Trilogie August Strindberg

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Trilogie August Strindberg
© DR
Trilogie August Strindberg
Théâtre-Laboratoire Sfumato
Les 18, 19 et 20 janvier I Théâtre
Lun 18 jan I 20h45 I Théâtre de la Butte
La danse de mort I Durée 1h30
Mar 19 jan I 20h45 I Le Vox
Julie, Jean et Kristine I Durée 1h15
Mer 20 jan I 19h45 I Théâtre de la Butte
Strindberg à Damas I Durée 1h30
Spectacles en bulgare surtitrés en français
Une sélection d’ouvrages de la librairie Ryst sera en vente à l’issue de chaque représentation.
Ouverture de billetterie 14 novembre
Tarif B I Passeport jeune
Saison 2009.2010
Autour de La Trilogie August Strindberg
Riches heures
[Rencontre]
Le « Sfumato » comme chemin pour le théâtre
Mercredi 20 janvier à l’issue de la représentation
[Atelier]
Sfumato -- essais
MJC rue de l’Abbaye I samedi 16 janvier I 14h à 17h
Tarif unique 21 € votre place pour l’un des spectacles de la Trilogie Strindberg comprise.
Genre : Exercices d’acteurs
Intervenants : Margarita Mladenova et Ivan Dobchev, metteurs en scène (la traduction sera assurée par un interprète)
Margarita Mladenova et Ivan Dobchev, metteurs en scène reconnus, sont également des pédagogues novateurs à l’origine
d’un enseignement original. Au fil des années, ils développent une formation de l’acteur en adéquation avec leur
conception du théâtre. « Pour nous, le spectacle est une action, un rite spirituel qui a lieu ici et maintenant. Car le rite ne
peut être ni imité, ni répété. C’est cela qui détermine la nature de la présence de l’acteur dans nos spectacles : tout le
travail de répétition consiste à le diriger vers des réflexes non conditionnés, à favoriser une impulsion créatrice. » Nous vous
invitons à appréhender ce qui fait la particularité du jeu des acteurs du Théâtre laboratoire Sfumato à travers les exercices
que Margarita Mladenova et Ivan Dobchev voudront bien vous confier ! Cet atelier s’adresse en priorité aux metteurs en
scène amateurs et aux personnes chargées d’ateliers de théâtre.
Saison 2009.2010
© DR
Trilogie August Strindberg
Par le Théâtre-laboratoire SFUMATO
La Danse de mort (1h30) d’August Strindberg. Adaptation du texte et mise en scène Margarita
Mladenova. Scénographie et costumes Daniela Oleg Liahova. Musique Assen Avramov. Lumières
Daniela Oleg Liahova et Margarita Mladenova. Avec Svetlana Yancheva, Vladimir Penev, Tzvetan
Alexiev.
Production Teatro Sfumato – Sofia. Coréalisation Théâtre de la Bastille, Festival d’Automne à Paris.
Julie, Jean et Kristine (Fröken Julie) (1h15) d’August Strindberg. Adaptation du texte et mise en
scène Margarita Mladenova. Scénographie et costumes Daniela Oleg Liahova. Lumières Daniela
Oleg Liahova et Margarita Mladenova. Avec Albena Georgieva, Hristo Petkov, Miroslava Gogovska.
Production Teatro Sfumato – Sofia. Coréalisation Théâtre de la Bastille, Festival d’Automne à Paris.
Strindberg à Damas (1h30) de Georgi Tenev et Ivan Dobchev. D’après August Strindberg. Mise en
scène Ivan Dobchev. Scénographie Ivan Dobchev et Daniela Oleg Liahova. Costumes, Daniela Oleg
Liahova. Musique originale Assen Avramov. Vidéofilm Lubomir Mladenov. Lumières Ivan Dobchev.
Avec Roumen Traikov, Snezhina Petrova, Hristo Petkov, Elena Dimitrova, Malin Krastev.
Coréalisation Théâtre de la Bastille, Festival d’Automne à Paris.
La trilogie Strindberg reçoit le soutien de l’Onda. Manifestation présentée dans le cadre de la Saison culturelle européenne
en France (1er juillet – 31 décembre 2008). Avec le soutien du Ministère de la Culture de Bulgarie. Partenaires média du
Festival d’Automne à Paris : France Culture, Arte.
Spectacles en bulgare surtitrés en français
1 Trident
Atelier Sfumato
Programme August Strindberg Vers Damas
Notre trilogie est inspirée par l’œuvre et le chemin vital d’un des meilleurs esprits trépidants du 20è
siècle européen, August Strindberg. Sa vie intime devient la chair de ses romans et pièces de
théâtre. C'est l'écrivain qui au plus haut degré a « versé » soi-même dans ses écrits. Reconnaître
en soi-même, dans sa propre maladie la maladie du siècle, c'est le sort du génie. Cent ans après,
nous continuons à étudier l’ « humain, trop humain », en utilisant ses observations et ses
diagnostics. Julie, Jean et Kristine (Fröken Julie), La Danse de Mort et Strindberg à Damas suivent
les trois étapes les plus importantes dans le développement du talent douloureux de Strindberg.
Nous pensons que ses révélations pour l'Homme n’ont pas encore perdu son tressaillement et
qu’elles sont valables pour nous, humains du 21è siècle.
Julie, Jean et Kristine (Fröken Julie)
August Strindberg
C’est l'idée anxieuse avec laquelle vivent les philosophes de la première partie du 20è siècle qui
me préoccupe : qu'advient-il de l'être humain - en particulier après les guerres - n’ayant cessé
d'être l’objet absolu de la civilisation ? Il n’est plus le centre d’intérêt. Dans les dernières phases, il
existe d'autres objectifs pour la civilisation. L'homme est marginal au regard de ces objectifs.
Cette civilisation de technologies, d'argent, etc., commence à produire d'autre type d’hommes.
Quelque chose se réalise dans l'homme classique et le transforme en une effigie métamorphosée,
pour laquelle il n'y a pas de Dieu, il n'y a pas de lois non écrites, les notions comme la conscience
et l'éthique sont considérées comme des anachronismes.
L'absurdité est que cette civilisation le cultive alors qu’il commence à détruire ses fondations. Cet
homme précisément et les modalités de sa constitution sont le centre du regard de Strindberg.
Avec son grand talent et génie, il attrape en état d’embryon les phénomènes cachés des yeux de
tout le monde et met en garde l’homme de ce qu’il se passerait s’il ne prend pas conscience de la
situation. Mais l’homme ne prend pas conscience et nous sommes déjà à l'époque où le barbare
civilisé détient les règles du jeu, le monde est à lui, il ne reste que des petites alcôves marginales
attachées à d'autres valeurs.
Les peurs et les cauchemars de Strindberg sont les peurs et les cauchemars d'une corde, d'une
vibration humaine qui voit mieux que les autres.
Nous partons de ce point. Il se superpose à notre grande inquiétude, à l'objet même de Sfumato :
ne pas livrer l'homme à l'amnésie de ce que l'esprit humain a réalisé lui-même.
Margarita Mladenova
La Danse de Mort
August Strindberg
Strindberg – La Danse des Mortels
Le point commun entre Fröken Julie et La Danse de Mort : un regard non romantique,
impudiquement cruel, sur l'homme, entre Eros et Tanatos.
Fröken Julie : l'érotique comme abject et humiliant. La mort comme issue. Mais il y a toujours des
« Dis que tu m'aimes ! »
Des années plus tard, La Danse de Mort.
- Pouvez-vous aimer le visage hideux de l'autrui ? (Dostoïevski)
- Je ne peux pas, c'est au-delà de mes forces. (Strindberg)
L'amour s’est écroulé dans la haine. La haine comme passion, comme forme de vie, comme
élément désastreux. La mort ne vient pas car elle est déjà venue, elle est ici depuis longtemps.
Une mort toujours en vie. Une mort vivante. Elle danse avec nous. Nous dansons avec elle.
Comme si le « tout vivant - tout vivant - tout vivant » (Tchekhov) a été exterminé et sur Terre ne
sont restés que les trois derniers : Edgar, Alice et Kurt. Souffrant tous de la même peste qu'un
poste de quarantaine ne peut arrêter. Souffrants de la haine.
Elle maintient le pouls des cœurs en pierre, elle gouverne « l'esprit éclairé » impuissant face à
elle.
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Le grand projet de la civilisation - l’Homme avec un grand H - échoue dans l'homme (l’humain).
L'effondrement du Surhomme (Nietzsche) à l'animal.
De ce point à l'absurde-ridicule du tragique, à « La Fin de Partie » (Beckett), il n’y a qu’un pas.
Quand l'Esprit est mort « il reste autant de bruit que pour un panier de merde, autant de bruit ! »
(Alice)
Margarita Mladenova
Strindberg à Damas
Georgi Tenev et Ivan Dobchev
Ceci est une pièce pour le temps, pour l'accomplissement total et créatif de la vérité jusqu'à la
pénétration. Une pièce pour la pièce future. Atteindre le non réalisé, le rêve, l'absolu. L’inexplicable.
Au delà du visible, au delà du possible. Dans Damas. Damas est une métaphore – un point crucial,
un endroit où une autre vie commence, où tu deviens un autre - l'inverse de celui que tu étais, de
celui qui t’étais familier, du commun que tu étais ... Damas est l'inconcevable. Le désir créatif
inextinguible de transformation.
