le prêt de main d`œuvre depuis la loi du 28 juillet 2011
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le prêt de main d`œuvre depuis la loi du 28 juillet 2011
DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 PAGE3 N°34 L’ACTUALITÉ DU DROIT SOCIAL COLLECTIF ET INDIVIDUEL MARS AVRIL 2012 LES NOUVELLES DU DROIT SOCIAL EN BREF Méconnaissance par l’employeur du délai d’envoi des invitations à négocier le protocole préélectoral : conséquences Le Code du travail énonce que l’invitation des syndicats à négocier le protocole préélectoral est effectuée un mois avant l’expiration du mandat des représentants du personnel en exercice (art. L. 2314-3 CT). Pourtant, la Cour de cassation affirme que la méconnaissance par l’employeur de ce délai ne peut être une cause d’annulation du protocole préélectoral. De plus, la loi ne fixant aucun délai entre l’invitation qui doit être adressée aux syndicats et la date de réunion de la négociation du protocole préélectoral, la chambre sociale précise que cette invitation doit être effectuée “en temps utile”. Dès lors, le syndicat ayant reçu la lettre l’invitant à négocier le protocole préélectoral seulement le 12 janvier pour préparer la négociation qui débutait le 20 janvier, a bénéficié d’un délai raisonnable. Cass.soc., 25 janvier 2012, n° 11-60093 Evaluation et mandat syndical Le Code du travail interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail (art. L. 2141-5 CT). A défaut, l’employeur se rend coupable de discrimination syndicale. Dès lors, la fiche d’évaluation d’un salarié qui fait mention d’une disponibilité réduite en raison des fonctions syndicales fait présumer une discrimination. Cass.soc., 11 janvier 2012, n° 10-16655 TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P2 LES NOUVELLES DU DROIT SOCIAL EN BREF Liste commune et représentant syndical au CE Dans les entreprises de 300 salariés et plus, une organisation syndicale ne peut désigner un représentant syndical au CE que si elle a au moins deux élus au sein du comité (art. L. 2324-2 CT). Désormais, en cas de constitution d’une liste commune pour les élections au comité d’entreprise ou d’établissement, un représentant syndical peut être désigné d’un commun accord entre les syndicats ayant présenté cette liste, dès lors que le nombre d’élus de la liste est au moins égal à deux. Cass.soc., 31 janvier 2012, n° 11-11856 LES RENCONTRES DES ÉLUS DES GRANDES ENTREPRISES Parce que les élus des Grandes Entreprises ont une problématique spécifique… JDS avocats vous invite à une journée unique Débats d’actualité Échanges avec d’autres élus Consultations juridiques Inscription / Renseignements www.eluceo.fr / 04 42 32 87 40 Attention, le nombre de places est limité. Plan de départ volontaire et plan de reclassement La loi prévoit que l’employeur qui projette un licenciement collectif de 10 salariés ou plus dans une même période de 30 jours dans les entreprises de 50 salariés et plus, est tenu d’établir un PSE et doit y intégrer un plan de reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité. Il est également acquis que l’employeur qui, pour des raisons économiques, entend supprimer des emplois en concluant avec les salariés intéressés des accords de rupture amiable (dits de « départs volontaires ») est tenu d’établir un PSE incluant un plan de reclassement lorsque les conditions précédentes sont remplies. En revanche, lorsque l’employeur propose un plan de départ volontaire à ses salariés, il est dispensé de mettre en place un plan de reclassement lorsqu’aucun licenciement économique n’est envisagé. Néanmoins, si l’employeur n’a effectivement envisagé aucun licenciement mais que son projet implique la suppression des emplois de salariés qui ne peuvent ou ne veulent pas bénéficier du plan de volontariat, il est contraint d’élaborer un plan de reclassement. Cass.soc., 25 janvier 2012, n° 10-23.516 Réforme des visites de reprise Le gouvernement a modifié les règles applicables en matière de visite de reprise en cas de maladie ou d’accident, réduisant gravement la protection des salariés malades. A compter du 1er juillet 2012, l’employeur a l’obligation d’organiser une visite médicale de reprise : comme auparavant en cas de congé maternité ou de maladie professionnelle, sans durée d’absence