Dossier de Presse

Transcription

Dossier de Presse
Romain Gary
des Racines du ciel à La Vie devant soi
© Jeanloup Sieff/Agence Vu
DOSSIER DE PRESSE
3 DECEMBRE 2010 - 20 FEVRIER 2011
DOSSIER DE PRESSE
« Romain Gary
des Racines du ciel à LaVie devant soi
»
Musée des lettres et manuscrits (3 décembre 2010 - 20 février 2011)
T
rente ans après sa disparition (le 2 décembre 1980), le Musée des lettres et manuscrits fait
revivre à travers ses écrits Romain Gary, l’homme au deux Goncourt, le mystificateur sublime,
héros, diplomate, écrivain, cinéaste, grand reporter, grand séducteur, dans toute sa complexité
et son humanité vibrante et douloureuse.
A travers quelque 160 pièces uniques, notamment un premier roman totalement inédit, et divers manuscrits, lettres autographes, articles de presse et photographies, voici le portrait kaléidoscopique de celui
qui éprouva si bien « l’effort d’être un homme ».
Relations presse :
Gaëlle Cueff - 3, rue d es Lilas 75019 Paris
email : [email protected] - Tél. : 01 42 41 64 98
DOSSIER DE PRESSE
SOMMAIRE
■ Communiqué de presse
p. 4
■ Le mot de Gérard Lhéritier
p. 5
■ Quelques pièces de l’exposition
p. 6
■ Visuels pour la presse
p. 11
■ Renseignements pratiques
p. 16
■ Partenaires média
p. 17
DOSSIER DE PRESSE
4
COMMUNIQUE DE PRESSE
« Je me suis bien amusé, au revoir et merci. »
Romain Gary in Vie et mort d’Emile Ajar
D
ans cette exposition qui présente quelque 160 pièces extraites de l’exceptionnelle
collection acquise auprès des ayants-droit de Romain Gary, le Musée des lettres et
manuscrits propose un itinéraire tour à tour thématique et biographique de l’écrivain à
travers ses écrits, manuscrits, correspondance, photographies, pour l’essentiel jamais exposés. Trente
ans après sa mort, il fait revivre l’auteur, le diplomate, le journaliste, l’homme de théâtre et de cinéma,
le gaulliste, le résistant, le séducteur et le grand mystificateur à travers sa part la plus intime peut-être
et la plus émouvante, son œuvre elle-même, mise à nu dans son processus de création à travers des
manuscrits, parfois profondément remaniés.
Le parcours commence par l’enfance plus que modeste à Vilnius puis à Nice du jeune Roman
Kacew, entre un père absent mais bientôt réinventé et une mère qui nourrit pour lui les folles ambitions
qu’il tentera une vie entière de satisfaire.
Il se poursuit par l’engagement de Gary dans la Résistance, auprès du Général de Gaulle à
qui il vouera une indéfectible admiration, puis après-guerre par sa carrière de diplomate (notamment
aux Nations-Unies à New York). Consul de France à Los Angeles en 1957, il contourne son devoir de
réserve en prenant le pseudo de Fosco Sinibaldi pour brocarder l’action de l’ONU dans L’Homme à la
colombe, premier roman écrit sous pseudo.
Une place de choix est accordée au célèbre roman La Promesse de l’aube écrit en 1960, mélange
de récit autobiographique et d’invention, déjà, de sa vie. Emouvant hommage à une mère dont l’amour
fusionnel et follement ambitieux se révèle être un cadeau empoisonné, il dresse le portrait inoubliable,
douloureux, drôle et amer d’une femme à la force hors du commun : « Avec l’amour maternel, la vie vous
fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin
de ses jours (…). Je ne dis pas qu’il faille empêcher les mères d’aimer leurs petits. Je dis simplement
qu’il vaut mieux que les mères aient encore quelqu’un d’autre à aimer ». Le chapitre XXII, inédit dans
la version française jusqu’en 1980 (où parut l’édition définitive en Folio) est présenté dans l’exposition.
