Le bitcoin, une monnaie d`avenir

Transcription

Le bitcoin, une monnaie d`avenir
LE BITCOIN
UNE MONNAIE D’AVENIR ?
Valentin BUREAU
Tristan CLAVERIE
Léo LOZACH
Loïc PELLEAU
Adrien REUZEAU
3ème année
Département Informatique
Remerciements
Nous tenions, avant tout, à remercier Madame Hélène PRIGENT, professeure de communication, pour nous avoir encadré tout au long de ce semestre et pour tous ses conseils avisés et très précieux.
Nous remercions également Monsieur Pierre NOIZAT, co-fondateur et Directeur de l’exploitation de la start-up Paymium, très impliqué dans le développement et la démocratisation de cette monnaie, pour nous avoir accordé
un entretien le vendredi 5 décembre 2014.
Nous souhaitons par ailleurs remercier Monsieur Simon LE BAYON et Madame Chloé LAILIC pour leurs différentes interventions réalisées dans le cadre
de ce projet.
Le bitcoin - I
Sommaire
Remerciements
I
Sommaire
II
Introduction
1
1 Les monnaies décentralisées : un modèle monétaire
controversé
3
1.1 Le fonctionnement d’une monnaie décentralisée : le bitcoin . . .
1.1.1 L’utilisation en pratique
3
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
1.1.2 Les besoins qui ont provoqué la création du bitcoin . . . . .
4
1.1.3 Les technologies utilisées pour son fonctionnement . . . . .
5
1.2 Les nouveautés apportées par le bitcoin . . . . . . . . . . . . . . . .
7
1.2.1 Un concept central : l’anonymat . . . . . . . . . . . . . . . .
7
1.2.2 La sécurité au cœur du système . . . . . . . . . . . . . . . . .
9
1.2.3 Une monnaie universelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
1.3 Le cadre légal et fiscal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.3.1 Le point de vue des États . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.3.2 L’avis des banques centrales sur une monnaie qui leur
échappe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.3.3 Les mesures fiscales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
2 L’intégration du bitcoin dans la sphère socio-économique
17
2.1 Le particulier et le bitcoin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
2.1.1 Achat de biens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
2.1.2 Placement d’argent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
2.1.3 Une monnaie sans frontière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
2.2 Une opportunité pour les entreprises . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
2.2.1 De nouveaux clients ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
2.2.2 Un investissement à moindre coût . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.2.3 Un exemple d’intégration : showroomprive.com . . . . . . . 24
2.3 Risques et dérives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.3.1 Protection du consommateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.3.2 Des transactions mal encadrées . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
2.3.3 Fins criminelles : blanchiment de capitaux et financement
du terrorisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
II - Le bitcoin
3 Le bitcoin : une mode ou une alternative aux monnaies
fiduciaires ?
3.1 L’aspect environnemental . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.1.1 Le coût d’un bitcoin . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.1.2 Une puissance de calcul gaspillée . . . . . . . . .
3.1.3 Comparaison à un système classique de monnaie
3.2 Un possible effet de mode . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2.1 Une expérience libertarienne ? . . . . . . . . . . . .
3.2.2 La tendance éphémère du numérique . . . . . .
3.2.3 Vers une nouvelle monnaie décentralisée ? . . . .
3.3 Une alternative durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.1 Un modèle conçu pour durer . . . . . . . . . . . . .
3.3.2 Des exemples de monnaies qui ont déjà marché
3.3.3 Les monnaies fiduciaires sont-elles en danger ? . .
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44
Conclusion
46
Annexe A Compte-rendu de la conférence « Les mathématiques et la cryptographie réinventent la monnaie : le
bitcoin »
IV
Annexe B Entretien avec Pierre NOIZAT, co-fondateur de la
start-up Paymium
XII
Annexe C Entretien avec Éric LARCHEVÊQUE, co-fondateur
de La Maison du bitcoin et de la start-up Ledger
XVIII
Bibliographie
XXV
Table des figures
XXXI
Le bitcoin - III
Introduction
Intéressés par les nouvelles technologies qui se rapportent au domaine
de l’informatique, nous avons voulu dresser un état des lieux de la monnaie
bitcoin. Son développement, de plus en plus en vogue actuellement, a également suscité notre curiosité. Le système monétaire associé à la technologie
bitcoin nous a semblé novateur et prometteur.
Le protocole utilisé pour le fonctionnement du système monétaire bitcoin
a été conçu au cours de l’année 2009 par un développeur non identifié utilisant le pseudonyme « Satoshi NAKAMOTO ». Plusieurs hypothèses concernant
l’identité du créateur du bitcoin ont vu le jour. Au début, les suspicions se sont
portées sur Hal FINNEY, un cryptographe américain. Il a beaucoup contribué
au développement du bitcoin, mais fut rapidement écarté de la liste (car il
a échangé des centaines de messages et effectué les premières transactions
en bitcoins avec le vrai NAKAMOTO). En mars 2014, le magazine américain
Newsweek a déclaré avoir découvert sa véritable identité : NAKAMOTO serait Dorian Satoshi NAKAMOTO. Cette hypothèse est de loin la plus médiatisée,
mais ne saurait être considérée sérieusement au vu des nombreuses incohérences qu’elle comporte, à la fois dans les méthodes d’investigations et dans
les preuves récoltées par le magazine. Enfin, les soupçons se dirigent désormais vers Nick SZABO, un cryptologue américain. Cependant, les informations
le concernant sont extrêmement pauvres.
Les procédés cryptographiques employés permettent une gestion totalement décentralisée de l’unité monétaire, qui ne dépend donc absolument
pas d’une autorité centrale. De ce fait, il est difficile d’identifier les utilisateurs de bitcoins avec précision (âge, sexe, catégorie socio-professionnelle
par exemple).
Nous nous sommes ainsi intéressés à la place du bitcoin dans le système
socio-économique actuel, où les monnaies fiduciaires 1 sont utilisées dans la
quasi-totalité des transactions. Pourtant, cette nouvelle devise (ayant une valeur de 300 euros en décembre 2014) permet aussi d’effectuer ses achats.
1. Monnaie dont la valeur est basée sur la confiance plutôt que sur son coût de production
(exemple : pièces et billets de banque en euros)
1 - Le bitcoin
Comme cette monnaie a connu un développement extrêmement rapide,
nous nous sommes demandés si le bitcoin est une monnaie d’avenir.
Pour répondre à cette question, nous allons tout d’abord nous intéresser
au modèle monétaire du bitcoin en étudiant son fonctionnement et les nouveautés qu’il apporte par rapport aux monnaies dites classiques. Nous ferons
également un état des lieux du cadre légal et fiscal.
Ensuite, nous étudierons plus particulièrement son intégration dans
la sphère socio-économique actuelle. Nous présenterons les potentialités
offertes par le bitcoin pour les particuliers ainsi que la possibilité pour les
entreprises de l’accepter comme moyen de paiement. Nous exposerons par
la suite les dérives et risques associés à cette monnaie.
Enfin, nous étudierons la question de la pérennité d’une telle monnaie
décentralisée : les facteurs environnementaux, les aspects concernant l’hypothétique effet de mode autour du bitcoin et les composantes de fiabilité
de ce système monétaire.
Le bitcoin - 2
Les monnaies décentralisées : un modèle monétaire controversé
1.1
Le fonctionnement d’une monnaie décentralisée : le bitcoin
1.1.1
L’utilisation en pratique
Contrairement à une croyance très répandue dans la population, acheter ou dépenser des bitcoins est une opération très simple. Il n’est en aucun
cas nécessaire de posséder des compétences avancées en informatique, et
encore moins de comprendre comment fonctionne le réseau bitcoin avec
exactitude. L’utilisation de cette monnaie est en réalité naturelle pour quiconque est amené à effectuer des virements de façon régulière. Afin d’effectuer des achats, un utilisateur doit ouvrir un porte-monnaie virtuel, aussi
appelé « wallet ». Il suffit donc d’installer un logiciel tel que Bitcoin Core ou
MultiBit sur son ordinateur, ou alors de se créer un compte sur une application en ligne comme Hive ou BitGo. Ces services permettent, entre autres, de
ne pas se soucier de devoir protéger son compte soi-même contre la perte
de données ou le vol de son ordinateur. Il est possible de se connecter à son
compte indépendamment de la machine utilisée : il suffit de saisir ses identifiants.
Un compte bancaire est identifié par un International Bank Account
Number (IBAN). Un compte bitcoin est, quant à lui, identifié par une adresse.
Il s’agit d’une chaîne de 33 caractères, incluant chiffres et lettres (minuscules
et majuscules). Lors de la création d’un porte-monnaie virtuel, une adresse,
une clé publique ainsi qu’une clé privée sont générées simultanément par
un procédé cryptographique. De plus, il est possible d’avoir plusieurs clés
publiques, donc plusieurs adresses. La clé privée permet d’effectuer un
transfert de bitcoins d’un compte vers un autre. Par conséquent elle est
indispensable pour effectuer un achat. Il est donc facile de déduire que si
l’accès à un compte est perdu, les bitcoins stockés dessus seront eux aussi
perdus à jamais. Un porte-monnaie permet de s’écarter du côté technique
des clés privées ou publiques, et de simplifier l’utilisation de bitcoins.
3 - Le bitcoin
Acheter des bitcoins est simple. Certains porte-monnaie permettent de
mettre en relation les différents utilisateurs afin d’en vendre ou d’en acheter.
Il existe aussi des sites d’échange le permettant. Le vendeur fixe les différents
types de paiements acceptés (cela peut aller jusqu’à un achat en liquide).
Pour acheter des bitcoins, il suffit de choisir un vendeur, un montant à acheter
et de valider le paiement. La Maison du bitcoin, à Paris, permet l’achat de
bitcoins par carte bancaire sur borne physique. Il faut savoir qu’un bitcoin
n’est divisible que jusqu’à huit chiffres après la virgule, et que la transaction
n’est possible que si le montant à acheter est présent chez le vendeur. Le
transfert n’est pas instantané, il est préférable d’attendre une heure avant de
considérer que la transaction a été prise en compte.
1.1.2
Les besoins qui ont provoqué la création du bitcoin
Il existe peu de choses aussi simples et aussi complexes que la monnaie.
L’argent fait partie intégrante de notre culture depuis de nombreux siècles
comme monnaie d’échange universelle. Il a donc beaucoup évolué au fil
des années.
Historiquement, l’or fut très important. Sa rareté et sa beauté lui conféraient une valeur, mais il était aussi facilement divisible en pièces de monnaie pour être utilisé dans la vie courante. Cependant, les gens se rendirent
compte qu’il était plus facile de laisser la gestion de son or à une tierce partie
spécialisée dans ce domaine et d’échanger à la place des informations sur
sa possession en or. Il s’agit respectivement des ancêtres des banques et des
billets [1]. Enfin, le dernier grand bouleversement fut en 1971 lorsque Richard
NIXON prit la décision que la valeur du dollar ne serait plus indexée sur celle
de l’or [2]. C’est depuis ce jour que le système monétaire ne repose plus sur
une réalité physique mais seulement sur la confiance.
C’est entre 1998 et 2005 que le cryptologue américain Nick SZABO développa un nouveau modèle monétaire baptisé Bit Gold. Son constat est
le suivant : la valeur de notre monnaie est entièrement dépendante de la
confiance que nous accordons à une tierce partie. On trouve dans ce rôle
les banques étatiques responsables de la gestion de leurs devises respectives.
Cet état de fait a eu des conséquences importantes lors des épisodes d’inflation et d’hyperinflation du 20ème siècle. Pour résoudre ce problème, il a donc
Le bitcoin - 4
imaginé un système beaucoup plus proche de celui de nos ancêtres, où les
paiements étaient effectués en or, ou avec n’importe quel autre matériau
précieux. Ce type de ressource a en effet une valeur intrinsèque indépendante de toute tierce partie, puisque personne n’en a le contrôle [3][4].
Dès lors, la problématique est de sécuriser le système. Il faut qu’il soit
inviolable, que personne ne puisse falsifier une unité monétaire, que personne
ne puisse en voler, que personne ne puisse contrôler le réseau. Il faut aussi
que les transactions soient instantanées et sans intermédiaires. Les travaux sur
le Bit Gold sont laissés à l’état de théorie. Il s’agit d’un modèle très réfléchi
et avancé, mais qui n’a pas été implémenté. Parmi les autres précurseurs du
bitcoin, on trouve le système hashcash d’Adam BLACK [5], le système RPOW
de Hal FINNEY [3] et le système b-money de Wei DAI [6].
En Novembre 2008, Satoshi NAKAMOTO publia l’article qui allait marquer
la genèse du bitcoin. Le protocole derrière cette nouvelle monnaie est très
similaire au protocole Bit Gold décrit par Nick SZABO, ce qui pourrait signifier
qu’il s’agit de la même personne [7].
En janvier 2009, le réseau bitcoin fut officiellement lancé. À ce jour, le
protocole est resté inviolé et tient toutes ses promesses, malgré les nombreuses
tentatives et les études auxquelles il a été soumis depuis sa publication.
1.1.3
Les technologies utilisées pour son fonctionnement
Le bitcoin n’est pas révolutionnaire dans les technologies qu’il utilise, ce
qui ne revient pas à dire qu’il n’a rien inventé. Toutes les technologies utilisées
existaient avant sa création. La réelle innovation derrière le bitcoin, c’est la
manière dont ces technologies ont été utilisées [8].
Le réseau bitcoin est un réseau pair à pair, donc décentralisé. Un réseau
peut être vu comme un ensemble de noeuds reliés entre eux par des flux
d’informations. Dans le cas d’un réseau centralisé, ces flux sont indirects et
passent tous par une autorité centrale. Par exemple, pour effectuer un virement entre deux comptes, l’information va passer par la banque du compte
à débiter et celle du compte à créditer. Dans le cas d’un réseau pair à pair,
les noeuds sont directement reliés entre eux. Chaque noeud est relié à un
5 - Le bitcoin
certain nombre d’autres noeuds qui sont ses voisins. Ainsi, il existe un chemin
entre chaque paire de noeuds du réseau. Dès qu’une information est transmise à un noeud, ce noeud la transmet à son tour à ses voisins. Dans le cas du
bitcoin, une information est une transaction.
F IGURE 1.1 – Opposition entre réseau décentralisé et réseau centralisé
Une transaction est valide s’il y a suffisamment de bitcoins sur le compte à
débiter. De manière assez naturelle, on ne doit pas pouvoir dépenser de l’argent que l’on ne possède pas. Pour cela, toutes les transactions effectuées
sont publiques et regroupées dans un « livre de comptes » appelé blockchain. Pour autant, le système est entièrement sécurisé. Il est possible de voir
les opérations effectuées par chacune des clés publiques, mais l’utilisation de
procédés cryptographiques avancés fait qu’il est impossible de trouver la clé
privée associée à chacune des clés publiques. Ainsi, pour vérifier une transaction, il suffit de retrouver les transactions effectuées par le compte à débiter
et de s’assurer que le solde soit supérieur au montant de la transaction. Ce
fonctionnement est en réalité très proche du système de virements que nous
connaissons : la clé publique d’un compte serait le numéro de compte, et la
clé privée serait l’association nom d’utilisateur et mot de passe permettant
d’accéder à un compte. À travers la blockchain, il est possible de retrouver
le solde de chaque compte : imaginons un nouveau compte, il est crédité
de 80 euros puis débité de 20 euros. Ces transactions sont visibles dans la blockchain, n’importe qui peut donc savoir que le solde de ce compte s’élève
Le bitcoin - 6
à 60 euros. Pour autant, il est impossible de faire le lien entre le numéro de
compte et son propriétaire, de même qu’il n’est pas possible de récupérer le
nom d’utilisateur et le mot de passe permettant d’utiliser cet argent.
En pratique, le fonctionnement du réseau est légèrement différent puisqu’il existe deux types de noeuds : les noeuds actifs et les noeuds passifs. Un
noeud passif va transmettre de manière automatique les informations qu’il reçoit. Un noeud actif va s’intéresser à la véracité de l’information. À chaque
transaction reçue, il va la transmettre en plus de vérifier sa validité. Si elle l’est,
il va l’ajouter à un bloc de transactions qu’il a construit. Au cours de son travail,
un noeud actif est susceptible de trouver une « preuve de travail », prouvant
qu’il a dépensé de l’électricité et de la puissance de calcul [7]. Plus le nombre
de transactions traitées est grand et plus la probabilité de trouver une preuve
de travail est élevée. Cette preuve de travail l’autorise à publier le bloc de
transactions formé et à l’ajouter à la blockchain. Cette blockchain agrandie
sera alors utilisée par tous les autres noeuds du réseau comme référence pour
vérifier une transaction. En échange des ressources utilisées pour faire fonctionner le réseau, la publication d’un bloc rapporte un certain nombre de
bitcoins au noeud en question. Actuellement, ce montant est de 25, et est divisé par deux tous les quatre ans. Ce procédé appelé « minage » est l’unique
moyen de créer des bitcoins. De plus, la probabilité de trouver une preuve de
travail est réajustée toutes les deux semaines pour qu’il n’y en ait qu’une de
découverte toutes les dix minutes en moyenne, peu importe la puissance du
réseau. Ainsi, il n’y aura plus de bitcoins créés après 2140 et il y en aura alors
21 millions en circulation.
1.2
1.2.1
Les nouveautés apportées par le bitcoin
Un concept central : l’anonymat
Comparé aux autres monnaies dites classiques, le bitcoin garantit l’anonymat de toutes les transactions et des utilisateurs. Bien que chaque échange
de bitcoins soit stocké de façon permanente dans la blockchain accessible
à tous, seuls les clés publiques de l’émetteur et du destinataire, la date et le
montant de la transaction sont visibles. Le site blockchain.info [9] affiche en
temps réel l’état de ce fichier ce qui signifie que le solde et les transactions de
n’importe quelle adresse bitcoin peuvent être consultés par tous.
