Appropriation de l`espace et expérience de consommation : le cas
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Appropriation de l`espace et expérience de consommation : le cas
Session 6 - 49 Appropriation de l’espace et expérience de consommation : le cas des rassemblements de joueurs en réseau Candy KOLENC ATER IAE de Lille - EREM LEM UMR CNRS 8179 [email protected] Résumé Cet article, fondé sur une approche exploratoire inspiré de la « grounded theory » propose une investigation des processus d’appropriation de l’environnement physique dans le cadre des expériences de consommation, représentées par les rassemblements de joueurs en réseau. Les principaux résultats soulignent qu’au-delà des processus d’appropriation de base, les individus développent, à mesure de la participation à des expériences successives, des stratégies complexes d’anticipation, d’adaptation et d’appropriation, destinées à maximiser la qualité de l’expérience vécue. Dans une perspective managériale, il s’agit d’appréhender les risques et les sources d’insatisfaction liées à la participation de manière à y pallier par des actions opérationnelles. Abstract This article, based on an exploratory approach inspired of the «grounded theory" investigates the appropriation processes of the physical environment in the context of the consumption experiences, represented by the gatherings of network video gamers. The main results shows that beyond the basic processes of appropriation, the individuals develop, during the participation in successive experiences, complex strategies of anticipation, adaptation and appropriation, in order to maximize the quality of the lived experience. From a managerial point of view, risks and sources of dissatisfaction related to the participation are apprehended so as to minimize them by operational actions. Session 6 - 49 Appropriation de l’espace et expérience de consommation : le cas des rassemblements de joueurs en réseau Introduction Ce travail de recherche propose de mettre l’accent sur l’appropriation de l’espace dans le contexte de l’expérience des rassemblements de joueurs en réseau (les LAN pour Local Area Network), du point de vue du participant. Il s’agit, en ce sens, d’appréhender la problématique de l’impact de l’antériorité (c'est-à-dire, des expérience passées) sur les processus d’appropriation mis en place par les acteurs. Se posent alors des questions relatives aux modalités d’apprentissage des stratégies d’adaptation, destinées à maximiser la qualité de l’expérience vécue par les participants. Le développement de cette recherche suit un schéma classique. Après la présentation du cadre conceptuel, les principales caractéristiques de la méthodologie sont détaillées avant d’exposer puis de discuter les résultats. Cadre conceptuel de la recherche Si le concept d’appropriation a abondamment été étudié dans le contexte du magasinage et des expériences d’achat (Aubert-Gamet 1996 ; Bonnin 2000, 2002, 2003, 2006), l’appropriation d’une expérience de consommation a fait l’objet d’une attention moindre. Parmi les travaux de recherche fournissant des éléments clefs de l’appropriation de l’expérience, Ladwein (2002), souligne le rôle fondamental de la composante praxéologique dans le contexte de la consommation d’un hôtel club. Plus généralement, force est de constater que la manière dont les individus se représentent les éléments de la situation et la situation globale de consommation est étroitement liée : 1) au positionnement de soi (Bongkoo et Shafer 2002), 2) aux comportements (les interactions individus-objets et individus-situation, les pratiques – Holt 1995), et 3) à la satisfaction (l’extraction de valeur – Aurier, Evrard et N’Goala 2004). Par conséquent, avant d’aborder la notion d’appropriation dans la perspective d’une expérience de consommation, il s’agit de revenir brièvement sur les conceptions de la situation de l’expérience. 1. La situation de consommation et la définition de l’environnement de l’expérience Concernant les situations de consommation, deux courants théoriques se distinguent sans toutefois s’opposer. Il s’agit de la situation objective (Belk, 1974, 1975) et de la situation objective (Lutz et Kakkar 1975). Ces différentes approches permettent d’appréhender l’environnement de l’expérience en catégorisant les différents éléments le constituant. Après l’exposition des principales caractéristiques de ces conceptions, leur complémentarité sera soulignée dans le cadre des approches marketing. 1.1. La situation objective La situation objective se compose de « l’ensemble des facteurs particuliers à un moment et à un endroit d’observation, qui ne provient pas de la connaissance d’attributs personnels (interindividuels) ou des attributs du stimulus (alternatives de choix), et qui ont un effet démontrable et systématique sur le comportement actuel » (Belk 1974, p. 157). Elle peut être définie à partir de cinq composantes (Belk 1975) : 1) l’environnement physique (les caractéristiques les plus apparentes), 2) l’environnement social (les caractéristiques, les rôles et - les interactions entre - des individus), 3) la perspective temporelle (la spécification en unités de temps ou mesurée par rapport à des évènements passés ou futurs), 4) la définition des tâches (les rôles d’acheteur ou de consommateur assumés) et 5) les états antécédents (les états émotionnels ou conditions momentanées précédant immédiatement l’expérience). Session 6 - 50 Cependant, bien qu’elle soit facilement opérationnalisable, cette approche a fait l’objet de nombreuses critiques (Lemoine 2000). Pour Barker et Wicker (1975), définir les états antécédents revient à introduire une confusion entre les caractéristiques de la situation et de l’individu. Conjointement, ils insistent sur la prise en compte d’éléments plus spécifiques en fonction des activités de consommation, tels que les conditions climatiques dans le cadre du golf. Enfin, Lutz et Kakkar (1975) proposent de considérer la subjectivité de la situation. 