Cette pièce se réfère au grand texte de Strindberg Le Chemin à Damas. L'excitation de ce texte
nous a fait imaginer ce voyage à travers les rêves de Strindberg, à travers les documents
entremêlés aux faits réels et suppositions émergeants de la biographie de l'écrivain. A travers les
hypothèses sur ses crises, sur son épreuve humaine - trop humaine - de l’esprit, sur son étirement
au delà des limites de la réalité, d’où le retour parfois est impossible.
Ceci est la pièce d'aujourd'hui. On est bien loin de la prétention du roman biographique. Ensemble,
avec George Tenev, nous y avons inscrit nos propres sensations, notre propre expérience dans le
respect de la personnalité du plus grand écrivain scandinave : l’audacieux August Strindberg à la
recherche de l’humain.
Ivan Dobchev
3 Trident
Atelier Sfumato
Margarita Mladenova, Ivan Dobchev
Nous sommes concernés par les pré-images de la conduite spirituelle humaine.
Le théâtre est entré dans le XXIè siècle comme une Arche de Noé qui porte la mémoire du
Spirituel à travers le Déluge du matériel.
Pour nous le mot esprit est équivalent à l’impulsion créative.
Avec son étymologie et sa force métaphysique.
L’excitation créative est la mesure du sens.
Sfumato est une stratégie créatrice qui suit sa conviction que l'artistique et le spirituel ont
une nature commune. Nous ne nous intéressons pas tellement à l'homme en tant que tel, ni
à l'homme en communauté, mais plutôt à l'homme dans sa genèse.
Nous voyons le théâtre comme une intuition pour la genèse, comme une vie verticale qui
rebondit sur « la prose du temps », qui étire l’ « ici » jusqu’à « là », le « maintenant »
jusqu’au « toujours ». Un théâtre de l'exagération.
Le spectacle comme « une machine à transporter ailleurs » (Antonin Artaud)
L’atelier théâtral « Sfumato » est créé en 1989. Ses fondateurs, les metteurs en scène
Margarita Mladenova et Ivan Dobchev, sont aussi les producteurs de leurs idées. Le « Sfumato »
est un théâtre d’état au statut de théâtre-laboratoire. Son nouveau lieu est en train de se
développer en centre international d’innovation théâtrale.
Le fonctionnement de « Sfumato » en tant que territoire de recherches théâtrales est basé sur
les principes artistiques suivants :
¾ Programmes à long terme
afin de pénétrer dans la poétique d’un auteur, d’un texte, d’un thème via quelques spectacles. Le
programme est une expédition spirituelle vers un territoire mystérieux, une pénétration dans le
monde d’un auteur : une passion pour le creusage. Dans chacun de ces mondes immenses
insondables on vit selon certaines lois, elles doivent être découvertes (senties et reconnues),
acceptées et respectées, créant ainsi la poétique du spectacle. On travaille sur la nature
inconditionnelle de l’énergie dans la convention de l’œuvre. On cherche le langage, la forme, la
dramaturgie théâtrale des contenus découverts, -qui ne sont pas simplement des significations-,
on cherche l’esthétique.
Programme
Programme
Programme
Programme
Programme
Programme
Programme
Programme
Programme
Programme
Tchekhov
Yovkov
Raditchkov
Mythes
Archetypes
Nomina Trivialia
Dostoievski
Exit
Strindberg
Gogol
1989-1996
1991-1992
1993-1994
1997-1998
1997-2000
2001-2002
2003-2005
2005-2007
2006-2007
2008-2009
¾ « Expéditions » préliminaires
Première étape de chaque projet pour acquérir des connaissances scientifiques et factuelles sur un
thème, grâce à un large éventail d'experts : poètes, philosophes, linguistes, théologiens, etc. Les
expéditions restaurent le syncrétisme du processus créatif, le lien entre la théorie et l’empirisme.
Elles transforment l’œuvre théâtrale en un espace unique d’enrichissement au croisement de la
science et de l'art. Elles mettent en contre un profilage artisanal.
¾ Ateliers
L’atelier introduit un groupe d’acteurs, engagés autour du thème du projet bénévolement, dans
l’espace et la poétique du futur spectacle.
L’objectif-rêve de l’atelier est de provoquer de l’excitation dans la nature artistique, de créer un
espace vital autour de la vision du nouveau projet. Si l’on recourt à une analogie, ce processus
4 Trident
ressemble à l’entrainement des cosmonautes afin qu’ils puissent alunir et marcher sur la lune
dans des conditions terrestres.
¾ Participation aux forums internationaux et aux projets multilatéraux
A part les participations annuelles dans tous les festivals en Bulgarie, le « Sfumato » a donné
plus de 200 représentations dans le cadre d’une quarantaine de festivals comme : Festival
D’automne A Paris, (12 représentations du programme Strindberg en 2008) ; Teater Der Welt,
Berlin ; ContacT, Torun ; Mittelfest Italie ; L’ete D’ohrid, Macédoine ; Bonner Biennale ; Fiat,
Podgoritza ; Ex Ponto, Ljubljana ; Baltic House, Saint Petersburg, Sibiu, Roumanie, etc. ; ou en
tournée à l’étranger à : Hambourg, Leipzig, Luxembourg, Vienne, San Marino, Zurich, Rijeka,
Novosibirsk, Theatre National de Bucarest, au Theatre Studio, Varsovie ; Théâtre des Nations,
Moscou ; Culturgest, Lisbonne ; Shizuoka Performing Arts Center, Japon ; Piccolo Teatro Di Milano
et deux mois avec 40 représentations au Théâtre de la Tempête, Paris ; Suwon Hwaseong Théâtre
de la Forteresse, Suwon, Korée.
Le « Sfumato » a réalisé de coproductions avec Le Festival D’avignon, Òeorem, France, Hebbel
Theater, Berlin ; Passages, Nancy ; Mes-Sarajevo ; et de projets européens dans le programme 25
++ de Culturesfrance, France ; Seas Black/North d’Intercult, Suède en tant que co-organisateur.
¾ Programme parallèle
« La Petite Saison », festival annuel des jeunes artistes ; projections de films alternatifs et non
commerciaux ; programme vidéo de clips des spectacles de « Sfumato »
Le Cercle « Sfumato » : soirées poétiques, concerts, expositions photographiques, vernissages des
livres, séminaires, discussions, rencontres avec le public.
Presque toutes les productions du « Sfumato », ses metteurs en scène et ses acteurs ont reçu de
nombreux prix nationaux.
Prix internationaux :
Apocryphe
1997 Meilleur radio spectacle du Festival International Radio, Croatie
1998 2e Prix pour radio spectacle du Festival International Radio, Berlin
L’Atoll, co-production Radio Nationale, T.A.G.&Ars Digital
1999 Meilleure radio pièce européenne du Grand Prix Europe, Berlin
La Toison Noire
2000 Le Laurier d’Or du meilleur spectacle
Le Prix du Public du Mes-Sarajevo, Bosnie
2001 Prix spécial du spectacle
Le Prix de dramaturgie – à Margarita Mladenova et Ivan Dobchev ;
Le Prix de musique – à Assen Avramov ;
Le Prix d’Argent du public
du Festival International des Petites Scènes, Rijeka, Croatie
La Danse de mort
2008 Le Prix Veljko Marièiæ du meilleur acteur – à Vladimir Penev
Le Prix Veljko Marièiæ du meilleur acteur épisodique – à Tzvetan Aleksiev
Le Prix de musique – à Assen Avramov
du Festival International des Petites Scènes, Rijeka, Croatie
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A propos du Théâtre Sfumato
Margarita Mladenova et Ivan Dobchev venaient d’avoir quarante ans lorsqu’ils ont créé le Théâtre
Sfumato en 1989 à Sofia. L’un et l’autre étaient déjà des metteurs en scène reconnus et des
pédagogues appréciés– et ils embarquèrent dans l’aventure une poignée de jeunes acteurs qu’ils
avaient formés. Ils avaient contribué au renouveau du théâtre bulgare depuis trop longtemps pris
dans les rets de l’empire soviétique : lourdes institutions et fossilisation dogmatique de
l’enseignement de Stanislavski. Si cette union fit leur force, c’est qu’elle se fondait sur une
commune et exigeante vision du théâtre que résume bien le nom de leur troupe emprunté à
Léonard de Vinci, et que leur union allait radicaliser.
Le sfumato désigne une technique de dessin, de peinture, qui consiste à brouiller les contours, à
cerner, à peindre l’air, l’impalpable. « Le nom de notre troupe reflète notre stratégie poétique »,
disaient Mladenova et Dobchev. Autrement dit, moins le trait que son mouvement, plutôt
l’indistinct et ses mystères que l’affirmation péremptoire, la dynamique du geste que son
accomplissement, le processus que le résultat. « Nous ne cherchons pas un théâtre descriptif
mais, dans le jeu des acteurs, une vérité du courant intérieur qui ne s’épuise pas dans la réalité
visible », ajoutent-ils. Comme l’écrit Heinz Wismann, « le théâtre Sfumato met l’accent sur le
surgissement initial de l’élan et fait en sorte qu’il ne soit pas absorbé par la logique de l’efficacité
». « Pour nous, poursuivent Margarita et Ivan, le spectacle est une action, un rite spirituel qui a lieu
ici et maintenant. Car le rite ne peut être ni imité, ni répété. C’est cela qui détermine la nature de
la présence de l’acteur dans nos spectacles : tout le travail de répétition consiste à le diriger vers
des réflexes non conditionnés, à favoriser une impulsion créatrice ».
