction à
une portion congrue de la politique de redistribution,
ainsi que la crise de 1982, ont laminé tout un pan de la
classe moyenne basse, d’où une paupérisation
importante. La part de la population vivant en dessous
du seuil de pauvreté est ainsi passée de 24% en 1970 à
45% à la fin des années 1980, pendant que les
inégalités de revenus s’accroissaient fortement.
Richesse nationale et salaires réels
450
Indice base 100 en 1978
400
350
Salaires réels
PIB réel
300
250
200
150
Finalement, à l’appui de politiques économiques
orthodoxes, le Chili a su stabiliser l’inflation (à un niveau
moyen tout de même élevé de 20% par an dans les
années 1980). Et suite à l’ajustement drastique des
années 1982-83, l’économie chilienne assainie a repris
un sentier de croissance soutenue (+6,3% en moyenne
de 1984 à 1989, mais +3,3% sur toute la décennie
1980), marquée par une importante accumulation de
capital (le taux d’investissement est passé de 16% en
1979 à 6% en 1982-83 et à 27% en 1989).
Ce « second miracle économique chilien » tranche
avec la croissance moribonde observée dans la majorité
des autres pays latino-américains (+2,1% en moyenne
entre 1984 et 1989 et +1,5% sur l’ensemble de la
décennie 1980), englués dans « la décennie perdue »
reflétant l’adhésion de pays comme le Brésil, le Mexique
ou l’Argentine à des politiques macroéconomiques
interventionnistes, expansives et protectionnistes
jusqu’à la fin des années 1980, puis une libéralisation
financière mal contrôlée (Argentine et Mexique
notamment) engendrant plusieurs crises financières
majeures au cours de la décennie suivante.
L’expansion de 10% par an des exportations
chiliennes dans la seconde moitié des années 1980 a
concouru à la résorption du déficit chronique du compte
courant, financé non plus par des flux générateurs de
dette mais principalement par des investissements
directs étrangers (IDE), attirés par un environnement
macroéconomique et juridique favorable, et contribuant
à renforcer substantiellement la position de liquidité
extérieure du pays.
Parallèlement, le bilan social du régime militaire
s’est avéré calamiteux en sapant le compromis
institutionnel ancré depuis plusieurs décennies.
Septembre 2009
100
78
80
82
84
86
88
90
92
94
96
Graphique 7
98
00
02
04
06
08
Sources : IFI, BNP Paribas
Distribution des revenus et taux de chômage
25
Distribution des revenus par foyer*
20
15
Taux de chômage
10
5
* Rapport entre les revenus du quintile le plus riche
et le quintile le plus pauvre
0
78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Graphique 8
Sources : IFI, Etudes de la Documentation Française
Dépenses sociales
% du PIB
1990
1996
2000
2006*
Education
2,3
2,4
3,7
3,1
Santé
1,9
2,4
2,8
2,8
Protection sociale
8,1
7,3
7,9
5,9
indice 100=1990
Education
100
195
279
367
Santé
100
203
266
401
Protection sociale
100
153
194
248
Tableau 1
Source : OCDE
* La forte croissance économique en 2006 explique la chute relative du
poids des dépenses sociales en part de PIB.
Conjoncture
19
Le rétablissement du compromis
sociopolitique sans remise en
cause du modèle libéral (1990- )
Dans un souci de recherche du consensus politique
et de procéder à une transition démocratique « sans
violence et sans vengeance », les gouvernements
successifs ont gardé comme leitmotiv depuis 1990 de
concilier maintien des grands équilibres macroéconomiques et apurement progressif de la « dette
sociale » vers une société plus inclusive et une
croissance plus équitable.
Une transition démocratique réussie…
A la tête du pays depuis le retour à la démocratie,
les dirigeants de la Concertation, la coalition de centre
gauche, ont refusé les solutions de facilité et la tentation
populiste consistant à donner la priorité absolue à la
politique sociale. Face à un espoir de vie meilleure et à
des attentes sociales importantes, les dangers de
dérapage étaient d’autant plus grands que la croissance
économique soutenue pouvait légitimer des
revendications fortes de la part de la population.
Le Chili a donc opéré « un changement dans la
continuité » en réintégrant syndicats et salariés et en
associant la majorité des forces politiques dans le
processus d’orientation et de décision de la politique
économique et sociale, notamment en matière de
fiscalité, de réforme de la législation du travail,
d’amélioration du système de santé et d’éducation, de la
politique du logement et de l’emploi.
Le choc de confiance suscité par cette transition
démocratique(4) sans déstabilisation institutionnelle ni
remise en cause du cadre de la politique économique
explique largement le dynamisme de l’investissement
productif et de la croissance économique depuis deux
décennies (+6,3% de croissance en moyenne au cours
des années 1990 et +5,4% entre 1990 et 2008, contre
+2,8% et +3,3% pour l’ensemble de l’Amérique latine).
…et des mesures de politique macroéconomique
adaptées face au « choc de confiance »
De 1990 à 1993, le Chili a connu, à l’instar de ses
voisins latino-américains – dont les marchés obligataires
Septembre 2009
secondaires se sont développés suite à l’instauration du
plan Brady en 1989 –, un afflux d’investissements de
portefeuille par nature volatils, attirés notamment par un
différentiel significatif entre les taux d’intérêt
domestiques et internationaux (opérations de carry
trade), la confiance croissante accordée aux politiques
économiques chiliennes, ainsi que la transition
démocratique réussie. Cet afflux de capitaux étrangers
a créé un conflit entre les objectifs internes (maîtrise de
l’inflation) et externes (maintien de la compétitivité des
exportations) des autorités chiliennes.