1.2. La situation subjective Lutz et Kakkar (1975, p. 441) définissent la « situation psychologique subjective » comme relevant des « réponses internes de l’individu à – ou à l’interprétation de – tous les facteurs particuliers à un endroit et à un moment d’observation qui ne sont pas des caractéristiques individuelles ou environnementales stables, et qui ont un effet systématique et démontrable sur les processus psychologiques de l’individu et/ou sur le comportement apparent ». Ils proposent de recourir aux travaux de la psychologie environnementale, qui considèrent que les réponses émotionnelles médiatisent l’impact de la situation sur le comportement individuel. En ce sens, l’échelle PAD de Mehrabian et Russell (1974) permet de décrire les réponses émotionnelles individuelles selon trois dimensions : 1) le plaisir (Pleasure), les états émotionnels, 2) l’excitation (Arousal), les stimulations sensorielles (Berlyne 1960) et 3) la domination (Dominance), le sentiment de contrôle sur l’environnement. Ces trois dimensions, susceptibles de se combiner, composent les réponses émotionnelles des individus à l’environnement. 1.3. La complémentarité des approches objectives et subjectives de la situation Comme Lutz et Kakkar (1975) le précisent, leur approche ne s’oppose pas à celle de Belk (1975) mais se propose de la compléter. Belk (1976) reconnaît d’ailleurs la complémentarité des perspectives objectives et subjectives de la situation. Les travaux plus récents de Lemoine (2000, 2003) confirment également la pertinence d’une approche « hybride » de la situation. Cependant, dans une perspective plus globale, il semble délicat de discriminer les réponses émotionnelles liées spécifiquement à la situation de celles relatives au vécu de l’expérience de consommation (Havlena et Holbrook 1986 ; Havlena, Holbrook et Lehman 1989). Par conséquent, il s’agit de revenir sur les processus d’immersion et d’appropriation de l’environnement dans le cadre des activités de consommation, afin d’envisager les stratégies comportementales individuelles destinées à la maximisation de la qualité de l’expérience vécue. 2. Immersion, état de flux, appropriation et composante praxéologique de l’expérience de consommation De manière générale, les approches expérientielles soulignent la variété des états émotionnels individuels dans le contexte de la consommation (Holbrook et Hirschmann 1982). D’un point de vue plus managérial, le marketing expérientiel vise à la proposition de dispositifs de production permettant aux individus de vivre des expériences gratifiantes (Pine et Gilmore 1999 ; Schmitt 1999 ; Hetzel 2002 ; Filser 2002 ; Petr 2002 ; Dupuis et Lejean Savreux 2004 ; Puhl, Bourgeon-Renault et Bouchet 2005 ; Ochs et Rémy 2006 ; Carù et Cova 2003). Néanmoins, quels que soient les leviers opérationnels proposés, il n’en demeure pas moins que la participation du consommateur, qu’elle soit active ou passive/réactive (Pine et Gilmore 1999, Holbrook 1999), plus ou moins intense (Bitner et ali. 1997), est une condition indispensable à la production de l’expérience. En ce sens, l’individu devient un élément du dispositif et co-produit voire co-crée l’expérience (Firat, Dholakia et Venkatesh 1995 ; Carton 2007). Or, il s’avère que les interactions individu-objet et individu-situation sont à l’origine de processus d’immersion, d’appropriation, et de la mise en œuvre d’actions (composante Session 6 - 51 praxéologique) susceptibles de générer des états de flux (flow experience - Csikszentmihalyi 1990 ; Hoffman et Nowak 1996), engendrant une forte valeur de consommation pour le participant. Ces processus, sources de nombreux travaux de recherche, méritent néanmoins d’être distingués. En effet, ils ne recouvrent pas forcément des notions identiques. Précisons toutefois qu’il ne s’agit pas ici de proposer une synthèse exhaustive des conceptions théoriques, mais d’en clarifier les principaux éléments de définition afin de les mobiliser de manière appropriée. 2.1. Immersion et état de flux L’immersion signifie l’action de plonger ou d’être plongé partiellement ou totalement dans l’eau, et plus généralement dans une atmosphère quelconque1. En marketing, ce concept particulièrement mobilisé par les approches expérientielles, souligne la quête d’immersion dans les expériences des consommateurs contemporains (Firat et Schultz 2001, p.113). Les individus chercheraient alors à s’évader de leur quotidien, en « plongeant » dans des expériences de consommation proposant des cadres enclavés, sécurisés, et thématisés (Firat et Dholakia 1998 ; Kozinets et ali. 2002 ; Goulding, Shankar et Elliott 2002). Conjointement, les études portant sur les environnements virtuels - disposant d’un potentiel immersif important ont révélé l’existence de moments d’expériences optimales (Hoffman et Nowak 1996 ; Douglas et Hargadon 2001) aux caractéristiques similaires aux états de flux (flow) au sens de Csikszentmihalyi (1990). L’état de flux, est pour Csikszentmihalyi (1990), un état mental, un état de conscience fortement focalisé ne demandant presque pas d’effort. L’individu est alors totalement immergé dans ce qu’il fait et il est possible de dénommer les principales caractéristiques de cet état (Csikszentmihalyi 1997, p. 9) : - la poursuite de buts précis, - la rétroaction immédiate de ses propres actions, - un équilibre entre niveau de défi et niveau de compétence, - la fusion de l’action et de la conscience, - l’exclusion des distractions de la conscience, - l’absence de la peur de l’échec, - la disparition de la conscience de soi, - la distorsion de la perception du temps, - l’activité devient une fin en soi, elle est gratifiante et l’action ne demande pas d’efforts. La totalité de ces « symptômes » n’est pas indispensable à l’expérience de flux cependant, ces éléments permettent de décrire les principales caractéristiques des expériences de flux. Plus globalement, « l’état de flux est le résultat d’une concentration intense sur le présent, qui implique que nous nous déchargions des peurs habituelles qui engendrent anxiété et dépression dans la vie quotidienne » (Csikszentmihalyi 1997, p. 10). Les approches expérientielles combinent fréquemment les notions d’immersion et d’état de flux. En ce sens, certaines activités de consommation sont susceptibles de provoquer des états de flux, l’optimum de l’expérience de consommation, par l’immersion de l’individu dans une atmosphère ou un environnement particulier (Schmitt 1999 ; Pine et Gilmore 1999 ; Hetzel 2002 ; Carù et Cova 2003). Cependant, l’accès à ces état de flux et plus généralement aux expériences de consommation, « n’est ni évident, ni systématique et requiert des compétences ou des aptitudes dont le consommateur ne dispose pas nécessairement » (Ladwein 2002, p. 61). Par conséquent, il est indispensable de considérer la composante praxéologique de l’expérience et les processus d’appropriation qui en découlent, de manière à envisager les 1 Source : Trésor de la Langue Française (http://atilf.atilf.fr/tlf.htm). Session 6 - 52 moyens et les méthodes mises en œuvre par les individus pour maximiser la qualité de l’expérience vécue. 