Très vite, ils tomberont sur cette phrase du peintre Odilon Redon qui deviendra leur mot d’ordre et
leur règle d’or : « la logique du visible au service de l’invisible ».Tous les spectacles du Sfumato se
déroulent sous haute tension. Découvrir une telle aventure dans un pays alors surtout connu pour
ses yaourts et ses parapluies et qui venait tout juste de s’ouvrir au monde occidental, fut un choc.
Cela se passait en 1990 dans un recoin d’un gigantesque et prétentieux Palais de la culture de
Sofia où Lénine avait été plus d’une fois le héros de spectacles grandiloquents. Là, avec la
complicité d’un vice ministre clairvoyant, le Sfumato avait installé une sorte de campement, un
ilôt de théâtre vivant et incandescent au sein d’un mausolée. À la lueur de bougies, des acteurs
aux traits acérés nous entraînaient dans les méandres de Petar Atanassov, un Rimbaud bulgare
dont l’œuvre avait été longtemps interdite, ou nous promenaient dans l’œuvre de la russe Ludmilla
Petrouchevskaïa que nous avait fait connaître la perestroïka. Dès l’année suivante, ils campaient
sous des bâches dans le sous-sol de Beaubourg, invités par le Festival d’Automne à Paris. Dobchev
venait avec la mise en scène de Témoignage de lumière pendant la peste, un spectacle conçu à
partir de l’œuvre d’Atanassov dialoguant avec des passages de la Bible et du Festin au temps de
la peste de Pouchkine. Mladenova signait post scriptum, un voyage dans l’œuvre de Tchekhov à
partir de la scène finale de La Mouette : le suicide de Constantin Gavrilovitch Treplev, le fils de la
grande actrice Akardina. Cinq ans plus tard, le Sfumato était au Festival Passages à Nancy avec
deux Tchekhov, Oncle Vania (Dobchev) et Les Trois Sœurs (Mladenova). Et cette saison, la trilogie
Strindberg ayant pour titre Vers Damas ira au Festival Passages en mai 2009 après sa venue au
Théâtre de la Bastille dans le cadre du Festival d’Automne.
Désormais dénommée «Théâtre-laboratoire Sfumato» (un clin d’œil au mythique théâtre
Laboratoire de Grotowski avec lequel le Sfumato partage plusieurs visées), la compagnie n’empile
pas les spectacles mais conçoit sa démarche exploratoire à partir d’un projet, généralement
autour d’un auteur. Tchekhov, de 89 à 96, puis Lovkov, Raditchkov, les mythes, Dostoïevski de
2003 à 2005, le projet Exit autour des derniers jours de Léon Tolstoï et Marina Tsvetaeva, et
maintenant, Strindberg. Autant de voyages au long cours, de répétitions, d’improvisations des mois
durant, un temps lent nécessaire pour pénétrer « l’esprit » de l’auteur, approcher son « secret » et,
au-delà, interroger « la grande énigme de l’existence ». Il y a longtemps que les gens du Sfumato
ont quitté la soupente du Palais de la culture désormais voué aux spectacles de divertissement.
Après bien des péripéties – un théâtre qui brûle, un autre dont ils sont expulsés pour cause
d’opération immobilière – ils sont désormais installés au bord d’un jardin au centre de Sofia, dans
un théâtre que toute l’équipe du Sfumato a façonné de ses mains dans d’anciens bains de la ville
depuis longtemps abandonnés.
Jean-Pierre Thibaudat,
conseiller artistique au Festival Passages de Nancy
6 Trident
«Le théâtre représente pour nous une autre forme de vie – plus concentrée, plus pure et plus
élevée. Soit l’existence d’une communauté de personnes qui ont quelque chose à échanger, qui se
réjouissent de leur rencontre, la partagent et sont prêts à donner beaucoup d’eux-mêmes. Une vie
de personnes étroitement liées où chacun se découvre à travers l’autre, en échangeant avec lui
son énergie spirituelle, dans une complicité qui s’avère un rite mystérieux des âmes et peut nous
restituer un sentiment perdu de sainteté, de pureté, et de chaleur humaine. Le théâtre est une vie
bouillonnante. Le théâtre n’est pas le lieu de la rencontre, il est la rencontre elle-même ».
Margarita Mladenova
Ivan Dobchev
Mademoiselle Julie, d’Eros en Thanatos
Première étape de la trilogie Vers Damas qui traverse l’œuvre d’August Strindberg à la nage et
souvent en apnée, Mademoiselle Julie, une pièce en un acte, en un souffle, fulgurante. En 1883,
l’auteur avait quitté la Suède et ses théâtres, mettant en péril la carrière d’actrice de son épouse
Siri. À la veille du printemps 1888, au Danemark, il met un point final à son Plaidoyer d’un fou
(écrit en français), l’une de ses œuvres autobiographiques où il dissèque à l’envi sa vie de couple.
Peu après, il découvre Friedrich Nietzsche, le lit avec exaltation, « Tout y est ! », écrit-il à un ami.
La famille Strindberg (deux enfants) passe l’été au Danemark, à Lyngby, louant des chambres
dans un château tenu par une comtesse extravagante. C’est là qu’August écrit Mademoiselle Julie
en deux semaines, s’inspirant sans doute des personnes qui vivent dans ce château, dont la jeune
Marta, avec laquelle Strindberg aura une brève aventure. En scène, trois personnages :
Mademoiselle Julie, la fille du comte, Jean, un valet, Kristine, la cuisinière. L’action se déroule dans
La cuisine du château, la nuit de la Saint-Jean. Une nuit de fête, une nuit de folie. « Ce soir
Mademoiselle Julie est folle, complètement folle », première réplique de la pièce. Au bout de la
nuit, la fille du comte ayant couché avec le valet fiancé à la cuisinière, obéit à l’ordre de son
amant : elle sort pour aller se suicider. Dans une longue préface, Strindberg s’attarde sur
l’ambivalence des personnages. Mademoiselle Julie « est un caractère moderne » mais « elle est
également une survivance de l’ancienne noblesse guerrière ». Jean, fils de journalier, «monte déjà
sur l’échelle sociale et il est suffisamment fort pour ne pas se gêner en profitant d’autrui ».
Seigneur en herbe, il hésite « entre la sympathie pour les hautes sphères et la haine pour ceux qui
les occupent ». Enfin Kristine est «une esclave féminine » qui va « à l’église pour se décharger sur
Jésus de ses larcins domestiques et acquérir une nouvelle provision d’innocence ». Quand elle entre
en scène, Mademoiselle Julie invite Jean à danser avec elle encore une fois. Il obéit. Elle règne en
maîtresse, elle le désire, mais l’acte consommé, tout se renverse. D’Eros en Thanatos. « La victoire
de Julie devient vite la victoire du valet. Jean, ayant mêlé son sang à celui de la race des forts,
devient fort à son tour. Julie n’aura plus qu’à lui obéir, et quand il lui donnera l’ordre de se tuer,
elle se soumettra, comme hypnotisée », écrit Arthur Adamov dans l’essai qu’il a consacré à
Strindberg. Et ce dernier d’ajouter : « Il en est de l’amour comme de la jacinthe : elle doit se
développer par ses racines dans l’obscurité avant de donner des fleurs durables. Ici, l’amour
pousse trop vite, il fleurit et monte tout de suite en graine et c’est pourquoi la plante meurt aussi
rapidement ». Tournant le dos à ce qu’il nomme « le dialogue à la française », Strindberg laisse
« les cerveaux travailler sans règles comme ils le font dans la réalité, où une conservation
n’épuise jamais un sujet, mais où les cerveaux s’envoient mutuellement des leurres qui leur
permettent de rebondir ». Ainsi la nuit blanche de la Saint-Jean est-elle zébrée d’un dialogue
«erratique» mais on ne peut plus serré. « Prenez une côte de mouton, écrit Strindberg, elle paraît
large, mais elle est aux trois quarts faite d’os et de graisse, et comme les Grecs, je vous donne la
noix ». Strindberg parle de Kristine comme d’un personnage secondaire. Ce n’est pas l’avis du
théâtre Sfumato qui a retitré la pièce (trop souvent mise en scène autour d’une actrice star jouant
le rôle titre), Julie, Jean et Kristine soulignant ainsi le jeu de tensions entre les trois personnages et
les ravages qui en résultent à tous les étages dans un monde où l’être humain « cesse d’être
l’objet absolu de la civilisation », dit Margarita Mladenova qui signe la mise en scène. Une froide
cuisine métallique occupe la scène, aseptisée comme un laboratoire, une clinique. Propre jusqu’à
l’effroi. L’eau bout dans des bassines pour laver la saleté. À la face, une rigole rigoureuse charrie
les eaux usées. C’est adossé à ce paysage quasi clinique que le Sfumato cuisine la pièce.
Jean-Pierre Thibaudat,
La Danse de mort, ou le triomphe de la haine comme passion
Le voyage Vers Damas du Sfumato à travers l’œuvre de Strindberg se poursuit avec La Danse de
mort, pièce adaptée et mise en scène par Margarita Mladenova.