Afin de limiter l’appréciation du peso et de contenir
l’excès de liquidité et la croissance du crédit, la banque
centrale a intensifié ses opérations de stérilisation des
entrées de devises en émettant massivement des
instruments libellés en peso. Ces titres ont été
facilement absorbés par des marchés de capitaux
domestiques de plus en plus profonds et liquides pour
les titres publics mais aussi privés grâce à l’élévation du
taux d’épargne domestique, limitant le recours à
l’endettement en devises(5).
De plus, le cadre légal a été renforcé pour réguler
les entrées massives de capitaux de court terme(6),
inversant le caractère dissymétrique de l’ouverture du
compte de capital. En 1991, les autorités chiliennes ont
ainsi institué l’encaje, consistant en une obligation de
dépôt non rémunéré et pendant un an auprès de la
banque centrale de 20% puis 30% de toute entrée de
capital étranger sous forme de crédit et d’investissement
de portefeuille (titres obligataires puis élargi aux
marchés actions en 1995), avec le souci de ne pas
décourager l’investissement productif de long terme.
Parallèlement, les autorités chiliennes ont souhaité
assouplir les sorties de capitaux afin de soulager les
pressions à l’appréciation du peso. Les fonds de
pension chiliens se sont vus offrir la possibilité d’investir
à l’extérieur, pendant que les entreprises chiliennes
désireuses d’investir à l’étranger ont pu accéder au
marché formel des devises.
En élargissant à nouveau la bande de fluctuation du
peso par rapport au dollar (jusqu’à +/-10% en 1992) puis
en instaurant un panier de devises (1992), les autorités
chiliennes ont permis une plus grande stabilité
aux valeurs en peso des retours d’exportations dans
un contexte de diversification des débouchés
commerciaux.
Conjoncture
20
Ces mesures ainsi que l’essor des marchés de
capitaux domestiques ont facilité une certaine
stabilisation du stock de dette externe et donc une forte
réduction du ratio dette externe/PIB, notamment sa
composante bancaire à court terme. De plus, ces
mesures semblent avoir permis de maintenir des taux
d’intérêt domestiques élevés permettant une réduction
graduelle de l’inflation vers un régime d’inflation
modérée (l’objectif de 3% a été atteint à partir de 1999),
sans déstabiliser le peso. La régulation des entrées
de capitaux a eu un effet positif sur la stabilité
macroéconomique durant la première partie des années
1990, contribuant à maintenir la demande agrégée et un
déficit courant raisonnable.
Les caractéristiques de la crise chilienne de 1982
ont à nouveau été à l’œuvre lors de la crise tequila
mexicaine de 1994-95 (complétés par une crise de
liquidité du secteur public), sans effet de contagion
notoires sur le Chili, alors considéré comme un safe
haven. A contrario, l’Argentine, qui a opté à partir de
1991 pour une libéralisation des flux de capitaux, a du
faire face à une nouvelle crise bancaire en 1995, alors
qu’elle avait retrouvé un certaine stabilité économique et
financière suite à l’instauration du plan de convertibilité(7). La crise mexicaine n’aura induit qu’un
retournement temporaire des flux de capitaux dans la
région, mais a mis en exergue les risques de crise de
liquidité liée au non renouvellement de dettes
obligataires à court terme (Mexique) ou aux fuites de
dépôts bancaires (Argentine).
Investissement et épargne
30
% du PIB
25
20
15
Taux d'investissement
10
Taux d'épargne
Solde extérieur net
5
0
-5
-10
85
87
89
91
93
95
97
99
01
03
Graphique 9
05
07
Source : IFI
Dette externe
90
80
70
60
Autres
Entreprises
en % du PIB
Banques
Gouvernement général
Service de dette externe/Exports Biens et Services (%)
Dette extérieure à CT/Dette totale (%)
50
40
30
20
10
0
1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
Graphique 10
Sources : Banque centrale, IFI, BNP Paribas
...jusqu’au sudden stop de 1998
La crise asiatique de 1997, crise de liquidité
consécutive à un credit crunch du financement bancaire
international sur lequel reposait largement le boom
économique régional, a essentiellement été ressentie au
Chili et en Amérique latine via le canal commercial, suite
à la chute de 30% des prix des matières premières hors
pétrole. Par la suite, le défaut souverain russe d’août
1998 a eu un effet systémique malgré le poids
commercial et financier relativement faible de la
Russie(8). A l’exception du Mexique, l’ensemble des
pays d’Amérique latine a subi à cette occasion un
sévère coup d’arrêt des flux de capitaux au premier rang
desquels le Chili.
Septembre 2009
Flux de capitaux
20
USD mds
Compte financier de la balance des paiements
IDE (flux net)
15
Investissement de portefeuille (flux net)
10
5
0
-5
-10
-15
-20
96
97
98
99
Graphique 11
Conjoncture
00
01
02
03
04
05
06
07
08
Sources : IFI, Banque centrale, BNP Paribas
21
En 1996-97, les autorités chiliennes n’ont pas
souhaité endiguer – par une hausse du taux des
réserves obligatoires ou d’autres mesures – une
nouvelle vague de capitaux étrangers portée par
l’illusion de l’immunité du Chili et du caractère non
répétitif des crises financières. En apparence, les
investisseurs étrangers considéraient cette réserve
obligatoire comme un prix d’option pour investir au Chili,
relativement modique au regard des anticipations
d’appréciation réelle du change. Utilisée par la banque
centrale comme un instrument de désinflation à partir de
1995, l’appréciation réelle du change est devenue
propice au creusement du déficit courant.