7 - Le bitcoin
Cela peut paraître contradictoire avec la notion d’anonymat et pourtant tout réside sur le principe de transparence du système. Pour avoir un portefeuille bitcoin et donc un compte, il n’est pas nécessaire de renseigner un
nom ou une adresse, et encore moins des coordonnées bancaires. Seuls une
adresse email et un mot de passe sont requis. Ce qui signifie que l’identité de
l’utilisateur derrière la clé bitcoin demeure inconnue.
Il faut cependant éviter de diffuser un QR Code 1 de demande de don
sur un site internet. On permet ainsi à quelqu’un d’associer notre clé de chiffrement publique à notre identité. Une personne mal intentionnée peut lister l’ensemble de nos transactions et ainsi voir les sommes versées ou reçues.
Cette personne peut donc potentiellement savoir ce que l’on a acheté ou
vendu avec cette adresse. Cela peut donc porter atteinte à notre vie privée.
Des techniques existent pour brouiller au maximum les transactions comme
utiliser plusieurs comptes ou utiliser des programmes informatiques spéciaux.
Une analogie peut être faite entre le réseau de navigation internet anonyme TOR et le réseau bitcoin. Tous deux utilisent un réseau pair à pair pour
garantir l’anonymat de leurs utilisateurs. Ils sont en marge des systèmes classiques et empêchent les organisations gouvernementales et les entreprises de
suivre ou d’enregistrer les actions des citoyens. Cette absence de régulation
est souvent le premier argument évoqué par les personnes favorables à ces
systèmes.
On peut aussi noter que le concepteur du bitcoin, Satoshi NAKAMOTO,
a tenu à garder secrète son identité, à l’instar de son réseau.
Il est important de garder à l’esprit que si vous perdez votre mot de passe
pour accéder à votre compte bitcoin, vous ne pourrez pas le réclamer car
vous serez dans l’impossibilité de prouver que ce portefeuille vous appartient.
Les bitcoins restés sur ce compte seront donc perdus. De plus, si quelqu’un découvre votre clé privée, il est, par équivalence, en possession de votre carte
bleue et son code. Il peut donc utiliser vos bitcoins et les transférer sur un autre
compte.
1. Type de code-barres en deux dimensions
Le bitcoin - 8
Ce principe d’anonymat fait du bitcoin un bon moyen pour acheter un
bien de manière totalement anonyme et donc sécurisée. Il convient cependant de faire attention à ce que l’on fait sur le réseau. De la même manière
que sur les réseaux sociaux, toutes vos actions sont enregistrées, même si votre
identité n’est pas directement affichée dans le cas présent.
1.2.2
La sécurité au cœur du système
En plus de l’anonymat, le réseau bitcoin garantit une sécurité absolue sur
l’ensemble des transactions. Tout dans le bitcoin est crypté. Les clés de chiffrement qui permettent d’envoyer ou de recevoir des bitcoins sur un compte
sont basées sur deux algorithmes de hachage : le SHA-256 et le RIPEMD-160.
De plus, comme le système utilise un réseau pair à pair, pour modifier une
donnée, il faut l’accord de la majorité, c’est-à-dire qu’une transaction n’est
effectuée que si la majorité l’a validée. Cela rend impossible la falsification
des comptes dans un cadre normal d’utilisation.
Après cinq années de service, aucune faille n’a été trouvée dans le réseau. Cependant, les cas de sites internet piratés pour récupérer des clés bitcoins sont malheureusement assez courants. Le cas le plus connu est celui
de Mt. Gox, une entreprise japonaise spécialisée dans l’échange de bitcoins,
qui a perdu environ 750 000 bitcoins en février 2014 suite à un piratage. Cela
a conduit à sa faillite et donc à la fermeture des serveurs de stockage des
comptes bitcoins. Des milliers de personnes ont ainsi perdu définitivement leur
l’argent. Les problèmes de sécurité ne proviennent donc pas du système mais
des logiciels et sites internets qui ne sont pas suffisamment protégés.
Il existe cependant deux problèmes. Le premier est ce qu’il se passerait
si la majorité des noeuds du réseau appartenait à une seule entité. C’est-àdire que si un groupe possède plus de 50 % des « voix », il est capable de
valider toutes les transactions. Dans ce cas, cette majorité est aussi capable
d’annuler des transactions et de modifier les données à volonté. Ce problème
est déjà référencé et un correctif sera ajouté, si le besoin s’en fait sentir, par
la communauté de développeurs lors d’une mise à jour du réseau. Ce cas a
failli se produire dans le passé, cependant le groupe en question s’est divisé
de lui-même. Le second problème est d’un tout autre type. Il réside dans les
technologies de cryptage utilisées par le protocole. Les algorithmes SHA-256
9 - Le bitcoin
et RIPEMD-160 sont aujourd’hui reconnus comme sûrs. Si quelqu’un trouvait
les moyens techniques pour décrypter ces codes, il gagnerait un contrôle total du réseau. Le protocole bitcoin est cependant suffisamment souple pour
changer d’algorithmes de hachage et ainsi évoluer en fonction des avancées
scientifiques et technologiques.
Le risque de vol de compte existe et ne doit pas être négligé. Ce risque
ne découle pas du réseau bitcoin mais plutôt du manque de sécurité de certains ordinateurs ou de mauvaises habitudes de sécurité de la part des utilisateurs. Pour un compte stocké sur internet, le mot de passe est l’unique chose
qui protège ce compte. Il convient donc de le faire le plus robuste possible
en mélangeant lettres, chiffres et caractères spéciaux en plus d’avoir une longueur adéquate. L’utilisateur est donc aussi responsable de sa propre sécurité.
Le système bitcoin est sûr. Aucune faille n’a été trouvée et il n’y a aucune
plainte concernant des transactions qui n’auraient pas abouti. Cependant, il
est vivement conseillé d’appliquer des mesures de sécurité du côté des utilisateurs pour empêcher le vol de clé privée. Même le protocole le plus sécurisé
au monde ne saurait protéger un utilisateur de ses propres erreurs.
1.2.3
Une monnaie universelle
Contrairement aux services bancaires traditionnels, aucun prérequis
n’est nécessaire à l’ouverture d’un compte bitcoin. Le système de cette
monnaie décentralisée ne tient pas compte du profil social et des antécédents bancaires d’une personne avant de créer son compte. Un utilisateur
considéré comme « à risque » par une banque, ne sera donc pas refusé sur
le réseau bitcoin. Et pour cause, ce dernier n’a pas besoin de prendre ce
type de précaution car un compte bitcoin ne peut avoir un solde débiteur.
Cette monnaie est universelle et ouverte à tous. Cependant, elle reste
utilisée essentiellement dans les pays développés. La carte ci-dessous répertorie le nombre de commerçants par région où il est possible d’utiliser des
bitcoins pour acheter des biens. Le fait qu’une connexion internet soit nécessaire pour utiliser un compte bitcoin peut expliquer qu’une grande majorité
des commerces acceptant le bitcoin se situent dans des pays développés
[10].
Le bitcoin - 10
F IGURE 1.2 – Carte répertoriant le nombre de commerces acceptant le bitcoin
comme moyen de paiement au 16/12/2014. Source : coinmap.org.
Il est aussi important de noter qu’il y a moins de contraintes pour la tenue d’un compte bitcoin que pour un compte bancaire classique. En effet, un
utilisateur ne doit s’acquitter d’aucun frais, ni pour ouvrir un compte bitcoin,
ni pour garder celui-ci ouvert. Il n’est, par ailleurs, pas obligatoire de l’alimenter avec une somme minimale dès son ouverture. Même les transactions entre
utilisateurs ne demandent pas de frais supplémentaires. Cependant, il est possible de laisser une commission, une sorte de pourboire pour le mineur qui validera cet échange. À titre d’exemple, une étude réalisée en 2013 a révélé que
les Français payent en moyenne 186 euros de frais bancaires par an [11]. Pour
supprimer un compte bitcoin, il suffirait d’effacer sa clé privée. Or, il faudrait
donc qu’un utilisateur prouve qu’elle lui appartient. Mais ce n’est pas possible
à cause de l’anonymat, concept central du protocole. Par conséquent, il est
absolument impossible de fermer un portefeuille bitcoin, alors qu’une banque
ou le détenteur a parfaitement le droit de clôturer un compte.
Le bitcoin est donc une monnaie universelle offrant des avantages non
négligeables par rapport aux monnaies fiduciaires (ouverture de compte possible pour tous, frais de tenue réduits voire inexistants). Malgré ces nouveautés
et avantages, il ne connaît pas le même succès partout, sans doute à cause
d’un manque d’équipements, mais surtout de connaissances à son sujet.
11 - Le bitcoin
1.3
Le cadre légal et fiscal
1.3.1
Le point de vue des États
Depuis quelques années, le bitcoin prend de l’importance et suscite l’intérêt de plus en plus d’acteurs. Certains pays se soucient sérieusement de
l’utilisation qui peut être faite de ces monnaies alternatives. En effet, les États
perdent tout contrôle sur les fonds circulant en bitcoins, contrairement aux
transactions effectuées dans leur devise. Ce sont, pour la plupart, des nations
où le bitcoin est très populaire [Figure 1.3], comme la Chine qui est en train
de légiférer ou bien le Japon qui a décidé de traiter le bitcoin comme un
bien. Par ailleurs, certains pays tels que la Bolivie et l’Équateur refusent de
considérer les monnaies décentralisées comme des monnaies à part entière.
Ils estiment que ces dernières sont dangereuses pour leur économie car elles
facilitent l’évasion fiscale. Cependant, ce point de vue reste minoritaire.
F IGURE 1.3 – Carte du monde présentant la popularité par pays du mot-clef
« bitcoin » dans les recherches Google au 27/11/2014. Source : Google Trends.
Le bitcoin - 12
On pourrait se dire que ce sont uniquement les pays où le bitcoin est populaire qui s’intéressent à ce phénomène, mais ce ne serait pas vrai. Des États,
ou micro-États, tels que l’Île de Man (paradis fiscal sous la tutelle de la couronne britannique) légifèrent en faveur de l’intégration du bitcoin dans leur
économie. Katherine JOHNSON, avocate fiscaliste chez Appleby Global (spécialiste du placement financier offshore), dans son article « Crypto-currencies
and the Isle of Man » du 15 octobre 2014 [12], décrit que l’Île de Man a décidé de ne pas appliquer de TVA 2 aux transactions effectuées en bitcoins. La
spécialiste ajoute que l’Île de Man n’est actuellement pas le seul paradis fiscal
à vouloir légiférer en ce sens : en effet, l’île de Jersey et Gibraltar sont en train
de s’orienter dans la même direction.
Les prises de position de ces paradis fiscaux peuvent sembler anecdotiques. Mais quand on sait que cette île enclavée est placée devant Dubaï en
tant que place financière selon certains classements [13], on se rend compte
qu’une décision prise par l’Île de Man peut avoir de lourdes répercussions sur
les marchés financiers.
1.3.2
L’avis des banques centrales sur une monnaie qui leur
échappe
Les banques centrales sont chargées de prendre toutes les mesures
et décisions liées à la politique monétaire d’un État. C’est pourquoi elles
prennent, elles aussi, part aux débats sur les monnaies décentralisées et
donnent leur avis sur ces nouvelles devises.
Dans la zone euro, la Banque Centrale Européenne (BCE) a été créée
comme institution monétaire de l’Union Européenne (en plus des banques
centrales étatiques déjà existantes) lors de la mise en circulation de la monnaie commune. Dans un rapport présenté en octobre 2012 [14], la BCE préconise une certaine méfiance à l’égard du bitcoin. Elle évoque des problèmes
de sécurité dans le système. Elle justifie ce propos, en rappelant l’incident
survenu en 2011 lorsqu’un utilisateur avait perdu 25 000 bitcoins (soit 500 000
dollars) à cause d’un virus. La BCE met aussi en garde les utilisateurs sur le
mode de change de cette monnaie. Pour elle, c’est relativement dangereux
et risqué. En effet, pour changer des bitcoins en euros (mais c’est aussi valable
2. Taxe sur la Valeur Ajoutée
13 - Le bitcoin
pour les autres devises), il faut absolument qu’une personne rachète les bitcoins. Cela veut donc dire que ce type de monnaie n’est assorti à aucune
garantie de remboursement.
De son côté, la Banque de France est un peu plus ferme que la BCE.
Dans une note du 5 décembre 2013 [15], l’institution expose les dangers liés
au développement de ces devises et prend l’exemple du bitcoin. Pour elle,
le premier danger est la non régulation de ces nouvelles monnaies par une
autorité bancaire (une banque centrale par exemple), ce qui rejoint l’avis de
la BCE sur les garanties de remboursement. D’autre part, elle condamne le
caractère hautement spéculatif du bitcoin, dont le cours oscille beaucoup
et trop rapidement. Pour l’institution, « les concepteurs ont « organisé » la
pénurie de cette monnaie virtuelle » en « limitant la quantité maximale de
bitcoins pouvant être créée et en faisant fluctuer le rythme de création au
cours du temps ».
À l’inverse, le bitcoin a été reconnu en Allemagne comme une devise.
La Deutsche Bundesbank ne partage donc pas le même avis que la Banque
Centrale Européenne et considère désormais le bitcoin comme une « monnaie privée », c’est-à-dire qu’elle est taxée et les profits spéculatifs imposés.
Il n’est donc pas étonnant que les institutions bancaires se préoccupent
et s’inquiètent à ce sujet. En effet, ces nouvelles devises échappent totalement à leur contrôle et à leur supervision. Dans un même temps, des commerçants de l’économie réelle acceptent désormais ce moyen de paiement.
C’est pour cette raison que dans sa note, la Banque de France propose
pour encadrer les risques liés au développement de ces monnaies, la mise
en place d’un agrément obligatoire pour les plateformes de conversion de
bitcoins en euros.
1.3.3
Les mesures fiscales
Il n’y a pas que les institutions bancaires qui s’interrogent sur l’utilisation
des monnaies décentralisées. La fiscalité est désormais un enjeu important
pour les personnes qui possèdent des bitcoins. C’est une des raisons pour
lesquelles les institutions fiscales de différents pays se préoccupent de cette
question.
Le bitcoin - 14
En France, il n’y a pour le moment aucun texte précis concernant ces
nouvelles monnaies dans le Code Général des Impôts. Cela paraît logique,
puisqu’à l’heure actuelle, le bitcoin n’existe pas aux yeux du fisc. Pourtant,
l’article 92 du Code Général des Impôts [16] oblige chaque contribuable à
déclarer tous les revenus perçus au cours de l’année. Par conséquent, les plusvalues de la vente de bitcoins pourraient, en vertu de ce texte, être soumises à
l’impôt sur le revenu, « au titre des bénéfices non commerciaux » [17] explique
l’avocat Daniel GUTMANN dans un article du journal Le Monde. Cependant,
le Ministère de l’Économie et des Finances confirme que « pour le moment, il
n’y a pas d’obligation déclarative concernant le bitcoin ».
À l’inverse, en août 2013, l’Allemagne a reconnu le bitcoin comme
« monnaie privée » [18], pour mieux la taxer. En effet, grâce à ce statut
juridique, l’administration fiscale allemande peut désormais prélever une taxe
sur toutes les transactions réalisées avec cette devise virtuelle. Les bénéfices
provenant d’une vente en bitcoins seront taxés à hauteur de 25 %. Les
vendeurs seront cependant exonérés d’impôts au bout d’un an. Concernant
les entreprises, elles doivent à présent intégrer un taux de TVA dans toutes
leurs transactions en bitcoins. Cependant, il est nécessaire de rappeler
qu’aujourd’hui, la plus grande partie des opérations en bitcoins est réalisée
sur internet. Il est donc encore très complexe pour le fisc de les taxer, car elles
sont difficilement repérables dans une telle économie numérique.
De son côté, l’administration fiscale américaine a précisé dans une
note du 25 mars 2014 [19], que les monnaies virtuelles sont désormais traitées
comme un « bien » sur leur territoire. Les paiements effectués en bitcoins sont
concernés par cette taxe et les éventuels salaires versés dans cette devise
sont désormais soumis à l’impôt sur le revenu.
À Singapour, l’administration fiscale assimile les monnaies virtuelles à un
service [20]. Par conséquent, leur utilisation pour l’achat d’un bien est considérée comme du troc. Ainsi, lors d’une transaction, la taxe s’applique à deux
reprises : sur le produit acheté et sur le montant en bitcoins considéré comme
un service. Ce mécanisme rend le paiement dans cette devise très peu avantageux.
15 - Le bitcoin
De plus en plus de mesures fiscales sur les monnaies décentralisées sont
mises en place dans différents pays (beaucoup de pays européens étudient
la question mais n’ont pas encore légiféré). Tout d’abord, les États profitent
de ces taxes pour essayer de freiner la progression de ces nouveaux types
de monnaies (non régulées par une autorité et concurrentes des devises officielles). Ensuite, par définition, ces impositions sont bénéfiques pour un État,
car elles tendent à augmenter les recettes publiques (bien que le bitcoin soit
difficilement taxable à l’heure actuelle).
Le bitcoin - 16
L’intégration du bitcoin dans
sphère socio-économique
2.1
2.1.1
la
Le particulier et le bitcoin
Achat de biens
Les achats de biens font partie de nos habitudes de consommation, que
ce soit par l’intermédiaire d’un magasin physique ou directement depuis internet. Il aura suffi d’une année pour que le bitcoin soit utilisé en tant que moyen
de paiement. En effet, depuis quelques temps, les possibilités pour acheter
avec des bitcoins sont de plus en plus nombreuses. Autrefois utilisé uniquement par curiosité, il prend une place de plus en plus importante pour les
achats en ligne, grâce à ses nombreux avantages par rapport aux monnaies
classiques.
