i/ l`entreprise
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"La nai ssance d' uN li vre" Pi erre MULLER PIERRE MULLER ElEve ingEnieur de premiEre annEe A Grenoble INP - Pagora STAGE DE fin de 1ERE annEe LIEUX : MANUFACTURE D'HISTOIRES DEUX-PONTS DATE : DU 10/06/2013 au 19/07/2013 TUTEUR : ARNAUD CHAUSSON SOM E R I A M E S I R P E R T N E ’ L / I S II/ MES MISSION S W E I V R E T N I / I I I S I R P P A I A ’ J E U IV/ CE Q AVANT-PROPOS Afin de diversifier mes compétences pour parfaire ma formation d’ingénieur j’ai choisi d’effectuer mon stage ouvrier dans une imprimerie, Manufacture d’histoires Deux-Ponts, entreprise située à Bresson, au sud de Grenoble et spécialisée dans l’impression à forte valeur ajoutée. Mon stage s’est déroulé en équipe (2x8) au sein du service façonnage pendant une durée totale de 6 semaines, de 6h à 14h ou de 14h à 22h alternativement chaque semaine pour un total de 37h et demi par semaine. Bien que particulièrement difficile, ce stage permet au futur ingénieur de faire l’expérience des conditions de travail des ouvriers qu’il sera certainement amené à diriger plus tard, de voir le fonctionnement d’une entreprise et de confronter les cours théoriques de première année avec la réalité du monde du travail, des coûts et des impératifs de livraison. Etant également particulièrement intéressé par le monde de l’imprimerie, c’était pour moi un grand avantage d’effectuer mon stage dans une entreprise qui regroupe tous les aspects de l’impression, de la création à l’impression Offset puis au façonnage. 1 I/ L’ENTREPRISE L’entreprise Manufacture d’Histoire Deux-Ponts a aujourd’hui 78 ans. Créée en 1935 par André Caillat, elle est désormais aux mains de Laurent et Renaud Caillat, d’où une certaine tradition dans son savoir-faire. Cette entreprise a su fidéliser des clients qui partagent les mêmes valeurs et attentes en terme de qualité et travaille donc régulièrement pour Hermès, Dior ou encore Ubisoft. Enfin depuis décembre 2012 l’entreprise a reçu le label “ Entreprise de Patrimoine Vivant” reconnaissance d’un savoir- faire d’excellence attribué à un peu plus de 1000 entreprises françaises dont seulement 15 en Isère. La force principale de cette imprimerie et qu’elle possède tout le matériel nécessaire pour créer, imprimer, façonner puis expédier une commande et ne sous-traite aucune étape. Son activité s’inscrit également dans une idée de développement durable avec la certification iso 14 001 pour la gesLES DEUX-PONTS EN BREF tion de l’énergie et des ressources. Voyons donc en détail le cheminement d’une commande : 1ère étape : Le 2 Studio Le client a besoin d’imprimer un produit. S’il possède un service communication efficace ou a déjà fait appel à une agence graphique pour designer le produit alors il envoie simplement le document numérique. Dans le cas contraire il peut faire appel au Studio des Deux-ponts pour s’occuper de la création du produit. Le document produit est alors parfaitement conforme avec les méthodes d’impression des Deux-Ponts. • 160 Salariés et 32 metiers • 3 sites : - Bresson - Paris - Annecy • CA : 19,8 M€ • Atelier : 13 000 m2 • Méthode d’impression : Offset, Offset UV, sérigraphie, numérique, typographie 2e étape : La Publication Assistée par Ordinateur Le fichier est ensuite imposé pour l’impression, les pages sont positionnées dans l’ordre, pouvant différer selon la méthode d’impression choisie. En effet le livre peut être imprimé en feuillets qui se suivent, ou encore qui s’imbriquent les uns dans les autres. C’est également l’endroit où le fichier est mis en conformité. On prépare des épreuves pour le client qui valide ou non le travail et l’ordre des pages. Si tout est en ordre on prépare le Bon à Tirer (BAT) avec une imprimante Laser ou à l’aide d’une imprimante 8 couleurs Epson pour voir le rendu colorimétrique (éclairage normalisé D50 ou D65). On prépare ensuite les plaques Offset, une pour chaque couleur du fichier à imprimer (Quadri CMJN) dans le CTP (Computer To Plate). 3e étape : L’impression Selon la quantité à produire et la qualité recherchée, plusieurs méthodes d’impression sont disponibles : - Offset pour les grandes quantités - Offset UV pour d’autres effets plus complexes - Sérigraphie pour des couleurs éclatantes, du vernis, du relief, des paillettes... - Numérique pour les plus petites quantités Le papier provient de différentes papeteries et dépend aussi de la demande du client (PEFC/FSC). 