Durant toute l’année 1998, la banque centrale a
combattu énergiquement la dépréciation du change en
vendant massivement des devises, de peur de faciliter
le retour de l’inflation dans une économie en surchauffe.
Le contrôle des capitaux a été levé en septembre 1998
afin de maintenir les entées de capitaux en période de
turbulence, mais des choix contestables de policy mix(9)
ont exacerbé la défiance des investisseurs vis-à-vis du
risque chilien, plaçant le Chili dans la même catégorie
que l’Argentine. Dans le même temps, de faibles
contraintes réglementaires sur les sorties de capitaux
ont favorisé des fuites de capitaux de résidents, notamment les fonds de pension pour un montant équivalent à
5% du PIB en 18 mois, contribuant de façon procyclique
à la contraction de la liquidité domestique.
Le Chili a finalement subi le plus important
ajustement macroéconomique depuis le début des
années 1980. Mais l’ajustement du compte courant s’est
globalement avéré plus rapide et la dépréciation réelle
du change moins brutale que pour les autres pays
latino-américains. Toutefois, l’investissement s’est
contracté de 18% en volume sur la seule année 1999,
contribuant à trois trimestres de récession économique,
et le taux d’investissement est tombé de 27% du PIB en
1997 à 21% en 1999.
…absorbé grâce à des fondamentaux relativement
solides
Au-delà de la décision rapide des autorités
chiliennes de laisser flotter le change (septembre 1999),
l’ouverture commerciale et surtout la solidité du système
financier et la faible dollarisation financière expliquent la
Septembre 2009
relative résilience et l’ajustement rapide de l’économie
chilienne sans crise financière (telle qu’au Brésil en
1999) ni effondrement de l’économie (tel qu’en
Argentine en 2001(10)). Un taux d’ouverture commerciale
plus important requière une moindre dépréciation réelle
du change pour éliminer un déficit extérieur. Avec un
déficit courant proche de celui du Chili (-4.5% du PIB en
1997), l’Argentine, moins ouverte que le Chili, aurait
donc du consentir une dévaluation substantielle du
peso. Mais cette solution était potentiellement extrêmement dommageable compte tenu de la forte dollarisation
de l’économie argentine(11). Le secteur public argentin,
endetté quasi-exclusivement en devises (contre 45%
au Chili), faisait plus partie du problème que de la
solution.
En complétant sa politique de ciblage d’inflation par
l’adoption d’un régime de change flexible, le Chili a
accentué l’autonomie de sa politique monétaire vis-à-vis
des chocs de change, un change flexible permettant de
limiter la volatilité des taux d’intérêt et des réserves de
change. En 2001-02, la retentissante crise argentine et
le ralentissement économique mondial lié à l’explosion
de la bulle internet ont ralenti la sortie de crise du Chili,
mais sans déstabilisation macroéconomique. Dans un
contexte à nouveau marqué par une détérioration des
termes de l’échange, le taux de change a joué un
rôle de variable d’ajustement plus efficace qu’en 1998
et la politique monétaire a indubitablement été
contracyclique.
Confiance face à la crise
économique actuelle
De 2003 à 2007, le Chili a connu un niveau de
croissance conforme à son potentiel d’environ 5% par
an et a su capitaliser sur un environnement international
favorable – hausse du cours des matières premières
tirée par la demande mondiale, liquidité mondiale
abondante et conditions financières favorables – pour
consolider davantage ses fondamentaux macroéconomiques. Ceci a permis au pays d’aborder dans
des conditions relativement confortables la crise
financière mondiale larvée depuis l’été 2007, ouverte
depuis l’automne 2008 et à l’origine d’une crise
économique globale de grande ampleur.
Conjoncture
22
Secoué par la crise mondiale…
Compte tenu de la taille relativement réduite et de
l’ouverture de l’économie Chilienne (le taux d’ouverture
commerciale est de 40% du PIB), le choc externe
marqué à l’automne 2008 par un sévère credit crunch
au niveau mondial, une chute de la confiance des
marchés, une récession économique initiée dans les
pays développés n’épargnant pas les pays émergents et
une baisse marquée du prix du cuivre (-70% entre juillet
et décembre 2008), a conduit à un sérieux coup d’arrêt
de l’activité économique chilienne.
Le PIB réel s’est contracté sur quatre trimestres
consécutifs pour s’établir à -0,4% au T2 2009 (-4,2% en
glissement annuel). La demande interne s’est repliée de
9% en glissement annuel au premier semestre 2009,
avec un fort recul de l’investissement (-15%), tandis que
la consommation privée a reculé de 2% sous le double
effet de la hausse du taux de chômage de 7,2% début
2008 à 10,7% en juin 2009 et du resserrement du crédit
à la consommation. Parallèlement, la consommation
publique a augmenté de 7% en glissement annuel au
S1 2009 dans le cadre de la politique de relance
budgétaire, et la contribution nette du commerce
extérieur à la croissance est devenue fortement positive,
compte tenu de la chute plus brutale du volume
des importations (-17%) que de celui des exportations
(-4%).