En mai 2010, soit une année après le lancement du bitcoin, un développeur américain demanda, par l’intermédiaire d’un forum sur internet, qu’on
lui apporte deux pizzas chez lui. En compensation, il promit de verser 10 000
bitcoins (soit 25 euros au cours monétaire de l’époque, aujourd’hui cela vaut
environ 3 000 000 d’euros). Cette proposition, vécue au départ comme une
blague, fit de cet américain le premier à acheter un produit avec cette monnaie décentralisée. Cet événement marqua ainsi le début de l’utilisation du
bitcoin pour effectuer des achats.
Aujourd’hui, les particuliers peuvent utiliser le bitcoin comme moyen de
paiement pour acheter de nombreux produits. On remarque que de plus en
plus d’entreprises acceptent cette monnaie virtuelle. On peut d’ailleurs retrouver dans les listes des magasins et sites acceptant le bitcoin [21][22], des
plateformes de vente en ligne bien connues comme showroomprive.com,
des restaurants comme pizza.fr ou des services comme PayPal. Sur ces sites,
au moment de choisir son moyen de paiement, on peut alors sélectionner le
bitcoin à la place de sa carte de crédit. On entre ensuite sa clé d’identification, une vérification a lieu sur votre compte et si vous avez suffisamment de
bitcoins, la transaction est effectuée.
17 - Le bitcoin
D’abord acceptée uniquement pour les achats en ligne, aujourd’hui la
tendance est aussi à la démocratisation de cette monnaie dans les magasins physiques [23]. De nombreuses boutiques, principalement en région parisienne, commencent à accepter le bitcoin. En magasin, l’utilisation des bitcoins comme moyen de paiement n’est pas très compliquée. Comme nous
l’avons expliqué précédemment, chaque utilisateur dispose de deux codes
secrets : l’un permet de recevoir de l’argent virtuel, l’autre permet d’en donner. Ils sont souvent disponibles sous forme de QR Codes sur son smartphone.
Cela permet de n’avoir à présenter que le code pour payer en bitcoins à
la caisse d’un magasin équipé. Il faut aussi noter que ce type de paiement
n’engendre pas de frais supplémentaires pour l’utilisateur.
F IGURE 2.1 – Logo indiquant qu’un site internet ou un magasin accepte les
bitcoins. Source : bitcoin.it.
Le bitcoin ne se limite pas exclusivement à l’achat de biens. Des associations à but non lucratif proposent aussi d’envoyer des dons par l’intermédiaire
du réseau bitcoin. Wikimedia ou plus récemment la Croix-Rouge américaine
sont des précurseurs dans l’utilisation de cette méthode. Ils espèrent ainsi offrir
un moyen alternatif de don et donc attirer plus de donateurs.
2.1.2
Placement d’argent
Le bitcoin est vu par de nombreux investisseurs comme un puissant outil
de spéculation 1 . Du fait de ses fortes variations et de l’absence quasi-totale
de régulation (c’est une monnaie décentralisée), il est prisé par les courtiers à
risque qui cherchent de hauts rendements.
Hendrix VACHON, économiste et spécialiste des monnaies chez Desjardins (groupe financier canadien) s’est penché, selon ses propres termes, « sur
le nouveau phénomène dans le monde de la monnaie ». Dans un article paru
1. Tirer profit des marchés
Le bitcoin - 18
fin 2013 [24], il met en évidence, selon lui, les risques que l’on encourt à spéculer sur une telle monnaie. Il présente d’abord les différents avantages de
cette monnaie décentralisée : sa confidentialité et ses coûts de transaction
faibles, voire inexistants. Cependant, il reste plutôt critique pour ce qui est de
sa sécurité, de son intérêt en tant que valeur refuge 2 et de sa volatilité 3 . Les
chiffres confirment ses propos, le bitcoin connaît de forts risques d’inflation 4 et
de déflation 5 ainsi que des cours plus que fluctuants : moins de 100 dollars fin
2012 et plus de 800 dollars fin 2013 [Figure 2.2].
F IGURE 2.2 – Cours du bitcoin (en dollars US) du 30/11/2012 au 30/11/2014.
Source : Mt.Gox.
Il est difficile de trouver une comparaison mettant en exergue cette inflation, mais on peut prendre l’exemple du cours du pétrole lors des différents chocs pétroliers. L’inflation est tout aussi importante sauf que dans le cas
du bitcoin, cette dernière n’a eu lieu qu’en l’espace de deux mois au lieu
d’une année. Finalement, le bitcoin reste un actif 6 sur lequel on peut spéculer comme n’importe quelle autre valeur boursière. Cependant, sa forte
volatilité fait de lui une valeur à risque. Pour reprendre un slogan cher aux
adeptes du bitcoin : « n’investissez que le temps et l’argent que vous pouvez
vous permettre de perdre ». //
2.
3.
4.
5.
6.
Valeur dont le cours varie peu
Ampleur des variations d’un cours
Hausse d’un cours
Baisse d’un cours
Bien immatériel susceptible de produire des revenus
19 - Le bitcoin
2.1.3
Une monnaie sans frontière
Dans un monde de plus en plus mondialisé, nous sommes souvent amenés à effectuer des transactions qui dépassent les frontières d’un État. Ces
transactions sont réglementées lorsqu’il s’agit d’opérations boursières ou bien
de virements entre comptes bancaires domiciliés dans différents États. En ce
qui concerne le particulier, il peut y être confronté lorsqu’il spécule, effectue
des achats sur internet ou des virements de fonds à l’étranger. Il devient alors
intéressant pour le particulier de choisir le service le plus avantageux.
Il existe actuellement de nombreuses entreprises proposant des transferts sécurisés d’argent à l’étranger. Les premiers services qui nous viennent
à l’esprit sont bien entendu les banques, des services de paiement en ligne
comme Paypal ou de transfert d’argent comme Western Union. Ces derniers
offrent certains avantages tels que la garantie que les fonds soient arrivés à
destination. De nombreuses taxes peuvent être appliquées lorsque la devise
doit être convertie ou tout simplement pour rémunérer ces services. C’est là
que réside l’intérêt du bitcoin. Aucune taxe n’a lieu lors d’un virement.
Anonymat
Commissions
(EEE)
Commissions
(hors EEE)
Frais
de change
Réseau bitcoin
Oui
Non
Non
Non inclus
Paypal
Non
Non
0.3 % à 1 %
Inclus
Western Union
Non
2%
À partir de 3 %
Inclus
Banques
Non
Variables
Variables
Variables
F IGURE 2.3 – Comparaison des différents coûts d’un virement effectué à
l’étranger. Ces informations concernent un virement de 1 000 euros à partir
d’un compte bancaire domicilié en France au 22/11/2014.
Un transfert d’argent en bitcoins se fait donc sans aucune commission
contrairement aux autres services présentés. Il est pourtant tout aussi sécurisé.
Si l’on souhaite effectuer un virement dans l’EEE 7 et que l’anonymat n’est pas
une priorité, l’utilisation de Paypal peut être intéressante. Dans certains pays
émergents où seul Western Union est présent, de nombreux particuliers préfèrent l’utilisation du système bitcoin afin d’effectuer des virements d’argent
7. Espace Économique Européen
Le bitcoin - 20
à des proches pour éviter de lourdes commissions. Le seul reproche que l’on
peut faire à l’utilisation de bitcoins est le problème des frais de change qui
peuvent s’élever à quelques pourcents et sérieusement alourdir la note. Au
final, au-delà d’accomplir un acte potentiellement perçu comme militant, le
particulier peut aussi tirer dans certaines situations des bénéfices à utiliser des
bitcoins.
2.2
2.2.1
Une opportunité pour les entreprises
De nouveaux clients ?
Le bitcoin est une monnaie qui s’intègre de plus en plus dans le monde
économique. De nombreuses entreprises commencent à accepter ce nouveau moyen de paiement. Pour autant, si ces entreprises s’intéressent désormais au bitcoin, ce n’est sûrement pas anodin. Il est par conséquent légitime
de se demander si l’acceptation de cette nouvelle devise peut leur apporter
de nouveaux clients.
À l’heure actuelle, les entreprises utilisent avant tout le bitcoin comme
moyen de communication. Accepter ce nouveau moyen de paiement permet de renforcer leur image sur l’aspect de l’innovation et de la modernité.
Elles gagnent aussi en visibilité.
Tout d’abord, les entreprises acceptant ce moyen de paiement peuvent
s’enregistrer en tant que tel sur le site openstreetmap.org. Elles sont ensuite
répertoriées et visibles sur la carte coinmap.org. Les personnes voulant exclusivement effectuer leurs achats en bitcoins ont donc la possibilité de trouver
les magasins physiques les acceptant grâce à ce service.
Par exemple, la chaîne de magasins Monoprix avait pour objectif de
conquérir une nouvelle part de marché en annonçant vouloir accepter le
bitcoin avant la fin de l’année 2014. À l’heure actuelle, ce projet est en attente. Cependant, avec cette annonce, Monoprix n’a certes pas attiré de
nouveaux clients dans ses magasins, mais a bénéficié d’une publicité extraordinaire à l’international (pour preuve, l’article dans le journal économique
new-yorkais Bloomberg [25]). Des géants du web comme Microsoft [26] ou
21 - Le bitcoin
encore Wikimedia [27] acceptent d’ores et déjà le bitcoin pour respectivement vendre leurs produits ou obtenir des dons. Aucun chiffre n’a été publié à propos de l’impact sur les ventes car c’est une possibilité très récente,
pour l’instant principalement utilisée aux États-Unis et réservée à certains types
de produits [28]. Finalement, les répercussions seront minimes si les entreprises
n’élargissent pas leur champ d’action.
Les entreprises acceptant le bitcoin en tant que moyen de paiement
supplémentaire disposent d’un avantage concurrentiel. Actuellement, beaucoup de restaurants, hôtels, bars et plus généralement les entreprises du domaine du tourisme franchissent le pas [29]. Cela n’est absolument pas anodin : le bitcoin est une vraie solution de facilité lorsqu’on est à l’étranger. Il
n’est alors plus indispensable pour un touriste possédant une monnaie différente du pays visité de convertir celle-ci et il s’épargne alors des forts taux de
change. Les entreprises du secteur touristique peuvent donc potentiellement
attirer de nouveaux clients avec le bitcoin.
Comme toute nouvelle technologie à ses débuts, aujourd’hui, le profil
typique d’un utilisateur de bitcoins est une personne curieuse et intéressée
par le numérique, ce qui limite grandement le nombre d’utilisateurs. En fin
de compte, accepter le bitcoin comme moyen de paiement ne signifie pas
obligatoirement un apport de nouveaux clients, en tout cas pour le moment.
En effet, même si le nombre d’utilisateurs de cette monnaie augmente, ils ne
paieront pas forcément tous leurs achats avec celle-ci (ils se feront dans des
cas particuliers comme le tourisme). Cependant, il peut être intéressant de
profiter de la visibilité offerte par le bitcoin, d’autant plus que l’intégration de
ce nouveau moyen de paiement est peu risquée financièrement.
2.2.2
Un investissement à moindre coût
La mise en place d’un nouveau système de paiement est souvent coûteux pour une entreprise. En effet, la multiplication des moyens de paiements
(cartes de crédit, Paypal, cartes prépayées, Allopass, pour ne citer qu’eux)
entraîne une complication de la procédure pour le marchand. Cette complexité croissante engendre des coûts supplémentaires. Les systèmes de paiement via Paypal ou par carte bancaire sont parmi les plus utilisés, mais possèdent certaines limites.
Le bitcoin - 22
Ainsi, pour émettre ou recevoir des paiements à l’aide des circuits traditionnels, il est souvent nécessaire de s’acquitter de frais. En revanche, il est tout
à fait possible d’effectuer une transaction via le réseau bitcoin sans aucune
taxe.
Lorsqu’une entreprise souhaite ouvrir son marché à l’international, il est
fréquent de recevoir des paiements de l’étranger. Des délais peuvent s’appliquer, tout comme des frais supplémentaires. Dans le cas du bitcoin, il n’y
a pas de banque intermédiaire. Il suffit de quelques dizaines de minutes pour
qu’une transaction soit validée. Ce système n’est pas contraint par des devises locales, des cartes de crédit ou encore des restrictions géographiques.
Une entreprise qui accepte le paiement par Paypal ou les cartes de
crédit connaît le problème des paiements qui sont rejetés après que le bien a
été expédié. Les fraudes par rejet de débit occasionnent des frais de dossier
qui peuvent représenter un fort pourcentage du prix du produit. En effet, le
coût engendré est bien souvent à la charge du vendeur qui doit le répercuter
au client. En revanche, les paiements effectués en bitcoins sont irréversibles,
toute fraude est impossible.
Par ailleurs, l’intégration « technique » du moyen de paiement en bitcoins est très rapide et devient peu onéreuse dans la mesure où aucun intermédiaire n’intervient. Pour revenir aux coûts annexes, qui correspondent aux
coûts d’utilisation au quotidien, ils sont variables selon la stratégie de l’entreprise. Une entreprise peut, si elle le désire, passer par un intermédiaire qui se
chargera de reconvertir automatiquement les bitcoins reçus en devise classique. Cette dernière devra s’acquitter de frais de change, comme si elle
désirait convertir des dollars reçus en euros. En revanche, une autre entreprise
pourra tout aussi bien décider de conserver quelques temps, tout ou partie
de ses bitcoins pour spéculer.
Concrètement, si de plus en plus d’entreprises décident d’accepter le
bitcoin, ce n’est pas seulement pour proposer un moyen de paiement supplémentaire. Il possède des caractéristiques qui permettent de simplifier énormément le processus de transaction. L’intégration de ce moyen de paiement
a certes un coût, mais qui s’avère négligeable sur le long terme. Les très faibles
23 - Le bitcoin
frais de transactions et l’impossibilité de frauder permettent d’espérer rentabiliser en peu de temps cet investissement. Enfin, un des derniers remparts à
cette intégration est la peur engendrée par la forte volatilité du bitcoin. Finalement, cet obstacle peut être surmonté à l’aide d’un intermédiaire qui
convertira la somme, reçue en bitcoins, vers une devise classique. Au final,
tout est réuni pour permettre l’intégration du bitcoin à moindre coût.
2.2.3
Un exemple d’intégration : showroomprive.com
Le site internet showroomprive.com a déjà franchi le pas en octobre
2014 en intégrant le bitcoin dans ses moyens de paiement. Soucieux d’innover, le numéro deux français des ventes privées de grandes marques a
d’abord préféré intégrer cette nouvelle devise sur sa version néerlandaise
avant de conquérir les autres pays d’Europe. Le choix des Pays-Bas est essentiellement dû à l’avancement du pays sur ces problématiques de paiement. Cet exemple d’intégration du bitcoin chez ce grand e-commerçant
européen est par conséquent intéressant à analyser.
Avec plus de 15 millions de membres, ce site de ventes privées est donc
devenu la plus grande entreprise française acceptant les bitcoins. « Nous recherchons en permanence des solutions innovantes pour accompagner nos
consommateurs au quotidien et répondre à leurs besoins. Dans cette démarche, nous avons voulu tester cette approche disruptive de la monnaie. En
effet, ce nouveau service a déjà rencontré un certain succès aux États-Unis
qui devrait rapidement gagner l’Europe. Nous voulons donc être prêts pour
accompagner nos consommateurs dans ce nouveau mode de paiement »
[30], explique Thierry PETIT, co-fondateur de showroomprive.com. Cette approche novatrice s’inscrit dans l’évolution des modes de paiement sur internet. Le marché du bitcoin en Europe est relativement peu développé et il
faudra certainement attendre qu’un géant du e-commerce l’intègre, pour
voir une évolution nette dans ce secteur. Cependant, de plus en plus d’initiatives voient le jour comme celle de showroomprive.com, mais aussi celles
d’Expedia ou de Dell.
Pour garantir un service optimal et mener à bien ce projet, le site showroomprive.com s’est associé avec la start-up Paymium [31]. Cette dernière
propose à ses utilisateurs (particuliers ou entreprises) une place de marché
Le bitcoin - 24
où ils peuvent échanger des bitcoins contre des euros et inversement. Dans
cet accord, Paymium se chargera donc de convertir le paiement reçu en
bitcoins. Le site de ventes privées n’a donc plus à sa charge le problème de
la forte volatilité des cours du bitcoin. Cependant, showroomprive.com n’a
communiqué aucune information sur la durée pendant laquelle il conservera
les bitcoins avant de les convertir. Il est en effet légitime de se demander s’il
compte s’appuyer sur la volatilité du bitcoin pour réaliser plus de profits.
Pour le moment, le site de ventes privées n’a pas d’objectif précis en matière de résultats. Il considère que tous les acteurs du marché doivent d’abord
apprivoiser cette monnaie décentralisée avant d’en tirer un réel profit. Cependant, « si nous faisons 5 à 7 % de notre chiffre d’affaires en bitcoins d’ici
cinq ans, nous serons contents » [32] commente Thierry PETIT.
Showroomprive.com est donc un des tous premiers grands ecommerçants européens à se lancer dans l’aventure bitcoin. Même si
pour le moment, il considère que le marché n’est pas encore assez mûr,
il n’hésite pas à proposer des solutions innovantes pour accompagner les
consommateurs et faire évoluer les modes de paiement. D’ailleurs, on peut
raisonnablement penser que le coût relativement réduit de l’investissement
pour mettre en place ce nouveau système de paiement a été un facteur
déterminant pour cette innovation.
2.3
2.3.1
Risques et dérives
Protection du consommateur
La protection du consommateur prend une place importante dans la
société actuelle. Que ce soit dans des magasins physiques ou sur internet, la
plupart des pays protègent leurs citoyens. Prenons l’exemple de la France.
