L`ellipse : Une activité d`introduction alliant outils

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L`ellipse : Une activité d`introduction alliant outils
L’ellipse : Une activité d’introduction alliant outils
technologiques et matériel didactique
Alexandre Asselin, finissant au BES1 mathématique, UQÀM
[email protected]
Les coniques font partie du volet géométrie du programme
de la troisième année du deuxième cycle du secondaire
(secondaire 5), séquence TS et SN. On y étudie les
définitions, les propriétés et les équations du cercle, de
l’ellipse, de l’hyperbole et de la parabole. Lors d’un stage
à l’école Jacques-Rousseau de la commission scolaire
Marie-Victorin, j’ai eu à construire, en collaboration avec
mon enseignante associée, Mme Nathalie Hosson, une
séquence d’enseignement sur ce sujet. Dans ce texte, je
vais présenter une activité créée et aménagée en classe par
Mme Hosson et moi-même qui vise à construire avec les
élèves le concept d’ellipse. Notre intention pédagogique
est d’introduire cette conique comme lieu géométrique
de points, c’est-à-dire en mettant l’accent sur l’idée que
la figure représente l’ensemble des points partageant
une propriété métrique commune, soit que la somme des
distances aux deux foyers est constante. À travers une
mise en situation fantaisiste, la pâtisserie de M. Rouge,
les élèves sont d’abord amenés à trouver différents
points équidistants de deux points donnés (qui sont en
fait les foyers), puis ils découvrent que la réunion de
cette infinité de points forme une ellipse. Cette situation
s’inscrit bien dans la philosophie du programme de
formation de l’école québécoise : l’élève est actif dans
ses apprentissages à travers la résolution d’une situationproblème qui l’amène à développer le concept d’ellipse
en tant que lieu géométrique. Le logiciel de géométrie
dynamique GeoGebra a permis de consolider, lors de la
phase d’institutionnalisation, les apprentissages faits par
les élèves.
Les préalables des élèves
Dans les leçons précédentes, les coniques ont été présentées
aux élèves. Ils ont vu que celles-ci sont générées par les
différentes coupes d’une surface conique par un plan. De
plus, ils ont été introduits à la notion de lieu géométrique
à travers l’étude de la médiatrice et du cercle. Au moment
de présenter la mise en situation, les élèves ignorent que
l’activité proposée va les amener à tracer une ellipse.
Énoncé de la situation
La situation est basée sur l’histoire du petit chaperon
rouge2. Voici son énoncé :
La pâtisserie de M. Rouge
Le petit chaperon rouge est bien chanceuse : son père
est le maître pâtissier du village. Comme elle aime
bien sa grand-mère, tous les jours, elle lui apporte
une gâterie que son père a cuisinée. Pour ce faire,
elle doit partir de chez elle, aller à la pâtisserie de
son père, puis aller porter la pâtisserie à sa grandmère. Comme elle n’aime pas beaucoup la marche,
elle prend toujours le chemin le plus court dans ses
déplacements3.
Or, voilà qu’un matin, son père lui annonce que
le loup a attaqué la pâtisserie. Il lui faut donc
trouver un autre emplacement pour reconstruire son
commerce. Le petit chaperon rouge proteste : elle ne
veut pas modifier ses habitudes et demande à ce que
le commerce soit reconstruit à un emplacement de
telle sorte que la distance totale de son déplacement
(Maison de petit chaperon rouge – Pâtisserie –
Maison de mère-grand) reste exactement la même.
Tu dois identifier, sur le schéma, une dizaine
d’endroits où M. Rouge pourrait reconstruire sa
pâtisserie en respectant les exigences de sa fille
adorée.
Laisse les traces de ta démarche/explique
comment tu détermines les endroits où on pourrait
reconstruire la pâtisserie.
Baccalauréat en enseignement secondaire à l’Université du Québec à Montréal.
Le contexte et la mise en situation sont des idées originales de Mme Nathalie Hosson.
3
Précision donnée à l’élève : en mathématique, la distance la plus courte se fait en ligne droite.
1
2
GRMS
ENVOL no 161 — hiver-printemps 2013
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placent alors
extrémités
de la
auxmère-grand
foyers de l'ellipse,
représentés
pa
petitleschaperon
rouge
etcorde
celle de
et tendent
le crayonicijusq
petit chaperon
rougeles
etélèves
celle de
mère-grand
et tendent
crayon
la pâtila
Toutefois,
sont
alors portés
à tracer le
une
ellipsejusqu’à
en gardant
Toutefois, les élèves sont alors portés à tracer une ellipse
Toutefois,crayon
les élèves
sont2).alors
tracer unel’ellipse
ellipse en
la corde te
(figure
On portés
perd
iciàl’idée
estgardant
constituée
Le schéma suivant est fourni aux élèves :
en gardant
la corde
tendue
à l’aideque
du crayon (figure 2).