A l’exception du secteur sylvicole, tous les secteurs
d’activité affichent des performances médiocres. La
production industrielle (16% du PIB réel) a chuté de
12% en glissement annuel au S1 2009. La production
minière, qui représente 7% du PIB réel, mais 14% du
PIB nominal compte tenu de l’incidence de la hausse du
cours du cuivre sur les dernières années, baisse
tendanciellement depuis fin 2007 (- 5% au S1 2009 par
rapport au S1 2008). En dépit d’efforts de la part de
Codelco, principal producteur mondial de cuivre, pour
accroître sa production et réduire la charge des coûts
d’exploitation, la société nationale a connu un premier
semestre 2009 très difficile malgré une taux de change
favorable. Les services financiers (19% du PIB réel) et
le secteur de la construction (8% du PIB réel) ont vu leur
activité décroître respectivement de 2% et 4%. Le
secteur aquacole – le pays est le second producteur
mondial de saumon – est en plein marasme, affecté
Septembre 2009
depuis de nombreux mois par une épidémie qui décime
une industrie intensive et soulève des interrogations
d’ordre environnemental, sanitaire et social.
Structurellement excédentaire depuis 2004, le
compte courant du Chili s’est rapidement dégradé à
partir de la mi-2008 en lien avec la résilience de la
demande interne jusqu’à l’automne, la détérioration des
termes de l’échange et la dépréciation du peso (-25%
en quatre mois) à l’origine d’une hausse de 31% des
importations sur l’année. Au cours de la même période,
les exportations totales ont baissé de 2% sous l’effet de
la chute de plus de 8% des exportations minières
représentant toujours près de 60% des exportations du
pays. L’excédent commercial a été divisé par quatre en
2008 à 4,6 milliards de dollars et le solde du compte
courant est passé d’un excédent de 7,2 milliards de
dollars (4,4% du PIB) en 2007 à un déficit de 3,4
milliards (2,0% du PIB) en 2008, malgré la baisse du
déficit du compte de revenus (-21% à 9% du PIB en
2008) induite par les moindres rapatriements de profit
opérés par les nombreuses multinationales implantées
au Chili. Depuis le début de l’année, l’effondrement des
importations lié à la contraction de la demande interne
et au rebond du prix du cuivre (notamment sous
l’impulsion de la demande chinoise qui absorbe 17%
des exportations chiliennes devant les Etats-Unis (12%)
et le Japon avec (11%)) a permis un redressement
rapide des soldes commercial et courant.
Contrairement aux précédents épisodes de crise
financière et à ce qui a pu être observé récemment dans
d’autres pays, le compte de capital du Chili s’est
sensiblement amélioré au second semestre 2008. Les
flux d’investissement direct étranger ont continué
d’affluer dans le pays, atteignant un montant record de
16,8 milliards de dollars (10% du PIB) en 2008 soit
+25% en un an, positionnant le Chili largement devant
les deux principales économies latino-américaines
(Brésil et Mexique) en termes d’IDE rapporté au PIB.
Dans le même temps, les flux d’investissement chilien à
l’étranger
ont
progressé
fortement,
limitant
l’augmentation des flux nets d’IDE à 3,4% en 2008 et
accentuant leur chute au S1 2009 (-47% par rapport au
S1 2008), dans un contexte de recul substantiel des
entrées d’IDE. Attendu autour de 1% du PIB cette
année, le déficit du compte courant devrait malgré tout
demeurer couvert par les entrées nettes d’IDE.
Conjoncture
23
Exportations et balance commerciale
Croissance économique
10
30
g.a., %, termes réels
8
20
6
4
10
2
0
0
-2
-4
Croissance du PIB réel
Croissance du PIB réel (t/t)
Consommation privée
Consommation publique
Contribution nette du commerce extérieur à la croissance
Investissement
-6
-8
-10
97
98
Graphique 12
99
00
01
02
03
04
05
06
07
08
-10
-20
-30
09
Sources : Banque centrale, BNP Paribas
Indicateur d'activité et production minière
Graphique 15
Sources : Banque centrale, BNP Paribas
Comptes externes (USD mds)
IMACEC (m/m % var., cvs)
IMACEC (% gliss.annuel, cvs)
Production minière (% gliss.annuel)
20
16
12
8
4
0
-4
-8
-12
-16
22 USD mds, cumul sur 3 mois
20
Autres exports
18
Agriculture
16
Produits manufacturés
14
Produits miniers
12
10
Balance commerciale
8
6
4
2
0
-2
-4
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Compte courant
Balance commerciale
Balance des revenus
IDE (flux entrants nets)
Investissement de portefeuille (flux entrants nets)
8
6
4
2
0
-2
-4
-6
-8
2007
2008
96
2009
Graphique 13
Sources : Banque centrale, INE
Prix du cuivre, taux de change et indice boursier
Indice base 100 = Janvier 2007
160
150
140
130
120
110
100
90
80
Prix du cuivre
70
Indice boursier
60
Taux de change nominal CLP/USD
50
40
2007
2008
Graphique 14
Echelle inversée
97
98
99
00
01
02
03
04
05
06
07
08
09
Source : Banque centrale
Graphique 16
Investissements (flux nets)
40
50
60
70
80
90
100
110
120
130
140
150
160
Investissements de portefeuille
Investissements en actions
2
Investissements de portefeuille par les
fonds de pension domestiques
1
0
-1
-2
-3
-4
2007
2009
Sources : Data Insight, BNP Paribas
Septembre 2009
2008
Graphique 17
Conjoncture
2009
Sources : Banque centrale, BNP Paribas
24
Le déficit du compte financier du Chili est
structurellement élevé du fait d’importantes sorties de
portefeuille imputables essentiellement aux actifs placés
à l’étranger par les fonds de pension domestiques et les
fonds souverains. Or, l’intensification de la crise
financière a accentué l’aversion au risque des fonds de
pensions chiliens qui ont rapatrié une partie de leurs
actifs localement (la valeur des actifs à l’étranger
a chuté de moitié entre mai et décembre 2008 à
21 milliards de dollars) participant au soutien du compte
de capital.
