Présentation de Rembrandt, documentaire de Kat Mansoor
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Présentation de Rembrandt, documentaire de Kat Mansoor
Présentation du film Rembrandt de Kat Mansoor par Daniel Lamotte, écrivain et critique d’art Cinéma le Paris mardi 17 février 2015 à 20 heures Enfant de la famille Van Rijn, Rijn, c’est-à-dire du Rhin (le fleuve Rhin), Rembrandt est son prénom. Né à Leyde en juillet 1606, fils d’un riche meunier, sa destinée devait s’avérer strictement hors du commun. Et même beaucoup plus encore ! Presque 350 ans après la mort de Rembrandt, l’œuvre du peintre et du graveur demeure mondialement connue et reconnue. Mais que penser de l’artiste et de l’homme ? Portraitiste d’un incroyable talent, il eut très jeune un succès fulgurant. Il parvint même, à Amsterdam, à l’âge de 24 ans, à vendre des tableaux au roi d’Angleterre Charles Ier1. Seulement, la clientèle se détourna assez vite de lui, effrayée par certaines œuvres peu conventionnelles… Vivant une vie jugée scandaleuse, même dans le pays de tolérance dans lequel il vivait, Rembrandt fut confronté à une succession de tragédies familiales. Il fut aussi acculé à la faillite et mis sous tutelle économique. Devenu une figure d’artiste maudit et incompris, les Romantiques s’emparèrent du personnage et de son œuvre pour tirer l’un et surtout l’autre des oubliettes de l’Histoire. Si l’on en croit plusieurs documentaires récents ayant un peintre pour sujet, on s’intéresse, semble-t-il, plutôt aux fins de carrière des artistes qu’à leurs débuts. Peur de la fougue juvénile ? Goût pour les extravagances de vieillards qui n’ont plus rien à prouver aux hommes de leur temps et n’ont de compte à rendre qu’à l’au-delà ? Notre Rembrandt âgé (Autoportrait de 1660), qui nous bénit d’un sourire narquois, nous invite à passer en revue le fil de son existence. Saurons-nous saisir les messages codés du maître ? 1 Charles Ier (1600-1649), roi d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande de 1625 à 1649. Une peinture faite d’or Formé à Amsterdam dans l’atelier du peintre italianisant Pieter Lastman2, le jeune Rembrandt s’intéressa particulièrement à la peinture du Caravage3 et à celle de Pierre-Paul Rubens4 qui l’influencèrent. Au Caravage il emprunta les forts contrastes d’ombre et de lumière, ainsi que la simplicité naturelle des personnages ; à Rubens il emprunta la théâtralité et le mouvement. Du premier on peut citer La Déposition du Christ (1602-1603), du second Le Miracle sainte Walburge (1610-1611). Vous vous souviendrez de ce dernier tableau quand vous verrez Tempête sur la mer de Galilée (1633), de Rembrandt. Extrêmement cultivé, Rembrandt connaissait les maîtres de la Renaissance italienne, ce que montre bien son Autoportrait au béret le bras appuyé sur un rebord de fenêtre (1640). On peut rapprocher de ce tableau le Portrait de l’Arioste (1508-1512), de Titien5, et le Portrait de Baltassare Castiglione (1515), de Raphaël6. Il devint vite le portraitiste le plus recherché d’Amsterdam. Par exemple ici un Vieil homme en costume militaire (1630-1631). Il réalisa également -des scènes bibliques (de la catégorie des peintures d’Histoire, considérées comme les plus nobles), comme Le Sacrifice d’Isaac (1635) (avec le couteau lâché en l’air, c’est un arrêt sur image au moment le plus crucial de la scène !), -ou des peintures de genre, comme Le Philosophe en méditation (1632) (la lumière éclaire le penseur, la spirale de l’escalier en vis évoque les méandres de l’esprit et une