Le rapport de force USA-Russie

Transcription

Le rapport de force USA-Russie
L’enjeu européen pour les Etats-Unis et la Russie
Introduction
Les logiques d’affrontements entre Etats ne sont plus ce qu’elles étaient. Comme le souligne
Pascal Gauchon, la fin de la guerre froide, et donc le passage d’un monde bipolaire à un
monde multipolaire, a redistribué les cartes en matière d’affrontements étatiques qui sont dès
lors de nature plus économique 1.
Certains pays ont mis en place des stratégies offensives d’accroissement de puissance et se
positionnent dans une logique d’affrontement vis à vis des autres.
Aujourd’hui, la puissance économique est la forme de puissance la plus recherchée par les
Etats qui utilisent alors le levier économique afin d’atteindre le plus haut niveau de puissance
possible.
La Russie et les Etats-Unis sont, entre autres, au cœur d’un rapport de force géoéconomique.
En ce qui les concerne nous pouvons parler de guerre économique entre deux empires rivaux.
Chacun de ces empires a mis en place des stratégies destinées à accroître sa puissance et
cherche à affaiblir l’adversaire sur différents échiquiers (économique, politique, sociétal).
Ces deux géants se livrent depuis de nombreuses années une guerre économique sans merci et
cette dernière se matérialise notamment par une volonté d’avoir un certain contrôle, une
certaine influence sur l’Europe (politiciens et entreprises) afin qu'elle agisse dans leurs
intérêts.
Pour illustrer ce propos nous pouvons citer la remarque de Poutine à Clinton, lors d’une
rencontre entre les deux hommes en 1999 : « Vous avez l’Amérique du Nord et celle du Sud,
vous avez l’Afrique et l’Asie. Vous pourriez au moins nous laisser l’Europe» 2.
La rivalité historique des empires rivaux américain et russe
L’empire que sont les Etats-Unis, a compris très tôt la nécessité de mettre en place une
stratégie d’accroissement de puissance et utilise tous les leviers d’action à sa disposition afin
d’atteindre ses objectifs.
En 1992, les Etats-Unis mettent en place le programme SBIR (Small Business Innovation
Research) dans le but de verser des fonds aux entreprises afin de développer des produits et
des services. Ce programme a vocation à stimuler les innovations qui pourront être utiles à
l’Etat et être mises sur le marché à destination des entreprises ou des particuliers. Le
gouvernement américain a bien compris les enjeux stratégiques liés aux innovations sur
l’échiquier mondial puisqu’il finance entre 25 et 30% de la recherche et développement et
60% de la recherche fondamentale 3.
Par ailleurs, ils créent en 1993, le « National Economic Council » (NEC) doté de quatre
objectifs 4 :
o
Coordonner l’élaboration des politiques économiques pour répondre aux enjeux
nationaux et internationaux.
o
Coordonner les conseils donnés au président américain au sujet des politiques
économiques.
o
S’assurer que les décisions et programmes politiques soient cohérents avec les
objectifs économiques du président.
o
Surveiller la mise en œuvre de la politique économique du président.
Le directeur de ce conseil est directement nommé par le président des Etats-Unis, ce qui sous
entend bien la portée extrêmement stratégique de cette organisation pour les américains.
2
Depuis très longtemps, les Etats-Unis sont la première puissance mondiale dans de nombreux
domaines (politique, économique, militaire). La coopération entre les acteurs privés et
publics, mise en place dans le but de servir des intérêts communs ne fait aucun doute aux
Etats-Unis (Nous étudierons un exemple plus bas).
Que ce soit d’un point de vue militaire, économique ou politique les Etats-Unis utilisent
toutes les armes dont ils disposent afin d’avoir un contrôle sur le monde (extraterritorialité du
droit américain, décisions militaires unilatérales, droit de veto au FMI, prédominance du
dollar, l’anglais comme langue internationale etc.)
Néanmoins, cet empire fait face aujourd’hui à certaines difficultés et ne peut plus incarner la
puissance légitime démocratique comme ce fut le cas auparavant, pour diverses raisons :
o Taux de criminalité aux Etats-Unis : 1 américain sur 100 est en prison, il s’agit du
pays possédant la population carcérale la plus élevée au monde 5.
o Brutalités policières (souvent à caractère raciste) : de nombreuses vidéos sortent
régulièrement montrant des interpellations policières extrêmement brutales envers des
afro-américains se terminant par la mort de ces derniers. (Michael Brown à Ferguson,
Eric Garner, Ezell Ford, Akai Gurley etc.) 6.
o Problèmes de santé : un tiers des américains sont obèses. Aujourd’hui, l’américain
moyen pèse 11 kg de plus que dans les années 60 7.
o Couverture médicale : 45 millions d’américains ne disposaient d’aucune couverture
médicale en 2009, les prévisions pour 2019 font état de 54 millions. 8
Par ailleurs, les Etats-Unis voient apparaître de nouveaux adversaires très coriaces (la Chine
et la Russie par exemple), qui se dressent contre l’hégémonie des Etats-Unis parce qu’ils ont
compris eux aussi la nécessité de mettre en place une stratégie d’accroissement de puissance 9.
Malgré ces points noirs, Washington reste aujourd’hui une des puissances les plus actives de
en termes de guerre économique 10.
Pour sa part, depuis la fin de la guerre froide, la Russie cherche à « retrouver un levier de
puissance » 11.
La nouvelle recherche de puissance de la Russie
Cela fait un certain nombre d’années que Vladimir Poutine, très au courant des logiques
d’affrontements, applique une stratégie qui manifeste clairement sa volonté de redonner une
forme de puissance à son pays. Vladimir Poutine a placé, aux postes les plus stratégiques du
pays 12 (groupes énergétiques, grandes banques etc.), des hommes avec lesquels il a noué une
relation de confiance durant son passage au KGB ou encore à la mairie de Saint Petersburg
par exemple. La Russie mise sur ses matières premières stratégiques (les ressources naturelles
du pays représentent 95,7 % de la richesse nationale du pays) 13 pour développer sa puissance
(1er producteur mondial de gaz, 2nd producteur mondial de pétrole, 4ème producteur mondial
d’uranium etc.) et venir concurrencer les Etats-Unis sur le plan économique et aussi politique.
En effet, en ce qui concerne les minerais stratégiques la Russie est soit leader, soit elle dispose
de gisements de classe mondiale (titane, métaux de base, platinoïdes, terres rares, cobalt,
cuivre, uranium, rhodium) 14.
3
Métaux stratégiques
béryllium
chrome
cuivre
manganèse
mercure
nickel
niobium
platine
tantale
vanadium
zinc
% des réserves mondiales
16 %
11 %
22 %
38 %
79 %
15 %
16 %
10 %
7%
49 %
24 %
Ces métaux sont considérés comme stratégiques car ils sont rares et ils sont utilisés dans des
domaines tels que l’aéronautique et les hautes technologies (santé, militaires etc.). Ils sont
donc très prisés et offrent un important levier d’action pour celui qui les détient.
Les différentes déclarations et prises de position de Vladimir Poutine montrent nettement sa
volonté de remettre en cause l’hégémonie américaine ainsi que celle de ne laisser aucun autre
acteur dicter l’avenir de son pays.
Cependant, la Russie reste une économie fragile qui repose essentiellement sur les
exportations de matières premières présentes sur son sol (40% du budget de l’Etat russe
provient des exportations de gaz et de pétrole à destination de l’Union européenne) 15. Cette
économie reste donc très soumise aux variations du cours des hydrocarbures (70% des
exportations du pays), ce qui la fragilise beaucoup par rapport aux économies plus
diversifiées.