7 Trident
Douze ans ont passé depuis l’écriture de Mademoiselle Julie. Strindberg a divorcé d’avec sa
première femme, une ancienne actrice ; lui a succédé une journaliste, nouvel échec. Et voici qu’au
printemps 1900, il fait la connaissance d’une jeune actrice norvégienne de vingt-deux ans, Harriet
Bosse. Après une longue période où il côtoie la folie, après Inferno, il a retrouvé les voies de
l’écriture dramatique. En 1898, il a écrit les deux premières parties du Chemin de Damas. L’année
suivante sont venus ses grands drames historiques, et à l’automne 1900, coup sur coup, il écrit
sans guère de ratures deux grandes pièces, une dizaine de jours pour chacune, Pâques et La
Danse de mort. La première se termine par une scène de réconciliation, la seconde est marquée de
bout en bout par la haine. Dans La Danse de mort, tout se passe sur une île que les habitants
nomment « le petit enfer ». Là, dans la tour circulaire d’une forteresse qui fut une ancienne prison,
vit un couple que l’on croirait uni puisqu’il a tenu le coup et s’apprête à fêter ses noces d’argent
(vingt-cinq ans de mariage). Il n’en est rien. La haine habite Edgar, capitaine d’artillerie, et Alice,
son épouse, une ancienne actrice. La haine de l’un envers l’autre, la haine des autres, la haine de
soi. Leurs enfants sont partis, ils n’ont pas d’amis, les domestiques ne s’attardent pas, l’argent
manque, le garde-manger est vide, et la cave n’a plus vu de bouteilles depuis cinq ans. En
coulisses, on entend de la musique comme dans Mademoiselle Julie, un voisin, le docteur, a invité
des amis, Edgar et Alice n’en font pas partie. D’ailleurs, d’amis, ils n’en ont pas ; la détestation est
absolue, et c’est peut être ce qui les réunit. Le capitaine rumine son absence de promotion, Alice
sa carrière d’actrice avortée, elle joue du piano mais leurs goûts musicaux sont opposés. Ils n’ont
rien d’autre à se dire que de s’envoyer à la figure le néant de leur vie à coups de « vieilles
répliques éculées », comme dit le capitaine. Le sarcasme et la saillie agressive sont la monnaie
courante de leur dialogue quotidien, en attendant la mort qui est déjà à l’œuvre. « Leurs âmes
sont mortes. Ce sont deux corps –deux momies ressemblant à des êtres humains – qui entament
une lente danse à travers le néant », dit Margarita Mladenova. Arrive Kurt, un ami du temps jadis.
Une chance, une possibilité de salut ? Rien de tel. C’est Kurt qui est entraîné dans leur cercle
infernal, sa présence ne faisant qu’exacerber la haine, l’abjection et la destruction, tiraillé qu’il est
entre l’un et l’autre. Deux chiens se disputant un os. Et à son tour devenu chien, Kurt mord le cou
d’Alice, son amour de jeunesse. Il prendra la fuite, et le couple se retrouvera face à face au fond
d’un commun abîme. « Et là, dit Mladenova, de cet abîme, s’élève un absurde espoir, aussi faible
que le cri d’un nouveau-né, l’espoir de « quelque chose de mieux » face à la mort imminente
(Edgar étant réellement condamné et le disant). Pour se purger. Pour commencer après la fin ».
Vanité du couple, faillite de l’amour, triomphe de la haine comme passion, et de la mort dans la
vie même. « La joie ? Qu’est-ce-que c’est ? », demande le capitaine à son épouse. « Ce n’est pas à
moi qu’il faut le demander », répond-elle du tac au tac. C’est l’une des premières répliques de la
pièce. Et la dernière : « Donc, noces d’argent… passer l’éponge et continuer. Continuons », dit le
capitaine. C’est déjà du Beckett, ce que souligne Mladenova : « la mort maintient le pouls des
cœurs en pierre, elle gouverne « l’esprit éclairé » impuissant face à elle. Le grand projet de
civilisation – l’Homme avec un grand H – échoue dans l’homme (l’humain). Effondrement : du
Surhomme (Nietzche) à l’animal. De là à l’absurde-ridicule du tragique, à Fin de partie (Beckett),
il n’y a qu’un pas ».
Jean-Pierre Thibaudat,
Strindberg à Damas
Le dernier volet de la traversée Strindberg du théâtre Sfumato part du Chemin de Damas, une
longue pièce en trois parties (rarement montée intégralement) que l’auteur écrira en deux temps
sur une période s’étalant sur dix ans. « C’est un poème qui repose sur une terrible demi-réalité »,
écrit-il. L’histoire d’un Inconnu, de ses errances, de ses questionnements, de ses rencontres…
Strindberg propose à Harriet Bosse, une jeune actrice d’origine norvégienne de vingt-deux ans,
d’interpréter le rôle de la Dame après l’avoir vue jouer le rôle de Puck dans Le Songe d’une nuit
d’été de Shakespeare. Dans son journal, il rapporte un « incident inexplicable » qui s’est produit le
jour de la répétition générale, le 15 novembre 1900. Dans l’une des scènes cruciales, la Dame qui
porte une voilette doit donner un baiser à l’Inconnu. Strindberg monte sur scène, s’approche de
l’actrice et lui parle de ce moment du baiser. Alors, écrit-il, « le petit visage de Bosse se
transforme, s’épanouit et s’emplit d’une beauté surnaturelle ; il semblait s’approcher du mien et
ses yeux m’enveloppèrent de flammes noires. Puis, sans raison, elle partit en courant, et je suis
resté interdit, ayant l’impression d’un miracle et d’avoir reçu un baiser qui venait de m’enivrer ».
Quand il l’épouse en mai 1901, il a cinquante-deux ans. Quelques jours plus tard, il colle dans son
journal une dépêche d’un journal qui lui apprend la mort de Dagny Juel, assassinée par un amant
avec lequel elle s’était enfuie à Tbilissi. Strindberg avait connu cette jeune femme fascinante au
Cochonnoir, un célèbre pub de Hambourg. Grande buveuse d’absinthe, militante de l’amour libre,
surnommée Aspasie (en référence à la maîtresse de Périclès), elle fut un modèle aimé d’Edvard
2 Trident
Münch. Elle avait été l’amante de Strindberg (alors marié avec Frida, la journaliste autrichienne)
avant de partager la vie de l’écrivain et essayiste polonais Przybyszewski.
On retrouve tous ces éléments et d’autres (la correspondance entre Strindberg et Nietzsche, son
Journal occulte, son obsession des psychiatres) dans Strindberg à Damas, titre donné par le
Sfumato à ce troisième volet qui s’éloigne du texte même de la pièce Le Chemin de Damas (mais
non de certaines scènes) pour cheminer plus avant, avec et dans Strindberg. « L’exaltation de ce
texte nous a fait imaginer un voyage à travers les rêves de Strindberg, à travers des documents
entremêlés à des faits réels et des suppositions émergeant de la biographie de l’écrivain, à travers
des hypothèses sur ses crises, sur son épreuve humaine – trop humaine – de l’esprit, sur son
étirement au-delà des limites de la réalité, d’où le retour parfois est impossible », explique Ivan
Dobchev qui signe la mise en scène et a établi le texte avec Georgi Tenev, suite à deux très longs
workshops avec les acteurs du Sfumato. Une tentative pour « atteindre le non réalisé, le rêve
absolu. L’inexplicable. Au-delà du visible, au-delà du possible. Dans Damas ». Damas (ou Tbilissi)
comme métaphore. Le Sfumato prolonge la forme dramatique du « drame » itinérant ou du
« pèlerinage dramatique » chère à Strindberg (sa dernière pièce aura pour titre La grand-route) qui
n’aura jamais cessé d’entremêler l’histoire de ses pièces et celle de sa vie. Mais c’est un voyage
qui délaisse le monde extérieur pour explorer le monde intérieur. Il en va des personnages de cette
pièce comme de ceux des trois parties du Chemin de Damas décrits ainsi par Arthur Adamov : ils
« sont à la fois Strindberg lui-même, et ceux avec qui la vie l’a mis aux prises. Et cela donne une
assez grandiose réunion, où chacun ressemble à l’autre par un certain côté, où tout le monde
cligne des yeux dans une connivence épouvantable ».
A travers cette trilogie, à travers ce cheminement dans les méandres de la « blessure » de
Strindberg, « cette blessure que chacun porte en son cœur », disent Margarita Mladenova et Ivan
Dobchev, le théâtre Sfumato n’a peut-être jamais si bien porté son nom.
Jean-Pierre Thibaudat,
3 Trident
Les parcours
Margarita Mladenova et Ivan Dobchev
Metteurs en scène et co-fondateurs du Laboratoire Sfumato à Sofia, Margarita Mladenova et Ivan
Dobchev, qui assurent respectivement les fonctions de directrice et directeur artistique du
Sfumato, sont, par ailleurs, professeurs à l’Académie nationale bulgare de théâtre et de cinéma /
NATFA. Ils ont réalisé de très nombreuses mises en scène de textes classiques bulgares, russes et
ouest-européens, tant au théâtre ou à l’opéra que pour la télévision.
Margarita Mladenova a notamment présenté des œuvres de Molière, de Sophocle, d’Alfred de
Musset, de Peyo Yavorov, d’Ivan Tourguenev, d’Anton Tchekhov, au Théâtre National Ivan Vasov de
Sofia, au Théâtre Satirique, et dans plusieurs centres dramatiques nationaux en Bulgarie.