vieille femme attise le feu de la Connaissance dans une cheminée). Sa peinture était d’or. Après ce Philosophe aux couleurs enflammées, voyez ce Cavalier polonais (1655), Esther (1633), ou cet Autoportrait en roi et rouge (1658) (roi autoproclamé de la Peinture ou artiste déguisé en roi de la Dérision Perpétuelle ?). L’artiste connut un succès phénoménal. L’homme avait son caractère. Voyez cet Autoportrait en costume de travail (1654). Je cite notre cher René Huyghes: « [Rembrant se représente] massif, il apparaît semblable à Balzac 7 dans sa robe de bure »8. Rembrandt n’étant pas d’un caractère à accepter quelque compromission que ce soit, sa peinture finit par trahir son anticonformisme. Ses contemporains, qui n’admettaient pas qu’on suive un autre chemin qu’eux, le rejetèrent peu à peu. Fort de son succès et sûr de son génie, Rembrandt livra en 1642 un portrait de groupe devenu depuis l’un des plus célèbres tableaux du monde : La Ronde de nuit, qui d’aillleurs n’en est pas une du tout, le bon titre étant La Compagnie du capitaine Frans Banning Cocq. Le vernis appliqué sur la peinture s’étant fortement assombri au cours des ans, on a cru au XIXe siècle à une scène nocturne. Il s’agit en réalité d’un portrait de groupe. À l’avant d’un tumulte soldatesque, le capitaine, habillé de noir, et son lieutenant, habillé de blanc, tous deux calmes et bien décidés marchent, guidés par le devoir. Derrière, parmi les bourgeois de la milice, on voit clairement que certains ne savent pas manier leurs armes. On entend le bruit des bottes sur le pavé, le cliquetis des hallebardes entrecroisées, les roulements d’un tambour et les aboiements d’un chien affolé. Mais que font les deux petits personnages à gauche du capitaine ? Une petite fille en blanc qui porte une volaille plumée suspendue à sa ceinture et, de dos, un jeune garçon (ou un nain) en tenue sombre et casque noir qui lève sa pétoire vers le ciel et laisse malencontreusement partir un coup de feu. On voit bien s’échapper du canon des flammes et de la fumée mêlées aux plumes du chapeau du lieutenant ; entre le capitaine et son lieutenant, un homme, surpris, a la présence d’esprit de soulever l’arme du dos de sa main pour éviter tout accident. Il émane de cette œuvre une drôle d’odeur de poudre… La mystérieuse petite fille et le gamin aussi maladroit qu’inquiétant ne seraient-ils pas les doubles négatifs de nos deux héros guerriers du premier plan ? 2 Pieter Lastman, ou Pieter Pietersz Lastman, peintre hollandais. Entre 1604 et 1607 environ, Lastman voyagea en Italie, où il fut influencé par le Caravage et Adam Elsheimer (1578-1610). 3 Michelangelo Merisi, ou Amerighi, ou Merighi, dit Caravaggio ou le Caravage (1571-1610). 4 Pierre-Paul Rubens (1577-1640). 5 Tiziano Vecellio, dit Titien (vers 1490-1576), peintre vénitien. 6 Raffaello Sanzio, dit Raphaël (1483-1520). 7 1) Honoré de Balzac (1799-1850). 2) Portrait de Balzac (1842), par Louis Boulanger (1806-1867). 8 Médiathèque Amélie-Murat de Chamalières, 701. 