Voici les 10 premiers produits exportés par la Russie 16 :
-
Pétrole brut
Produits pétroliers raffinés
Gaz naturel
Charbon
Produits semi-finis en fer
Aluminium
Blés
Or
Diamants
Sels minéraux ou engrais chimiques
Nous dénotons bien la prédominance de matières premières et donc l’impact des chutes du
cours de celles-ci, surtout au vu de l’importance des exportations dans l’économie de la
Russie (Rappel : 1er exportateur mondial de gaz naturel, 2e exportateur mondial de pétrole et
1er exportateur de produits pétroliers).
Vladimir Poutine cherche à placer la Russie comme un acteur majeur sur l’échiquier mondial
et parfois au détriment de la situation interne de son pays (censure, contrôle des médias,
scandale des élections truquées, récession entraînant une importante sortie de capitaux ainsi
que la chute des investissements etc.) 17.
4
Une Europe influencée depuis sa création
De manière générale, les Etats-Unis utilisent différents moyens pour contrôler l’Europe, afin
que cette dernière se dirige dans le « bon sens » et empêcher d’autres empires (Russie
notamment) de se l’approprier.
Les Etats-Unis vont, dans un premier temps, influencer les institutions politiques européennes
afin que ces dernières prennent des décisions en ligne avec les intérêts américains. L’empire
américain n’accepte pas que l’Union européenne ne s’aligne pas sur ses positions et il s’est
toujours employé à ce que l’Europe agisse en sa faveur. Comme lorsque Jacques Chirac a dit
non à la guerre en Irak sur de faux prétextes par exemple, cela a beaucoup irrité les EtatsUnis. Nous pouvons citer pour exemple les négociations du GATT durant lesquelles les EtatsUnis, lors des négociations concernant l’agriculture, on tout fait pour « désarmer les
Européens de leur arsenal de protection et de stimulation des productions et des exportations
agricoles ». Les Etats-Unis attendaient alors de l’Union européenne « un démantèlement
intégral des soutiens internes et externes, ainsi qu’une ouverture de son marché aux
productions américaines » 18.
Ces négociations se solderont par un accord, des années plus tard, en faveur des Etats-Unis
(diminution des soutiens internes, des subventions aux exportations et ouverture du marché
intérieur aux produits agricoles en provenance des Etats-Unis en particulier).
Aujourd’hui les Etats-Unis poussent l’Union Européenne à la signature d’un traité de libre
échange, partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement (communément
nommé sous les sigles TAFTA, TTIP ou PTCI) qui serait encore une fois en faveur des
intérêts économiques américains.
Il est alors légitime de se demander comment les Etats-Unis parviennent à avoir autant
d’influence sur les décisions européennes au point de pouvoir pousser l’Europe à prendre des
décisions politiques et économiques qui lui sont défavorables.
Si nous prenons l’exemple du TAFTA, les informations sur le passé du négociateur européen
en chef sur ce dossier sont quasi inexistantes (aucune information disponible sur ses anciens
postes, ni sur ses anciennes missions), et en ce qui concerne les autres membres de l’équipe,
certains d’entre eux ont fait leurs études aux Etats-Unis et d’autres ont exercé leurs fonctions
au sein d’instances internationales faisant la promotion de l’ouverture des marchés et du libre
échange. Tout ceci jette le doute sur la neutralité et l’impartialité des négociateurs européens
sur ce dossier et sur l’influence probable des Etats-Unis dans le choix des membres de
l’équipe de négociation 19.
Il est aujourd’hui acté que les Etats-Unis ont placé leurs relais d’influence au sein de
l’Europe, et ce dès la création de l’Union européenne puisque Jean Monnet (un des fondateurs
de l’Europe) était un agent d’influence américain.
Par ailleurs, les Etats-Unis excellent en matière de lobbying à Bruxelles (seconde capitale du
lobbying derrière Washington), et ce depuis la création de l’Europe, via trois acteurs :
l’European Round Table (ERT), l’Unice (confédération européenne) et l’AmCham (Comité
européen de la Chambre de commerce américaine).
C’est en 1970 que les Américains installent l’AmCham à Bruxelles. Cette organisation réunis
145 des plus grandes entreprises américaines présentes en Europe (Boeing, Procter &
Gamble, Monsanto, McDonald's, General Motors etc.) 20.
L’ERT, quant à lui, est un lobby fondé en 1983, qui bénéficie du privilège de pouvoir
s’adresser directement aux membres de la commission européenne et qui s’est fixé pour
objectif de « stimuler la compétitivité mondiale de l'industrie européenne » 21 . Depuis sa
création, l’ERT a multiplié les actions, campagnes et interventions ce qui ne laisse plus aucun
doute sur le fait que l’Europe est une création américaine.
5
Pour se faire une véritable idée de la présence américaine à Bruxelles il nous suffit de nous
référer aux chiffres suivants :
En 2014, les compagnies qui ont le plus dépensés en lobbying à Bruxelles sont américaines :
Philip Morris (> 5 millions d’euros), Exxon Mobil (environ 5 millions d’euros et Microsoft
(4,5 millions d’euros) 22.
Les principales agences de lobbying qui opérent à Bruxelles en 2014 sont également
américaines 23 :
1. Fleishman-Hillard : 11,5 millions d'euros
2. CDC Climat : 10 millions d'euros
3. Taxand : 10 millions d'euros
4. Burson-Marsteller : 8,9 millions d'euros
5. Med Ingeneria : 8,5 millions d'euros
6. Hill & Knowlton 8,4 millions d'euros
7. APCO Worldwide : 8 millions d'euros
8. FTI Consulting : 6 millions d'euros
9. Risk Dynamics : 6 millions d'euros
La domination américaine
Les Etats-Unis disposent d’un contrôle quasi total sur l’Europe via des leviers diplomatiques
(condition de la création de l’Union européenne, rôle des Etats-Unis pendant la Seconde
Guerre mondiale et pendant la guerre froide, création du sentiment « d’être redevable » aux
Américains et donc d’une certaine culture poussant les politiques à se plier aux Américains
sur tous les terrains etc.) et économiques.Après avoir mis en avant la force d’influence
politique dont disposent les Etats-Unis sur l’Europe, étudions maintenant comment cet empire
l’utilise dans son rapport de force économique avec la Russie.
Dans ce cas précis, les Etats-Unis vont influencer l’Europe pour l’empêcher de se rapprocher
de la Russie ou d’être trop dépendante de celle-ci, sans accorder d’importance aux
conséquences économiques et politiques que subiront les pays Européens.
Pour les Etats-Unis, l’Union européenne doit rester sous contrôle américain puisque, comme
nous l’avons vu précédemment, ce sont eux qui ont promu sa création via des agents
d’influence.
Une des manifestations de tout ceci est le résultat du conflit entre la Russie et l’Ukraine. En
effet, pour punir la Russie de son comportement dans le déroulement de cette affaire les
Américains, suivi des pays européens ont mis en place un certain nombre de sanctions contre
la Russie, nous pouvons citer entre autres 24 :
o
o
o
Une impossibilité d’achat, pour un citoyen européen, d’actions financières si ces dernières
proviennent d’une banque russe dont l’Etat est majoritaire.
Un embargo sur l’import et l’export d’armes en provenance et à destination de la Russie ainsi
qu’un droit de veto des Etats pour d’autres produits.
L’établissement d’une liste noire d’hommes d’affaire, de banques et de sociétés russes proches de
Poutine suspectés de tirer avantage de l’annexion de la Crimée par la Russie, dont les avoirs seront
bloqués et avec lesquels il est désormais « interdit » de faire du commerce.
6
Les Etats-Unis sont derrières ces différentes sanctions économiques qui leurs octroient un
double avantage : Affaiblir économiquement la Russie qui, comme nous l’avons vu, est très
dépendante de ses exportations et détériorer les relations entre l’Europe et la Russie et ainsi
endiguer un éventuel rapprochement.
D’après l’ex-fonctionnaire du département du Trésor des États-Unis Paul Craig Roberts, ces
sanctions avaient été planifiées à l’avance par les Etats-Unis et le but de Washington est
« d’isoler la Russie de l’Europe et la diaboliser » 25.
