emilie et adrien - Cours de theatre Paris

Transcription

emilie et adrien - Cours de theatre Paris
EMILIE ET ADRIEN
D’après Xavier DURRINGER
PERSONNAGES : ADRIEN, EMILIE
ADRIEN
Avant je riais, de tout et de rien.
Avant je chantais, du lever au coucher. Avant je dansais, n'importe où.
Avant je pouvais parler des heures de n'importe quoi à n'importe qui J'avais la soif pour ça, j'allais vers
l'amour comme un tir tendu, une balle de mitrailleuse, une balle perdue, j'attendais que ça touche quelque
part, quelqu'un. Et voilà, ça t'a touché. Avant, j'étais comme un poisson carnassier là, les dents longues
pointues, l'écaille dure, je remontais le courant, et d'un coup de queue je te faisais vaciller tout ça. Je savais
nager dans le milieu, dans le plein milieu, je savais trancher, fendre, foutre, je fendais, tu vois, un
carnassier, je chopais les petits poissons, d'un coup de dent, d'un coup de mâchoire, tchac ! …
EMILIE : Et tu vas me dire que tu faisais du sur place tranquille tout au fond, tout au fond, dans la fraîche,
dans les zones d'ombre, là où tout est plat, tranquille; et que tu te foutais le ventre sur le sable, et tu restais
là des heures à épouser le fond… C’est ça ?
ADRIEN : Oui… Avant toi, je sentais que ça tournoyait autour de moi, les petites là, la croupe en l'air
qu'attendaient que moi, que moi. Oh, tu écoutes pas ?… Tu fais semblant, mais t’écoutes pas ! Je sens
bien que t'es pas la !
EMILIE- Si, si. . .
ADRIEN- - Dis pas « si-si », t'es pas là, t'es ailleurs, où t'es ?
EMILIE.- Je suis là.
ADRIEN.—Où ?
EMILIE.- Là, là avec toi, en face de toi !
ADRIEN.- C'est pas la peine.
EMILIE.- Qu'est-ce qu'est pas la peine ?
ADRIEN.- Que je me casse le cul, t’écoutes pas !
EMILIE.—Mais si, je t’écoute !
ADRIEN.- Non...
EMILIE.- Merde!
ADRIEN. Quoi ?
EMILIE.- Adrien, merde! Je t’écoute ! Je voulais juste pas t’interrompre ! Le respect, tu connais ? Je te
respecte ! Et tu sais pourquoi je te respecte ? Parce que j’ai toujours envie de toi ! Ton regard, tes mains,
ton corps, ca m’érotise ! Mais tu t’en fous. Je te crains, tu m’impressionnes, je te respecte et j’ai envie de
toi ! Je t’aime voila ! Mais toi, tu parles comme tu te branles : T’es TOUT SEUL !...
ADRIEN.- Ah ouais...(seul) C'est ça, tire-toi !. . . Ça revient au même de toute façon. Faut que j'arrête... Faut
que j'arrête de parler.. .Ça sert à rien de toute façon de parler. J'ai bien vu tout à l'heure que je les saoulais,
saoulés de mots ils étaient, Je voyais bien, mais je pouvais pas m'arrêter comme ça, d'un coup, ça non je
pouvais pas… J'espère qu'elle, elle, elle a compris, c'est le principal, faut que j'arrête putain de parler et de
penser, je pense trop, y a trop de choses là-dedans, ça bouillonne faut pas croire, quand on me voit comme
ça, du premier coup, on se dit, qu'est-ce qu'on se dit quand on me voit pour la première fois ? On se dit...
J'aimerais bien savoir, putain ce qu'on se dit... Faut que j'arrête, merde, faut que j'arrête de parler.