1. HUY, L’Art et l’âme, René Huyghe, Paris, Flammarion, 1960, p. 392 et 396. Commandée par les officiers de la Compagnie des Arquebusiers, l’œuvre ne fit pas l’unanimité, loin de là. Après dix ans d’un succès formidable, Rembrandt, qui y avait mis toute sa science, s’en ressentit profondément blessé. Des femmes que la Mort lui ravit Collectionneur excessivement dépensier, esthète du luxe, drogué de confort matériel dans sa maison familiale, Rembrandt était certainement un jouisseur aimant les plaisirs de la chair et buvant le genévrier à s’en rendre bouffi et présenter finalement un visage aux joues tombantes et au front strié de méchantes rides. En juillet 1634, Rembrandt avait épousé Saskia, justement, la dame qui accompagne le fils prodigue… Elle lui avait donné un fils, Titus. Hélas, Saskia la Muse tomba malade. Elle mourut début juin 1642, laissant un Rembrandt désespéré. Dix ans de vie commune pour le meilleur, et enfin pour le pire… Pour ces deux raisons, cette année maudite de 1642 doit être considérée véritablement comme celle de la grande rupture, à la fois au plan affectif et au plan professionnel. Par la suite, l’art de Rembrandt commença à prendre une tournure fort différente. La nourrice qu’il engagea pour s’occuper de son fils chéri Titus devint rapidement sa maîtresse. Mais elle fut vite considérée comme quantité négligeable, voire même comme très gênante (je passe sur les détails sordides), lorsque Rembrandt engagea une jeune femme, Hendrickje, qu’il se choisit pour compagne. Voyez-la, dans toute sa sensualité, La Jeune femme au bain (1654), un tableau fort osé. Leur concubinage avéré fit l’objet d’attaques du Consistoire de l’Église Calviniste qui exigea régularisation. La réponse du couple fut de donner jour à Cornelia, née en 1654. Depuis des années, Rembrandt traversait des difficultés financières énormes. Déjà du temps de Saskia, la famille de celle-ci l’accusait de dilapider la dote de son épouse. Puis, malgré un travail acharné et des revenus confortables (vente de tableaux, droits perçus sur ses gravures et honoraires versés par ses élèves9), les dépenses du peintre furent telles que des montagnes de dettes s’accumulaient. Son entreprise fut déclarée en faillite et ses biens vendus aux enchères, maison et collections d’œuvre d’art et de curiosités. En 1660, Rembrandt s’installa dans une maison beaucoup plus modeste et continua à peindre. Mais il avait été placé sous la protection de ses employeurs, qui n’étaient autres qu’Hendrickje et Titus. Hendrickje mourut en 1663, après avoir passé 21 ans au côté de Rembrandt. Titus la rejoignit dans l’au-delà en 1668, à l’âge de 27 ans. Ce fils qu’il aimait tant, le peintre en avait fait l’Ange Inspirateur de son Saint Matthieu (1661). Jack Kerouac10 en visite au Louvre, a écrit du Saint Matthieu inspiré par l’ange11 : « Puis un dernier coup d’œil à l’ange de saint Matthieu […]. Sa bouche barbouillée de rouge a remué quand je l’ai regardée. » Seul et miséreux, Rembrandt s’acharna à vivre pour la Peinture. Joris-Karl Huysmans12 a ainsi décrit la situation13 : « [Rembrandt, dans un coin de faubourg, s’absorbait dans la frénétique féerie de son œuvre pour oublier ses peines.] » Un talent qui se libère À croire que plus le malheur l’accablait, plus le peintre devait plonger dans l’inconnu de la liberté et de l’invention, tête première, pinceau, brosse et couteau en mains. 9 Médiathèque de Jaude, à Clermont-Ferrand, 759. 046 REMB, Rembrandt, Michael Bockemühl, Cologne, Benedikt Taschen, 1994, p. 95. 10 Jack Kerouac (1922-1969). 11 Le Vagabond américain en voie de disparition (1960) précédé de Grand voyage en Europe (1960), par Jack Kerouac, Paris, Gallimard, 2003, p. 59-61. 12 Joris-Karl Huysmans (1848-1907). 