On par un
crayon (figure
2).géométrique.
On
l’idée
que l’ellipse
constituée
par une
perd
iciperd
l’idéeicique
est
constituée
par
infinité
du lieu
Jel’ellipse
propose
que
la est
ficelle
soitune
donnée
dansinfinité
un deu
de
points,
l’idée
du
lieu
géométrique.
Je
propose
que
la
du lieu géométrique.
propose pas
que àlatrouver
ficelle soit
dans un deuxième
tem
si les élèvesJen’arrivent
des donnée
points respectant
la condition
ficelle soit donnée dans un deuxième temps, notamment
si les élèves
pas à trouver
des les
points
respectant
la condition
décrite d
lesn’arrivent
élèves
raisonnent
ainsi sur
points
respectant
le lieu géométriqu
si les élèves
n’arrivent
pas à trouver
des
points respectant
les élèvesdirectement
raisonnent
ainsi
sur lesdans
points
respectant
leélèves
lieu géométrique
la condition
la consigne,
lesla
raisonnent
sur décrite
l’ellipse
tracée
à l’aide de
ficelle.
De plus, j’aiplutôt
demaq
ainsi
sur les
points
respectant
lieu géométrique
plutôt
directement
sur
l’ellipse
tracée
à l’aide
de lalele
ficelle.
De plus, j’ai
demandé
aux é
la distance
totale
parcourue
par
chaperon
Les élèves
que de travailler
directement
sur petit
l’ellipse
tracée àrouge.
l’aide de
la distancerelation
totale
parcourue
par j’ai
le
chaperon
rouge.
Les
élèves
ainsi
la ficelle.
De plus,
demandé
aux élèves
trouver
lasont Ils
métrique
entre
lespetit
trois
paramètres
a, bde
et
c de
l'ellipse.
de
distance
totale
parcourue
par
le
petit
chaperon
rouge.
Les
relation métrique
les la
trois
paramètres
a, b et c de l'ellipse. Ils devaient, po
question,entre
utiliser
relation
de Pythagore.
élèves sont ainsi sensibilisés à la relation métrique entre
question, utiliser la relation de Pythagore.
les trois paramètres a, b et c de l’ellipse. Ils devaient, pour
Les diverses manipulations pouvant être réalisées par les élèves
Figure
1 : Tendre
ficelle vers
la pâtisserie
répondre
à lalaquestion,
utiliser
la relation de Pythagore.
nous voulions mettre
l’accent sur le concept de lieu
géométrique,Figure
nousêtre
avons
Les Comme
diverses
manipulations
pouvant
1 : Tendre la ficelle vers la pâtisserie
demandé aux élèves de trouver une dizaine d’emplacements permettant au petit chaperon
réalisées
par les élèves
Le schéma suivant est fourni aux élèves :
rouge de parcourir la même distance. Le raisonnement des élèves est alors orienté vers l’idée de
la somme constante de deux distances à deux points fixes, dans ce cas-ci la maison de mère-
grand et la maison
petit chaperonmettre
rouge. Avec
ses groupessur
d’élèves,
Mme Hosson de
a fait
le
Comme
nousduvoulions
l’accent
le concept
lieu
choix de favoriser diverses manipulations : avec deux règles, en utilisant du papier quadrillé ou
géométrique,
avons
demandé
aux
élèves etdela maison
trouver
en traçant des cercles nous
concentriques
dont les
foyers (la maison
de mère-grand
du
petit chaperon
rouge)
constituent le centre. Les élèves
raisonnent ainsi
la distance
entre les
une
dizaine
d’emplacements
permettant
ausurpetit
chaperon
points de l’ellipse (les différents emplacements de la pâtisserie) et les foyers (maison de mèrerouge
de parcourir la même distance. Le raisonnement des
grand et celle du chaperon rouge). La consigne de cette activité amène les élèves à voir que
l’ellipse estest
une alors
figure composée
d’unevers
infinitél’idée
de pointsde
partageant
une propriété
métrique
élèves
orienté
la somme
constante
commune. Nous voulions éviter que les élèves tracent toute l’ellipse de façon « continue », car
de deux distances à deux points fixes, dans ce cas-ci la
en procédant ainsi, les élèves perdent l’idée de lieu géométrique. Il peut être alors demandé aux
maison
de unemère-grand
et unlatransparent,
maison
petit
chaperon
élèves de tracer
dizaine de points sur
puis,du
à l’aide
du rétroprojecteur,
l’enseignant
peut
superposer
les
transparents
produits
par
plusieurs
groupes
rouge. Avec ses groupes d’élèves, Mme Hosson a d’élèves.
