1° dimanche de carême, 21 février 2010 Tentations de Jésus au

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1° dimanche de carême, 21 février 2010 Tentations de Jésus au
CATECHESE BIBLIQUE SYMBOLIQUE
29 janvier 2010
1° dimanche de carême, 21 février 2010
Tentations de Jésus au désert
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 4, 1-13
Après son baptême, Jésus, rempli de l'Esprit Saint,
quitta les bords du Jourdain ;
il fut conduit par l'Esprit à travers le désert où, pendant
quarante jours, il fut mis à l'épreuve par le démon.
Il ne mangea rien durant ces jours-là et, quand ce temps
fut écoulé, il eut faim.
Le démon lui dit alors : « Si tu es le Fils de Dieu,
ordonne à cette pierre de devenir du pain. »
Jésus répondit : « Il est écrit : Ce n'est pas seulement de
pain que l'homme doit vivre.
Le démon l'emmena alors plus haut, et lui fit voir d'un
seul regard tous les royaumes de la terre.
Il lui dit : « Je te donnerai tout ce pouvoir, et la gloire de
ces royaumes, car cela m'appartient et je le donne à qui
je veux. Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu
auras tout cela. »
Jésus lui répondit : « II est écrit : Tu te prosterneras
devant le Seigneur ton Dieu, et c'est lui seul que tu
adoreras. »
Puis le démon le conduisit à Jérusalem, il le plaça au
sommet du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu,
jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi à
ses anges l'ordre de te garder; et encore : Ils te
porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne
heurte une pierre. »
Jésus répondit : « Il est dit : Tu ne mettras pas à
l'épreuve le Seigneur ton Dieu. »
Ayant épuisé toutes les formes de tentation, le démon
s'éloigna de Jésus jusqu'au moment fixé.
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Lecture du livre du Deutéronome 26, 4-10
Moïse disait au peuple d'Israël : « Lorsque tu présenteras les prémices de tes récoltes, le
prêtre recevra de tes mains la corbeille et la déposera devant l'autel du Seigneur ton
Dieu. Tu prononceras ces paroles devant le Seigneur ton Dieu :
"
Mon père était un Araméen vagabond, qui descendit en Égypte :
il y vécut en immigré avec son petit clan. C'est là qu'il est devenu une grande nation,
puissante et nombreuse. Les Égyptiens nous ont maltraités, et réduits à la pauvreté ; ils
nous ont imposé un dur esclavage.
Nous avons crié vers le Seigneur, le Dieu de nos pères.
Il a entendu notre voix, il a vu que nous étions pauvres, malheureux, opprimés.
Le Seigneur nous a fait sortir d'Égypte par la force de sa main et la vigueur de son bras,
par des actions terrifiantes, des signes et des prodiges.
Il nous a conduits dans ce lieu et nous a donné ce pays, un pays ruisselant de lait et de
miel.
Et voici maintenant que j'apporte les prémices des produits du sol."
Psaume 90
Quand je me tiens sous l'abri du Très-Haut
et repose à l'ombre du Puissant,
je dis au Seigneur : "Mon refuge,
mon rempart, mon Dieu, dont je suis sûr !"
Ils te porteront sur leurs mains
pour que ton pied ne heurte les pierres;
tu marcheras sur la vipère et le scorpion,
tu écraseras le lion et le Dragon.
Le malheur ne pourra te toucher,
ni le danger, approcher de ta demeure :
il donne mission à ses anges
de te garder sur tous tes chemins.
Puisqu'il s'attache à moi, je le délivre;
je le défends, car il connaît mon nom.
II m'appelle, et moi, je lui réponds;
je suis avec lui dans son épreuve.
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 10, 8-13
Frères, nous lisons dans l'Écriture : La Parole est près de toi, elle est dans ta bouche et
dans ton cœur. Cette Parole, c'est le message de la foi que nous proclamons. Donc, si tu
affirmes de ta bouche que Jésus est Seigneur, si tu crois dans ton cœur que Dieu l'a
ressuscité d'entre les morts, alors tu seras sauvé. Celui qui croit du fond de son cœur
devient juste. Celui qui, de sa bouche, affirme sa foi parvient au salut. En effet,
l'Écriture dit : Lors du jugement, aucun de ceux qui croient en lui n'aura à le regretter.
Ainsi, entre les Juifs et les païens, il n'y a pas de différence : tous ont le même
Seigneur, généreux envers tous ceux qui l'invoquent. Il est écrit en effet : Tous ceux qui
invoqueront le nom du Seigneur seront sauvés.