particulière ; en cas d’accident du travail du salarié dès lors qu’il a été absent au moins 30 jours contre 8 actuellement ; en cas d’accident ou de maladie non professionnelle du salarié dès lors qu’il a été absent au moins 30 jours contre 21 jours actuellement ; en cas d’absences répétées, la visite médicale de reprise est supprimée. Décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P3 DOSSIER LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 Les entreprises confrontées à un besoin ponctuel de salariés peuvent avoir recours au prêt de main-d’œuvre. Pourtant, initialement, et c’est toujours la règle de principe, la loi a interdit les opérations de prêts de main-d’œuvre. En effet, le recours au prêt de main d’œuvre est souvent utilisé par des employeurs afin d’échapper à leurs obligations. Toutefois, une évolution récente tend à autoriser certaines opérations de prêt de main d’œuvre. La motivation de ces évolutions, somme toute classique, est que les entreprises ont besoin de plus de souplesse et de flexibilité et doivent alors pouvoir externaliser l’emploi. La transformation des modes de production dans les entreprises a généré une externalisation de l’activité provoquant une forte mobilité du personnel notamment dans les groupes qui recourent de plus en plus au prêt de main d’œuvre. La crise aurait par ailleurs amplifié ce phénomène. T Il faut surtout rappeler que l’externalisation de l’emploi permet à l’utilisateur de se soustraire légalement à de nombreuses obligations notamment en matière d’embauche et de licenciement. l’article L. 8231-1 du Code du travail relatif au marchandage et l’article L. 8241-1 relatif au prêt illicite de main-d’œuvre. Après plusieurs nouvelles tentatives de réforme du prêt de main d’œuvre à but non lucratif, c’est la loi Cherpion sur « le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels » du 28 juillet 2011 qui a aménagé les dispositions relatives au prêt de main d’œuvre. Ces dispositions intéressent à la fois les relations entre les deux entreprises mais aménagent également le statut du salarié « prêté ». La loi de 2011 prévoit aussi de nombreuses dispositions qui intéressent particulièrement les représentants du personnel. Le législateur a alors modifié les deux dispositions particulières qui encadraient et limitaient ces opérations de prêt de main d’œuvre. Il s’agit de la loi du 25 juin 2008 qui a modifié TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P4 DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 1 LES CONDITIONS DE LICÉITÉ DU PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE Il faut garder à l’esprit que les opérations de prêt de main d’œuvre, qui constituent une forme d’externalisation de l’emploi, présentent un risque important d’évitement du droit du travail et d’atteinte aux droits des salariés prêtés. Ce recours a de la main d’œuvre extérieure doit alors être strictement encadré ce que ne permettent pas suffisamment les nouvelles dispositions. distingue pour l’essentiel deux types de prêt de main d’œuvre : le prêt de main d’œuvre à but lucratif qui est interdit et le prêt de main d’œuvre à but non lucratif qui est autorisé. Toute opération de prêt de main d’œuvre à but lucratif est donc interdite dès lors qu’elle n’a pas d’autre objet que la mise à disposition de personnels (art. L. 8241-1 CT). On parlera alors d’opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d’œuvre. Il existe toutefois une première exception notable à cette règle. Les opérations ayant pour objet exclusif le prêt de main d’œuvre à but lucratif sont en effet considérées comme licites pour les entreprises de travail temporaire et de travail à temps partagé ou en cas de portage salarial (art. L. 8241-1, 1° CT). A- LES PRÊTS DE MAIN D’ŒUVRE AUTORISÉS Le prêt de main d’œuvre est un contrat par lequel un employeur (le préteur) met temporairement un ou plusieurs de ses salariés à la disposition d’un autre employeur (l’utilisateur). Ces contrats sont le plus souvent maquillés en contrats d’entreprise, contrats de sous-traitance ou de prestation de service. Le ou les salariés ainsi prêtés doivent alors réaliser une tache ou un objet particulier pour le compte de l’utilisateur. Il n’y a ni rupture ni transfert du contrat de travail initial, l’employeur