fait le
L’assemblage des transparents fait émerger une réunion de points construits par le travail de la
choix
dequifavoriser
manipulations : avec deux
classe, points
tendent à formerdiverses
une ellipse.
règles, en utilisant du papier quadrillé ou en traçant des
Figure 1 : Tendre la ficelle vers la pâtisserie
3
cercles concentriques dont les foyers (la maison de mèreFigure 2 : Déplacer le crayon en laissant la ficelle tendue
grand et la maison du petit chaperon rouge) constituent
Figure 2 : Déplacer le crayon en laissant la ficelle tendue
le centre. Les élèves raisonnent ainsi sur la distance entre
les points de l’ellipse (les différents emplacements de la
pâtisserie) et les foyers (maison de mère-grand et celle
du chaperon rouge). La consigne de cette activité amène
les élèves à voir que l’ellipse est une figure composée
d’une infinité de points partageant une propriété métrique
commune. Nous voulions éviter que les élèves tracent
toute l’ellipse de façon « continue », car en procédant
ainsi, les élèves perdent l’idée de lieu géométrique. Il peut
être alors demandé aux élèves de tracer une dizaine de
points sur un transparent, puis, à l’aide du rétroprojecteur,
Figure 2 : Déplacer le crayon en laissant la ficelle tendue
l’enseignant peut superposer les transparents produits par
plusieurs groupes d’élèves. L’assemblage des transparents
Durée et déroulement de l’activité
fait émerger une réunion de points construits par le travail
de la classe, points qui tendent à former une ellipse.
En tout, l’activité a eu une durée d’une trentaine de minutes,
Mon choix a été différent; j’ai fourni, dès le départ, une
ficelle aux élèves. Ceux-ci placent alors les extrémités
de la corde aux foyers de l’ellipse, représentés ici par
les maisons du petit chaperon rouge et celle de mèregrand et tendent le crayon jusqu’à la pâtisserie (figure 1).
10
temps qui comprend la présentation de la situation par
l’enseignant, le travail des élèves en équipe et le retour
en classe. J’ai fait cette activité au début d’un cours. J’ai
distribué la situation-problème aux élèves, ainsi qu’une
ficelle, puis laissé une dizaine de minutes aux élèves pour
faire la situation-problème en équipes de deux.
ENVOL no 161 — hiver-printemps 2013
GRMS
Matériel utilisé
• Document de l’activité;
• Papier quadrillé, règle, compas ou tout outil pouvant
aider les élèves à trouver des points dont la somme
des distances aux deux foyers est constante;
• Une ficelle par équipe de deux élèves, d’une longueur
d’au moins une vingtaine d’unités par rapport à
l’échelle du schéma;
• Un ordinateur muni d’un logiciel de géométrie
dynamique comme GeoGebra et un projecteur, pour
la phase d’institutionnalisation.
Pertinence de l’activité
Comme précisée précédemment, notre intention
pédagogique est de faire le lien entre l’ellipse et le lieu
géométrique des points dont la somme des distances aux
foyers est constante. Il faut donc montrer, d’un côté, que la
réunion de tous les points décrits dans le lieu géométrique
forme une ellipse, et d’un autre côté, que tous les points
de l’ellipse respectent la définition du lieu géométrique.
Le passage est double : il faut passer du lieu à l’ellipse,
puis de l’ellipse au lieu géométrique. Ce passage, je
crois, se fait de manière dynamique et cyclique tout au
long de l’étude de l’ellipse. La compréhension de ce
lien entre une figure et un lieu géométrique aide l’élève
à analyser la représentation graphique de l’ellipse ainsi
que ses différents éléments (sommets, axe, foyers, etc.).
Cette même idée de passage entre un lieu géométrique et
une figure particulière est reprise dans l’étude des autres
coniques.
En leur fournissant une ficelle dès le départ, la plupart
des élèves ont tracé une ellipse, puis indiqué dix points
sur celle-ci. Ainsi, ils partent de la définition du lieu
géométrique pour tracer une ellipse, puis passent de
l’ellipse pour revenir vers le lieu géométrique. L’activité
de manipulation permet donc de faire ce double passage.