4e étape : Le façonnage Le produit passe d’abord par le pliage où il est plié en 8, 16 ou 32 pages par des plieuses ou bien rainé. La couverture est faite à part puisqu’elle nécessite souvent plus de travail. Elle peut également être pliée s’il s’agit d’une couverture souple, mais cette fois par une plieuse différente pour les plus gros grammages. L’étape suivante est l’assemblage des feuillets pour former le produit fini avec sa couverture. C’est là où le produit reçoit différents traitements qui lui apportent une forte valeur ajoutée : il peut être vernis, gaufré, pelliculé, recevoir une dorure sur certains caractères ou sur la tranche. Là aussi selon la volonté du client, plusieurs modes d’assemblage existent : - agrafe pour des produits simples. Ex : Notice - dos carré collé pour un rendu propre. Ex : Magazine - dos carré cousu collé pour une plus grande longévité ou un meilleur aspect. Ex: bandes dessinées ou “vrai” livre, catalogue d’art... Parfois le livre peut également faire un passage dans le service “papeterie”, soit l’endroit où sont faites les finitions uniquement faisables à la main. C’est notamment le cas pour les produits de luxe qui nécessite des ajouts de ruban, des collages spéciaux ou tout autres soins qui aide à sublimer le produit. Enfin vient le conditionnement où le produit est mis sous film plastique, en carton étiqueté puis sur une palette pour être ensuite envoyé à destination ou bien prélevé directement sur place. 3 II/ MES MISSIONS La majeure partie de mon stage a été effectuée dans le service façonnage sous la tutelle de Arnaud Chausson et Rogerio Portela En tant qu’ouvrier stagiaire, mon occupation principale était de servir “d’aide”, c’est-à-dire bien souvent à conditionner le produit fini en paquet de taille donnée, le mettre sous plastique puis en cartons étiquetés pour partir ensuite directement chez le client. C’est donc un poste relativement important puisque j’étais le dernier à voir le produit fini avant le client, même si des contrôles qualités ont lieu régulièrement. Il fallait donc s’assurer que tout était conforme en terme de qualité et que le conditionnement était bien celui voulu par le client. J’ai également eu plusieurs l’occasion de “ marger “, terme utilisé pour décrire l’action d’alimenter la machine avec les différents cahiers, dans le bon ordre, pour l’assemblage. Là aussi la responsabilité est grande puisqu’à la moindre erreur, c’est l’arrêt machine dans le meilleur des cas. Ayant observé le processus plusieurs fois voici ce que j’ai retenu : - On lit le dossier et on contrôle le Bon à Tirer (BAT). On contrôle ensuite le nombre d’exemplaires, le mode d’attache choisi, le nombre de pages et de cahier ainsi que la date de livraison. - On “cale” la machine, positionne les lames, règle les capteurs et on s’assure du bon fonctionnement du système sur plusieurs exemplaires supplémentaires, la “ passe”. - Une fois tout en ordre on produit le “ Bon à Rouler” qui doit être visé et validé par le chef d’équipe. - Si tout est en ordre, on peut passer à la production. La machine “roule” et les feuillets défilent. - On prélève périodiquement des exemplaires qui vont être horodatés afin d’être controlés par le responsable qualité et pour garder une trace de tous les travaux en cas de soucis ou de réclamations par le client. J’ai également eu l’occasion d’utiliser ou de voir fonctionner plusieurs machines : • Une découpeuse Varimatrix qui à l’aide d’un modèle de découpe permet de couper des papiers au bon format à la sortie de l’impression. • La dorure sur tranche qui chauffe des bandes dorées et applique la couleur sur la tranche du livre. • La plieuse Cordoba qui fonctionne pour les couvertures souples ou papiers de fort grammage. • Des plieuses standards à plis croisés pour faire des cahiers de 8, 16 ou 32 pages. • Une couseuse qui attache les feuillets ensemble à une vitesse impressionnante. • Une assembleuse Wire’O pour faire des cahiers à spirales. 4 BONUS : A la fin de mon stage et en plus de mes horaires de travail où il fallait être rapide et efficace pendant les 7h et demi de travail, j’ai pris sur mon temps libre pour me rendre dans le Studio, pour visiter et discuter avec les graphistes. Ce domaine étant celui qui m’intéresse le plus dans mes études, j’ai été agréablement surpris de découvrir une véritable agence de communication parfaitement intégrée à la Manufacture Deux-Ponts et capable de créer des documents suivant les demandes des clients. L’équipe du studio se compose de 6 personnes dont plusieurs graphistes, un photographe, une spécialiste web, une chef de projet et un directeur artistique. Lors de mes passages au studio j’ai pu observer plusieurs travaux et poser des questions pour en apprendre plus sur les méthodes de travail. Sans surprise, le travail se fait essentiellement sous Mac avec des logiciels de la suite Adobe, Illustrator, Photoshop et Indesign et à l’aide d’une tablette graphique. Il dispose également un studio photo pour faire des pack shot, essentiel dans la pub et efficace en terme de communiction pour l’entreprise. Le travail auquel j’ai pu assister correspond egalement à celui d’une agence de communication, ils peuvent s’occuper du design d’un livre ou d’un produit, créer une charte graphique, faire des retouches photo ou colorimétriques sous photoshop pour correspondre aux attentes du client. Tout est ensuite archivé sur CD gravé pour garder une trace des différents projets et travaux effectués. 