capital - Université Paris-Sud

Comptabilité environnementale
et gouvernance
Jacques Richard
Professeur à l’Université Paris
Dauphine
Expert comptable, Membre de l’ANC
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Exergue
• Nous n’avons jamais eu un vrai
capitalisme
• La notion de capital n’a jamais été
vraiment prise au sérieux
• La nature et l’homme n’ont pas de prix
mais leur maintien a un coût
• Il faut un capitalisme anticapitaliste
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Introduction
• Contexte de triple crise
• Développement de tentatives de
refondation de l’entreprise/gouvernance
• Focus sur le thème droit des sociétés
versus droit de l’entreprise : thèses de
Robé (1999),notamment
• Curieusement, très peu de choses sur le
droit comptable
• D’où cette intervention en sept thèses
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1ère thèse (Générale)
• Préalable à toute réforme de la gouvernance: une
redéfinition du droit comptable/fiscal
• Ce droit fixe les règles du jeu capitaliste avec:
• Une définition précise des concepts clefs de capital et
de profit
• L’ imposition d’une rationalité comptable conforme au
capitalisme/salariat (déductibilité d’un salaire
contractuel)
• La fameuse « Rentabilitätsrechnung » que Max Weber
avait identifié comme la marque du capitalisme (ratio)
• Eloge de Max Weber (lectures de Schär et de Leitner)
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2ème thèse : la question du droit
des sociétés est secondaire
• Le droit des Sociétés (DS) ne définit pas les concepts
de profit et de capital
– Il se contente de dire que la société fait des profits ou des
pertes (art 1832 Code civil)
• Benéfice:gain pécuniaire ou matériel « qui ajoute à la fortune
des associés » arrêt Manigot CourCass 1/3/1914
• Il laisse donc une marge de manœuvre a priori sur le
terrain des définitions de la performance
• En matière de pouvoir le DS peut être souple: cf
cogestion allemande, cf SCOP
• Le DS a une portée limitée par rapport au DC
• La réforme essentielle, pour « changer le monde »,
c’est donc celle du DC
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3 ème thèse : le DC fixe des
règles de conservation du capital
• Le monde capitaliste s’est imposé un droit comptable qui garantit
(en principe) la conservation du capital financier
• Deux concepts fondamentaux :l’amortissement et le capital à
conserver
• Les actifs doivent être systématiquement amortis (plan) et les
charges correspondantes passées en diminution du profit
• Un fonds d’amortissement doit être créé à l’actif en relation avec le
capital à conserver qui figure au passif
• Toute distribution de dividendes en infraction à ces règles est
réputée fictive
• Extraordinaire et puissante institution comptable fixée dans
quasiment tous les pays par des lois commerciales et pénales (délit
DD fictifs)
• Le capitaliste est obligé de conserver son capital!
• Institution peu connue, sauf des spécialistes.
