la Cour supérieure du Québec a reconnu

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c
Résumé
Cette decision a ete citee au moins une fois. A-t-elle ete appliquee, distinguee ou critiquee ?
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Parties
College d'enseignement general et professionnel A c. Flynn
(Association du personnel de soutien du College A et College A (F.S.) ; F.N. c. Flynn) *
Juridiction
Cour superieure (C.S.), Montreal
Numero de dossier
500 17 037967 075 et 500 17 045671 081
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Decision de
Juge Jeannine M. Rousseau
Date de la decision
2010 04 09
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References
AZ-50625599
2010 QCCS 1371
2010EXP-1501
2010EXPT-1086
J.E. 2010-825
D.T.E. 2010T-305
[2010] R.J.Q. 1160
[2010] R.J.D.T. 498
Texte integral : 28 pages (copie deposee au greffe)
Indexation
TRAVAIL — grief — harcelement psychologique — arbitrabilite du grief — prescription — derniere manifestation de
harcelement — libelle du grief — ajout d'un evenement additionnel par l'arbitre — exces de competence — revision
judiciaire — grief irrecevable.
TRAVAIL — grief — harcelement psychologique — preuve — justice naturelle — decision s'appuyant sur des «autorites»
non presentees ni mentionnees a !'audience — ouvrages traitant de psychiatrie et de psychologie — incident qualifie de
harcelement psychologique — decision annulee.
TRAVAIL — grief — harcelement psychologique — procedure d'arbitrage — amendement du grief — ajout de
conclusions en cours d'audience — intervention limitee du pretendu harceleur — droit compromis — violation des regles
de justice naturelle.
controle judiciaire — justice naturelle — droit d'etre entendu — equite procedurale —
ADMINISTRATIF (DROIT)
arbitre de griefs — ajout de conclusions au grief — effet — modification du statut de l'intervenant — tiers devenu partie.
ADMINISTRATIF (DROIT) — controle judiciaire — cas d'application — grief — arbitre de griefs — arbitrabilite —
prescription — harcelement psychologique — libelle du grief — exces de competence — ajout de conclusions — tiers
intervenant — violation des regles de justice naturelle — equite procedurale.
—
La Depeche
GRIEF - HARCELEMENT PSYCHOLOGIQUE L'arbitre s'est servi d'un evenement posterieur afin d'amender un grief
pour harcelement psychologique et faire en sorte que celui-ci ne soit pas prescrit; ii s'agit d'un exces de competence, et
sa decision est annulee.
ADMINISTRATIF (DROIT) : Une sentence arbitrate ayant conclu que le grief n'etait pas prescrit et que la plaignante avait
subi du harcelement psychologique de la part d'un collegue est annulee, car l'arbitre a excede sa competence ainsi que
viole les regles de justice naturelle.
Résumé
Requetes en revision judiciaire de deux sentences arbitrates de griefs. Accueillies.
La plaignante est technicienne de laboratoire dans un cegep. Le 24 octobre 2005, elle a depose une plainte denongant le
harcelement psychologique exerce a son endroit par un professeur de l'etablissement. A la suite dune enquete interne
devant un comite forme de trois personnes, l'employeur a rejete sa plainte. Le 30 mars 2006, le syndicat a depose un
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grief. Le 28 novembre suivant, l'arbitre de griefs a accorde un droit d'intervention limite au professeur vise par la plainte.
Dans sa sentence du 5 juin 2007, elle a rejete ('objection fondee sur la prescription du recours et elle a conclu que les
allegations de harcelement psychologique etaient fondees. Elle a reserve sa competence eu egard a la responsabilite de
l'employeur et aux correctifs recherches. A la suite du depOt dune requete en revision judiciaire, les parties se sont
entendues pour en suspendre le traitement jusqu'a ce que l'arbitre ait statue sur la responsabilite de l'employeur et les
mesures de redressement. En janvier 2008, le syndicat a signifie aux parties de nouvelles conclusions, dont certaines
visaient expressement le professeur. Celui-ci s'est oppose a cette demande d'amendement. Le 24 avril suivant, l'arbitre a
rejete !'objection et les audiences ont repris sur le fond du grief. A partir de septembre, la plaignante a quitte la region
pour un conge sans solde de un an. Les parties ont alors decide de faire valoir leurs droits devant la Cour superieure. Le
professeur vise par la plainte pour harcelement a egalement depose une requete en revision judiciaire a I'encontre de la
sentence arbitrale du 24 avrii 2008. Les deux recours ont ete reunis. Dans le premier dossier, l'employeur soutient que
I'arbitre a erre relativement a la prescription du grief et a !'utilisation d'opinions d'experts qui n'ont pas ete mises en
preuve ni annoncees. Dans le second dossier, le professeur invoque un manquement aux *les de justice naturelle.
Decision
Conformement a ce que prevoit Particle 123.7 de la Loi sur les normes du travail, le grief devait etre depose dans les 90
jours suivant la derniere manifestation de harcelement. Le grief etant date du 30 mars 2006, la conduite reprochee devait
donc avoir eu lieu apres le 29 decembre 2005. Or, selon le document annexe au formulaire de grief, le dernier
evenement d'une serie de 14 invoques par la plaignante a eu lieu le 28 septembre 2005. L'arbitre a neanmoins conclu
que le grief n'etait pas prescrit compte tenu d'un evenement additionnel survenu le 30 janvier 2006, soit des paroles a
caractere vexatoire prononcees par le professeur devant le comite d'enquete. Ce faisant, elle a confondu le contenu du
grief tel qu'il a ete form ule le 30 mars 2006 et la preuve de faits posterieurs. Cette modification du grief, en y incluant un
15e evenement, constituait un exces de competence. L'arbitre s'est servie de l'evenement du 30 janvier 2006 afin
d'amender le grief, ce qu'elle ne pouvait faire. Sa decision est annulee. II serait inutile de renvoyer l'affaire devant un
autre arbitre, qui ne pourrait que la rejeter pour cause de prescription. Au surplus, il est etabli que, lors de deux
conferences preparatoires, l'avocate du syndicat a declare que tous les evenements invoques au soutien de ('allegation
de harcelement enoncee au grief etaient enumeres dans la plainte du 24 octobre 2005. Le contenu du grief avait alors
ete discute et precise, et Pevenement de janvier 2006 n'en faisait pas partie. Le grief etant prescrit, it aurait do etre rejete.
Par ailleurs, l'employeur et le professeur reprochent a I'arbitre d'avoir fonde sa conclusion quant a ('existence de
harcelement psychologique sur des autorites n'ayant pas ete mises en preuve. Ces documents, que I'arbitre a qualifie
d'«externes», proviennent de deux auteurs, une psychiatre et un psychologue (Marie-France Hirigoyen. Malaise dans le
travail: harcelement moral: demeler le vrai du faux. Paris: Syros, 2001. 289 p., et Christian Balicco. Pour en finir avec le
harcelement psychologique. Paris: Ed. d'Organisation, 2001. 256 p.). L'arbitre s'est appuyee sur leurs ouvrages dans son
analyse du concept de harcelement psychologique. Lorsqu'elle a conclu que les propos tenus par le professeur devant le
comite d'enquete le 30 janvier 2006 constituaient une «egression se rattachant a la situation de harcelement
psychologique», elle faisait explicitement reference a ces auteurs. Or, ceux-ci n'ont pas ternoigne a ('audience et leurs
qualifications n'ont pas ete validees. De plus, it ne s'agit pas de rapports prepares pour la presente affaire, mais d'extraits
de deux publications choisies par l'arbitre. D'autre part, le recours a ces textes n'a pas ete divulgue aux parties pendant
l'enqu8te ou le delibere, de sorte qu'elles n'ont pas eu la possibilite d'y reagir, que ce soit par une preuve d'expert ou par
une preuve ordinaire. Cette violation des principes de justice naturelle entraine Par - lulation de la decision de juin 2007.
Enfin, le professeur reproche a l'arbitre d'avoir permis, en cours d'audience, I'ajout au grief de conclusions le visant
personnellement. Elle a estime que les droits de ce dernier ne seraient pas compromis par cet ajout puisqu'il aurait toutes
les chances de faire connaitre ses arguments a ce sujet. Cette reflexion de l'arbitre se penchait vers l'avenir, mais sans
envisager tout ce qui s'etait passé depuis sa decision du 28 novembre 2006 de lui reconnaitre un «droit d'intervention
limite». Or I'ajout de conclusions le visant directement a modifie Pinter -et du professeur: de simple tiers, it est devenu une
partie a part entiere. Ce changement l'a insere en cours de route dans un litige auquel tl n'avait pu participer pleinement.
