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BULLETIN Valeurs mobilières, fusions et acquisitions 20 juin 2011 Projet de modifications du « Takeover Code » : Est-ce la fin des offres rusées comme celle de Kraft? Par : Richard Cliff | Londres Introduction À la suite des réponses reçues en octobre 2010 à son document de consultation initial, le Takeover Panel (le « Panel ») a récemment mis un terme à la période de consultation de son projet de modifications détaillées du Takeover Code (le « Code »). Le motif initial de ce projet de modifications a été en partie la prise de contrôle controversée de Cadbury par Kraft Foods en 2010 et la tempête politique et médiatique qui a suivi lorsque Kraft a annoncé qu'elle allait fermer l'usine de Cadbury située à Somerbury, alors qu'elle avait déclaré que l'usine poursuivrait ses activités. Le Code régit les offres publiques d'achat, les opérations de fusions et autres opérations dont l'objectif ou l'effet potentiel est d'obtenir ou de regrouper le contrôle : de sociétés dont les sièges sont situés au R.-U., dans les îles Anglo-Normandes ou dans l'île de Man et dont les titres sont admis aux fins de négociation sur un marché réglementé au R.-U. ou sur toute bourse des îles Anglo-Normandes ou de l'île de Man; de sociétés ouvertes et certaines sociétés fermées dont les sièges sont situés au R.-U., dans les îles Anglo-Normandes ou dans l'île de Man et qui, selon le Panel, ont leur siège de direction et de contrôle dans un de ces territoires; dans une certaine mesure, de sociétés du R.-U. admises aux fins de négociation sur un marché réglementé ailleurs dans l'Espace économique européen et de certaines sociétés dont le siège est situé dans un État membre de l'Espace économique européen et dont les actions sont admises aux fins de négociation sur un marché réglementé au R.-U. Le Panel a reconnu que le Code, dans sa forme actuelle, est devenu trop favorable aux initiateurs d'une offre hostile et qu'il doit prendre davantage en considération les personnes (principalement les employés) autres que les actionnaires de la société visée qui sont affectées par les prises de contrôle. Le Panel vise donc à renforcer la position de la société visée. La liste des principales modifications est dressée ci-dessous. 1. Accroître la protection des sociétés visées contre la prolongation indéfinie des « offres virtuelles » Les « offres virtuelles » ont lieu lorsqu'un initiateur potentiel annonce son intérêt pour une société cible, mais ne lance pas d'offre formelle. Ces offres prolongent souvent le processus d'acquisition et créent une incertitude pour la société cible potentielle et ses actionnaires. Le Panel propose que : à la suite de son approche initiale, un initiateur potentiel soit cité dans une annonce qui marque le début de la période d'offre, peu importe laquelle des parties fait l'annonce; tout initiateur potentiel cité précise ses intentions par rapport à la cible dans les 28 jours suivant la date à laquelle il est cité. Ce délai, dit « put up or shut up » (présente une offre officielle sinon tais-toi), serait automatiquement imposé, contrairement à la situation actuelle où le Panel impose uniquement un délai à la demande du conseil d'administration de la société cible. Le Code en sa forme actuelle n'exige pas que le conseil d'administration de la société cible fasse d'annonce pour nommer l'initiateur potentiel. Le Panel estime que la nouvelle règle exigeant l'identification de l'initiateur potentiel motivera les initiateurs à préserver des niveaux de confidentialité plus élevés. En outre, il a avancé qu'il serait avantageux pour les actionnaires de la société visée que l'identité de l'initiateur soit révélée plus tôt dans le processus, puisque ceux-ci pourraient se faire une opinion quant à savoir si une offre formelle sera présentée sous peu ou non. Le Panel a aussi souligné que, en cas de fuite au sujet d'une offre potentielle, la cible pourrait subir des dommages importants alors qu'un initiateur potentiel anonyme n'aurait aucun effet. Le Panel espère qu'en établissant un délai strict pour 1 VANCOUVER CALGARY TORONTO OTTAWA MONTRÉAL QUÉBEC LONDRES PARIS JOHANNESBURG BULLETIN Valeurs mobilières, fusions et acquisitions l'annonce, les modifications proposées rétabliront l'équilibre et encourageront les initiateurs à préserver la confidentialité et à lancer des offres formelles conformément aux échéanciers prévus par le Code. La proposition « put up or shut up » est probablement la modification la plus fortement critiquée de toutes les modifications proposées. Les critiques soutiennent que la période accordée est trop courte pour certains types d'initiateurs, comme les sociétés de financement par capitaux privés, qui ont souvent besoin de temps pour monter un financement par emprunt et qui sont assujetties à des obligations de diligence de longue haleine. À moins que l'initiateur puisse convaincre le conseil d'administration de lui accorder plus de temps, il devra attendre six mois additionnels pour faire une offre. Toutefois, le Panel semble ne pas avoir tenu compte de cette objection. 