Ivan Dobchev a réalisé plus de cent vingt mises en scène, d’Ivan Vazov d’après Yordan Raditchkov
au Théâtre National, à Georg Büchner, Samuel Beckett, Heiner Müller, Yordan Yovkov… L’un et
l’autre sont lauréats de nombreux prix décernés tant au niveau national que par les festivals de
Croatie et de Bosnie. Tous deux ont donné des cours à l’Académie des arts modernes et à la
Sorbonne.
Margarita Mladenova, metteur en scène.
Co-fondatrice, au même titre qu’Ivan Dobchev, de l’Atelier « Sfumato » à Sofia et sa directrice.
Professeur à l’Académie nationale bulgare de théâtre et cinéma /NATFA/.
M. Mladenova a crée pour le théàtre dramatique, la télévision et l’opéra plus de 150 mises en
scène de textes classiques bulgares, russes et ouest-européens au Théâtre National « Ivan
Vazov », Théâtre Satirique, Théâtre « Sofia » et dans plusieurs CDN en Bulgarie, parmi lesquelles
les mises en scène d’après les œuvres de Molière, Sophocle, A. de Musset, P. Yavorov, K. Iliev, I.
Turgenev, Tchekhov.
M. Mladenova est lauréate de distinctions et prix nationaux de théâtre pour plus d’une vingtaine de
ses productions. Ses spectacles ont reçu aussi des prix aux festivals en Croatie et en Bosnie. Elle
a donné des cours à l’Académie des Arts Modernes et à la Sorbonne à Paris.
¾
1989
1989
1990
1994
1995
1996
1997
2006
2007
2007
2009
Créations « Sfumato »
La Mouette, A. Tchekhov, avec Ivan Dobchev
On joue Petrouchevska, d’après L. Petrouchevska
P.S., d’après A. Tchekhov
Le Péché Zlatil, d’après Yordan Yovkov
L’Herbe folle, d’après Yordan Raditchkov
Les Trois sœurs, A. Tchekhov
Apocryphe création, avec Ivan Dobchev, première au Théâtre de la Manufacture,
Nancy, France
Antigone la Mortelle, d’après Sophocle
La Toison Noire, création, avec Ivan Dobchev
La Vallée de l’ombre de la mort : Aliocha, d’après Dostoievski, première au Théâtre de
la Tempête, Paris
Exit : Station Elabuga, d’après les poèmes de M. Tzvetaeva
Vers Damas : Julie, Jean et Kristine /Frocken Julie/, A. Strindberg
Vers Damas : La Danse de mort, A. Strindberg
OOOO - Les Rêves de Gogol, création, avec Ivan Dobchev
¾
1996
1997
1997
La Cerisaie, A. Tchekhov, avec Ivan Dobtchev, Festival d’Avignon
Le Petit Pouchkine, avec Ivan Dobtchev, Scène Nationale de Mâcon
Les Noces en sang, Lorca, avec Ivan Dobtchev, Conservatoire de Paris
1998
2000
2004
Créations en France
Mis à part les ateliers au « Sfumato » précédant toute création, M. Mladenova a dirigé, avec Ivan
Dobchev, également des Ateliers à l’étranger, parmi lesquels les ateliers Tchekhov, Lorca,
Pouchkine, M. Pavich, Beckett au Théâtre Paris-Villette, Théâtre de la Colline et au Théâtre de la
Tempête avec la participation de comédiens français ; d’étudiants du Conservatoire National d’Art
Dramatique de Paris ; de comédiens espagnols à Madrid ; plusieurs ateliers avec des étudiants de
l’Université de New York à Varna.
4 Trident
En 2006, M. Mladenova a produit à « Sfumato » le premier atelier international « De l’extérieur
vers l’intérieur », en équipe avec Ivan Dobchev, pour les acteurs de 8 pays -Géorgie, Bulgarie,
France, Lituanie, Russie, Belgique, Roumanie, Ukraine-, dans le cadre du programme européen
« 25++ : Emergences artistiques en Europe », initié par Culturesfrance. Leur deuxième atelier
international « Humain, trop humain » a eu lieu à Balchik en juin 2008, avec des acteurs de
Bulgarie, Belgique, Slovenie, Suède, Danemark, Ukraine, Macédoine, Turquie, Angleterre, dans le
cadre du projet « SEAS.Black/North », initié par Intercult, Suède.
M. Mladenova participe régulièrement avec ses créations réalisées à Sfumato, à des Forums
théâtraux bulgares et à de nombreux festivals internationaux comme : Le Festival d’Automne à
Paris, Le Festival « Passages », Nancy, Le Festival d’Avignon, France ; Luxembourg – Capitale
européenne de la culture, « L’été d’Ohrid », Macédoine ; Sibiu festival, Roumanie ; Bonner Biennale,
Teater der Welt, Berlin, Foire de Lepzig, Le Festival d’Eté de Hamburg, Allemagne ; Mittelfest,
Cividale, Festival « Migrations » du Piccolo Teatro di Milano, Italie ; San Marino Stage Festival ;
MES-Sarajevo, Bosnie ; Festival des Petites Scènes, Rijeka, Croatie ; Festival des Arts du Printemps,
Shizuoka, Japon ; Festival « Ex Ponto », Ljubljana, Slovenie ; Festival de Noel, Novosibirsk, Festival
« La Maison Balte », St. Petersbourg Russie ; Festival « FIAT », Monte Negro. Elles sont présentées
également au Hebbel Theater, Berlin ; Culturgest, Lisbonne ; Théâtre des Nations, Moscou ;
Théâtre Studio, Varsovie ; Théâtre de la Tempete, Paris, Suwon, Korée, etc.
Ivan Dobchev, metteur en scène.
Co-fondateur, au même titre que Margarita Mladenova de l’Atelier « Sfumato » à Sofia et son
directeur artistique.
Professeur à l’Académie nationale bulgare de théâtre et cinéma.
Dobchev a créé pour le théàtre dramatique, la télévision et l’opéra plus de 120 mises en scène de
textes classiques bulgares, russes et ouest-européens, parmi lesquelles les mises en scène au
Théâtre National « Ivan Vazov » d’après Y. Raditchkov, G. Buchner, S. Beckett, H. Muller, K. Iliev, Y.
Yovkov.
¾ Créations « Sfumato »
1989 La Mouette, A. Tchekhov, avec M. Mladenova
1989 Témoignages de la lumière au temps de peste, d’après A. Pouchkine
et P. Atanassov
1990 Paroles vers B., d’après S. Beckett et B. Papazov
1994 Le Péché Koutzar, d’après Y. Yovkov
1995 La Chute d’Icarus, d’après Y. Raditchkov
1996 Oncle Vania, A. Tchekhov
1997 Apocryphe, I. Dobchev et M. Mladenova, avec M. Mladenova, première au Théâtre de la
Manufacture, Nancy
1998 Tirésias l’Aveugle, d’après le mythe d’Œdipe
2000 La Toison Noire, I. et M. Mladenova, avec M. Mladenova
2001 Né à Bethel, I. Dobchev, coproduction MES-Sarajevo
2004 La Vallée de l’ombre de la mort : Ivan, d’après Dostoievski,
première au Théâtre de la Tempête, Paris
2005 Pas Moi, Samuel Beckett, coproduction avec La Radio Nationale Bulgare
2006 Exit : Station Astapovo, Ivan Dobchev, d’après des textes de L. Tolstoy
2007 Vers Damas : Strindberg à Damas, Georgi Tenev et Ivan Dobchev
2008 Lazare et Jesus, Ivan Dobchev
2008 Birth Mark, d’après N. Koliada
2009 OOOO-Les Rêves de Gogol, création, avec M. Mladenova
¾
1996
1997
1997
Créations en France
La Cerisaie, A. Tchekhov, avec M. Mladenova, Festival d’Avignon
Le Petit Pouchkine, avec M. Mladenova, Scène Nationale de Mâcon
Les Noces en sang, Lorca, avec M. Mladenova, Conservatoire de Paris
Mis à part les ateliers à « Sfumato » précédant toute création, Ivan Dobchev a dirigé, avec M.
Mladenova, également des Ateliers à l’étranger, parmi lesquels les ateliers Tchekhov, Lorca,
Pouchkine, M. Pavich, Beckett au Théâtre Paris-Villette, Théâtre de la Colline et au Théâtre de la
Tempête avec la participation de comédiens français ; d’étudiants du Conservatoire National d’Art
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Dramatique de Paris ; de comédiens espagnols à Madrid ; plusieurs ateliers avec des étudiants de
l’Université de New York à Varna.
En 2006 Ivan Dobchev a dirigé à « Sfumato » le premier atelier international « De l’extérieur vers
l’intérieur », en équipe avec M. Mladenova, pour les acteurs de 8 pays /Géorgie, Bulgarie, France,
Lituanie, Russie, Belgique, Roumanie, Ukraine/. dans le cadre du programme européen « 25++ :
Emergences artistiques en Europe », initié par Culturesfrance. Leur deuxième atelier international
« Humain, trop humain » a eu lieu à Balchik en juin 2008, avec des acteurs de Bulgarie, Belgique,
Slovenie, Suède, Danemark, Ukraine, Macédoine, Turquie, Angleterre, dans le cadre du projet
« SEAS.Black/North », initié par Intercult, Suède.
