La msique est un jeu d`enfant

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La msique est un jeu d`enfant
La musique est un jeu d’enfant
François Delalande, éd. Buchet / Chastel, Paris, 2003, 195 p.
Un préalable est à faire :
• Sans prudence, quand on parle de rythme, on risque de glisser d’un abus de langage à un abus de
confiance en présentant notre rythme occidental (périodique, de durées simples ou doubles) comme
un modèle universel.
• On adopte sans s’en rendre compte un raisonnement vicieux : on ne qualifie de « musical » que ce
qu’on est capable de décrire en termes musicaux.
• En peinture, ce qu’on produit est plus ou moins réussi ; on dessine plus ou moins bien et jamais
« faux » alors qu’en musique, le langage est banalisé : c’est plus ou moins juste (ou faux) et l’on a
difficile à porter un jugement plus critique parce qu’on est vite complexé de ne savoir user des codes
pour corriger selon nos attentes.
• Il ne faut pas confondre l’objectif final du travail éducatif qui est de développer une sensibilité et la
capacité d’invention avec l’objectif immédiat de réaliser une œuvre. On commet une erreur
d’objectif en prenant l’œuvre comme finalité : elle doit être un moyen, non un objectif. On vise une
pédagogie des conduites et considérons comme un heureux hasard si, en passant, on habitue les
enfants à la réalisation d’une œuvre.
La recherche des sources
L’activité pédagogique est double : par ce qu’il y a mobilisation des affects dans l’acte de recherche et parce
que les instruments « prêts à l’emploi » sont limités dans ce domaine. Ni les métallophones, ni les triangles,
ni les claves, ni les tambourins ne sont adaptés à l’expérience.
Les élastiques rangés en échelle de hauteurs autour d’une boîte de polystyrène ou les bouteilles alignées font
entendre des modèles connus proches de la gamme ou de l’instrument lui-même (guitare ou xylophone).
Nos instruments traditionnels offrent des types sonores conventionnels : des notes plus ou moins précises,
des utilisations par bouchage ou frappé. Une flûte qui passerait de do à mi sans changer de position de
doigts offrirait des sons trop imprécis que l’on aurait tôt fait de qualifier de « faux ». Pourtant, la flûte de Nô
présente cette particularité de jouer des glissandos et de fluctuer autour des notes prédéfinies : offrir aux
enfants des musiques occidentales et des instruments à sons déterminés conduit à une culture fermée à
d’autres codes que la forme classique occidentale.
Lorsqu’on demande aux enfants d’aller à la découverte d’objets qui produisent un son intéressant, on éveille
une écoute des bruits quotidiens ; les enfants vont porter leur attention au bruit d’un ressort, au souffle d’un
tuyau, au raclement d’une pelle, à la dynamique sonore des ustensiles de cuisine. Les parents, en s’en
mêlant, vont redécouvrir le bruit des choses. On n’écoute que rarement le bruit, on identifie d’emblée
l’action dont il est l’indice (maman range la vaisselle). La recherche que nous proposons demande une
sensibilité au son lui-même ; l’enfant doit d’abord le remarquer puis l’apprécier : c’est cette écoute qui
prévaut dans « la découverte du monde sonore » : Il y a ceux qui traversent la vie sans rien entendre et
d’autres pour qui l’environnement sonore est une constante surprise.
Le détail du son
La lutherie occidentale a recherché des sons aussi purs que possible, dénués d’accidents, pour que les
relations de hauteurs apparaissent mieux. C’est un « défaut » si l’on entend le bruit des marteaux d’un piano
ou le cliquetis des clés d’un instrument à vent ; ce sont des parasites dans notre musicalité des hauteurs.