L’histoire d’amour avec Jean Seberg, rencontrée en 1959, est notamment présentée à travers
des photos et un poème inédit, en français, de l’actrice, et par la présentation de Chien Blanc (1970), qui
laisse apparaître en filigrane l’imminente séparation du couple. L’amour et la place de la femme dans
la vie de Romain Gary, grand séducteur, sont également présents à travers le manuscrit de Clair de
femme ou cette très belle lettre à Christel Kryland, où transparaît aussi son humanisme : « Souviens-toi
que si je t’aime comme femme c’est aussi parce que je t’aime comme homme. (…) Et rien, jamais, ni le
mariage, ni l’amour ni les enfants ne te rapprocheront de moi plus que ça : l’effort d’être un homme. »
Un ouvrage coédité avec Gallimard et le Magazine littéraire, intitulé « Lectures de Gary »,
propose les regards croisés sur l’œuvre de Romain Gary de Pierre Assouline, Paul Audi, Pierre Bayard,
Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Bernard Fauconnier, Roger Grenier, Nancy Huston, Hervé Le Tellier,
Bernard-Henry Lévy, Jean-Marie Rouart, Mireille Sacotte et Tzvetan Todorov.
DOSSIER DE PRESSE
5
LE MOT DE GERARD LHERITIER
PRESIDENT DU MUSEE DES LETTRES ET MANUSCRITS
L
a qualité des expositions dans la sélection des manuscrits, c’est la promesse de l’aube
faite par le Musée des lettres et manuscrits, ces racines qui devaient nous conduire un
jour au ciel de Romain Gary. Ce sera chose faite à partir du 3 décembre, au lendemain
du trentième anniversaire de sa disparition, avec une exposition consacrée à ce prodigieux écrivain.
Cet homme est un mystère à plusieurs visages, l’approcher au plus près, un défi. Le seul chemin
pour y parvenir est bien sûr d’aller au plus intime de ses manuscrits les plus authentiques, les plus
mystérieux. C’est ce que va permettre pour la première fois en France et dans le monde cette exposition
exceptionnelle qui rassemble la plus importante collection d’écrits de Romain Gary. Cet événement
culturel unique et inédit mobilise déjà les chercheurs et les critiques, les éditeurs et les biographes.
C’est sous le nom d’Emile Ajar (« braise » en russe) que Romain Gary va susciter le plus
fameux scandale littéraire du XXe siècle. Souffrant d’être incompris par une critique dont il veut mettre
les préjugés à l’épreuve, il s’invente une autre identité et rédige plusieurs romans avec une créativité
renouvelée, dont Gros-câlin (1974), La Vie devant soi (1975), et L’Angoisse du Roi Salomon (1979).
Gary demande à son cousin Paul Pavlowitch d’assumer ce personnage auprès des médias, mystification
qui ne sera révélée qu’après sa mort, et faisant de Romain Gary le seul auteur ayant obtenu deux fois
le prix Goncourt, en 1956 pour Les Racines du ciel puis en 1975 pour La Vie devant soi. Traité avec une
certaine condescendance par la critique de son vivant mais lu et apprécié par un public fidèle qui fait un
triomphe à ses livres, Romain Gary a vu un certain nombre d’entre eux portés au cinéma, notamment
Les Racines du ciel en 1958, réalisé par John Huston avec Errol Flynn, Juliette Gréco et Orson Welles,
La Vie devant soi qui donne en 1977 un de ses plus grands rôles à Simone Signoret ou Clair de femme
en 1979, réalisé par Costa-Gavras avec Yves Montand et Romy Schneider.
Jaloux de son indépendance, Gary s’est tenu à l’écart des coteries littéraires et politiques. La
résistance est un mot-clé pour comprendre un auteur qui présente souvent des héros en lutte contre des
puissances qui les dépassent. Son œuvre porte en filigrane la marque de son combat pour la Libération,
à l’origine d’une fidélité jamais démentie au Général de Gaulle. Pilote de chasse dans les Forces
aériennes françaises libres (FAFL), résistant, diplomate, voyageur, homme de lettres et séducteur, il
est le grand mystificateur des lettres françaises. Sa revanche posthume et jubilatoire contre ceux qui
sous-estimaient Romain Gary et portaient Emile Ajar aux nues est celle de Janus, le dieu des portes,
ouvertes dans ses temples en temps de guerre et fermées en temps de paix. Mais s’il est une guerre
que Janus-Gary-Ajar a menée, c’est celle de l’humain contre la bêtise et, par son œuvre, de la vie
contre la mort. Estimant qu’il avait passé la limite au-delà de laquelle son ticket n’était plus valable, il a
prouvé par son dernier geste qu’il n’était pas besoin que l’arbre demeure sur pied pour que les racines
montent pour toujours au ciel.