II lui etait alors impossible de remedier a cette situation, qui le touchait directement. II s'agit d'un manquement a la regle
audi alteram partem. Le remede est I'annulation de la decision d'avril 2008 ayant autorise ces modifications aux
conclusions.
Fascicuie Express
EXP 2010, no 18
EXPT 2010, no 18
J.E. 2010, no 18
D.T.E. 2010, no 18
Historique
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Documents et formats
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Instance precedente
Me Maureen Flynn, arbitre, T.A., 2008-7616, 2008-09-29, SOQUIJ AZ-50515118
Reference(s) anterieure(s)
(T.A., 2007-06-12), SOQUIJ AZ-50442551, D.T.E. 2007T-660, [2007] R.J.D.T. 1247; (T.A., 2008-09-29), SOQUIJ AZ50515118, D.T.E. 2008T-853, [2008] R.J.D.T. 1762
Suivi
Requete pour permission d'appeier accueillie (C.A., 2010-09-21), 500-09-020642-104, 2010 QCCA 1729, SOQUIJ AZ50674060. Appel accueilli; le dossier est renvoye a l'arbitre (C.A., 2012-03-07), 500-09-020642-104, 2012 QCCA 441,
SOQUIJ AZ-50837656, 2012EXP-1162, 2012EXPT-592, J.E. 2012-632, D.T.E. 2012T-192
Legislation citee
Normes du travail (Loi sur les), (L.R.Q., c. N-1.1), art. 123.7
Jurisprudence citee
Applique I Explique I Distingue I Critique I N'applique pas I Mentionne I Citee(s) par les parties
Mentionne
Paragr. 83: Pfizer Co. c. Sous-ministre du Revenu national Dour les douanes et l'accise (C.S. Can., 1975-10-07), SOQUIJ
AZ-77111039, [1977] 1 R.C.S. 456, 68 D.L.R. (3d) 9, 24 C.P.R. (2d) 195, 6 N.R. 440
Doctrine citee
Balicco, Christian. Pour en finir avec le harcelement psychologique. Paris: Ed. d'Organisation, 2001. 256 p.
Hirigoyen, Marie-France. Malaise dans le travail: harcelement moral: demeler le vrai du faux. Paris: Syros, 2001. 289 p.
Categorie
01
Date du versement initial
2010-05-05
Date de la derniere mise a jour
2012-03-23
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College d'enseignement general et professionnel A c. F.N.
COUR SUPERIEURE
CANADA
PROVINCE DE QUEBEC
DISTRICT DE MONTREAL
N° :
500-17-037967-075
500-17-045671-081
DATE : 9 avril 2010
L'HONORABLE JEANNINE M. ROUSSEAU
N° : 500-17-037967-075
COLLEGE D'ENSEIGNEMENT GENERAL ET PROFESSIONNEL A
requerant
vs
MAUREEN FLYNN, es qualites d'arbitre de griefs
intimee
et
ASSOCIATION DU PERSONNEL DE SOUTIEN DU COLLEGE A
et
F... N...
mis en cause
N° : 500-17-045671-081
F... N...
requerant
vs
MAUREEN FLYNN, es qualites d'arbitre de griefs
intimee
et
ASSOCIATION DU PERSONNEL DE SOUTIEN DU COLLEGE A
et
COLLEGE D'ENSEIGNEMENT GENERAL ET PROFESSIONNEL A
mis en cause
J R0686
2010 QCCS 1371
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JUGEMENT
Les procedures
[1]
Le Tribunal est saisi de deux requetes en revision judiciaire 1 eu egard a des
sentences arbitrales rendues par Me Maureen Flynn, oil ii est question de harcelement
psychologique dans le milieu de travail.
[2]
La premiere demande en revision judiciaire (500-17-037967-075) est de
l'employeur, qui se plaint de la sentence arbitrale du 12 juin 2007 (RC-3) (dossier 1).
[3]
La seconde demande en revision judiciaire (500-17-045671-081) est de F... N...,
qui se plaint non seulement de la sentence arbitrale decrite ci-dessus, mais aussi de Ia
sentence du 24 avrii 2008 (R-3) (dossier 2).
[4]
Apres avoir situe le conflit, les parties et le deroulement des procedures, nous
analyserons les divers reproches a regard des deux sentences visees, y compris les
normes de controle.
Des explications linguistiques
La sentence arbitrale de juin 2007 est double : une version anglaise et une
[5]
version frangaise.
Les avocats ont explique au Tribunal que la sentence avait ete redigee par
[6]
l'arbitre en langue anglaise; elle ne put cependant Ia deposer au greffe de Ia
Commission des relations du travail, car un texte en langue frangaise fut requis.
[7]
C'est ainsi que I'arbitre elle-meme a traduit sa sentence de 32 pages et que les
deux textes ont ete deposes.
Que la redaction de la sentence ait ete en langue anglaise n'a rien d'etonnant.
[8]
[9]
En effet, seul l'avis de grief (RC-2) est redige en langue frangaise, tous les autres
documents etant rediges en langue anglaise :
•
RC-4 : A College Human Rights Policy Complaint Form, tel que complete par la
plaignante;
•
RC-5 : A College Administrative Policies and Procedures — Human Rights Policy
and Complaint Resolution Procedures;
Les pieces RC sont celles du dossier 1; les pieces R sont du dossier 2.
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•
RC-6 en liasse : correspondance entre A College et monsieur N..., dont le A
College Human Rights Policy Respondent Form, tel que complete par monsieur
•
RC-7 en liasse : lettres de A College;
•
RC-8 en liasse : avis de A College;
•
RC-9 : rapport du Formal Hearing Panel.
[10]
De surcroit, tous les documents joints a ces pieces RC-4 a RC-9 sont aussi en
anglais, notamment la plainte de la presumee victime (14 pages — RC-4) et les
commentaires du presume harceleur (7 pages — RC-6).
[11] Quant a la piece RC-10, it s'agit du CD ROM de l'audition du 30 janvier 2006
devant le comite interne, i.e. le Formal Hearing Panel, constitue conformement au
Human Rights Policy and Complaint Resolution Procedures (RC-5). La encore, cela
s'est deroule en anglais.
-
Ces precisions sont necessaires vu les risques inherents a la traduction, lorsqu'il
[12]
est question d'evaluer et d'interpreter les mots utilises par un ternoin. On trouve une
illustration de cette difficulte aux paragraphes 117 et suivants de la sentence arbitrate
de juin 2007, difficulte qui se repercute dans les demandes de revision judiciaire, eu
egard a l'existence ou non de harcelement psychologique.
Devant la soussignee par contre, les procedures avaient ete redigees en langue
[13]
frangaise et le tout sest deroule en langue frangaise. C'est ainsi que ce jugement est
redige en langue frangaise.
Les parties au conflit
11 s'agit essentiellement de Ft... S..., technicienne au laboratoire de biologie du
[14]
College d'enseignement general et professionnel A, et de F... N..., enseignant de
biologie au merne cegep.
[15]
Les parties officielles au conflit devant la Cour superieure sont :
•
Me Flynn, l'arbitre;
•
('Association du personnel de soutien du College A, le syndicat representant
madame S...;
•
le College A, l'employeur de madame S... et de monsieur N...;
•
monsieur N... lui-meme.
Les &tapes anterieures et posterieures
L'histoire procedurale de cette affaire est compliquee. II est necessaire de la
[16]
connaftre pour comprendre l'interaction des deux requetes dont la soussignee est
saisie.
eft
OAP
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La plainte
[17]
C'est a partir de l'automne 2003 que monsieur N... et madame S... sont appeles
a travailler ensemble et ce, jusqu'a l'automne 2005, époque a laquelle madame S...
depose une plainte (RC-4) conformement aux dispositions du Human Rights Policy and
Complaint Resolution Procedures (RC-5) de l'employeur.
[18]
Cette politique etait nouvelle; elle venait d'être adoptee en juin 2005. L'objectif
vise y est decrit comme suit :
To fulfill the College's legal responsibility under the Quebec Charter of Human
Rights and Freedoms and the Act Respecting Labour Standards in Quebec, to
take reasonable steps to prevent discrimination and harassment and to provide
procedures to resolve problems and handle complaints.