Ivan Dobchev participe régulièrement, avec ses créations réalisées à « Sfumato », aux Forums
théâtraux bulgares et à de nombreux festivals internationaux comme : Le Festival d’Automne à
Paris, Le Festival « Passages », Nancy, Le Festival d’Avignon, France ; Luxembourg – Capitale
européenne de la culture, « L’été d’Ohrid », Macédoine ; Sibiu festival, Roumanie ; Bonner Biennale,
Teater der Welt, Berlin, Foire de Lepzig, Le Festival d’Eté de Hamburg, Allemagne ; Mittelfest,
Cividale, Festival « Migrations » du Piccolo Teatro di Milano, Italie ; San Marino Stage Festival ;
MES-Sarajevo, Bosnie ; Festival des Petites Scènes, Rijeka, Croatie ; Festival des Arts du Printemps,
Shizuoka, Japon ; Festival « Ex Ponto », Ljubljana, Slovenie ; Festival de Noel, Novosibirsk, Festival
« La Maison Balte », St. Petersbourg Russie ; Festival « FIAT », Monte Negro. Elles sont présentées
également au Hebbel Theater, Berlin ; Culturgest, Lisbonne ; Théâtre des Nations, Moscou ;
Théâtre Studio, Varsovie ; Théâtre de la Tempete, Paris, Le Festival de la Forteresse, Suwon, Korée,
etc.
Théâtre-laboratoire Sfumato
Fondé par Margarita Mladenova et Ivan Dobchev en 1989, le Sfumato est un acteur culturel
indépendant reconnu par les pouvoirs publics bulgares. Il propose une démarche originale par son
activité de laboratoire artistique d’innovation théâtrale. Le jeu d’acteur y est considéré en tant que
processus, le spectateur est invité à découvrir le cheminement des artistes à travers l’univers d’un
acteur ou d’un texte.
Le Théâtre-laboratoire Sfumato anime des ateliers artistiques et réalise des productions théâtrales.
Il organise également des événements culturels ainsi qu’un festival, la « petite Saison », destiné à
promouvoir le travail des jeunes professionnels bulgares et des compagnies théâtrales
émergentes.
August Strindberg (1849-1912)
Ecrivain et auteur dramatique, il est le fils d’un membre de la bonne bourgeoisie suédoise, Oskar
Strindberg, et d’une fille d’auberge devenue gouvernante puis maîtresse de son père, ce dont porte
trace son récit autobiographique Le Fils de la servante (1886). Bachelier en 1867, il s’inscrit à
l’université sans trop savoir ce qu’il veut faire. Pour des raisons financières, il s’essaie parallèlement
aux métiers de journaliste, de comédien au Théâtre Royal Dramatique d’employé du télégraphe ou
de la Bibliothèque royale de Stockholm. Après une période de tâtonnements, il fonde l’association
Runa, vouée au culte du passé et de l’idéal nordiques. Il découvre alors Schiller, Byron et
Kierkegaard, et commence à écrire : La Fin de l’Hellade, tragédie en vers couronnée par l’Académie
suédoise (1869), Maître Olof (1872), ou encore l’Apostat. Après son mariage à Siri von Essen (1877)
dont il divorcera quelque dix ans plus tard, il publie Le Peuple suédois, un récit historique (1882)
et Le Nouveau Royaume, un roman qui ridiculise la société suédoise et les institutions
parlementaires juste instaurées, tout en critiquant des personnalités en vue. Attaqué pour son
irrévérence et abattu par ses malheurs conjugaux, Strindberg tombe sérieusement malade. Il
décide de s’exiler en France, où il publie des articles dans diverses revues parisiennes, ainsi qu’un
recueil de poèmes qui fait de lui l’un des pionniers du modernisme lyrique scandinave. Ce séjour
durant lequel il découvre Zola et les frères Goncourt ainsi que les études d’Hippolyte Bernheim et
celles de Jean Charcot sur le psychisme, donne lieu à une série de tragédies d’empreint
naturaliste : Père (1887), Mademoiselle Julie – la plus jouée de ses pièces – ou encore Créanciers
(1888). A revers du courant romantique alors sensible en Suède, Strindberg écrit des œuvres
satiriques sur la vie de couple, le creuset social et les contingences matérielles. Inspiré par
Nietzsche, avec lequel il entame une correspondance au milieu des années 1880, il fonde sa
conception des rapports humains sur la notion d’inégalité psychique et sur l’idée du
« surhomme » : toute vie sociale est combat, et c’est toujours l’être le plus fort psychiquement qui
l’emporte. Au milieu des années 1890, après l’échec de son deuxième mariage, il erre de
l’Allemagne à l’Autriche, en passant par le Danemark et l’Angleterre. A nouveau malade,
6 Trident
hospitalisé à Saint-Louis, il se croit persécuté, tente de mettre fin à ses jours, et fuit son
entourage. Il décrit la violente crise psychique qu’il traverse dans Inferno (roman écrit en français
en 1897, puis traduit en suédois). Il retourne ensuite à Stockholm, où il se fixe définitivement.
S’ouvre alors une période d’intense production : il écrit des pièces historiques – Gustav Adolf
(1899), La Reine Christine (1901) – et d’autres dites expressionnistes, presque toutes « itinérantes »
car les héros y sont perpétuellement en marche. C’est la trilogie composée du Chemin de Damas
(1898-1904), de L’Avent (1898) et de Pâques (1901), mais aussi La Danse de mort (1900) et Le
Songe (1901). Après un troisième mariage qui se termine par un nouvel échec, Strindberg continue
d’écrire et anime un théâtre d’avant-garde. Reconnu par la ville de Stockholm qui le gratifie d’une
souscription nationale pour son soixante-troisième anniversaire, il meurt d’un cancer quelques mois
plus tard.
Assen Avramov a fait ses études à l’Académie nationale de musique. Entre 1991 et 1997, il est
chef d’orchestre et compositeur du Théâtre Derrière le Canal. Co-fondateur d’Ars Digital Studio
(audio, vidéo, télévision) et professeur en théorie de la musique à l’Académie nationale de théâtre
et de cinéma de Sofia, il a composé la musique de toutes les créations de Margarita Mladenova et
d’Ivan Dobchev au Sfumato. Il travaille également avec d’autres metteurs en scène bulgares
reconnus au plan européen, comme Yavor Gardev, Alexander Morfov, Stoyan Kambarev, et Galin
Stoev.
Georgi Tenev a étudié les langues slaves à l’Université de Sofia, puis il a fait partie de la classe
de Margarita Mladenova et d’Ivan Dobchev à l’Académie nationale de théâtre et de cinéma de
Sofia. Il a écrit des romans dont La Centrale du parti (prix de la Fondation Vick 2007), Variations
Karamazov (2004), et le recueil de récits Retour de La Haye (2008), des pièces de théâtre comme
L’Atoll (avec Yavor Gardev et Assen Avramov, Prix européen de la Meilleure pièce radiophonique), et
Strindberg à Damas (avec Ivan Dobchev, nomination Askeer 2007). En 1999, il a publié La Peur du
résident du rappel, un recueil de poèmes en prose et de pièces dramatiques. Enfin, il est l’auteur
du poème La Citadelle (2002).
Daniela Oleg Liahova
Elle a fait des études de scénographie à l’Académie nationale des beaux arts de Sofia. Elle
travaille dans les domaines de la scénographie, de la peinture et du graphisme. Depuis 1997, elle
est scénographe aux côtés de Margarita Mladenova et d’Ivan Dobchev au Sfumato. En 2007, elle a
reçu les deux prix bulgares les plus prestigieux pour son décor de Julie, Jean et Kristine.
Lubomir Mladenov a fait ses études à l’Académie nationale de théâtre et de cinéma de Sofia,
dans le département de réalisation cinématographique (1991-1996). Il a participé aux festivals de
cinéma de Gyor, Kiev, Munich, Angers et Clermont-Ferrand.
En 1998, il a fait son service militaire au Centre audiovisuel de l’armée et a monté des films
produits par l’armée elle-même. Il a fait ses débuts au cinéma en 2002 avec Truth or Dare (Vérité
ou Oser). Entre 2003 et 2007, il a créé deux documentaires et deux courts-métrages, dont le
dernier a gagné le prix de Meilleur film balkanique au Festival Filmini à Sofia.
7 Trident
Les extraits de presse
www.lestroiscoups.com, le lundi 27 octobre 2008, Maja Saraczyska
Trilogie Strindberg, Julie Jean et Kristine et la Danse de Mort (Paris)
Mortelle(s) danse(s)
Dans le cadre du Festival d'Automne à Paris, le Théâtre de la Bastille accueille le Théâtrelaboratoire Sfumato. Cette compagnie bulgare propose avec sa Trilogie August Strindberg une
plongée angoissante et complexe dans l'univers de l'auteur dramatique suédois.
Première des pièces proposées, Mademoiselle Julie dépeint en un acte l'affrontement entre trois
êtres et trois esprits. Julie, fille du comte, Jean, le valet ambitieux et Kristine, réfugiée dans la
religion. La nuit de la Saint-Jean, la première séduit le deuxième pourtant fiancé à la troisième.
Une fois possédée, et sans espoir pour elle d'échapper au déshonneur, Julie se suicide.