2.2. L’appropriation La définition de l’appropriation renvoie à deux notions différentes : l’adaptation et la propriété. D’une part, l’appropriation désigne l’adaptation de quelque chose à un usage déterminé, et peut, dans ce cadre, être synonyme d’ajustement. D’autre part, l’appropriation signifie l’action de prendre possession de quelque chose, d’en faire sa propriété (Trésor de la Langue Française). En marketing et en comportement du consommateur, ce concept particulièrement mobilisé dans le cas des services et de la distribution, s’attache à expliciter comment les individus utilisent, manipulent et agissent sur des objets physiques, des lieux, des idées (Aubert-Gamet 1996 ; Filser 2002 ; Bonnin 2002, 2003, 2006 ; Ladwein 2002, 2003 ; Carù et Cova 2003, 2006). En psychologie environnementale, l’expérience du lieu repose sur les interactions entre l’individu et l’environnement (Moles et Rohmer 1982, De Certeau 1980, Fischer 1981). En ce sens, toute action sur l’environnement (ou réaction à l’environnement, Moles 1976) s’inscrit dans un processus d’appropriation (Moles et Rohmer 1977). Pour Fischer (1992, p. 91), l’appropriation est « un processus psychologique fondamental d’action et d’intervention sur un espace pour le transformer et le personnaliser : ce système d’emprise englobe les formes et les types d’intervention sur l’espace qui se traduisent en relation de possession et d’attachement », composé de quatre principaux types d’opérations : - Le regard : l’opération d’appropriation la plus basique, mais susceptible de générer des émotions, notamment esthétiques et d’éveiller la curiosité (Berlyne 1960). - L’exploration : l’individu repère le territoire à partir d’informations diverses, des produits ou d’activités pour développer des « points d’ancrage et de contrôle (balises) » (Carù et Cova 2003, p.50), et étend ainsi son champ d’action dans l’espace. - L’aménagement : l’individu inscrit un caractère personnel dans toute ou partie de l’expérience, il délimite alors des frontières (physiques ou symboliques), dont la manifestation la plus observable est le « marquage » de l’espace (Ladwein 2002). - La nidification : l’individu crée un chez-soi, « fait son nid » en isolant une partie familière de l’expérience, et constitue un espace stable sur lequel il exerce un contrôle. L’individu, pour Carù et Cova (2003), à la suite de ces processus d’appropriation se trouverait en situation d’immersion, ce qui favoriserait l’état de flux (Csikszentmihalyi 1990, 1997) et permettrait de prolonger la durée de la consommation par un état d’excitation ou de stimulation optimal (Berlyne 1960 ; Holbrook et Gardner 1993). Il apparaît donc que les notions d’immersion, d’appropriation et d’état de flux sont étroitement liées dans le cadre des expériences de consommation. L’état de flux semble en effet conditionné par les processus d’appropriation concomitants à l’immersion. Or, les individus ne disposent pas forcément des compétences ou des aptitudes nécessaires à l’accès à l’expérience, et/ou, peuvent manquer de connaissances concernant l’objet ou la situation de consommation (Ladwein, 2002). Ce potentiel manque de connaissances invite naturellement à s’interroger sur les processus d’apprentissage et d’acquisition des connaissances par les consommateurs. Cette recherche poursuit donc deux principaux objectifs : 1) appréhender les modalités de participation à une expérience de consommation sous l’angle des processus d’appropriation, et, 2) envisager les processus d’apprentissage sous-jacents à la mise en œuvre des processus d’appropriation de l’environnement physique. Session 6 - 53 Approche empirique Compte tenu des objectifs poursuivis, il a été question de s’appuyer sur une étude exploratoire de type qualitatif, inspirée de la théorie enracinée ou « grounded theory » (Glaser et Strauss 1967; Goulding 1998, 2002). Cette approche s’inscrit dans la continuité de travaux déjà entrepris auprès des utilisateurs de jeu vidéo en réseau (Ladwein et Kolenc 2006, Kolenc et Ladwein 2006), mais propose un focus particulier sur l’appropriation de l’espace de consommation dans l’élaboration de l’expérience (Ladwein 2002, 2003). Il a ainsi été question de combiner des techniques d’enquêtes par récits de pratique (Rouleau 2003) par des observations participantes et non participantes. Après une description des modalités du recueil des informations, la démarche analytique est présentée. 1. Choix du terrain et recueil des données Face à la démocratisation du sport électronique ou e sport, les pratiques compétitives du jeu vidéo en réseau se multiplient et offrent de nouvelles perspectives de développements pour les éditeurs et les développeurs vidéoludiques, dans un marché déjà très porteur2. Dans ce cadre, il apparaît que certains joueurs en réseau participent à des rassemblements (les LAN – Pine et Gilmore 1999), réunissant parfois des centaines d’individus. A ce titre, cette étude repose sur une démarche exploratoire qualitative, combinant des techniques d’enquêtes par récits biographiques (21 entretiens – Rouleau, 2003) et par observation (4 séances d’observations participantes et 1 séance d’observation non participantes – Groleau 2003 ; Dion et Ladwein 2005). 1.1. Les récits biographiques Les récits biographiques, à l’instar d’entretiens individuels semi directifs, sont menés à l’aide d’un guide d’entretien ne comportant qu’un nombre très restreint de thèmes à aborder, aucune question n’étant rédigée. Il s’agit de proposer un thème de réflexion (la pratique du jeu vidéo en réseau), servant d’inducteur au déroulement de l’entretien, puis, d’encourager les répondants à s’exprimer à propos de leurs différentes expériences, tout en préservant une grande liberté de discours. Au total, 21 entretiens individuels ont été réalisés entre janvier 2004 et janvier 2005 auprès de divers utilisateurs de jeux en réseau, qui participent ou ont déjà participé à des rassemblements en LAN (Annexe A1 – Présentation de l’échantillon). Les individus interrogés ont été recrutés de diverses manières : par convenance (entourage, recrutements sur des sites et des forums Internet, recrutement direct en LAN) ou encore de proche en proche. 