La manipulation permet également, je crois, de donner du
sens aux différents éléments de l’ellipse tout en rendant
l’élève actif. L’apprentissage est donc plus significatif
pour ce dernier. Par la manipulation, on conçoit bien l’idée
que la somme de chacun des points aux deux foyers reste
constante, car cette somme des distances est représentée
par la longueur totale de la ficelle. Il faut toutefois faire
attention, car certains élèves ont de la difficulté avec
le concept de distance. Notamment, ils ne perçoivent
pas que la ficelle, peu importe la manière dont elle est
placée, conserve toujours la même longueur. Il est alors
plus difficile, pour ces élèves, de faire le lien entre la
manipulation à l’aide de la ficelle, la définition du lieu
géométrique et la figure de l’ellipse. Il peut donc être plus
judicieux, avec ces élèves, de simplement leur demander
de trouver, à l’aide de stratégies qui leur seront propres,
des points respectant le lieu géométrique.
La manipulation à l’aide de la ficelle a, toutefois, certains
avantages. Lorsque les élèves tendent la ficelle aux deux
sommets de l’axe transversal, ils comprennent que la
somme des distances d’un point aux deux foyers représente,
en fait, la longueur de l’axe transversal. De plus, quand
les élèves tendent la ficelle aux deux sommets de l’axe
conjugué, ils sont sensibilisés à la relation métrique entre
les paramètres a, b et c.
Le contexte que nous avons utilisé est également
intéressant didactiquement. D’abord, l’histoire du petit
chaperon rouge ajoute un côté ludique et motivant pour
les élèves : il y a maintenant un but, une raison, pour
trouver des points dans le plan. Le contexte transforme la
simple manipulation en situation-problème. On ne dit pas
à l’élève comment trouver les points : à la limite, on lui
précise seulement que la ficelle peut l’aider à représenter
la distance totale que parcourt le petit chaperon rouge4.
C’est donc à l’élève de faire le lien entre la somme des
distances entre le point et les deux foyers, la ficelle et la
représentation graphique qu’on lui demande de réaliser. Le
défi est toutefois raisonnable : les élèves ont rapidement
compris la manipulation qu’ils devaient réaliser. Une fois
qu’ils l’ont comprise, les apprentissages sont encore plus
significatifs que si je leur demande simplement de tracer
une ellipse. Ils comprennent mieux la relation entre les
paramètres, car ils ont fait ce lien par eux-mêmes pour
répondre à la situation-problème.
L’histoire donne également du sens au concept de foyers.
Nous ne prenons pas n’importe quel point dans le plan,
mais bien ceux représentant les maisons du chaperon
rouge et de sa grand-mère. Le contexte permet de mieux
comprendre pourquoi il faut que la somme des points de
l’ellipse aux deux foyers soit constante. Enfin, les élèves
peuvent, par la suite, rattacher le concept de foyer à une
La ficelle donnée aux élèves était plus grande que la mesure du grand axe.
4
GRMS
ENVOL no 161 — hiver-printemps 2013
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image, ce qui les aide à travailler avec la figure lorsqu’il
n’y a pas de contexte. C’est aussi plus facile de verbaliser
les caractéristiques de l’ellipse lorsqu’on fait des liens
avec la situation-problème.
Nous avons également fourni un schéma aux élèves
pour les guider dans leurs démarches, et nous leur avons
implicitement demandé de calculer la distance initiale
que parcourt le petit chaperon rouge. Instinctivement, la
relation métrique entre les trois paramètres s’est révélée
une évidence pour les élèves, car ils maîtrisent parfaitement
la relation de Pythagore.
J’ai finalement utilisé le logiciel GeoGebra pour me
permettre de pallier une faille de mon activité de
manipulation. À l’aide de la ficelle, les élèves ont tendance
à tracer directement un trait continu illustrant l’ellipse.
Or, nous voulions, au départ, que les élèves identifient
différents points puis comprennent que la réunion de
ces points nous donne l’ellipse. J’ai donc créé un fichier
GeoGebra qui reprend la manipulation réalisée par les
élèves, mais en ne faisant que des points au lieu d’un trait
continu. Ce fichier m’a permis de montrer aux élèves
que l’ellipse est composée de plusieurs (une infinité)
de points respectant une même propriété métrique. Par
contre, l’activité à l’aide de la ficelle rend plus concrète
la définition de l’ellipse que le fichier GeoGebra, car les
élèves « manipulent » la somme des distances du point de
l’ellipse aux deux foyers par le biais de la ficelle.
En somme, la manipulation à l’aide de la ficelle permet
de donner du sens à la définition de l’ellipse en tant que
lieu géométrique des points dont la somme des distances à
deux foyers est constante, tandis que le fichier GeoGebra
permet de reprendre l’idée que l’ellipse est en fait
composée d’une infinité de points respectant une propriété
métrique commune.
Un défi mathématique : solliciter
l’implication des élèves
Lorsque les élèves ont fait l’activité, ils étaient anxieux.