Chaque consommateur possède différents droits qui garantissent le bon déroulement d’un achat ou d’une vente. Lorsque l’on achète dans une grande
enseigne ou bien sur des sites de ventes en ligne réputés, des droits tels que le
droit de rétractation s’appliquent facilement. Les sites d’e-commerce acceptant le bitcoin comme moyen de paiement et ayant pignon sur rue, tels que
showroomprive.com, proposent les mêmes garanties que l’on paye en euros
ou bien en bitcoins.
25 - Le bitcoin
En revanche, lorsqu’il s’agit d’une transaction de particulier à particulier, le bitcoin possède alors des caractéristiques très différentes par rapport
à un simple virement bancaire ou paiement par chèque. Lors d’un litige, au
sujet d’une transaction effectuée en euros, de nombreux recours existent. Il
est possible de se retourner vers sa banque pour tenter d’obtenir une annulation. Le système bitcoin, quant à lui, assure l’irréversibilité d’une opération.
Une transaction ne peut en aucun cas être annulée. Cela peut être considéré
comme un avantage ou un inconvénient. Du point de vue d’un vendeur, on
est assuré de recevoir le paiement. Cependant, l’acheteur ne peut pas ouvrir
de litige afin d’annuler une transaction. Seul un arrangement à l’amiable est
envisageable. Cet exemple met en évidence que lors d’une vente ou d’un
achat effectué grâce au système bitcoin, il faut garder à l’esprit que toutes
les règles du système bancaire classique ne s’appliquent pas forcément.
Tout comme on doit veiller à ne pas divulguer les identifiants permettant
d’accéder à son compte bancaire, il ne faut pas révéler la clé privée de son
compte bitcoin. Contrairement à ce que l’on pense, le principal risque de
stocker sa clé privée sur son disque dur n’est pas de se la faire voler, mais
plutôt de la perdre.
L’anecdote la plus célèbre est celle de Kristoffer KOCH, un étudiant norvégien ayant acheté pour 26,60 dollars de bitcoins en 2009 lorsqu’il effectuait
une thèse sur le chiffrement [33]. Cela correspondait, au cours de l’époque,
à environ 5 000 bitcoins. Au bout de quelques mois, il avait complètement
oublié la présence de la clé privée sur son ordinateur. Finalement, en octobre
2013, il s’est rendu compte de la somme qu’il possédait : environ 885 000 dollars, soit 642 000 euros. Heureusement, cette histoire s’est bien terminée, mais
une simple erreur de manipulation aurait pu détruire cette clé privée et, par
conséquent, rendre inaccessible la somme. En effet, il aurait été impossible de
se rappeler des dizaines de caractères composant cette clé.
Le risque de se faire voler sa clé privée lorsqu’elle est sur votre disque
dur est lui aussi loin d’être négligeable. Il faut donc privilégier ce que l’on
appelle « le stockage à froid », dans le sens où les données stockées ne sont
pas accessibles via internet. Cela revient tout simplement à « débrancher » de
votre ordinateur le support sur lequel est stocké la clé. Cela permet de garantir
qu’aucun accès non autorisé n’aura lieu. De plus, en multipliant les supports
Le bitcoin - 26
de stockage à cause des risques de défaillance, vos bitcoins ne risqueront pas
grand chose à part le vol « physique » d’un de ces supports.
Finalement, tout comme on n’écrit pas son code de carte bancaire sur
un morceau de papier, il ne faut pas non plus noter la clé privée de son
compte bitcoin n’importe où sur son ordinateur. Bien que très similaire au système bancaire dit « classique », le système bitcoin possède quelques particularités qu’il faut toujours garder à l’esprit.
2.3.2
Des transactions mal encadrées
À l’inverse des monnaies classiques liées à un État, le bitcoin est
totalement décentralisé. De ce fait, aucun pays n’a d’influence directe sur
cette monnaie. On peut même aller jusqu’à dire que personne n’en a de
réel contrôle. C’est pour cette raison que le bitcoin est perçu comme une
monnaie mal encadrée.
L’absence d’autorité supérieure fait qu’il est difficile d’appliquer les lois
sur la protection des consommateurs, notamment celles garantissant aux utilisateurs le remboursement en cas de fraude ou d’opération non autorisée.
Avec cette monnaie, les utilisateurs sont livrés à eux-mêmes. C’est à eux de
vérifier que le site d’achat est sécurisé et que les données envoyées sont cryptées. Dans le cas contraire, la clé privée peut être interceptée et cela permettrait à une personne mal intentionnée de récupérer tous les bitcoins. Le
problème est le même sur les plateformes de change entre bitcoin et monnaie fiduciaire, il n’y a aucune garantie d’exécution ou de remboursement.
Il est donc fortement recommandé de passer par des sites connus et qui ont
déjà quelques années d’existence. De plus, comme le réseau est de type pair
à pair, personne ne peut répondre d’un problème dans le système et ne peut
donc rembourser la victime. De même, l’anonymat ne permet pas de prouver que quelqu’un a fait une utilisation frauduleuse de son compte en son
absence. Chaque transaction est irréversible, on ne peut donc pas l’annuler
si elle a été confirmée par l’utilisateur.
Un autre point important à considérer est le délai avant qu’une transaction ne soit définitivement actée. Même si l’utilisateur n’a pas la possibilité
d’annuler une transaction, le réseau peut la supprimer, s’il y a un problème
27 - Le bitcoin
sur la blockchain, ou si l’une des valeurs n’est pas correcte. L’échange de bitcoins n’aura alors pas lieu. Il faut environ une heure pour être certain que la
transaction ait été validée. C’est un problème que chacun doit avoir à l’esprit : tant le vendeur qui doit s’assurer que les bitcoins sont bien versés avant
d’envoyer un produit, que le consommateur qui doit vérifier que la transaction
ait bien eu lieu pour être sûr de recevoir le produit.
Le bitcoin tend à responsabiliser les utilisateurs sur l’usage du système qui
est reconnu comme sûr. Malgré tout, cela ne dispense pas les utilisateurs d’appliquer des mesures de sécurité élémentaires. Un moyen est d’utiliser plusieurs
comptes bitcoins, un pour servir de dépôt, un autre pour recevoir des bitcoins
et un troisième pour en envoyer. Il s’agit ici d’un exemple simple pour mieux
sécuriser ses transactions. Étant donné qu’on ne diffuse que les clés pour les
comptes d’envoi et de réception et en ne conservant dessus que des petites
sommes, on limite le risque de perte de bitcoins en cas de vol de ces comptes.
Pour résumer, l’utilisation du bitcoin comme moyen de paiement est assez similaire à un règlement par carte bancaire. Cependant, les lois normalement appliquées par les banques et les vendeurs ne sont pas garanties. Il
n’y a aucun moyen d’annuler une transaction, c’est à l’utilisateur de faire attention à ses actions. L’usage et la sécurité des comptes bitcoins sont donc
totalement sous la responsabilité de l’utilisateur.
2.3.3
Fins criminelles : blanchiment de capitaux et financement
du terrorisme
Mise en lumière récemment, l’utilisation du bitcoin à des fins criminelles
a noirci l’image de cette monnaie virtuelle. Ces dérives associées à la vente
de biens ou services illicites sur internet sont devenues fréquentes. Les experts
s’interrogent également sur le blanchiment de capitaux, notamment en matière de financement du terrorisme. Ce marché noir du bitcoin inquiète les
spécialistes et les autorités de différents États.
L’anonymat des transferts de bitcoins (concept central de la monnaie)
est notamment à l’origine de son utilisation illicite. En effet, il est impossible de
déterminer quelle est la personne qui détient physiquement le compte. C’est
Le bitcoin - 28
justement cet argument qui amène les sites de vente de biens ou services illégaux à proposer leurs produits contre des bitcoins. La figure 2.4 prouve qu’il
est assez facile de trouver de la drogue ou des armes en échange de monnaies décentralisées sur des sites internet. Cependant, les autorités judiciaires
ne sont pas inactives face à cette économie souterraine. Par exemple, en
2013, le site internet Silk Road (site d’acquisition de marchandises illégales) a
été fermé par le FBI. Le chef présumé de ce réseau a par ailleurs été arrêté.
F IGURE 2.4 – Site internet vendant de la drogue et des armes contre des bitcoins. Source : afp.com
En France, Tracfin (organisme chargé de lutter contre le blanchiment
d’argent) a publié un rapport d’activité en 2011 [34] qui identifie le bitcoin
et les monnaies virtuelles plus généralement, comme un risque spécifique
en matière de blanchiment d’argent. C’est pour cette raison que les détenteurs de bitcoins en France doivent faire attention : les banques peuvent
être amenées à faire des déclarations à Tracfin si elles jugent que les activités
d’échange de bitcoins en euros d’un client sont trop régulières. Aux États-Unis,
un homme a déjà été arrêté pour le blanchiment d’un million de dollars en
bitcoins sur une plateforme clandestine.
29 - Le bitcoin
Si à l’heure actuelle, aucun fait de financement du terrorisme n’est
avéré, les autorités sont inquiètes à ce sujet, à cause des transferts anonymes
de bitcoins. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’au niveau international,
le Groupe d’action financière a publié il y a un peu plus d’un an, des
directives [35] concernant ces risques liés au terrorisme. Pour cet organisme
intergouvernemental, les menaces sont réelles et ne sont pas à négliger.
Le bitcoin - 30
Le bitcoin : une mode ou une alternative aux monnaies fiduciaires ?
3.1
3.1.1
L’aspect environnemental
Le coût d’un bitcoin
Si le bitcoin n’existe que virtuellement et est entretenu par les participants, il est faux de penser que son coût de création est négligeable. En raison
de la récompense obtenue après avoir trouvé une preuve de travail, c’est une
véritable ruée vers l’or qui a lieu pour posséder des ordinateurs avec plus de
puissance de calcul. Ces derniers permettent donc d’avoir plus de chances
pour obtenir la récompense des 25 bitcoins (plusieurs milliers d’euros actuellement).
Des composants informatiques spécialisés ont vu le jour, offrant un
meilleur rendement entre puissance de calcul et consommation énergétique. Comme chaque mineur a un rendement différent, il est très difficile
d’estimer précisément la consommation électrique liée au minage de
bitcoins. Une étude a, malgré les difficultés, tenté d’étudier le phénomène
et en a déduit que la consommation du réseau se situait entre 0,1 et 10
GW (gigawatt) [36]. Ces valeurs ont été obtenues par simulation. Si tous
les mineurs possédaient les composants les plus économes en énergie, ils
consommeraient 0,1 GW ; a contrario, si tous les mineurs possédaient des
composants très énergivores, ils consommeraient 10 GW. Les deux valeurs
précédentes représentent donc la dépense théorique minimale et maximale.
Il est alors facile de se convaincre que la consommation réelle se situe dans
cet intervalle. À titre de comparaison, l’Irlande a une dépense en électricité
de 3 GW : la quantité d’énergie utilisée est donc énorme.
Cependant, ce n’est pas suffisant pour conclure quant au coût d’un bitcoin, puisque le prix de l’électricité n’est pas identique dans toutes les régions du monde. Prenons comme référence le prix le plus bas pratiqué en
France : 0,10150 euros par kWh (kilowatt-heure) [37]. L’ensemble des mineurs
consomme entre 10 150 et 1 015 000 euros d’électricité en une heure, alors
31 - Le bitcoin
qu’il n’est possible de gagner que 45 000 euros durant ce même laps de
temps 1 . On voit que le minage est finalement peu rentable, et ces calculs ne
prennent pas en compte le coût initial des composants, parfois de quelques
milliers d’euros.
Un autre point important est l’empreinte carbone associée à cette
consommation énergétique colossale. Là encore, le calcul précis est impossible car l’énergie n’est pas produite de la même façon partout. Cependant,
en France, où plus de 73 % de l’énergie produite est issue du nucléaire [38],
l’empreinte carbone sera beaucoup plus faible que dans des pays comme
la Chine, où 80 % de l’énergie produite est issue de centrales thermiques
hautement polluantes [39]. Si l’énergie nécessaire aux mineurs venait des
centrales nucléaires françaises, alors ils rejetteraient entre 0,67 et 67 tonnes
de C02 par heure [40]. Si au contraire, elle venait des centrales à charbon
chinoises, ils rejetteraient entre 9,34 et 934 tonnes de C02 par heure [41]. Il
s’agit d’un résultat qui est loin d’être négligeable.
Ces chiffres donnent un ordre d’idée, car la réalité est plus complexe. Il
faut par exemple ajouter un système de refroidissement à une installation de
minage, ce qui consomme aussi de l’énergie mais n’est pas pris en compte ici.
Ces calculs sont par ailleurs loin d’être précis. On voit qu’il est extrêmement
délicat voire impossible de déduire le coût exact d’un bitcoin à partir des
données à disposition. Cependant, il est important d’avoir conscience des
problèmes écologiques liés au minage, problèmes qui seront possiblement
amenés à gagner en importance à mesure que la puissance du réseau augmente. Cet état de fait est d’autant plus dramatique que cette puissance de
calcul n’est pas exploitée.
3.1.2
Une puissance de calcul gaspillée
Chaque transaction monétaire effectuée en bitcoins est vérifiée par des
ordinateurs à l’aide d’une puissance de calcul (résolutions de problèmes mathématiques, appelées preuves de travail). Comme nous l’avons expliqué
précédemment, cette vérification demande une quantité d’énergie très importante : elle dépasse même la consommation électrique de l’Irlande. Ce1. Taux de change utilisé pour les calculs : 1 bitcoin = 300 euros
Le bitcoin - 32
pendant, la puissance des ordinateurs qui entretiennent cette monnaie numérique n’est pas utilisée à bon escient.
Les calculs à résoudre se complexifient de plus en plus au fur et à mesure
que le système bitcoin se développe. Lors de sa création en 2009, un simple
ordinateur suffisait pour entretenir tout le réseau. Cependant aujourd’hui, de
nombreuses machines ne travaillent que pour le minage de bitcoins, mais les
calculs effectués ne sont pas réutilisés pour d’autres applications (recherche
scientifique par exemple). Ils ne servent qu’à entretenir la monnaie et récompenser un utilisateur pour le travail fourni.
Utiliser cette puissance pour résoudre des problèmes scientifiques ou
technologiques permettrait de concentrer ce potentiel dans un but autre
que stérile. Pour donner une idée de la puissance de calcul perdue, d’après
Bitcoin Watch, le réseau bitcoin a atteint un sommet de 1 000 petaFLOPS 2 lors
d’un week-end de mai 2013 [42]. Les FLOPS représentent le nombre d’opérations que peut faire un ordinateur en une seconde. Ce chiffre représente
donc un milliard de milliards d’opérations arithmétiques effectuées chaque
seconde. À cette date, le super-calculateur le plus puissant au monde ne
pouvait effectuer que 16 petaFLOPS, soit 1,6 % de la puissance utilisée ce
week-end là.
Cependant, il existe des monnaies décentralisées qui utilisent la puissance développée lors de la vérification des transactions pour des finalités
plus intéressantes. Par exemple, le primecoin utilise un système de minage qui
se base sur la recherche des plus grands nombres premiers. Ces calculs sont
notamment utiles pour les mathématiciens et les cryptologues. Le curecoin
utilise, quant à lui, la puissance de ces ordinateurs pour résoudre des problèmes biologiques (repliement de protéine) [43]. D’ailleurs, il existe aussi des
ordinateurs scientifiques qui réalisent ce type de calculs. Il serait donc possible
de rassembler ces forces de calcul dans l’optique d’entretenir une monnaie
et de participer à la recherche scientifique. En effet, une partie du coût va
être, en quelque sorte, remboursée par l’utilisation de la preuve de calcul
par des mathématiciens. Cependant, comme nous l’a expliqué Pierre NOIZAT
(co-fondateur de la start-up Paymium), cela revient à baisser la difficulté de la
preuve de calcul et cela a donc un impact négatif sur la sécurité du système.
2. FLoating-point Operations Per Second
33 - Le bitcoin
Les calculs réalisés pour vérifier les transactions monétaires effectuées
en bitcoins ne sont donc pas réutilisables (car ils n’ont aucune application
scientifique). Cependant, toute monnaie a besoin d’un système (utilisant
de l’énergie) pour contrôler son fonctionnement. Les monnaies fiduciaires
n’échappent pas non plus à cette règle. Il faut donc comparer le système
bitcoin avec un autre système pour avoir une meilleure vision de l’aspect
environnemental.
3.1.3
Comparaison à un système classique de monnaie
Comme nous l’avons montré précédemment, le réseau bitcoin utilise
énormément de calculs, ce qui consomme beaucoup d’énergie. Les monnaies « traditionnelles » telles que l’euro sont moins énergivores de ce côté là,
cependant leur fabrication et régulation ont d’autres besoins que de simples
calculs. Contrairement au bitcoin, il y a une partie humaine impliquée dans le
maintien de notre monnaie fiduciaire. Et ceci est loin d’être la seule différence
entre les deux systèmes.
L’euro a une présence physique, sous forme de pièces et billets bien
connus de tous. Ces objets, pourtant quotidiens, sont de vraies merveilles
technologiques. Ainsi, les pièces sont constituées de divers alliages de carbone, aluminium, fer, nickel, cuivre, zinc et étain [44]. À la date du 29 octobre
2014, la Banque Centrale Européenne (BCE) en dénombrait plus de 100 milliards en circulation autour du monde [45]. Très peu de chiffres sont divulgués
quant au coût de production de ces pièces. On sait malgré tout qu’une pièce
d’un euro coûte moins de 10 centimes à produire [46]. Quant aux billets, il y
en avait plus de 16 milliards en circulation fin 2013 [47]. Ceux-ci sont composés de plusieurs couches, ainsi que d’éléments visant à renforcer leur sécurité comme les filigranes ou les hologrammes [48]. Là encore, très peu de
chiffres sont publiés. Nous savons seulement que le nouveau billet de 5 euros
coûte moins de 5 centimes à produire [49] et que les plus petites coupures
doivent être renouvelées tous les deux ans. La consommation énergétique
liée à la fabrication est en fait assez faible. Mais une nouvelle donnée s’ajoute
à l’équation, puisque toutes ces pièces et billets ont demandé énormément
de matières premières.