[19]
Les &tapes prevues a cette « Policy » se deroulent comme suit :
•
madame S... depose sa plainte le 24 octobre 2005;
•
monsieur N... en recoit une copie le surlendemain et y repond le 10 novembre
2005 (RC-6);
•
apres reception de cette reponse, madame S... confirme sa demande pour une
enquete — les autres possibilites etant « informal resolution » et « mediation »
(RC-4), le retrait ou ('abandon de Ia plainte ou ('acceptation de Ia reponse;
•
un comite interne, le Formal Hearing Panel, est constitue le 21 novembre 2005 :
o
P... M..., coordonnatrice des services aux etudiants;
o
Pe... R... , directeur des etudes;
o
N... W... , doyenne de la faculte des sciences sociales, commerce, arts et
lettres;
•
l'audition se tient le 16 decembre 2005 et se continue le 30 janvier 2006;
•
madame S... et monsieur N... y assistent et tous deux sont representes par
avocat; de plus, monsieur N... s'etait prevalu de son droit d'être accompagne
d'une personne qui agirait a titre d'« advocate » 2;
•
les personnes suivantes temoignent : madame S..., monsieur N..., l'infirmier J...
A... et H... J..., la coordonnatrice du departement de biologie;
•
le rapport du Formal Hearing Panel est en date du 17 fevrier 2006 (RC-9); it est
remis a madame S... et a monsieur N... le 23 fevrier 2006.
[20] Les conclusions de ce rapport ne satisfont pas madame S.... Elles se lisent
comme suit :
Conclusions
2
Voir RC-5 : Human Rights Policy and Complaint Resolution Procedures, art. 3.12.
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a)
The Hearing Panel concludes that the respondent had certainly, on
occasion, acted and spoken in ill-considered and inappropriate ways.
Although the respondent claimed that his remarks were specifically
directed to another individual and not generalized to all women, they were
clearly inappropriate and unacceptable.
b)
The Hearing Panel concludes that the complainant did not effectively
communicate her experience of the respondent's behaviour to the
respondent, nor to the college until after considerable delay.
c)
The Hearing Panel concludes that very little was done since the
beginning of the respondent's employment at the college to inform him
how his behaviour was being experienced.
d)
The Hearing Panel does not agree with many of the complainant's
interpretations of the cited incidents.
e)
Finally, the Hearing Panel concludes that the complainant did not satisfy
the standards as outlined in Articles 4.01, 4.02, 4.03 and 4.06 under the
college's Human Rights Policy.
Recommendations:
The Hearing Panel recommends that the working relationship of the complainant
and the respondent be evaluated by the appropriate faculty dean(s) and that
measures and actions be instituted (written directives, mediation, Employee
Assistance, etc.) within the shortest delay possible.
Le grief
[21]
D'ou le grief dont Me Flynn sera saisie, qui est signe le 30 mars 2006 (RC-2).
[22]
Une conference preparatoire est tenue le 20 septembre 2006; ii y est question du
droit possible d'intervention au grief de monsieur N.... Le dossier est suspendu pour
trente jours 3 .
[23]
Le 11 octobre 2006, l'arbitre est informee que monsieur N... desire intervenir
titre de personne interessee. Une conference telephonique est tenue le 23 octobre
2006, pour discuter de cette demande d'intervention et du calendrier des journees
d'audience. Les avocats du syndicat et de l'employeur ne s'objectent pas a la demande
d'intervention de monsieur N... 4 .
[24]
Par sa decision en date du 28 novembre 2006, l'arbitre accorde a monsieur N...
un droit d'intervention limite, qui sera etudie ci-dessous : voir a la rubrique Le statut et
l'interet juridique de monsieur N..., aux paragraphes 86 et suivants.
[25]
L'audition du grief a lieu les 20 et 22 mars et le 5 mai 2007. La decision est du
12 juin (RC-3) : l'arbitre rejette ('objection de prescription formulee par l'employeur,
3
4
Decision arbitrale interimaire du 28 novembre 2006, paragr. 5.
Ibid. aux paragr. 6, 7 et 9.
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accueille le grief de harcelement psychologique et reserve sa juridiction eu egard a la
responsabilite de l'employeur et aux correctifs recherches.
La premiere demande en revision judiciaire
La requete en revision judiciaire de l'employeur (dossier 1) est signifiee a la fin
[26]
juillet 2007. Le syndicat *and par une requete en irrecevabilite (procedure #6),
alleguant que la decision attaquee n'etait pas finale : l'arbitre n'avait pas epuise sa
competence et I'employeur n'avait pas, a ce stade, l'interet requis, son interet n'etant
qu'eventuel et hypothetique.
Les parties s'entendent pour harmoniser le deroulement des procedures
[27]
judiciaires et arbitrales, i.e. report de cette requete en revision judiciaire jusqu'a ce que
l'arbitre ait statue sur la responsabilite de I'employeur et les redressements recherches
et report de la requete en irrecevabilite, accompagnes de ('engagement du syndicat de
ne pas soulever, ulterieurement, la tardivete de Ia demande de revision judiciaire : voir
Ia correspondance du 17 octobre 2007 au dossier 1.
Le grief (suite)
Au debut novembre 2007, le syndicat demande une ordonnance provisoire de
[28]
sauvegarde; trois mois plus tard, a la fin janvier 2008, le syndicat signifie officiellement
aux parties de nouvelles conclusions, dont certaines visent monsieur N... directement5 .
[29]
Monsieur N... s'oppose a cette demande de modification et I'employeur I'appuie.
Le debut au sujet de ces amendements en cours d'audience et de la legalite des
[30]
ordonnances reclamees a lieu le 18 mars 2008 devant l'arbitre.
Par decision en date du 24 avril 2008, I'arbitre rejette ces objections. L'audition
[31]
du grief reprend; it y aura cinq jours d'audience.
Au debut septernbre 2008, I'arbitre est informee que madame S... vient de
[32]
commencer un conge sans solde d'un an et ce, pour des raisons personnelles, et
qu'elle sera absente de la region de Montreal.
[33]
Deux consequences s'ensuivent :
• les parties s'entendent pour demander de l'arbitre une decision sur la seule
responsabilite de I'employeur 6 et de reporter sine die Ia poursuite des auditions
eu egard aux ordonnances reclarnees a I'encontre de I'employeur et de monsieur
N..., le tout sous reserve de la demande de revision judiciaire (dossier 1) et de la
demande en revision judiciaire a venir de monsieur N... (dossier 2);
5
s
Voir paragr. 3 de Ia decision du 24 avril 2008.
L'arbitre a rendu cette decision peu apres, le 20 octobre 2008. Cette decision ne fait pas partie du
debat actuel; H n'en sera done plus question.
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•
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vu ('absence de madame S... pendant un an, les parties decident qu'il serait
opportun, pendant ce temps, de faire valoir leurs droits devant la Cour
superieure.
La seconde demande en revision judiciaire
[34]
Ainsi, peu apres, monsieur N... fait signifier sa requete en revision judiciaire
(dossier 2). Les dossiers sont reunis et la soussignee en devient saisie en juin 2009.
•
[35]
Dans le dossier 500-17-037967-075 (dossier 1), la revision judiciaire est
demandee par I'employeur; l'enseignant vise par la plainte y est mis en cause.
[36]
Dans le dossier 500-17-045671-081 (dossier 2), c'est I'enseignant vise par Ia
plainte qui demande la revision judiciaire.
[37]
Mais dans I'un et I'autre des cas, ce sont les mernes reproches qui sont faits, i.e.
decisions deraisonnables, exces de competence et contravention aux regles de justice
naturelle; it s'agit de Ia prescription du grief et de ('utilisation par l'arbitre d'opinions
d'experts non mises en preuve et non annoncees.
De plus, dans le dossier 2, monsieur N... plaide que la *le audi alteram partem
[38]
n'a pas ete respectee, constituant une seconde violation des regles de justice naturelle,
vu l'autorisation de modifier les correctifs recherches.
La prescription du grief
[39]
Voyons d'abord de fagon plus precise les faits a I'origine du premier reproche
souleve par les demandes de revision judiciaire, i.e. celui qui porte sur la prescription : it
s'agit de savoir si les paroles prononcees par monsieur N... le 30 janvier 2006 devant le
Formal Hearing Panel font partie du grief, comme l'a decide l'arbitre, ce qui lui a permis
de conclure a ('absence de prescription. L'analyse du Tribunal suivra.
L'identification des gestes harcelants
Les quatorze evenements, s'echelonnant jusqu'au 28 septembre 2005
[40]
Commengons par le grief (RC-2). II est du 30 mars 2006 et se lit comme suit,
exclusion faite de la liste des correctifs recherches 7 :
EXPOSE DU GRIEF :
(Le syndicat) vous avise de la naissance d'un grief. Les faits a l'origine sont les
suivants et ce, a titre indicatif et sans prejudice.