Particulièrement dans les classes PEI où la crainte de
l’erreur rend les élèves nerveux, ces derniers sont peu
enclins à résoudre une situation-problème telle que
décrite dans l’activité. J’avais toutefois fait plusieurs
activités dans les leçons précédentes, ils n’étaient donc
pas confrontés pour la première fois à la résolution d’une
activité. Le travail en équipe a également apaisé leurs
craintes, car ils pouvaient s’entraider. Comme les élèves
12
PEI ont un lien très fort entre eux, car ils sont ensemble
depuis 5 ans, ils travaillent bien en équipe et s’entraident
beaucoup. Les plus forts vont donc aider les plus faibles,
ce qui fait en sorte que tous les élèves finissent par
comprendre comment réaliser la manipulation, grâce à
l’aide fournie par leurs pairs. J’ai remarqué qu’ils osent
faire des essais et présenter leurs démarches entre eux,
car ils se font confiance. Ils sont très solidaires entre eux.
Il est donc plus facile de miser sur le sociocontructivisme
avec ce type de clientèle.
De plus, le contexte humoristique est basé sur une histoire
d’enfant (le petit chaperon rouge) a probablement eu
comme effet de dédramatiser les erreurs en donnant
l’illusion aux élèves que l’activité est plutôt un défi
mathématique, voire un jeu, une énigme ou une activité
purement ludique; qu’un exercice de mathématiques
qu’ils doivent impérativement être capables de réaliser
du premier coup. Ils ont été ainsi plus enclins à faire des
essais pour essayer de comprendre les liens entre la ficelle,
les distances impliquées et la représentation graphique
de l’ellipse. L’une des principales difficultés que j’ai
éprouvées quand je présentais des activités aux élèves est
qu’ils veulent toujours performer et n’osent pas faire les
erreurs qui sont pourtant nécessaires à leur apprentissage.
Erreurs, difficultés des élèves et
interventions possibles
Lorsque les élèves ont essayé de trouver la façon dont
ils doivent utiliser la ficelle pour trouver des points
permettant de conserver la somme des distances aux deux
foyers, plusieurs raisonnements et erreurs intéressants
sont ressortis.
a) Confusion avec le cercle
Certains élèves ont essayé de tracer un cercle (nous
venions de voir cette conique), en prenant comme centre le
point d’intersection des deux segments donnés et comme
rayon la distance entre ce dernier point et la pâtisserie de
M. Rouge. (Voir Figure 3 à la page suivante)
Pour aider ces élèves, je leur ai fait remarquer que la
distance totale que parcourt le petit chaperon rouge si l’on
place la nouvelle pâtisserie au point P1 ou P2 ne serait plus
la même. On peut faire le calcul : présentement, le petit
chaperon rouge parcourt 20 mètres au total, tandis qu’elle
ne parcourt que 16 mètres si l’on place la pâtisserie au
point P1 ou P2. Le cercle ne permet donc pas de résoudre la
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GRMS
Figure 3 : Une conception erronée utilisation du cercle
D’autres
élèves n’ont considéré que la partie supérieure
D’autres élèves n’ont considéré que la partie supérieure de l’ellipse. À ces élèves, je leu
À ces
élèves,
jeautre
leuremplacement
ai fait remarquer
qu’il remarquabl
aide
faitl’ellipse.
remarquer qu’il
y a au
moins un
possible, facilement
y an’est
au pas
moins
undans
autre
possible,
facilement
qui
présent
leuremplacement
démarche. Ce point
est évidemment
le point obtenu pa
remarquable,
qui
n’est
pas
présent
dans
leur
démarche.
symétrie dont j’ai parlé précédemment. Ces élèves ont ainsi compris que l’on Ce
pouvait considére
point
est
évidemment
le
point
obtenu
par
symétrie
dont
également la partie inférieure de l’ellipse.
j’ai parlé précédemment. Ces élèves ont ainsi compris que
l’on 5pouvait
considérer
Figure
: Une difficulté
des élèves également la partie inférieure de
l’ellipse.
Figure 3 : Une conception erronée utilisation du cercle
situation. Par contre, cette fausse conception de départ m’a
permis de décrire, lors de la phase d’institutionnalisation,
Pour aider ces élèves, je leur ai fait remarquer que la distance totale que parcourt
le Une difficulté des élèves
Figure 5 :
la différence entre le cercle et l’ellipse, puisque plusieurs
haperon rouge
la nouvelle
pâtisserie au
P1 ou P2 ne serait plus la
élèves siontl’on
eu place
de la difficulté
à comprendre
la point
différence
Mise en commun des points trouvés par
entre
deux
coniques.