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TEXTES DES PERES : ORIGÈNE (III° siècle)1
PREMIÈRE TENTATION (Homélie 29)
Pendant quarante jours, Jésus est tenté. De quelles tentations s'agit-il ? Nous l'ignorons. Peut-être ontelles été passées sous silence parce que trop fortes pour être confiées à l'Écriture. De même que le
monde n'aurait pas pu contenir tous les livres (Jn 21,25) qu'il aurait fallu écrire pour mentionner les
enseignements et les actions de Jésus, ainsi les tentations de quarante jours que le Seigneur eut à subir
de la part du diable, le monde n'aurait pas eu la force de les supporter, si l'Écriture nous les avait
apprises. Il nous suffit de savoir qu'il fut dans le désert pendant quarante jours, qu'il y était tenté par
le diable et ne mangea rien durant ces jours-là, car il mortifiait le désir de la chair par un jeûne assidu
et continuel.
3. Et quand ces jours furent achevés, il eut faim. Le diable lui dit : si tu es fils de Dieu, dis à cette
pierre de se changer en pain.
Dis à cette pierre, mais à quelle pierre ? Sans doute à celle que montrait le diable, à celle qu'il veut
voir se changer en pain. Quelle est donc cette tentation ? Un père à qui son fils demande du pain ne va
pas lui donner une pierre (Lc 11,11) et voici que le diable, en adversaire sournois et trompeur, donne
une pierre au lieu de pain ? Est-ce là tout ce que le diable voulait, que la pierre devienne pain et que les
hommes se nourrissent, non de pain mais de la pierre que le diable leur avait montrée en guise de
pain ?
Pour ma part, je pense qu'aujourd'hui encore, le diable montre une pierre et incite chacun à prononcer
la parole : Ordonne à cette pierre de se changer en pain. Toutes les tentations que les hommes
devaient subir, le Seigneur les a subies le premier dans la chair qu'il a assumée. Mais, s'il est tenté, c'est
pour que, nous aussi, nous puissions vaincre par sa victoire.
[...] Il faut veiller avec soin : qu'il ne nous arrive pas de manger la pierre du diable en croyant nous
nourrir du pain de Dieu. D'ailleurs où serait la tentation dans le cas d'une pierre changée en pain, qui
aurait été mangée par le Sauveur ? Imaginons que, sur la proposition du diable, le Seigneur, après avoir
changé la pierre en pain, ait mangé ce qu'il aurait réalisé par sa propre puissance et ainsi apaisé sa
faim ? Où aurait été la tentation, où aurait été la victoire sur le diable si tout cela n'avait pas un autre
sens, un sens spirituel2 ? 5. Or, comme nous l'avons dit, un examen approfondi des faits montre à la
fois la réalité de la tentation (vécue par Jésus) et une hypothétique victoire du diable, mais dont on ne
parle pas3.
La Parole de Dieu fait ressusciter
Il nous est montré aussi que ce pain fait d'une pierre n'est pas la Parole de Dieu qui nourrit l'homme et
dont il est écrit : L'homme ne vivra pas seulement de pain, toute parole qui sortira de la bouche de
Dieu fera vivre l'homme (Dt 8,3).
"Je te réponds, être sournois et méchant qui ne crains pas de me tenter : il existe un autre pain, celui de
la Parole de Dieu, un Pain qui fait vivre l'homme !"
Remarquons aussi que ce n'est pas le Fils de Dieu qui parle mais l'humanité que le Fils de Dieu a
daigné assumer. C'est en tant qu'homme que Jésus répond quand il dit : II est écrit : L'homme ne vit
pas seulement de pain. Ceci montre clairement que ce n'est pas Dieu mais l'homme qui fut tenté4.
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2
3
4
SC N° 87, Homélie XXIX
Au premier degré, le récit évangélique n'apporte aucune richesse, aucune nouveauté.
Origène ne s'arrête pas à la simple victoire sur la tentation (texte pris au premier degré), il incite les baptisés
à aller plus loin qu'un simple moralisme, et à s'interroger sur la puissance divine du Verbe de Dieu.
Le Créateur d'où tout vient ne peut être tenté, mais la créature doit exercer sa liberté pour grandir en Dieu.
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6. En scrutant avec soin le sens de l'Écriture, je découvre la raison pour laquelle Jean n'a pas raconté la
tentation du Sauveur, que les autres évangélistes racontent. Jean, dans son prologue, est parti de Dieu :
Dans le Principe (divin), était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu et le Verbe était Dieu (Jn 1,1).
Aussi, faute de pouvoir retracer la manière dont s'est accomplie la génération divine, il s'était borné à
affirmer que le Verbe était de Dieu et qu'il était avec Dieu, Jean a ajouté : Et le Verbe s'est fait chair.