Dans I'exercice de travail de la personne salariee Madame Fl... S... detenant la
classe d'emploi de Technicien Travaux Pratiques au Service Science and
7
Les correctifs recherches sont reproduits ci-dessous au paragraphe 91.
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General Studies celle-ci est victime de harcelement psychologique exerce par
l'employeur A College en ayant a son egard un comportement vexatoire se
manifestant notamment mais non limitativement par des paroles, des actes et
gestes repetes qui sont reprehensibles, malicieux, hostiles, abusifs et non
desires, laquelle porte atteinte a la dignite, a l'integrite psychologique ou
physique du salarie et qui entraine, pour celui-ci, un milieu de travail nefaste, et
ce, dans le cadre de l'exercice de ses fonctions et de facon contemporaine a cet
exercice.
A College Support Personnel Association (VCSPA) (le syndicat) et Madame FL..
S... par le present grief contestent ce comportement et ces paroles de
l'Employeur A College puisque cela contrevient a la convention collective, la Loi
sur les normes du travail et des Chartes canadienne et quebecoise des droits et
libertes de la personne. En effet, l'Employeur A College notamment mais non
limitativement, a vide les droits fondamentaux de Madame FL.. S... Les actes
poses par l'Employeur A College ainsi que ('absence de mesure prise par celui-ci
ont cause des dommages moraux a Madame Fl... S..., coinme le stress, l'atteinte
a sa dignite, son honneur et sa reputation.
Toute personne salariee a droit a un milieu de travail exempt de harcelement et
de discrimination.
II nous faut d'abord identifier les « paroles, ... actes et gestes repetes qui sont
[41]
reprehensibles, malicieux, hostiles, abusifs et non desires ... » auxquels se refere le grief.
De la decision arbitrale elle-merne, it est clair que les quatorze evenements de Ia
[42]
plainte originate (RC-4) d'octobre 2005 sont vises :
The complainant raises fourteen incidents in her original complaint of
[11]
October 2005 ... [RC-4]
[111] ... the complainant spontaneously said that her written complaint [RC-4]
contained all the incidents ...
(RC-3.)
En résumé, l'arbitre constate que le grief de mars 2006 (RC-2) se plaint des
[43]
memes evenements que ceux decrits a Ia plainte d'octobre 2005 (RC-4). Soulignons
que ce formulaire exigeait une description « in detail [of] the alleged
discrimination/harassment h; cette description detainee se trouve a ('annexe 1 du
formulaire, comportant quatorze pages. Le dernier evenement de cette serie de
quatorze a lieu le 28 septembre 2005.
Un quinzieme evenement, le 30 janvier 2006
L'arbitre, cependant, identifie, a partir de Ia preuve faite devant elle, un
[44]
quinzieme evenement qui constitue, d'apres elle, une conduite harcelante, s'agissant de
paroles prononcees par monsieur N... le 30 janvier 2006 devant le Formal Hearing
Panel.
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[45]
L'identification de ce quinzierne evenernent par madame S... devant l'arbitre s'est
deroulee en deux temps :
•
d'abord, madame S... declare que sa piainte ecrite (RC-4) contient tout ce dont
elle se plaint — donc, cela s'arrete au 28 septembre 2005;
•
par la suite, en reponse a une autre question posee par son avocate, elle se
reprend et parle des paroles du 30 janvier 2006.
[46]
L'arbitre s'exprime ainsi :
The employer's preliminary objection
[108] At the pre-hearing conference, the employer's attorney submitted that the
grievance was untimely. The objection was based on the facts enumerated in the
first complaint filed by Mrs S... with the Internal Committee. The last incident
cited goes back to September 28 2005, therefore the grievance filed on March 30
2006 is clearly untimely.
[.-.]
[110] Counsels for the intervener and the employer allege that the
complainant invented that last incidence in reaction to the employer's
objection. In support of their assessment, they relate the testimony of the
complainant where at one point she said that all the incidents were in her
written complaint and corrected herself following a second question asked
by her lawyer.
[111] I do not read the situation the same way. It is true that the
complainant spontaneously said that her written complaint contained all
the incidents. She had written it and I saw a person that simply forgot part of
the evidence that was not in the complaint that she wrote. The fact is that
she then testified and established the last incident as being the statement made
by Mr N... at the hearing of the Internal Committee on January 30 2006.
(RC-3.)
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
L'analyse du Tribunal
II est acquis que, dans un cas de harcelement psychologique, le grief doit etre
[47]
depose dans les 90 jours de la derniere manifestation de la conduite harcelante 8 . Dans
la presente affaire, puisque le grief etait du 30 mars 2006, la conduite reprochee devait
avoir eu lieu apres le 29 decembre 2005.
[48] Or, les reproches faits par madame S... et soumis au Formal Hearing Panel a
l'automne 2005 portent sur quatorze incidents précis, dont le dernier est du
28 septembre 2005. Ainsi, environ 180 jours se sont ecoules entre le 28 septembre et le
8
RC-1 : convention collective 2005-2010, art. 9-1.03 et Loi sur les normes du travail, L.R.Q., G. N-1.1,
art. 123.7.
Mt`
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30 mars. Le grief nest-il pas prescrit? C'est ce qui a ete souleve par l'employeur des le
debut de ('arbitrage.
[49]
Mais l'arbitre a conclu que le grief n'etait pas prescrit vu l'evenement additionnel
du 30 janvier 2006.
[50]
C'est ici qu'entrent en jeu les reproches de violation des principes de justice
naturelle et d'exces de competence.
[51]
Les propos du 30 janvier 2006 ont servi pour fonder deux conclusions de
l'arbitre :
•
l'existence d'une conduite harcelante dont les propos du 30 janvier 2006
constituaient la derniere manifestation;
•
par vole de consequence, ('absence de prescription.
[52]
Ainsi, pour conclure a la non-prescription du grief, l'arbitre y a incorpore un
evenement qui n'en faisait pas partie, i.e. les propos de monsieur N... du 30 janvier
2006.
[53]
L'arbitre s'explique comme suit :
The employer's preliminary objection
[108] At the pre-hearing conference, the employer's attorney submitted that the
grievance was untimely. The objection was based on the facts enumerated in
the first complaint filed by Mrs S... with the Internal Committee. The last
incident cited goes back to September 28 2005, therefore the grievance
filed on March 30 2006 is clearly untimely.
[109] In reaction to the employer's objection, the complainant's attorney asked
the tribunal to decide on the employer's objection only after hearing all the
evidence, since it will be perilous for the tribunal to assess if the last incidence is
part of psychological harassment situation without hearing the previous incidents.
In other words, without a global view, the tribunal cannot assess an isolated
incident. Also, the attorney submitted that the evidence would consist essentially
of the testimony of the intervener and the complainant, which would make it even
more difficult to assess an isolated incident. For those reasons, the tribunal
agreed to hear all the evidence.
[110] Counsels for the intervener and the employer allege that the complainant
invented that last incidence in reaction to the employer's objection. In support of
their assessment, they relate the testimony of the complainant where at one point
she said that all the incidents were in her written complaint and corrected herself
following a second question asked by her lawyer.
[111] I do not read the situation the same way. It is true that the complainant
spontaneously said that her written complaint contained all the incidents.
She had written it and I saw a person that simply forgot part of the evidence that
was not in the complaint that she wrote. The fact is that she then testified and
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established the last incident as being the statement made by Mr N... at the
hearing of the Internal Committee on January 30 2006.
[112] Section 123.7 of the Labour Standards Act sets a time limit to file a
complaint of psychological harassment:
"123.7 (Time Limit) Any complaint concerning psychological harassment
must be filed within 90 days of the last incidence of the offending
behaviour."
The provisions of section 123.7 are deemed to be an integral part of
[113]
every collective agreement, therefore the grievance must be filed within the time
limit set in section 123.7 of the Labour Standards Act.
[114] The evidence reveals that after filing the first complaint, in October 2005,
the complainant took sick days or vacation days whenever Mr N... had a
laboratory session with her. They basically had no contact until the hearing in
front of the Internal Committee that began in December 2005.
[115] As described previously, the essence of psychological harassment is the
repetition over time of acts that may, individually, be considered harmless.
Therefore, that last statement made by the intervener must be assessed in light
of all the other incidents that are alleged by the complainant and that are part of
their relationship. In a relationship, "the meter" does not stop at the end of the
day nor at the end of each period of 90 days following an incident. Relationship is
a continuous situation and the repetitiousness and frequency of incidents must
be appreciated in light of the whole situation:
"(190) Dans tout milieu de travail, comme l'a justement souligne la
procureure syndicate, les acteurs vivent des relations continues, non
compartimentees : « le compteur » n'est pas remis a zero au debut de
cheque journee, mais a enregistre ce qui est survenu par le passé.