L'ambiguïté de l'oppression
En choisissant volontairement de renommer la pièce Julie, Jean et Kristine, le Sfumato souligne
l'ambiguïté des liens unissant les trois personnages. Dans le jeu complexe auxquels ils se livrent,
les rapports de pouvoir ne se situent pas nécessairement là où ils devraient être, et Julie, sa
position sociale supérieure mourra de ses faiblesses.
À travers cette pièce à l'écriture nerveuse et resserrée, le combat qui est à l'œuvre est une guerre
de l'esprit. L'opposition des classes et des sexes se révèle dans une mécanique des discours
implacable et tranchante, à l'image de la mise en scène proposée par Margarita Mladenova. La
metteuse en scène installe, en effet, l'action dans une cuisine toute d'inox aux lumières cliniques.
Dans cet espace où l'on hache la viande et lave à grandes eaux, les protagonistes confrontent
leurs convictions religieuses et sociales sans parvenir à se comprendre. Le meurtre psychique de
Julie, qui la pousse au suicide physique, éclaire chacune des solitudes des trois personnages. Le
texte, interprété avec un réalisme énergique mais sans excès par les trois comédiens nous est
transmis avec d'autant plus de violence.
Étouffement mortel
Deuxième pièce de la Trilogie, La Danse de Mort partage selon Margarita Mladenova avec
Mademoiselle Julie « un regard non romantique, impudiquement cruel, sur l'homme ». Dans ce
texte très sombre, les personnages sont encore trois. Edgar, sa femme Alice et le cousin de cette
dernière Kurt. Les deux premiers qui ne se sont jamais aimés s'apprêtent à fêter leur noce d'argent,
et le troisième (qui a un temps aimé la deuxième) partage pour quelques heures leurs haines.
Comme dans Mademoiselle Julie, les personnages se jettent aux visages reproches et désillusions.
Mais à la différence de la précédente pièce, point ici de combat d'esprit ni d'amour, qui s'est
depuis bien longtemps tari. Les cœurs sont secs, aigris. Les propos amers et sans espoirs, d'un
pessimisme sombre, sont la seule monnaie d'échange de la sinistre maison.
Dans cette atmosphère étouffante, pesante, le jeu des comédiens aux accents parfois hystériques
accentue le sentiment de décomposition mortifère. La scénographie funèbre, les faibles lumières,
les costumes épais et empesés, tout concourt à souligner l'absence totale d'échappatoire. Le
ballet tragique des désillusions ne mène qu'à la mort, qui seule délivrera les esprits. Et tout
comme le trio on étouffe, pris dans la chape de plomb de leur danse hostile.
Le dimanche 26 octobre 2008
La Danse de mort (critique), Théâtre de la Bastille à Paris
De la haine, du désespoir, de la mort
Dans le cadre du Festival d’automne, le Théâtre de la Bastille accueille dans ses lieux une
compagnie bulgare, Théâtre-Laboratoire Sfumato. Dans une sorte d’hommage rendu au ThéâtreLaboratoire de Grotowski, les fondateurs de la compagnie, Margarita Mladenova et Ivan Dobchev,
incarneront et exploreront méticuleusement sur la scène parisienne l’univers dramatique d’August
Strindberg.
Fondé à Sofia en 1989, le Théâtre Sfumato se doit de (re)découvrir les œuvres dramatiques des
auteurs illustres, tels Tchekhov, Lovkov, Dostoïevski ou dernièrement Strindberg. L’enjeu est certes
8 Trident
délicat et risqué, mais abordé par la troupe de Margarita Mladenova et Ivan Dobchev avec
beaucoup de justesse et d’éloquence.
Cette fois-ci, le public parisien aura une vraie chance d’assister à une adaptation bulgare de la
Trilogie troublante d’après August Strindberg, ce précurseur suédois du drame moderne européen :
la Danse de mort, Strindberg à Damas (d’après le Chemin de Damas) et Julie, Jean et Kristine
(d’après Mademoiselle Julie).
La mise en scène de la Danse de mort que propose le Laboratoire Sfumato nous introduit et puis
nous entraîne véritablement dans l’univers strindbergien, par le biais d’une exploration profonde
des thèmes hantant obsessionnellement l’imaginaire et l’œuvre du dramaturge. La banalité et
l’humanité des sujets abordés – des relations humaines manquées, de l’isolement, de la solitude,
de l’amour et de la haine, du désespoir, de la mort – s’élèvent vers l’universel et le tragique, dans
un jeu transcendant des paradoxes, où l’espoir et le rire n’apparaissent qu’en face de la fin. Une
avant-fin de partie, un véritable enfer, que Strindberg associe à la vie humaine, sont recréés sur
scène grâce au recours à l’inquiétante ambiance sonore (musique et bande sonore amplifiée
d’Assen Avramov) et visuelle jouant sur les couleurs éteintes et sobres.
Ainsi, un couple vivant sur une île désertée, entourée des terres des ennemis, s’apprête à fêter les
noces d’argent, vingt-cinq ans de malheurs et de souffrances. Dans ce théâtre statique du
quotidien et d’arrêt sur l’image des gens – marionnettes accrochées aux objets : lit, fauteuils,
télégraphe… –, c’est la richesse de l’interprétation et la force intérieure des comédiens qui prônent.
Malgré quelques longueurs, Margarita Mladenova signe là une mise en scène austère et
minimaliste, en y installant un profond jeu de tension entre le cri et le silence, entre le
mouvement et l’immobilité, entre le moi et autrui.
Libération.fr, le 23 octobre, Maïa Bouteillet
Strindberg in vivo
Avec Vers Damas, le Sfumato propose un regard neuf sur trois pièces de l’auteur suédois, jouées
en bulgare surtitré dans le cadre du festival d’Automne.
Mademoiselle Julie en guise de mise en jambe avant la Danse de mort ? C’est ainsi que le projet
Strindberg des Bulgares du Teatro Sfumato s’inscrit au théâtre de la Bastille. Intitulée Vers Damas,
cette trilogie relie ces deux grandes pièces sur le couple écrites à des périodes différentes, mais
portées par un même regard acéré, une même violence. Elle s’achève ce week-end par un texte de
Georgi Tenev et Ivan Dobchev, Strindberg à Damas, en référence à une autre pièce-clé du
dramaturge suédois, le Chemin de Damas.
Fondé à Sofia il y a près de vingt ans, le Sfumato, qui rassemble une communauté d’acteurs
engagés autour des metteurs en scène Margarita Mladenova et Ivan Dobchev, fonctionne comme
un laboratoire qui aborde le répertoire par une recherche approfondie sur un corpus de textes ou
sur un auteur. En l’occurrence, le travail effectué sur Strindberg restaure à la perfection l’acuité
d’une œuvre relativement peu montée en France, exception faite de Mademoiselle Julie, à laquelle
l’adaptation de Margarita Mladenova insuffle une vigueur nouvelle. Le changement de titre, Julie,
Jean et Kristine, témoigne d’ailleurs du déplacement de regard proposé aux spectateurs.
Casseroles. Ecrite en 1888, cette pièce courte, qui explore les ravages de la passion prise dans les
rapports de pouvoir, appartient à l’époque naturaliste. La situation et le contexte se trouvent
clairement définis, mais apparaissent ici comme exacerbés, joués à couteaux tirés. Par une folle
nuit de la Saint-Jean, alors que le comte est absent, sa fille Julie entreprend le valet Jean, le
pousse à fauter, puis remet son destin entre ses mains au terme d’une nuit où la haine succède au
désir. Le rapport de force s’inverse bientôt et Jean se montre moins soumis qu’il n’y paraît.
Jetée sur la scène comme dans un jeu de quilles, la pièce se déroule dans la cuisine de Kristine,
la fiancée de Jean. Ici, un espace tout en inox à la froideur quasi clinique, où fument de hautes
casseroles comme autant de chaudrons des passions. Dans la petite salle de la Bastille, le public
est au cœur des ébats.
Forteresse. Spectacle puissant, la Danse de mort, qui se joue dans la salle du bas, très en fond de
scène, derrière un tulle noir, apparaît comme sortie d’une autre dimension. En 1900, Strindberg ne
fait plus dans le naturalisme, mais presque dans le symbolisme. Il n’y a plus ici ni passion, ni
chair, seulement de la haine et surtout, l’ombre de la mort qui rôde. Les cadres de la convention
bourgeoise ont volé en éclats, l’espace et le temps deviennent incertains. On sait seulement que
l’histoire se déroule sur une île, dans une forteresse où un homme et une femme vivent reclus. Ils
9 Trident
n’ont que de la détestation l’un pour l’autre, mais ce sentiment néfaste est bien la seule chose
qu’il leur reste. Les enfants ont quitté le foyer, les domestiques ont fui, le garde-manger est vide
et la cave n’a plus vu de vin depuis cinq ans. Même Kurt, l’ami de jeunesse qui tente de concilier
les deux époux, se trouvera entraîné dans la spirale de leur folie.
Dans cette danse à tombeau ouvert, les acteurs, Svetlana Yancheva, Vladimir Penev et Tzetan
Alexiev, déploient une force prodigieuse. L’extraordinaire fou rire final fait tomber les masques. Ce
tête-à-tête ad vitam eternam pourrait bien s’appeler l’enfer. Et ces deux-là, n’être plus que des
spectres.
www.bigorre.org, les 15-17 octobre 2008, Stéphane Boularand
Trilogie Strindberg
Le théâtre, c'est quelquefois des expériences surprenantes. C'est bien ce que nous propose de vivre
le théâtre Sfumato, avec ces trois pièces de Strindberg jouées en Bulgare.
