Conseils méthodologiques A Art de l`époque
Transcription
Conseils méthodologiques A Art de l`époque
Conseils méthodologiques A Art de l’époque contemporaine Licence 2 Analyser et définir les termes du sujet Certains étudiants veillent à démarrer leur écrit par une élucidation des termes du sujet afin d’en repérer les différentes acceptions au regard des arts plastiques. Ce travail préalable permet souvent d’éviter les confusions ou les amalgames dans la poursuite de l’analyse. Soulignons que l’élucidation lexicale peut s’inscrire dans l’introduction ; sans excéder quelques lignes, elle doit fournir un cadre de référence probant à l’établissement des grandes lignes de l’analyse. L’Analyse des documents « Tous les documents mis à disposition doivent être traités. » Les sujets sont construits à partir d’un ensemble de 2 ou 3 documents articulés à une incitation. Il peut s’agir de documents textuels ou iconiques. Il faut veiller à traiter de manière équilibrée chaque document. Il faut également faire entrer en dialogue ces documents vis-à-vis de l’incitation. Il est également important pour consolider et nuancer votre réflexion de convoquer d’autres œuvres, d’autres auteurs, d’autres références, que ceux uniquement proposés par le sujet. Un premier écueil consiste en une approche des documents strictement descriptive, formelle, sans recul critique, ni dégagement d'un sens éventuel ou pour le moins d'un ancrage dans une pensée, un contexte historique. Le second, à l'inverse, consiste en une prise de distance immédiate faisant, à tort, l'économie de l'analyse pour traiter de considérations fatalement trop générales. Soulignons les grands aspects d’une analyse d’œuvre : Analyse identitaire : Sur le principe du cartel, présenter et identifier rapidement les œuvres, leur nature, leur statut, leurs caractéristiques générales. Analyse iconographique : Dans le cas d’une œuvre figurative notamment. Décrire ce qui est représenté, le thème, le sujet, les formes qui sont données à voir, les symboles… Analyse historique : Les œuvres renvoient à des époques ainsi qu’à des conceptions qu’il convient de définir de manière plus ou moins approfondie selon le sujet. Analyse plastique : les matériaux, le support, la technique, la facture, les couleurs, la composition, le traitement : Comment cela est fait ? / Pour quel effet ? / Quelles intentions ? Analyse sémantique : La conception plastique d’une œuvre renvoie également à une conception symbolique, esthétique, poétique ainsi qu’à une multitude d’évocations qui peuvent faire sens. Problématiser à partir de l’incitation et des documents L’étudiant ne doit pas se précipiter, mais prendre le temps de l’analyse des documents et de l’incitation. Il ne faut pas paraphraser le sujet dans l'espoir de faire passer cela pour une problématique. Dans le cadre du partiel, problématiser équivaut à saisir les relations induites par le jeu des documents qui, précisément, accompagnent l’incitation. Ces documents ne sont pas là par hasard. Ils figurent autant de pistes et d’éclairages singuliers sur la question posée. Le sujet tout entier (incitation + documents) permet de fonder et d'engager une réponse argumentée, étayée d’exemples précis et explicités. Ainsi faut-il explorer le sujet en rendant compte des enjeux qu’il suppose et des questionnements qui y sont sous-tendus. Il n’est pas nécessaire de rappeler qu’une bonne connaissance du cours et des questionnements majeurs soulevés lors des séances est indispensable. 1 Le plan Trop d’étudiants négligent de sous-tendre leur analyse par un réel plan. Certaines copies aux idées pourtant pertinentes pêchent par une organisation inexistante du propos. La sensation que l’analyse est effectuée à la volée enlise souvent les réflexions dans la confusion. Pourtant, quand le plan est établi avec précision, la rédaction ne pose guère de problème. Il faut toutefois que la rigueur du plan reste manifeste dans la rédaction. Ne pas omettre d’indiquer quel sera le plan suivi dès l’introduction. Sans prétendre offrir un modèle unique de procédure, il convient sans doute préalablement de débuter au brouillon par une phase de repérage et d’inventaire des idées. Ensuite, il faut classer ces pistes de réflexion, puis procéder à une répartition et une hiérarchisation des connaissances sous forme de parties. Construire une analyse c’est donc être capable, en filigrane, de faire apparaître un fil conducteur, une progression, faire montre de suite dans les idées et d’une capacité à porter à son comble une réflexion. C’est également maîtriser, pour les meilleures copies, un