encontre des Palestiniens

Transcription

encontre des Palestiniens
Adalah dénonce les pratiques
racistes et illégales dans
les aéroports israéliens à
l’encontre des Palestiniens
Jonathan Cook – L’organisation Adalah confirme que le droit
israélien de l’aviation n’autorise pas le « profilage racial »
à l’encontre des Palestiniens aux aéroports.
Nazareth – En juillet dernier, Maria Jamal, 29 ans, domiciliée
à Haïfa, rentrait chez elle d’Athènes lorsqu’on la transféra à
la dernière minute sur un vol de la compagnie nationale
israélienne El Al à destination de l’aéroport Ben Gourion,
suite à l’annulation de son vol sur Turkish Airlines en raison
d’une tentative de coup d’état militaire en Turquie.
« Je fais de nombreux déplacements en avion chaque année mais
j’évite toujours les compagnies aériennes israéliennes à cause
des histoires épouvantables que m’ont racontées des amis et
des membres de ma famille. » explique Mme Jamal, membre
fondateur de Humanity Crew, organisation qui travaille avec
les réfugiés en provenance des zones de conflit au MoyenOrient qui vivent dans des camps en Europe.
Après qu’elle eut passé les contrôles de sécurité grecs, le
personnel israélien de l’aéroport d’Athènes l’intercepta pour
lui faire subir un interrogatoire intensif. On l’emmena
ensuite dans une pièce sécurisée, où on exigea qu’elle remette
son bagage à main et se déshabille pour une fouille
corporelle.
« Comme je refusais, ils m’ont dit que je ne pourrais pas
monter à bord de l’avion, » a-t-elle rapporté à Al Jazeera.
Finalement, elle n’a pas pu prendre son vol. « Leur
comportement était honteux, » a-t-elle ajouté. « Et je trouve
également choquant que d’autres pays autorisent le traitement
raciste des passagers arabes par Israël sur leur propre sol. »
De nombreux cas similaires touchent le cinquième de la
population d’Israël qui est palestinien.
Selon un récent rapport d’Adalah, groupe de défense des droits
juridiques, le personnel des aéroports israéliens violent
régulièrement le droit israélien en soumettant les passagers
arabes, y compris les propres citoyens palestiniens d’Israël à
des fouilles au corps et à d’autres procédures dégradantes.
D’après Adalah rien dans la loi de 1977 sur la sureté aérienne
d’Israël n’autorise le personnel des aéroports à utiliser des
« pratiques qui violent l’intimité et la dignité » des
passagers arabes.
Ces pratiques ont lieu à l’aéroport international d’Israël Ben
Gourion, ainsi qu’à de nombreux autres aéroports étrangers où
les agents de sécurité israéliens sont habilités à effectuer
des contrôles pré-embarquement pour le compte des compagnies
aériennes israéliennes.
En plus de devoir se déshabiller pour les fouilles
corporelles, les passagers arabes sont souvent détenus dans
des pièces sécurisées avant leur vol dans la zone de départ et
escortés à bord par des agents de la sécurité au vu et au su
d’autres passagers. Il se peut également que leur bagage à
main soit confisqué.
Toutefois, c’est la première fois qu’il est avancé que le
personnel de sécurité israélien se livre à des procédures qui
contreviennent au droit israélien. Nadeem Shehadeh, avocat
d’Adalah, a déclaré à Al-Jazeera que l’organisation avait
écrit au procureur général d’Israël, Avichai Mandelblit, et
aux Autorités aéroportuaires d’Israël exigeant qu’il soit mis
fin immédiatement aux fouilles au corps et aux escortes de
sécurité.
Les passagers acceptent de se livrer à ces pratiques « sous la
contrainte », a-t-il déclaré, parce que le personnel les
menace de les empêcher de prendre leur vol à moins qu’ils ne
s’exécutent. En l’absence de toute autorité légale, le
personnel des aéroports se livrent à ce qui revient à « une
agression physique » en forçant les passagers à se
déshabiller.
Adalah insiste pour qu’Israël mette en place une procédure
d’indemnisation « du grand nombre de passagers qui ont eu à
subir de tels abus au fil des ans ».
Il est probable que les dernières révélations vont susciter un
regain de critiques du profilage racial des passagers arabes
que pratique Israël depuis longtemps aux aéroports.