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NB Eloge des comptables (un
terme honni (cf TV)
• Contrairement à la plupart des économistes les
comptables ont compris que le capital n’est pas un actif
mais un passif
• La plupart des économistes sont des monistes
(confusion actif.capital) qui en sont restés de plus
souvent à des concepts de revenu brut (PIB)
• Le comptable est un dualiste ( distinction ressources
à amortir et ressource à conserver ou capital) et un
partisan du net
• L’amortissement industriel: inventé par des praticiens
comptables :le cheval de LODER (1610)
• Exception notable chez les économistes:les physiocrates
mais ils n’ont pas découvert le concept d’amortissement
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4ème thèse :les règles actuelles
de conservation du capital sont
obsolètes
• Le capitalisme traditionnel ne propose qu’un
seul objet à conserver systématiquement: le
capital financier (bâtiments machines brevets
etc)
• Dans le contexte de la triple crise actuelle cette
règle limitée est totalement obsolète
• Il faut désormais conserver aussi les capitaux
naturel ou humain ou disparaître (suicide
collectif dû à l’impéritie des gouvernants)
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5ème thèse: la solution est la
triple ligne d’amortissement
(TLA) et le triple capital (TC)
• Au passif du bilan trois capitaux à conserver: humain ,naturel et
financier (TC)
• Tous ces capitaux sont inscrits à leur coût de remplacement (voir
infra)
• A l’actif figurent les ressources correspondantes qui vont être
amorties systématiquement au fur et à mesure de leur usure
• D’où au CR une TLA qui vient en moins du profit distribuable
• Les fonds correspondants aux trois lignes sont bloqués et dédiés à
l’actif (pas de compensation; pas d’utilisation autre que le maintien
spécifique)
• Ils assurent en principe la conservation séparée des trois capitaux
• Pour des détails voir Richard (2012) et Rambaud et Richard (2013)
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Exemple relatif au capital naturel
• Un exploitant agricole pollue une rivière (algues vertes)
• Il fait faire une expertise qui révèle un excès de nitrates au-delà des
normes acceptables pour le maintien des fonctions du sol
• Le coût de la réparation des fonctions environnementales par une
méthode agricole différente (agriculture sous couvert) est de 100000
• Ce coût de remplacement (d’une méthode par une autre) sera inscrit
au passif (en tant que capital naturel à conserver) et à l’actif en tant
que ressource sol)
• Il donnera lieu à amortissement sur la période de restauration de
l’équilibre prévue.
• Aucune distribution de dividendes en principe avant la rectification
de la situation
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Remarque fondamentale
• Le coût de remplacement des fonctions environnementales n’a rien
à voir avec les fameuses externalités internalisées par les
tenants de l’approche néo classique
– NB on peut démontrer que l’internalisation des externalités mène
sauf miracle à la catastrophe finale.
• Il ne s’agit pas de donner un prix aux dommages (algues vertes) ou
aux services rendus par la nature pour compenser leur dégradation
• Il ne s’agit pas non plus de chiffrer des réparations effectives
(nettoiement)
• Il s’agit de faire cesser les causes des pollutions et de rétablir
des fonctions environnementales critiques
• D’où une comptabilité en coût (historique ou de remplacement) et
non en juste valeur
• NB Les normes IFRS sont dangereuses et obsolètes pour la cause
environnementale et même pour le capitalisme financier
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Remarque concernant les
ressources non renouvelables
(RNR)
• Elles sont inscrites au passif à leur coût de
remplacement en terme d’énergie renouvelable (
ex solaire)
• Elles sont amorties à l’actif au fur et à mesure de
l’extraction des RNR
• Le fonds d’amortissement est utilisé pour investir
dans des énergies renouvelables
• On aurait dû faire cela depuis 40 ans au moins
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Exemple relatif au capital
humain
• En principe (version « pure » du modèle) les coûts passés cumulés
de formation des personnes travaillant dans l’entreprise sont inscrits
en tant que capital à conserver au passif et en tant que ressources à
l’actif
• Les ressources à l’actif sont amorties en fonction de leur
obsolescence programmée
• NB Plus généralement une ligne amortissement des « ressources
humaines » enregistrera ce que l’OIT appelle un « revenu décent »
et les coûts de suppression des dégradations exceptionnelles (dues
au stress par ex).