Prenez la Sanza, chaque lamelle est fixée à la boîte par une extrémité et soulevée en son milieu par un
chevalet. On la tient dans les deux mains et on excite les lames ave les pouces. Chaque lame, selon sa
longueur, émet une note bien définie. La sanza européenne est diatonique (8 lames). En Afrique, le nombre
de lames importe peu, on ajoute chaque lame, entre l’extrémité et le chevalet, une sorte de bague qui va
vibrer avec la lame en produisant un magnifique « tzin tzin » caractéristique de la sanza. Inutile de vous
préciser que l’européen aura tôt fait d’essayer de les coincer pour les empêcher de vibrer et obtenir
– enfin ! – un son pur. Les enfants, eux, sont spontanément intéressés par cette sorte de « parasites ». Ils sont
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toujours à la recherche de ces détails du son. Voyez-les faire vibrer leur latte plastique ou leur règle
métallique sur le bord du banc justement à la recherche de ces petits ornements.
Le geste instrumental
Pour le jeu instrumental, il est conseillé d’amener l’enfant à contrôler le geste par le son : obtenir que
l’attention ne reste pas centrée sur la qualité du geste (le mouvement) mais sur le résultat de celui-ci. Le jeu
du chef d’orchestre reste un des classiques du genre. Par exemple, on généralisera le rôle du chef en
proposant au groupe de suivre les mouvements de l’un d’eux et au lieu de rester sur le geste de la main, on
ira jusqu’à investiguer tout le corps, y compris les expressions du visage. C’est sur l’expérience sensorimotrice toute entière qu’il faut bâtir. Sur l’exploitation du corps tout entier : en partant de la production de
sons avec la bouche, puis avec la main et pourquoi pas le corps. Il faut parler de geste et non de rythme et
c’est en fortifiant cette relation geste / son qu’on affine le mouvement. Regardez un charpentier planter un
clou : s’il veut frapper plus fort, il va plus lentement. Pour définir le mot « Fort » on pourrait d’abord
qualifier le mot « doucement ». Ce n’est pas un hasard s’il signifie à la fois « moins vite et moins fort » :
c’est la « douceur » qu’on exprime ; c’est par le ressenti affectif que l’on qualifie le geste. Le geste est
l’image du vécu affectif.
Si vous mettez un métallophone dans les mains d’un enfant de six ans, vous sollicitez deux sortes de
réaction : TAPER, ce qui est un des schèmes moteurs les plus régressifs, IMITER pour reproduire une
mélodie simple comme Au clair de la lune : tous deux opposés à l’INVENTION ; vous êtes engagés dans la
logique du juste / faux que vous corrigerez tôt ou tard par voie de dressage. Le choix de l’instrument
détermine à la fois la pédagogie et l’objectif.
Le jeu représente donc une expérimentation portant sur le geste pour balayer un champ musical défini : des
petites variations gestuelles ou vocales déterminent des variations sonores. C’est bien sur ce petit écart que
porte l’expérimentation, sur cette corrélation qui n’est pas tout à fait une identité entre un geste et une idée
musicale, comme deux pièces mécaniques qui s’encastrent avec un certain « jeu ». L’adulte ne guide pas la
production sonore tout juste intervient-il pour mieux placer le micro qui permet de garder la trace.
On ne parle, il est vrai, que de faire et on apprend en fait à entendre ! Aucune réalisation ne demande
d’habileté particulière des mains ou de la voix ; la seule maîtrise réside dans « l’oreille » : c’est elle qui sera
sollicitée et développée si on ne se trompe pas d’objectif, si on n’oublie pas de rester centré sur « le son », si
on ne privilégie pas le résultat miroir plutôt que la démarche.
Osons rappeler que si les enfants n’avaient pas disposé d’un magnétophone, s’ils ne s’étaient pas habitués à
écouter, s’ils ne s’étaient pas exercés à critiquer leurs productions, ils n’auraient pas su la développer et la
parfaire.
