CANCER DU SEIN ET GROSSESSE

Transcription

CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
CANCER DU SEIN
ET GROSSESSE
OPTIMISATIONS DANS LA PRISE EN
CHARGE DES CANCERS
GYNECOLOGIQUES
10 JANVIER 2015 CHRISTOPHE AMIEL
DEFINITIONS
Cancer du sein survenant pendant la gestation
Cancer du sein survenant dans l’année qui suit
l’accouchement
DEFINITIONS
Cancer du sein survenant pendant la gestation
Cancer du sein survenant dans l’année qui suit
l’accouchement
ANTAGONISME
CANCER-GROSSESSE?
Traiter au mieux la patiente avec des moyens adaptés :
interruption de grossesse, prématurité induite?
ßà
Préserver la santé du foetus : retarder le traitement
maternel?
CANCER DU SEIN ET
GROSSESSE
EPIDEMIOLOGIE
Même taux de fécondité qu’en 1973 (2,01) en France, mais l’âge moyen
à l’accouchement continue d’augmenter : >30 ans.
Ce sont les femmes de plus de 30 ans qui ont eu une progression de leur
fécondité, surtout après 35 ans.
Le taux de femmes de plus de 40 ans qui accouchent a doublé en 20 ans.
Le risque de survenue d’un cancer augmente avec l’âge ; concomitance
cancer-grossesse : 1/1000 à 2000 grossesses, au premier rang celui du
sein.
CANCER DU SEIN ET
GROSSESSE
PRONOSTICS
Du fait de l’ANTAGONISME cancer et grossesse, de ce qu’il
représente symboliquement (vie ßà mort), c’est une situation
toujours marquée très péjorativement et de mauvais pronostic vital
avec Interruption Médicale de Grossesse.
Pronostic fertilité : au moins 2 ans sans grossesse, 5 si RH+, et âge
trop avancé pour une grossesse ou les traitements on fait chuter la
réserve ovarienne.
CANCER DU SEIN ET
GROSSESSE
PRONOSTICS
Han SN et al, ESGO « Cancer in Pregnancy » Task Force. Cancer in pregnancy : a
survey of current clinical practice. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 2013.
Enquête en 2010 en Europe, attitude en cas de cancer pendant la grossesse : 1er
trimestre et au début du 2ème, 44% des centres préfèrent pratiquer une interruption de
grossesse avant de traiter ; en fin de 2ème et au 3ème trimestres, 58% optent pour un
accouchement prématuré à 34 SA pour traiter en post-partum.
37% pensent qu’aucune chimio ou radiothérapie ne peut être faite en per gravidique
par sécurité pour la santé du fœtus.
Ainsi, il y a manifestement une méconnaissance des effets des traitements sur le foetus
et des effets de la prématurité induite sur le nouveau-né, selon les cas, par les
obstétriciens ou les oncologues .
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
DIAGNOSTIC
Diagnostic difficile du fait de la congestion mammaire et l’asthénie. La
difficulté du diagnostic le retarde souvent.
Devant toute masse mammaire il est nécessaire de pratiquer une
échographie qui a les meilleures sensibilité et spécificité car la
mammographie est plus difficile à interpréter pendant la grossesse. (Si
celle-ci est pratiquée, il faut utiliser un tablier de protection abdominale
et commencer par un cliché en oblique, puis en cas d’image suspecte,
deux clichés en cranio-caudale et en profil pour exclure une tumeur
multicentrique ou bilatérale).
Si l’IRM est nécessaire, il ne faut pas utiliser de Gadolinium comme
produit de contraste, mais le gadobenate dimeglumine ou le gadoterate
meglumine.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
DIAGNOSTIC
Masse repérée biopsiée pour le diagnostic histologique.
Le plus souvent un cancer canalaire infiltrant, majoritairement avec une
métastase ganglionnaire et fréquemment avec des récepteurs négatifs
pour les estrogènes et la progestèrone et HER2neu positif (pathologiste
prévenu que la patiente est enceinte pour l’interprétation de ces tissus
prolifératifs)
En cas de signes inflammatoires sans masse palpable, un traitement
antibiotique doit être prescrit et en l’absence de disparition, une biopsie
permet d’exclure ou de confirmer le diagnostic de cancer inflammatoire.
Consultation oncogénétique
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
TRAITEMENT CHIRURGICAL
Il reste l’élément de base du traitement du cancer mammaire, même pendant la
gestation, pratiqué comme hors grossesse. En première intention, tumorectomie
associée au ganglion sentinelle ou à un curage axillaire.