du salarié reste l’entreprise prêteuse. Le droit français interdit par principe le prêt de main d’œuvre. En effet, il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui peuvent être l’objet de convention ou de contrat (art. 1128 du Code civil). Le droit du travail a fait sien ce principe et interdit de se constituer intermédiaire entre un employeur et un salarié (art. L. 8231-1 CT). Pour autant, le législateur a prévu des exceptions à ce principe et De plus, les opérations à but lucratif n’ayant pas pour objet exclusif le prêt de main d’œuvre sont autorisées à condition de ne pas causer un préjudice au salarié ou d’éluder les dispositions légales et les dispositions des conventions et accords collectifs de travail (art. L. 8231-1 CT). Le caractère non exclusif signifie que l’opération de prêt de main-d’œuvre est la conséquence nécessaire de la réalisation d’une autre prestation. Enfin, le prêt de main d’œuvre à but non lucratif est licite (art. L. 8241-2 CT). Les opérations de prêt de main d’œuvre dès lors qu’elles sont autorisées ne doivent pas revêtir un caractère fictif. Pour distinguer les opérations fictives, le juge s’appuie sur différents indices tels que l’objet du contrat de mise à disposition, l’encadrement des salariés prêtés, la fourniture de matériel et le mode de rémunération. Autrement dit, dès lors que les critères d’un contrat de travail seront caractérisés entre le salarié prêté et l’entreprise utilisatrice, l’opération sera fictive et, partant, le prêt de main d’œuvre sera illicite. B- BUT LUCRATIF ET BUT NON LUCRATIF La licéité des opérations de prêt de main d’œuvre est déterminée par le caractère lucratif ou non lucratif de ces dernières. Pourtant, il n’existait pas de définition légale du but lucratif et non lucratif jusqu’à la loi du 28 juillet 2011. En effet, en matière de prêt de main d’œuvre, toute la difficulté consiste à déterminer quels éléments de coût peuvent être refacturés sans que l’opération soit suspectée de poursuivre un but lucratif. La question qui se posait était donc de savoir si la refacturation devait se limiter strictement à la rémunération du salarié et aux charges sociales ou si elle devait prendre en compte des frais de gestion du personnel mis à disposition. Si des frais de gestion devait être refacturés, jusqu’à quel niveau étaient-ils acceptables pour ne pas donner un caractère lucratif à l’opération ? TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P5 DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 La chambre criminelle de la Cour de cassation avait alors caractérisé une opération à but lucratif comme une opération « qui peut consister au profit de l’utilisateur ou du préteur de maind’œuvre en un bénéfice, un profit ou un gain pécuniaire » (Cass. crim., 20 mars 2007, n° 05-85253). Pouvait dès lors être facturés le montant des salaires et des charges sociales mais la question était plus discutée s’agissant des coûts de gestion résultant de la mise à disposition. Coté utilisateur, il restait également à déterminer si le but lucratif pouvait résulter des économies réalisées par l’emprunteur : celle-ci était-elle assimilable à un gain pécuniaire ? Il semblait alors admis que la refacturation du seul coût salarial était satisfaisante, mais cette solution a été remise en cause par l’arrêt John Deere. Dans cet arrêt (Cass.soc., 18 mai 2011, n° 09-69175), la Cour de cassation a reproché à une société utilisatrice de n’assumer aucun frais de gestion de personnel. Pour la chambre sociale, de ce fait, l’utilisatrice réalisait une économie, donc un profit financier caractérisant le but lucratif de l’opération. La loi (art. L. 8241-1 al.3 CT) pose désormais une définition mais seulement du but non lucratif d’une opération de prêt de maind’œuvre : « une opération de prêt de main d’œuvre ne poursuit pas un but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition ». L’intervention de ce cavalier législatif sonne le glas de la jurisprudence de la Cour de cassation qui a été contestée par certains en ce qu’elle constituerait un frein à la mobilité des salariés et, par conséquent, pourrait nuire à l’emploi. Il semble d’ailleurs que ce soit l’arrêt John Deere rendu par la Cour de cassation le 18 mai 2011 qui ait précipité cette évolution législative. La