• NB rien à voir avec le capital immatériel des partisans des
ressources humaines: pour ceux-ci aucun concept de capital au
passif et évaluation en prix actualisé des services rendus et non en
coût de remplacement de la formation du capital
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6ème thèse :vers un nouveau
concept de profit et de
performance
• Avec la TLA un nouveau concept de profit
(environnemental) apparaît après maintien des trois
capitaux
• Il peut être consommé sans porter atteinte à l’intégrité
des trois principaux types de capitaux étudiés ici
• La question de la responsabilité sociale et de
l’entrepreneuriat social est « réglée » dans le cadre
d’une modification du droit comptable
• NB: ce profit n’a rien à voir avec la fameuse TBL dont le
flou masque en fait la prédominance de la performance
financière sur la performance environnementale
(stratégie Win Win Win)
• NB Prise en compte systématique de l’inflation
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Le nouveau compte de résultat
• Ventes
• Moins consommations de matières et de
services
• Moins amortissement des ressources naturelles
• Moins amortissement des ressources humaines
• Moins amortissement des ressources
financières
• = profit distribuable
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Applicabilité
• Un système comptable similaire (dans l’esprit)
est déjà mis en œuvre dans certaines
entreprises agricoles qui font du bio selon la
méthode des indicateurs IDEA (Zahm et alii)
• Cf la thèse de Y.Altukhova sur la Bergerie de
Rambouillet (2013)
• NB Ces petites entreprises agricoles sont bien
en avance en matière de RSE sur les grandes
multinationales
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7ème thèse :vers une nouvelle
gouvernance des firmes
• Prise en considération de trois capitaux au
passif
• Ces capitaux et eux seuls ont tous des droits au
pouvoir dans la firme
• NB la thèse du risque supporté uniquement par
le capital financier actionnarial traditionnel est
obsolète
• Deux orientations sont possibles :le capitalisme
environnemental pur et le capitalisme
environnemental co-gestionnaire
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L’hypothèse du capitalisme
environnemental pur
• Calquer le modèle capitaliste traditionnel
• Attribuer un nombre de voix aux représentants des trois
catégories de capital proportionnel à l’importance du
capital (le capital financier devient « ridicule » par
rapport au capital humain notamment)
• NB Pour le capital naturel représentation par des
scientifiques et des ONG spécialisées dans la protection
de la nature
• NB Pour le capital financier mise sur un pied d’égalité de
tous les types de capitaux (Publics/Privés; prêtés ou
non)
• Profit distribué en principe en fonction des apports
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Limites du modèle du
capitalisme environnemental pur
• Pourquoi distribuer le pouvoir en fonction
de la chance d’une accumulation
antérieure?
• Pourquoi un pouvoir qui dépendrait de la
plus ou moins grande cherté des études ?
• A qui et pourquoi distribuer des dividendes
en vertu du capital naturel?
• Complexité du suivi des mouvements de
capitaux
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L’hypothèse du capitaliste
environnemental co-gestionnaire
• La co-gestion du type allemand étendue à trois capitaux
avec des corrections pour tenir compte des problèmes
de l’expérience outre Rhin
• Des pouvoirs égaux aux trois groupes de représentants
des trois types de capital
• Un homme une voix (cf capitalisme familial)
• Système préférable par sa simplicité (pas d’obligation de
faire figurer les capitaux humain et naturel au bilan) et sa
« justice » sociale (un homme une voix)
• Disparition du régime du salariat
• Délibérations collectives sur les stratégies et la
distribution du profit
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L’extension du système cogestionnaire à l’échelle
macroéconomique
• Un résultat national compris comme une somme de
profits environnementaux
• L’existence d’un fonds de réserve nationale prélevé sur
les profits environnementaux pour parer aux faillites et à
la rémunération décente des humains sans travail
• Une protection des capitaux efficace (pas comme celle
des « gadgets » du type internalisation des externalités
et même des quotas et des taxes environnementales)
• Une fiscalité nouvelle basée sur un résultat
environnemental
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Conclusion (avec Aristote)
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La fin (enfin) de la chrématistique
L’homme et la nature peuvent « respirer »
L’oikos est systématiquement préservé
Démocratie dans l’entreprise
Maintien d’un marché mais un marché sous contrainte
d’humanisme
• Un vrai capitalisme (réhabilitation du terme capital) cf
capital santé
• Bien sûr ce schéma ne plaira pas à tous les privilégiés
(en argent et pouvoir) du système capitaliste actuel (un
faux capitalisme)
• Lutte pour imposer de nouvelles idées
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Exeat
Il faut penser le changement et non pas
changer le pansement (F.B)
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