5 III/ INTERVIEWS ARNAUD CHAUSSON Poste : Responsable service façonnage Age : 35 ans Ancienneté : 5 ans Parcours : Commercial et fils de façonneur Arnaud Chausson est le responsable du service façonnage et fut mon tuteur pendant toute la durée de mon stage. C’est à lui de gérer le bon fonctionnement du service façonnage et de s’occuper du planning. Il gère 41 personnes en équipes et doit répartir les différents travaux en fonction du temps de production estimé, des dates de départ d’usine ainsi que des personnes disponibles. Pour cela tous les matins à 10h a lieu une réunion planning pour répartir les tâches de façon optimale. Il est formé sur la quasi totalité des machines utilisées dans l’atelier et connait donc les problèmes récurrents. En tant que responsable c’est donc la personne qu’on va voir en cas de problème, de détection d’un défaut sur un produit ou de demandes de conseils. Il est en effet responsable de la qualité des produits qui sortent de son service. Par exemple, si un technicien découvre que tel ou tel produit à un défaut d’impression, une faute d’orthographe ou une erreur, il en réfère à M. Chausson qui, selon la gravité de la situation peut décider de continuer la production ou bien d’avertir Dominique Coussy, le directeur de production, pour éventuellement choisir d’arrêter la production, de contacter le client ou de faire tout son possible pour résoudre le problème. Ce genre de problème arrive plus souvent que l’on pourrait croire puisque le service façonnage est à la fin de la chaine de production et la plupart des problèmes invisibles en amont sont beaucoup plus réperables quand on regarde le produit fini. 6 BRIGITTE GARCIA Poste : Chef de Projet Ancienneté : 8 ans Parcours : BTS puis formation continue Pendant mes passages au studio j’ai également eu l’occasion de rencontrer Brigitte Garcia, chef de projet au studio qui m’a expliqué en détail les rouages du Studio. Comme évoqué précédement l’équipe constitue une véritable agence de communication, capable de produire des documents pour les clients et de développer leurs idées. Le studio c’est la “ cerise sur le gâteau” pour une imprimerie. Mme Garcia est chargé de s’assurer du bon déroulement du planning pour répondre aux deadlines des clients. Elle doit donc toujours s’informer sur le bon déroulement des projets en cours, répartir les tâches le mieux possible. Le studio est situé dans les locaux des Deux-Ponts mais reste un peu à part puisqu’il est possible de choisir différents “menus” : impression simple, impression et création, et même parfois simplement la création. Par conséquent ils ont un objectif financier à atteindre et c’est elle qui doit s’assurer que les contrats et factures sont suffisantes pour cela. Derrière tout ceci il y a également beaucoup de travail et d’interactions avec le client pour saisir ce qu’il demande. Mme Garcia est donc régulièrement en contact avec le client pendant toute la durée du projet, mais aussi avec des sous-traitants pour certaines tâches. En effet, lorsqu’un client fait appel au studio, il peut avoir une maquette déjà commencée, une ébauche, un plan détaillé... Mais parfois ils peuvent aussi partir de zéro. Dans ce cas, le studio peut choisir d’engager un journaliste ou un rédacteur pour créer non seulement la forme mais aussi le contenu. La traduction d’un ouvrage par exemple passe aussi par le studio qui doit ensuite remettre en forme le contenu. 