Selon le média allemand Deutsche Wirtschafts Nachrichtent, « les Etats-Unis ont coupé court
aux tentatives de l’Union européenne de lever les sanctions et d'amorcer un rapprochement
avec la Russie » 26 début 2015.
Ces évènements sont une manifestation de la guerre économique que livrent les Etats-Unis
contre la Russie. Pour mesurer l’impact de telles sanctions il nous suffit de rappeler les
éléments suivants :
o
Exportations russes en 2013 : 297 milliards de dollars à destination de l’Europe (1ère
destination des exportations russes) soit environ 60% du total des exportations russes contre à
peine 3,7% à destination des Etats-Unis.
o
Importations russes en 2013 : 191 milliards de dollars en provenance de l’Europe (1er
fournisseur de la Russie) soit 60% du total des importations russes contre 4,4% en provenance
des Etats-Unis.
Ces sanctions ont donc été néfastes pour la Russie mais aussi pour l’Europe qui sont très liées
d’un point de vue commercial. L’Europe a par ailleurs vu ses exportations diminuer suite à la
décision de Vladimir Poutine d’interdire l’importation en Russie de matières premières, de
denrées alimentaires et de produits d’agriculture en provenance des pays ayant appliqués ces
sanctions. Le ministre des affaires étrangères espagnol a affirmé que le coût pour l’Europe des
sanctions appliquées à la Russie était, en février 2015, déjà de 21 milliards d’euros 27. Les
Etats-Unis n’ont presque pas été touchés car ils sont beaucoup moins liés à la Russie que ne
l’est l’Europe. Cette stratégie a donc permis d’affaiblir l’économie russe, d’endiguer un
éventuel rapprochement entre l’Europe et la Russie et de montrer à la Russie que l’Europe
était sous influence américaine et que les Etats-Unis feraient en sorte qu’elle le reste.
L’annulation du projet de gazoduc South Stream
Toujours dans l’optique d’affaiblir la Russie et de détériorer les relations russo-européennes,
les Américains ont usé de leurs différents leviers d’influence politique sur les politiciens
européens pour saboter le projet du gazoduc South Stream afin d’éviter que l’Europe ne soit
trop dépendante du gaz russe. C’était également le moyen d’infliger un coup dur à l’économie
russe qui se développe en grande partie grâce à la distribution de son gaz via son entreprise
Gazprom (nous verrons de quelle manière lors de l’étude de la stratégie russe).
Le Gazoduc South Stream, dont la construction était évaluée à 32 milliards de dollars, devait
en effet permettre à la Russie d’approvisionner l’Europe en gaz sans passer par l’Ukraine
mais par la Bulgarie, et faisait intervenir des entreprises comme EDF ou encore ENI
(entreprise leader dans le secteur des hydrocarbures en Italie) 28.
7
Tracé du gazoduc South Stream :
Source :
http://www.euractiv.fr/sections/leurope-dans-le-monde/matteo-renzi-soutient-south-stream-facebruxelles-302708
Ce projet n’était évidemment pas dans les intérêts américains puisqu’il liait encore un peu
plus l’Europe et la Russie économiquement, il augmentait la dépendance de l’Europe à la
Russie et permettait à l’entreprise phare de la Russie (Gazprom) d’accroître un peu plus sa
puissance en Europe.
C’est pour ces raisons que les Etats-Unis ont usé de leur influence politique sur l’Europe pour
saboter ce projet. Ils se sont servis des sanctions économiques faisant suite à la crise
ukrainienne et notamment la liste noire des hommes d’affaires avec qui il était désormais
interdit de faire affaire pour exercer une pression sur la commission européenne et plus
particulièrement sur la Bulgarie.
Les Etats-Unis et la commission européenne ont reproché à la Bulgarie d’avoir confié la
construction du gazoduc à l’entreprise russe Stroytransgaz en lien avec Gennady Timchenko,
individu placé sur la liste noire établie sous l’impulsion des Etats-Unis...
Cette pression s’est soldée par le blocage du projet par le premier ministre bulgare Plamen
Oresharski, et l’annulation du projet par Moscou face a au comportement de l’Europe et
notamment à cause des sanctions économiques prises contre la Russie.
L’annulation de ce projet a coûté très chère à Gazprom, à la Russie et à l’Europe, et
notamment aux pays d’Europe centrale censés accueillir une portion du gazoduc. Cette affaire
illustre la force d’influence politique des Etats-Unis sur les élites européennes qui ne
mesurent pas l’importance économique de ce type de décisions ni même les enjeux qui
découlent de ce type de comportement sur les relations internationales futures et l’avenir des
entreprises européennes.
Il paraît important de noter que l’influence américaine ne se dirige pas uniquement vers les
hommes politiques européens actuels mais également à tous les potentiels futurs hommes et
femmes politiques. Les Américains avaient en effet mis en place, en 2010, une stratégie
8
d’influence des minorités françaises, jugées comme étant l’avenir politique de la France. Les
différentes étapes de cette stratégie sont détaillées dans le « Manuel d’intelligence
économique, sous la direction de C.Harbulot, première édition, p 395 ». Le but de cette
stratégie était d’influencer et ensuite de placer des individus devenus pro-américains à la tête
du futur gouvernement français pour s’assurer que celui-ci suive toujours les intérêts
américains.
La guerre de l’information autour du gaz de schiste coté américain
Une autre stratégie utilisée par l’empire américain pour affaiblir l’empire russe consiste à
promouvoir le gaz de schiste. Les Etats-Unis savent que la Russie accroît sa puissance en
partie grâce au gaz qu’elle fournit à de nombreux pays européens qu’elle rend par la suite
dépendants.
Pour éviter une éventuelle perte de contrôle de l’Europe et une trop grande dépendance de
celle-ci vis à vis de la Russie, le président américain, Barack Obama, avait d’ailleurs déclaré
lors d’une conférence de presse, en mars 2014, avoir autorisé la livraison de gaz à l’Europe
pour un volume « équivalent à ce que l'Europe consomme chaque jour » 29. Cette déclaration
retransmise dans le monde entier est un outil de guerre de l’information utilisé par les EtatsUnis afin de promouvoir le gaz de schiste américain et par ailleurs, influer sur les cours du
gaz (cf. courbe ci dessous)
Il est intéressant de noter que le président américain a utilisé la question de la dépendance de
l’Europe vis à vis du gaz russe comme outil pour faire la promotion du TAFTA en affirmant
que les livraisons de gaz américain aux Européens seraient largement facilitées dès lors que le
TAFTA serait signé. En effet, une loi américaine interdit aux compagnies d’hydrocarbures
d’exporter du gaz à un ou plusieurs pays qui ne possèdent pas d’accord de libre échange avec
les Etats-Unis 30. Voici un exemple qui démontre bien que les Américains n’oublient jamais
où sont leurs intérêts.
L’objectif de cette prise de position est triple :
o
o
o
o
Rendre l’Europe moins dépendante du gaz russe.
S’octroyer le marché européen du gaz et donc d’accroitre encore un peu plus la puissance
économique américaine dont l’Europe sera alors dépendante en terme d’approvisionnement
de gaz.
Infliger un nouveau coup dur à l’économie russe qui verrait ses exportations de gaz diminuer
(en 2013 les exportations de gaz naturelle représentaient 14% des exportations totales de la
Russie) et qui subirait une baisse des cours du gaz.
C’est un outil de guerre de l’information qui permet d’influer sur les cours du gaz et qui
impact négativement la Russie.