Chirurgie délabrante et sanglante par l’hypervascularisation de la grossesse. Si
une reconstruction est nécessaire, il faut attendre le post-partum et la fin de tous
les traitements.
Une mastectomie peut être faite au 1er trimestre pour ne pas avoir à différer la
radiothérapie.
Surveillance cardiaque fœtale avant et après l’intervention. Une éventuelle
tocolyse est prescrite à partir de 24 semaines d’aménorrhée, essentiellement à
cause de la douleur et de l’anxiété tocogènes.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
CHIMIOTHERAPIE (1)
Il est de plus en plus établi que la chimiothérapie est possible en
pergravidique pour conserver un bon pronostic maternel tout en assurant
une absence de nuisance fœtale et néo-natale.
Il est admis de ne pas faire de chimiothérapie au 1er trimestre de la
grossesse pour éviter toute tératogénicité, les cures sont donc faites aux
2ème et 3ème trimestres, entre 14 et 35 SA.
Le placenta constitue une barrière variable selon l’agent car le passage
transplacentaire est fonction du type de molécule : les modèles animaux
révèlent un passage de 1 à 10% des anthracyclines, et 0,8 à 2,4% pour les
taxanes.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
CHIMIOTHERAPIE (2)
Loibl S et al. Treatment of breast cancer during pregnancy : an
observational study. Lancet 2012.
Une étude européenne sur 447 patientes de 2003 à 2011. Suites
maternelles et néo-natales des prises en charge avec un temps médian
de suivie de 31 mois. Le diagnostic a été fait au 2ème trimestre pour
43% et au 3ème pour 38%.
La majorité des cancers étaient des formes agressives : 76% étaient
des grades 3, 33% étaient triple négatifs et 58% des patientes avaient
une métastase ganglionnaire.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
CHIMIOTHERAPIE (3)
Loibl S et al. Treatment of breast cancer during pregnancy : an observational study.
Lancet 2012.
Chimiothérapie pour 89% des patientes : 48% pergravidique (surtout des stades T4),
41% après l’accouchement.
Plusieurs types de chimiothérapie prescrites pendant la gestation : 90% avec une
anthracycline (FAC ou FEC), 8% du cyclophosphamide avec du methotrexate et du
fluorouracile (CMF), 7% une taxane, 1% un sel de platine.
Etude la plus importante en nombre de patientes et elle semble autoriser, sans
dommage fœtal, l’utilisation de la majorité des chimiothérapies habituellement
utilisées en dehors de la grossesse.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
CHIMIOTHERAPIE ET THERAPIES
CIBLEES (4)
Loibl S et al. Treatment of breast cancer during pregnancy : an observational
study. Lancet 2012.
Aucune patiente n’a eu d’irradiation, de trastuzumab ni de traitement
hormonal pendant la gestation.
Le trastuzumab entraîne le plus souvent des dommages fœtal ou néonatal à
type de diminution de la fraction d’éjection ventriculaire, d’oligoamnios ou
d’anamnios dus à une insuffisance rénale, avec ses conséquences
d’hypoplasie pulmonaire. En effet, HER2neu est exprimé par l’épithélium
rénal fœtal.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
RADIOTHERAPIE
Les effets sur le nouveau-né peuvent être très graves mais des précautions
sont possibles pour éviter une irradiation fœtale et les conséquences telles
que retard mental et malformations.
Si le fœtus reçoit une dose estimée < 100 mGy, il n’y a pas d’effet délétère à
craindre.
En théorie, retarder la radiothérapie après le post-partum peut augmenter le
risque de récidive locale si le cancer est découvert au premier trimestre
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
RADIOTHERAPIE
La dose de radiations reçues par le fœtus augmente avec l’âge de la gestation,
le fond utérin se rapprochant du sein en cours de grossesse.
En pratique, si elle est théoriquement possible au premier trimestre, elle est
rarement réalisée, pour éviter qu’on lui impute un avortement spontané ; et
au troisième trimestre, le risque d’irradiation foetale est trop important.
Il est donc théoriquement possible de réaliser une radiothérapie au deuxième
trimestre, pour une patiente qui n’aurait pas d’indication de chimiothérapie
après une chirurgie conservatrice.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
SOUTIEN PSYCHOLOGIQUE
Evidemment indispensable pendant la grossesse et tout le traitement
de la maladie, la concurrence entre ces deux concepts de mort et de
vie étant très anxiogène et morbide.