La danse à l’école
On fait souvent danser les enfants, c’est quelques fois le seul contact que l’école propose avec la musique
(fête scolaire). L’imitation est un exercice qui développe la relation sensori-motrice. A partir d’un jeu de
chef d’orchestre où l’on investit tout le corps, y compris les expressions du visage, on peut proposer au
groupe de figurer les sons avec les bras et les déplacements. On utilisera un panel de sons longs, courts,
successifs, des extraits musicaux opposés l’un à l’autre, des ambiances de sons mélodiques ou non. Vers
quatre ans, l’enfant se balance au rythme de la musique. D’un point de vue physiologique, il excite les
canaux semi-circulaires : c’est la source de plaisir qu’éprouve le bébé que l’on berce. On le retrouve plus
tard sur la balançoire, puis sur les montagnes russes. C’est le rythme qui déclenche la danse : La réponse
motrice synchronisée avec la musique suppose une opération complexe qui s’appuie sur l’anticipation ; il
faut prévoir la pulsation suivante. Elle n’est pas possible avant trois ans mais il faut attendre six ans pour
que les combinaisons de durée soient reproduites. Avant cela c’est surtout un travail d’imitation qui prévaut.
C’est sur l’expérience sensori-motrice toute entière qu’il faut bâtir. Sur l’exploitation du corps tout entier. Il
faut parler de geste et non de rythme et c’est en fortifiant cette relation geste / son qu’on affine le
mouvement qui donne accès à l’expression.
La création
Il s’agit de créer quelque chose de toute pièce et ensuite de le comprendre, de l’assimiler. Le premier moyen
de travailler dans ce sens, c’est, pour l’enseignant, de ne pas intervenir verbalement, de ne pas formaliser, de
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ne pas porter de jugement sur ce que l’enfant (le groupe) est en train de faire mais de lui offrir les conditions
qui le lui permettent. Ensuite, du côté de la reconnaissance sociale, de la comparaison, le dispositif sera de
prendre les autres enfants (ou un autre groupe) à témoin et d’en faire les critiques, de comparer l’idée que
l’on s’était faite à celle que s’en font les autres. Ici, apparaît la notion de communication à travers l’œuvre.
L’œuvre est un produit fini qui appelle à une reconnaissance sociale. Chez les tout-petits, elle est déjà cet
empilage de trois cubes que le parent encourage et félicite : il construit sa pile, il est content, ça tient debout,
il s’arrête - produit fini -, va chercher l’adulte pour la montrer - reconnaissance sociale - ensuite seulement,
il envisagera de la démolir lui-même. La motivation est évidente : le goût d’un résultat abouti et montrable
apparaît comme un besoin. Le risque est de faire passer le résultat avant la démarche. On rencontre souvent
des enfants qui ne participent pas et on les laisse parce que ça ne nuit pas au résultat final. : on sacrifie le
travail de groupe ou les progrès individuels (démarche) au profit du résultat, de la qualité du produit fini ;
l’enseignant met souvent lui-même la main à la pâte, pour fignoler la présentation. C’est un représentation
mensongère, l’œuvre est détournée de son intérêt pédagogique pour être utilisée à d’autres fins : les parents
voient que leurs enfants sont décidément très doués et l’enseignant est décidemment un bon enseignant !
Questions pédagogiques
Comment motiver ?
On est bien obligé de constater que l’un des facteurs qui assure le succès de la recherche sonore auprès des
enfants et leur donne le goût de s’y livrer de manière prolongée est le caractère surprenant, nouveau, de la
sonorité. Qu’il s’agisse du timbre des objets métalliques suspendus qui s’entrechoquent, de la résonance
d’un long tuyau, de l’amplification de la voix, … le son, chaque fois, est insolite et flatteur.
Ce n’est pas une condition sine qua non mais, dans les cas contraires, l’exploration est vécue comme un
exercice plutôt qu’animée par la curiosité et le plaisir. Il n’y a pas de raison de se priver de ce charme
supplémentaire qu’apporte une mise en valeur acoustique quelque peu étonnante de la source sonore. Il faut
oser cultiver l’insolite.
Comment passer de l’exercice gestuel à l’écoute de ce qui est produit ?