Les Etats-Unis savent que la volatilité des cours des hydrocarbures joue en défaveur de la
Russie qui en est extrêmement dépendante. Toujours sous l’angle de la guerre
informationnelle autour du gaz de schiste, l’EIA (US Energy Information Administration)
publie en 2012 un rapport affirmant que les Etats-Unis renfermerait les quatrièmes plus
grosses réserves de gaz de schiste (19 000 milliards de mètres cubes techniquement
extractibles) 31. Les conséquences de cette situation pour les Etats-Unis seraient les suivantes :
o
o
Possibilité d’atteindre une situation de quasi autosuffisance à l’avenir
Possibilité d’exporter du gaz à l’étranger
9
D’un point de vu mondial, ce type d’annonces, tout comme la déclaration du président Obama
s’inscrivent dans une logique de guerre informationnelle ayant pour conséquence la chute du
cours du gaz naturel (année 2012 et 2014)
L’annonce concernant cette grande quantité de gaz de schiste aux Etats-Unis et la possibilité
de fournir l’Europe a évidemment fait chuter le cours du pétrole (2012, 2014) puisqu’il s’agit
d’une augmentation de l’offre de gaz disponible par rapport à la demande ce qui entraine
forcément une chute des prix.
Cette chute du cours du gaz a évidemment beaucoup pénalisé la Russie puisque le gaz naturel
représente 14% du total de ses exportations et a permis de pénaliser Gazprom également qui a
vu certains de ses clients obtenir un pouvoir de négociation plus important, ainsi qu’une plus
grande marge de manœuvre dans les renégociations de contrats avec celle-ci.
Par ailleurs, les Etats-Unis, accompagnés de certains pays européens au sein desquels se
trouvent d’importants gisements de gaz de schiste (Pologne, Hongrie), et de certaines
entreprises européennes (Shell, Centrica, ENI, E.ON etc.) ont mis en place un lobbying
important pour promouvoir le gaz de schiste en Europe.
Leurs arguments sont les suivants :
o
o
o
Sécurité énergétique (réduire la dépendance au gaz russe)
Le potentiel du gaz de schiste est extrêmement fort
Les risques environnementaux sont très faibles
Le gouvernement américain effectue un lobbying extrêmement fort en soutenant ses
entreprises phares, qui sont très présentes en Europe en ce qui concerne l’exploration de
gisement de gaz de schiste :
o Exxon Mobile : Allemagne, Hongrie, Pologne, Royaume Uni
o Chevron : Pologne
o ConocoPhillips : Pologne
Les Etats-Unis animent cette guerre de l’information également via ses ambassadeurs et
autres personnalités qui vont aller effectuer du lobbying auprès des plus hautes instances
gouvernementales des pays membres 32 :
En Bulgarie, l’ambassadeur américain a fortement fait la promotion des intérêts de
l’entreprise américaine Chevron pour explorer les gisements de gaz de schiste en Bulgarie.
La secrétaire d’Etat, Hillary Clinton (février 2012) en visite en Bulgarie a également fait la
promotion du gaz de schiste en s’appuyant sur la nécessité pour la Bulgarie d’être plus
indépendante d’un point de vue énergétique.
En Pologne, la secrétaire d’Etat et d’autres membres du gouvernement américain ont
également dépensé énormément d’énergie pour obtenir des permis d’exploration de gisement
de gaz de schiste.
Néanmoins, cette stratégie d’approvisionnement de l’Europe semble difficilement réalisable
du fait des contraintes de livraison :
o
o
o
Pour le moment il n’y a pas de terminal de liquéfaction sur le littoral américain.
Nécessité de mettre en place des méthaniers pour ensuite l’acheminer à travers l’atlantique.
Nécessité de le regazéifier une fois arrivé en Europe.
Mettre en place cette opération engendrerait des investissements extrêmement importants
ainsi qu’un temps considérable et rendrait donc le gaz de schiste américain plus cher que le
gaz russe pour l’Europe. Donc, la question ici, est de savoir qui serait en charge de financer
10
cet écart de prix si la décision de passer par les Etats-Unis en tant que fournisseur de gaz était
actée. Les Européens se retrouveraient-ils à devoir payer leur gaz plus cher ou bien les EtatsUnis opèreraient-ils un effort financier pour contrer la menace russe ? Cette question sera sans
doute abordée en fonction du déroulement des négociations sur ce dossier.
Autre point, la technique de la fracturation hydraulique (technique d’extraction du gaz de
schiste) est très polluante et des mouvements civils se sont déjà emparés de ce sujet pour
lutter contre l’exploitation du gaz de schiste (exemple de site internet :
stopaugazdeschiste07.org, www.nongazdeschiste.fr, stopgazdeschiste.org).L’Europe est,
quant à elle, divisée sur la question du gaz de schiste. La France a interdit la fracturation
hydraulique sur son sol, l’Allemagne reste quant à elle mesurée mais d’autres pays d’Europe
y sont eux favorables (Pologne, Royaume Uni, Irlande, Pays-Bas, Suède, Espagne etc.).
Devant ces différents obstacles les Etats-Unis avaient commencé via l’entreprise Chevron, la
prospection de gaz de schiste en Europe.
Cette entreprise, liée au pouvoir américain, avait alors entamé, dans une optique
d’indépendance de l’Europe vis à vis du gaz russe, la prospection de gaz de schiste en
Roumanie, en Pologne et en Lituanie, qui sont trois pays très dépendants du gaz russe.
L’entreprise avait fait le tour de tous les pays de l’Europe de l’Est avant de se concentrer sur
ces trois pays là en particulier.
En 2014, cette stratégie a subit un coup d’arrêt puisque la prospection fut arrêtée dans ces
trois pays car les coûts auraient été trop élevés et les bénéfices trop marginaux. En effet, les
entreprises Eni, Marathon Oil, Talisman Energy et Exxon Mobil ont arrêté les recherches,
seule l’entreprise Chevron a continué. Cet arrêt a bien évidemment contrarié les différents
gouvernements européens qui voyaient dans ce projet, la possibilité d’aboutir à une forme de
sécurité énergétique et le moyen de mettre fin à leur dépendance vis à vis du gaz russe 33.
Les questions autour du gaz de schiste et des livraisons en provenance des Etats-Unis
devraient continuer à alimenter le débat de la dépendance énergétique de l’Europe vis à vis de
la Russie. L’intervention des Etats-Unis semble être une aide pour extirper l’Europe de cette
situation mais il serait naïf de penser que cette intervention est totalement altruiste de leur
part.
L’utilisation de l’extraterritorialité du droit américain
Une caractéristique importante du droit américain est qu’il est extraterritorial... C’est à dire
que sous certaines conditions il va s’appliquer à des entreprises non américaines et ces
dernières n’auront quasiment aucun moyen de défense puisqu’en général elles ne sont pas
formées à ce droit extrêmement restrictif.
L’outil favori des Etats-Unis dans l’application extraterritoriale de leur droit est la FCPA
(Foreign Corrupt Practices Act). Il s’agit d’une loi fédérale américaine pour lutter contre la
corruption mise en place en 1977 et les américains ont décidé que cette loi s’appliquerait de
manière extraterritoriale.
Le principe d’extraterritorialité est le suivant : Dès lors qu’une entreprise non américaine fait
des affaires en dollars (monnaie de référence dans le commerce international, dans la finance
internationale et toutes les matières premières sont cotées en dollars...), passe par un
fournisseur d’accès internet américain, un opérateur téléphonique américain, répond a un
appel d’offre la mettant en concurrence avec une entreprise américaine ou encore si elle
possède des filiales sur le territoire américain, les Etats-Unis considèrent qu’ils peuvent lui
appliquer leur droit !
Voici un exemple grossier afin de résumer au mieux ce principe d’extraterritorialité du droit
américain : une entreprise suédoise passant un contrat en euros avec une entreprise espagnol,
communiquant via un opérateur téléphonique irlandais mais échanges quelques mails via un
11
fournisseur d’accès Internet américain devient passible de poursuites pénales américaines et
devra se défendre devant les tribunaux américain.