2. Renforcer la position de la société visée Compte tenu de son intention générale de « rééquilibrer » le Code et de renforcer la position des sociétés visées, le Panel propose : d'imposer une interdiction générale de recours aux mesures de protection de l'opération (qui, en général, sont des mesures qui protègent la position de l'initiateur) et aux paiements incitatifs; de préciser que le conseil d'administration de la société visée n'est pas limité quant aux facteurs qu'il peut évaluer lorsqu'il donne un avis sur une offre. À l'heure actuelle, il existe une variété de mesures de protection, y compris des ententes d'exclusivité, des mesures prises par le conseil d'administration pour recommander un initiateur donné, des « accords de mise en œuvre » (contraignant la société visée à mettre en œuvre une offre ou à s'abstenir de prendre des mesures pour faciliter la mise en œuvre d'une offre concurrente) et des clauses d'« obligation de la tenue d'un vote » (exigeant que le conseil d'administration de la société cible soumette une opération au vote des actionnaires même lorsqu'il n'appuie plus l'offre). Le Panel a souligné qu'un ensemble de mesures de protection courantes est souvent présenté au conseil d'administration d'une société cible (y compris des indemnités de résiliation maximales), qui se sent obligé de l'accepter, et que cette pratique peut même avoir lieu lorsqu'une entente a été obtenue à la suite d'une « offre virtuelle » hostile. Aux termes des modifications proposées, un initiateur potentiel pourra toujours demander au conseil d'administration de la société cible de conclure des ententes de confidentialité, des ententes de communication d'information, des ententes de non-sollicitation des employés de l'initiateur et des mesures irrévocables limitées pour accepter l'offre. En outre, les sociétés cibles seront encore autorisées à consentir des indemnités de résiliation pouvant atteindre 1 % du prix offert à un « chevalier blanc » qui se manifeste après l'annonce d'une offre hostile, à un initiateur lorsque la société visée s'est mise en vente dans le cadre d'un processus officiel de vente et, avec une dispense du Panel, lorsqu'un initiateur potentiel est dans une situation financière si désespérée qu'il cherche une offre de sauvetage. Certains participants au marché ont exprimé leurs préoccupations à l'égard des initiateurs privés qui, en particulier, pourraient être découragés d'entamer un processus d'offre par peur de ne pas faire leurs frais si la cible potentielle se retirait des pourparlers. En outre, l'affaiblissement des accords de mise en œuvre (tels qu'ils sont décrits ci-dessus) visant les plans d'arrangement peut aussi décourager les initiateurs de s'engager sur cette avenue. Toutefois, pour ces raisons, le Panel a l'intention d'exiger que les conseils d'administration des sociétés visées conviennent avec lui d'un échéancier pour la mise en œuvre des plans d'arrangement et qu'ensuite ils respectent cet échéancier, sous réserve du retrait de la recommandation du conseil. En ce qui concerne les facteurs que les conseils d'administration des sociétés visées évaluent en décidant s'ils recommandent d'accepter une offre, le Panel a aussi souligné qu'il existe une perception parmi certains participants au marché selon laquelle le conseil d'administration est tenu en vertu de ses obligations prévues par le Code de considérer le prix d'offre comme le facteur déterminant dans la formulation de son avis et dans sa décision de recommander une offre ou non. Par conséquent, le Panel entend insérer une note explicative dans le Code précisant que le prix ne doit pas être le facteur déterminant et que le conseil d'administration peut prendre en considération tous les facteurs qu'il juge pertinents. Toutefois, plusieurs doutent que les conseils d'administration des sociétés visées délaisseront jamais un jour leur fixation par rapport au prix, malgré ce que le Code propose, en particulier lorsque le prix est payable au comptant plutôt que payable en échange d'actions ou d'autres titres de l'initiateur. 3. Accroître la transparence et améliorer la qualité de la divulgation (à l'initiateur et aux actionnaires de la société visée) Cette modification comporte deux mesures principales : les deux parties à une offre devront divulguer les frais liés à l'offre; 2 VANCOUVER CALGARY TORONTO OTTAWA MONTRÉAL QUÉBEC LONDRES PARIS JOHANNESBURG BULLETIN Valeurs mobilières, fusions et acquisitions le document relatif à l'offre devra contenir des informations financières plus exhaustives concernant l'initiateur. Le Panel propose que l'initiateur et le conseil d'administration de la société visée divulguent une estimation de leurs frais totaux dans le document de l'offre et divulguent également les honoraires de leurs conseillers séparément par catégorie de conseiller. Les frais liés au financement doivent être divulgués séparément des honoraires des conseillers. Les conseils d'administration doivent aussi révéler les montants maximums et minimums payables à leurs conseillers dans le cadre d'un programme de conclusion de l'opération, de mesures incitatives ou d'un mécanisme de cliquet. Finalement, les conseils d'administration doivent aviser leurs actionnaires de tout changement important apporté aux estimations qu'ils ont fournies initialement : ce qui constitue en quelque sorte une obligation continue. Le Panel a également conclu que les actionnaires de la société visée n'étaient pas la seule partie intéressée à obtenir une analyse détaillée de la situation financière de l'initiateur : les actionnaires, les administrateurs et les employés de l'initiateur peuvent aussi être concernés. Selon les modifications proposées, le document de l'offre devra contenir des renseignements détaillés sur la situation financière de l'initiateur, et ce, peu importe si l'offre est une offre payable au comptant ou payable