Celui qui découvre un mode de jeu original en effleurant de sa baguette une lame qui vibre est au moins
aussi fier de sa découverte que du son qu’il a engendré. Il n’est pas certain que les enfants qui inventorient
les trente manières de souffler dans une bouteille se fient exclusivement à leur oreille. On peut même parier
que deux modes de jeu faisant appel à des gestes différents mais produisant les mêmes sons, seraient
considérés comme différents. Comment centrer l’attention sur le son ?
La petite chanteuse qui redécouvre la musique en improvisant des variations sur un « heum » balaye un
large champ musical par des variations phonatoires infimes. Ayant pris soin de les amplifier, ces petites
différences motrices deviennent auditivement grosses. L’amplificateur attire l’attention sur le son. Le
résultat sonore est devenu la raison d’être de l’activité motrice. Il est presque toujours possible de lier une
pédagogie de l’écoute à une pédagogie de la production.
Comment passer de l’énumération à la centration d’une trouvaille ?
Celui qui veut aller plus loin dans l’exploration d’une idée sonore se trouve devant une alternative :
l’énumération ou le développement. Avant de chercher des solutions pédagogiques, il faut saisir
l’importance du choix. Composer revient à disposer des unités sonores les unes à côté des autres. Un enfant
entouré de trois ou quatre corps sonores accèdera rapidement à cette forme de création. Une fois passé le
stade du changement pour le plaisir du changement, il s’investiguera dans les concepts de rapports que sont
les oppositions, les transitions et, soignant un pu le fin, cette production prendra bien l’allure d’une œuvre.
En réalité, c’est plus complexe : les relations ne deviennent intéressantes que si les unités elles-mêmes le
sont. Si l’on s’est engagé trop hâtivement dans la combinaisons des unités sans avoir pris le temps de
« sentir » si elles en valent la peine, il faudra, comme dans un labyrinthe, rebrousser chemin et chercher des
idées plus riches ou modifier le contenu de quelques unités pour aboutir à une meilleure satisfaction.
L’orientation qui conduit le plus loin est celle qui permet de « creuser » une idée, de l’enrichir avant d’en
essayer une autre. Tous, nous vivons de ces deux pôles : l’un qui, comme un leitmotiv, nous amène à se
fixer sur une petite unité sonore et l’autre, comme un patchwork, qui offre la diversité. Cet état bipolaire ne
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doit de toute façon pas empêcher de prendre le temps de ressentir chacune des unités produites avant de
passer à la suivante ; aussi diversifiée et divertissante soit-elle. Après une phase d’exploration nécessaire,
une première limite consistera à ne retenir qu’un seul corps sonore. Ensuite, on privilégiera les modes de
jeu. Choisir de centrer le champ d’exploration suppose une finesse d’écoute qui n’est pas immédiate car elle
propose d’entendre des variations de détail au lieu de gros contrastes ; choisir l’abondance des corps sonores
reste un penchant naturel mais ne reflète pas une démarche volontaire. Ce n’est quà ce stade d’exploration
que se pose le problème de dégager une idée pour en faire un point de départ au développement d’une
séquence musicale.
Comment utiliser le bruitage à bon escient ?
Après les babillages et les « hochets » de jouets sonores aux timbres insolites, vient la phase de la marche.
Les objets secoués sont maintenant frappés de diverses façons et l’enfant se plaît à traîner ou pousser ceuxci dans ses déplacements. Ensuite viennent les objets sonores que l’on peut tenir en mains ou poser face à
soi. Déjà, l’usage d’un microphone (et lecteur) renforce le goût du développement.
A quatre ans, l’activité reste avant tout individuelle mais devient peu à peu collective et constructive si elle
est dirigée. C’est la cohérence face au récit dans la splendeur du ressenti et non dans l’intérêt de réalisme
acoustique.