C'est parce que Dieu dont il devait parler ne peut pas être tenté, qu'il ne l'a pas montré aux prises avec
le diable. [...]
Par conséquent, si le Fils de Dieu - vraiment Dieu - s'est fait homme et a été tenté pour vous, vous qui
êtes hommes par nature, ne vous indignez pas si par hasard survient la tentation5. En revanche, si dans
la tentation vous imitez l'homme qui, pour vous, a été tenté et si vous surmontez l'épreuve, vous aurez
part à l'espérance de Celui qui, homme alors, a désormais quitté notre condition humaine.
Car celui qui, jadis, était homme, après avoir été tenté et avoir vu le diable s'éloigner de lui jusqu'au
temps (Lc 4,13) de sa mort, est ressuscité d'entre les morts et désormais ne meurt plus (Rm 6,9). Or
tout homme est assujetti à la mort ; par conséquent, Lui, qui ne meurt plus, n'est plus homme mais bien
Dieu. Et s'il est Dieu, lui qui fut jadis homme, et si vous devez lui devenir semblables puisque nous
lui serons semblables et nous le verrons tel qu'il est (Jn 3,2), il vous faudra, vous aussi, devenir divins
dans le Christ Jésus à qui appartiennent la gloire et la puissance dans les siècles des siècles, amen (1 P
4,11).
SECONDE TENTATION (Homélie 30)
Il ne faut pas croire qu'en lui montrant les royaumes du monde, le diable ait fait voir à Jésus le
royaume de Perse, ou celui des Indes... Non, il lui montra tous les royaumes du monde, ce qui signifie :
il montra son empire, sa façon de dominer le monde, pour l'engager à exécuter sa volonté et
commencer par là à s'assujettir le Christ.
Veux-tu, lui dit-il, régner sur tous ces êtres ? Et il lui montre les masses innombrables d'hommes qu'il
tenait en son pouvoir. Et à vrai dire, si nous consentons à reconnaître en toute simplicité notre misère et
notre infortune, le diable est roi de presque tout l'univers ; aussi le Seigneur l'appelle-t-il d'ordinaire "le
prince de ce monde" (Jn 12,31;16,11...) Et quand le diable dit à Jésus : "Vois-tu ces hommes soumis à
mon pouvoir", il les lui montre en un instant. Le cours du temps n'est qu'un instant en comparaison de
l'éternité.
3. Le Sauveur n'avait pas besoin qu'on lui montrât plus longuement les affaires de ce monde ; à peine
a-t-il posé son regard sur ce spectacle qu'il voit le règne du péché, il voit tous ceux qui sont esclaves de
leurs vices, il voit le prince de ce monde lui-même, le diable qui s'enorgueillit et se réjouit pour sa
propre perte, d'avoir tant de monde sous son empire. Alors ce diable dit au Seigneur : "Est-ce pour
lutter contre moi que tu es venu et pour arracher à mon pouvoir tous ceux que j'ai maintenant pour
sujets ? Non, n'essaie pas de te mesurer à moi. Non, ne te donne pas ce mal, ne va pas t'exposer aux
difficultés du combat. C'est tout ce que je te demande : prosterne-toi à mes pieds, adore-moi, et tout
mon royaume m'appartiendra."
Notre Seigneur et Sauveur veut bien être roi et s'assujettir toutes les nations pour qu'elles servent la
justice, la vérité et toutes les autres vertus, mais il veut régner en tant que Justice pour régner sans
péché et ne rien faire de mal ; il ne consent pas à être assujetti au diable, à être couronné sans peine ni à
régner sur les autres en subissant lui-même la loi de ce diable.
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La tentation est bonne puisqu'elle permet l'exercice de la liberté, donc la croissance en Dieu.
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4. C'est pourquoi il lui réplique : Il est écrit : tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu ne serviras que lui.
(Dt 6,13). Aussi ma volonté est que tous ces hommes deviennent mes sujets pour qu'ils adorent le
Seigneur et ne servent que Lui. Tel est le désir de mon règne. Et toi, tu voudrais que par Moi
commence le péché que je suis venu détruire et dont je veux délivrer tous les hommes ? Apprends et
sache que je m'en tiens à ce que j'ai dit, que le Seigneur Dieu, lui seul, soit adoré et que tous ces
hommes soient soumis à ma puissance dans mon royaume.
Quant à nous, réjouissons-nous d'être ses sujets et prions Dieu qu'il fasse mourir le péché qui règne
dans notre corps (Rm 6,12), afin que seul règne en nous le Christ Jésus, à qui appartiennent la gloire
et la puissance dans les siècles des siècles. Amen.