Le bitcoin - 34
Pour l’empreinte carbone, il est impossible de statuer. On peut supposer que la principale source de gaz carbonique est le convoiement de fonds,
mais les données à disposition sont trop pauvres pour nous permettre d’obtenir un nombre précis. Une fois la monnaie sortie d’usine, elle est distribuée
à travers toute l’Europe par de multiples convois de fonds, selon la répartition décidée par la BCE. Malgré cela, la monnaie ne reste pas immobile. Les
déplacements touristiques et voyages d’affaires créent d’importants mouvements de la masse monétaire. Certains pays se retrouvent donc en surplus,
quand d’autres se retrouvent en déficit de monnaie. C’est encore une fois à
la BCE de redistribuer cette masse en cas de nécessité. Les convois de fonds
sont donc des opérations bien plus courantes et plus importantes que l’on ne
croit. Des opérations qui génèrent bien évidemment du C02 .
Cependant, la majorité de l’argent en circulation est présente sous
forme numérique et ce sont divers systèmes informatiques qui se chargent
de le stocker et de gérer les transactions. Les opérations réalisées sont moins
coûteuses que ce que le maintien du réseau bitcoin requiert, mais elles sont
aussi bien plus nombreuses. L’énergie consommée par le réseau bitcoin est
certes gigantesque, mais il est important de ne pas faire de raccourci injustifié
en concluant que le système traditionnel est plus efficace. La réalité est très
complexe, et les coûts que nécessitent ces deux systèmes pour fonctionner
sont difficilement comparables : les dépenses ne se situent simplement pas
aux mêmes endroits.
3.2
Un possible effet de mode
3.2.1
Une expérience libertarienne ?
L’idéologie libertarienne prône la liberté individuelle en tant que droit intrinsèque à la nature humaine. Ce mouvement est très présent aux États-Unis.
Les libertariens sont favorables à la naissance d’un système de propriété et de
marché universel basé sur une coopération libre et volontaire entre les individus et accordent beaucoup d’importance aux initiatives privées. Ce mouvement se traduit notamment par une volonté de réduire voire de faire disparaître le pouvoir exercé par les États. De ce point de vue, les monnaies
fiduciaires sont gênantes car ce sont des monnaies publiques.
35 - Le bitcoin
On remarque que le fonctionnement du bitcoin correspond fortement
aux valeurs défendues par les libertariens, qui l’ont très vite adopté. Selon un
sondage réalisé en décembre 2013 par Atlantico, un site francophone d’informations, 80 % des utilisateurs de bitcoins se réclamaient à ce jour de la
mouvance libertarienne [50]. Un sondage analogue avait été réalisé le même
mois par le site bitcoin.fr auprès d’utilisateurs francophones, et affichait un résultat de 38 % [51]. Cependant, il est important de relativiser ces informations
contradictoires : en un an, le bitcoin s’est beaucoup popularisé et touche
désormais un public bien plus varié.
Par ailleurs, il est important d’être attentif lorsque le bitcoin est rapproché du mouvement libertarien car beaucoup de raccourcis sont réalisés. Pour
preuve, l’introduction de l’article paru sur Atlantico : « 80 % des utilisateurs de
bitcoins se revendiquent de la mouvance libertarienne. Un chiffre qui en dit
long sur la société dont ils rêvent, surtout lorsque l’on voit les fins auxquelles
est bien souvent utilisée la monnaie numérique sans contrôle étatique : trafics divers, blanchiment d’argent, engagement de tueurs à gages. . . ». Il est
évident que cette introduction donne une idée fallacieuse de ce qu’est la
« mouvance libertarienne ». Les libertariens ne défendent absolument pas les
crimes cités. Cependant, pour savoir si le bitcoin a été créé dans le but de répondre à des besoins idéologiques, il est important d’analyser les motivations
de son inventeur.
Le mouvement libertarien a été décrit à plusieurs reprises comme initiateur de la technologie bitcoin. C’est notamment une des thèses défendues
par le magazine américain Newsweek dans son article « The face behind
Bitcoin » [52] paru en mars 2014. Cependant, à cause de l’anonymat se cachant derrière le nom de Satoshi NAKAMOTO, il paraît impossible de savoir si
son créateur adhère ou non à cette idéologie. Pourtant, il a déjà fait allusion
à ce mouvement dans un message posté sur internet : « Les gouvernements
sont très bons pour décapiter des réseaux à contrôle centralisé comme Napster, mais de purs réseaux peer-to-peer comme Gnutella ou Tor semblent résister par leurs propres moyens. C’est très intéressant d’un point de vue libertarien, si nous arrivons à l’expliquer correctement » [53]. Cette citation n’indique
en rien la position de Satoshi NAKAMOTO, aussi est-il hasardeux de l’utiliser
pour en tirer des conclusions.
Le bitcoin - 36
Si le bitcoin et l’idéologie libertarienne ont souvent été associés, c’est
parfois à tort. L’invention bitcoin est effectivement une initiative privée et il
n’y a aucune obligation à l’utiliser. Néanmoins, il convient de ne pas extrapoler trop promptement. Satoshi NAKAMOTO a créé le bitcoin pour établir un
système monétaire indépendant de toute institution. Il n’a jamais justifié son
invention par une quelconque idéologie politique. Le mouvement libertarien
est par conséquent à dissocier de la technologie bitcoin, même si une partie
des utilisateurs y adhère.
3.2.2
La tendance éphémère du numérique
Chaque jour, des centaines de start-up se créent aux quatre coins du
monde. Leur réussite dépend de beaucoup de facteurs (idée du produit,
contexte du marché et de l’économie, business plan, management). Cependant, dans le secteur du numérique et des nouvelles technologies, un quart
de ces entreprises ne réussiront pas à passer le cap de la première année
d’existence et près de la moitié mettront la clé sous la porte après trois années [54]. Cette tendance éphémère est très présente dans les technologies
numériques. C’est notamment pour cette raison qu’il faut analyser l’évolution
du bitcoin avec attention.
Il est d’usage qu’un produit numérique se développe très rapidement
et soit adopté par une majorité d’internautes. Mais ce système est à double
tranchant. En effet, il n’est pas rare non plus qu’un produit phare soit, quelques
mois plus tard, tombé dans l’oubli, ou du moins quasiment plus utilisé. C’est
notamment cette vitesse de développement qui est responsable de l’effet
de mode ou d’une tendance éphémère. Beaucoup d’entre nous ont en tête
le système de messagerie instantanée MSN de la firme américaine Microsoft,
très utilisé au début du millénaire, puis remplacé progressivement par Skype,
pour finalement être arrêté en octobre 2014. De même, aujourd’hui, il peut
être impensable d’imaginer internet sans réseaux sociaux. Pourtant, la tendance éphémère du numérique pourra à l’avenir, forcer le destin de ces incontournables du web.
À l’heure actuelle, le bitcoin est dans une phase d’acceptation, de
croissance et se situe encore au début de la courbe d’adoption. Le nombre
de transactions effectuées chaque jour est en hausse significative depuis
37 - Le bitcoin
juillet 2012 [Figure 3.1]. Mais, comme nous l’avons rappelé précédemment,
rien n’est acquis dans le domaine des technologies numériques. Même si son
acceptation en tant que moyen de paiement, sur les sites leaders de vente
en ligne, aide à sa popularisation et tend à prouver le contraire, la tendance
peut très vite s’inverser. Notamment si des États ou des banques centrales
décident d’user de leur pouvoir et de publier des communiqués alarmants
pour diaboliser le bitcoin.
F IGURE 3.1 – Évolution du nombre de transactions effectuées chaque jour en
bitcoins, de janvier 2009 à décembre 2014. Source : blockchain.info
Dans un registre assez similaire, de nombreuses monnaies décentralisées
ont été créées pour améliorer l’idée initiée par le bitcoin et sont pour la plupart inconnues (et le resteront). Une liste relativement exhaustive est disponible sur le site altcoins.com. Ces exemples prouvent qu’il est assez facile d’innover dans le domaine numérique, mais plutôt difficile de créer des inventions
pérennes.
De manière générale, le numérique évolue relativement vite par rapport
à l’innovation de produits industriels de grande consommation par exemple.
Cette rapidité peut cependant être néfaste pour ces nouvelles inventions.
En effet, nous avons vu que cette vitesse de développement est aussi vraie
dans l’autre sens. C’est ce qu’on peut appeler la « tendance éphémère du
numérique » : les innovations sont rapidement développées et utilisées, mais
elles peuvent devenir précipitamment oubliées et inutilisées. Pour le bitcoin,
son acceptation par le grand public est plutôt lente, mais s’accélère depuis
Le bitcoin - 38
deux ans. Cependant, la tendance peut très vite s’inverser si des institutions
monétaires et financières décident de limiter sa progression.
3.2.3
Vers une nouvelle monnaie décentralisée ?
Le système bitcoin mis en place est novateur, il change notre façon de
concevoir ce qu’est une monnaie. Depuis sa création, des centaines de nouvelles monnaies décentralisées ont émergé et les plus connues ont déjà été
citées précédemment (primecoin, litecoin, curecoin). Toutes néanmoins se
basent sur le système bitcoin, à quelques différences près.
Cette monnaie a déjà convaincu beaucoup d’utilisateurs à travers le
monde, mais elle n’est pas parfaite pour autant et reste méconnue du grand
public pour le moment. De plus, certaines de ses principales caractéristiques
sont controversées, comme par exemple le procédé de minage. Cependant,
nous avons montré que son coût d’entretien n’est pas si exorbitant lorsqu’on
le compare avec le coût de maintien d’une monnaie traditionnelle telle que
l’euro. Malgré cela, la puissance de calcul est une ressource très recherchée
dans le monde actuel. La perspective que la puissance disponible à travers
le réseau bitcoin soit utilisée plus efficacement est plutôt séduisante. Ceci est
encore illusoire, mais un nouveau protocole réussira peut-être à réaliser ce
tour de force.
De plus, l’utilisation de bitcoins est quelque chose d’encore rudimentaire. Il existe une seule opération possible, qui est : « l’utilisateur A envoie un
certain montant en bitcoins à l’utilisateur B ». Cette transaction est irréversible,
ce qui en soi est à double tranchant. Cependant, cette unique méthode a
déjà donné naissance à des opérations plus complexes. Des organismes spécialisés ont vu le jour et proposent de convertir des euros en bitcoins. Malgré tout, les possibilités offertes par nos devises ne se limitent pas à cela. En
plus des divers moyens de paiement possibles (espèces, chèques, virements,
carte), il existe de multiples façons de payer. Il est par exemple possible de
différer ses paiements ou encore d’y ajouter une condition de réduction (escompte conditionnel). De plus, il est possible de souscrire à des prêts, sans
parler des systèmes de crédits renouvelables présents dans de nombreux de
pays.
39 - Le bitcoin
Tous ces services se sont développés au fil du temps et la plupart ne
sont pas encore accessibles avec des bitcoins. Cependant, plusieurs initiatives existent, dont le but est d’offrir plus de possibilités aux utilisateurs. On peut
par exemple citer Open Transactions [55], un logiciel qui propose nombre
de services comme l’achat d’actions, mais aussi beaucoup de moyens de
paiement comme les chèques, ou encore les prélèvements automatiques. Il
existe aussi le logiciel Ripple [56], qui permet d’effectuer des paiements depuis
n’importe quelle devise (euro, bitcoin, mile aérien par exemple) dans n’importe quelle autre. Une telle transaction est validée en seulement quelques
secondes, alors que cela ne se passe pas aussi simplement dans le cas du
bitcoin.
Il est important de garder à l’esprit que le bitcoin est encore jeune, alors
que les monnaies usuelles ont connu des siècles d’évolution. Ce système a
ouvert une porte, il a montré que l’on peut concevoir et utiliser une monnaie entièrement décentralisée. Il est possible que le protocole évolue, afin
de régler les points sujets à débat, comme il est possible qu’une toute nouvelle monnaie décentralisée émerge et prenne la place du bitcoin. En réalité,
son avenir n’est pas si important, le bitcoin est et restera la première monnaie
décentralisée à l’échelle planétaire.
3.3
3.3.1
Une alternative durable
Un modèle conçu pour durer
De par sa conception, le bitcoin est une monnaie virtuelle pensée pour
durer. En effet, son créateur, Satoshi NAKAMOTO, avait déjà écrit dans son
article « Bitcoin : A Peer-to-Peer Electronic Cash System » [7] en novembre
2008 que son système serait capable de fonctionner « quasi éternellement ».
Il a ainsi proposé des solutions à de nombreux problèmes possibles et cela six
mois avant la mise en place des premiers serveurs.
Il est prévu que la quantité de bitcoins soit limitée : 21 millions, c’est le
nombre exact de bitcoins qui seront en circulation à partir de 2140. En contrepartie, une unité peut être théoriquement divisée en une infinité de parts. Pour
le moment le bitcoin est divisible jusqu’à la huitième décimale soit 0.00000001
Le bitcoin - 40
bitcoin. Cette limite est censée permettre à la monnaie de ne pas connaître
d’inflation une fois la totalité des bitcoins créés.
Un problème est soulevé à cause de cette limite. Jusqu’à présent les
mineurs sont rémunérés pour leur travail en récupérant les bitcoins créés à
chaque validation de bloc. Lorsque la limite sera atteinte plus aucun bitcoin
ne sera créé. Comme un utilisateur a la possibilité de laisser une commission
à la personne qui se chargera de valider sa transaction, il y aura toujours un
intérêt à miner.
Comme nous l’avions énoncé précédemment, les clés de chiffrement
garantissant l’anonymat et l’accès au compte, sont actuellement basées sur
deux algorithmes : SHA-256 et RIPEMD-160. Pour le moment, ces derniers sont
réputés sûrs, c’est-à-dire que personne n’a encore réussi à casser le cryptage.
Cependant, si un jour les progrès technologiques les rendent obsolètes, le système sera suffisamment évolutif pour intégrer de nouveaux algorithmes et ainsi
continuer de garantir la sécurité des transactions.
Par le passé, des failles de sécurité ont été découvertes dans les logiciels
exploitant cette monnaie décentralisée. Une fois ces bugs 3 connus, ce fut à la
communauté de développeurs de les corriger au plus vite. Les problèmes ne
proviennent donc pas du système en lui-même et tant que les développeurs
continueront à améliorer les logiciels et donc le réseau, les bitcoins pourront
continuer à circuler en toute sécurité.
Toutes les transactions sont stockées dans le fichier appelé blockchain.
Étant donné que chaque transaction rajoute une ligne à cette liste, le fichier
devient de plus en plus lourd chaque jour. Pour information, en novembre
2014, le fichier pesait 25 Go [57] pour 53 millions de transactions déjà effectuées, soit l’équivalent de 530 dictionnaires. Le concepteur a prévu un système qui permet d’effacer certaines données jugées inutiles après un certain
laps de temps. Cette fonctionnalité n’est pas encore implémentée car le besoin à l’heure actuelle ne s’en fait pas sentir. Il faut aussi noter que la puissance
de nos ordinateurs va augmenter en même temps que la taille de la blockchain. Cela ne représente donc pas un problème dans le maintien du réseau,
3. Défaut dans la conception d’un logiciel.
41 - Le bitcoin
même si cela peut décourager certains mineurs amateurs à se lancer dans
l’aventure.
Comme la majorité des problèmes qui pourraient survenir au cours des
prochaines années ont déjà été anticipés, le bitcoin est une monnaie décentralisée conçue pour durer grâce à son caractère évolutif. On peut également remarquer que la majorité des autres monnaies décentralisées s’appuie
sur l’article de Satoshi NAKAMOTO, chacune d’entre elles ajoutant ou modifiant un élement. Cet article représente en quelque sorte une base théorique
pour toutes les monnaies décentralisées.
3.3.2
Des exemples de monnaies qui ont déjà marché
Le bitcoin est loin d’être la première monnaie complémentaire [58]. Il
faut comprendre ici que le bitcoin n’est pas la première monnaie à ne pas
dépendre d’un État particulier. La plus ancienne des monnaies complémentaires encore en activité aujourd’hui est le WIR, qui est utilisé par plus de 60 000
entreprises suisses. Afin d’éviter toute confusion, il faut savoir que le WIR est une
initiative privée, mais reste une monnaie centralisée. La banque WIR est l’institution chargée de contrôler les transactions. Le WIR circule donc en dehors
des circuits bancaires traditionnels. On ne détaillera pas toutes les monnaies
existantes, mais on peut citer l’exemple du SEL en France, du RES en Belgique,
ou encore du Chiemgauer en Allemagne. La valorisation de ces monnaies
varie beaucoup selon les cas. Il n’existe pas de règle générale : un WIR équivaut à un franc suisse, mais un SEL correspond à une heure de temps. Ainsi,
on peut acheter un cours particulier d’une heure en dépensant un SEL, sous
réserve que ce moyen de paiement soit accepté.
Le WIR a été créé en 1934 en Suisse, à la suite de la crise de 1929.
Pour faire un parallèle, le bitcoin a été créé en 2009, à la suite de la crise
de 2008 et le protocole utilisé est une réponse aux diverses crises économiques ayant secoué le 20ème siècle. Sans rentrer dans les détails, pour le WIR,
lorsque l’entreprise A décide d’acheter certains produits à l’entreprise B, l’entreprise A marque un débit de WIRs et l’entreprise B est créditée de ces WIRs,
en échange des produits. En 2000, l’économiste américain James STODDER
a réalisé une étude sur toutes les transactions effectuées en WIRs depuis la
naissance du système. Les résultats qui en ressortent sont très intéressants. Il
Le bitcoin - 42
a démontré que le volume d’activité du WIR augmente lorsque l’économie
se trouve en récession et qu’il baisse en période de croissance. Le WIR a un
effet contracyclique, il aide à maintenir l’économie à flot lorsque le climat est
difficile, sans pour autant faire de l’ombre aux monnaies étatiques.