13 Écrits sur l’Art, Joris-Karl Huysmans, présentation, notes, chronologies, bibliographie et index de Jérôme Picon, Paris, Flammarion, 2008, p. 391. Il est aujourd’hui souvent classé parmi les baroques. Si l’on considère que ce mot signifie « bizarre », il devait réellement le paraître pour les gens de son époque. Roi des « tronies » (« trognes »), Rembrandt a donné dans un pittoresque susceptible de faire penser à Jacques Callot14. Il ne faut non plus négliger que Rembrandt possédait une très importante collection de gravures d’Albrecht Dürer15. En matière de gravure, surtout, il a révolutionné la technique et réussi à rendre une lumière qui semble provenir de l’intérieur des personnages. La Pièce aux cent florins (1647-1648) reste un exemple probant, et en peinture Les Pèlerins d’Emmaüs (1648). René Huyghe a le mieux expliqué cette lumière intérieure que le peintre a fait jaillir des âmes de ses personnages16 : « Ainsi, l’art de Rembrandt s’explique et s’accomplit par deux mouvements en apparence opposés : celui qui le porte à s’enfoncer en lui-même, [l’introspection], mais en même temps celui qui l’incite à rejoindre les autres par le don de ce moi où il semblait s’enfermer. L’aspect même de sa peinture semble traduire symboliquement cette tentative contradictoire : le monde visible semble s’y absorber jusqu’à presque disparaître. L’ombre monte toujours davantage avec les années. La touche du début, trop désireuse de préciser l’objet de ses désirs, se fait plus large, plus vague ; mais au moment où il semble que la nuit croissante va achever d’absorber la lumière, une lumière nouvelle, inattendue, sort d’elle. Elle vient des choses et des êtres, elle émane d’eux. Elle est un rayonnement issu du centre intérieur et qui se répand, écarte les ténèbres, pour venir jusqu’à nous, ainsi qu’une chaleur. » Avec Bethsabée au bain (1654), Rembrandt est parvenu à exprimer tout le fatalisme et la lassitude de cette femme qui sait qu’elle devra se soumettre aux exigences charnelles du roi David. Elle tient en main la missive qui n’est autre qu’un ordre de se rendre dans le lit du souverain. À propos de ce tableau, François Cheng rapporte17 : « On assiste ici à ce que Kenneth Clark qualifie de “miracle d’un corps dénudé imprégné de sentiment et de pensée”. » Pour le rendu étonnamment visible et puissamment dramatique de l’expression d’une femme arrivée à la frontière de la mort, vous serez terriblement émus avec le film de ce soir en voyant les yeux emplis de larmes d’une belle Lucrèce (1664). Dans La Conjuration des Bataves et de leur chef Claudius Civilis (1661-1662), tableau mutilé, Rembrandt a franchi le pas d’une touche grossière et de la représentation d’un chef glorieux, mais borgne. Son Bœuf écorché (1655), peint à grandes coulées de couleurs frise l’abstraction au point que ce tableau a fasciné bien des peintres jusqu’à aujourd’hui, notamment Marc Chagall18, Chaïm Soutine19 ou Francis Bacon20. Rembrandt a transformé le réel en pictural. Il a changé les apparences pour les charger d’émotions, il a rendu informe les formes et donné forme à l’invisible, il a rendu les contours flous, estompé les couleurs au profit de la lumière et de l’ombre, éclairé des lieux sombres et obscurci des incendies, il a fait flotter les auras des personnages par-delà leur représentation matérielle et a donné vie aux acteurs de son théâtre, ils sont là, devant nous, présences fortes, illusionnistes, subtiles, dans l’intemporel, dans le pays du Temps Suspendu. Il a aussi fait appel à l’imagination du spectateur. En d’autres termes, il a transmuté son art en art moderne. Un long chemin de recherche de spiritualité Que pouvait penser le jeune Rembrandt face à son avenir (Autoportrait de 1628) ? Le débutant ambitieux a d’abord travaillé en se conformant à l’univers de ses pairs. Puis, avec le temps, les