Pour
leur
la différence,
ces
coniques.
leur
la différence,
j’aichaperon
utilisé
un fichier
dans
Ondeux
peut
faire ces
lePour
calcul
: expliquer
présentement,
le expliquer
petit
rougeGeoGebra,
parcourt
20 mètres au
les élèves
Mise en commun des points trouvés par les élèves
j’ai
utilisé
un
fichier
GeoGebra,
dans
lequel
je
modifie
je modifie
la distance
focale que
d’une
Lorsque
laplace
distance
focale est nulle,
l’ellipse
andis
qu’elle
ne parcourt
16ellipse.
mètres
si l’on
la
P2. Le
la distance
focale d’une
ellipse.
Lorsque
la pâtisserie
distance au point ÀP1la ou
suite de la manipulation réalisée par les élèves, j’ai dessiné le même schéma qu
la forme d’un cercle. Le logiciel GeoGebra, par son côté dynamique permet de montrer
en de la manipulation réalisée par les élèves, j’ai
À la suite
focale
nulle,
l’ellipse prend
la formePar
d’un
cercle.cette
Le fausse
ne permet
doncestpas
de résoudre
la situation.
contre,
de au tableau, mais en plus gros pour qu'il soit bien visible pour tous le
dans laconception
situation-problème
dessiné
le même schéma que dans la situation-problème au
u l’effet delogiciel
la modification
de
certains
paramètres
sur
la
figure,
illustre
bien
que
le
cercle
GeoGebra, par son côté dynamique permet de
élèves de la classe, et j'ai demandé aux élèves, lorsqu'ils avaient terminé de répondre à
m’a permis de décrire, lors de la phase d’institutionnalisation, la différence
entre
le gros pour qu’il soit bien visible pour
tableau, mais
en plus
montrer
en
continu
l’effet
de
la
modification
de
certains
cas particulier d’une ellipse au même titre que le carré est un cas particulier du rectangle.
situation-problème, de venir en avant rapporter 2 points représentant des emplacemen
tous les différence
élèves de la classe, et j’ai demandé aux élèves,
et l’ellipse,
puisque plusieurs
élèves
ont bien
eu de
la ledifficulté
à un
comprendre
paramètres
sur la figure,
illustre
que
cercle est
possiblesla
pour la pâtisserie. De cette manière, nous voyions apparaître, peu à peu, une ellips
lorsqu’ils avaient terminé de répondre à la situationcas particulier d’une ellipse au même titre que le carré est
formée par le travail de tous les élèves. Comme précisés précédemment, si nous avions eu u
problème, de venir9en avant rapporter 2 points représentant
un
cas
particulier
du
rectangle.
rétroprojecteur, nous aurions pu demander aux élèves d’identifier quelques points en faisant
b) Des points plus évidents que d’autres
des emplacements possibles pour la pâtisserie. De cette
manipulation sur des transparents, puis superposer les transparents au rétroprojecteur.
manière,
Plusieurs b)
élèves
facilement
trouvé qu’il
possible d’utiliser le point image
de la nous voyions apparaître, peu à peu, une ellipse
Des ont
points
plus évidents
queest
d’autres
formée par le travail de tous les élèves. Comme précisés
erie obtenu par une symétrie axiale selon la droite qui supporte le segment limité par les
précédemment, si nous avions eu un rétroprojecteur, nous
Plusieurs élèves ont facilement trouvé qu’il est possible
maisons. Par contre, certains de ces élèves ont eu de la difficulté à trouver les
autres pu demander aux élèves d’identifier quelques
aurions
d’utiliser le point image de la pâtisserie obtenu par une
.
points en faisant la manipulation sur des transparents, puis
1
symétrie axiale selon la droite qui supporte le segment
superposer les transparents au rétroprojecteur.
limité par les deux maisons. Par contre, certains de ces
élèves
eu premier
de la difficulté
à trouver les autres points.
Figureont
4 : Un
emplacement
Institutionnalisation à l’aide de GeoGebra
Pour faire suite à cette activité, j’ai fait un retour en
groupe-classe à l’aide d’un fichier préalablement préparé
sur GeoGebra qui permet, à l’aide de l’outil trace et de
l’animation, de représenter un ensemble de points qui
forme, à la fin, une ellipse. En activant le curseur lieu,
l’ellipse complète apparaît dans le schéma. Le curseur v
permet de faire varier la vitesse de l’animation. Dans
l’animation, le point P se déplace suivant la courbe de
l’ellipse en laissant des traces, sous forme de points, comme
présenté dans la représentation de la page suivante.
