Accès à l`avortement à Paris : enquête 2014

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Accès à l`avortement à Paris : enquête 2014
Accès à l’avortement à Paris : enquête 2014
Un des objectifs du Planning Familial est d’ « écouter et orienter pour une demande d’IVG dans le
respect des personnes et de leur choix sans pression ni culpabilisation, veiller à l’application des lois, à
l’accès et aux conditions dans lesquelles sont pratiquées les interventions et favoriser une meilleure
prise en charge ».
Il apparaît que la loi a évolué mais que les moyens matériels et humains alloués spécifiquement pour
l’appliquer n’ont pas été à la hauteur.
Avant 1975, l’avortement était considéré comme un crime, un délit. A partir de 1975, l’avortement
est encadré par l’hôpital. En 1979, tous les hôpitaux doivent pratiquer des IVG.
Avec la loi Aubry de 2001, les conditions et les modalités de l’intervention ont connu des
modifications : délai d’accès à l’IVG allongé, accès facilité pour les mineurs, suppression de
l’entretien psychosocial pour les majeurs, entre autres. Par ailleurs, la pratique de l’IVG dans les
établissements de santé peut être mise à mal si le chef de service fait valoir sa clause de conscience :
quid de l’application de ce droit fondamental par le service public.
En 2012, une loi est votée en faveur de la prise en charge intégrale des IVG par l’assurance maladie,
même pour les personnes en AME ou CMU / CMU-C. Toutefois, ce n’est qu’un forfait qui exclut les
frais de consultation et d’examens pré-intervention.
La situation actuelle fait émerger un certain nombre de constats, plus ou moins alarmants.
Il y a un manque de médecins, de ville notamment, une offre de places en établissements de santé
habilités à faire l’IVG bien inférieure à la demande. La loi HPST (Hôpital, patient, santé, territoires) de
2009 a aggravé les inégalités d’accès aux soins entre territoires et a ancré les établissements de santé
à avoir une logique de rentabilité proche de la gestion d’entreprise pure, ce qui a eu un impact fort
sur la pratique de l’IVG. On constate la fermeture de plus de 130 établissements pratiquant l’IVG en
France pendant ces dix dernières années. Par conséquent, de nombreuses femmes n’ayant pas à
proximité de leur domicile un établissement de santé pratiquant l’ivg sont dans la contrainte de venir
sur Paris pour réaliser l’intervention.
L’IVG est souvent perçu comme un échec des femmes à maîtriser leur contraception, dans un
contexte de stigmatisation et de culpabilisation de celles-ci.
Au regard des difficultés d’accès à l’IVG (y compris le délai de pratique de l’IVG en France = 14
semaines d’aménorrhées maximum), les femmes ont tendance à avorter dans des pays étrangers
comme les Pays-Bas, l’Espagne, le Royaume-Uni.
Un certain nombre de dénonciations en est la cause : accueil déplorable, confidentialité non
respectée, prise en charge partielle et non intégrale comme c’est prévu, délai considérable de prise
de rendez-vous pour l’IVG, la moitié des visites de contrôle ne sont pas réalisées, autorité parentale
obligatoire dans certaines établissements de santé alors que ce ne devrait plus être le cas. D’une
manière générale, il n’y a pas de sanctions effectives en cas de non-respect du cadre légal.
Quelques chiffres :
40% des femmes vivant en France ont recours à l’IVG au moins une fois au cours de leur vie
80% des IVG sont faits dans le secteur public
13 hôpitaux publics à Paris pratiquaient l’IVG en 1999 tandis qu’ils ne sont plus que 9 en 2014
En Ile-de-France, le nombre d’IVG a augmenté de 24%
Planning Familial 75
14 avril 2015
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200 000 avortements en France / an = chiffre stable depuis des années
41% des IVG en Ile-de-France sont faits à Paris ou en Seine-Saint-Denis
Objectifs de l’enquête du Planning Familial 75 :
Accessibilité technique des services
Prise en charge des femmes qui sont entre 12 et 14 semaines d’aménorrhées
Prise en charge des femmes n’ayant pas de couverture sociale
Choix de méthode d’IVG et d’anesthésie
Cette enquête sur les conditions d’accès à l’avortement à Paris est le fruit d’un échange avec le
Planning Familial du 93 qui réalise une étude bi-annuelle sur les conditions d’accès à l’avortement.
Elle vise à mieux orienter les femmes vers des structures bienveillantes, observer les
dysfonctionnements pour les identifier et alerter les pouvoirs publics afin de les résoudre et d’être
force de proposition pour palier à ces dysfonctionnements.
Méthodologie utilisée :
L’enquête téléphonique portait sur tous les hôpitaux publics pratiquant des IVG de Paris et sur un
institut mutualiste, soit un hôpital privé à but non lucratif qui participe au service public hospitalier.
Le Planning Familial s’est présenté en son nom propre ou s’est présenté pour une femme demandant
un IVG qui se déclinait en deux sous profils avec des noms à consonance étrangère ou pas, un âge
plus ou moins avancé, un nombre de mois de grossesse plus ou moins important.
Il en résulte les constats suivants :
sur 20 demandes de rendez-vous, seuls 43% des appels aboutiront à un rendez-vous, 47 %
n’aboutiront pas à un rendez-vous.
certains actes nécessaires à la réalisation d’une IVG (comme les antidouleurs prescrits par
exemple) ne font pas partie du forfait 100% énoncé par la loi 2013 d’où une attente des
décrets d’application de la loi 2015 (janvier) portée par la ministre Mme Marisol Touraine
pour les non-assurées sociales, la prise en charge n’est pas automatique parce qu’il y a un
flou des dispositifs et des décrets d’application des différentes lois
les femmes ne peuvent pas « choisir » leur méthode d’avortement et d’anesthésie car elles
sont soumises aux contraintes imposées par le fonctionnement des établissements.
il y a peu de places à l’hôpital pour des IVG médicamenteuses.
Pour dénoncer cet état de fait, le Planning Familial a créé un site internet spécifique à l’IVG. C’est un
outil politique qui a pour but principal de contrer les anti-IVG.
Il demande une harmonisation au niveau européen des procédures/délais encadrant l’intervention
de l’IVG ainsi qu’une meilleure prise en compte de l’impact psychologique sur la femme.
Le planning Familial a créé un espace web visant à recenser les dysfonctionnements d’accès à l’IVG :
toute personne peut se saisir de cet outil pour interpeller.
http://ivg.planning-familial.org/
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