1.2. Les séances d’observation Les observations participantes et non participantes réalisées reposent sur des techniques d’observations flottantes globales et non standardisées (Groleau 2003 ; Dion et Ladwein 2005). Pour réaliser les enquêtes, le chercheur a pris contact avec les organisateurs des LAN (via les sites ou les salons de discussion sur Internet) afin d’obtenir l’autorisation de mener des investigations. Les organisateurs n’ont manifesté à cet effet, aucune résistance. Les séances d’observation se sont déroulées au cours des rassemblements suivants : - BTF 7 - Arras (62) du 5 décembre 2003, 18H au 7 décembre 20H : 150 personnes - BTF 8 - Arras (62) du 23 janvier 2004 18H au 25 janvier 20H: 200 personnes - Nexen 15 - Wattrelos (59) du 27 février 2004 17H au 29 février 19H : 400 personnes - Baua 5 - Béthune (62) du 2 avril 2004 17H30 au 4 avril 18H : 200 personnes (observation non participante) 2 Par exemple, voir http://www.afjv.com/press0701/070115_chiffres_marche_jeux_video_us_2006.htm Session 6 - 54 - Team Attack Arena 5 - Cambrai (59) du 21 octobre 2005 18H au 23 octobre 2005 19H : 200 personnes Outre les notes d’observation, environ 250 photographies ont été réalisées au cours de ces rassemblements. Au-delà de l’éclairage supplémentaire qu’elles ont apporté à l’étude, elles ont permis de repérer a posteriori des éléments qui auraient pu échapper in situ, mais aussi d’illustrer certains aspects de l’expérience du jeu vidéo en réseau (Badot, 2000). La photographie a été privilégiée par rapport au film vidéo dans la mesure où de nombreux participants prennent des photographies lors des regroupements. Cela a permis d’éviter une présence trop visible ou remarquée par les joueurs. Les informations obtenues par le biais des techniques d’observations ont été examinées conjointement aux entretiens qualitatifs et ont enrichi l’analyse globale. De plus, elles ont fourni un éclairage supplémentaire, propice à la vérification et à la confirmation des conclusions de l’enquête par entretiens. 2. Traitements et analyses des données Après transcription des entretiens individuels, un corpus de 21 témoignages composés d’environ 220 000 mots, représentant un peu plus de 18 200 lignes (interventions de l’enquêteur incluses) a été obtenu. Le seuil de saturation sémantique a été atteint dès le 13ème entretien, dans la mesure où les entretiens suivants n’ont apporté que peu nouvelles informations, ou anecdotiques. Les photographies ont quant à elle été analysées selon une démarche standardisée (Collier et Collier 1967 ; Dion et Ladwein 2005). Pour analyser l’ensemble du corpus de données, une démarche interprétative a été privilégiée, car elle offre un cadre théorique favorable aux investigations qualitatives et à l’utilisation de différentes méthodes d’enquêtes (observation et entretiens), susceptible de circonscrire de manière plus exhaustive les différents aspects du phénomène étudié (Holbrook et O’Shaughnessy 1988). La démarche générale d’enquête et d’analyse suivie dans cette approche relève de processus itératifs permanents entre la collecte, le codage et l’analyse des données. Conformément aux méthodes inspirées de la grounded theory, l’analyse comprend trois principales étapes (Glaser et Strauss 1967 ; Miles et Huberman 1984 ; Goulding 1998, 2002) : 1) lecture flottante et codage manuel ouvert dit « in vivo » (codage ouvert), 2) confrontation du codage ouvert à la littérature, catégorisation et constructions théoriques (codage axial) et 3) identification des catégories centrales et formulations théoriques (codage sélectif). Enfin, les techniques d’analyses de contenu ont permis de réaliser un codage par thème et d’identifier a posteriori 4 grandes catégories : 1) L’équipement du participant : les objets nécessaires à la participation aux rassemblements. 2) L’appropriation de l’environnement physique : les modalités de base de l’appropriation de l’espace dans le cadre des rassemblements 3) L’adaptation aux contraintes du rassemblement : la manière dont les participants mettent en œuvre des stratégies d’appropriation plus complexes, destinées à maximiser leur confort. 4) L’anticipation des problèmes techniques : le rôle de l’antériorité dans la préparation d’une future expérience. Ces quatre catégories seront traitées selon deux axes majeurs : 1) les modalités de participation et l’appropriation de l’espace (équipement du participant et appropriation de l’environnement physique), et, 2) les stratégies d’adaptation aux contraintes des rassemblements et la maximisation de la qualité de l’expérience (adaptation aux contraintes du rassemblement et anticipation des problèmes techniques). Session 6 - 55 Résultats : des modalités de participation aux stratégies de maximisation de la qualité l’expérience : appropriation de l’espace et expériences vidéoludiques en LAN L’enquête réalisée a révélé l’importance de la composante praxéologique de l’expérience vidéoludique en réseau. Il apparaît en effet que participer à ce type de rassemblements ne s’improvise pas, et que les individus développent une diversité de stratégies adaptatives destinées à s’approprier l’espace et à maximiser la qualité de l’expérience. L’approche mobilisée a ainsi permis d’identifier quatre principales catégories : 1) équipement du participant, 2) processus d’appropriation de l’environnement physique, 3) stratégies d’adaptation aux contraintes et 4), anticipation des problèmes techniques. Les analyses amènent à constater que l’antériorité (la participation à des expériences successives) semble, dans ce cadre, représenter un paramètre essentiel dans le déroulement et la maximisation de la qualité de l’expérience. En ce sens, plus l’individu a accumulé d’expériences passées, plus il développe de stratégies d’adaptation et d’anticipation des contraintes praxéologiques lors d’une nouvelle expérience. Il acquiert alors des aptitudes lui permettant d’optimiser sa satisfaction, en réduisant les sources et les risques potentiels d’insatisfaction. Il apparaît en effet que la participation aux LAN nécessite l’acquisition de connaissances spécifiques. Ces connaissances concernent les modalités de participation aux rassemblements, ainsi que les stratégies individuelles mises en place pour s’approprier l’environnement physique de l’expérience. 1. Modalités de participation aux rassemblements en LAN et appropriation de l’espace Pour participer à un rassemblement de joueurs en réseau, il s’agit d’accéder à l’information, c’est-à-dire, d’être informé de l’organisation d’un(e) LAN. Les individus ont généralement accès à ces informations soit, par le biais du réseau Internet (sites Internet, forums de discussion, messageries instantanées, pratiques vidéoludiques), soit par le bouche-à-oreille. Outre ces informations, l’enquête révèle une forte composante praxéologique, qui concerne à la fois l’équipement nécessaire à la participation et les méthodes d’appropriation de l’environnement physique. 