loi de juillet 2011 met donc en cause cette décision puisqu’elle affirme qu’une stricte facturation du coût salarial protégera désormais l’opération. Toutefois, la rédaction de l’article L. 8241-1 modifié par la loi de 2011 ne règle pas toutes les questions. En effet, on peut s’interroger sur le caractère limitatif des prévisions légales. De plus, le texte ne définit pas l’opération à but lucratif. Il est donc nécessaire d’interpréter cette disposition a contrario, avec toutes les incertitudes que cela comporte. En définissant ce qui est autorisé, la loi laisse une grande marge de manœuvre au juge pour qualifier ce qui est interdit, si bien que l’on peut espérer que la qualification d’opération à but lucratif soit appréciée de manière étendue. Enfin, on peut regretter que la définition posée ne s’intéresse qu’à l’attitude de l’entreprise prêteuse. Peu importe semble-t-il la flexibilité ou l’avantage qu’en retire la société emprunteur dans la qualification du but lucratif ou non lucratif de l’opération. C- SANCTIONS Le prêt de main-d’œuvre illicite est sanctionné pénalement par une peine d’emprisonnement de 2 ans et une amende de 30 000€ (art. L. 8243-1 CT). Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement des infractions de marchandage et de prêt illicite de main-d’œuvre et peuvent se voir punies d’une amende de 150 000 € et de peines complémentaires (art. L. 8234-2 et L. 8243-2 CT). Si en plus le personnel mis à disposition subit un préjudice parce que l’opération élude l’application des dispositions de la loi, de règlements ou de conventions ou accords collectifs de travail, le délit de marchandage sera constitué (art. L. 8231-1 CT). Ce délit est également punit par une peine d’emprisonnement de 2 ans et une amende de 30 000€ (art. L. 8234-1 CT). L’existence d’un tel préjudice résultera le plus souvent de ce que le personnel mis à disposition ne bénéficie pas des mêmes avantages que les salariés permanents de l’entreprise utilisatrice. Il faudra donc comparer le statut des salariés « prêtés » par le sous-traitant et celui des salariés du donneur d’ordre. Si un préjudice est constaté, le salarié pourra en demander réparation devant le conseil de prud’hommes ou en se constituant partie civile devant les tribunaux répressifs à l’encontre des deux entreprises. L’infraction de marchandage et/ou de prêt illicite de maind’œuvre peut être constatée par l’inspecteur du travail dans un procès verbal. TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P6 DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 L’article L. 8233-1 du Code du travail dispose qu’en cas de prêt de main-d’œuvre illicite, les organisations syndicales représentatives peuvent exercer en justice toutes actions en faveur d’un salarié sans avoir à justifier d’un mandat de l’intéressé. Enfin, le prêt de main-d’œuvre illicite et la violation des dispositions légales relatives au travail temporaire, en diminuant la possibilité d’embauche de travailleurs permanents, sont de nature à causer à la profession représentée par le syndicat demandeur un préjudice matériel et moral distinct de celui subi personnellement par le salarié (Cass. crim., 15 nov. 1983, n° 82-94092). 2 LE RÉGIME JURIDIQUE DU PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE LICITE ISSUE DE LA LOI CHERPION Les prêts de main-d’œuvre bouleversent l’ordonnancement traditionnel des relations de travail. En effet, ces opérations constituent des relations juridiques triangulaires ou tripartites de travail puisqu’il existe 3 acteurs : une entreprise prêteuse, une entreprise utilisatrice et un salarié « prêté ». La loi de 2011 a modifié les règles applicables afin d’aménager ces relations d’un type particulier. L’article L. 8241-2 du Code du travail a été complété par non moins de 13 alinéas. Le saviez-vous ? CHAQUE ÉLU D’UN CE BÉNÉFICIE D’UN DROIT À UNE FORMATION SPÉCIFIQUE AU COURS DE SON MANDAT. (C. trav., article L. 2325-44). TOUTES LES FORMATIONS JDS SUR www.jdsavocats.com A- RELATION TRIPARTITE Jusqu’à l’intervention de la loi de juillet 2011, les opérations de mise à disposition faisaient généralement l’objet d’une convention tripartite conclue entre l’entreprise prêteuse, l’entreprise utilisatrice et le salarié mis à disposition. C’était donc un seul document qui fixait les conditions de la mise à disposition entre les 3 parties. Désormais, prenant modèle sur les dispositions relatives à une opération de mise à disposition particulière qu’est le recours à l’intérim et reprenant l’ANI du 8 juillet 2009, la loi prévoit l’obligation de conclure, d’une part, une convention de mise à disposition entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice et, d’autre part, un avenant au contrat de travail entre le salarié mis à disposition et l’entreprise prêteuse. 