Ce principe d’extraterritorialité n’est qu’un outil servant les intérêts économiques et politiques
américains permettant aux Etats-Unis entre autres de :
o
Effectuer une veille constante des entreprises étrangères (européennes) notamment sous le
prétexte de la FCPA.
o
Mettre en place une surveillance accrue, du FBI et de la NSA (écoutes téléphoniques,
surveillance des mails etc.) de certaines entreprises sur la base de simples soupçons.
o
Attaquer certaines entreprises allant contre les intérêts américains.
o
Affaiblir des entreprises concurrentes des sociétés américaines sur des secteurs stratégiques
pour permettre aux entreprises américaines de les racheter, de remporter un appel d’offre ou
encore de se placer en situation de quasi-monopole.
Le cas le plus probant est celui du rachat de la société française Alstom par l’américain
General Electric (GE) 34.
Les Etats-Unis ont utilisé la FCPA et son principe d’extraterritorialité pour faire peur aux
dirigeants d’Alstom en les menaçants de lourdes sanctions (pénales). Il s’agissait d’une
technique pour pousser ces derniers à vendre une de leur branche stratégique à une entreprise
américaine.
Le rachat d’Alstom par General Electric est une matérialisation de la convergence des intérêts
commerciaux d’une entreprise américaine et des intérêts stratégiques du gouvernement
américain et de la porosité de la frontière entre les secteurs privé/public aux Etats-Unis
puisque ce sont les agences gouvernementales (NSA, FBI) qui ont mis à mal Alstom pour
ensuite servir les intérêts de GE et du gouvernement américain par ricochet.
La branche énergie d’Alstom est extrêmement stratégique puisque l’entreprise fabriquait des
turbines qui équipent les centrales nucléaires françaises et certaines centrales nucléaires
étrangères ainsi que la flotte de guerre française.
Aujourd’hui, suite à ce rachat, General Electric et donc les Etats-Unis, sont en situation de
monopole en ce qui concerne les turbines or les centrales nucléaires sont des éléments
stratégiques de l’autonomie énergétique de la France, il s’agit d’un secteur stratégique tout
comme celui de la défense.
En quelques mots, si les Français désirent vendre un navire ou un réacteur nucléaire (équipé
d’une turbine autrefois fabriquée par Alstom) à un pays tiers, elle ne pourra le faire que si les
Américains (GE) acceptaient de leur fournir la turbine... Idem, pour la flotte française dont la
bonne santé dépend désormais du bon vouloir des américains qui peuvent s’octroyer le droit
de ne plus lui fournir les pièces de rechange.
GE a également racheté une petite filiale d’Alstom chargée de la surveillance des satellites qui
permettait de suivre la totalité des mouvements des satellites étrangers. C’était un moyen pour
la France de savoir en permanence où se situaient les satellites russes et américains
susceptibles de surveiller les mouvements des bâtiments français. Le rachat de cette petite
filiale revêt donc une importance fondamentale en ce qui concerne la dissuasion nucléaire de
la France car c’est en fonction de la position des satellites que la France faisait sortir ses sous
marins nucléaires afin d’être sur qu’ils n’étaient pas suivis par des satellites étrangers.
12
Conséquences de ce rachat pour la France :
o Augmentation de la dépendance énergétique française vis à vis des Etats-Unis
(turbine utilisée dans les réacteurs nucléaires).
o Affaiblissement de la France en ce qui concerne la dissuasion nucléaire.
o Possible perte de contrats commerciaux si les Etats-Unis ne sont pas d’accords pour
fournir les turbines.
o Dépendance de la marine nationale française vis à vis des Etats-Unis.
Conséquences de ce rachat pour les Etats-Unis :
Donner une position dominante à General Electric.
Faire rentrer la France, pilier de l’Europe, « dans le rang » et l’affaiblir.
Accroître la dépendance de la France vis à vis des américains.
Obtention d’un levier d’action futur du fait du monopole d’approvisionnement de pièces
stratégiques pour la France (nucléaire, défense).
o Pouvoir de négociation accru du fait de l’affaiblissement du pouvoir de dissuasion
nucléaire de la France.
o Accroissement du contrôle sur un des piliers de l’Europe.
o
o
o
o
Il existe d’autres exemples d’application extraterritoriale du droit américain soit pour
renflouer les caisses du gouvernement américain (amende infligée à BNP Paribas) ou pour
aider les entreprises américaines et donc accroître la puissance économique des Etats-Unis.
Les Etats-Unis utilisent donc cet outil pour museler les entreprises étrangères et notamment
européennes, car aucun gouvernement européen ne vient remettre en cause ce principe abusif
d’extraterritorialité que nous pourrions apparenter à de « l’extorsion de fonds ». Il s’agit d’un
outil de contrôle des entreprises européennes par les américains afin que ces dernières ne
concurrence « pas trop » les entreprises américaines et n’aillent pas à contre-sens des intérêts
américains.
Les Etats-Unis ont donc un temps d’avance en ce qui concerne le contrôle des entreprises
européennes par rapport à la Russie notamment avec ce principe d’extraterritorialité qui lui
permet de surveiller toutes les entreprises européennes et de les saboter lorsqu’elles ne suivent
pas une ligne de conduite en accord avec la volonté de domination mondiale des Etats-Unis.
Intéressons nous désormais à la stratégie mise en place par la Russie pour développer sa
puissance et répondre à la stratégie américaine de contrôle de l’Europe.
La stratégie d’internationalisation de Gazprom
Comme nous avons pu le voir précédemment, l’économie russe dépend beaucoup des
exportations de matières premières. Les trois principales exportations de la Russie sont : le
pétrole brut, les produits pétroliers raffinés et le gaz naturel. Ces trois produits représentent
66% des exportations totales de la Russie. Or, le premier client de l’Europe en matière
d’exportations est l’Europe (60%) suivie de l’Asie (30%). La Russie et l’Europe ont donc un
lien commercial fort. La Russie va utilisé cette dépendance énergétique qu’a l’Europe vis à
vis d’elle pour tenter de l’influencer.
L’acteur majeur dans la stratégie russe est l’entreprise Gazprom (l’entreprise a livré plus de
161 milliards de mètres cubes de gaz à l’Europe en 2013 ce qui équivaut à un quart de sa
consommation).
Comme nous l’avons vu auparavant, Gazprom est très lié au gouvernement russe (actionnaire
majoritaire), notamment à Poutine qui y a placé ses hommes de confiance et l’entreprise
13
s’attache à servir les intérêts du pays. Cette dernière détient entre 50 et 100% des parts de
marché en ce qui concerne l’approvisionnement en gaz de plusieurs pays membres de l’Union
européenne (Bulgarie, Hongrie, Slovaquie, République tchèque, Pologne, Estonie, Lettonie,
Lituanie etc.) 35.
Source:http://www.mullc.com/dependance_de_l_europe_sur_gazprom_dans_un_graphique_kr99zX.html
L’entreprise n’hésite d’ailleurs pas à « couper les robinets » d’approvisionnements de certains
pays pour renégocier ses contrats, ou encore si le pays visé a eu un comportement jugé
comme allant à l’encontre des intérêts russes (Biélorussie, Ukraine). Cette dépendance permet
à Gazprom d’avoir un levier d’influence très important sur certains pays européens.
Dans un registre moins extrême, l’entreprise parvient à influencer les pays de l’Union
Européenne en passant notamment par l’influence de certaines entreprise, opérant dans des
secteurs stratégiques, leader dans leur pays, comme l’ENI (compagnie gazière italienne), EDF
(Electricité de France), ou encore MOL (compagnie hongroise de gaz et de pétrole). En effet,
l’entreprise a tissé une véritable toile en Europe via ses gazoducs qui font transiter des
milliards de mètres cubes de gaz chaque année à travers plusieurs pays et en créant des
partenariats et des joints ventures avec des entreprises européennes sur des projets
représentant des milliards de dollars, comme le projet Nord Stream 2 ayant pour objectif de
doubler les capacités de Nord Stream.