Avant six ans, la tentation du bruitage réaliste n’existe pas : la « musique du repassage » ou la « danse des
vêtements » sont très éloignés du frottement du fer à repasser ou de la résonance des pas. Si on leur
demande de représenter « sonore » un personnage qui marche, c’est précisément le mouvement de la
marche tel qu’il est ressenti corporellement qui l’inspirera et no le bruit des pieds sur le sol. Que le
personnage marche sur du gravier ou sur de l’herbe n’introduit aucune spécificité acoustique par contre,
qu’il monte lourdement un escalier ou le descende avec agilité, est exprimé différemment. C’est le
mouvement ressenti physiquement et psychologiquement qui est rendu. L’enfant de cinq ans représente le
monde réel revu et corrigé selon ses propres préoccupations, transformé par ses affects. C’est une des
caractéristiques de l’art : on ne photographie pas le réel, on l’interprète !
Après sept ans, le bruitage devient une tentation gênante. Il ne reste que les quelques bruits furtifs qu’ils
soient figuratifs ou anecdotiques. On tombe vite dans le travers du « cui-cui » et du « plouf ». L’itinéraire
idéal semble commencer par la recherche de corps sonores (incluant la voix) et de modes de jeu, de
développer ce travail par co-pillage en binômes ou collectivement. On pourra évidemment réaliser des
musiques pour des textes, des bruitages de séquences narratives, des montages audiovisuels, … dont le seul
intérêt ne sera pas de bruiter mais d’explorer les trouvailles, de développer les idées musicales pour ellesmêmes de façon à ce que l’expression dramatique soit une dimension complémentaire et non un substitut de
l’imagination musicale.
Vers dix ans, si la motivation y est, il est capable de reprendre la séquences et de l’affiner en éprouvant les
techniques adéquates. A vrai dire, il n’y a pas de limite supérieure et le cursus privilégié semble être
constitué d’abord de l’approche des objets sonores, des modes de jeu, des séquences improvisées d’une à
trois minutes autour d’une idée, de l’élaboration d’une forme organisée (pouvant illustrer un argument
littéraire). De toutes façon, c’est le récit qui doit jouer son rôle de source de l’imagination ; il ne doit pas
être contrainte pour celle-ci et emprisonner la faculté créatrice. Ce n’est pas un parcours du simple vers le
complexe mais une démarche essentiellement concrète centrée sur l’observation et l’exploration de l’objet
sonore précédant le projet de composition.
Comment quitter le prétexte dramatique ?
Quand on s’aventure à sonoriser un texte ou une action, on ne prend pas de risque : on sait où l’on va ; le
point de départ est solide et la finalité bien définie. Le travail consiste à trouver avec plus ou moins de
bonheur les idées sonores bien adaptées. Le premier facteur dépend de l’impact de la trame sur le groupe :
l’évènement, le ressenti, la situation. L’autre s’appuie sur l’idée poétique du texte à laquelle on tente
d’associer une suggestion musicale. Pour y parvenir, il faut avoir acquis l’habitude de d’améliorer les
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trouvailles sonores pour rendre plus juste la suggestion musicale désirée et en trouver plus grande
satisfaction. Ainsi, le vol du moustique naîtra du frottement d’une corde de cithare à la vitesse et la pression
désirée (définie après plusieurs essais). Par la suite, après avoir retravaillé les frottements, les attaques et les
rebonds, on n’était loin du moustique mais l’expérience des jeux a servi une anecdote qui a permis d’autres
développements. Il ne faut donc pas considérer le texte comme un raccourci qui dispense de la recherche de
sons et de formes mais bien comme une dimension supplémentaire qui enrichit l’expérience musicale.
Quelle est la bonne taille de groupe ?
Le nombre réclame une organisation spécifique dans l’approche et la forme.
Seul, il est plus facile d’improviser et le joueur peut plus aisément se focaliser sur le résultat sonore.
Spontanément, il aura tendance à s’arrêter sur une idée, la varier, la développer.
A deux, c’est un autre plaisir. Chacun suit son idée mais elles s’interfèrent et l’interaction entre les deux
partenaires crée des relations (oppositions, influences, co-pillage, …). C’est l’expérience première de la
polyphonie.