1- Convention de mise à disposition L’article L. 8241-2 alinéa 3, 2° du Code du travail prévoit que la convention de mise à disposition conclue entre les 2 entreprises doit définir : l’identité du salarié : les conventions sont donc nominatives. Il n’est pas possible d’établir une convention applicable à plusieurs salariés. la qualification du salarié la durée de la mise à disposition : les conventions de mise à disposition ne peuvent donc a priori qu’avoir une durée déterminée. En revanche, le terme peut être certain ou incertain. Reste entière la question de savoir si une même convention peut prévoir plusieurs périodes de mise à disposition espacées dans le temps ou s’il est nécessaire de conclure une nouvelle convention à chaque mise à disposition du même salarié auprès de la même entreprise utilisatrice pour la même mission. le mode de détermination des salaires, des charges sociales et des frais professionnels qui seront facturés à l’entreprise utilisatrice. Les frais de gestion ne pouvant être, a priori, refacturés dans la mesure où les dispositions prévues par la loi sont limitatives. 2- Avenant au contrat de travail Le 3° de l’alinéa 3 de l’article L. 8241-2 du Code du travail énonce que l’avenant au contrat de travail doit préciser : le travail confié au salarié dans l’entreprise utilisatrice les horaires le lieu d’exécution les caractéristiques particulières du poste de travail s’il existe ou non une période probatoire, sa durée et ses modalités En revanche, rien n’est prévu s’agissant de la durée et du terme de la mise à disposition (par opposition au contrat de travail temporaire). TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P7 DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 La loi de juillet 2011 met l’accent sur l’obligation de recueillir le consentement du salarié. n° 02-14680). L’article L. 8241-2 al.3 1° du Code du travail prévoit que le prêt de main-d’œuvre requiert l’accord du salarié. Cet accord est formalisé par la signature de l’avenant au contrat de travail. La loi insiste donc sur la possibilité pout tout salarié de refuser de faire l’objet d’une mise à disposition et rappelle que le salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet de mesures discriminatoires en cas de refus (art. L. 8241-2 al.6 CT). 3- articulation convention de mise à disposition et avenant au contrat de travail Auparavant, la mise à disposition d’un salarié ne devait faire l’objet d’un avenant que lorsque cette opération avait pour conséquence une modification du contrat de travail dudit salarié. En effet, la mise à disposition d’un salarié ne constitue pas en soi une modification du contrat de travail (Cass.soc., 1er avril 2003, n° 02-14680). Toutefois, dès lors que cette mise à disposition entrainait une modification du lieu de travail au sens d’une modification du contrat de travail (hors secteur géographique en l’absence de clause de mobilité) ou que la rémunération, la durée de travail ou les fonctions du salarié étaient modifiées, l’opération de mise à disposition nécessitait l’accord du salarié et partant la conclusion d’un avenant au contrat de travail. Désormais, la conclusion d’un avenant au contrat est systématique, peu importe que le contrat de travail du salarié concerné soit modifié ou non. On peut regretter le caractère lacunaire de la loi s’agissant de la rupture de la mise à disposition (qu’il s’agisse de la rupture de la convention de mise à disposition ou de l’avenant) et de l’articulation entre les 2 conventions. Par exemple, en cas de rupture de la convention entre les deux employeurs, le salarié pourra–t-il refuser un retour à son poste de travail originaire ? Si la mise à disposition a pour conséquence une modification de son contrat de travail, il