Cependant, tirant avantage de l’amélioration des
conditions sur les marchés financiers internationaux
observée ces derniers mois, les fonds de pension
chiliens ont opéré une réallocation de portefeuille
notable au Q2 2009. De plus, suite à la baisse drastique
des taux d’intérêt chiliens depuis le début de l’année, les
flux financiers liés à des opérations d’arbitrage de taux
d’intérêt (carry trade) au profit de pays voisins,
notamment le Brésil, ont dépassé cinq milliards de
dollars au S1 2009. Ces récents mouvements,
conjugués à la baisse des IDE, pèsent sur le compte de
capital, sans toutefois soulever un risque majeur de
déstabilisation de la balance des paiements.
Pour le second semestre 2009, dans un contexte
toujours incertain tant au niveau international que local,
certains indicateurs avancés (indices de confiance et
indicateurs économiques mensuels) annoncent une
certaine stabilisation de l’économie chilienne, permettant d’envisager une reprise progressive de l’activité
économique d’ici la fin de l’année. Le Chili ne devrait
toutefois pas échapper à une contraction du PIB réel de
l’ordre de 1,5 % en 2009, après +3,2% en 2008. Dans
l’hypothèse d’une amélioration de l’environnement international et compte tenu de la solidité des fondamentaux
et de la relative efficacité de la politique macroéconomique, la croissance économique pourrait
atteindre 3,5% en 2010.
…mais des « amortisseurs » solides et des atouts pour
rebondir
Plusieurs facteurs semblent avoir atténué l’intensité
de la crise économique au Chili qui dispose d’atouts
indéniables pour rebondir relativement rapidement.
Septembre 2009
Une position extérieure confortable
Au cours des dernières années, la position de
liquidité extérieure du Chili s’est renforcée. Les
excédents courant et budgétaire ainsi que l’intervention
de la banque centrale sur le marché des changes entre
avril et septembre 2008, destinée à limiter l’appréciation
du peso et à soutenir la compétitivité des exportations
par l’achat de devises, ont permis au pays d’amasser un
montant significatif de réserves de change (24 milliards
de dollars actuellement), auquel s’ajoutent les
16 milliards de dollars du fonds de stabilisation
économique principalement investis sur les marchés
internationaux et les 36 milliards de dollars d’actifs
étrangers détenus par les fonds de pension chiliens.
Au total, le Chili a les moyens d’honorer ses
engagements externes à court terme. Ceux-ci ont
d’ailleurs diminué depuis le début de l’année, participant
à l’allongement de la maturité moyenne de la dette
externe des corporates et des banques chiliennes, qui
constitue l’essentiel de la dette externe du pays.
L’exposition extérieure du secteur privé a légèrement
baissé, le stock de dette externe en progression ces
dernières années s’étant réduit de 69 milliards de
dollars en septembre 2008 à 64 milliards en juin 2009
(38% du PIB de 2008).
Un système financier développé et solide
La dégradation du risque de crédit a été atténuée
par la solidité du système financier chilien, considéré
comme l’un des plus sophistiqué et liquide parmi les
pays émergents. Dans un contexte de credit crunch
international, les marchés de capitaux domestiques, qui
ont profité ces dernières années du développement des
fonds de pension, ont permis aux entreprises chiliennes
de substituer le financement local au financement
externe. Les émissions de titres de corporates sur le
marché domestique ont atteint 2,1 milliards de dollars
au S1 2009 contre 0,8 milliard un an plus tôt. Le projet
de réforme des marchés de capitaux repoussé compte
tenu de la crise pourrait être présenté au congrès dans
les prochaines semaines. Les autorités chiliennes
souhaitent voir la crise financière comme une
Conjoncture
25
opportunité et ambitionnent de faire de Santiago une
grande place financière régionale en ouvrant l’accès au
marché local à de nouveaux acteurs, notamment les
investisseurs institutionnels étrangers et les institutions
multilatérales.
Le système bancaire est bien régulé, supervisé et
capitalisé. Les pratiques en termes de gestion des
risques et de management sont strictes. Toutefois, les
autorités monétaires souhaitent encore renforcer la
régulation financière et les exigences en termes de
capitalisation des banques. Le ratio encours de crédit
bancaire au secteur privé/PIB est élevé (75%). Le crédit
ne s’est pas tari depuis l’automne, mais sa progression
a ralenti fortement (+6% en glissement annuel en juillet
2009 contre +20% en juillet 2008), notamment dans
le segment du crédit à la consommation. Malgré
l’assouplissement drastique de la politique monétaire,
sa transmission aux taux d’intérêt bancaires a été
mesurée. Dans un contexte d’augmentation des prêts
non performants (de 1% des encours en décembre
2008 à 3.5% en avril 2009), les banques ont augmenté
leurs marges d’intermédiation et maintiennent des
pratiques de financement assez prudentes soutenant
leur profitabilité.
Des leviers de politique macroéconomique
contracyclique
En 2008, dans un contexte de résilience de la
demande domestique et de boom des prix alimentaires
et énergétiques, les autorités monétaires se sont
employées à lutter contre l’appréciation du peso et
l’accélération de l’inflation (jusqu’à un taux annuel de
+9,9% en octobre 2008). Puis, à partir d’octobre, la
banque centrale a interrompu son programme d’achat
de devises pour se focaliser sur la stabilisation du
système financier, en coordination avec le Trésor. A
cette fin, elle a mis en place un programme de swap de
devises de cinq milliards de dollars destiné à fournir de
la liquidité dollar aux banques. Le trésor a déposé un
milliard de dollars auprès des quatre principales
banques locales, et les opérations de Repo ont été
largement utilisées et étendues pour soutenir la liquidité
en monnaie locale.