1.1. L’équipement du « Laneur3 » La participation à une LAN nécessite fondamentalement le transport d’un équipement informatique. Celui-ci est en effet indispensable à la pratique vidéoludique. Chaque participant, doit au minimum disposer des éléments suivants : 1) matériel : une unité centrale, un moniteur, un clavier, une souris, un casque audio, les câbles d’alimentation et une multiprise, un câble pour se connecter au réseau (RJ-45 droit) ; 2) logiciel : un système d’exploitation, des logiciels de jeu vidéo en réseau et un anti-virus, voire un pare-feu (photo 1). L’oubli ou le non fonctionnement d’un de ces éléments rend toute pratique vidéoludique impossible ou quasi. Précisons qu’à ce jour, la plupart des associations organisatrices rappellent via leurs sites Internet l’équipement requis pour la participation. L’équipement informatique (matériel et logiciel) représente un élément essentiel et indissociable de l’activité vidéoludique en réseau. Cependant, par les caractéristiques environnementales (physiques, temporelles et sociales) des rassemblements en LAN, la participation requiert généralement, en plus de l’équipement informatique, un équipement de camping, les LAN « officielles » (organisées par des associations) durant plusieurs jours et se déroulant généralement dans des salles communales. Cette forme de camping est différente du camping « traditionnel » dans la mesure où il s’agit de camper « en intérieur », sur le lieu du 3 L’expression « Laneur », utilisée par certains individus interrogés, renvoie ici à l’équipement spécifique des participants aux rassemblements de joueurs en réseau, comparable à un équipement de campeur. Session 6 - 56 rassemblement. Les participants s’équipent en conséquence de matériel destiné à séjourner plusieurs jours sur place (photo 2). Photographie 1.Transport du matériel nécessaire à la participation au LAN (TAA 5, Cambrai) L’équipement de camping des participants aux rassemblements en LAN est composé de matériel destiné au couchage (sacs de couchage, matelas, couvertures, oreillers…), de boissons et de nourriture. Dans ce cadre, apparaît la notion d’appropriation de l’environnement physique, qui est dans ce contexte, un espace partagé simultanément par plusieurs participants. Photographie 2. L’équipement de camping (TAA 5, Cambrai) 1.2. L’appropriation de l’environnement physique Compte tenu de l’équipement nécessaire à la participation aux regroupements, il est question non seulement de s’approprier un espace personnel de jeu, mais aussi un espace personnel de couchage. Le déroulement de l’expérience des rassemblements en LAN permet d’observer les méthodes mises en œuvre par les participants pour s’approprier l’environnement physique. La Session 6 - 57 photo 3 illustre le marquage des espaces personnels de jeu. En pratique, dès leur arrivée sur le lieu de la LAN, les participants occupent les tables libres en y positionnant une marque de présence. L’unité centrale ou le moniteur représentent à cet égard les instruments les plus usités pour effectuer ce marquage de territoire. En effet, en tant qu’objets personnels, leur manipulation par d’autres individus serait perçue comme une violation de la sphère privée. « Les conventions sociales n’autorisant pas les conquêtes sauvages, toute place marquée devient une place acquise » (Ladwein 2002, p.7) pour la durée de la participation. Photographie 3. Marquage des tables (BTF 8, Arras) Cependant, les tables (et chaises associées à chaque place) ne représentent pas les uniques espaces et objets de l’environnement physique appropriables par les participants. En effet, le sol, si possible à proximité de la place acquise, représente également un espace « à conquérir » où pourront être entreposés divers objets personnels. Cet espace au sol est également utilisé pour la préparation d’un espace personnel de couchage (photo 4), renvoyant à des opérations de nidification. Certains participants s’approprient même d’autres objets de l’espace public non utilisés (en particulier d’autres chaises et/ou tables non marqués) de manière à augmenter leur confort (photo 5). L’espace approprié peut enfin être utilisé à des fins de stockage eu/ou d’entreposage des effets personnels (photo 6). Le déroulement des rassemblements en LAN révèle donc divers processus comportementaux destinés à s’approprier l’environnement physique. Les participants utilisent en effet, diverses opérations d’aménagement (marquage) et de nidification (personnalisation) au sein des espaces publics partagés. Cependant, force est de constater que ces connaissances procédurales ne peuvent s’acquérir que par la participation à des expériences successives de rassemblements. Session 6 - 58 Photographie 4. Marquage et appropriation du sol (BTF 8, Arras) Photographie 5. Appropriation des objets non marqués de l’espace public (BTF 8, Arras) La participation à rassemblement en LAN nécessite donc de multiples connaissances spécifiques. Elles sont principalement relatives aux modalités de participation à l’expérience et aux modalités d’appropriation de l’espace public partagé. Par ailleurs, les observations ont amené à constater que certains individus développent des stratégies d’adaptation plus complexes dans le cadre des expériences de LAN. 2. Stratégies d’adaptation aux conditions des rassemblements et maximisation de la qualité de l’expérience Comme cela a été souligné, en participant à divers rassemblements en LAN, les individus sont susceptibles d’acquérir des connaissances leur permettant d’anticiper les futures expériences. Par conséquent, ils développent et mettent en place des stratégies destinées principalement à s’adapter aux conditions environnementales des LAN, et à parer aux éventuels dysfonctionnements de l’équipement matériel, dans le but de maximiser la qualité de l’expérience vécue. Session 6 - 59 Photographie 6. Appropriation et stockage des effets personnels (BTF 7, Arras) 2.1. Adaptation aux contraintes du séjour en LAN Les rassemblements en LAN, par leurs caractéristiques environnementales, sont sources d’inconfort. «C’est les gros inconvénients de la LAN, tu dors comme un clochard, la plupart du temps. Enfin, bon, sauf si tu… t’accommodes ou si t’as des techniques heu, spécifiques, quoi, mais autrement heu… C’est… l’inconfort…heu… […] T’as faim, ben…tu te retrouves comme un guerrier, faut que tu chasses ta nourriture, si y’a pas de buvette, quoi, si y’a