14
Gazoduc Yamal approvisionnant l’Europe
Source :http://www.gazprom.com/about/production/projects/pipelines/yamal-evropa/
Gazoduc Nord Stream approvisionnant l’Europe
Source :
http://www.telegraph.co.uk/finance/newsbysector/energy/2784810/Whats-in-the-pipeline-for-NordStream.html
Matérialisation des liens stratégiques de Gazprom
Ces liens forts (joints ventures, projets de plusieurs milliards de dollars, transport de milliards
de mètres cubes de gaz etc.) permettent d’aligner les intérêts de ces entreprises sur ceux de
Gazprom et donc sur ceux de la Russie. Ceci permet d’envoyer ces entreprises faire du
lobbying en faveur des intérêts de Gazprom et de la Russie sans forcément qu’elles ne le
sachent.
15
Liens stratégiques tissés par Gazprom
Entreprises
Pays
E.ON Global
Commodities SE
Allemagne
Wintershall AG
ENGIE
France
EDF
Caractéristiques de
l'entreprise
Relations avec le
pays
Relation avec l'entreprise
Entreprise leader dans
le pays et fournit plus
de 50% du gaz sur le
Exploitation de Nord
marché allemand. Liée Gazprom lui a fournit
Stream
à Gazprom jusqu'en
38,7 milliards de
2035 au minimum.
mètres cubes de gaz
en 2014
Possédée en totalité
Exploitation de Nord
par BASF AF (plus
Stream et de Yamal via des
grand groupe de
joints ventures
chimie au monde).
Exploitation de Nord
Entreprise leader
Stream
Gazprom lui a fournit
7,1 milliards de
Signature d'un accord de
2ème fournisseur de
mètres cubes de gaz
coopération à long terme
gaz naturel en France
en 2014
dans le secteur du gaz et de
pour les particuliers
l'électricité
Italie
leader sur le marché
italien de l'énergie
Gazprom lui a fournit
21,7 milliards de
mètres cubes de gaz
en 2014
Exploitation du gazoduc
Blue Stream via une joint
venture (16 milliards de
mètres cubes par an)
Royaume Uni
Leader sur le marché
des hydrocarbures au
Royaume Uni
Gazprom lui a fournit
10,1 milliards de
mètres cubes de gaz
en 2014
Accord signé pour la
construction de Nord
Stream 2
Botas
Turquie
Leader sur le marché
du gaz en Turquie
Gazprom lui a
fournit27,3 milliards
de mètres cubes de
gaz en 2014
Accord pour la fourniture
du gaz en Turquie
Gasunie
Pays-Bas
Leader sur le marché
du gaz au Pays-Bas
Gazprom lui fournit
10% de son gaz
Accord signé pour la
construction de Nord
Stream 2
OMV
Autriche
Leader en Autriche
Gazprom lui fournit
70% de son gaz
Accord signé pour la
construction de Nord
Stream 2
ENI
Royal Dutch Shell
L’objectif est ici de rendre les entreprises européennes dépendantes de Gazprom pour les
utiliser par la suite comme un levier d’influence sur les différents gouvernements Européens,
notamment en s’appuyant sur les divisions existantes au sein de l’Europe. Les différents pays
européens ont du mal à mettre en place des politiques communes et donc à mettre en place
des sanctions communes face à Gazprom, cette dernière ayant un rôle trop important dans
l’économie de certains pays européens (100% dépendante) et qui ne peuvent pas se permettre
les conséquences de la mise en place de sanctions contre cette entreprise.
Toujours dans une logique d’influence, Gazprom souhaite être connu de tous en Europe, et
pas uniquement dans le secteur de l’énergie. L’entreprise cherche à renvoyer une image
positive auprès des populations européennes.
16
Pour ce faire, l’entreprise est devenue un sponsor à part entière dans le domaine du football
auprès d’équipe comme Chelsea (Angleterre) ou encore le FC Shalke 04 (Allemagne).
Gazprom est également un partenaire officiel de l’UEFA Champions League et de la FIFA
jusqu’en 2018 (C’est d’ailleurs la Russie qui accueillera la coupe du monde de football en
2018) 36.
Cette stratégie permet à Gazprom de faire en sorte que le plus grand nombre d’Européens se
familiarise avec le nom de l’entreprise afin d’être habitué à sa présence au quotidien et
notamment lors des grands évènements sportifs (qui rassemblent des millions de personnes).
Le choix du monde du football n’est pas anodin, il permet à Gazprom de soigner son image
auprès du grand public et d’avoir une influence sur les événements footballistiques qui
peuvent générer certains bénéfices économiques ou encore politiques à la Russie et cela lui
permet d’accroître son influence en Europe.
Par ailleurs, Gazprom est un groupe, il existe un Gazprom Media qui possède des chaînes de
télévision, des radios, des agences de presse écrite, des productions de cinéma 37 etc. Gazprom
Media fait partie des groupes de médias les plus importants en Europe, or lorsque l’on connaît
la proximité de l’entreprise avec le Kremlin, il s’agit ici d’une arme à part entière pour
étendre l’influence de la Russie en Europe.
Gazprom est le « bras armé » de la Russie. Cette entreprise lui permet d’étendre son
influence, via la création de certaines formes de dépendance, pour contrôler les pays
européens et lutter contre l’influence américaine sur le continent. Cette stratégie permet à la
Russie d’avoir un levier d’action pour contrer certaines décisions européennes, qui lui sont
défavorables, pouvant être orchestrées par les Etats-Unis.
Les « terres rares » et autres métaux stratégiques futures armes de la Russie ?
Comme nous l’avons vu au début de ce document, la Russie dispose d’énormément de
ressources naturelles sur son territoire.
La Russie a donc mis en place une stratégie d’accroissement de puissance basée sur les
matières premières stratégiques présentes sur son sol et notamment via l’exportation de cellesci. Pour rappel, la Russie disposerait de 20% des réserves de « terres rares » connues dans le
monde ainsi que beaucoup de métaux stratégiques (tableau page 3).
Le terme « terres rares » désigne 17 métaux, dont les propriétés sont exceptionnelles, qui ne
sont pas substituables et qui sont utilisées dans la fabrication de nombreux produits dans des
secteurs extrêmement stratégiques comme la haute technologie, la santé, l’armement etc.
Les « terres rares » représentent donc un enjeu majeur pour l’avenir, et les différents pays du
globe l’ont bien compris (la Chine, par exemple, avait mis en place un quotas pour limiter
l’exportation de ses « terres rares »).
Il nous paraît pertinent de faire la liste de ces « terres rares » et des secteurs dans lesquels
elles sont utilisées afin de bien mesurer les enjeux associés :
Il est donc évident que les « terres rares » représentent un enjeu stratégique pour l’avenir car
l’acteur qui aura le monopole de ces « terres rares » disposera d’un levier extrêmement
important en matière de domination et d’accroissement de puissance. La Russie en a bien pris
conscience ainsi que du potentiel de son territoire. La Russie a donc mis en place une stratégie
reposant sur le potentiel de son territoire en métaux stratégiques et son entreprise phare
Gazprom :
Depuis de nombreuses années Gazprom cherche à s’étendre en Russie notamment en
rachetant des entreprises stratégiques russes :
o L’entreprise a acquis 75% du producteur gazier Sibneft, qui est aujourd’hui devenu
GazpromNeft, ainsi que 36,3 % des parts de la compagnie pétrolière Slavneft.