TROISIÈME TENTATION (Homélie 31).
1. Scrutez 1'Écriture de façon a découvrir, même dans les passages en apparence les plus simples, des
mystères qui ne manquent pas de grandeur. Examinons le début du texte de l'Évangile que nous avons
entendu aujourd'hui et mettons en lumière son contenu caché.
Le diable conduisit Jésus à Jérusalem. C'est incroyable : voici le diable conduit le Fils de Dieu et
celui-ci marche à sa suite. Jésus le suivait, semblable à l'athlète qui se rend de lui-même à l'épreuve. Il
ne craignait pas le tentateur, ni les pièges d'un ennemi très rusé et il devait s'exprimer à peu près en ces
termes : « Conduis-moi où tu veux, tente-moi selon ton bon plaisir. Je m'offre spontanément à la
tentation. Je supporte tes suggestions. Je me livre à toutes sortes de tentations possibles : en toutes, tu
me trouveras le plus fort. »
2. II le conduisit donc à Jérusalem, le plaça sur le pinacle du temple et lui dit : Si tu es le Fils de Dieu,
jette-toi en bas. II le conduisit sur le faîte, au sommet du temple et il l'exhorte à se précipiter de là-haut.
Mais cette proposition était hypocrite et, sous prétexte de révéler la gloire du Christ, elle visait un autre
but ; aussi le Sauveur a répondu : Il est écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu (Dt 6,16).
Considérez aussi la façon dont le diable tente le Christ. Il n'ose le faire qu'en invoquant le témoignage
des livres saints et des psaumes : Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : II a donné
pour vous des ordres à ses anges, ils vous porteront sur leurs mains, de peur que votre pied ne heurte
contre une pierre (Ps 91,11-12).
Comment sais-tu, ô diable, que ces mots sont dans l'Écriture ? As-tu lu les Prophètes ou connais-tu la
Parole de Dieu ? Tu peux bien te taire, je répondrai pour toi. Tu as lu les livres saints, non pour devenir
toi-même meilleur, mais pour tuer au moyen de la simple lettre, les amis de la lettre. Tu sais que si tu
veux parler au Christ d'autres ouvrages, tu ne le tromperas pas et que tes assertions ne pourront avoir
aucune autorité6. [... Origène décrit ensuite l'exégèse des gnostiques].
L'exégèse du diable
Voyons le passage de l'Écriture que le diable propose au Seigneur : I1 a donné pour vous des ordres à
ses anges ; ils vous porteront sur leurs mains de peur que votre pied ne heurte contre une pierre.
Comme il est sournois ce diable dans le choix des témoignages. Il diminue la gloire du Sauveur,
comme si Jésus avait besoin du secours des anges, comme s'il allait faire un faux pas faute du soutien
de leurs mains. Le diable allègue un témoignage de l'Écriture en l'appliquant au Christ, mais ce verset
ne concerne pas le Christ mais nous tous, les saints.
6
Des chrétiens, qui n'avaient pas été bien initiés à la lectio divina qui médite la Parole de Dieu au-delà de la
lettre, au-delà du sens littéral du récit, idolâtraient le texte saint sans l'intelligence de la foi qu'éclaire l'Esprit
du Père. Leur exégèse sans verticalité, les faisaient ramper sur la terre comme le Serpent de la Genèse.
L'exégèse littérale est sectaire et diabolique.
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En toute liberté, j'affirme avec force, contrairement au diable, que ces paroles ne peuvent pas
s'entendre de la personne du Christ. Car il n'a pas besoin du secours des anges, Lui qui est plus grand
qu'eux et possède en héritage un nom bien supérieur au leur. Dieu n'a dit à aucun ange : Tu es mon
Fils, je t'ai engendré aujourd'hui (Ps 2,7, Hé 1,5-7). À aucun d'entre eux, Dieu ne s'est adressé comme
un père à un fils. Et quand il a dit : II a fait de ses anges des souffles et de ses serviteurs, un feu brûlant
(Ps 104,4), il s'adresse à son propre Fils dont il parle souvent dans les prophètes.
5. Le Fils de Dieu, dis-je, n'a pas besoin du secours des anges. Sache plutôt, ô diable, que les anges
font des faux pas si Jésus ne les aide pas. On vient de lire : Nous jugerons les anges (1 Cor 6,3)7. Le
diable a trébuché parce qu'il n'a pas tendu la main à Jésus, afin que, saisi par lui, il ne bronchât pas. Si
on se fie à ses propres vertus, sans invoquer l'assistance de Jésus, on trébuche et on tombe. Et toi,
diable, si tu es tombé comme la foudre du ciel (Lc 10,18), c'est que tu n'as pas voulu croire en JésusChrist, Fils de Dieu8.