Romain Gary se suicide le 2 décembre 1980 à 66 ans, lui qui avait affirmé «J’ai fait un pacte
avec ce monsieur là-haut, vous connaissez ? J’ai fait un pacte avec lui aux termes duquel je ne
vieillirai jamais.»
Gérard Lhéritier, Président du Musée des lettres et manuscrits.
DOSSIER DE PRESSE
6
QUELQUES PIECES DE L’EXPOSITION
■ La Geste grimaçante (1934) : le premier roman,
totalement inédit, de Gary
Cette pièce capitale n’est autre que le premier roman, totalement inédit, de celui qui
s’appelait encore Roman Kacew. Une étiquette blanche, sur la couverture du cahier, porte cette
mention autographe à l’encre noire, écrite un an avant le suicide de son auteur : « Ce manuscrit de
mon premier roman écrit à dix-sept ans ne doit pas être publié. Il peut-être ouvert [illisible]. /Romain
Gary 16 XII 79 ». Un an après la rédaction de La Geste, Gary publia ses premières nouvelles,
L’Orage et Une petite femme dans Gringoire, mais décida dès la seconde parution de renoncer à
percevoir sa rémunération d’une revue conservatrice devenue franchement d’extrême-droite.
Ce roman épique, noir et violent commence dans la tradition des grands récits d’aventure,
avec la rencontre des personnages principaux dans une taverne, sur le port de Shanghai. Mais
cette longue scène inaugurale prend vite une dimension burlesque et frénétique, autour de l’ivrogne
Pindanusse, un ancien professeur coupable de pédophilie qui a fui la France : ce personnage
ubuesque au verbe truculent fut inspiré, semble-t-il, par M. Fouassier dont Gary suivit les cours
de philosophie au lycée de Nice. Pindanusse fait la connaissance de deux aventuriers criminels,
Pepito, un matelot au passé douteux, et Cagne, à la fois témoin et acteur dans cette histoire dont il
finira par être le protagoniste principal, celui que l’on suit jusqu’à la fin du livre – peut-être, déjà, un
double de l’auteur. La beuverie se termine dans un bain de sang. Après le meurtre par Cagne du
tenancier Beppo, dont on apprend qu’il avait autrefois caché des sacs d’or en Afrique, le trio prend
la fuite dans la nuit et s’embarque sur un navire en partance. La deuxième partie se situe sur le
bateau, dans une atmosphère oppressante, hantée par les cauchemars de Cagne et la dureté de la
vie à bord. Après le naufrage du « Joseph », leur quête les conduira, dans la troisième et dernière
partie du livre, jusqu’à un étrange village africain, Topinambourg, où l’or est supposé se trouver. Le
thème de la culpabilité qui sous-tend toute cette étrange geste, où affleurent bien des fantasmes de
Gary, aboutit à un dénouement tragique avec le suicide final de Cagne qui se jette dans un brasier.
Ce livre est sans aucun doute l’un de ses plus sombres et violents. Ecrite au sortir de l’adolescence,
cette œuvre achevée se clôt sur le mot « Fin » : il ne s’agit aucunement d’une ébauche, mais
d’un roman structuré, où le jeune Gary montre une maîtrise étonnante de la technique narrative :
construction en trois parties dans des lieux différents, avec une grande scène d’exposition au
début et un enchaînement quasi cinématographique des séquences, caractérisation très poussée
de chaque personnage qui attachent le lecteur, et déjà, un don extraordinaire du dialogue, très
abondant, qui restera un point fort de l’art de Romain Gary.
DOSSIER DE PRESSE
7
QUELQUES PIECES DE L’EXPOSITION
■ Le Charlatan (1969 ?)