Ce type de monnaie est intéressant pour plusieurs raisons. Leur création
diffère de l’utilisation d’une « planche à billets », il s’agit là d’une caractéristique importante des monnaies complémentaires. Lorsqu’un WIR est créé,
cela signifie qu’une transaction réelle a été effectuée. Des WIRs sont introduits
dans l’économie uniquement lorsque des marchandises ont été échangées,
contrairement à nos monnaies étatiques qui sont créées ex nihilo. Le minage
de bitcoins fonctionne selon un système analogue, puisque les bitcoins sont
donnés en récompense de l’aide apportée lors du maintien de l’intégrité
du réseau. De plus, il n’est pas possible de placer ces monnaies, certaines
perdent même de la valeur tous les mois. Ceci favorise les échanges : il est
inutile d’accumuler des WIRs, puisqu’ils ne rapporteront rien de plus dans plusieurs mois. La conséquence est simple et immédiate : les WIRs circulent, ce
qui favorise grandement les échanges et contribue à relancer l’activité économique.
Les monnaies complémentaires ont assez mauvaise presse auprès des
gouvernements. En réalité, cela vient du fait qu’il n’y a presque aucune
taxe ni aucune commission à payer lors d’une transaction. Plus précisément,
quelques frais dont il faut s’acquitter lors d’une opération de change. Par
exemple, pour changer des WIRs en euros, il y a une commission prélevée par
la structure régulatrice (banque WIR). Les gouvernements ne recouvrent rien
sur ces monnaies. Dans le cas du bitcoin, une commission est aussi prélevée
par les plateformes de change.
Le cas de l’inflation est plus compliqué. Comme le WIR est directement
relié au franc suisse, si celui-ci est sujet à l’inflation, alors le WIR sera directement entraîné. Il existe aussi des monnaies reliées à des actifs réels. Par
exemple, le LEAF est convertible en produits agricoles et est très utilisé au Japon. Si le yen entre dans la spirale de l’hyperinflation, le LEAF en sera complètement épargné. On voit ici l’importance de relier la monnaie à un actif réel,
chose que Richard NIXON, alors Président des États-Unis, a supprimé en 1971
mettant fin à l’étalon-or.
43 - Le bitcoin
Le fonctionnement du bitcoin diffère de celui des monnaies présentées
ici, mais simplement parce qu’il est basé sur des technologies qui n’existent
que depuis peu. Pour autant, on a vu qu’il présentait beaucoup de points
communs avec diverses monnaies complémentaires plus anciennes. On peut
donc penser qu’il se comportera de la même façon à l’avenir. Il est trop tôt
pour dire si le bitcoin aura un effet bénéfique sur l’économie à long terme ou
n’aura eu aucune utilité. Cependant, nous avons vu que les monnaies complémentaires présentent des avantages que les monnaies étatiques n’ont pas
et que leur rôle est loin d’être négligeable en temps de crise.
3.3.3
Les monnaies fiduciaires sont-elles en danger ?
À l’heure actuelle, le bitcoin se situe encore au début de la courbe
d’adoption et les personnes qui s’y intéressent sont plutôt jeunes et naturellement curieuses. Le bitcoin est donc encore assez peu connu du grand public.
À l’inverse, tout le monde possède des pièces de monnaie ou des billets de
banque. C’est pourquoi les monnaies fiduciaires sont encore très présentes
dans les esprits et beaucoup y sont attachés. Il est également nécessaire de
rappeler que de nombreuses personnes travaillent dans le secteur bancaire
dans le monde. À titre d’exemple, en France, les banques employaient un
peu moins de 380 000 salariés en 2013 [59]. Il paraît donc important d’analyser la répercussion de l’apparition de ces nouvelles devises décentralisées sur
les monnaies fiduciaires.
Pierre NOIZAT indique que les monnaies usuelles n’ont pas à s’inquiéter
du bitcoin. Pour lui, « cette monnaie décentralisée ne les remplacera jamais »,
car elle n’a pas la même vocation. En effet, le bitcoin offre une nouvelle possibilité, qui est de payer « en espèce » sur internet. Il s’agit de quelque chose
qui n’était pas possible jusqu’à présent. D’ailleurs, il analyse le bitcoin avec la
même analogie que l’on peut faire entre un chèque et des espèces. Lorsqu’il
a été inventé, le chèque n’avait pas pour vocation de remplacer les billets de
banque, mais plutôt d’étendre les possibilités et facilités de paiement. Selon
lui, le bitcoin ne remplacera donc jamais la carte bleue, les chèques et tous
les outils financiers que nous utilisons au quotidien.
Certains d’entre nous sont sceptiques sur la longévité de cette monnaie
décentralisée et non régulée par une autorité. Il ne faut pas y voir un quelLe bitcoin - 44
conque attachement aux propos des banques centrales, des institutions étatiques ou des lobbys. Cependant, on peut être amené à penser que le faible
engouement montré jusqu’à présent demeure le principal frein au développement du bitcoin. À l’heure du numérique, où une application ne met que
quelques jours pour se faire connaître du monde entier, la faible utilisation du
bitcoin, pourtant créé en 2009, est peut-être à craindre.
Cependant, la donne n’est sûrement pas la même dans les pays pauvres
ou émergents. En 2010, d’après la Banque Mondiale, 2,5 milliards de personnes ne possédaient pas de compte bancaire [60]. Elle affirmait aussi que
75 % des pauvres dans le monde n’en ont pas à cause du coût de l’ouverture
et du maintien, et de l’éloignement des établissements bancaires. L’accès
à un téléphone mobile est donc bien plus facile dans ces pays que l’accès
à un compte bancaire. On peut donc véritablement parler d’essor de la « finance mobile » dans ces régions privées d’accès aux comptes bancaires. Par
exemple, 68 % des Kényans ont déjà eu recours à un téléphone mobile pour
réaliser des transactions financières alors que seulement 42 % ont accès aux
services bancaires (deuxième taux de bancarisation 4 le plus élevé d’Afrique
après l’Afrique du Sud) [61]. Dans ces pays-là, il n’est donc pas impossible que
le bitcoin prenne une place plus importante que dans les pays développés et
remplace même les monnaies locales. Pierre NOIZAT indique qu’il est même
possible qu’une « économie bitcoin » se mette en place au fil du temps.
Le bitcoin est donc à l’heure actuelle dans une phase de développement et d’acceptation du grand public. Dans les pays développés, il y a peu
de chance qu’il remplace les monnaies fiduciaires supervisées par les États et
les banques centrales, qui n’ont ainsi rien à craindre. Cependant, le bitcoin
offre un nouveau moyen de paiement pour les particuliers et il améliore notamment la rapidité des transactions sur internet. De plus, il est possible que
le bitcoin prenne une place importante dans l’économie des pays où le taux
de bancarisation est faible pour palier à cette difficulté d’accès.
4. Fait de pouvoir accéder à des services bancaires
45 - Le bitcoin
Conclusion
Les monnaies ont lentement évolué au fil des siècles et ces instruments
quotidiens sont devenus extrêmement complexes pour répondre à des besoins grandissants. Néanmoins, au cours du siècle dernier, notre système financier a provoqué plusieurs crises qui ont secoué le monde entier. C’est
en réponse à ces divers épisodes que l’idée du bitcoin a émergé. Aujourd’hui, cette monnaie est accessible, simple d’utilisation, anonyme, sécurisée
et complètement autonome.
À l’heure actuelle, le principal problème entourant le bitcoin n’est pas
un défaut du système. Il s’agit plutôt de la mauvaise image qu’il renvoie, due
en grande majorité à une presse mal informée. De nombreux raccourcis ont
été réalisés à tort et l’ont dégradé petit à petit. Au milieu de tous ces amalgames, il convient d’en revenir aux faits. Le mouvement libertarien n’est pas
une secte comme il est parfois présenté. Utiliser des bitcoins ne signifie pas que
l’on soutient les actions illégales qui sont réalisées avec. La sécurité du système
est garantie et son fonctionnement n’est certainement pas nébuleux.
Ce système est jeune, ce qui pose de nombreux problèmes : les différentes institutions concernées ne parviennent pas à suivre la croissance rapide
du bitcoin. Par exemple, on ne trouve aucune référence au bitcoin lorsque
que l’on effectue des recherches sur les différentes dispositions prises par la
Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL). De plus, cette
monnaie suscite encore la méfiance, voire parfois le rejet de la part des gouvernements et des banques. Cela tient au fait qu’aucune taxe ne soit prélevée sur les transactions et que personne n’ait le contrôle total du réseau.
Pour les entreprises, l’intégration de ce moyen de paiement peut se révéler extrêmement intéressante si elle est menée avec un minimum d’attention. Des méthodes simples et efficaces existent, qui ne demandent en plus
qu’un faible investissement. Cependant, le principal avantage réside dans la
communication engendrée. Comme nous l’avons vu pour Monoprix, la simple
annonce de cette intégration peut engendrer une publicité très importante
et se révéler très profitable pour une entreprise.
Le bitcoin - 46
Les particuliers ont eux aussi beaucoup d’avantages à tirer de l’utilisation
de bitcoins. Ce système peut sembler peu intuitif parce que nous n’y sommes
pas habitués, mais il est en réalité très simple de payer en bitcoins. Cependant, il n’existe aucun moyen de rattraper une erreur humaine, comme par
exemple la perte ou le vol d’une clé privée. Le réseau offre des outils puissants
pour rester anonyme et sécuriser ses transactions, mais l’usage qui en est fait
est à la responsabilité de chaque utilisateur.
Pour autant, rien ne garantit que le réseau bitcoin va perdurer dans les
années à venir. Les banques et les gouvernements ont un intérêt à ce qu’il ne
prospère pas. Il est à prévoir que ces acteurs tentent de freiner son avancée.
Ces structures ont effectivement beaucoup à perdre car elles s’appuient très
fortement sur les monnaies fiduciaires. Une perte de vitesse des monnaies étatiques au profit de monnaies décentralisées signifierait un pouvoir amoindri.
Cependant, nous pensons que les monnaies traditionnelles n’encourent
aucun risque. Elles sont ancrées dans notre culture depuis longtemps, les monnaies décentralisées ne les remplaceront jamais. Pour autant, elles peuvent
avoir un effet bénéfique à long terme en réduisant les effets des diverses crises
économiques. De plus, le protocole du bitcoin est évolutif, ce qui lui permettra
de s’adapter à tous les problèmes pouvant survenir dans le futur.
Le bitcoin est actuellement sur une pente ascendante et va encore se
développer dans les années à venir. De nombreux outils sont en cours de développement afin de multiplier les possibilités offertes par le réseau. À l’instar
du WIR en Suisse, on peut supposer qu’un équilibre se créera entre la part
des monnaies fiduciaires et celle du bitcoin dans l’économie mondiale. De
nouveaux protocoles plus performants peuvent aussi émerger. Il est possible
qu’une nouvelle monnaie décentralisée voit le jour et remplace le bitcoin. Au
final, son avenir n’est pas si important. Qu’il perdure ou qu’il disparaisse, le
bitcoin est et restera la première monnaie décentralisée à échelle mondiale.
Une expérience fascinante pour peu que l’on s’y intéresse.
47 - Le bitcoin
Annexe A
Compte-rendu de la conférence
« Les mathématiques et la cryptographie réinventent la monnaie : le
bitcoin »
Espace des Sciences - Rennes - 7 octobre 2014
— Animatrice
Maëtte CHANTREL, Responsable des conférences à l’Espace des Sciences de
Rennes
— Intervenant
Jean-Paul DELAHAYE, Mathématicien et Informaticien au Laboratoire d’informatique fondamentale, Université de Lille - CNRS
Introduction
Une monnaie décentralisée a été rendue possible grâce aux progrès des
mathématiques et de la cryptologie. Il existe aujourd’hui plus de 300 monnaies
cryptographiques, mais le bitcoin est la plus importante car elle représente
plus de 90 % de la capitalisation boursière des monnaies décentralisées.
En 2008, Satoshi NAKAMOTO publie un article sur le bitcoin et celui-ci est
mis en service au début de l’année 2009. Cette monnaie suscite la passion
dès le départ.
Jean-Paul DELAHAYE souligne que le bitcoin n’est pas une monnaie virtuelle : elle est réelle. Elle possède bien une valeur (268 euros au jour de la
conférence). Cette monnaie est seulement numérique.
Le bitcoin - IV
Il ajoute aussi que les monnaies électroniques ne sont pas une nouveauté. Une opération bancaire consiste simplement à effectuer des jeux
d’écriture sur des ordinateurs. Enfin, il précise que les crises financières n’ont
absolument pas pour origine le dysfonctionnement ou la fraude informatique.
Présentation rapide du système bitcoin
Autorité centrale et autorégulation
Aujourd’hui, toute monnaie repose sur une autorité centrale, ce qui implique qu’une entité la régule et la maintient. Il en est de même pour toutes
les monnaies pseudo-privées : le dollar Linden (Second Life), les points fidélité
des supermarchés, les monnaies locales.
L’originalité du bitcoin apparaît dans le fait qu’il se régule tout seul grâce
à un réseau P2P (pair à pair). Un certain fichier (blockchain) existe et transite
entre les utilisateurs, ce qui permet de se passer d’une autorité centrale.
Open source et anonymat
Dans le cas du bitcoin, Jean-Paul DELAHAYE souligne que tout est public. Les protocoles de base, les algorithmes cryptographiques utilisés, les programmes les rendant opérationnels et les données des comptes sont disponibles pour tout le monde. Cependant, il précise que l’anonymat est tout de
même conservé : il est impossible de faire le lien entre un compte et son titulaire.
Notions de base : compte, porte-monnaie et portefeuille virtuel
Grossièrement, posséder des bitcoins c’est connaître une suite de chiffres
et lettres qui donne l’accès à un compte. Il est possible pour une seule personne de posséder plusieurs comptes, l’ouverture de ceux-ci ne coûte rien.
Un compte est composé du montant de bitcoins qu’il contient, d’une clé
publique (numéro de compte) et d’une clé privée (connue par le détenteur
du compte seulement).
V - Le bitcoin
Tout support est bon pour conserver les données d’un compte : un papier, une clé USB, un disque dur, notre mémoire.
Pour gérer un compte bitcoin, on utilise un « wallet », appelé aussi portemonnaie. Il est aussi possible de confier la gestion de son compte à des sites
internet, mais le détenteur du compte n’en est plus totalement maître.
Obtenir et gérer ses bitcoins
On peut obtenir des bitcoins de plusieurs façons :
— en demandant à quelqu’un de nous envoyer des bitcoins (en échange
d’un bien ou d’euros).
— en utilisant un distributeur. Un seul distributeur est disponible en France :
il est accessible à La Maison du bitcoin à Paris. Il suffit d’insérer des billets
et son numéro de compte bitcoin puis l’équivalent en bitcoins des euros
insérés sont transférés sur le compte.
— en allant sur une plateforme de change. Elle permet d’acheter des bitcoins par carte bancaire ou par un autre moyen de paiement puis elle
les transfère sur un compte. On perd ici l’anonymat pour les versements
importants.
— en « minant » des bitcoins, c’est-à-dire en participant aux opérations
de contrôle de la monnaie.
Jean-Paul DELAHAYE insiste sur le fait que la gestion d’un compte bitcoin
doit être assurée très sérieusement afin d’éviter toute perte. Il conseille même
la possibilité de conserver son compte « à froid » (garder la clé privée sur une
clé USB ou un ordinateur déconnecté du réseau).
Comment est née cette monnaie
Jean-Paul DELAHAYE expose la problématique de la création d’une nouvelle monnaie. Comment est-il possible de créer une monnaie à partir d’un
programme informatique ?
On se repose sur l’idée que « l’argent c’est la mémoire » de Narayana
KOCHERLAKOTA :
Le bitcoin - VI
— toutes les transactions sont publiques.
— à chaque instant, la somme des bitcoins émis et le contenu de chaque
compte sont connus.
— seul celui qui connaît la clé privée d’un compte peut déplacer son
contenu.
— ceux qui le souhaite peuvent participer au calcul de la répartition des
bitcoins.
La mémoire collective, stockée dans la blockchain, va créer de la valeur. La cryptographie est utilisée pour signer et ordonner des transactions,
pour organiser et contrôler la création de nouveaux bitcoins, puis pour rendre
infalsifiable ce fichier représentant un cahier de compte.
Une caractéristique supplémentaire du bitcoin soulignée est que toute
transaction est irréversible. Ces transactions sont également rapides, cela est
dû à l’absence d’autorité centrale.
Explication illustrée
Exemple simplifié : compte entre amis
Jean-Paul DELAHAYE prend pour exemple un groupe d’amis (inflexible)
gérant un compte commun. Chacun d’eux note séparément toutes les transactions effectuées. Il est donc possible de savoir qui possède quoi sur ce
compte.
L’accord de tous les membres du groupe est nécessaire pour chaque
transaction. Une fois validée, les membres inscrivent le transfert sur leur fichier.
Si un des membres fait une dépense pour des courses communes, les
autres membres le remboursent par le biais de ce compte en se répartissant
les frais. Une fois les comptes équilibrés, les amis peuvent se séparer et oublier
ce compte.
VII - Le bitcoin
Extension internationale : problèmes rencontrés et résolutions
Transposer ce système à une plus grande échelle serait impossible pour
diverses raisons :
— les échanges électroniques ne sont ni parfaits ni instantanés.
— une partie du réseau peut être déconnectée du reste.
— tout le monde peut ne pas souhaiter participer à la vérification des transactions.
— il peut y avoir des tricheurs.
— il faudrait que la liste des membres puisse être extensible.