Mais pour que tu reconnaisses ton erreur d'interprétation, fais attention que la suite aussi doit
également s'entendre non pas du Christ mais des saints. Ce n'est pas le Christ mais les saints que Dieu
délivre de la ruine et du démon de midi (Ps 91,6). Lis le psaume 91 dont voici le début : Celui qui se
tient sous l'aide du Très-Haut, demeurera sous la protection du Tout-Puissant. Ce passage concerne le
juste plutôt que le Fils de Dieu : Mille tomberont à ton côté et dix mille à ta droite, mais, toi, tu restes
hors d'atteinte. Il suffit que tes yeux regardent et tu verras le salaire des pécheurs (Ps 91,7 et suivants).
Ce verset concerne aussi la personne du juste.
6. Mais le diable, qui utilise avec une intention perverse des témoignages bibliques pour affirmer du
Sauveur ce qui est dit des justes, passe sous silence la suite du psaume qui l'incrimine. De fait, après
avoir dit : II a donné pour vous des ordres à ses anges ; ils vous porteront sur leurs mains, de peur que
votre pied ne heurte contre une pierre », il tait la suite : Sur l'aspic et le basilic tu marcheras, tu
fouleras le lion et le dragon.
"Pourquoi, ô diable, gardes-tu le silence sinon parce que tu es « le
basilic », ce petit roi de tous les serpents, armé de venin plus nocif que
tous les autres, puisque tu causes instantanément la mort de celui que
tu regardes9. Tu sais bien qu'il existe à tes côtés une autre force qui se
nomme l'aspic et qui est soumise au juste. Tu ne dis rien de tout cela !
[...]
Si donc le pécheur foule aux pieds le Fils de Dieu, à l'inverse, le juste piétine le lion et le dragon et
toute la puissance de l'ennemi (1 P 4,11) au nom de Jésus-Christ à qui appartiennent la gloire et la
puissance dans les siècles des siècles. Amen.
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L'épitre qui était lue avant l'évangile était sans doute ce passage de la première épitre aux corinthiens.
Ce qui est ici en cause est l'esprit diabolique de l'homme qui se pense "auto-suffisant", qui refuse l'Alliance.
Pour l'antiquité, la basilic, ce coq à queue de serpent est immortel, son regard assassin et son souffle
nauséabond tuent ses proies.
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ORIGÈNE
Né vers 185 à Alexandrie, mort à Tyr en 253. Issu d'une famille nombreuse et chrétienne, le
jeune Origène souhaitait suivre son père dans son martyre pour le Christ en 202. Après de
fortes études profanes et scripturaires, il doit subvenir aux besoins de sa famille en donnant
des leçons. Il n'a que dix-huit ans quand l'évêque Démétrios lui confie la direction de la
célèbre école catéchétique qu'il dirigera jusqu'en 231, tout en se livrant à une ascèse
rigoureuse. Il interrompt son enseignement par plusieurs voyages pour s'instruire lui-même
ou pour instruire les autres, spécialement en Palestine où les évêques de Jérusalem et de
Césarée l'ordonnent prêtre pour le soustraire aux vexations jalouses de son évêque. C'est
au contraire pour Démétrios l'occasion de convoquer un synode qui excommunie Origène en
231. Celui-ci se retire alors à Césarée de Palestine dont l'évêque lui demande de fonder une
nouvelle école ; il y reprend l'œuvre commencée à Alexandrie. Affreusement torturé pendant
la persécution de Dèce en 250-253, il meurt à l'âge de soixante-dix ans, la santé ruinée par ;
ces épreuves. Personnalité éminente, caractère d'une noblesse incomparable, Origène
compte parmi les penseurs les plus originaux et les plus grands spirituels de tous les temps.
Précurseur en exégèse et en théologie, il soutint parfois sur des questions non encore
définies des opinions hasardeuses, qui furent à l'origine des « controverses origéniennes »
postérieures. Celles-ci entraînèrent malheureusement la disparition de la majeure partie de
sa prodigieuse œuvre littéraire, consacrée avant tout à la compréhension de l'Ecriture.
Malgré ces avatars, celui qui n'avait jamais voulu être qu'un « authentique homme d'Eglise »
eut, au cours des âges, aussi bien en Orient qu'en Occident, une influence capitale.
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Que fut notre réunion EPHETA du 29 janvier 2010 ?
A la demande de plusieurs participants, et pour ceux qui n'ont pu être avec nous, voici un
compte rendu rapide de ce que fut notre journée.