est en droit de refuser une nouvelle modification de son contrat de travail. Et puisqu’il y a eu signature d’un avenant à son contrat qui a nécessairement une nature contractuelle, ne peut-il pas exiger la poursuite de la mise à disposition ? Les réponses à ces questions devront nécessairement être déterminées par la jurisprudence. B- RELATIONS INDIVIDUELLES La qualification de modification du contrat de travail du salarié à la suite d’une mise à disposition conserve un intérêt puisque la loi de 2011 impose en pareille hypothèse la mise en œuvre d’une période probatoire. Il appartient alors aux parties de prévoir sa durée et un éventuel délai de prévenance pour y mettre fin. Une période probatoire, à la différence d’une période d’essai, n’a pas pour effet de permettre, notamment à l’employeur, de rompre le contrat de travail mais seulement de mettre fin à l’opération de mise à disposition, sans motif. Ainsi, lorsque l’entreprise prêteuse ou le salarié concerné décide de mettre fin à la mise à disposition pendant la période probatoire, le contrat de travail initial du salarié n’est pas rompu, et le salarié doit réintégrer son poste de travail. Toutefois, l’article L. 8241-2 alinéa 12 du Code du travail prévoit que la cessation de la mise à disposition pendant la période probatoire peut constituer un motif de sanction ou de licenciement en cas de faute grave du salarié. Quid en revanche de la convention de mise à disposition ? Est-elle aussi rompue ? La réponse doit être positive puisque cette convention est nominative. La loi de juillet 2011 met l’accent sur l’obligation de recueillir le consentement du salarié qui fait l’objet d’une mise à disposition alors qu’auparavant la jurisprudence considérait qu’elle pouvait en principe être imposée au salarié (Cass.soc. 1er avril 2003, 1- Statut du salarié pendant la mise à disposition La loi (art. L. 8241-2 al. 5 et 8 CT) prévoit désormais que : « Pendant la période de prêt de main-d’œuvre, le contrat de travail qui lie le salarié à l’entreprise prêteuse n’est ni rompu ni suspendu. Le salarié continue d’appartenir au personnel de l’entreprise prêteuse » ; « Il conserve le bénéfice de l’ensemble des dispositions conventionnelles dont il aurait bénéficié s’il avait exécuté son travail dans l’entreprise prêteuse » ; « Les salariés mis à disposition ont accès aux installations et moyens de transport collectifs dont bénéficient les salariés de l’entreprise utilisatrice ». S’agissant du pouvoir disciplinaire, l’employeur du salarié prêté reste l’employeur d’origine même si la prestation de travail du salarié est effectuée au service de l’entreprise utilisatrice. L’utilisateur oriente le travail du salarié, lui donne des directives et contrôle le travail réalisé. Mais il ne peut exercer son pouvoir disciplinaire que sur ses propres salariés. Le salarié prêté est toutefois soumis aux dispositions du règlement intérieur de l’entreprise d’accueil, mais en cas de non respect des dispositions, c’est l’employeur d’origine qui doit prononcer une éventuelle sanction. TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P8 DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 En matière d’hygiène et sécurité, ce sont les dispositions relatives au travail temporaire qui sont applicables (art. L. 1251-21 à L. 1251-24 CT). Ainsi, l’entreprise utilisatrice est responsable des conditions d’exécution du travail lesquelles comprennent la santé et la sécurité au travail. Le salarié prêté doit respecter les dispositions relatives à l’hygiène et à la sécurité prévues par le règlement intérieur. Les obligations relatives à la médecine du travail relèvent de l’entreprise utilisatrice, sauf exception. Les équipements de protection individuelle sont fournis par l’entreprise d’accueil, sauf exception. Le salarié ne doit jamais subir la charge financière de ces équipements. Enfin, est prévu l’accès aux installations collectives de l’entreprise d’accueil par le salarié prêté. En matière d’hygiène et sécurité, ce sont les dispositions relatives au travail temporaire qui sont applicables. On peut relever que contrairement aux dispositions relatives aux intérimaires, rien n’est prévu s’agissant de l’égalité de traitement et, en particulier, de l’égalité salariale. En matière de travail temporaire, le contrat de mise à disposition doit comporter l’indication du montant de la rémunération y compris « les primes et accessoires de salaire que percevrait dans l’entreprise utilisatrice un salarié de qualification équivalente occupant le même poste de travail » (art. L. 1251-42 CT) dont on connaît déjà les difficultés de mise en œuvre. Enfin, il est important de préciser que la question de l’égalité de traitement sera difficile à appréhender puisque les salariés relèvent en pareille hypothèse d’employeurs différents, et que partant, leur situation n’est par définition pas identique. 