Septembre 2009
Depuis le début de l’année, la contraction de
l’activité économique et la rapidité du processus de
désinflation (l’inflation s’établit à +0.3% sur douze mois
en juillet, bien en dessous de la cible d’inflation à moyen
terme de 3%) a conduit la banque centrale a réduire
drastiquement son taux directeur (-775 points de base
en sept mois) à un niveau historiquement bas de 0.5%
depuis juillet et pour une durée annoncée de six mois.
Elle a aussi fixé le taux interbancaire à six mois au
niveau du taux directeur pour renforcer les pressions à
la baisse sur les taux de marché et aplatir la courbe des
taux.
Parallèlement au relâchement de la politique
monétaire, le gouvernement dispose d’importants
leviers en matière de stimulus budgétaire compte tenu
de sa position financière très favorable. Le programme
de relance est estimé à 4,5 milliards de dollars (3,0% du
PIB) pour 2009, financés en recourant à l’endettement
sur le marché domestique (la dette publique devrait
augmenter de 5% du PIB en 2008 à 8% cette année)
mais surtout via le fonds souverain, dont 4 milliards de
dollars ont d’ores et déjà était rapatriés et débloqués
(une seconde tranche du même montant pourrait être
débloquée d’ici la fin de l’année). Cela a participé avec
le rebond du prix du cuivre à l’appréciation du peso
observée depuis le début de l’année (+15%). Les
priorités du gouvernement portent sur le soutien du
programme d’infrastructure, des transferts directs à
destination des foyers les plus démunis, le subventionnement de l’emploi des jeunes, le financement du
plan d’investissement de Codelco, des baisses temporaires d’impôts pour les PME et le soutien du crédit par
l’intermédiaire des banques publiques.
Selon le régime fiscal chilien, l’évolution des
dépenses publiques doit respecter une cible structurelle
définie en fonction du prix du cuivre sur longue période
et du niveau de la croissance potentielle, ce qui permet
de maintenir le niveau des dépenses en période de
baisse du prix du cuivre. La règle de surplus structurel
initialement fixée à 1% du PIB a été réduite à 0,5% en
2008 et désormais à 0%. Toutefois, le gouvernement a
annoncé qu’il prévoyait un déficit structurel de 0,4% du
PIB cette année. Le déficit budgétaire est attendu à 4%
du PIB en 2009, après +6,7% du PIB en moyenne
depuis 2005, et devrait se redresser progressivement
(-1,0% attendu en 2010) à mesure que les conditions
économiques se normaliseront.
Conjoncture
26
Service de dette externe à court terme* et
réserves de change
Encours et croissance du crédit
USD mds, *dette à court terme + dette à long terme à amortir dans les 12 mois
30
25
Investissements directs : prêts intra-groupe
Entreprises
Banques
Gouvernement général
Réserves de change
25
20
20
Encours de crédit (mds de pesos)
70
Croissance du crédit (gliss.annuel %)
60
50
15
40
10
10
30
5
5
15
20
10
0
98
99
00
01
02
03
04
05
06
07
08
09
juin
Source : Banque centrale
Graphique 18
Actifs des fonds de pension chiliens
USD mds
135
105
39.1
39.5 35.6
90
75
37.7
40.4 43.0
38.5
35.3 33.8
31.9 36.0
27.6
28.6
60
19.3 19.8
45
30
71.5
83.7 79.0
76.1 80.0
74.9
60.0
67.4
73.1 71.8
21.1
64.7
49.7 50.4 53.1
20.8 19.1
21.0 24.4
56.5 60.1 61.3 61.2
29.5
63.5 68.4 66.2
15
012/06 12/07
12/08
07/09
Sources : SAFP, BNP Paribas
Graphique 19
Graphique 21
Développement du système financier
Source : Banque centrale, BNP Paribas
% per annum
Inflation (IPC)
10
9
8
Taux d'intérêt nominaux (TPM)
7
6
5
4
3
2
1
0
-1
Taux d'intérêt réels (TPM-IPC)
-2
-3
2003
2004
2005
2006
2007
2008
Graphique 22
2009
Sources : Banque centrale, BNP Paribas
Position financière du secteur public
Capitalisation boursière/PIB (USD)
Dette publique/PIB (%)
120
Brésil
Moyenne années 90
100
0
Taux d'intérêt et inflation
Actifs étrangers
Actifs domestiques
120
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Argentine
Chili
Moyenne 2000-08
80
Moyenne 1995-2004
Moyenne 2005-08
70
60
80
50
Colombie
60
40
Mexico
40
Brésil
Mexico
20
Venezuela
20
30 Venezuela
Chili
10
Colombie
0
0
0
Graphique 20
20
40
Crédit/PIB ( monnaie locale)
60
80
Sources : IFI, Banque centrale, BNP Paribas
Septembre 2009
-6
-4
-2
Graphique 23
Conjoncture
0
2
4
6
Solde budgétaire/PIB (%)
8
Sources : FMI, BNP Paribas
27
Bilan : une économie toujours
émergente
Considéré comme un leader régional en termes de
stabilité institutionnelle et de développement économique et financier, le Chili affiche des indicateurs
socioéconomiques relativement décevants. D’importants
défis restent à relever pour que le pays assure son
développement économique à moyen et long terme afin
d’intégrer le club des pays développés.