LE MATIN AVEC JACQUELINE
Il y eut des nouveaux venant de l'étranger, et pour les accueillir Jacqueline a demandé ce
que l'un ou l'autre pouvait répondre à la question : qu'est-ce que la catéchèse biblique
symbolique ? Voici quelques réponses données dans cet ordre :
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Une catéchèse qui tient compte du développement psychologique de l'enfant.
Mieux comprendre et mieux transmettre la Parole de Dieu
Donner la Parole de Dieu comme un écho intérieur.
Cette façon de faire m'a enfin permis de comprendre quelque chose à la religion.
Comprendre comment la Parole de Dieu, que je lis dans la Bible, prend corps en moi
et dans ma vie.
Unir en moi le visible à l'invisible.
Me faire faire un chemin avec Dieu et en Dieu.
Donner l'expérience d'une Parole qui s'adresse à chacun de nous personnellement.
Rendre la Parole de Dieu vivante en la racontant pour qu'elle entre dans les cœurs et
transforme la vie.
Apprendre à parler avec la Bible et faire parler la Bible.
Approcher la Parole de Dieu en respectant les 4 niveaux de lecture pratiqués par les
Pères de l'Église.
La mémorisation de la Parole qui résonne d'un Testament à l'autre, selon les quatre
apprentissages (médiévaux) : Mémoire biblique, parole biblique et prière biblique,
pratique qui reprend d'une certaine façon le PARDES juif.
Et Jacqueline de souligner combien ces trois apprentissages successifs caractérisent notre
pratique catéchétique héritée de la tradition pédagogique et théologique de l'Église.
La mémoire biblique est fondatrice de la maison chrétienne, elle sera notre première
préoccupation de la journée.
Le partage de la parole biblique (de la Parole), constitutive à la fois de l'humain et du divin,
est indispensable à développer en notre catéchèse.
Ce qui conduit à la prière biblique, véritable action de grâce qui jaillit du partage
communautaire.
VISÉE du jour : La mémoire biblique s'apprend au premier niveau de parole, niveau
anecdotique du récit biblique, qui peut être difficile à acquérir surtout pour des chrétiens
cultivés (qui savent tout d'avance).
Le récit que nous avons étudié est la narration que fait Luc des Tentations de Jésus au
désert (Lc 4,1-13), premier dimanche de Carême de cette année liturgique (21 février).
Essayer de ne pas aborder le récit en le "parasitant" avec des informations ou des
enrichissements bibliques acquis auparavant afin d'appréhender le texte sans a priori pour
mieux le goûter tel qu'il est. Ce n'est pas facile. Étant donné que nous sommes tous de
"vieux chrétiens" qui ne sont pas sans mémoire, nous gardons nos bibles fermées.
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Chacun recherche le texte en lui tout d'abord pour le dire ensuite à son voisin
Par petits groupes, chacun put faire la même expérience. Effort de mémoire difficile, d'autant
que le récit de Matthieu, mieux connu et plus riche que celui de Luc, venait contaminer nos
narrations.
Eh oui, Luc s'adressait à des personnes peu cultivées en Bible et qui avaient tout à
apprendre de la culture biblique des juifs, l'écoute intérieure de la Parole de Dieu dans la
liturgie dominicale. Il a fallu que Luc simplifie en supprimant dans ce récit de Carême, les
sémitismes propres à Matthieu.
Puis Jacqueline « raconte » le texte de Luc, introduit par la prédication de Jean-Baptiste, et
conclu avec le début de l'enseignement de Jésus dans les synagogues de Galilée (Lc 4,14).
Alors nous avons ouvert la Bible, nous avons lu et relu le texte : qu'avait-on oublié ? Ajouté ?
Qu'est-ce qui a surpris comme une nouveauté ?"
Voici quelques uns des constats faits :
1. L'ordre des tentations a été changé entre les récits de Matthieu et de Luc : celle de la
montagne devient la seconde tentation, alors que celle du Temple de Jérusalem
termine la série. A l'époque où il écrit, Luc semble très branché "Temple" et liturgie
pour des communautés chrétiennes qui commencent à entrer dans l'écoute liturgique
et eucharistique de la Parole de Dieu.