(193) Le harcelement est une conduite sociaiement inacceptable, qui
s'enracine dans un continuum et un contexte précis de temps et de lieu,
qui ne peut donc 'etre apprecie correctement que si l'on tient compte de
la situation d'ensemble."
(Me Francois Hamelin in Centre hospitalier regional de Trois-Rivieres (Pavillon St-Joseph)
et Syndicat professionnel des infirmieres at infirmiers de Trois-Rivieres, [2006] R.J.D.T. 397
(T.A.))
[116] In the present case, the whole situation reveals that between the filing of
the complaint in October 2005 and the hearing that began in December 2005,
Mr N... and Mrs S... hardly saw each other. And during that hearing, the
complainant alleges that the last statement of the intervener constitute an
offensive incident. If so, the grievance is filed timely.
[117] The employer's and intervener's attorneys sustain that the discrepancies
between what the complainant said at the hearing and the recorded statement of
the intervener is another illustration of her tendency to exaggerate reality. They
maintain that Mr N... never said she was delusional and she needed
psychological help, that there was nothing offending in Mr N...'s statement.
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[118] In light of the other incidents that occurred between the fall semester of
2004 to the fall semester of 2005, such a statement does constitute an
aggression. It is the last offensive incidence. Delusional is defined in the
Canadian Oxford dictionary, as:
"delusion: 1. a false belief or impression 2. Psych. This as a symptom or
form of mental disorder"
[119] Without using per se the word "delusional", Mr N... delivered essentially
three messages: firstly, that this whole thing is the result of misinterpretations
and perceptions of the complainant that are not in accordance with reality;
secondly, that he is open to resolve the issue through communication; and lastly,
the fact that all this is a surprise for him corroborates his first message. At the
hearing of the Internal Committee, he said:
"that he felt that there has been a series of misunderstandings and
misinterpretations to his words and actions and that the complainant had
attributed the worst motivations to his words and actions. He did not feel
that the complainant's perception reflected reality. He said that as far as
going forward he felt that with open communication that he could have a
good working atmosphere with the complainant. And he emphasized that
the complaint was "completely unexpected".
In other words, the complainant invented this whole situation or has a
[120]
delusion problem. Mr N... does not recognize any kind of legitimacy to any of the
incidents alleged by the complainant. Even at the hearing, when the complainant
reacted spontaneously and expressed openly her understanding of his
statement, Mr N... did not contradict her. She said "It is hard to explain when you
don't have a grasp of reality" and "with my unrealistic view of the world".
[121] It is important to keep in mind that such assessment of Mr N...'s
statements is done in light of all the other incidents and that at the hearing, the
complainant had been hurt by the intervener. In this context, as described by
experienced authors on the subject, any comment made at that point in time of a
psychological harassment situation, that imply that the victim has some kind of
psychological problem is an aggression. It affects the dignity of the victim. (See
paragraph 92 of the sentence)
For all those reasons, the statement of Mr N... made on January 30
[122]
2006 constitutes the last offensive incidence and the grievance filed by the
complainant on March 30 2006 is timely.
(RC-3.)
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
L'exces de competence
[54] Que l'arbitre prenne en consideration un fait auquel le grief ne se refere pas dans
le but d'evaluer la conduite continue du presume fautif et son temoignage, c'est une
chose.
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Mais c'est tout autre chose que d'« importer » ce fait dans le grief et de s'en
[55]
servir pour des fins procedurales, i.e. le calcul de la conformite avec les exigences du
90 jours prescrit par la Loi, et pour conclure a l'absence de prescription.
L'arbitre, en effet, a confondu le contenu du grief tel que formule le 30 mars
[56]
2006, i.e. les quatorze evenements relates dans le Complaint Form du 24 octobre 2005,
et la preuve de faits subsequents, i.e. les propos du 30 janvier 2006.
Cette modification du grief par ('arbitre, en y incluant le quinzieme evenement,
[57]
constitue un exces de competence.
Mais les propos du 30 janvier 2006 existent : comment et pourquoi les eliminer
[58]
du grief et, par voie de consequence, du calcul de la prescription?
C'est ici, soit dit avec egards, que le raisonnement de ('arbitre manque de
[59]
rigueur. Elle se sert de ces propos a deux fins : d'une part, pour amender le grief et,
d'autre part, comme preuve de conduite harcelante.
En effet, pour que les propos du 30 janvier 2006 puissent etre utiles eu egard a
[60]
la prescription, ils devaient etre inclus dans le grief. Puisqu'elle les prend en
consideration pour le calcul des 90 jours, c'est dire qu'elle les greffe au grief.
Mais un arbitre ne peut ainsi amender ou changer un grief. Elle a donc
[61]
outrepasse sa competence. La decision arbitrale doit etre annulee.
Quant au grief, ii serait inutile de le renvoyer devant un autre arbitre, qui ne
[62]
pourrait que le rejeter pour cause de prescription. Le Tribunal en decidera donc
lui-meme.
L'analyse du Tribunal pourrait s'arreter ici. Mais la preuve presentee au Tribunal
[63]
supporte cette conclusion d'exces de competence tiree de la decision arbitrale de juin
2007 elle-merne.
La preuve devant la Cour superieure
De surcroit, les requetes dont la soussignee est saisie confirment que le contenu
[64]
du grief avait ete souleve, discute et precise avant le debut des trois jours d'enquete.
Ainsi, a la requete en revision judiciaire de l'employeur (dossier 1), dont les allegations
ont ete repetees in extenso dans la requete de monsieur N... (dossier 2), on lit ceci :
LES FAITS RELATIFS
A L'AUDITION
19.
Lors de la premiere journee d'audition, le 20 septembre 2006, le
tribunal et les procureurs des parties tiennent une conference
preparatoire lors de laquelle la procureure du syndicat precise que
tous les evenements invoques au soutien de ('allegation de
harcelement enoncee au grief (R-2) sont tous enumeres a la plainte
du 24 octobre 2005 (R-4);
20.
A
cette occasion, le College requerant annonce son intention de soulever
une objection preliminaire a I'effet que le grief est prescrit puisqu'il n'y a
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eu aucune manifestation de harcelement psychoiogique dans les 90 jours
precedent le depot du grief le 30 mars 2006;
21.
Sur demande de la procureure du syndicat, l'arbitre intimee decide de
trancher ('objection preliminaire en meme temps que la question de fond
qui consiste a determiner si la plaignante a ete victime de harcelement
psychologique au travail, et reporte le debut de l'audience sur ces
questions afin de permettre a monsieur N..., de soumettre une requete en
intervention a titre de partie interessee, requete qui sera accueillie;
22.
Le 7 fevrier 2007, l'arbitre intimee preside une nouvelle conference
preparatoire. A cette occasion, la procureure du mis en cause
monsieur N..., demande a Ia procureure du syndicat de Iui
communiquer tous les faits invoques au soutien de ('allegation de
harcelement et plus precisement, de Iui confirmer si toutes les
allegations de harcelement sont enoncees dans la plainte du 24
octobre 2005 (R-4). La procureure du syndicat reitere que tous les
.fait invoques au soutien de ('allegation de harcelement contenue au
grief (R-2) sont enonces dans Ia plainte (R-4), et qu'aucun autre
evenement nest invoque au soutien de ce grief.
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
Ces deux requetes sont appuyees de declarations assermentees. Pour sa part,
[65]
la declaration assermentee du vice-president du syndicat, Stephen Hemingway, ne
traite aucunement de ce sujet.
D'ailleurs, le memoire du syndicat reconnait ('existence de ces propos tenus par
[66]
l'avocate le representant. Le syndicat plaide, par contre, que ces propos ne faisaient
pas partie de la preuve, n'ont pas ete consignes dans les proces-verbaux, ne
constituaient pas des aveux et ne liaient pas l'arbitre.
Peut-etre. Mais ii n'en demeure pas moins que la preuve est limpide a l'effet que
[67]
cette declaration a ete faite, a deux reprises, lors de deux conferences preparatoires
distinctes, et n'a pas ete modifiee avant le debut de ('audition devant l'arbitre.
Ainsi, Ia preuve offerte a la Cour superieure lui permet de conclure a la
[68]
veracite des allegations des paragraphes 19 a 22 reproduits ci-dessus, i.e. la
tous les evenements
confirmation, a deux reprises, par l'avocate du syndicat que «
invoques au soutien de /'allegation de harcelement enoncee au grief (R-2) sont tous enurneres
a /a plainte du 24 octobre 2005 ... ».