Un exemple de stabilité institutionnelle et
macroéconomique…
La faible volatilité de l’activité économique, facteur
prépondérant dans la prise de décision d’un investisseur
et signe de maturité d’une économie, a baissé
tendanciellement au Chili depuis les années 1980, alors
qu’elle a augmenté sensiblement en Argentine et au
Venezuela, pays menant des politiques économiques
considérées comme hétérodoxes et difficilement
soutenables à moyen terme. La qualité de l’environnement institutionnel chilien est soulignée par les
indicateurs de gouvernance de la Banque mondiale qui
classe le Chili au 28e rang mondial (sur 205 pays
répertoriés) pour sa stabilité sociopolitique, le respect
des principes démocratiques et de l’état de droit,
l’ « effectivité » du gouvernement, et le contrôle de la
corruption. Selon les indicateurs de compétitivité
élaborés par le Forum Economique Mondial, le Chili se
classe aussi 28e sur 137 pays grâce notamment à une
bonne « efficience » des marchés et à la sophistication
du système financier, mais se positionne moins bien en
termes d’innovation et d’éducation secondaire et
supérieure(12).
…mais des indicateurs socioéconomiques contrastés…
Chili affiche toujours avec le Brésil la dispersion des
revenus la plus forte. Le caractère endémique des
inégalités de ressources stigmatise la difficulté et le
temps nécessaire pour gommer des disparités liées à
une structure sociale relativement cloisonnée et limitant
la mobilité sociale, au profit d’une certaine forme
d’oligarchie héritée du colonialisme.
…au centre des enjeux à moyen et long terme
Malgré les efforts en termes de politique sociale
menés par les gouvernements successifs, la réduction
des inégalités passant par une société plus inclusive
demeure un objectif prioritaire pour sauvegarder le
compromis institutionnel. Bien que le Chili présente l’un
des niveaux de prélèvements obligatoires parmi les plus
élevés en Amérique latine (18% du PIB, soit le double
de celui du Mexique mais la moitié de celui du Brésil),
ce taux demeure nettement plus bas que la moyenne
des pays de l’OCDE, notamment en Europe, ce qui
explique le caractère faiblement redistributif de la
politique sociale chilienne.
Le boom économique des dernières années a
suscité un certain durcissement du climat social, une
partie de la population engageant le gouvernement de
Michelle Bachelet à se départir de sa rigueur budgétaire
pour dépenser plus largement les excédents accumulés.
Mais dans un contexte économique aujourd’hui
dégradé, l’opinion publique confirme son attachement
au « modèle chilien » et soutient massivement l’action
du gouvernement engagé dans une politique de
stabilisation et de relance de l’économie.
Volatilité de la croissance économique
10
9
Ecart-type sur 10 ans
Argentine
8
Les critères liés au développement humain et au
niveau de vie situent le Chili en tête des pays
d’Amérique latine, mais assez loin derrière la moyenne
de l’OCDE. Surtout, le dynamisme et la relative stabilité
de la croissance économique ne se sont pas
accompagnés d’une amélioration des conditions de
répartition de la richesse nationale. Dans un souscontinent considéré comme des plus inégalitaires, le
Septembre 2009
7
Brésil
Chili
Colombie
Mexique
Venezuela
6
5
4
3
2
1
0
89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08
Sources : FMI, BNP Paribas
Graphique 24
Conjoncture
28
développement du potentiel en termes d’énergies
renouvelables, ainsi que l’amélioration de l’accès des
PME aux sources de financement sont autant de
domaines dans lesquels le Chili doit encore investir
davantage pour générer de nouveaux relais de
croissance soutenable et plus équitable.
PIB par tête en parité de pouvoir d'achat (2008)
50000
45000
40000
35000
30000
25000
20000
15000
10000
5000
0
PIB/tête PPA (USD)
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ˆ
Graphique 25
Source : FMI
Indicateurs de développement socioéconomique
IDH*
Inégalités**
Gouvernance***
EU
0,950 (15)
40,8
2,5 (23)
Israël
0,930 (24)
39,2
3,9 (64)
Corée du Sud
0,928 (25)
31,6
3,5 (49)
Chili
0,874 (40)
54,9
2,8 (28)
Argentine
0,860 (46)
51,3
5,5 (107)
Mexique
0,8421 (51)
46,1
5,3 (100)
Brésil
0,807 (70)
57,0
5,2 (98)
Chine
Afrique du
Sud
0,762 (94)
46,9
6,1 (140)
0,670 (125)
57,8
4,1 (70)
Inde
0,609 (132)
36,8
5,4 (102)
Tableau 2
Sources : Banque mondiale, PNUD, BNPP
* Indicateur de Développement Humain (de 0 à 1, classement mondial
entre parenthèses)
** Indice de GINI (de 0 : parfaite répartition à 1 : concentration des
revenus)
*** Indicateur de la Banque mondiale recalculé (de 1 : excellente
qualité des institutions à 10 : instittuions médiocres)
L’éducation et le capital humain, le système de
retraite dual (les trois quarts des pensions allouées
demeurent à la charge de l’Etat en grande partie via le
minimum vieillesse, un quart seulement étant financé
par les fonds de pension), la recherche et
développement, les nouvelles filières d’activités à plus
forte valeur ajoutée, l’indépendance énergétique
(notamment vis-à-vis du gaz argentin) et le
Septembre 2009
Dans un contexte de globalisation des marchés, la
crise mondiale initiée aux Etats-Unis à l’été 2007 s’est
propagée rapidement aux autres pays développés et
l’utopie du découplage économique entre pays avancés
et émergents s’est progressivement fissurée pour
s’effondrer à l’automne 2008. Traditionnellement à
l’avant-garde des crises économiques et financières
depuis les années 1980, les pays d’Amérique latine
brillent aujourd’hui par leur absence au panthéon des
régions les plus touchées par la crise. Cette relative
résilience du sous-continent a mis en exergue les
progrès réalisés ces dernières années en termes de
politiques macroéconomiques.