2. Pour Luc, une seule pierre et un seul pain, pour Matthieu, plusieurs ! Pourquoi ?
3. Que les 3 tentations n'arrivent qu'au 41° jour, pas avant ! On les imagine souvent
pendant les 40 jours lorsque Jésus a vraiment faim. Vérification faite le texte le dit
exactement « Conduit par l'Esprit pendant quarante jours, et il était tenté par le
diable. » (versets 1 et 2)
4. Une réflexion sur les traduction françaises courantes : "Jésus LE fils de Dieu", ou
"Jésus (simplement) fils de Dieu" (sans majuscule). Nous avons vérifié sur le grec :
Luc comme Matthieu, écrit "fils de Dieu", c'est-à-dire "dépendant du Père, associé à
Lui, nourri par Lui...". C'est la conception biblique de l'homme en Alliance, une
Alliance profonde et ontologique qui est aussi "vraie" pour Jésus que pour nous. Dieu
et l'homme ne sont posés l'un à côté de l'autre, extérieurs l'un à l'autre, comme deux
individus semblables, mais l'un dans l'autre (évangile de Jean).
5. En Luc, Jésus n'est pas poussé au désert par l'Esprit-Saint, il en est "rempli" au début
du récit - comme Marie fut remplie de l'Esprit-Saint (pleine de grâce)- et aussi au
verset 14 quand s'ouvre son enseignement dans les synagogues de Galilée.
6. Les trois dialogues entre Jésus et le diable sont difficiles à mémoriser, surtout ceux de
Luc, qui ont été simplifiés... Par exemple, dans le troisième évangile, Jésus n'ajoute
pas : car l'homme se nourrit de toute parole qui sort de la bouche de Dieu (Mt 4,4).
L'expérience de l'écoute de la Parole ne devait pas encore être évidente dans des
communautés chrétiennes d'origine païenne, il fallait la découvrir.
7. En Luc, les anges ne s'approchent pas de Jésus pour le servir en fin de parcours.
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8. Que le diable dise à Jésus : "Je donne (puissance et gloire) à qui je veux" en a surpris
plus d'un. Quelle audace !
9. Que Jésus doive s'agenouiller devant le diable : scandale pour les enfants ! Et pour
nous !
10. Des interrogations ont été exprimées : ne pas manger pendant quarante jour et après
avoir faim : c'est à la fois surprenant (40 jours !) et normal (le ventre bien creux !). etc.
Précisions sur les rapprochements faits
Évocation de la manne (Ex 16) : "le pain que Dieu vous donne ! Les hébreux veulent tout
tout de suite, ils sont en manque, et refusent de vivre le temps, l'histoire avec les autres et
avec Dieu. C'est cela, le fondement des tentations. Manne signifie en araméen "qu'est-ce
que c'est ?" : questions qui nous arrivent chaque jour, comme nous arrivent aussi des
étincelles de sens. Tout ne vient pas tout de suite ! Les tentations, c'est chaque jour de nos
vies.
Les traversées en grand nombre (du désert, de la mer, de Jéricho...de la mort) nous ont fait
réfléchir.
Les grands saints semblent tous avoir été très "tentés" ! Comme le sont des non-croyants
qui peuvent se demander si le tremblement de terre d'Haïti est le royaume du diable ou le
Royaume de Dieu ?
Le diable sait tout alors que nous nous cherchons toujours, cela pose question. Les sectes
savent tout en s'appuyant sur la lettre biblique sacralisée. Ce fondamentalisme est
diabolique, il divise. Les niveaux de parole disparaissent, la réalité est horizontalisée. Le
contraire de la divinisation de l'homme par Dieu !
Après de fructueuses discussions en équipe, Jacqueline a proposé en conclusion
d'appréhender "la prière de Jésus" en rapport avec le texte des tentations. Puisque, cela a
été plus qu'évoqué, Jésus priait, dans le désert, s'il ne mangeait pas.
A la lumière de ces parallèles faits entre le Notre Père et le récit des tentations dans les
évangiles, chaque équipe a « élargi » la prière pour l'une ou l'autre des demandes du Notre
Père comme nous faisons à la messe. Voici la prière qui est montée des équipes :
"Notre Père, qui es aux cieux, que ton Nom soit sanctifié.
Que ton règne vienne, « ton règne de paix et de justice arraché au pouvoir de satan. Donnenous la force de combattre et de ne pas nous endormir. Oui, fais-nous vivre dans ton
Alliance ! »
Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ! « Toi, dont le Royaume n'est pas de ce
monde,
toi, dont la puissance d'amour est au service du plus pauvre, toi dont la gloire resplendit
dans le cœur du croyant. »
Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour. « Pour demain, nous nous en remettons à toi.