A partir de trois, à quatre comme à trente et plus, il devient nécessaire de s’organiser : organiser le groupe,
c’est organiser la production sonore qui en aboutira. On se rend vite compte qu’on a difficile à percevoir
plus de quatre chaînes sonores distinctes et donc, on tente de coordonner les interventions : fondre en une
seule, créer des sous groupes, … Bref, il faut se parler, distinguer oralement les chaînes, décrire les sons et
pour le bien, transcrire cette organisation : on se crée la partition dont on a besoin. Par expérience, on
convient qu’un effectif de dix à quinze est propice au travail de construction collective : assez fourni sans
être trop lourd.
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APPLICATIONS
1. Collectionner les corps sonores (5 à 7 ans)
2. Enregistrer les paysages sonores, les ambiances (10 ans et +)
3. Inventorier les modes de jeu (7 à 10 ans)
4. Favoriser le jeu vocal (5 à 7 ans)
5. Improviser, développer un mode de jeu (3 ans et +)
6. Contrôler le geste (3 ans et +)
7. Contrôler le son (7 à 10 ans)
8. Mimer les sons (3 ans et +)
9. Décrire les sons (10 ans et +)
10. Enrichir les sons (5 ans et +)
11. Enrichir les images (10 ans et +)
12. Enrichir les textes narratifs (10 ans et +)
13. Jouer avec une idée (5 ans et +)
14. Assembler des chaînes sonores (7 à 10 ans)
En maternelle
DI – l’enfant placé devant un amplificateur émet un son (claquement de langue) qu’il doit reproduire
constamment. Le laissant libre de modifier quand il le souhaite, ce son va évoluer vers d’autres émissions,
d’autres idées. Il est impératif que le son soit amplifié pour qu’il l’entende en même temps qu’il le produit.
DI – avec une grille de four ou de réfrigérateur dont on a libéré les tiges des extrémités (coupées du cadre),
l’enfant explore les vibrations par frottement. L’expérience peut être reproduite avec n’importe quel objet
sonore vibrant ( voir classement des objets sonores)
DI – tout en y adjoignant les mouvements du corps, faire évoquer vocalement la mer : les vagues, le vent,
les mouettes, les bateaux, … Idem avec les états de l’eau (cours d’eau, précipitations, brouillard, glace, …),
les milieux sonores (gare, rue, magasin, …). L’improvisation doit rester libre, pas d’intervention de l’adulte
dans le jugement ou l’organisation mais juste guider l’évolution d’une trame à mimer. (leçons-contes)
DM – opposer par tous les moyens possibles l’univers de la force à celui de la douceur (instrumentaux,
vocaux, déplacements, objets, couleurs, mots, …)
DM – après avoir visité une lingerie, une boulangerie, la poste, … commenter, mimer, fabuler à partir des
observations. Ensuite reproduire ces impressions par les mouvements du corps, des déplacements par sousgroupes ou par l’ensemble puis y adjoindre des ambiances sonores produites par les enfants ou des musiques
choisies par le groupe.
DM – percer deux pots de yahourt, les placer sur un fil (tantôt en nylon, tantôt en acier lisse, tantôt en acier
non lisse (cordes de guitare). Tendre ces fils dans un cadre et laisser les binômes en jouer librement. L’un
influençant l’autre, on arrive très vite à un jeu de réponses en écho ou en polyphonie. On peut faire la même
chose avec n’importe quel instrument ou même le voix. Ce genre de duel est très apprécié quand on aime
explorer.
DS - caché derrière un paravent, proposer des profils sonores par frottement, grincement, claquement, …
l’enfant tente de reproduire le geste qu’il suppose être celui qui a produit le son (il imagine le geste et le
refait).
DS – au départ d’une émission vocale, proposer des variations soit à tour de rôle suivant les modes
d’émission (durée, attaque, intensité, expressivité, …) soit soi-même sur un laps de temps suffisamment
long pour laisser émerger les variations (la lassitude de l’un entraînant la variation qui crée le suivant).