certain sens de l’enquête, être capable de tenir en haleine, de mettre en valeur et ne pas tout dire d’emblée. L’introduction Exemple envisageable : 1. Présentation rapide des documents et de la teneur conceptuelle du dossier 2. Élucidation des termes du sujet 3. Problématisation 4. Annonce du plan Les longues introductions généralistes sont hors de propos. L'introduction doit permettre une ouverture sous forme de question et de problématisation. L’introduction et l’annonce du plan sont un contrat qui engage par la suite l’étudiant. À partir de cette accroche singulière, il conviendra ensuite d'argumenter. Le développement Produire un commentaire composé ne doit pas consister en un résumé du cours. Il ne faut dire que ce qui a du sens vis-àvis de l’incitation et des documents. Plusieurs approches de plan (et donc de développement) sont possibles selon la nature du questionnement posé par l’incitation. Certaines incitations invitent à discuter d’une position, d’une réflexion, demandent d'examiner un jugement, d'en montrer les limites voire de le réfuter. On reconnaît souvent ce type d’attendu à l’incitation : « Pensez-vous que... », « Dans quelle mesure peut-on dire que... », « Partagez-vous cette conception de… », « Limites et pertinences de… ». Dans ce genre de cas, la méthode requise va consister à examiner de façon contrastée les arguments, les artistes et les œuvres qui apportent autant de réponses différentes à la question posée, et ce de façon aussi équilibrée et objective que possible. D’autres incitations n’invitent pas à une confrontation de thèses. Il s’agit plutôt d’un jugement ou d’une affirmation qui demande à être étayé sous divers aspects. Il consiste à fournir un certain nombre d'arguments capables de valider le jugement ou de répondre à la question posée. Dans ce cas, l’approche se doit d’être progressive. Ne jamais produire un catalogue figé d'arguments. On reconnaît la nécessité de ce genre d’approche aux incitations du type : « Qu'est-ce qu'une œuvre d’avant-garde… ? », mais également aux invitations à vérifier une affirmation : « Pourquoi certains commentateurs ont pu dire qu’Otto Dix n’est ni un artiste d’avant-garde, ni un artiste académique ... », « Montrez, commentez ou justifiez ceci... » Notons que chaque partie du développement doit être constituée de paragraphes annoncés par des retours à la ligne. Le paragraphe constitue l'unité de base du développement. Un paragraphe se compose des éléments suivants: une idée principale ; une argumentation, justifiant l'idée en la développant ; un ou deux exemples précis, rendant concrète l'idée ainsi que l'argumentation proposée. 2 La conclusion Le schéma de la conclusion est l'inverse de celui de l'introduction : 1. La première phrase sert à quitter le développement. 2. La synthèse reprend ensuite les grandes lignes du développement et montre que le contrat initial a été respecté. Elle ne doit pas être un simple résumé du développement, ni la reproduction à l'identique du plan annoncé : il faut reformuler les idées, car ce qui importe est de mettre l'accent sur l'évolution apportée par la démonstration. 3. L’élargissement du sujet permet de prendre un peu de distance par rapport à la problématique initiale et d'attirer le regard vers d'autres perspectives intéressantes, il peut s’agir d’un transfert du questionnement dans un autre contexte, par exemple dans l’actualité artistique la plus récente. Les transitions Il faut bien relier vos idées et les parties principales de votre composition écrite. Chaque paragraphe doit contenir une idée centrale et être relié au paragraphe suivant par une phrase. Ménager une transition, c'est exprimer clairement le lien unissant les raisonnements sous forme d’un cheminement. Dans un ensemble où tout est solidaire, il faut établir une continuité. Les transitions les plus rigoureuses établissent soit une gradation, soit une relation de cause à effet. Ces transitions sont essentielles pour bien aider votre lecteur à suivre votre raisonnement. Les transitions permettent de faire la synthèse régulière et de rendre compte auprès du lecteur des avancées et des acquis apportés par votre réflexion. Il ne faut donc pas faire l’économie de certaines articulations logiques dans l’analyse, même sous prétexte d’évidence : c’est prendre sinon le risque de donner la sensation que des éléments sont restés impensés. Varier les formules logiques et les liens de coordinations : donc, ainsi, on peut conclure que, en ce sens, néanmoins, cependant, or, toutefois, de fait, en outre, en sus, de plus, dès lors, nonobstant, en