rien… Faut vraiment que t’ailles en ville, tout…que tu luttes heu, si t’as une voiture, tu prends la voiture… Si t’as pas de voiture, là, c’est encore pire, quoi, parce que t’es obligé de…faire des plans avec des potes et tout…Vas-y, tu veux pas aller en ville, patati, quoi » [E18, M, 27 ans, en concubinage, BAC+2, technicien] Les individus ayant déjà participé à ce type d’expériences, sont alors susceptibles d’anticiper les besoins survenant pendant la manifestation. Ils chercheront par conséquent à palier aux éventuelles sources d’ennui ou d’inconfort, en se munissant de divers objets destinés à séjourner sur place pendant plusieurs jours (3 jours et 2 nuits en général). Ces objets sont donc destinés comme cela a été souligné, d’une part, à dormir (sacs de couchage, couettes et matelas en tout genre) et d’autre part, à manger et à boire (biscuits sucrés et salés, bonbons, gâteaux, boissons alcoolisées ou non, etc. – photo 7). Certains participants améliorent leur confort en personnalisant leur espace de couchage, et prévoient, par exemple, plusieurs couvertures. Ce type d’amélioration révèle des stratégies plus complexes, combinant des processus d’anticipation avant l’expérience et d’appropriation de l’espace pendant l’expérience, renvoyant à nouveau à des opérations de nidification (photo 8). Session 6 - 60 Photographie 7. L’anticipation des besoins (TAA 5, Cambrai) Photographie 8. Appropriation de l’espace et opérations de nidification (BTF8, Arras) La participation à différentes expériences de rassemblement en LAN confronte donc les joueurs en réseau à des situations dans lesquelles le confort est rudimentaire. Face à ces conditions d’expériences, les participants sont susceptibles de développer des stratégies destinées à améliorer leur confort durant l’expérience de LAN. L’anticipation et l’amélioration des contraintes du séjour constituent le premier aspect de la maximisation de la qualité des expériences de LAN. Le second aspect de cette maximisation concerne quant à lui, plus spécifiquement, l’anticipation des éventuels problèmes techniques. 2.2. Anticipation des problèmes techniques Le matériel informatique, indispensable aux pratiques vidéoludiques en LAN, n’est pas infaillible. Les problèmes techniques peuvent être la conséquence d’un disfonctionnement de l’équipement (matériel et logiciel) soit lié au dispositif expérientiel mis en place par les associations organisatrices, soit lié à l’équipement des participants. « Mais entre temps, on a fait une LAN, parce qu’on avait vu sur un site web qui avait eu une LAN à Rouen, 150 personnes. Bah c’était déjà pas mal comme première Session 6 - 61 LAN. C’était tellement galère, c’était pannes de courant, organisation des tournois foireuse et tout, et les versions, nous on découvrait, fallait installer les patchs pour jouer avec les autres etc. La galère ! Une fois qu’on est au parfum, ça va mieux mais c’est tout un tas de choses à… » [E1, M, 26 ans, célibataire, BAC+2, technicien] « Ah, ouais, ouais, je crois que… j’avais pu jouer que deux heures à cette LAN là parce que je m’étais choppé un virus… Donc heu, voilà… J’ai vu les autres jouer mais… moi, je savais pas pourquoi ça marchait pas, et, j’ai trouvé deux heures avant la fin… (Rire) Voilà… Ca calme quand même » [E11, M, 21 ans, célibataire, BAC, employé] « Ma première grosse LAN, ça a été ça, quoi, j’ai… réinstallé ma machine heu, je pense 5 heures ou 6 heures d’affilée, quoi… Entre les coupures de jus, et les virus…qui me, qui me niquaient, je crois, sur heu… allez hop, on va dire, heu, sur heu, 25 ou 30 heures de LAN heu, j’étais amputé de 7 heures, quoi… Je bouillonnais à l’intérieur, mais bon, comme c’était ma première très grosse LAN, 200 personnes environ, 150-200 personnes environ… Je veux dire, j’étais aux anges quand même, quoi, parce que… parce que, ce que je faisais avant avec des potes à 3-4 dans une pièce, là, on était 150, quoi… C’est plus les mêmes mesures, quoi… » [E18, M, 27 ans, en concubinage, BAC+2, technicien] Les divers sites d’observation ont amené à constater que pour palier aux éventuels disfonctionnements et/ou oubli de matériel, il arrive que les organisateurs de LAN proposent des stands de vente de matériel informatique. Certains joueurs ayant déjà participé à ces types de rassemblement ont cependant connaissance des différents problèmes techniques pouvant survenir lors de l’expérience. Ils prévoient alors différents éléments en surplus pouvant se révéler forts utiles en cas de disfonctionnement de leur matériel informatique. Généralement, il s’agit de transporter des éléments supplémentaires : clavier ou souris, logiciels et programmes d’installation de système d’exploitation ou de jeu… Aussi, les individus participant fréquemment à ces expériences peuvent s’équiper d’un matériel plus adapté aux contraintes des LAN (tels que les transports). « Je me suis carrément aménagé le matériel qu’il faut pour… pour que ce soit un minimum contraignant. J’ai laissé un écran dans mon coffre. Un vieil écran heu… qui craint plus les transports. Heu… heu… prendre un PC transportable aussi, heu, un PC, enfin un shuttle… Et comme le PC transportable est très en vogue, enfin, très à la mode en ce moment, parce que ça se range dans une sacoche heu, comme un caméscope heu, même taille… je me ballade heu, voilà, sous, à la main quoi. Et puis, j’ai presque rien à ranger, j’ai tous mes câbles et tout dans la voiture, des fois, des fois, avec des potes, on l’appelle la LAN car (rire) » [E1, M, 26 ans, célibataire, BAC+2, technicien] Les rassemblements en LAN exposent également les participants aux risques de dégradations du matériel ou de vols, pour lesquels les organisateurs se dédouanent explicitement de toutes responsabilités dans les règlements. « La LAN, vous quittez votre ordinateur, y’en a un qui peut aller dessus, et vous volez votre ordinateur, le matériel que vous avez. Ca, c’est assez dangereux mais bon, en général y’a… Enfin, y’a pas… de vol. Mais bon…On se méfie quand même… » [E7, M, 29 ans, célibataire, BAC, ouvrier] « Et après, t’as le gros trucs, le gros phénomène avec heu… Tout ce qu s’ensuit, les files d’attentes au début, les badges, les t-shirts, les machins et ça prend heu perpette pour pouvoir s’installer heu… Au début, y’a personne heu, quand t’as un problème heu, forcément ça met cinq heures à être réglé, et puis, c’est pas […] T’as tout le temps, le danger, de te faire voler ton matériel quand tu l’abandonnes Session 6 - 62 un peu, c’est un peu stressant heu… y’a énormément de gens que tu