en échange de titres – aux termes du Code actuel, une offre au comptant réduit l'obligation de divulgation de l'information financière. En particulier, le document de l'offre, qu'il s'agisse d'une offre payable au comptant ou d'une offre payable en échange de titres, devra à présent contenir des renseignements détaillés sur : le financement par emprunt dont l'initiateur dépend (y compris le nom du fournisseur, la garantie offerte, les clauses restrictives clés et les taux d'intérêt); les perspectives de notation des deux parties. Ces obligations de divulgation sont totalement nouvelles et ont généralement été bien acceptées, bien que certains détracteurs s'inquiètent de ce que l'examen détaillé des coûts liés aux honoraires de spécialistes puisse détourner l'attention des actionnaires de la société visée de la valeur d'une offre potentielle. 4. Mieux reconnaître les intérêts des employés des sociétés visées Par suite de la volte-face de Kraft quant à son engagement de maintenir les activités de l'usine de Cadbury située à Somerbury et des répercussions qu'elle a eues sur les employés de Cadbury, le Panel a reconnu que le Code ne protégeait pas adéquatement les intérêts des parties concernées autres que les actionnaires de la société visée. Ses propositions visent à améliorer : la qualité de la divulgation par les initiateurs et les sociétés visées à l'égard des employés de ces dernières; la possibilité pour les représentants des employés de se faire leur propre opinion sur une offre connue. Dans la version actuelle du Code, les initiateurs doivent déclarer leurs intentions en ce qui concerne les employés de la société cible. Selon les modifications proposées, les initiateurs devront fournir des précisions supplémentaires sur, par exemple, leurs intentions quant au maintien d'un système de négociation existant. Ils devront aussi faire une déclaration négative s'ils prévoient n'apporter aucun changement aux conditions d'emploi de la société cible, et ils ne pourront s'abstenir de commenter cette question. Toutefois, la proposition qui surprend davantage est l'obligation que les déclarations faites par l'initiateur au cours de la période visée par l'offre concernant l'emploi et le lieu des activités de la société cible s'avèrent en général pour une période de 12 mois suivant la date à laquelle l'offre devient inconditionnelle (sauf lorsqu'une autre période est prévue). Cette obligation devrait prendre la forme d'une note plutôt qu'une règle. Cette modification aborde la question des initiateurs qui reviennent sur leurs promesses, ce que la plupart des gens considèrent comme inéquitable. Toutefois, l'initiateur de demain pourrait avec raison d'être inquiet que le respect de la proposition puisse l'empêcher de réagir aux changements ou aux événements imprévisibles ou de prendre des décisions qui amélioreront sa nouvelle entreprise après la réalisation de l'opération. Actuellement, les documents de l'offre doivent inclure les opinions des représentants des employés. Selon les modifications, la société visée devra informer les représentants de ses employés de la première date à laquelle ils pourront faire circuler une opinion sur les effets de l'offre sur les conditions d'emploi. Une fois produite, la société visée devra publier cette opinion sur son site Web. Une dernière proposition veut que les sociétés visées couvrent les frais raisonnables que les représentants des employés engagent en vue d'obtenir les conseils dont ils ont besoin pour vérifier l'information contenue dans leur opinion. Cette proposition n'a pas été diffusée aussi largement que les autres et est peut-être considérée comme acceptable. Toutefois, il est facile de voir comment l'idée que les représentants des employés payent pour obtenir des conseils financiers ou même juridiques puissent préoccuper les sociétés cibles futures, bien que le Panel affirme que ces frais ne seront pas importants. 3 VANCOUVER CALGARY TORONTO OTTAWA MONTRÉAL QUÉBEC LONDRES PARIS JOHANNESBURG BULLETIN Valeurs mobilières, fusions et acquisitions Conclusion Il serait simpliste de dire que nous devrons attendre et voir comment ces modifications seront appliquées une fois qu'elles entreront en vigueur plus tard cette année, mais il ne serait pas déraisonnable de dire qu'elles auront une incidence, du moins au début du processus des offres. Nous imaginons que les nouvelles exigences obligeront les initiateurs à être plus organisés et avancés dans la préparation de leurs offres avant d'approcher leur cible. Immanquablement, ils devront engager plus de frais qu'ils ne le font à l'heure actuelle au début du processus, et ils pourront éprouver des difficultés à trouver un financement dans les délais prescrits. Dans un contexte où les fusions et acquisitions se font plutôt rares, nous craignons que certains initiateurs, particulièrement les initiateurs privés, puissent être dissuadés d'entrer dans l'arène. Bien que les modifications visent à améliorer la position des sociétés visées, elles pourraient avoir comme conséquence non prévue de nuire aux intérêts des actionnaires des sociétés visées, conséquence que le Panel ne souhaite certainement pas. C'est donc une histoire à suivre! Pour plus de renseignements, n’hésitez pas à communiquer avec l’auteur de ce bulletin : Richard Cliff +44 207 917 8630 [email protected] Personnes-ressources VANCOUVER TORONTO MONTRÉAL PARIS Lata Casciano 604 631 4746 [email protected] Richard J. 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