2- Fin de la mise à disposition « A l’issue de sa mise à disposition, le salarié retrouve son poste de travail dans l’entreprise prêteuse sans que l’évolution de sa carrière ou de sa rémunération ne soit affectée par la période de prêt » (art. L. 8241-2 al.4 CT) : le texte vise expressément le poste de travail et non l’emploi ou un emploi équivalent. Cette exigence ne sera pas sans poser difficultés lorsque le prêt sera de longue durée et que l’entreprise d’origine aura dû, entre temps, se réorganiser. La loi ne fait pas mention des modifications de rémunération dans l’entreprise d’origine surtout en ce qui concerne les augmentations collectives. C- RELATIONS COLLECTIVES 1- Rôle des représentants du personnel dans l’entreprise prêteuse « Le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel de l’entreprise prêteuse sont consultés préalablement à la mise en œuvre d’un prêt de main-d’œuvre et informés des différentes conventions signées » (art. L. 8241-2 al.9 CT). La consultation peut être postérieure à la signature de la convention dans la mesure où elle a trait à la mise en œuvre du prêt. De plus, la consultation du CE parait concerner un prêt nominatif (utilisation du singulier dans le texte) et non le recours général au prêt de main-d’œuvre. « Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l’entreprise prêteuse est informé lorsque le poste occupé dans l’entreprise utilisatrice par le salarié mis à disposition figure sur la liste de ceux présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité des salariés mentionnée au second alinéa de l’article L. 4154-2 » (art. L. 8241-2 al.10 CT). 2- Rôle des représentants du personnel dans l’entreprise utilisatrice « Le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, les délégués du personnel de l’entreprise utilisatrice sont informés et consultés préalablement à l’accueil de salariés mis à la disposition de celle-ci dans le cadre de prêts de main-d’œuvre » (art. L. 8241-2 al.11 CT). L’information et la consultation sont ici préalables mais elles paraissent pouvoir être globales et concerner une pluralité de salariés (information/consultation sur le principe du recours et non à chaque accueil de salariés prêtés). De plus, l’employeur de l’entreprise utilisatrice doit informer le comité d’entreprise, dans le cadre de l’information annuelle (art. L. 2323-47 et R. 2323-9 CT relatifs au rapport annuel dans les entreprises de moins de 300 salariés) ou trimestrielle (art. L. 2323-51 et R. 2323-10 relatifs à l’information trimestrielle dans les entreprises de plus de 300 salariés), du nombre de salariés appartenant à une entreprise extérieure. S’agissant des activités sociales et culturelles, elles peuvent être ouvertes aux travailleurs extérieurs du moment qu’ils ne sont pas majoritaires. En revanche, il y a égalité d’accès aux moyens collectifs de transport et de restauration. TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P9 DOSSIER / LE PRÊT DE MAIN D’ŒUVRE DEPUIS LA LOI DU 28 JUILLET 2011 En effet, l’article L. 1251-24 du Code du travail relatif au travail temporaire est applicable au prêt de main-d’œuvre. Cet article prévoit le remboursement des dépenses supplémentaires qui incombent au CE en cas d’accès aux installations collectives et notamment de restauration, dès lors qu’elles sont gérées par le CE. Ces modalités de remboursement sont définies dans le contrat de mise à disposition. Par ailleurs, le CE ne peut refuser l’accès aux installations collectives aux salariés extérieurs à l’entreprise sous peine de commettre une discrimination (Cass.soc., 21 nov. 1990, n° 89-13056). Enfin, il est de la compétence des délégués du personnel de l’entreprise