Satoshi NAKAMOTO a donc travaillé pour perfectionner ce modèle. Il a
réglé les problèmes précédemment cités tout en améliorant d’autres aspects.
Par exemple, le bitcoin n’a pas de valeur prédéfinie (change flottant) ; elle
varie en fonction de l’offre et de la demande. Il a aussi géré les doubles dépenses qui devenaient possibles à cause des transactions non-instantanées
sur le réseau.
La validation d’une transaction
La solution proposée par Satoshi NAKAMOTO est la suivante : il ne faut
pas faire une vérification d’instant en instant. Il propose donc de ne faire les
validations que toutes les 10 minutes environs. La blockchain va donc être
complétée par une nouvelle page (un block) une fois toutes les 10 minutes.
Chaque ajout de block est validé par ceux qui participent à la régulation
du système. Les participants ont la possibilité de gagner des nouveaux bitcoins
(25 actuellement) toutes les 10 minutes. Le jour de la conférence, il y avait 13
millions de bitcoins déjà émis.
Lors d’une transaction, la blockchain est consultée et il est vérifié que
le montant de la transaction est bien présent sur le compte débiteur. Si c’est
le cas, la transaction est effectuée. Cependant, les bitcoins reversés ne sont
pas dépensables dans l’instant sur le compte crédité : il faut attendre que la
transaction soit validée.
Le bitcoin - VIII
Lorsqu’un dédoublement de blockchain se produit (coupure d’une partie du réseau), c’est la blockchain la plus longue qui est conservée afin de
perturber le moins de transactions possibles.
Approfondissement et élargissement
Le minage
Le système bitcoin désigne un gagnant (de 25 bitcoins) toutes les 10 minutes. Un processus cryptographique de « preuve de travail » en assure l’honnêteté et l’imprévisibilité. Un mineur a d’autant plus de chance de gagner
qu’il possède une grande puissance de calcul.
Jean-Paul DELAHAYE parle de « ruée vers l’or ». En effet, le jour de la
conférence, 25 bitcoins valaient environ 6 700 euros.
Le matériel permettant de miner du bitcoin se spécialise et se perfectionne de plus en plus. Même si la puissance de calcul devient de plus en
plus forte, le système conçu par Satoshi NAKAMOTO s’ajuste automatiquement pour que le temps de minage soit toujours de 10 minutes en moyenne.
La consommation électrique utilisée par les mineurs est donc considérable.
Selon le site bitcoinwatch.com, la puissance consacrée au minage est
d’environ 2 800 000 pétaFLOPS (au 16 septembre 2014), soit 20 000 fois la puissance de l’ordinateur le plus puissant du monde. Jean-Paul DELAHAYE fait ensuite remarquer que les défenseurs du bitcoin disent que les monnaies traditionnelles utilisent elles aussi énormément d’énergie. Il aborde ensuite l’existence de monnaies décentralisées basées sur le bitcoin qui utilisent ces puissances de calcul à des fins utiles (primecoin).
Une possible faille dans le système bitcoin est présente dans le fait que si
une entité possède plus de 51 % de la puissance consacrée au minage, elle
pourrait perturber le fonctionnement de la monnaie (doubles dépenses par
exemple). Afin de relativiser, Jean-Paul DELAHAYE explique que les mineurs
possèdent eux aussi des bitcoins, donc même s’ils obtiennent 51 % de la puissance de calcul, ils n’essaieront pas de détériorer le protocole.
IX - Le bitcoin
Nombre fini de bitcoins
Le nombre d’unités créées lors du minage diminue tous les 4 ans à partir
de la date de création du bitcoin. Au départ, 50 bitcoins étaient créés toutes
les 10 minutes, aujourd’hui seulement 25. Comme le bitcoin n’est divisible que
jusqu’au cent millionième, il y en aura un nombre limité : 21 millions. Un calcul
montre que le processus d’émission s’arrêtera en 2140. Par conséquent à partir
de cette date, plus aucun bitcoin ne sera créé.
L’intérêt de miner à partir de 2140 (et même avant) est discutable. C’est
pour cela qu’il est possible de laisser une commission à chaque transaction.
Ces commissions sont facultatives, mais à partir de cette date, les utilisateurs
auront intérêt à en proposer s’ils veulent que leurs transactions soient validées
rapidement.
La valeur du bitcoin
Jean-Paul DELAHAYE explique que le système bitcoin se consolide au fur
et à mesure que des personnes s’y intéressent : plus le cours du bitcoin monte,
plus il devient intéressant de miner, plus nombreux sont ceux qui minent, plus le
bitcoin devient robuste (y compris aux attaques d’acteurs puissants) et donc
plus son cours a de chances de monter.
Il tente d’expliquer la hausse fulgurante de la valeur du bitcoin lors du
mois de décembre 2013 (jusqu’à 900 euros). Pour lui, cela est principalement
dû à la spéculation sur cette monnaie, et plus particulièrement en Chine.
Conclusion
Satoshi NAKAMOTO a réussi à créer un système monétaire qui tient solidement depuis 2009. Son cours est passé d’un montant dérisoire à sa création,
pour arriver à 900 euros à la fin de l’année 2013.
En conclusion, Jean-Paul DELAHAYE et les personnes qui le promeuvent,
pensent que « le bitcoin est une expérience inédite. Il faut y investir que le
temps et l’argent que l’on peut se permettre de perdre ».
Le bitcoin - X
Il indique aussi que les avis sont très partagés sur son avenir et son intérêt.
Il se demande aussi si une monnaie non régulée par une autorité centrale est
viable.
XI - Le bitcoin
Annexe B
Entretien avec Monsieur Pierre NOIZAT (co-fondateur de la start-up
Paymium), réalisé le 5 décembre
2014
Créée en juillet 2011 par Gonzague GRANDVAL, Pierre NOIZAT et David
FRANCOIS, la start-up Paymium regroupe aujourd’hui 6 collaborateurs. Paymium est une place de marché en ligne où les utilisateurs peuvent échanger
des bitcoins contre des euros et inversement. Les utilisateurs peuvent être des
particuliers comme des entreprises.
Pierre NOIZAT a d’abord travaillé pour de grands groupes français (Canal+, Orange), avant de se lancer dans la création de la start-up Paymium,
où il est aujourd’hui Directeur de l’exploitation. Il est l’auteur des ouvrages Bitcoin, monnaie libre paru en septembre 2012 et Bitcoin Book paru en octobre
2012. Il est également l’auteur de l’article « Bitcoin : derrière la bulle, de vrais
débats » publié en juillet 2013 dans ParisTech Review.
Quels sont les éléments que vous avez considérés avant de
créer, ou de co-créer dans votre cas, la start-up Paymium ?
En fait, démarrer une start-up est un choix de vie personnel, puisque l’on
a un statut radicalement différent de celui d’un salarié. Cela dépend essentiellement de la psychologie de la personne. Certains deviennent entrepreneurs dès la sortie de l’école, d’autres, comme moi, travaillent de longues
années avant de se décider ou de trouver l’opportunité de se lancer. D’autre
part, il est beaucoup plus facile de se lancer dans une start-up technologique
que dans beaucoup d’autres aventures, ne serait-ce qu’en terme de capital
requis au départ. Par exemple la création d’une entreprise basée sur la fabrication d’un produit de grande consommation, même innovant, demande un
investissement beaucoup plus important. Pour ma part, l’envie d’entreprendre
Le bitcoin - XII
couplée à la découverte de l’invention bitcoin en 2010-2011 m’a poussé à me
lancer et à essayer de développer cette technologie dans le cadre d’une entreprise.
A ce moment-là, le marché autour du bitcoin n’était pas très développé, cela a-t-il rendu les choses plus simples ?
En réalité, c’est à double tranchant. On peut se dire que la technologie
en question n’est pas mûre et va mettre des années à percer. Ou au contraire,
on peut imaginer qu’il s’agit du bon moment pour se lancer parce qu’il n’y
a encore personne. Dans tous les cas, il est toujours délicat de déterminer la
bonne occasion pour le faire. Cependant en ce qui me concerne je trouvais
assez clair que c’était le bon moment pour démarrer.
Pour vous, quelles sont les principales différences entre les
« cryptomonnaies » et les monnaies fiduciaires ?
Je crois qu’il y a une grande confusion autour du terme « cryptomonnaie », qui est généralement mal interprété. Ce terme a été popularisé par les
lobbys et les banques centrales qui tentent de démanteler le bitcoin. Aujourd’hui, la cryptographie est impliquée dans toutes les transactions effectuées
sur internet, donc l’euro est tout autant une cryptomonnaie que le bitcoin.
De même, l’emploi qui est fait du terme « monnaie numérique » est incorrect.
L’euro est aussi une monnaie numérique, et le fait que les billets soient matériels n’y change rien. Il est parfaitement possible d’imprimer des clés privées
sur du papier et à ce moment là, il n’y a plus aucune différence. Le bitcoin est
certes basé sur un système de signature électronique mais ce système ne lui
est pas propre. Ce qui est assez génial c’est la manière dont la technologie
bitcoin en fait usage. Mais le système en lui-même est présent dans beaucoup
d’applications, et nos comptes bancaires en font partie. La vraie différence
entre ces deux monnaies est l’architecture de leur réseau respectif. Dans le
cas du bitcoin, parler de monnaie décentralisée ou open-source est pertinent, mais les termes cryptomonnaie et monnaie numérique sont à manipuler
avec précaution.
XIII - Le bitcoin
Avez-vous une idée des profils des utilisateurs qui utilisent votre
service ? Est-ce que ce sont des spéculateurs, des utilisateurs de
bitcoins dans les commerces, des sociétés ?
En fait, il est assez difficile pour une start-up de faire une étude de marché, mais surtout complètement inutile. Lorsque l’on réalise une étude de marché, les personnes essayent de se raccrocher à ce qu’ils connaissent déjà,
et cela est contraire au principe même de l’innovation. Par exemple, si on
leur demande ce qu’ils attendent d’une application pour payer par téléphone, les réponses vont vraisemblablement être « Je voudrais une application comme PayPal ». Lorsque nous avons très récemment lancé notre application de porte-monnaie bitcoin, nous n’avons pas réalisé d’étude de marché pourtant notre service s’utilise plus facilement que PayPal. Cela dit, il faut
bien se rendre compte que le bitcoin se situe encore au début de la courbe
d’adoption, et les profils des gens qui s’y intéressent sont assez semblables.
Ce sont des personnes plutôt jeunes et naturellement curieuses. Ce profil peut
sembler être un lieu commun, mais il se retrouve pour toutes les nouvelles technologies. Mon objectif est de populariser le bitcoin et donc obtenir des profils
d’utilisateurs plus variés.
Sur votre site, vous précisez que les fonds d’un utilisateur ne sont
pas mélangés avec ceux d’un autre. Quelles sont les garanties
apportées par ce système ?
Il faut commencer par distinguer deux cas, puisque les utilisateurs de
Paymium ont la possibilité d’effectuer des transactions en euros et en bitcoins.
Dans le premier cas, les clients ont leur propre compte de paiement via notre
partenaire Lemon Way. Dans le second cas, il n’existe pas de telles contraintes
pour la simple et bonne raison qu’il n’y a pas encore de régulation sur cette
monnaie. Il n’est donc pas obligatoire que chaque client ait une adresse bitcoin qui lui est propre. De plus, cela ne serait pas très pertinent dans notre cas
puisque nos clients sont identifiés.
Le bitcoin - XIV
Vous indiquez sur votre site internet que l’intégralité des clés privées déposées sur Paymium sont « stockées à froid » dans des
coffres de banques. Y voyez-vous un paradoxe par rapport à
l’idéologie du bitcoin ?
Je crois qu’il faut se garder d’associer idéologie et technologie. Ceux
qui associent une idéologie à une technologie réalisent un amalgame, alors
qu’il s’agit de deux choses complètement différentes. Ce rapprochement est
une technique de propagande efficace puisqu’elle permet aux gens de se
rassurer et de ne pas se poser de questions. On pourrait même dire qu’elle
empêche les gens de poser des questions. Cela existe dans d’autres pays,
mais c’est particulièrement vrai en France, où il est de bon ton de diffuser
une pensée « prête à porter ». On peut prendre l’exemple de la spéculation,
qui fut diabolisée au point que ce terme est désormais utilisé pour effrayer ou
énerver les gens. L’image que l’on a de la spéculation est le trader uniquement intéressé par le profit qui spécule sur les matières premières. En réalité,
la spéculation est vitale à l’innovation. Lorsque l’on créé une start-up, il faut
convaincre les investisseurs de spéculer sur son succès. C’est à dire que la
start-up va utiliser l’argent investi pour se développer, pour finalement réussir à être rentable au bout de deux ou trois ans. Sans cette spéculation, il
serait impossible de développer de nouveaux concepts ou produits et c’est
une information que la plupart des gens ne possède pas. J’aime beaucoup
rapprocher la spéculation de la météo, dans le sens où il s’agit d’un phénomène naturel que l’on ne contrôle pas, qui a de bons et de mauvais côtés.
Pour moi, le bitcoin n’est pas une idéologie, c’est une technologie. Il y a en
effet un courant libertarien, notamment aux États-Unis. Ceux qui y adhèrent
prônent l’anonymat du bitcoin. Je n’y adhère pas du tout et pourtant cela
ne m’empêche pas de l’utiliser. Je considère que les deux n’ont rien à voir,
aussi je ne vois aucun paradoxe au fait d’utiliser des coffres de banques pour
stocker des bitcoins à froid.
De nombreuses personnes considèrent que le minage est le principal problème du bitcoin. Qu’en pensez-vous ? Existe-t-il à ce
jour des pistes d’améliorations prometteuses ?
Il y aura toujours des gens à la recherche de la perfection, alors que
c’est quelque chose de difficilement réalisable. Par exemple, si on attendait
XV - Le bitcoin
qu’un médicament n’ait plus d’effets secondaires avant de le commercialiser, il n’y aurait presque aucun médicament sur le marché. Ainsi, en appliquant le principe de précaution, rien n’évolue. Pour le minage, la fabrication
d’une preuve de calcul a pour effet secondaire un certain coût en énergie. Il
existe une autre monnaie décentralisée qui s’appelle primecoin où le minage
consiste à générer des nombres premiers. Cependant, une partie du coût va
être, en quelque sorte, remboursée par l’utilisation de la preuve de calcul par
des mathématiciens. Cela revient en fait à baisser la difficulté de la preuve
de calcul donc la consommation. Cependant, cela a un impact négatif sur
la sécurité du système. Par ailleurs, c’est quelque chose qui me gêne parce
que cette information n’est pas disponible sur le site de primecoin, et que les
utilisateurs sont rarement au courant de ce contrecoup. Il reste encore beaucoup d’études à faire sur le sujet, mais il serait particulièrement intéressant de
prouver que la sécurité d’un système dépend d’un coût externe à ce système,
comme c’est le cas pour le réseau bitcoin mais aussi pour le système monétaire actuel. Les data center ont un coût énergétique, les convois de fonds
aussi, et de manière générale tous les procédés mis en place pour sécuriser
des transactions à l’intérieur de notre système monétaire. Il serait pertinent de
le comparer à celui du réseau bitcoin afin de voir si les deux se compensent
où si l’un des deux systèmes est plus efficace en énergie.
Que pensez-vous de l’annonce de Monoprix sur l’intégration du
bitcoin dans leurs magasins ? Pensez-vous que cela soit viable,
pertinent ?
L’annonce de Monoprix était un peu prématurée, puisque pour l’instant aucun détail sur cette intégration n’a été apporté. Cela leur a fait une
énorme publicité et Monoprix est maintenant connu dans le monde entier,
mais il faut attendre de voir ce que cela va donner.
Vous avez un partenariat avec le site internet showroomprive.com, pouvez-vous nous en dire plus ?
Contrairement à Monoprix, le système est déjà implanté sur showroomprive.com. C’est un bon exemple qui montre ce que peut faire un grand ecommerçant avec le bitcoin. Après avoir donné les informations nécessaires
concernant la commande, il suffit de choisir le bitcoin comme moyen de paieLe bitcoin - XVI
ment. Un des avantages majeurs apporté est la simplicité. Là où pour payer
par carte bancaire il faut rentrer le numéro de carte, la date d’expiration, le
cryptogramme de vérification, puis éventuellement un code reçu sur son téléphone afin de vérifier l’identité, un paiement en bitcoins ne nécessite que
la clé privée du compte.
Pour vous, les monnaies fiduciaires sont-elles en danger face à
ces nouvelles monnaies décentralisées ?
Je ne crois pas que les monnaies usuelles aient à s’inquiéter du bitcoin,
dans le sens où il ne les remplacera jamais. Par contre, le bitcoin offre une
nouvelle possibilité, qui est de payer en cash sur internet. Il s’agit de quelque
chose qui n’était pas possible jusqu’à présent. Mais cela ne remplacera jamais la carte bleue, les chèques, et tous les outils financiers que nous utilisons tous les jours. Ceci étant dit, la donne n’est pas la même dans les pays
émergents dont les monnaies sont beaucoup moins stables et où l’accès à
un smartphone est bien plus facile que l’accès à un compte bancaire. Dans
ces pays-là, il n’est pas impossible que le bitcoin prenne une place plus importante que dans nos pays développés, et même qu’une « économie bitcoin »
se mette en place au fil du temps.
XVII - Le bitcoin
Annexe C
Entretien avec Monsieur Éric LARCHEVÊQUE (co-fondateur de La Maison
du bitcoin et de la start-up Ledger),
réalisé le 30 mars 2015
Créée par Éric LARCHEVÊQUE et Thomas FRANCE et inaugurée en mai
2014, La Maison du bitcoin est un lieu de change situé en plein cœur de Paris.
Un espace d’échange sur la technologie et l’innovation autour du bitcoin est
également dédié aux entreprises. La start-up Ledger développe une solution
physique de portefeuille bitcoin protégé par carte à puce.