dépit, malgré… Exemples, références, citations Les titres des œuvres doivent être en italique pour un texte dactylographié et soulignés lorsqu’il s’agit d’un texte manuscrit ce qui est le cas du partiel. De manière canonique, une référence doit apparaitre organisée comme suit : Prénom, Nom de l’artiste, Titre de l’œuvre, date, technique et support, dimension (hauteur puis longueur dans le cas d’une peinture), localisation (du particulier au général). Lors de l’analyse, les références ont un rôle primordial d’appui à la réflexion menée par le candidat. Elles peuvent être sollicitées et confrontées, dans des rapports d’approfondissement ou de contrepoint afin de rendre compte d’une divergence de point de vue ou encore pour relativiser une conception. Les références n’ont pas le rôle de simples ornements, elles doivent au contraire faire naître la réflexion et rendre intelligibles les problématiques dégagées par l’étudiant. Certains étudiants éclairent judicieusement leurs propos par des références théoriques et critiques, mais également par le recours à des auteurs issus de la sphère élargie des connaissances humaines (philosophes, scientifiques, anthropologues, psychanalystes…) Tout élément, toute référence, tout contenu réflexif apporté par l’étudiant doit être véritablement opérant dans le cadre du sujet proposé. En aucun cas l’étudiant ne doit détourner son analyse des questions posées, les digressions aussi intéressantes soient elles, sont à juste titre sanctionnées en tant que hors-sujets. Il n’est donc pas attendu non plus de démonstrations arbitraires de connaissances. Certaines analyses au départ intéressantes se laissent prendre au piège de l’érudition stérile. À l'inverse, certains étudiants sont parfois trop allusifs ou rapides dans l’élucidation de leurs idées. Les remarques et les références ne sont considérées comme pertinentes que dans la mesure où l’on a pris le temps de repérer, de nommer, d’expliquer et de démontrer la valeur de ces ancrages référentiels. Le correcteur est habitué à voir les mêmes exemples revenir sans cesse au regard d’une question donnée. Si certains auteurs ou artistes sont incontournables, le choix de l’œuvre gagne toujours à dépasser les habitudes de renvois consacrées par les pensées vulgarisatrices et les doxas sur l’art. 3 En outre, il faut faire preuve de précision scientifique dans la dénomination des références : rappelons qu’il faut faire apparaître au minimum le titre précis de l’œuvre (en le soulignant), ainsi que le nom de l’artiste et une indication de date. Toute autre information utile est évidemment bienvenue. Enfin, la richesse de la culture artistique de l’étudiant ne s’improvise pas, elle est le fruit d’une curiosité et de la fréquentation régulière d’œuvres et d’ouvrages depuis au moins 2 ans. L’usage de références doit être également un moyen de rendre perceptible le ferment artistique qui construit la sensibilité propre de l’étudiant. Des écueils à éviter : -Veiller à ne pas réduire l’œuvre à l’illustration d’une idée ou l’expression d’un simple phénomène culturel ou historique. -Éviter l’inventaire de noms cités ou encore le catalogue de références. Une liste de références, aussi pertinentes soientelles, sera considérée comme nulle si l’étudiant ne prend pas le temps d’expliciter ce qui est mis en jeu et ce qu’il retient d’elles pour alimenter sa réflexion. -Il faut éviter au maximum la référence par métonymie (la partie pour le tout), autrement dit, les appellations génériques du type : « dans les œuvres de… », mais choisir plutôt une œuvre précise de l’artiste en question. Vocabulaire spécifique « La connaissance des œuvres ne saurait se limiter à de strictes données historiques ou culturelles, mais engage une connaissance fine des processus de création et des gestes qui les déterminent. » Il ne peut y avoir d'analyse plastique sans possession d'un vocabulaire spécifique et d'une capacité à désigner les gestes et les opérations conduites par les artistes. L’étudiant doit prendre le temps de s’approprier le champ lexical qui correspond au domaine investi. Dans le cours de licence 2, culture de l’époque contemporaine, l’axe principal est notamment celui de la peinture. De manière non exhaustive, voici les termes employés durant les séances pour aborder une peinture : La Composition : statique / dynamique ; flottante / charpentée ; claire / confuse ; centrée / décentrée ; symétrique / asymétrique ; équilibrée / déséquilibrée… La Lumière : diffuse / tamisée ; claire / obscure ; contrastée ; vibrante ; tournante ; ondoyante ; corpusculaire. Les Couleurs : Une gamme