d’accueil de présenter les réclamations des salariés prêtés intéressant les conditions d’exécution du travail qui relèvent du chef d’établissement, ainsi que les réclamations en matière de rémunération, de conditions de travail et d’accès aux moyens de transport collectifs et aux installations collectives (art. L. 2313-3 à L. 2313-5 CT). Les délégués du personnel de l’entreprise d’accueil ont par ailleurs un droit d’accès aux contrats de mise à disposition. De même, le CHSCT a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure (art. L. 4612-1 CT). au CHSCT, rappelons qu’il n’existe aucune condition particulière pour être candidat au CHSCT. L’administration avait eu l’occasion de préciser que les critères à privilégier sont la bonne connaissance des travaux effectués dans l’entreprise, ainsi que l’aptitude à l’étude et à l’analyse des problèmes de conditions de travail et de prévention des risques professionnels (Circ. DRT 93-15, 25 mars 1993). être désigné DS dans l’entreprise utilisatrice sous condition de pouvoir y être éligible et d’avoir obtenu au moins 10% des voix aux élections professionnelles bien que l’hypothèse semble peu probable. La mise à disposition ne peut avoir pour effet de mettre fin au mandat du salarié qu’il a obtenu dans son entreprise d’origine. En revanche, si le salarié prêté a été élu par exemple délégué du personnel dans l’entreprise d’accueil, son mandat prendra fin à l’issue de la mise à disposition en raison de la perte des conditions requises pour l’éligibilité (art. L. 2314-26 CT). Toutefois, la protection attachée à son mandat continue de produire effet dans les conditions prévues à l’article L. 2411-5 du Code du travail à savoir pendant 6 mois suivant l’expiration du mandat. A noter également que le salarié qui a demandé l’organisation des élections ou qui y a été candidat est protégé pendant 6 mois (art. L. 2411-6 et L. 2411-7 CT). 3 – Prise en compte du mandat du salarié prêté « La mise à disposition ne peut affecter la protection dont jouit un salarié en vertu d’un mandat représentatif » (art. L. 8241-2 al.7 CT). Rappelons tout d’abord que le salarié prêté peut soit : être élu ou désigné représentant du personnel dans son entreprise d’origine être élu DP dans l’entreprise d’accueil dès lors que le salarié mis à disposition est compté dans l’effectif de l’entreprise d’accueil et qu’il y travaille depuis 24 mois continus (art. L. 2341-18-1 CT). être élu membre du CHSCT. Bien que rien ne soit prévu concernant la possibilité d’être élu représentant du personnel Pour conclure, il faut rappeler que la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale a aménagé les conditions de prise en compte dans l’effectif et de participation aux élections professionnelles des salariés mis à disposition (voir lettre aux CE n°18 janvier/février 2009). TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] N°34 MARS - AVRIL 2012 - P10 LES FORMATIONS JDS er DU 1 SEMESTRE Niveau I POSER LES BASES Représenter les salariés au CE : missions économiques, activités sociales et culturelles, fonctionnement, moyens Niveau II POUR UN CE ACTIF ET EFFICACE La gestion du CE (en collaboration avec un Cabinet d’expertscomptables) Comptabilité générale et analyse financière (animée par un Cabinet d’experts-comptables) Niveau III POUR ALLER PLUS LOIN Le CE face aux restructurations Les éléments juridiques pour peser sur le processus Le rôle du CE à l’annonce d’une restructuration Le rôle du CE dans la phase d’examen du plan de licenciements L’épargne salariale (animée par un Cabinet d’experts-comptables) La santé au travail DE L’INDIVIDUEL AU COLLECTIF La formation professionnelle Le logement Le salaire Les seniors Intervenir dans la politique de l’entreprise (1/2 journée) Conseiller et accompagner : le point sur la retraite de base Le CE face aux restructurations Conseiller les salariés : restructuration et mobilités Le chômage partiel Faire respecter les limites du pouvoir disciplinaire La rupture du CDI : Notions, actualités et stratégies La rupture conventionnelle RETROUVEZ-NOUS SUR www.jdsavocats.com Pour les dates, veuillez contacter JEAN-BAPTISTE MERLATEAU TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected] TEL / 01 48 96 14 48 SITE / www.jdsavocats.com EMAIL / [email protected]