Figure 4 : Un premier emplacement
GRMS
ENVOL no 161 — hiver-printemps 2013
13
ces, sous forme de points, comme présenté dans la représentation ci-dessous.
ure 6 : Fichier GeoGebra utilisé lors du retour en groupe-classe
Figure 6 : Fichier GeoGebra utilisé lors du retour
en groupe-classe
tour réflexif sur l’activité
Retour réflexif sur l’activité
De manière générale, je suis satisfait de l’élaboration de cette activité. Les élèves ont été
tivés par cette tâche et ils ont bien fait le travail demandé. Pour les différentes raisons
osées dans la justification de la pertinence de mon activité, cette dernière a bien répondu à
De manière générale, je suis satisfait de l’élaboration de
cette activité. Les élèves ont été motivés par cette tâche
bien compris la définition de l’ellipse et ont été capables de la réinvestir dans les phases
et ils ont bien fait le travail demandé. Pour les différentes
séquentes de ma leçon. Évidemment, comme je m’y attendais, les élèves étaient anxieux au
raisons exposées dans la justification de la pertinence
part, car ils ne savaient pas trop comment réaliser la manipulation. Par contre, en
de mon activité, cette dernière a bien répondu à mes
ntraidant, ils ont fini par faire les liens que je souhaitais. De même, le retour en groupe-classe
intentions pédagogiques : en rendant les élèves actifs
dans leur apprentissage, ces derniers ont bien compris12la
définition de l’ellipse et ont été capables de la réinvestir
dans les phases subséquentes de ma leçon. Évidemment,
comme je m’y attendais, les élèves étaient anxieux au
départ, car ils ne savaient pas trop comment réaliser la
manipulation. Par contre, en s’entraidant, ils ont fini par
faire les liens que je souhaitais. De même, le retour en
groupe-classe supporté par l’applet GeoGebra a permis
de consolider les connaissances acquises par les élèves et
ceux qui n’avaient toujours pas réussi la manipulation ont
bien compris la définition de l’ellipse. Cette activité met en
évidence deux points importants, je crois, en enseignement
des mathématiques : l’utilisation de situations-problèmes
pour rendre l’élève actif dans la construction de ses savoirs
mathématiques et la pertinence de l’utilisation de logiciels
de géométrie dynamique comme GeoGebra, en classe.
s intentions pédagogiques : en rendant les élèves actifs dans leur apprentissage, ces derniers
L’apprentissage à travers la résolution
d’une situation-problème
Cette activité permet de développer la compétence de
l’élève à résoudre des situations-problèmes, tel que précisé
dans le programme de formation de l’école québécoise
« la résolution de situations-problèmes, qui constitue l’un
des fondements de l’activité mathématique, repose sur une
démarche heuristique, c’est-à-dire axée sur l’exploration
et la découverte » (MELS, 2009, p.19). Or, ce que nous
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avons demandé aux élèves, ce n’est pas seulement d’utiliser
la ficelle pour tracer une ellipse (tâche de reproduction),
mais bien de trouver une manière d’utiliser la ficelle
pour tracer une ellipse (tâche de production). Ce faisant,
nous avons favorisé chez eux un processus de réflexion
leur permettant de bien comprendre et de visualiser les
différents éléments de la définition d’une ellipse. En
établissant des liens entre la définition, la manipulation
et la représentation obtenue de l’ellipse, les élèves ont
donné du sens au concept de l’ellipse. Ils ont découvert
que l’ensemble de ces points donne la figure de l’ellipse et
conçoivent bien que la figure est composée d’une infinité
de points respectant tous une même propriété métrique.
En effet, ils ont obtenu eux-mêmes ces points par une
procédure élaborée par eux en manipulant directement
la somme des distances du point aux deux foyers,
représentée par la ficelle. L’activité répond ainsi bien aux
trois critères d’une situation-problème tels qu’énoncés
dans le programme :
1. « La situation n’a pas été présentée antérieurement en
cours d’apprentissage » (MELS, 2009, p. 19)
Le contexte du petit chaperon rouge n’a pas été présenté
précédemment aux élèves. Évidemment, ils connaissent
tous ce conte de Perrault, mais pas de la manière dont nous
l’avons présenté. C’est un contexte nouveau et intéressant
pour les élèves, et ces derniers ont dû traiter et décoder les
éléments de la situation avant de la résoudre.
2. « L’obtention d’une solution satisfaisante exige le
recours à une combinaison non apprise de règles ou de
principes dont l’élève a fait ou non l’apprentissage »
(MELS, 2009, p. 19)
Comme je l’ai précisé plus haut, les élèves ne savaient
pas comment obtenir les points respectant la description
du lieu géométrique. Dans un premier temps, ils ont dû
trouver une manière de les obtenir à l’aide d’une stratégie
qui leur est propre, à l’aide de règles ou de papier quadrillé.