7 IV/ APPORTS DU STAGE Au terme de ce stage de 6 semaines, j’ai eu l’occasion de découvrir beaucoup d’aspects du monde de l’imprimerie. Même si le travail fût répétitif et manuel, l’environnement était propice à la découverte des procédés évoqués rapidement à l’école. Ainsi, j’ai pu tester la patience de mes collègues en posant énorménment de questions sur tout les aspects du travail, des machines, des procédes, des capteurs... Soit tout ce qui m’intriguait et que je souhaitais comprendre. Les éléments qui, je pense, apporteront un véritable plus à ma formation sont tout d’abord le vocabulaire technique appris sur le tas. Les termes de “margeurs”, “tranche-fine”, “encartage”, “ gaufrage” ou la dénomination des différentes étapes, techniques et façon d’attache par exemple sont maintenant assimilés. Et effectivement, parler la même langue et comprendre les termes est plus qu’indispensable pour un futur ingénieur. Un autre aspect du travail qui m’a particulièrement intéressé, alors que pourtant c’est assez génant habituellement, était les problèmes rencontrés. Sans aucun doute, éviter les dysfonctionnements est l’objectif principal sur une chaîne de production mais parfois des problèmes arrivent. Une tâche sur la couverture, un cahier manquant, une impression mal faite..., c’est toute la production qui s’arrête pour régler le problème au plus vite. J’ai eu la chance de travailler avec des personnes réactives qui m’ont donc expliqué la marche à suivre pour s’en sortir à chaque fois. Problèmes rencontrés Solution Tâche sur le livre Nettoyage des courroies avec un produit qui elimine l’encre On dépose les ouvrages sur le tapis de la machine à la main avec des gants. Eviter le margeur Cas rare, mais nécessite de ré-imprimer On recoupe légèrement au massicot pour l’éliminer On peut penser que trop c’est mieux mais selon la commande si il faut envoyer différentes quantités du produit à différents endroit il est nécessaire d’en mettre juste assez. Passage en studio pour retouche colorimétrique Le dossier part au studio ou bien le service pré-presse appelle le client pour obtenir une nouvelle version conforme Dorure qui se raye facilement Problème de quantité, il manque des livres Gamme de couleurs visible Problème de comptage, : Trop de livres Le client veut une couleur plus éclatante Le PDF envoyé par le client est mal fait, basse résolution et sans bords perdus 8 Suite à mes observations sur la création d’un livre et voulant tirer un maximum de mon passage dans une imprimerie, j’ai décidé de profiter de ma période de stage pour apprendre à produire un livre. C’est pourquoi ce rapport de stage a été créé en utilisant Adobe Indesign pour la mise en forme, puis exporté en PDF optimisé pour l’impression en CMJN avant d’être imprimé au service numérique et relié. Le principal problème se situait dans les normes d’impression utilisées. Le fichier, une fois la partie création et mise en page terminée, doit s’exporter dans le bon format pour rester compatible avec le flux de production utilisé au CTP. Ce petit objectif en plus m’a donc obligé à découvrir le logiciel Indesign et a rencontrer des personnes de toute la chaine de production pour avoir des conseils et des informations. C’est en effet une chose que d’écouter les explications de quelqu’un sur tel ou tel procédé, mais lorsqu’il s’agit de le faire soi-même c’est tout de suite plus compliqué. On rencontre des nouveaux problèmes, ce qui permet de revenir voir les employés avec beaucoup de nouvelles questions et c’est à mon sens une manière efficace de se former. Il fallait donc prendre en compte les problèmes de bords perdus, la taille du dos carré collé, la méthode de pélliculage, ainsi que produire un document PDF adapté avec des traits de coupe. 9 CONCLUSION Au terme de ce stage de 6 semaines, j’ai le sentiment d’avoir profité au maximum des possibilités qui m’étaient offertes pour découvrir et comprendre le fonctionnement d’une entreprise et surtout la création et le façonnage d’un livre. Voir autant de métiers différents qui se complètent réunis en un même endroit pour produire un objet d’exception. Sans aucun doute, le travail d’ouvrier est difficile et demande un fort investissement mais c’est le prix à payer pour créer un ouvrage de qualité avec une belle finition. Je garderai un très bon souvenir de mes passages en studio, une envie de poursuivre mes études dans la communication et l’imprimerie et peut être aussi une fascination pour les 1001 utilités du Scotch. C’était une expérience intéressante et formatrice qui, je n’en doute pas, portera ses fruits pour la suite de mes études en école d’ingénieur. 10 REMERCIEMENTS Pour finir, je tiens à remercier toute l’équipe des Deux-ponts et mes collègues ouvriers pour leur accueil chaleureux dans cette imprimerie de tradition et plus particulièrement Cécile Caillat, directrice des ressources humaines, pour sa disponibilité et son aide au bon déroulement de ce stage, Arnaud Chausson et Brigitte Garcia pour leurs explications et le temps passé à répondre à mes questions ainsi que Pierrick Bonino pour son aide. 11 Manufacture d’Histoires Deux-Ponts 5 Rue des Condamines 38320 Bresson, Isère Tél : 0438241424 11