Ces manuscrits autographes et dactylographiés comportent deux versions, française et
anglaise, du roman inédit de Romain Gary Le Charlatan. Quoiqu’inédit et non daté, il est à peu
près certain que ce roman inachevé fut écrit par Romain Gary au cours de l’année 1969, soit à
l’époque de la parution d’Adieu Gary Cooper. Gary, dont le ménage avec Jean Seberg était en
perdition à cette époque et d’avec laquelle il s’apprêtait à divorcer était par ailleurs occupé à la
rédaction de Chien blanc, un livre violent sur le racisme qui devait paraître un an plus tard. Le
Charlatan est un roman policier dans lequel des mafieux et des agents américains du FBN (Federal
Bureau of Narcotics) se disputent, à Haïti, une importante cargaison d’héroïne. Avec une influence
certaine du réalisme fantastique russe exprimé par des auteurs comme Gogol, Biély ou Zamiatine,
l’écrivain réussit à transcender le genre littéraire du roman policier. Toutefois, l’intrigue s’appuie
sur des faits précis identifiés grâce à un important travail de documentation ainsi que sur une
solide connaissance des problèmes sociaux causés par la drogue aux Etats-Unis, que l’auteur a
acquise lors de ses séjours en tant que Consul Général de France à Los Angeles et porte-parole
de la représentation diplomatique permanente de la France auprès du Conseil de sécurité à NewYork. Ces connaissances, impressions et souvenirs seront d’ailleurs exploités un peu plus tard
dans Chien blanc. Pour l’heure, l’attrait de Gary pour le problème du trafic de drogue le conduit
à des hypothèses audacieuses : « Ecoute moi bien champion, on est en train d’empoisonner dixsept millions de noirs américains avec de l’héroïne. C’est prémédité, organisé, voulu. C’est même
probable que le Bureau des Narcotiques ne fait que ça. Cinquante de leurs agents ont été pris
quand même dans le sac cette année… ».
Le Charlatan servira par ailleurs de base à Kill, un film réalisé par Gary trois ans plus tard et
écrit sur mesure pour Jean Seberg. Au moment de la sortie de ce deuxième essai cinématographique
après Les Oiseaux vont mourir au Pérou, Gary apportera, dans Le Figaro, des précisions sur ses
intentions qui valent pour Le Charlatan : « La haine que j’éprouve pour les trafiquants d’héroïne
est à peu près sans limites. Je considère ces empoisonneurs, ces véritables tueurs de jeunesse,
comme dépourvus de tout caractère humain […] Le trafic d’héroïne atteint le chiffre de 5 milliards de
dollars par an. A ce degré ce n’est plus du trafic : cela devient l’économie d’un pays. »
■ Les Enchanteurs (1973)
Très précieux sur le processus de création de Romain Gary, les documents réunis à propos
des Enchanteurs (ébauche manuscrite, manuscrit, dactylographie, tapuscrits, jeux d’épreuves)
permettent de suivre toutes les étapes de la création de ce roman, depuis la première version,
très différente de celle finalement publiée, jusqu’aux épreuves corrigées, en passant par toutes
DOSSIER DE PRESSE
8
QUELQUES PIECES DE L’EXPOSITION
les étapes intermédiaires, inlassablement remaniées. Ce roman picaresque, plein d’humour et de
merveilleux, se déroule simultanément à plusieurs époques et dans plusieurs pays (en grande partie
en Russie sous le règne de Catherine II). Il met en scène la tribu des Zaga, famille de saltimbanques
vénitiens. Fosco Zaga, le héros, est, selon les termes mêmes de Gary « soucieux avant tout de ses
“enchantements littéraires”, mais aigrefin, maquereau, parasite et vérolé ». Illusionniste, médecin
prétendu, devin, il est amoureux de Teresina, la jeune femme de son père. De sa capacité à
soulager la constipation de l’impératrice russe dépendront sa survie et celle de sa famille. Suivront
d’autres péripéties, mais le fil rouge qui tient le récit, c’est l’amour de Fosco pour Teresina, qui se
meurt et ne sera sauvée que par les pouvoirs de l’écriture. Ce récit d’aventures débridé est donc
profondément une réflexion sur les pouvoirs de la littérature. On mesure le travail titanesque que
Gary a accompli sur cette œuvre et la minutie avec laquelle il a jusqu’au bout peaufiné son livre. Il
est rare et précieux d’avoir ainsi accès à tous les brouillons préparatoires d’un écrivain pour le début
de son œuvre, d’assister à la mise en route du processus d’écriture. Toutes proportions gardées, on
songe à Proust et au début une vingtaine de fois recommencé de La Recherche. Les corrections se
poursuivent ainsi jusqu’à l’épreuve ultime du bon à tirer. Gary apporte tant de corrections au texte
dactylographié que celui-ci doit être retapé. Les pages qui résultent de cette nouvelle frappe sont
à leur tour chargées de corrections et d’ajouts autographes. Sur les épreuves mises en page et
corrigées, Gary se livre encore à une modification d’importance, qui change la pagination du livre.