Le Tribunal conclut que le contenu du grief avait bel et bien ete discute et precise
[69]
et que l'evenement de janvier 2006 n'y etait pas inclus. Le grief etait donc prescrit et
aurait du etre rejete.
Un dernier commentaire. Le Human Rights Policy and Complaint Resolution
[70]
Procedures prevoit Ia possibilite de conflit avec les conventions collectives et s'y
subordonne :
3.00 GENERAL PRINCIPLES
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3.01 Academic Freedom
[---]
3.02 Due Process and Natural Justice
[...]
This policy and associated procedures shall not interfere with the rights
and obligations specified in the relevant collective agreements between
the College and the Unions or Associations, and hence the application of
this policy may be modified, as is reasonably necessary, to conform to
the applicable collective agreements which supersede College
policies.
(RC-5.)
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
•
Passons maintenant au deuxieme usage de ces paroles, i.e. comme preuve de
[71]
conduite harcelante. Cet usage se rattache au deuxieme reproche souleve par les
requerants en revision judiciaire, celui des autorites non mises en preuve.
Les autorites non mises en preuve
[72]
Desquelles s'agit-il?
A quoi servent-elles?
Commencons par ('analyse de la decision arbitrate. Bien construite, elle se divise
[73]
comme suit — les numeros des paragraphes suivent les titres :
1. Nature of the grievance: 1-2
2. Background: 3-16
Fall 2003: 17-19
Winter 2004: 20-21
Fall 2004: 22-25
Winter 2005: 26-43
Fall 2005: 44-46
Winter 2006: 47-50
3. Positions of the parties
The preliminary objection on time-limits
The employer and the intervener: 51-52
The union: 53-54
The psychological harassment
The union: 55-60
The employer: 61-66
The intervener: 67-75
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4. Analysis and decision: 76-77
A vexatious behaviour: 78-83
Repetitiousness: 84-85
The effect on the dignity or integrity of the employee: 86-88
Result in a harmful work environment for the employee: 89
The appraisal of the evidence: 90-102
The difference between a conflict and psychological harassment: 103-107
The employer's preliminary objection: 108-122
The psychological harassment: 123-143
Conclusions.
[74] Les autorites que le Tribunal qualifie d'« externes » emanent de deux auteurs :
•
Marie-France Hirigoyen, psychiatre;
•
Christian Ballow, psychologue.
[75] Les textes cites sont tires des volumes suivants :
•
Le malaise dans le travail, harcelement moral : demeler le vrai du faux, Editions
La Decouverte & Syros, Paris, 2001;
•
Pour en finir avec le harcelement psychologique, Organisation (editions d'), 2001.
Ils se trouvent aux paragraphes 85, 90, 92, 103, 104 et 105 de la decision.
[76]
L'arbitre s'appuie sur ces deux ouvrages dans le cadre de son analyse du
concept de harcelement psychologique, tel quill est defini par la Loi. Suivons le
deroulement de sa pensee.
[77]
Elle commence avec le texte de loi et, de cette definition, tire quatre
composantes :
[76]
Since June 1st 2004, each employee has the right to a work environment
free from psychological harassment. Inspired by the decisions and the writings
on the subject, the legislator adopted the following definition:
"81.18 (Interpretation) For the purposes of this Act, "psychological
harassment" means any vexatious behaviour in the form of repeated and
hostile or unwanted conduct, verbal comments, actions or gestures, that
affects an employee's dignity or psychological or physical integrity and
that results in a harmful work environment for the employee.
(Vexatious behaviour) A single serious incidence of such behaviour that
has a lasting harmful effect on an employee may also constitute
psychological harassment
[77]
As defined, psychological harassment contains four elements, Firstly it is
a vexatious behaviour in the form of hostile or unwanted conduct, verbal
comments, actions or gestures. Such conduct, verbal comments, actions or
gestures must be repeated unless it meets the requirement of a single vexatious
behaviour. The vexatious behaviour must affect the employee's dignity or
ttit
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psychological or physical integrity and lastly results in an harmful work
environment.
(RC-3.)
[78]
L'arbitre continue en analysant cheque composante : « vexatious behaviour »,
« repetitiousness », « the effect on the dignity of the employee », « result in a harmful
work environment D. Elle determine ensuite les principes qui doivent la guider dans
revaluation de la preuve : « the appraisal of the evidence D.
C'est ici, au cceur du probleme, que l'arbitre s'appuie sur ces sources externes
pour definir ou valider les principes qu'elle suivra :
[79]
•
au paragraphe 85, quant a la caracteristique de is repetitivite;
•
aux paragraphes 90 et 92, eu egard au point de vue a adopter dans l'analyse de
la preuve, i.e. celle de la presurnee victime ou celle du presume harceleur;
•
aux paragraphes 103, 104 et 105, pour distinguer le harcelement psychologique
du simple conflit.
Et quand l'arbitre conclut que les propos tenus par monsieur N... devant le
[80]
Formal Hearing Panel constituaient une egression se rattachant a la situation de
harcelement psychologique, elle se refere explicitement au paragraphe 92, i.e. a ces
auteurs externes :
[121] It is important to keep in mind that such assessment of Mr N...'s
statements is done in light of all the other incidents and that at the hearing, the
complainant had been hurt by the intervener. In this context, as described by
experienced authors on the subject, any comment made at that point in
time of a psychological harassment situation, that imply that the victim has
some kind of psychological problem is an aggression. It affects the dignity
of the victim. (See paragraph 92 of the sentence)
[122] For all those reasons, the statement of Mr N... made on January 30 2006
constitutes the last offensive incidence and the grievance filed by the
complainant on March 30 2006 is timely.
(RC-3.)
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
II s'agit, bref, de ('opinion d'auteurs qui n'ont pas temoigne et dont les
[81]
qualifications n'ont pas pu etre validees, ni les opinions explorees en interrogatoire et
contre-interrogatoire; de surcroit, ii ne s'agit pas de rapports prepares pour la presente
affaire, mais d'extraits de deux publications choisis par l'arbitre; et enfin, le recours a
ces textes n'a pas ete divulgue aux parties pendant renquete ou le delibere, les privant
ainsi de la possibilite d'y reagir, que ce soit par une preuve d'expert ou ordinaire, i.e.
une reouverture d'enquete, ou des plaidoiries additionnelles.
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[82]
Qu'en est- 1
. 1 de ('argument du syndicat qui plaide que les textes des auteurs
« externes » n'apportent rien de nouveau au debat et que la jurisprudence citee devant
l'arbitre illustrait les principes que l'on trouve dans ces textes.
[83]
Peut-etre. Mais la nest pas la question. L'arbitre a senti le besoin de s'y referer
et de s'y appuyer expressement sans en prevenir les parties : voila le probleme que la
Cour supreme du Canada a *le en 1977 9 :
L'avocat de I'appelante a souligne que les deux ouvrages susmentionnes
n'avaient pas ete presentes en preuve et qu'on n'y avait pas renvoye au cours de
('audience, et it s'est oppose a cette maniere de proceder. A mon avis, cette
objection est fondee. Bien que la loi autorise la Commission a obtenir des
renseignements autrement que sous la sanction d'un serment ou d'une
affirmation (Loi sur la Commission du tarif, c. T-1, art. 5(9)), elle n'est pas pour
autant autorisee a s'ecarter des regles de justice naturelle. II est nettement
contraire a ces regles de s'en rapporter a des renseignements obtenus apres la
fin de ('audience sans en avertir les parties et leur donner la possibilite de les
refuter.
(84]
li s'agit, bref, d'une violation des principes de justice naturelle, qui entraine
l'annulation de la decision de juin 2007.
Le statut et !Inter& juridique de monsieur N...
Dans le dossier 2, monsieur N... reprend a son compte la requete du cegep
(dossier 1) : voir le paragraphe 4 de la requete du dossier 2 qui reproduit in extenso la
requete du dossier 1.
[85]
[86] A titre subsidiaire, monsieur N... y formule aussi un autre reproche, i.e. celui
d'être pris dans une souriciere procedurale qui affecte ses droits fondamentaux, suite a
la decision du 24 avril 2008 (R-3). C'est de ce troisierne reproche qu'il s'agit maintenant.
Les faits
Par la decision arbitrate de juin 2007 (RC-3), l'arbitre accueille le grief, conclut a
[87]
('existence de harcelement psychologique et reste saisie de l'affaire :
FOR ALL THE REASONS CITED ABOVE:
The employer's objection is dismissed;
The grievance of psychological harassment is granted;
The tribunal reserves jurisdiction on the employer's responsibility and all the
remedies.