connais pas… » [E6, M, 26 ans, célibataire, BAC+5, enseignant] Le second extrait d’entretien, illustre à la fois deux éléments : 1) plus le nombre de participants est élevé, plus les individus ressentent de l’insécurité ; 2) la participation à des expériences successives amène à nouer des relations avec d’autres joueurs déjà rencontrés lors de précédents rassemblements. Notons toutefois que le sentiment d’insécurité concernant les vols lors des rassemblements en LAN est rarement verbalisé. Sur l’ensemble des joueurs interrogés, seuls deux individus ont évoqué le risque de vol. Cela étant, les observations réalisées ont tout de même amené à constater que les participants adoptaient des stratégies comportementales destinés à minimiser ce risque. A l’occasion de ces rassemblements, les participant se déplacent fréquemment en groupes et/ou se retrouvent sur place. Par conséquent de nombreux participants se connaissent ou font connaissance via différentes situations (« voisins de table », rencontre lors d’une partie…). Ainsi, lorsque les participants s’éloignent de leur matériel ou quittent provisoirement le lieu de l’expérience, ils demandent à d’autres joueurs un service de surveillance. De manière similaire, de multiples échanges de biens et de services peuvent être réciproquement consentis entre participants (prêt de matériel ou de logiciels, aide à l’installation du participant, aide à la configuration de l’équipement informatique, partage de nourriture et/ou de boisson…). Ces stratégies révèlent non seulement des processus d’adaptation individuels, mais aussi collectifs. D’une part, elles sont destinées à minimiser les risques et les contraintes liées aux LAN, et donc à maximiser la qualité de l’expérience vécue. D’autre part, ces stratégies font partie de systèmes d’interdépendances stables, qui structurent les fondements du fonctionnement d’un groupe d’individus au sens d’Anzieu et Martin (1968). Les stratégies d’appropriation et d’adaptation utilisées par les participants soulignent la composante praxéologique des expériences de LAN. Or, il apparaît très nettement que l’observation et/ou l’imitation ne suffisent pas dans ce cas à acquérir ces connaissances. C’est en effet la participation à des expériences successives qui va être à l’origine de l’acquisition de connaissances procédurales, c'est-à-dire de compétences spécifiques à ces pratiques de consommation (Holt 1995). L’accroissement de la familiarité aux rassemblements en LAN semble ainsi s’accompagner de l’acquisition d’expertise (Alba et Hutchinson 1987). Les participants pourront alors utiliser leurs connaissances (déclaratives et procédurales) pour maximiser la qualité de l’expérience, en anticipant d’éventuels besoins et en réduisant les risques et les contraintes liés aux LAN. 3. Synthèse et conclusions des résultats de l’analyse L’enquête réalisée auprès des joueurs en réseau ayant déjà participé à des rassemblements en LAN a permis d’appréhender les processus d’appropriation mis en œuvre par les individus dans le cadre d’une expérience de consommation. D’une part, il a été question de définir les modalités de participation à l’expérience par le biais : 1) des éléments personnels nécessaires à la participation (comparables à des inputs clients dans le contexte des services) et, 2) des processus d’appropriation de base de l’environnement physique. D’autre part, les résultats ont amené à constater l’existence de stratégies d’adaptation destinées à maximiser la qualité de l’expérience vécue consistant en : 1) des stratégies d’adaptation aux contraintes environnementales et de processus complexes d’appropriation de l’espace et, 2) des stratégies d’anticipation des éventuels problèmes techniques, spécifiques aux activités vidéoludiques en réseau. En définitive, cette approche amène à formuler plusieurs constats globaux quant aux relations entre appropriation de l’environnement et expérience de consommation : Session 6 - 63 - - 1) Les représentations individuelles de la situation se modifient et se complexifient à mesure de la participation à des expériences successives. 2) La participation à une expérience est susceptible d’affecter les attentes (et plus généralement les expectations, Teas 1993 ; Buttle 1995) concernant les futures expériences, mais aussi être au fondement des processus d’apprentissage (Lave et Wenger 1991) 3) L’antériorité de la participation à des expériences passées semble affecter l’anticipation de futures expériences, et conduire les individus à mettre en œuvre des stratégies d’anticipation, d’adaptation et d’appropriation de manière à maximiser la qualité de l’expérience vécue. Apports théoriques, implications managériales, limites et voies de recherche A un niveau théorique, cet article s’inscrit dans les approches mettant en évidence l’importance de la composante praxéologique de l’expérience (Ladwein, 2002). Il souligne le rôle des stratégies (individuelles et collectives) mises en œuvre dans l’appropriation de l’environnement physique, et l’adaptation aux contraintes, dans l’optimisation de la qualité de - et donc de la maximisation de la satisfaction vis-à-vis de - l’expérience vécue. Dans ce cadre, il semblerait que le renouvellement des expériences puisse être à l’origine de la transformation voire de l’apparition de nouvelles sources de valeurs de consommation (Holbrook, 1999). En outre, l’acquisition des connaissances paraît fondamentalement soustendue par des processus d’apprentissage situé (Lave et Wenger 1991), dans la mesure où c’est la pratique, la participation aux expériences qui permet l’apprentissage. Cela peut contribuer pour l’individu, d’une part à renouveler les motivations de participation à l’expérience (Becker 1963 ; Ladwein et Kolenc 2006 ; Ladwein, Kolenc et Ouvry 2008), mais aussi, d’autre part, à anticiper les futures expériences en envisageant la personnalisation des modalités de participation, et donc au-delà de l’environnement physique, de s’approprier davantage l’expérience. D’un point de vue plus managérial, cette approche permet d’appréhender l’expérience comme une coproduction (Firat, Dholakia et Venkatesh 1995 ; Carton 2007) combinant différents types de participation (active/réactive, individuelle/collective). En ce sens, les participants les plus experts (présentant du moins le plus d’antériorité) semblent participer de manières plus actives et personnalisées au déroulement de l’expérience. Ainsi, la valeur de l’expérience (et la satisfaction) peut être décomposée en fonction des succès ou des échecs que les