Ingénieur de formation, Éric LARCHEVÊQUE est un serial-entrepreneur depuis 1996 (France Cybermedia, Carpe Diem, Epic Dream SAS). Il décide de se
lancer dans l’aventure du bitcoin en 2014 avec La Maison du bitcoin puis
avec la start-up Ledger, où il est aujourd’hui Directeur général.
Comment avez-vous découvert le bitcoin ? Quels sont les éléments que vous avez considérés avant de vous lancer dans cette
aventure, c’est-à-dire de co-fonder La Maison du bitcoin puis
Ledger ?
J’ai entendu parler du bitcoin en 2012. À cette époque, je travaillais sur
une autre start-up donc je n’ai fait que survoler le sujet. J’ai quand même
continué à regarder comment il évoluait et lorsque j’ai vendu ma start-up fin
2013, je cherchais un projet sur lequel m’investir. C’était donc une évidence
pour moi de me diriger vers le bitcoin. Au début, je me suis surtout impliqué au
niveau technique parce que je ne connaissais pas trop l’écosystème. L’objectif premier a été de faire quelque-chose avec les fonds de la vente de
ma précédente start-up. On a donc décidé avec Thomas FRANCE, d’ouvrir
La Maison du bitcoin, un lieu de change et d’échange sur la technologie et
Le bitcoin - XVIII
l’innovation autour du bitcoin. En 2014, l’espace a bien fonctionné et nous
avons pu identifier des projets intéressants à développer. Par exemple, nous
nous sommes aperçus que nous pouvions améliorer certains points de sécurité
des transactions en bitcoins, notamment dans la protection des clés privées.
Nous avons donc fédéré d’autres start-up autour du projet pour accroître nos
opportunités de développement. Trois sociétés existaient alors : une évoluait
dans ce domaine et avait de très fortes compétences sur les cartes à puce
et la sécurité en général, une autre réalisait de la vente de bitcoins en ligne
et une dernière avait plutôt une capacité entrepreneuriale pour pouvoir lever
des fonds. Nous avons tout simplement décidé de nous associer pour créer
Ledger en juillet 2014. Nous sommes aujourd’hui une quinzaine de collaborateurs et nous travaillons principalement à développer les produits à l’international. Nous avons d’ailleurs récemment ouvert des bureaux à San Francisco.
Pour ma part, je suis beaucoup plus investi aujourd’hui sur Ledger que sur La
Maison du bitcoin, qui continue un petit peu sa mission.
Pourquoi avoir choisi le bitcoin comme unique monnaie décentralisée pour ce lieu ? Pensez-vous élargir ce choix à l’avenir ?
Nous n’avons pas « choisi une monnaie », mais nous avons plutôt choisi
de nous intéresser à une technologie. Toutes les monnaies décentralisées
fonctionnent sur le même principe. Le bitcoin représente plus de 90 % des
échanges cryptomonétaires. Les monnaies comme le litecoin n’apportent
strictement rien de plus au niveau technologique. Pour nous, le choix
était donc clair. L’intégralité des sociétés du domaine des cryptomonnaies
travaillent soit sur le bitcoin soit sur des choses plus exotiques. Il faut bien
se rendre compte que 97 % des investissements, sociétés et projets sur les
cryptomonnaies tournent autour du bitcoin.
Avez-vous une idée des profils qui s’intéressent et utilisent le bitcoin (âge, catégorie socio-professionnelle, sexe...) ?
Mes propos ne seront significatifs que pour la France et la région parisienne puisque je me base sur l’aperçu que je peux avoir avec La Maison du
bitcoin. Son activité principale est de proposer un change physique, c’està-dire un lieu où les personnes viennent acheter avec une carte de crédit
(ou des espèces) des bitcoins de façon simple et rapide. Il faut ainsi faire une
XIX - Le bitcoin
séparation entre les développeurs qui s’intéressent à la technologie et les utilisateurs qui viennent à La Maison du bitcoin parce qu’ils veulent acheter des
bitcoins. Donc les principaux usages ou les principales motivations des personnes qui viennent chez nous sont :
— l’investissement : plutôt que d’acheter un Napoléon ou de l’or, ils
achètent des bitcoins, mais ne les utilisent pas forcément ;
— les jeux en ligne (paris, poker) : les joueurs sont soumis à moins de limitations ;
— les transferts d’argent ;
— la curiosité : pour tester et essayer cette nouvelle monnaie.
Pour notre part, nous avons plutôt affaire à une population masculine jeune
d’une moyenne d’âge de 25 ans. Par contre, nous n’avons aucun indicateur
socio-professionnel.
Avez-vous connaissance d’autres lieux comme La Maison du bitcoin, en France ou à l’étranger ?
Oui, il y a MineOnCloud à Toulouse et c’est le seul autre lieu de change
physique en France à ma connaissance. Après, il existe ce que l’on appelle
des ambassades ou des centres bitcoin, comme à New York, Denver, Vancouver, Montréal, Sydney ou encore à Amsterdam. Là encore, ces lieux sont très
peu courants et répandus.
Vous avez récemment participé au mythique SXSW à Austin
(Texas, États-Unis). Qu’en avez-vous retenu ? Quel est l’état
d’avancement des mentalités aux États-Unis sur cette monnaie
par rapport à ce que l’on peut connaître en France ? Quel
accueil a reçu le Ledger Wallet ?
Il faut savoir que le SXSW n’est absolument pas spécialisé dans la
technologie bitcoin. Cependant, j’ai remarqué que les connaissances des
Américains sur les cryptomonnaies sont bien plus larges qu’en France. Le
bitcoin est plus perçu comme une technologie qu’une monnaie et il intéresse
beaucoup de personnes, notamment les investisseurs très présents sur cet
évènement. On était donc au SXSW dans un esprit entrepreneurial, de
découverte, d’expérimentation et d’investissement. En France, très peu de
Le bitcoin - XX
personnes connaissent les enjeux autour du bitcoin ; et quand ils en ont un
petit peu entendu parler, ils finissent par dire que c’est, soit un mode de vie,
soit pour acheter de la drogue. Aux États-Unis, même si ces clichés sont toujours présents, la communauté des start-up est largement plus développée.
Le bitcoin est donc beaucoup plus considéré comme quelque-chose de
sérieux avec de gros potentiels que comme un billet de Monopoly qui ne sert
à rien. Pour Ledger, l’intérêt de notre présence au SXSW était avant tout pour
nouer des relations et rencontrer des investisseurs.
Qu’est-ce que le produit Ledger Wallet apporte et change pour
les utilisateurs de bitcoins ?
Chacun est sa propre banque dans le système bitcoin. C’est-à-dire que,
quand un utilisateur possède de l’argent en bitcoins, il doit aussi s’assurer de
sa sécurité. Au même titre que, si on a des biens dans un coffre-fort ou des
espèces chez soi, on est responsable de leur protection. Sauf que, quand
on possède des bitcoins, ce que l’on a vraiment, ce sont des clés privées.
C’est donc celui qui connaît la clé privée associée à l’adresse publique d’un
compte, qui est propriétaire des bitcoins et qui est capable de réaliser une
transaction pour les dépenser. L’enjeu est donc de protéger au mieux ces clés
privées. Actuellement, le réseau bitcoin transactionnel est sécurisé et fonctionne très bien. Par contre, la sécurité s’arrête au niveau de l’utilisateur final
ou de la société qui gère des bitcoins. On peut lire beaucoup d’histoires sur
internet de personnes qui se font voler, car ils ont mal sécurisé leur clé privée.
Il est, par conséquent, primordial de trouver une solution simple pour mieux
protéger ces clés, pour que le bitcoin puisse un jour espérer se développer
auprès de la population.
Ledger se place au niveau de cette problématique et apporte des sécurités, des solutions matérielles pour protéger ces clés privées. Très concrètement, notre produit se matérialise avec une carte à puce. C’est exactement
la même technologie que celle que l’on retrouve dans les cartes de crédit.
Cette carte à puce va protéger et garder la clé privée, mais elle va aller plus
loin que ça, puisque ce n’est pas comme une clé USB sur laquelle on va écrire
des données. En effet, au moment où on signe une transaction, l’ordinateur
a besoin de connaître la clé privée pour résoudre une équation mathématique. Donc même si elle est cryptée et stockée sur une technologie à part,
on a besoin, à un moment, d’avoir cette clé en clair dans la mémoire pour
XXI - Le bitcoin
faire la signature (c’est à ce moment précis qu’on est vulnérable). La carte à
puce Ledger va donc garder de façon protégée les clés privées dans un environnement impénétrable, mais elle va aussi effectuer la signature à l’intérieur
de ce même environnement sécurisé. Au final, on se retrouve avec une sorte
de petit ordinateur sécurisé sous la forme de carte à puce, qui va effectuer
toutes les primitives critiques de bitcoin et assurer à l’utilisateur une protection
totale contre toute forme de hackage. À partir du moment où une personne
utilise le Ledger Wallet, elle n’a pas à se soucier de la sécurité de son ordinateur. De plus, elle peut l’utiliser dans tous les lieux et toutes les circonstances :
dans un cybercafé, chez un ami, sur un ordinateur dont on ne sait pas s’il est
vraiment bien sécurisé. Cela permet donc d’assurer à sa place la protection
de ses bitcoins que cette personne peut conserver et utiliser en toute tranquillité. Le Ledger Wallet est un produit que l’on vend dans le monde entier
(France, États-Unis, Inde, Australie...) puisque son intérêt est universel et qu’il
est facilement utilisable.
Pourquoi encourageriez-vous des personnes à utiliser le bitcoin ?
Pour sa sécurité ? Son caractère sans-frontière ? Ou... ?
Le bitcoin est une solution à un certain nombre de problèmes ; si on a
besoin de cette solution, c’est qu’on a des problèmes. Cependant, pour répondre à cette question, tout dépend à qui on s’adresse. Pour le Français
moyen et la plupart des personnes, le bitcoin n’a absolument aucun intérêt parce qu’aujourd’hui, les cartes de crédit fonctionnent bien, les banques
remplissent leur rôle correctement, les frais de transactions sont relativement
faibles. En somme, il n’y a pas de problème majeur. C’est pourquoi nous ne
faisons aucun prosélytisme en particulier pour le bitcoin en France. La seule
tranche de personnes qui peut être intéressée et à qui nous conseillons de se
renseigner, c’est tout simplement les personnes qui veulent diversifier leur portefeuille (au même titre qu’on peut vouloir mettre 1 % de ce que l’on possède
dans l’or). Ensuite, il faut prendre du recul et s’intéresser à d’autres types de
population. D’une manière générale, dans le monde, il y a trois milliards de
personnes qui n’ont pas accès à une banque ou à un système de paiement.
Je pense que les technologies comme bitcoin peuvent avoir un impact majeur pour ce type de population. À partir du moment où on a un smartphone
et un accès internet (ce qui va être de plus en plus le cas avec Facebook qui
est en train de relier la planète avec ses drones), on peut ouvrir un compte
Le bitcoin - XXII
bitcoin et ainsi se connecter à l’économie mondiale. C’est pour cela que les
enjeux de l’usage du bitcoin à l’avenir, sont largement plus orientés sur les
personnes qui ont des difficultés à accéder à l’économie mondiale que pour
les sociétés d’Europe occidentale ou d’Amérique, où a priori tout fonctionne
plutôt bien.
Par ailleurs, si on réfléchit sur des aspects transactionnels, le bitcoin est très
intéressant quand on fait du business à l’international. Cela permet en effet
d’envoyer des valeurs d’un point à un autre de la planète de manière très
efficace et à un coût très faible. Par exemple, certaines entreprises qui ont
des traducteurs dans beaucoup de pays, utilisent le système bitcoin pour les
payer (car cela coûte extrêmement cher avec des solutions comme Paypal).
Je pense qu’à terme, il y a peu de chance pour que les Français utilisent le
bitcoin, parce que cela ne leur apporte rien. Il sera très certainement réservé
à une catégorie de la population qui a besoin d’envoyer des fonds à l’étranger ou de faire des choses un petit peu plus complexes qui ne seraient pas
permises par l’euro. Cependant, je pense que le bitcoin a surtout un intérêt
technologique, mais en dehors de cela, il n’aura pas forcément un impact
pour les Français dans les mois qui vont venir.
De nombreuses personnes considèrent que le minage est le principal problème du bitcoin. Qu’en pensez-vous ? Existe-t-il des
pistes d’améliorations prometteuses à ce jour ?
Il suffit de comparer l’empreinte carbone du bitcoin avec l’empreinte
carbone du réseau financier actuel. Aujourd’hui, il y a des personnes qui
disent que le bitcoin utilise trop d’électricité, que la puissance des machines
consacrées à ce système ne sert à rien et que par conséquent c’est un désastre écologique. Je pense que ces personnes n’ont absolument aucune
idée de ce que représente le coût énergétique du système informatique global dans le secteur bancaire. Le système bitcoin est largement plus performant puisqu’il a retiré un nombre important de couches d’abstraction et énormément d’intermédiaires. L’empreinte énergétique globale du bitcoin est largement inférieure à 1 % de l’empreinte carbone du système bancaire global. Psychologiquement, on peut penser que le bitcoin ne sert à rien parce
qu’on ne le voit pas et qu’il y a beaucoup de calculs qui sont effectués. Mais
ces mêmes personnes font totalement abstraction que lorsqu’ils mettent leur
carte de crédit dans un terminal de paiement, il se passe tellement de choses
XXIII - Le bitcoin
que l’empreinte carbone est largement supérieure à celle du bitcoin. Pour
moi, c‘est donc un faux problème.
La puissance de calcul est une ressource que les scientifiques
convoitent. À côté de cela, le système bitcoin représente une
énorme puissance qui n’est pas exploitée...
Je ne suis pas d’accord, cette puissance de calcul est exploitée et elle
sert à assurer la sécurité du réseau bitcoin. Sans cette puissance de calcul,
le système bitcoin ne pourrait pas apporter les garanties suffisantes à son bon
fonctionnement. C’est justement parce qu’il a cette sécurité que le système a
un potentiel à venir qui est plutôt intéressant. C’est d’ailleurs une des caractéristiques qui fait la valeur du bitcoin. Bien sûr, ce n’est pas directement associé,
parce que la sécurité ne va pas doubler la valeur du bitcoin. Mais par contre,
l’ensemble des sécurités générées font qu’aujourd’hui, le système bitcoin est
considéré comme une des bases de données les plus sûres au monde. Si on
retire cela au réseau bitcoin, on retire tout l’intérêt que peut représenter la
blockchain. La puissance de calcul a donc un usage très clair. Certes, elle
ne sert à rien d’autre, mais sur le périmètre du bitcoin, c’est une ressource
essentielle à la réussite de cette technologie.
Le bitcoin - XXIV
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Le bitcoin - XXX
Table des figures
1.1 Opposition entre réseau décentralisé et réseau centralisé . . . . . 6
1.2 Carte répertoriant le nombre de commerces acceptant le bitcoin comme moyen de paiement au 16/12/2014. Source : coinmap.org. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
1.3 Carte du monde présentant la popularité par pays du mot-clef
« bitcoin » dans les recherches Google au 27/11/2014. Source :
Google Trends. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
2.1 Logo indiquant qu’un site internet ou un magasin accepte les
bitcoins. Source : bitcoin.it. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.2 Cours du bitcoin (en dollars US) du 30/11/2012 au 30/11/2014.
Source : Mt.Gox. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.3 Comparaison des différents coûts d’un virement effectué à
l’étranger. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.4 Site internet vendant de la drogue et des armes contre des bitcoins. Source : afp.com . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. 18
. 19
. 20
. 29
3.1 Évolution du nombre de transactions effectuées chaque
jour en bitcoins, de janvier 2009 à décembre 2014. Source :
blockchain.info . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
XXXI - Le bitcoin
Le bitcoin est une monnaie entièrement numérique créée en 2009 par un développeur ayant comme pseudonyme Satoshi NAKAMOTO. Sa valeur était de 300
euros en décembre 2014. Ce système monétaire est entièrement nouveau et ne
ressemble en rien à notre système de monnaie fiduciaire. Le bitcoin a la particularité d’être entièrement décentralisé : aucune banque centrale n’a la charge de
sa création ou de son maintien. Comment est-il possible qu’une simple chaîne de
bits ait de la valeur ? Quel est l’accueil réservé à cette monnaie par les particuliers,
les entreprises et les gouvernements ? Ce système est déjà utilisé partout à travers
le monde, son potentiel semble sans fin. Il est alors naturel de se demander quelles
sont les forces et les faiblesses du bitcoin et si ce modèle économique est viable
sur le long terme ou si au contraire il s’agit d’un simple effet de mode. Notre étude
se place dans un tel contexte. Nous essayons avant tout de comprendre les différences existantes entre le bitcoin et les monnaies fiduciaires, afin d’en déterminer la
pérennité.
Mots-clés : bitcoin, monnaie, réseau décentralisé, économie, technologie, fiscalité, intégration, innovation
Bitcoin is a new entirely online currency created in 2009 by -aka- developer Satoshi
NAKAMOTO. A bitcoin was worth 300 euro back in December, 2014. This brand new
monetary system is completely different from the fiat money we’re used to. Bitcoin
has the peculiarity of being completely decentralized : there is no entity such as a
central bank which is in charge of its manufacture or preservation. How is it possible
for a simple bit string to have some value ? How did individuals, companies and
governments react to Bitcoin ? This system is already being used worldwide and its
potential seems endless. Though, it’s only natural to wonder about the strengths and
weaknesses of the bitcoin and whether this economic model is viable in the long
term or whether it’s a simple fad. That’s what our study will focus on. And we will
mainly try to understand the most noticeable differences between Bitcoin and fiat
currencies, so as to determine whether it is sustainable.
Keywords : bitcoin, currency, decentralized network, economy, technology, tax
system, integration, innovation

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