L’anxiété générée peut perturber grandement le bien-être obstétrical
et provoquer des contractions ; elle peut aussi empêcher un lien mèreenfant devenu douloureux.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
SUIVI OBSTETRICAL
Suivi échographique mensuel pour surveiller la croissance fœtale, pendant la
radiothérapie et la chimiothérapie, en plus du dépistage morphologique des
malformations avant tout traitement.
En cas de risque important d’accouchement prématuré, maturation fœtale
par corticothérapie impérative.
Dans l’idéal, l’accouchement doit survenir au moins 3 semaines après la
dernière cure de chimiothérapie. C’est pourquoi la dernière cure doit avoir
lieu au plus tard à 35 semaines d’aménorrhée, pour éviter des problèmes
hématologiques maternel et fœtal (anémie, hémorragie, infection).
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
SUIVI OBSTETRICAL
L’accouchement peut être effectuée par voie basse, hormis une contreindication liée à la maladie comme une métastase cérébrale.
Le placenta doit être examiné en histologie, à la recherche de métastase
placentaire. Plusieurs cas de métastases ont été rapportés avec des leucémies
ou des mélanomes. Le seul cas de métastase chez le nouveau-né décrite était
avec un mélanome maternel.
L’allaitement est contre-indiqué après une chimiothérapie, du fait de la
présence des semaines après les cures, de substances actives lipophiles dans le
lait maternel.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
DEVENIRS MATERNEL ET
NEO-NATAL (1)
Loibl S et al. Treatment of breast cancer during pregnancy : an observational study.
Lancet 2012.
Une étude européenne sur 447 patientes de 2003 à 2011, suites maternelles et néonatales des prises en charge. 50% des enfants nés prématurément, i.e. avant 37 SA,
contre 5 à 10% dans la population générale.
Dans le groupe chimiothérapie après accouchement, c’est pour débuter celle-ci que la
naissance a été provoquée prématurément. Les complications néo-natales sont liées à
la prématurité dans cette étude. Les enfants ayant reçu une chimiothérapie pendant la
gestation sont nés hypotrophes mais sans complication propre à la chimiothérapie. Les
patientes ayant reçu une chimiothérapie pendant la gestation avaient un stade plus
avancé. Le taux de survie n’est pas différent dans les 2 groupes avec chimiothérapie
avant ou après l’accouchement.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
DEVENIRS MATERNEL ET
NEO-NATAL (2)
Loibl S et al. Treatment of breast cancer during pregnancy : an observational study.
Lancet 2012.
Il y avait plus de tumeurs grade 3, triple négative ou HER2 positive que
comparativement à des patientes de moins de 41 ans dans cette étude.
Le pronostic des femmes ayant été traitées pour un cancer du sein pendant une
grossesse est le même qu’en dehors de la grossesse.
C’est l’âge, le stade de la maladie avec ses caractéristiques biologiques, qui font le
pronostic.
CANCER DU SEIN ET GROSSESSE
DEVENIRS MATERNEL ET
NEO-NATAL (3)
Amant F et al. Cancer during pregnancy : a case-control analysis of mental
development and cardiac functioning of 38 children prenatally exposed to
chemotherapy. ESMO 2014.
38 enfants exposés à une chimiothérapie pendant la vie intra-utérine (moyenne de 4
cures pour cancers du sein et hématologiques).
Evaluation développement mental par test de Bayley (18 et 42 mois) et cardiaque par
ECG et échocardiographie.
Pas de différence pour MDI (mental developmental index), pas de corrélation avec le
nombre de cures ; seule corrélation : MDI-âge gestationnel de naissance.
Dimensions et fonctions cardiaques dans les normes.
CANCER DU SEIN ET
GROSSESSE
CONCLUSION
Sur la base d’informations erronées, trop de patientes enceintes chez lesquelles un cancer
du sein vient d’être découvert, sont amenées à demander une interruption de grossesse,
ou ne sont prises en charge qu’après un accouchement prématuré induit.
Il est primordial de pouvoir traiter une patiente atteinte d’un cancer du sein découvert
pendant sa grossesse, avec les thérapeutiques adaptées, pour qu’elle ait une survie
théorique comparable aux patientes non enceintes.
En quelques années il est recommandé de provoquer la naissance à partir de 32-34 SA,
aux recommandations actuelles d’attendre au-delà de 37 SA. Quand les patientes ayant
un cancer du sein pendant la grossesse sont traitées, elles ont le même pronostic que les
femmes ayant les mêmes paramètres sauf la grossesse.
Ce n’est pas la grossesse qui altère le pronostic du cancer du sein mais le type de tumeur à
cet âge.
CANCER DU SEIN ET
GROSSESSE
MERCI