La phrase ultime du livre est d’une grande force et peut se lire comme une profession de foi de Gary
écrivain : « J’ai tout de même découvert un secret qui est celui de tous les enchanteurs : si je meurs,
c’est que j’aurai manqué de talent. »
■ Gros-Câlin (1974)
Le dernier chapitre de ce premier ouvrage publié sous le nom d’Emile Ajar en 1973 est
présenté pour la première fois, et constitue une pièce majeure de l’exposition.
Les pièces présentées montrent qu’il songea d’abord au titre « Le Socialisme », puis à
« La Solitude du python à Paris ». Cette publication marque le début d’une des plus incroyables
aventures littéraires de la seconde moitié du XXe siècle. C’est par l’intermédiaire de son ami Pierre
Michaut que Gary fit porter son manuscrit chez Gallimard. L’auteur, Emile Ajar, était censé habiter
au Brésil. Seul Robert Gallimard fut mis dans la confidence et le livre subit l’épreuve du Comité
de lecture, qui le refusa. Gary fit porter son manuscrit au Mercure de France, dirigé par Simone
Gallimard. Cette filiale des Editions Gallimard accepta le texte, au prix de coupes importantes, dont
tout le chapitre final.
Le contenu comme la forme de cette œuvre avaient certes de quoi décontenancer. En
adoptant un nouveau pseudonyme, Gary renouvelait en même temps ses thèmes et sa manière.
DOSSIER DE PRESSE
9
QUELQUES PIECES DE L’EXPOSITION
Gros-Câlin, c’est le nom du python que Michel Cousin a adopté, et avec lequel il vit dans son modeste
deux-pièces. Cet employé solitaire est secrètement amoureux d’une de ses collègues, Melle Dreyfus,
amour non partagé. Peu à peu, Cousin sombre dans la désocialisation et la dépression : il en vient
à se prendre pour son serpent et termine dans la folie. Cette fable moderne, tragique et drôle, est
portée par une langue pleine de tournures volontairement fautives, d’à-peu-près, de calembours. Le
récit progresse à la façon du serpent qui s’enroule, à coup de digressions, de circonvolutions et de
retours en arrière. Gros-Câlin remporta dès sa sortie à l’automne 1974 un grand succès tant critique
que public, renforcé par le mystère entourant la personnalité de l’auteur. Gary avait réussi son coup,
et il jubilait intérieurement de voir les critiques qui l’avaient méprisé faire l’éloge d’Emile Ajar.
Malgré de nombreuses coupes, le manuscrit fut encore jugé trop long par l’éditeur et Gary
dut se résoudre à en supprimer toute la fin. Ce passage, qui représente pas moins de 71 feuillets
manuscrits, tenait pourtant à cœur au romancier. On y voit le héros du livre arrêté par la police,
enfermé au « Jardin d’Acclimatation », à savoir un hôpital psychiatrique, puis passer dans la
clandestinité pour finir par prononcer un long discours à la tribune d’un meeting humaniste. Dans
Vie et mort d’Emile Ajar, Gary reviendra sur cette suppression : « Ce dernier chapitre “écologique”
était à mes yeux important. Mais il est vrai que son côté “positif”, son côté “message”, lorsque mon
personnage, transformé en python, est porté à la tribune du meeting écologique, n’était pas dans
le ton du reste. Je souhaite donc que Gros-Câlin demeure tel qu’il est apparu pour la première fois
devant le public. Le chapitre “écologique” peut-être publié séparément ; si mon œuvre continue à
intéresser. » Le vœu de Gary n’a pas été exaucé, malgré le patient travail de transcription effectué
par son fils Diego Gary, et il est ici offert au public pour la première fois, constituant une des pièces
essentielles de cette réunion de manuscrits.