Ensuite, lorsque j’ai orienté les élèves vers l’utilisation
d’une ficelle, ces derniers devaient trouver une manière
de l’utiliser pour résoudre la situation.
3. « Le produit, ou sa forme attendue, n’a pas été présenté
antérieurement » (MELS, 2009, p. 19)
Dans un cours précédent, j’ai présenté l’ellipse comme
une conique, c’est-à-dire une figure géométrique obtenue
par la coupe d’une surface conique par un plan. Les élèves
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ont donc déjà vu la figure. Par contre, ils ne savent pas,
avant de résoudre la situation-problème, que la réunion des
points demandés donne une ellipse. D’ailleurs, certains
élèves étaient persuadés que je leur demandais de tracer
un cercle, et la plupart étaient surpris de constater que la
figure obtenue était une ellipse.
Le socioconstructivisme et la
contextualisation
Le travail en équipe, selon les fondements du
socioconstructivisme, permet d’enrichir la réflexion de
l’élève par l’interaction entre les différents membres de
l’équipe. En s’entraidant, les élèves arrivent à développer
davantage leur raisonnement, à consolider leur
compréhension des différents concepts mathématiques et
à participer collectivement à la recherche d’une solution.
Il faut aussi noter, je crois, que le contexte permet de
motiver l’enseignement et l’apprentissage des différentes
notions mathématiques, car les élèves voient une utilisation
concrète, bien que loufoque dans ce cas-ci, des notions
mathématiques, tout en rendant la tâche significative et
intéressante pour eux.
Utilisation d’outils technologiques
J’ai trouvé intéressante l’utilisation de GeoGebra dans la
phase d’institutionnalisation. Grâce à des outils comme
l’animation ou la trace, on peut faire bouger les figures
mathématiques pour faire voir à l’élève l’influence
directe d’un paramètre. L’élève comprend donc mieux
leur effet. En rendant les mathématiques dynamiques,
GeoGebra permet de rendre certains concepts beaucoup
plus significatifs pour les élèves. Par exemple, dans cette
activité, le logiciel a été utilisé pour tracer différents
points autour du tracé d’une ellipse, plutôt que de faire
directement un trait. D’abord, le tracé de l’ellipse est plus
précis, mais on peut également montrer à l’élève que
l’ellipse est avant tout un ensemble de points respectant
une propriété métrique, et non un simple trait de forme
ovale, comme les élèves la perçoivent souvent. Les élèves
ont bien compris que ce n’est pas n’importe quelle figure
en forme d’ovale qui peut représenter une ellipse : il faut
que les points de la figure respectent une relation bien
précise. En ajoutant de la rigueur dans les représentations
graphiques des figures, des concepts tels les sommets et
les axes ont beaucoup plus de sens pour les élèves. J’ai
également utilisé GeoGebra pour montrer aux élèves que
le cercle est un cas particulier en modifiant la distance
focale et en montrant de manière dynamique l’influence
de la modification de ce paramètre sur la figure. D’autres
applications sont également disponibles en ligne : par
exemple, j’ai trouvé un applet intéressant pour montrer
que les coniques pouvaient être obtenues par des coupes
d’une surface conique par un plan5. C’est quelque chose
qui peut être difficile à faire visualiser aux élèves sans le
recours à du matériel concret parfois difficile à manipuler
en classe. J’encourage donc les enseignants à utiliser ces
outils technologiques qui permettent de rendre, je crois,
les mathématiques plus accessibles et intéressantes aux
élèves du secondaire.
Remerciements
Je tiens à remercier Mme Nathalie Hosson, enseignante à
l’école Jacques Rousseau, pour son soutien et ses judicieux
conseils, ainsi que pour sa créativité débordante dans la
conception de contextes intéressants et stimulants pour les
élèves; et Mme Mireille Saboya, professeure à l’UQAM,
pour m’avoir encouragé à écrire cet article, pour son appui
tout au long de sa rédaction ainsi que pour ses nombreuses
suggestions pour l’améliorer.
Références
MELS (2009). Ministère de l’Éducation, du Loisir et
du Sport. Programme de formation de l’école
québécoise : Enseignement secondaire, deuxième
cycle, Mathématique, 2e édition. 143 p.
National Council of Teachers of Mathematics. 2012. « Conic Section Explorer » In Illumination.
En ligne. http://illuminations.nctm.org/ActivityDetail.aspx?ID=195. Consulté le 19 octobre 2012.
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