17
o Gazprom, via Gazprombank a acquis en 2007 l’entreprise Mosenergo (aujourd’hui
Gmosenergo) qui était l’un des plus important producteur d’électricité en Russie.
o Gazprom, toujours via Gazprombank, a investit massivement au sein du groupe
pétrochimique russe Sibur.
o Gazprombank détient des parts de la société « National Telecommunications Group
(NTK) » leader en Russie, et participe à l’élaboration de sa stratégie.
o Gazprombank a également investit dans l’entreprises NetByNet Group (NBN), le plus
important fournisseur d’accès internet en Russie.
o Gazprombank est à l’origine de la stratégie de l’entreprise Stroytransgaz (STG) qui
est leader dans la construction d’infrastructure de grande ampleur dans le domaine du
pétrole et du gaz et présente en Algérie, Syrie, Inde et Arabie Saoudite.
Ces actions démontrent la volonté de Gazprom de pénétrer différents secteurs en Russie afin
d’avoir la main mise sur le plus de secteurs stratégiques possibles (pétrole, gaz, électricité,
télécoms, pétrochimie, infrastructure gazière et pétrolière). L’enjeu est majeur, car si
l’ensemble des secteurs et des ressources stratégiques de la Russie sont entre les mains d’une
seule entreprise, très liée au gouvernement, cela permettrait à ce dernier d’avoir un levier
extrêmement important en matière de politique extérieure (nous retrouvons l’idée de porosité
de la frontière entre le secteur privé et public aux Etats-Unis) :
o Pression sur les entreprises stratégiques (opérant dans divers secteurs : Chimie, haute
technologie, hydrocarbures etc.) des pays étrangers se fournissant en matières
premières stratégiques en Russie via une entreprise détenue par Gazprom.
o Influence de ces mêmes entreprises pour servir les intérêts russes.
o Influence sur le cours des métaux stratégiques et des « terres rares ».
o Levier diplomatique.
o Possibilité d’enrayer la concurrence.
Il est clair que le gouvernement russe cherche à tirer le maximum des richesses qu’offre son
territoire et de son entreprise phare afin d’accroître sa puissance et venir tenir tête aux EtatsUnis.
Les manœuvres informationnelles de la Russie
Devant la stratégie américaine de promotion du gaz de schiste en Europe, pour contrer la
dépendance de cette dernière au gaz russe, la Russie a entamé une véritable guerre de
l’information pour la défense de ses intérêts économiques. Les principaux opposants au gaz
de schiste en Europe sont bien sûr Gazprom, le gouvernement russe et les organisations de
protection de l’environnement. C’est d’ailleurs, la notion de protection de l’environnement
qui va être le fer de lance du lobby de ces acteurs. Dmitri Medvedev ; 1er ministre russe, a
d’ailleurs déclaré que le gaz naturel était dix fois plus efficace que le gaz de schiste et que les
pipelines existants (gérés en lien avec Gazprom) étaient insuffisants pour permettre l’essor
possible de la consommation du gaz de schiste. Autrement dit, cela nécessiterait des
investissements très couteux et un temps de mise en place trop important.
18
La technique de la Russie et de Gazprom va être locale dans un premier temps. L’Europe
étant divisée sur la question du gaz de schiste et notamment au sujet de la technique de
fracturation hydraulique, la Russie va effectuer du lobbying état par état afin de mettre en
avant les répercussions environnementales de cette technique. En 2012, en Bulgarie, certains
journaux ont explicitement accusé les bulgares pro-russes et la Russie d’être derrière tous les
mouvements sociaux contre l’exploration du gaz de schiste qui ont aboutis à l’interdiction de
l’exploration des gisements de gaz de schiste et le retrait du permis d’exploration accordé à
l’entreprise américaine Chevron.
Les services secrets russes sont fortement soupçonnés d’être derrière de nombreux
mouvements écologistes en Europe, qu’ils instrumentaliseraient pour lutter contre
l’exploration de gisements de gaz de schiste en Europe. En 2014, Anders Fogh Rasmussen, le
secrétaire général de l’OTAN, a directement accusé Moscou d’être derrière les mouvements
d’opposition au gaz de schiste afin de maintenir la dépendance de l’Europe vis à vis de la
Russie 38 :
o
o
« La Russie, dans le cadre de leur information de pointe et d’opérations de désinformation,
est engagée activement avec les organisations dites non gouvernementales – qui œuvrent
contre le gaz de schiste - pour maintenir la dépendance européenne au gaz russe importé »
« Les rangs des militants anti-gaz de schiste largement infiltrés par des agents russes ».
Ces propos sont à analyser sous différents angles : Il ne serait en effet pas étonnant que la
Russie cherche à instrumentaliser différentes organisations non gouvernementales (ONG)
pour remporter cette guerre de l’information autour du gaz de schiste Europe (Les lobbys
américains ont utilisé ce genre de techniques dans le passé pour affirmer que le tabac n’était
pas dangereux pour la santé par exemple). Mais il ne faut pas perdre de vu que les Etats-Unis
exercent un important contrôle sur l’OTAN (créée au départ dans le but de contrer l’URSS) et
qu’ils cherchent à promouvoir le gaz de schiste en Europe. Nous pouvons donc considérer ces
propos comme étant une simple technique de désinformation dans le but de déplacer le débat
sur un autre terrain afin d’orienter le public sur des questions d’éthique, de crédibilité des
mouvements et des ONG, et non pas sur le terrain scientifique du gaz de schiste qui est le
véritable sujet.
Par ailleurs, la Russie va dénigrer le gaz de schiste de manière plus globale en passant par sa
chaîne « Russia TV » (disponible partout en Europe) qui est son « bras armé » en termes
d’influence et de guerre de l’information.
La tactique russe consiste à attaquer selon différents angles. Elle s’appuie tout d’abord sur les
dégâts environnementaux résultants de la technique d’extraction du gaz de schiste, notamment
prouvés aux Etats-Unis. Ensuite, la chaîne va remettre en cause les statistiques et estimations
américaines concernant le gaz de schiste en faisant appel à différents experts pour appuyer ses
thèses.
Les médias russes ont, par ailleurs, traité de la nomination, au conseil d’administration de la
plus importante société gazière ukrainienne (Burisma Holdings), du fils du vice président
américain Joe Biden. Cette société dispose des droits pour exploiter d’importantes réserves de
gaz de schiste en Ukraine. Les médias russes ont alors dénoncé un conflit d’intérêt ainsi qu’un
coup des Etats-Unis pour affaiblir la position de la Russie comme principal fournisseur de gaz
de l’Union européenne. Ces déclarations ont obligé le porte parole de la Maison Blanche à
s’exprimer afin de démentir tous liens entre l’administration Obama et cette récente
nomination 39.
Enfin, nous pouvons noter que la Russie, pour faire face aux Etats-Unis et à leur influence sur
l’économie mondiale, a exprimé sa volonté de créer ses propres agences de notation pour
lutter contre le monopole anglo-saxon dans ce domaine. Celle-ci souhaite également
contourner le dollar dans ses futurs échanges avec la Turquie, ce qu’elle fait déjà dans ses
19
échanges avec la Chine. La Chine et la Russie font d’ailleurs toutes deux partie de
l’Organisation de Coopération de Shanghai, organisation qui ne cache pas sa volonté de lutter
contre l’influence des Etats-Unis dans le monde.
Ces différentes actions démontrent la volonté de la Russie de remettre en cause l’hégémonie
américaine et de développer sa puissance en passant notamment par une forme de contrôle sur
l’Union européenne.
Conclusion
Nous assistons donc à une véritable bataille économique que se livrent les deux empires,
notamment sur le continent européen qu’ils cherchent tous deux à contrôler. Chacun utilisant
ses armes (influence, dépendance énergétique etc.) afin de développer sa puissance tout en
affaiblissant les positions de l’adversaire (sanctions économiques, guerre de l’information
etc.). Cet affrontement géoéconomique est loin d’être terminé, il risque d’ailleurs de
s’accentuer au fil du temps. Il est certain que l’avenir apportera d’autres manifestations de
cette guerre économique.