Donne-nous de goûter chaque jour un peu plus la saveur de ta Parole. »
27 mars 2010
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Pardonne-nous nos offenses. « Nos offenses sont nombreuses, Seigneur, envers toi : nous
t'oublions, nous nous attribuons les mérites que tu nous donnes,nous pervertissons ta Parole
en la lisant de manière rampante... envers les autres, par nos jugements hâtifs, envers nousmêmes : en ne te faisant pas confiance, en nous laissant soumettre à la tentation. »
Ne nous soumets pas à la tentation. « Seigneur, ne permets pas que mon cœur s'éloigne de
ton amour, ne permets pas que mon regard se laisse détourner par les promesses illusoires
et clinquantes du tentateur qui cherche à m'enfermer dans mes égoïsmes. »
Mais délivre-nous du mal. « Délivre-nous de tout mal, Seigneur, et donne la paix à notre
temps; par ta miséricorde, libère-nous du péché, rassure-nous devant les épreuves en cette
vie où nous espérons le bonheur que tu promets et l'avènement de Jésus Christ, notre
Sauveur.
Car c'est à toi qu'appartiennent le règne, la puissance et la gloire, pour les siècles des
siècles.
L'APRÈS-MIDI AVEC CLAUDE
C'est Origène qui fut à l'honneur, nous avons étudié deux sermons du grand catéchète, le
premier sur la première tentation, le second sur les deux autres tentations.
Paragraphe par paragraphe, nous avons suivi la stratégie de sa communication catéchétique
avec ses ouailles, des chrétiens de sa paroisse.
La visée était de retrouver les "niveaux de parole" dans sa prestation. Comment Origène
passait d'une parole anecdotique, toujours un peu présente, à l'au-delà de la "lettre". Nous
avons vu qu'il agissait de deux manières :
1. En lâchant une question qui oblige à 'avoir un regard critique sur le texte (parole
critique).
2. En établissant des correspondances intra-bibliques qui apportent une ouverture à ce
texte (correspondances d'images).
3. Origène peut aussi associer les deux procédés pour faire dépasser "la parole
anecdotique" qui n'apporte aucune nourriture spirituelle.
Par exemple, il interroge d'emblée : "De quelles tentations, s'agit-il ?" et il répond "nous
l'ignorons." On ne sait en effet rien des contextes concrets dans lesquels Jésus fut tenté. On
n'est informé que du dialogue de Jésus avec le diable. Il faudra donc mettre du nôtre pour
entrer dans le sens évangélique.
Origène interroge : "de quelle pierre, s'agit-il ?" et aussitôt il rappelle un autre passage de
Luc : Un père à qui son fils demande du pain,ne va pas lui donner une pierre (Lc 11,11). Et
cela pose question. Le diable voulait-il que l'homme mange une pierre en guise de pain ?
Avec cette réponse, nous restons dans une parole anecdotique.
Nous nous sommes arrêtes sur la manière qu'Origène a utilisée pour introduire la dimension
existentielle du récit. Il s'engage personnellement ("pour ma part") a placer le récit dans
notre quotidien : "Je pense, qu'aujourd'hui encore, le diable (nous) montre une pierre et
incite chacun à prononcer la parole : "ordonne à cette pierre de se changer en pain". Ce
serait alors notre parole personnelle qui serait diabolique.
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Nous voici existentiellement concernés. Mais nous pouvons sortir de cette situation
désagréable en bénéficiant de l'aide du Seigneur.
La pierre du diable et le pain de Dieu ont la même apparence. Pour éviter la confusion, il faut
prendre de l'altitude, et Origène montre une fois encore que le récit n'a pas de sens s'il est
pris à la lettre. Si Jésus avait transformé la pierre en pain pour se nourrir, sa puissance ne
nous aurait servi à rien. Sa puissance suppose une lecture à un autre niveau, un sens
spirituel au récit est indispensable, c'est-à-dire ne pas rester enfermé dans l'anecdote où la
puissance de Dieu n'a pas de sens pour nous.
Il nous faut passer à un niveau de parole supérieur, une sorte de lecture poétique et
théologique du récit de Luc.
Origène continue à pousser vers une lecture existentielle de l'évangile en mettant au même
niveau existentiel la pierre du diable et la Parole de Dieu. Et il ajoute la réponse que fait
Jésus au diable en Matthieu qu'il prend dans le Deutéronome : "L'homme ne vit pas
seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu" (Dt 8,3). Il existe une
expérience nourrissante de la Parole de Dieu... si tant est que notre cœur ne soit pas de
pierre.
Origène apporte un enrichissement du problème en rappelant le prologue de Jean : "Dans le
principe était le Verbe... et le Verbe était Dieu" (Jn 1,1). Et c'est le Verbe de Dieu qui
s'incarne en nous pour nous faire ressusciter.... Nous ne sommes plus du tout dans une
parole anecdotique, mais dans une parole de foi biblique-symbolique10.
Claude et Jacqueline Lagarde
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Pour approfondir cette écoute de la Parole de Dieu, lire le dernier numéro de Christus : "Dieu nous parle".
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