■ La Vie devant soi (1975)
Ce manuscrit autographe complet sur quatre cahiers registres noirs, du premier jet, est
le seul existant du chef-d’œuvre de Gary paru en 1975 sous le pseudonyme d’Emile Ajar. Des
pièces jointes et un tapuscrit de la traduction en anglais complètent ce document exceptionnel, qui
présente d’importantes variantes par rapport au texte publié. La Vie devant soi connut un immense
succès public, et le film qui en fut tiré quelques années plus tard avec Simone Signoret acheva
d’inscrire cette œuvre parmi les plus populaires de la littérature de la fin du XXe siècle. La Vie devant
soi raconte l’histoire de Momo, jeune garçon arabe, recueilli à Belleville par Madame Rosa, une
ancienne prostituée juive qui a été déportée à Auschwitz. Autour de ce couple improbable gravite
toute une galerie de personnages plus hauts en couleur et attachants les uns que les autres : N’Da
Amédée, proxénète, le docteur Katz, vieux médecin juif, Mme Lola, travesti et ancien champion de
boxe ou encore M. Hamil, le marchand de tapis aveugle. Avec une tendresse, une humanité et un
humour constants, Gary fait évoluer tous ces êtres pathétiques et émouvants dans le décor du Paris
DOSSIER DE PRESSE
10
QUELQUES PIECES DE L’EXPOSITION
populaire. La grande réussite du livre, c’est l’usage virtuose fait par Gary du langage parlé. Il tord la
syntaxe de façon très subtile et a des trouvailles langagières d’une drôlerie irrésistible, si bien que
le livre est tout entier porté par sa musique propre. C’est en avril 1975, en une semaine, que, dans
un véritable état de fièvre, Gary rédigea ces centaines de feuillets. L’étude de cet extraordinaire
manuscrit permet de percevoir l’excitation qui l’animait. Son écriture pressée, bousculée, semble
suivre avec peine son inspiration. On notera que sur les innombrables corrections qui émaillent ces
pages, il y a très peu de repentirs. Gary ne revient pas sur son texte à tête reposée, mais, dans
l’instant même de l’écriture, biffe un mot ou un passage et enchaîne aussitôt.
■ Clair de femme (1977)
Cet ensemble comprend les différentes versions manuscrites du roman de Romain Gary,
Clair de femme, initialement intitulé Paso doble (Gary ne décida du titre définitif de son roman
qu’une fois rédigée la dernière version. Glissé entre les pages de son ultime manuscrit, on découvre
un demi-feuillet sur lequel l’auteur a envisagé trois autres titres possibles, tous biffés : Au clair, Au
clair de femme et Eclair de femme). Costa Gavras, réalisateur jusqu’ici marqué par une œuvre
essentiellement politique, adapta pour le cinéma Clair de femme en 1979 et choisit, pour les rôles
principaux de Michel et de Lydia, Yves Montand et Romy Schneider (avec laquelle Romain Gary
avait eu une discrète liaison).
Romain Gary entreprend la rédaction de Clair de femme au printemps 1976, peu après la
parution au Mercure de France de Pseudo, son troisième roman signé Ajar. Au même moment ont
lieu les premières projections privées de l’adaptation cinématographique de La Vie devant soi, un
autre roman publié sous pseudonyme et distingué par le prix Goncourt. Dans le nouveau livre qu’il
achèvera à la fin de l’été, il rend hommage au couple « … une notion essentielle, fondamentale,
rudimentaire […] un homme qui vit une femme ; une femme qui vit un homme. »
Ce texte émouvant raconte l’histoire d’un homme, Michel, dont la femme, atteinte d’une
leucémie, lui demande avant de se suicider de prolonger leur amour dans une relation avec une
autre femme. « La plus cruelle façon de m’oublier, ce serait de ne plus aimer ». Michel fait alors la
connaissance de Lydia, aussi désespérée que lui, dont la petite fille est morte dans un accident de
voiture et dont le mari, Alain, rescapé, est devenu aphasique. Tous deux en quête d’assistance dans
leurs malheurs respectifs, Michel et Lydia se rapprochent, mais échoueront dans leur relation, parce
qu’« il ne suffit pas d’être malheureux séparément pour être heureux ensemble ». L’auteur sait aussi
ciseler des dialogues paradoxaux qui constituent une des ses marques de fabrique et éloignent de
la banalité cette évocation tragique de couples en perdition : « Il me semble que si je ne t’avais pas
connu, j’aurais passé ma vie à te haïr - C’est justement pourquoi tu vois tant de gens haineux. Tu
vois plein de gens qui haïssent tous ceux qu’ils n’ont pas rencontrés. C’est même ce qu’on appelle
l’amitié entre les peuples ».