chromatique réduite / variée ; saturée ; criarde ; franche. Une couleur rompue (couleur à laquelle on ajoute plus ou moins de sa complémentaire) ; rabattue (couleur + du noir) ; chaude / froide ; dissonante / complémentaire ; acide / douce. La dominante (couleur qui ressort le plus) ; Une tonique : couleur qui occupe une petite surface, mais qui pourtant ressort énormément ; Une Teinte : Degré de pâleur d'une couleur qui varie à mesure qu'on ajoute du blanc ou du noir ; Monochrome : qui est constitué des modalités d’une seule couleur ; Camaïeu : peinture réalisée avec les différents tons d'une seule couleur ; Accord subjectif : association de couleurs selon une liberté propre à l’artiste, Accord objectif : association de couleurs selon des règles scientifiques ou définies par le cercle chromatique… La Facture (matière + exécution) : Matière grasse, maigre ; en demi-pâte ; en pleine-pâte - en empâtement ; en glacis ; en aplats ; une facture riche, sèche… ; une surface lisse, striée… Le Dessin : Le cerne : tracé visible des contours d’une forme ou d’une figure. Le modelé : suggestion d’un volume par la représentation des ombres propres. Un tracé lyrique, sinueux, zigzagant, tortueux, torturé, hésitant, incisif, anguleux, fourni / clair… L’espace : -Perspective linéaire monocentrique : les lignes de construction convergent vers un point de fuite. -Perspective atmosphérique : plus les éléments sont éloignés dans la profondeur, plus ils apparaissent flous. -Perspective aérienne : suggestion de la profondeur par le refroidissement progressif des couleurs. -Perspective intuitive : espace en profondeur suggéré sans précision mathématique (cf. Van Gogh, la Chambre à Arles) -La Ligne d’horizon : dans un espace en perspective, ligne horizontale qui semble la plus lointaine pour le regard. -Organisation sur le plan, mise en page (dans le contexte de la modernité et des avant-gardes, penser aux œuvres faisant référence aux estampes japonaises). -Espace feuilleté (ex : les œuvres du cubisme dit synthétique). Etc. 4 Éviter les abus de langage qui consistent, par contamination, à reprendre des termes spécifiques à un artiste ou un auteur et d’en faire une acception et un usage commun. Par exemple le « regardeur » renvoie forcément à l’œuvre de Marcel Duchamp. Dans un autre contexte, ce terme ne peut servir comme simple synonyme pour désigner le spectateur, le public, l’amateur. « All over » renvoie à l’œuvre de Pollock principalement, etc. Conseils en vrac L’étudiant doit toujours veiller à ne pas caricaturer son propos, les analyses les plus riches sont celles qui ont su éviter les faux découpages et les faux clivages. Il faut donc modaliser : ne soyez pas complètement tranché dans vos affirmations ; l’œuvre d’art dépasse et déborde toujours le discours. Utilisez toute une batterie de mots permettant de nuancer le propos et de lui redonner une ouverture de champ : peut-être, sans doute, il est possible de penser, on peut avancer l’hypothèse que… Il est attendu de l’étudiant une analyse fine et justement tempérée, capable de rendre perceptible dans quelles mesures l’art moderne n’a pas tout inventé à partir de rien. Par exemple, bien avant Monet et les impressionnistes, des artistes pouvaient déjà laisser visibles les coups de pinceau. Varier la façon de dénommer une même œuvre ou une personne tout au long du commentaire, afin d’éviter une forme de redondance ou de monotonie. Par exemple avec La Femme à la Mandoline de Picasso : Dans le tableau de Picasso / Dans la Femme à la Mandoline / Dans la peinture de l’artiste espagnol / Dans le tableau cubiste… Éviter absolument la désignation de type : « dans le document n°1 », etc. Dans certains devoirs, la grammaire et la syntaxe sont approximatives, et bien souvent l'orthographe devient aléatoire. Relire le devoir au maximum. On veillera à une graphie lisible, avec tout moyen d'écriture et de mise en page au service de cette lisibilité. Éviter l’écriture au futur (cela donne la sensation que tout reste à faire) ainsi qu’au passé (donne la sensation que tout a déjà été dit) favoriser le présent de l’indicatif. Ne pas se contenter du cours et lire des ouvrages : ceux d’auteurs faisant autorité et notamment présentés durant les séances, mais également les ouvrages généralistes et synthétiques. Bien évidemment, chaque étudiant doit entretenir sa culture artistique par une approche personnelle du champ artistique : visites d'expositions, de musées, lectures théoriques et critiques, qui seront le fondement d’une réflexion ouverte, personnelle et originale. Bon courage et bon travail à tous. 5