Chaque séquence est enregistrée pour que le groupe puisse tenter de reproduire ce qui a été fait.
DS – avec environ 500 pots de yahourt, une latte de bis d’environ un mètre, les binômes déplacent les pots à
leur gré mais chacun leur tour, puis ensemble puis librement. L’effet visuel est surprenant, l’effet sonore est
impressionnant !
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En primaire
DI – alimenter une base d’objets sonores selon les principes pédagogiques. Les enfants constituent cette
réserve en justifiants « sonoriquement » leur classement.
DI – au départ de trente segments de bambou, les enfants explorent ce qu’ils peuvent tirer de l’objet. Puis
vient la mise ne commun où il ne peut y avoir de « blanc » (silence) et que chacun ait proposé un ou
plusieurs modes de jeu. On enregistre bien sûr la séquence pour comparer les premières émissions et les
assemblages de fin de séquence. Cette base servira à la phase suivante où l’on organise les successions et les
assemblages.
DM – au départ de la banque d’objets sonores, il s’agit d’explorer à plusieurs reprises chacun des objets :
soit en se le passant à tour de rôle soit en investiguant en deux ou trois séances avec enregistrement à la fin
de chaque recherche.
DM – chacun connaît la joie de faire vibrer sa latte de bois ou de plastique sur le bord du banc. Et si l’on s’y
mettait tous avec des longueurs et des matières différentes. Et si l’on organisait, sans parler, une trame
sonore.
DS – enregistrer soi-même des ambiances typiques pertinentes pour les autres. L’enfant doit enregistrer sur
K7 un milieu sonore – la séquence reste anonyme (elle peut être numérotée mais l’index n’est pas accessible
par les autres) – Si l’enregistrement est pertinent, les autres doivent reconnaître le milieu évoqué.
DS – au départ de trente segments de bambou, les enfants explorent ce qu’ils peuvent tirer de l’objet. Puis
vient la mise ne commun où il ne peut y avoir de « blanc » (silence) et que chacun ait proposé un ou
plusieurs modes de jeu. On enregistre bien sûr la séquence pour comparer les premières émissions et les
assemblages de fin de séquence. Cette base servira à la phase suivante où l’on organise les successions et les
assemblages.
DS – les enfants travaillent en sous-groupes des sonorités originales puis toutes les propositions sont
enregistrées et listées. Une deuxième phase propose de développer, mélanger, créer des atmosphères. La
séquence suivante propose de mettre en forme, de créer des chaînes sonores en essayant de faire ressentir les
qualités propres de chaque idées : c’est un répertoire d’idées que l’on constitue et non de corps sonores ou
de modes de production. Ensuite, on élabore un plan, une trame, puis un début et une fin : c’est une partition
unique destinée à ceux qui la créent. Enfin vient le moment de l’enregistrement : l’interprétation collective
ou les groupes sont constitués par idée ou impact sonore. S’en suit une critique, des amendements, des
propositions, des modifications (de construction, d’enchaînement, de durée, de silence, de sonorité, de
nuance, …). L’œuvre se construit en une dizaine de séances, chacune enregistrée et critiquée. L’on pourrait
s’arrêter là car l’œuvre est accomplie. Et si on la mettait en « représentation » ? le travail dramatique devrait
suivre le même cheminement pour ne pas être la composition d’un metteur en scène mais le résultat d’une
démarche collective.
DS – Lancer l’enregistrement, montrer une photo (grandeur poster), d’abord faire exprimer par les sons les
ressentis, puis par les mots qui sont notés au fur et à mesure. Arrêter l’enregistrement. Choisir les mots qui
« collent » le mieux aux ressentis. Elaborer des histoires venant avant ou après ce cliché. Synthétiser ces
histoires par les mots clés. Créer une trame complète. Y adjoindre le choix des sons qui collent le mieux au
choix des mots. Mettre en forme. Enregistrer l’œuvre.