Plus petite et plus ouverte économiquement et
financièrement et que ses voisines, l’économie chilienne
toujours insuffisamment diversifiée, prouve une nouvelle
fois que sa matrice de développement fondée sur des
réformes structurelles profondes et la crédibilité des
politiques économiques axées sur une amélioration à
moyen et long termes des conditions économiques est
opérante en période de fortes turbulences. Précurseur
régional de l’orthodoxie macroéconomique, le Chili se
positionne pour une normalisation relativement rapide
des conditions économiques, à l’instar du Brésil, du
Pérou voire de la Colombie, alors que le Mexique est
très durement touché par la récession américaine et que
la trajectoire économique de l’Argentine et du
Venezuela laisse les analystes perplexes. Mais au-delà
des principes de saines politiques économiques, le Chili
se démarque surtout par la stabilité de son cadre
institutionnel que les élections présidentielles de
décembre 2009 ne devraient pas remettre en cause
quelqu’en soit le résultat.
Conjoncture
29
Pourtant, les revendications sociales demeurent
fortes du fait de la dichotomie entre d’un côté la stabilité
et le dynamisme économique du pays et de l’autre la
lenteur des progrès socioéconomiques. Ainsi bien que
les indicateurs macroéconomiques du Chili puissent
faire pâlir d’envie la plupart des pays développés, ses
indicateurs socioéconomiques ainsi que la structure de
son économie le placent toujours parmi les pays
émergents.
Achevé de rédiger le 31 août 2009
[email protected]
NOTES
(1) La flexibilisation du marché du travail a été opérée à travers
une réduction substantielle des coûts de licenciement et la
suppression des droits de grève et des syndicats (1973-79),
puis leur restitution dans des conditions très restrictives après
le rétablissement des conventions collectives.
(2) Parallèlement, certains pans de l’économie domestique ont
été « sacrifiés », concurrencés par les importations pour
lesquelles les barrières tarifaires ont été abaissées sans
permettre une adaptation progressive de l’appareil productif.
(3) La maturité des « billets à ordre » émis par la banque
centrale a progressivement été allongée (de 90jours, soit
l’instrument de référence, jusqu’à 20 ans en 1993) dans le but
de faciliter la développement de la courbe des taux et les
marchés de titres à plus longue échéance. Dans le même
temps, la consolidation des finances publiques a réduit
progressivement l’utilisation des bons du trésor dans les
opérations de la banque centrale.
(4) A noter toutefois que des « scories » hérités de la période
autoritaire, tels que la nomination de sénateurs à vie, ont
entaché et ralenti le processus législatif de réformes jusqu’à la
fin des années 1990.
(5) Notamment de la part d’un secteur public se cantonnant à
émettre des titres en monnaie locale généralement indexés
sur l’inflation.
(6) En ouvrant une brèche dans le triangle des incompatibilités
identifiées par le modèle de Mundell-Fleming (mobilité des
capitaux, stabilité des changes et indépendance de la politique
monétaire), les restrictions aux mouvements de capitaux
permettent aux autorités de recouvrer une part d’autonomie
dans la fixation du niveau de leur taux d’intérêt.
Septembre 2009
(7) Mis en place en 1991 et abandonné dix ans plus tard, le
currency board argentin était fondé sur un ancrage de change
à parité peso/dollar, la possibilité de nouer librement des
contrats en dollar, l’adossement de la base monétaire aux
réserves de change supposant une interdiction de monétiser
les déficits publics, et l’abolition de l’indexation des prix.
(8) Le défaut russe a fragilisé le bilan des intermédiaires
financiers internationaux fortement « leverages »; et les pertes
subies ont conduit à un « liquidity crunch » pour de nombreux
marchés émergents. De plus, la décision du FMI de ne pas
soutenir la Russie a accentué l’aversion au risque émergent
en créant les conditions d’un phénomène d’aléa moral inversé.
Les flux de capitaux vers l’Amérique latine n’ont repris que très
lentement et les conditions de financement externe n’ont
retrouvé leur niveau d’avant la crise russe qu’en 2003, sachant
qu’entre temps la crise argentine de 2001 est intervenue.
(9) Le resserrement des marges de fluctuation du change et le
durcissement drastique de la politique monétaire ont en effet
été interprétés par les marchés comme la réponse des
autorités chiliennes à un risque de mismatch de devises dans
le bilan des entreprises locales. Ce signal était apparemment
sans fondement puisque ce problème concernait principalement des filiales de multinationales.
(10) Caractérisé par une ruée bancaire, l’insolvabilité
généralisée du système bancaire, un défaut souverain, une
chute du change et l’abandon du currency board, un
effondrement du PIB de 15% en un semestre, et une crise
sociale et politique majeure.
(11) La dollarisation est positivement corrélée à la faiblesse
institutionnelle, au manque de crédibilité de la politique
économique, au pass-through du change sur l’inflation, aux
réticences envers la flexibilisation du change, à la volatilité de
l’activité économique et à la vulnérabilité aux fuites de
capitaux.
(12) La dernière étude PISA de l’OCDE sur l’évaluation des
compétences scolaires à 15 ans datée de 2006 place le Chili
devant le Mexique, le Brésil et la Colombie mais loin derrière
la moyenne de l’OCDE.
Version électronique consultable avant l’édition papier
sur :
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Rédacteur en chef : Philippe d’Arvisenet
Conjoncture
30
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