DOSSIER DE PRESSE
11
VISUELS POUR LA PRESSE
1
Ces visuels peuvent être obtenus en haute résolution après inscription sur le site
www.museedeslettres.fr, rubrique presse. Seul leur usage dans le strict cadre de la promotion de l’exposition du Musée des lettres et manuscrits est autorisé jusqu’à la fin de cette dernière le 21 février 2011.
Pour toute demande complémentaire merci de vous adresser à Gaëlle Cueff - [email protected]
Romain Gary (1975)
© Jeanloup Sieff/Agence Vu
Romain Gary (1972)
Photo Jacques Robert (mai 1972) /
© Editions Gallimard.
DOSSIER DE PRESSE
12
VISUELS POUR LA PRESSE
2
L’étiquette du dossier enfermant ce manuscrit de 1934, roman
totalement inédit de Romain Gary, porte cette indication, écrite
de la main de l’auteur un an avant son suicide :
« Ce manuscrit de mon premier roman ne doit pas être publié.
Il peut être ouvert [illisible]. Romain Gary. 16 XII 79 ».
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
La Geste grimaçante
Ce roman policier inachevé, resté inédit, a très certainement été
écrit au cours de l’année 1969.
Le feuillet présenté est un brouillon préparatoire : Gary établit la
liste de ses personnages qui sévissent en Haïti. Des mafieux,
des agents américains et le dictateur haïtien « Papa Doc ».
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
Le Charlatan
Feuillet dactylographié de l’ouvrage La Promesse de l’aube,
numéroté « II », sur lequel figure, en photocopie, la mention
manuscrite autographe de Romain Gary ; « Chapitre inédit en
français de La Promesse de l’aube ». Gary a corrigé le numéro
de chapitre en « XXII ».
C’est dans la version anglaise sous le titre Promise at dawn
qu’apparaît ce chapitre, qui ne figure pas dans la version originale
française. Ce n’est qu’en 1980, dans la version définitive du
livre (Gallimard, collection Folio) que le chapitre sera intégré à
l’œuvre.
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
La Promesse de l’aube
DOSSIER DE PRESSE
13
VISUELS POUR LA PRESSE
3
Lettre autographe signée de Romain Gary, datée : Nice, 14 avril
1938. Belle lettre d’amour à Christel Kryland : « Souviens-toi que
si je t’aime comme femme c’est aussi parce que je t’aime comme
homme […] c’est par cette volonté dure d’arriver à être un homme
que tu seras toujours au sens le plus beau de ce mot, ma femme
[…] Et rien, jamais, ni le mariage, ni l’amour ni les enfants ne te
rapprocheront de moi plus que ça : l’effort d’être un homme. »
Superbe déclaration à celle qui fut une de ses premières passions
et inspira le personnage de Brigitte dans la Promesse de l’aube.
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
Lettre à Christel Kryland
Lettre autographe signée de Romain Gary à André Malraux, 21
novembre [1956]. Gary est alors diplomate en Bolivie « Viens de
lire pour la 1ère fois Mémoires d’Outre-Tombe - je déclare que
Chateaubriand est un con, le plus grand de notre littérature, et un
imbécile par-dessus le marché. »
Le 7 décembre de cette même année, Romain Gary va obtenir son
premier Prix Goncourt avec Les Racines du ciel.
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
Lettre à Malraux
Dans cet article inédit non daté mais postérieur à 1969 puisqu’il
y évoque le roman Un peu de Soleil dans l’eau froide, paru cette
même année, Gary prend la défense de Françoise Sagan. Rendant
brièvement hommage aux qualités littéraires de l’auteur de Bonjour
Tristesse : « je ne connais pas d’œuvre plus fidèle à une certaine
réalité sociale», Gary place l’essentiel de sa défense sur le terrain
politique. Il semble répondre à une polémique au terme de laquelle
il aurait été reproché à Sagan de ne pas renier, dans ses écrits, le
milieu aisé et bourgeois dont elle était issue.