DS – avec un matériel de traitement de son (logiciel), capturer tous les résultats sonores provenant
d’expériences innovantes (un bouchon de liège traîné sur une vitre, frotter une chaise sur le sol, frotter le
dossier sur le moquette, toutes sortes de bruits parasites, les prises de respiration entre les mots d’un texte dit
à des vitesses différentes, …). Traiter ces sons par des options d’inversion, de boucle, de sampling, de
superposition, … Faire lire un poème (ou un texte narratif) par plusieurs et/ou de plusieurs façons suivant le
même traitement d’inversion, de boucle, de sampling ou de superposition. Mettre en forme le tout.
Enregistrer l’œuvre.
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Classement des corps sonores
• Instruments-environnement : on se déplace devant les instruments pour en jouer.
Pex : le percussionniste face à ses timbales, xylophone, métallophone, grosse caisse et cymbales ou les
jouets sonores que l’on pousse ou tire en se déplaçant.
• Instruments-objets : on ne se déplace pas pour en jouer, ils sont en mains ou posés devant soi.
Pex : tous les instruments qu’on joue en étant assis ou tous les instruments apportés par les enfants
• Matériaux sonores bruts :
o en métal = tige filetée frottée ou égrenée, tringle, grille, ressort, tôle flexible, enjoliveur, roue
de vélo, couvercle, boules, …
o en plastique = tuyaux souples, semi-rigides ou rigides, bouteilles, baquets de polystyrène, …
o en caoutchouc = ballons baudruche, élastiques, …
o en bois = bambous, plaques et boîtes de différentes tailles
o en verre = bouteilles et bocaux, vitres du local, …
o en matières diverses = abat-jour en opaline, coquilles St Jacques, récipients en grès, en
faïence, … + l’eau
o en accumulation = graines, graviers, clous, pots de yahourt en grande quantité, coquilles de
noix, …
o les manipulations des matériaux sont amplifiées (par caisse de résonance, par pavillon ou par
ampli), sont variées (en utilisant des étaux pour libérer les mains, en tordant les tôles, en
modifiant l’oscillation ou la résonance, en suspendant les sonnailles, en versant les grains,
…)
• les sons brefs : dont la résonance s’éteint sans qu’on puisse la moduler
pex : percussions mélodiques (xylophone, métallophone, rangées en série, …) ou non mélodiques (petites
percussions, cordes libres que l’on gratte, frappe, pince)
• les sons entretenus : dont la persistance résulte d’un frottement, d’un souffle tenu, d’une oscillation
pex : instruments à archet ou à vent et tout ce qui roule, qu’on manipule, qu’on frotte
• les sons aléatoires et/ou contrôlés
o le son se prolonge de lui-même de façon imprévisible : balanciers, trajets sonores
imprévisibles, tournoiement d’une pièce de monnaie
o le son est presque contrôlé : par inertie, par vibration, par rebonds
o le son est contrôlé : varier la longueur ou la tension du corps mis en vibration (corde, lame,
tôle, peau tendue)
o le son est modifié : le geste donne le profil sonore de l’objet qu’on frotte, qu’on tournoie,
qu’on insuffle, …
• les modes de jeu : l’ensemble des phénomènes physiques et mécaniques
o percussion – résonance : la résonance qui prend place juste après la percussion (cordes,
peaux, tôles, …)
o rebondissement : percussions fondues dans une loi physique qu’on tente d’influer
o oscillation : le mouvement s’amortit mais il est possible de l’entretenir ou le modifier
o chocs itératifs : percussions répétées entendues comme une continuité (baguette sur surface
cannelée, règle sur grille, …)
o accumulation : succession rapide et non ordonnée (pluie de grains, froissement de matière,
émiettement de matières, …)
o frottement : grande variété de jeux, de vitesse, de pression, de roulement, de souffle, …
Education Musicale – Actions pédagogiques -
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