Julie, Jean et Christine
(Mademoiselle Julie)
Avec Mademoiselle Julie, Strindberg nous amène à la croisée des chemins entre une aristocrate qui
s'effondre et un domestique qui échappe à sa condition. Une pièce magnifique !
La mise en scène est d'une précision chirurgicale. Le jeu des acteurs parait tellement travaillé
qu'on atteint une perfection un peu froide. C'est une façon efficace d'exprimer la dureté des propos
de Strindberg. Et même si le fonctionnement aléatoire du sur-titrage perturbe un peu les
spectateurs, on se laisse prendre par ce choc frontal entre deux strates de la société qui n'auraient
pas du quitter leur trajectoire.
La danse de Mort
Finalement Mademoiselle Julie, est une pièce légère. Avec La danse de mort, on passe au vitriol.
Après 25 ans de vie commune, Edgar, capitaine à la retraite et son épouse Alice ont accumulé
tant de griefs que la situation devient intenable. Et pourtant elle continue. Un équilibre précaire qui
permet de ne pas sombrer, en attendant une mort salvatrice. Mais l'arrivée de Kurt, un cousin, va
rompre cet équilibre et libérer toute la haine accumulée.
La mise en scène très physique de Margarita Mladenova permet à toute l'(in)humanité de la pièce
de s'imposer. La pression va monter tout au long de la pièce, et cette explosion de haine donne
lieu à des moments d'une rare intensité. On en oublie que tout ça se joue en Bulgare...
Strindberg à Damas
Après Mademoiselle Julie et La danse de mort, le théâtre Sfumato termine sa trilogie Strindberg
en faisant des trois tomes du Voyage à Damas un voyage dans la peau de d’August Strindberg.
Une pièce dont Arthur Adamov disait que « tous les personnages sont à la fois Strindberg luimême, et ceux avec qui la vie l’a mis aux prises. Le spectateur est ballotté au milieu d’une foule
de doubles et de demi-doubles, de jumeaux et de demi-jumeaux, dont les entrecroisements lui
échappent en grande partie. A cause de cela sans doute, Le chemin de Damas a peu de chances
de succès ». Lourde sanction ! Georgi Tenev et Ivan Dobchev ont relevé le défi et réussi à faire de
cette introspection, une riche déambulation dans l’œuvre de Strindberg.
Ça commence dans le lit conjugal qu’il partage avec la dernière de ses trois épouses, de trente
ans plus jeune que lui. Un départ qui n’est pas anodin quand on connaît la lourde réputation de
misogyne de Strindberg. Il suffit de rappeler qu’il a écrit « De l’infériorité de la femme » pour en
être convaincu ! Alors qu’il est en pleine lune de miel, il apprend que Dagny Juel, avec laquelle il
avait eu une brève relation quelque année auparavant, a été assassinée par un jeune amant
éconduit. Et c’est le début d’une espèce de road movie théâtral qui va nous mettre aux prises avec
un Strindberg vieillissant qui jette un regard plein de remord et de nostalgie sur son passé. Par un
jeu d’écrans et de projection vidéo, la mise en scène d’Iban Dobchev et de Daniela Oleg Liahova
restitue physiquement les couches successives qui composent cette introspection. La lumière et la
musique complètent une atmosphère qui oscille entre rêve, délire et réalité. Le résultat est riche et
complexe, comme peut l’être Strindberg lui-même. C’est déjà beaucoup. Quand en plus, il faut lire
le texte particulièrement abondant qui défile au dessus des comédiens qui jouent en bulgare, on
commence à ne plus savoir ou donner de la tête. C’est peut-être la couche qui fait déborder le
spectateur, qui risque d’atteindre la surcharge. Un beau spectacle d’où on sort donc un peu frustré
de n’avoir pu en en saisir toute l’étendue.
La succession des trois pièces aura été une belle façon de découvrir et d’explorer l’œuvre de
Strindberg. Le spectateur suit Le chemin de Damas en ayant à l’esprit La danse de mort et
10 Trident
Mademoiselle Julie qu’il a vu les soirs précédents. Une belle aventure qui aura aussi permis de
montrer la qualité du travail du théâtre Sfumato. Les tarbais auront eu le privilège de l’apprécier
en primeur avant qu’ils n’aillent à Paris pour le présenter dans le cadre du prestigieux Festival
d’Automne.
pyreneesinfo.fr, le site d'actualité des Hautes-Pyrénées, le 12 octobre 2008
Cette semaine au Parvis Scène Nationale
Strindberg, cirque et avant-première
[…] La Trilogie Strindberg par le Théâtre Sfumato
La Scène Nationale du Parvis accueille le Théâtre Sfumato pour la Trilogie Strindberg. Le théâtre
de Strindberg qui connut ses heures de gloire à la fin du XIXème siècle mais aussi quelques années
plus tard en France et même dans les années cinquante (Vilar montera La danse de mort), n’est
guère plus joué de nos jours et c’est dommage, tant ce théâtre constitua une véritable révolution
théâtrale qui se fait encore sentir dans l’œuvre de nombreux dramaturges du XXème siècle. Ce qui la
caractérise tient au fait que Strindberg va faire passer le théâtre de divertissement au rang
d’introspection psychologique et de drame naturaliste à la façon de Zola en France. En choisissant
trois pièces majeures de ce répertoire, le théâtre « Sfumato » de Sofia tente une approche globale
de ce théâtre confronté à l’époque actuelle, à la désorientation de l’homme moderne, à la tyrannie
des passions, à l’angoisse du présent et à l’opacité du monde. Rappelons que ce nom de
« sfumato », fumée, vient du procédé prôné par Léonard de Vinci dans sa peinture en ce qu’il
estompait les contours du dessin leur laissant ainsi plus de mystère.
Première partie, […] : Julie, Jean et Kristine (Mademoiselle Julie), d’August Strindberg. Mademoiselle
Julie est l’histoire d’une fille de la noblesse vivant à la campagne avec son père et servie par un
couple de valets. Et voilà la nuit de la Saint-Jean, voilà le printemps dans les corps, le désir qui
s’éveille et l’homme appelé par le sexe. Il se produit donc une union contre-nature ou plutôt
contre-rang social. Comment s’en extraire quand tout se mélange : la morale, la religion, la notion
de classe, l’antagonisme de l‘homme et de la femme ? Comment s’en extraire sinon par le drame,
et c’est ce qui se passe. L’homme lâchement donnera un rasoir à Mademoiselle Julie dans une
scène quasi d’hypnose pour qu’elle mette fin à ses jours. Drame naturaliste, drame ressenti comme
vérité d’une époque, grand texte de théâtre.
Deuxième partie, […] : La Danse de mort, d’August Strindberg. La Danse de Mort évoque un huis
clos dans une forteresse. Là aussi un couple mal assorti : un capitaine d’artillerie, sa femme
ancienne actrice qui se sent enfermée et qui vit un enfer et un administrateur militaire qui sera le
troisième personnage de ce trio infernal. Dans ce trio se noue et se dénoue toute la terrible
ambiguïté du couple telle que l’époque allait la découvrir et la vivre alors que se soulevait la
chape de plomb de l’hypocrisie, du poids des conventions sociales et des contraintes
économiques.
Troisième partie, […] : Strindberg vers Damas. D’August Strindberg. Le chemin de Damas est plutôt
une métaphore même si c’est aussi une histoire, celle d’un homme qui va à la poste toucher un
mandat. Là il rencontre une dame qui l’entraîne dans une sorte de voyage initiatique plus ou
moins confus mais d’où il ressort qu’on nage dans le péché jusqu’au cou. Nous retrouvons alors le
personnage à l’asile, prisonnier d’un étrange délire où suivant les conseils d’un confesseur, il va
refaire à l’envers le chemin initial et réparer ses fautes. Ce chemin de la rédemption c’est le
biblique chemin de Damas, celui de l’expiation et de la conversion. Il retrouvera le chemin de la
poste, enfin ouverte et entendra dans une chapelle un hymne religieux, l’appel du divin.
Le Monde.fr, le 10 septembre 2008
Jeunesse hongroise et maturité bulgare
De l'est de l'Europe nous viennent, en cet automne, une découverte et de belles retrouvailles.
[…] Les retrouvailles se feront avec le Teatro Sfumato de Sofia (Bulgarie), créé en 1989 par
Margarita Mladenova et Ivan Dobchev, et que l'on a pu voir en France de loin en loin - notamment
à Avignon, en 1996 et 2000. On retrouve donc leur théâtre entre rêve et métaphysique - leur
devise est celle du peintre Odilon Redon : « la logique du visible au service de l'invisible » -, d'une
beauté à couper le souffle, avec une trilogie Strindberg qu'ils présentent au Théâtre de la Bastille
du 20 au 26 octobre.
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Julie, Jean et Kristine s'inspire de trois grandes pièces du dramaturge suédois, Mademoiselle Julie
(1888), La Danse de mort (1900) et Le Chemin de Damas (1898), et retrace un parcours dans les
visions hallucinées et la lucidité suraiguë du génial August Strindberg.
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