Alexis Pinon
20
1
Pascal Gauchon, Emission « Géopolitique, sommes nous en guerre économique », 9 mars
2015,
http://www.revueconflits.com/geopolitique-le-debat-rfi-sommes-nous-en-guerreeconomique/ consulté le 20 octobre 2015
BDC AEGE, Victor Bernard, Prédrag Cvijic, Laura Fort, Manuel Gangloff, Romain
Moreau, « Russie : Quelle stratégie de puissance », Décembre 2006, Page 3
2
BDC AEGE, Thomas Bonnecarrere, Nelly Dubois, Florentin Rollet, Olivier Soula, « Le cas
des Etats-Unis », Mars 2011
http://bdc.aege.fr/public/Intelligence_Economique_et_strategique_Le_cas_des_Etats_Uni
s.pdf
3
Site du « National Economic Council », consulté le 30 novembre 2015,
https://www.whitehouse.gov/administration/eop/nec
4
Wikipédia, « Classement des pays par population carcérale » , consulté le 30 novembre
2015, https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_population_carc%C3%A9rale
5
Libération.fr, « Un an de brutalité policière raciste aux Etats-Unis », 6 août 2015,
http://www.liberation.fr/planete/2015/08/06/un-an-de-brutalite-policiere-racisteaux-etats-unis_1358109
6
Lapresse.ca, « États-Unis: le taux d'obésité «intolérablement élevé» », 4 septembre
2014,http://www.lapresse.ca/vivre/sante/201409/04/01-4797231-etats-unis-le-tauxdobesite-intolerablement-eleve.php
7
Cairn.info, Pratiques et Organisation des Soins, « Le système de santé des Etats-Unis »
Avril 2009, Page 309, https://www.cairn.info/revue-pratiques-et-organisation-dessoins-2009-4-page-309.htm
8
9
C. Harbulot, Sabordage, Edition François Bourrin, 2013, pages 70-71
10
Pascal Gauchon, « Géopolitique : sommes nous en guerre économique », rfi.fr, 9 mars 2015
http://www.revueconflits.com/geopolitique-le-debat-rfi-sommes-nous-en-guerreeconomique/, consulté le 20 octobre 2015.
11
C. Harbulot, Sabordage, Edition François Bourrin, 2013, page 71
BDC AEGE, Victor Bernard, Prédrag Cvijic, Laura Fort, Manuel Gangloff, Romain
Moreau, « Russie : Quelle stratégie de puissance », Décembre 2006, Page 3
12
Advantour.com, « Les ressources naturelles, l’écomonie de la Russie »,
http://www.advantour.com/fr/russia/economy/natural-resources.htm
13
Cairn.info, Russie et matières critiques, Avril 2011https://www.cairn.info/revuegeoeconomie-2011-4-page-109.htm
14
21
15
Le dessous des cartes ; Arte ; Russie, moyenne puissance, 5 août 2014,
https://www.youtube.com/watch?v=UyVQPPwpBtQ, consulté le 18 octobre 2015.
16http://atlas.media.mit.edu/en/visualize/tree_map/hs92/export/rus/all/show/2013/
17
Reuters France, « L’économie Russe montre de nouveaux signes de faiblesse », 22 octobre
2014, Consulté le 19 octobre 2015.
18
Thierry Pouch ; « Les guerres agricoles », Manuel d’intelligence économique 2nd édition,
Presses Universitaires de France, 2015 page 80-81
19
« Edito : L’influence américaine dans le dispositif européen du TTIP » 5 novembre 2014,
Infoguerre.fr, http://www.infoguerre.fr/culture-et-influence/edito-linfluence-americaine-dansle-dispositif-europeen-du-ttip-5544
Ladoc.ffi.fr, « La présence et l’influence des lobbies américains à Bruxelles »,
http://ladoc.ffii.fr/lobbying_americain_bruxelles.pdf
20
Ladoc.ffi.fr, « La présence et l’influence des lobbies américains à Bruxelles »,
http://ladoc.ffii.fr/lobbying_americain_bruxelles.pdf
21
22
Le Journal du Net, Les entreprises qui dépensent le plus en lobbying à Bruxelles, 6 octobre
2014, http://www.journaldunet.com/economie/magazine/lobbying-europe.shtml
strategies.fr, « Le lobbying fait recette à Bruxelles », 6 octobre
2014,http://www.strategies.fr/actualites/marques/244717W/le-lobbying-fait-recettea-bruxelles.html
23
Consilium.europa, « EU restrictive measures in view of the situation in Eastern
Ukraine and the illegal annexation of Crimea », 29 juillet 2014,
http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/EN/foraff/144159
.pdf
24
Français.rt, « Les Etats-Unis imposent de nouvelles sanctions à la Russie », 30 juillet
2015, https://francais.rt.com/international/5085-etats-unis-sanctions-russie-crimee
25
26
Sputniknews.fr, « Les USA interdisent à l'UE de se rapprocher de la Russie (média
allemand), 22 janvier 2015,
http://fr.sputniknews.com/international/20150122/203475012.html
27
La Croix, « Les sanctions contre la Russie ont déjà coûté 21 milliards d'euros à l'UE
(ministre espagnol) », 9 février 2015, http://www.la-croix.com/Actualite/EconomieEntreprises/Economie/Les-sanctions-contre-la-Russie-ont-deja-coute-21-milliards-d-euros-al-UE-ministre-espagnol-2015-02-09-1278464
Lemonde.fr, « Gazoduc South Stream : pourquoi la Russie a décidé de jeter l’éponge »,
2 décembre 2014, http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/12/02/gazoducsouth-stream-pourquoi-la-russie-a-decide-de-jeter-l-eponge_4532731_3234.html
28
22
29
Conférence de presse : « sommet Europe-Etats-Unis », mercredi 26 mars, Bruxelles.
30
The New York Times, « The Case for Natural Gas Exports », 15 août 2012,
http://www.nytimes.com/2012/08/16/opinion/the-case-for-natural-gas-exports.html, consulté
le 05 octobre 2015.
Site de l’U.S Energy Information Administration,
http://www.eia.gov/todayinenergy/detail.cfm?id=11611#
31
10
juin
2013,
Pacteurope.fr, « Lobbying shale gas in Europe »,Mai
2012,http://www.pacteurope.eu/pact/wp-content/uploads/2012/06/Lobbying-shalegas-in-Europe.pdf
32
33
Sputniknews.fr, « Gaz de schiste en Europe: Chevron jette l'éponge », 24 février 2015,
http://fr.sputniknews.com/international/20150224/1014873268.html, consulté le 10 octobre
2015
Reportage sur la vente d’Alston, intervention de Eric Denécé et Jean-Michel
Quatrepoint, « La vente d'Alstom, histoire d'une guerre économique », 24 octobre 2015,
https://www.youtube.com/watch?v=88cZestFj9c&feature=youtu.be
34
35
« L’Europe et Gazprom: la puissance par le droit », 29 avril 2015, http://www.teloseu.com/fr/globalisation/leurope-et-gazprom-la-puissance-par-le-droit.html, consulté le 26
octobre 2015
36
37
Gazprom-football, https://www.gazprom-football.com/en/Home.htm
Gazprom-Media, http://www.gazprom-media.com/en/about
Contrepoints.org, « La Russie travaille en secret avec les écolos contre la fracturation
hydraulique », 21 juin 2014, http://www.contrepoints.org/2014/06/21/169641-larussie-travaille-en-secret-avec-les-ecolos-contre-la-fracturation-hydraulique
38
39
Knowckers.org, « Polémiques en cascade sur le gaz de schiste entre les Etats-Unis et la
Russie », 3 novembre 2014, http://www.knowckers.org/2014/11/polemiques-en-cascade-surle-gaz-de-schiste-entre-les-etats-unis-et-la-russie/
Source humaine :
-
Interview de Nicolas Mazzucchi, Directeur de Polemos Consulting, Professeur associé
à l’Ecole de Guerre Economique, 26 octobre 2015.
23