épreuves et la maturité, puisant des forces dans le malheur, il a libéré son art jusqu’à le rendre totalement pictural. Oublié le dessin et les représentations réalistes ! Il 14 15 16 17 18 19 20 Jacques Callot (1592-1635). Albrecht Dürer (1471-1528). L’Art et l’âme, René Huyghe, Paris, Flammarion, 1960, 1980, p. 279-288. Pèlerinage au Louvre, François Cheng, Paris, Flammarion, Musée du Louvre, 2008, p. 155. Bœuf écorché (1947), Marc Chagall (1887-1985). Carcasse de bœuf (1925), Chaïm Soutine (1893-1943). Figure with meat (1954), Francis Bacon (1909-1992). s’est mis à inventé dans la matière même. Il a tout essayé et tout inventé : son pinceau s’est relâché ou a été pris d’une fougue sans pareille, Rembrandt s’est armé de larges brosses et de couteaux, il a étalé des glacis en fond ou en surcouche, il a littéralement tartiné sa pâte épaisse, l’a piquée, piquetée, frottée, grattée… Ce travail surprit tant qu’au début du XVIIIe siècle, un historien écrivit21 : « J’ai vu plusieurs tableaux] où certains détails sont exécutés avec le plus grand soin, tandis que le reste semble peint avec le pinceau de peintre en bâtiment, sans le moindre égard pour le dessin. […] On rapporte qu’il peignit un jour un portrait si chargé de couleur qu’on aurait pu soulever le tableau en le prenant par le nez de la figure. » Balzac22 a pu penser à cette facture particulière de Rembrandt en écrivant son Chefd’œuvre inconnu où le peintre, à force d’empâtements successifs, finit par obtenir un chaos incompréhensible. À force de se portraiturer (et sans doute aucun artiste ne s’est autant représenté que Rembrandt tout au long de sa vie), il a réellement fait de son propre personnage une figure éternelle du monde pictural. Je rejette catégoriquement l’idée de narcissisme car l’intérêt se porte vers nous. Par un effet de miroir, nous sommes lui et il devient nous. Par un autre effet de miroir, l’homme Rembrandt s’est incarné dans sa peinture, il y a pénétré. « Les portraits qu’il grave, dessine ou peint de lui-même ne sont pas le récit de sa vie. Mais son ambition de devenir la peinture même. » Il a suivi un chemin sacré : le voyage au plus profond de lui-même, pour y reconnaître son âme et la faire participer au souffle vital. Le long de cette route obscure qui mène à la Lumière, il a été épaulé par des amis Juifs. Voyez la fameuse Fiancée juive (en réalité Isaac et Rebecca) (1665), où s’exprime tout l’amour désintéressé du monde. Ses clairs-obscurs, sa poésie inventive, sa spiritualité franche et la vérité évidente de ses scènes ont fait de son œuvre l’une des plus aimée du public. Au cours du film qui va vous être projeté, vous verrez un curieux Autoportrait aux cercles (1660). Ces cercles23 sont le retour de toute chose, éternellement, à l’image du printemps qui revient toujours, tel un miracle immuablement renouvelé. Or, dans l’un de ses premiers tableaux, Rembrandt s’est représenté en fils prodigue. Et voilà que le sujet de l’une de ses dernières toiles est précisément Le Retour du fils prodigue (1668). Je remercie Jérôme Fossati, directeur du Cinéma CGR-Le Paris et Pierre Casabianca, son directeur-adjoint. Je me félicite de la collaboration entre les Cinémas CGR et l’Association Amoureux d’Art en Auvergne. © Daniel Lamotte, écrivain et critique d’art 21 22 23 Rembrandt – Le clair, l’obscur, Pascal Bonafoux, Paris, Gallimard (Découvertes), 1990, 2006, p. 115. Honoré de Balzac (1799-1850). La Comédie, Dante, Paris, Imprimerie Nationale, 1995, 1999, 2007, Gallimard-NRF (Poésie), 2012, p. 1203.