(RC-3, pages 31-32.)
9
Pfizer Co. vs Sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise, [1977] 1 R.C.S. 456 a la
p. 463.
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[88]
Peu apres, en juillet 2007, l'employeur intente des procedures en revision
judiciaire (dossier 1).
[89] Au debut de l'annee suivante, le syndicat demande des ordonnances de
sauvegarde, s'agissant de conclusions dont la plupart visent monsieur N..., tent
directement qu'indirectement
ORDONNER au College A de prendre les mesures necessaires afin que la
plaignante n'ait pas a preparer ou a participer a la preparation des cours de
laboratoire a etre donnes par Monsieur F... N...;
ORDONNER au College A de prendre les mesures necessaires afin que
Monsieur F... N... ne se retrouve pas dans le bureau de la plaignante et ne se
retrouve pas seul dans un local de laboratoire dans lequel travaille la plaignante;
ORDONNER au College A de prendre les mesures necessaires afin qu'un
coordonnateur ou une autre personne en autorite soit presente lorsque Monsieur
N... doit acceder a un local de laboratoire dans lequel se trouve la plaignante;
ORDONNER a Monsieur F... N... de ne pas acceder seul au bureau de la
plaignante;
ORDONNER a Monsieur F... N... de ne pas acceder seul dans un local de
laboratoire dans lequel travaille la plaignante;
CONDAMNER le College A a verser a la plaignante une somme de 20 000 $
titre de dommages moraux;
CONDAMNER le College A a verser a la plaignante ('equivalent du salaire et des
avantages perdus pour les jours de maladie et du conge sans solde pris par la
plaignante en raison du fait du harcelement subi;
Le tout avec interets.
(R-5.)
[90]
Monsieur N... s'y objecte voir Ia lettre du 14 mars 2008 (R-6); l'employeur
l'appuie.
Ces nouvelles conclusions font contraste avec les quatorze mesures reparatrices
[91]
recherchees a l'origine
En consequence, en vertu des Chartes canadienne et quebecoise des droits et
libertes et de la convention collective, nous demandons au Tribunal :
o
d'accueillir le present grief;
o
de faire cesser toute forme de harcelement, Ia cessation de toute mesure de
represailles ou d'iniquite ainsi que toute forme de discrimination envers Ia
personne salariee;
o
de declarer contraire a la convention collective, a Ia Loi sur les normes du
travail et a les Chartes canadienne et quebecoise des droits et libertes le
comportement et les paroles de l'employeur;
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o
d'ordonner a l'Employeur (A College) de respecter et d'appliquer
integralement la convention collective, la Loi sur les normes du travail et la
Charte;
o
d'ordonner a l'Employeur (A College) de prendre les moyens raisonnables
pour faire cesser le harcelement;
o
d'obliger l'Employeur (A College) a garantir un milieu exempt de harcelement
et de discrimination;
o
d'ordonner a l'Employeur (A College) de financer le soutien psychologique
requis par le salarie et sa famille, pour une periode raisonnable qu'elle
determine;
o
d'ordonner a l'Employeur (A College) de financer la formation pour les
Cadres et Gerants impliques pour une periode raisonnable qu'elle determine;
o
d'ordonner a l'Employeur (A College) de financer le cot:it d'un entraineur
professionnel pour travailler avec les Cadres/Gerants et les employes afin
d'etablir un environnement sain or [ou?] harmonieux au Service des
ressources materielles;
o
d'ordonner a l'Employeur (A College) de rembourser a la personne salariee le
traitement perdu, s'il y a lieu;
o
d'ordonner de rembourser les journees de maladie, les journees de conges
pour raisons personnelles ou banque de temps, selon le cas, que la
personne salariee a utilise face a cette situation;
o
d'ordonner que toutes les sommes dues portent interets au taux prevu au
Code du travail;
o
de retablir la personne salariee dans taus ses droits, benefices et avantages
prevus a la convention collective;
o
d'octroyer une compensation pour les prejudices subis, de quelque nature
qu'ils soient, incluant des dommages moraux, psychologiques et exemplaires
ainsi que le prejudice fiscal;
o
de rendre toute autre ordonnance propre a sauvegarder le droit des parties;
o
de rendre toute ordonnance que le Tribunal jugera appropriee.
(RC-2.)
Par sa decision du 24 avril 2008 (R-3), l'arbitre rejette les objections de monsieur
[92]
N... et de l'employeur. La suite des evenements est decrite ci-dessus aux paragraphes
31 et suivants. La presente requete en revision judiciaire suit peu apres.
L'analyse du Tribunal
Le probleme dont se plaint monsieur N... decoule de la demande de modification
[93]
par le syndicat, en tours de route, des conclusions recherchees, modification autorisee
par l'arbitre par sa decision du 24 avril 2008.
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[94]
Avant ces modifications, c'est-e-dire de mars 2006 jusqu'a la decision arbitrale
de juin 2007, aucun des correctifs recherches ne s'adressait directement a monsieur
N... : voir ('enumeration ci-dessus au paragraphe 91; tous ces correctifs dependaient de
I'employeur.
[95]
L'arbitre reconnait d'ailleurs cet etat de fait dans sa premiere decision, celle de
novembre 2006, qui accorde a monsieur N... un droit d'intervention limits :
2. La question en litige
[2]
Est-ce que le presume harceleur est une personne interessee ayant le
droit d'intervenir? Dans ('affirmative, quelle est l'etendue de son droit
d'intervention?
[.-.]
5. Analyse et decision
[.--]
L'intervenant partie a ('instance est en droit alors d'attaquer, de contester,
[22]
de produire une preuve et une argumentation alors que l'intervenant, non partie
('instance a le droit de faire des representations estimees opportunes par le
tribunal, compte tenu des questions en litige.
[23]
Dans la presente affaire, le requerant demande d'intervenir afin de
proteger ses droits qui peuvent eventuellement etre affectes par la sentence,
dont ceux du droit a I'honneur, a sa dignite et sa reputation et de ses droits
decoulant de sa relation d'emploi avec l'employeur. L'etendue de l'exercice du
droit d'intervention n'a pas ete precise par le requerant autrement que le desir de
proteger les interets du presume harceleur qui peuvent etre a la fois convergents
ou divergents de ceux de I'employeur.
[24]
Tel que formule, la demande d'intervention du presume harceleur
s'apparente a une demande d'intervention conservatoire pouvant etre
exerts par le biais de representations. Le presume harceleur desire supporter
I'employeur et defendre le cas echeant ses interets personnels, directs et
divergents de l'employeur.
[25]
Vu ('objet du litige dont la portee peut affecter des interets directs et
personnels de ('harceleur qui peuvent etre divergents de ceux de l'employeur et
('article 100.5 du Code du travail, j'estime que le presume harceleur a un droit
suffisant pour etre entendu et ce au m8me titre qu'un salarie titulaire d'un
poste dont ('affectation peut eventuellement etre modifiee par un grief formule par
un tiers.
[26]
J'estime, cependant, que son droit d'intervention dolt etre
circonscrit. Sans etre une tierce partie, le presume harceleur doit pouvoir
faire des representations pour proteger ses interets directs, personnels et
divergents de I'employeur. A cette fin, j'estime qu'il peut etre represents par
un procureur, assister a toutes les stapes de ('audience et etre informs par
le greffe des journees d'audition. Le cas echeant, it pourra temoigner, avec
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la permission du tribunal, etre interroge par son procureur, contreinterroge et reinterroge.
POUR TOUS CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
Accorde un droit d'intervention limite a M. F... N....
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
[96]
La demande de modification des conclusions merle l'arbitre a examiner ses
pouvoirs a ce sujet dans sa decision d'avril 2008 :
1.
Le grief
Le syndicat soutient que la plaignante etait victime de harcelement
[1]
psychologique dans son milieu de travail.
[2]
Le 12 juin 2007, la soussignee a accueilli le grief. Suite a la sentence, les
parties ont adopte quelques mesures pour remedier et mettre fin a la situation de
harcelement psychologique. Le 7 novem bre 2007, le syndicat a depose une
demande d'ordonnance provisoire de sauvegarde, la plaignante alleguant vivre
d'autres incidents.
Suite a la conference telephonique sur la demande d'ordonnance de
[3]
sauvegarde, I'employeur, le syndicat et l'intervenant ont explore d'autres
remedes. Ne pouvant arriver a une entente definitive, le 30 janvier 2008, le
syndicat a signifie a l'employeur et a l'intervenant de nouvelles
conclusions. Parmi ces conclusions, certaines s'adressent directement
l'intervenant. Ce dernier s'objecte a l'amendement et la legalite des
ordonnances requises.