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
Faut-il assassiner Françoise Sagan ?
DOSSIER DE PRESSE
14
VISUELS POUR LA PRESSE
4
Feuillet manuscrit relatif au livre d’entretiens de Romain Gary, La
Nuit sera calme, publié en 1974. L’ouvrage se présente sous la
forme d’un entretien avec son ami d’enfance, François Bondy, que
Gary réussit à convaincre de participer à ce projet. Mais l’écrivain
avait l’intention de rédiger ce nouvel ouvrage seul et n’en soumit
la version dactylographiée et déjà finalisée à son ami que pour la
forme. Les feuillets, d’une écriture pressée, sont numérotés selon un
ordre à usage personnel, qui ne sera pas respecté dans la version
publiée et de nombreux passages resteront inédits ou paraîtront
rédigés différemment.
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
La Nuit sera calme
Tout un ensemble de pages, manuscrits et dactylographies
corrigés, qui présentent la genèse, le développement et
l’aboutissement de l’écriture d’une œuvre. Tous les brouillons
préparatoires exposés permettent d’assister à la mise en route
du processus d’écriture.
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
Les Enchanteurs
Les 16 premières pages de ce cahier manuscrit de premier jet
relatent la rencontre du narrateur et d’une certaine Anna Maria.
Il n’est pas question de python mais d’une relation amoureuse
et érotique. Ce passage s’interrompt brusquement et Gary
reprend au feutre, avec cette indication portée à l’encre orange :
« Changer le nom du python à : Gros Câlin » (le reptile s’appelait
précédemment Simon). Dès lors, le canevas et les scènes
sont en place. Toute la version de premier jet regorge ainsi de
passages finalement écartés non par manque d’intérêt mais
pour resserrer la structure du roman.
© Coll. privée/Musée des lettres
et manuscrits, Paris
Gros-Câlin
DOSSIER DE PRESSE
15
VISUELS POUR LA PRESSE
5
Ensemble regroupant les différentes versions manuscrites du
roman de Romain Gary, Clair de femme, paru en 1977.
L’analyse des différentes versions montre aussi que Gary
semblait avoir dès le début de la rédaction une idée très précise
de l’intrigue et des personnages qui devaient figurer dans la
version finale. Ainsi, on note finalement peu de différences entre
le texte jeté d’une écriture pressée sur les premiers cahiers de
brouillon et la version publiée.
« La vérité est peut-être que je n’existe pas. Ce qui existe, ce qui commencera à exister peut-être
un jour, si j’ai beaucoup de chance, ce sont mes livres, quelques romans, une œuvre, si j’ose
employer ce mot. Tout le reste, c’est de la littérature. »
Romain Gary in « L’Affaire homme »
© Coll. privée/Musée des lettres et manuscrits, Paris
Clair de femme
DOSSIER DE PRESSE
16
RENSEIGNEMENTS PRATIQUES
Adresse du musée :
222, boulevard Saint-Germain 75007 Paris
Téléphone : 01 42 22 48 48
Site web : www.museedeslettres.fr
Accès :
Métro : Rue du Bac, Sèvres-Babylone, Saint-Germain des Prés
RER C : Musée d’Orsay
Bus : 63, 68, 69, 83, 84, 94
Tarifs et horaires d’ouverture :
Du mardi au dimanche de 10h à 19h, nocturne le jeudi jusqu’à 21h30
Entrée : 7 €, tarif réduit : 5 €
Gratuit pour les moins de 12 ans
Direction du musée :
Fondateur : Gérard Lhéritier
Conservateur : Pascal Fulacher
Commissaire de l’exposition : Estelle Gaudry, assistée de Sébastien Zaaf
Responsable de la communication :
Gaëlle Cueff – 3, rue des Lilas 75019 Paris
email : [email protected] – Tél. : 01 42 41 64 98
Autour de l’exposition :
Ouvrage-catalogue :
Lectures de Gary
23 x 28,7 cm / 288 pages / 160 illustrations / 35 €
Mise en vente : 5 janvier 2011
Coédition :
Gallimard - Musée des lettres et manuscrits Le Magazine Littéraire
Visites :
Visite guidée sur réservation (droit d’entrée + 5 €)
6
DOSSIER DE PRESSE
17
LES PARTENAIRES MEDIA DE L’EXPOSITION