participants attribuent aux différents acteurs et/ou éléments de l’expérience. Par conséquent, il s’agit pour l’entreprise, que l’individu attribue les sources de satisfaction, mais pas les sources d’insatisfaction, à l’offre proposée. En ce sens, il est question pour les offreurs à l’origine du dispositif de production, d’appréhender et de palier aux sources potentielles d’insatisfaction quant à la qualité de l’expérience vécue : - 1) incombant à ou aux entreprise(s) organisant l’expérience : par exemple, les problèmes liés à l’organisation tels que l’accès à – ou le manque de repérages sur - un site physique ou virtuel, les attentes trop longues, l’absence de considération pour le participant. - 2) liés au comportement du ou des participants : en proposant par exemple, la disponibilité sur place des éléments indispensables à la participation, voire d’éléments augmentant le confort, l’accompagnement des novices (pour éviter un taux d’attrition important au cours des premières expériences – à l’instar des guides pour Carù et Cova 2006), une présence visible mais non intrusive des organisateurs de l’expérience. Dans le cadre des services, le modèle de la disconfirmation de la qualité, comporte trois résultats possibles : 1) l’insatisfaction (la qualité perçue est inférieure aux attentes), 2) la Session 6 - 64 satisfaction (adéquation entre qualité perçue et attentes) et 3) l’enchantement (la qualité perçue est supérieure aux attentes). Ces conceptions renvoient à la notion de seuil de tolérance, borné par une limite basse et une limite haute. La limite basse se réfère aux expectations adéquates (le niveau de performance que l’individu accepte) tandis que la limite haute se réfère aux expectations désirées (le niveau de performance que l’individu croit devoir être fourni par un excellent prestataire – Zeithaml, Berry et Parasuraman 1993). Appliqué au contexte de l’expérience de consommation, l’anticipation des sources d’insatisfaction incombant au producteur permettrait d’atteindre au minimum un état de satisfaction, c'est-àdire la limite basse du seuil de tolérance, tandis que l’anticipation des sources d’insatisfaction liés au comportement des participants permettrait d’atteindre la limite haute de ce seuil, en visant l’enchantement de l’individu. Plus globalement, il s’agit bien de faire vivre des expériences à la fois gratifiantes et mémorables aux consommateurs, approche qui s’inscrit dans le cadre du marketing expérientiel et du réenchantement de la consommation (Badot et Cova 2003). Il importe cependant de nuancer les résultats obtenus, notamment en ce qui concerne les limites méthodologiques de l’approche empirique. Le recrutement des interviewés s’est en effet déroulé par convenance ou de proche en proche. Conjointement, la structure de l’échantillon, composé essentiellement de jeunes hommes, n’avait pas vocation à une représentativité statistique. La stratégie d’échantillonnage était fondée sur un principe d’échantillonnage théorique (Schatzman et Strauss 1973), recherchant la saturation sémantique de manière à renforcer la catégorisation émergeante. Néanmoins, d’une part, les caractéristiques de l’échantillon sont conformes aux statistiques sociodémographiques de l’activité vidéoludique, et d’autre part, l’utilisation conjointe de différentes techniques de recueil de données, auprès de différents individus et sur différents sites d’observation concourt à la confirmation des résultats par triangulation (Miles et Huberman, 1984). Il convient également de préciser que, compte tenu de l’objet spécifique de l’approche (l’appropriation de l’environnement physique), ni les caractéristiques rituelles des rassemblements, ni la nature communautaire des groupes participant aux expériences vidéoludiques n’ont été développées. De même, il était ici question des rassemblements « officiels » ou publics, ce qui exclue les rassemblements organisés par des particuliers (le particulier devenant alors producteur). Enfin, l’approche adoptée dans cette recherche ne considère pas la question plus spécifique de l’appropriation des environnements virtuels simulés par les jeux vidéo en réseau. Ces différents aspects constituent ainsi de premières voies de recherche. Ce travail ouvre également d’autres pistes de réflexion, concernant en premier lieu, un suivi des participants selon une segmentation par rapport à l’antériorité des pratiques, dans le but notamment de comprendre les risques d’attrition, en particulier pour les novices. En second lieu, une approche plus spécifique des liens entre pratiques de consommation et valeurs de consommation en résultant dans le cadre des rassemblements pourrait permettre d’appréhender à la fois la constitution des buts de consommation et des motivations à renouveler l’expérience (Ladwein, Kolenc et Ouvry 2008). Session 6 - 65 Bibliographie Alba Joseph W. et Hutchinson Wesley J. (1987), « Dimensions of Consumer Expertise, Journal of Consumer Research », Vol. 13, n°4, pp. 411-454. Anzieu Didier et Martin Jean.-Yves (1968, [2007]), La dynamique des groupes restreints, PUF, collection "Quadrige", 10 e Ed, Paris. Aubert-Gamet Véronique (1996), Le design d’environnement dans les services : appropriation et détournement par le client, Thèse de Doctorat en Sciences de Gestion, Université de Droit, d’Economie et des Sciences d’Aix Marseille III. 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M M M M M M M F M M M M M M M M M M M M M 26 18 21 27 21 26 29 21 19 26 21 18 18 18 18 22 20 27 31 19 21 BAC+2 BAC BAC BAC+5 BAC+4 BAC+5 BAC BAC+3 BAC+2 BAC+5 BAC BAC BAC+1 BAC BAC+2 BAC+3 BAC+2 BAC+2 BAC+5 BAC+2 BAC+2 Technicien Lycéen Employé Cadre Etudiant Enseignant Ouvrier Etudiante Etudiant Employé Menuisier Etudiant Etudiant Etudiant Etudiant Etudiant Etudiant Technicien Cadre Etudiant Etudiant Célibataire Célibataire Célibataire Concubinage Célibataire Célibataire Célibataire Célibataire Célibataire Pacsé Célibataire Célibataire Célibataire Célibataire Célibataire Célibataire Célibataire Concubinage Célibataire Célibataire Célibataire Issy-Les-Moulineaux Sequedin Hersin-Coupigny Rosny-sous-Bois Hersin-Coupigny Lomme Lomme Labeuvrière Vendin-Les-Béthune Béthune Villeneuve d’Ascq Lens Beuvry Bernissart Tournai Saint Laurent Blangy Monchy au Bois Haubourdin Sin Le Noble Proville Bouvignies 92 59 62 93 62 59 59 62 62 62 59 62 62 Belgique Belgique 62 62 59 59 59 59 Médiane : 21 ans Durée entretien (en minutes) 105 90 60 30 45 130 90 20 20 75 65 40 70 70 75 100 65 100 75 35 40 Moyenne : 67 minutes Ecar-type : 29,7 minutes