2.
Les questions en litige
[4]
Est-ce que le tribunal a le pouvoir d'emettre des ordonnances a regard
de l'intervenant directement? Dans ('affirmative, est-ce que l'ajout de conclusions
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a regard de I'intervenant en cours d'audience constitue un amendement
admissible?
(Decision interimaire du 24 avril 2008.)
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
[97]
•
L'arbitre conclut :
guide a de tels pouvoirs :
En somme, j'estime que tout en respectant Ia volonte du legislateur de
maintenir un recours sans faute a regard de l'harceleur, je ne crois pas que le
legislateur ait souhaite limiter le recours a des pouvoirs exceptionnels dont
celui d'emettre une ordonnance qui assurers la sauvegarde des droits des
parties en ('occurrence ('obligation de moyen de l'employeur et par ricochet le
droit du plaignant de travailler dans un milieu exempt de harcelement
psychologique. Ordonnance qui peut etre ernise a regard de toutes les parties au
litige. Et ce faisant, ni d'empecher rarbitre de trencher le grief de
harcelement d'une maniere finale et efficace. Soulignons qu'une ordonnance
exceptionnelle ernise a l'encontre du harceleur dolt s'inscrire en accessoire aux
ordonnances ernises contre I'employeur et ne revetir aucun caractere punitif.
L'objectif etant selon le cas de permettre une application efficace de Ia sentence
finale qui s'inscrit dans un contexte au toutes les parties au litige incluant les tiers
intervenants continueront a travailler dans le meme milieu de travail. Les parties
sont dans un continuum de relation.
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
[38]
•
que les amendements recherches constituent un accessoire au principal, ne
denaturent pas le grief et meme completent les ordonnances recherchees a
l'origine
Enfin, j'estime que les amendements apportes au grief initial, c'est-edire les nouvelles conclusions dont certaines a regard du tiers intervenant,
ne denaturent pas le grief initial ma's constituent un accessoire au
principal :
[41]
« Une partie peut modifier un grief iorsque l'efiet de ce geste n'est pas un
changement de la nature du grief ou lorsque ('amendement est
accessoire au grief ou qu'il decoule simplement de celui-ci. Pour
expliquer ce principe, le tribunal n'a qu'a titer un passage extrait de
I'ouvrage de Blouin et Morin, Droit de ('arbitrage de grief, 4e edition, Les
Editions Yvon Blais Inc., page 243 :
"Si par ailleurs le titulaire du grief estime opportun de
('amender, it peut le faire dans la mesure ou ii ne
denature pas le grief original, c'est-e-dire s'il ne modifie
pas les elements caracteristiques du grief initial; Ia
personne visee, ('objet de la reclamation et le correctif
recherché. II en sera par exemple ainsi lorsqu'il ne s'agit
que de corriger une irregularite technique. Un
amendement peut aussi etre pour permettre
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!'introduction dune conclusion accessoire au principal ou
qui devrait normalement en decouler."
(Westroc inc. et Syndicat canadien des communications de l'energie at
du papier (S.C.E.P.), section locale 134Q (TA., 2001-04-25), D.T.E.
2001T-649) a.
[42]
Egalement, j'estime que les nouvelles ordonnances recherchees
s'inscrivent ou completent les ordonnances initiales dont les suivantes :
de rendre toute autre ordonnance propre a sauvegarder le droit des parties
et de rendre toute ordonnance que le Tribunal jugera appropriee.
Complement ou precision qui ne denature pas le grief initial. La nature
du litige demeure le meme soit : est-ce que la plaignante etait victime de
harcelement psychologique dans son milieu de travail? J'estime donc que
l'amendement est admissible...
(Les caracteres gras sont de Ia soussignee.)
[98] L'arbitre reflechit aussi aux effets de ces modifications recherchees eu egard a
monsieur N... et conclut que ses droits ne seront pas affectes puisqu'il pourra faire des
representations, tout comme le syndicat et l'employeur :
Egalement, le fait d'ajouter de telles ordonnances exceptionnelles en
[39]
cours d'audience ou d'y donner suite si l'arbitre les estime justes et
appropriees n'affecte pas les droits du tiers intervenant qui aura toutes les
chances de faire les representations sur ces elements. Et ce genre de
demande d'ordonnances accessoires n'affecte aucunement Ia nature du litige
mais peut effecter notamment les droits a la dignite de l'harceleur et ses droits
decoulant de sa relation d'emploi avec l'employeur.
J'estime donc qu'a cette etape du dossier, ii est premature d'accueillir ou
[40]
de rejeter les ordonnances a regard du tiers intervenant et ce compte tenu de
leurs libelles. II serait preferable d'entendre les representations de toutes les
parties incluant le tiers intervenant sur leur bien-fonde et ce a partir des
parametres de Ia presente sentence interimaire.
(Les caracteres gras sont de la soussignee.)
La reflexion de l'arbitre se penche ainsi sur l'avenir; mais elle oublie d'envisager
[99]
le passé, i.e. tout ce qui s'est passé depuis sa premiere decision, en novembre 2006,
alors qu'elle ne reconnaissait a monsieur N... qu'un droit d'intervention
[100] Ce droit d'intervention limite fut defini par l'arbitre comme suit (voir le paragraphe
26 de la decision du 28 novembre 2006 reproduit au long ci-dessus au paragraphe 95) :
•
etre represente par avocat;
•
etre informe par le greffe des journees d'audition;
•
assister a toutes les etapes;
•
avec Ia permission de l'arbitre, temoigner, i.e. etre interroge par son avocat et
contre-interroge par les avocats des autres parties.
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[101] Monsieur N... n'aurait donc pas pu presenter des temoins parce que, a cette
epoque, aucune conclusion ne le visait directement.
[102] Par contre, les modifications aux conclusions en avril 2008 ont modifie l'interet
de monsieur N... : de simple tiers, ii devenait une partie a part entiere.
[103] Ce changement a insere monsieur N..., en cours de route, dans un litige auquel ii
n'avait pas pu participer pleinement. En effet, ii etait trop tard pour participer, a titre de
partie a part entiere, au debat quant au comportement reproche : le sort en avait ete
jete! II etait impossible a monsieur N... de remedier a cette situation, qui le touchait
directement.
[104] II s'agit la d'un manquement au principe d'audi alteram partem, manquement
serieux constituant une violation reelle des droits de monsieur N....
[105] Le remede est l'annulation de la decision d'avril 2008, qui a autorise ces
modifications aux conclusions et a cree cette situation impossible.
[106] Un dernier commentaire : les points de vue differents, opposant monsieur N... au
syndicat au sujet du contre-interrogatoire de madame S..., n'ont pas d'importance, vu la
conclusion du Tribunal eu egard a l'effet de l'autorisation des modifications aux
conclusions 10 .
[107]
II n'en sera donc pas question.
Les conclusions
[108]
Le Tribunal :
Dossier 500-17-037967-075 :
ACCUEILLE la requete en revision judiciaire du College d'enseignement general
et professionnel A;
ANNULE la decision arbitrale rendue par l'arbitre Maureen Flynn en date du
12 juin 2007 et deposee au greffe le 4 juillet 2007;
REJETTE le grief numero 5534 de l'Association du personnel de soutien du
College A parce que presort
Avec depens;
Dossier 500-17-045671-081 :
ACCUEILLE la requete en revision judiciaire de F... N...;
ANNULE la decision arbitrale rendue par I'arbitre Maureen Flynn en date du 12
juin 2007 et deposee au greffe le 4 juillet 2007;
10
Voir, d'une part, les paragraphes 11 et 12 de la requete en revision de monsieur N... et son affidavit
(dossier 2) et, d'autre part, ('affidavit de monsieur Hemingway, le representant du syndicat, en date du
decembre 2008.
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REJETTE le grief numero 5534 de l'Association du personnel de soutien du
College A parce que prescrit;
ANNULE la decision arbitrate rendue par l'arbitre Maureen Flynn en date du
24 avril 2008;
Avec depens;
j.c.s.
Me Pierre Bourgeois
Ellefsen Bergeron Tremblay
Avocats du College d'enseignement general et professionnel A
Me Francois Cote
Poudrier Bradet
Avocats de F... N...
Me Chantal Poirier
Matteau Poirier
Avocats de l'Association du personnel de soutien du College A
Dates d'audience : 16, 17 et 18 juin 2009
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