Shlomo Harnoy, ancien haut responsable des services secrets du
renseignement d’Israël, le Shin Bet, qui supervise les
contrôles de sécurité aux aéroports, a dit au Jerusalem Post
en juillet qu’Israël était le « seul » pays à pratiquer le
profilage des passagers. La court suprême a refusé l’an
dernier d’interdire le profilage racial, bien qu’elle ait
exprimé une certaine gène vis à vis de cette politique et ait
exhorté les Autorités aéroportuaires à trouver des solutions
technologiques afin d’atténuer son impact.
Le traitement des passagers arabes par Israël, qui viole le
droit international et soulève des questions éthiques a aussi
causé un large malaise en Europe et aux États-Unis. Le mois
dernier les États-Unis ont accusé Israël de traitement
discriminatoire à l’encontre de ses propres citoyens après
qu’il eut refusé l’entrée à cinq Arabes américains.
Toutefois, comme l’inquiétude grandit en Occident en matière
de sécurité des aéroports en raison du développement de
groupes tels que Al-Qaïda et l’Etat islamique d’Irak et du
Levant (EIIL ou OEI), certains pays manifestent un intérêt
croissant pour les mesures de sécurité israéliennes.
En juin, 150 responsables de la sécurité intérieure et des
aéroports des Etats-Unis, d’Europe, d’Afrique et de Russie ont
bénéficié de séances d’information à l’aéroport Ben Gourion.
Le même mois Donald Trump, le candidat républicain aux
élections présidentielles états-uniennes de novembre, a appelé
les États-Unis à « s’inspirer d’Israël » en matière de
sécurité intérieure. « Le profilage » a-t-il déclaré, « c’est
une chose à laquelle nous allons devoir nous mettre à
réfléchir ».
Les médias britanniques ont aussi rapporté que l’aéroport
Heathrow réfléchit à un système de sécurité style israélien
qu’il a surnommé « anneau d’acier ».
M. Shehadeh dit qu’il est révélateur que dans sa réponse
l’aéroport a éludé les questions d’Adalah concernant la
légalité des fouilles et des escortes. Au lieu de cela, a-t-il
noté, il a nié avoir utilisé de telles pratiques.
Tamar Turjeman, le conseiller juridique en chef des Autorités
aéroportuaires, a nié que le personnel de l’aéroport avait
utilisé « des pratiques inappropriées comme obliger les
passagers à se déshabiller et/ou les faire escorter par des
gardes de sécurité ». M. Turjeman a refusé de commenter ce qui
se passe dans des aéroports étrangers, disant que c’était de
la responsabilité des services du renseignement du Shin Bet.
Un autre incident a touché Samar Qupty, actrice palestinienne
d’Israël de 26 ans, qui joue dans Junction 48, film primé sur
deux artistes de hip-hop qui utilisent leur musique pour
défier les comportements racistes en Israël.
Lorsqu’elle est arrivée à l’aéroport Ben Gourion en juillet
pour se rendre sur un site de tournage en Colombie, elle fut
détenue pendant deux heures par des agents de sécurité.
Bien qu’elle ait montré une invitation officielle, Mme Qupty
dit qu’elle a été longuement interrogée, qu’elle a subi une
fouille corporelle, et qu’on lui a interdit de monter à bord
avec son bagage à main. Elle a écrit sur Facebook que les
contrôles supplémentaires à l’aéroport « me rappellent une
fois de plus à quel point je suis indésirable ici et à quel
point je peux faire peur ».
L’un des avocats d’Adalah, Fady Khoury, a secrètement
enregistré l’interrogatoire qu’il a subi récemment par du
personnel Adalah Israël aéroportsaéroportuaire israélien lors
de l’enregistrement, et qui semble être un exemple type de
profilage racial. On l’interroge sur l’origine de son nom et
le statut d’immigrant de ses parents – seuls les juifs et
leurs proches peuvent immigrer en Israël.
En 2007, deux groupes de défense des droits de l’homme
israéliens ont recueilli des témoignages montrant que les
citoyens palestiniens étaient systématiquement soumis au
profilage racial et subissaient un traitement dégradant aux
aéroports, y compris ceux à l’étranger.
L’Association arabe pour les Droits de l’Homme et le Centre
Contre le Racisme basés à Nazareth sont arrivés à la
conclusion que les contrôles de sécurité intrusifs sont « si
répandus qu’il est difficile de trouver un citoyen arabe se
rendant à l’étranger en avion qui n’ait pas fait l’expérience
au moins une fois d’un contrôle de sécurité discriminatoire ».
Toutefois, seuls des changements cosmétiques semblent avoir eu
lieu depuis lors, rien de plus.
Une requête en justice de longue date déposée par
l’association des droits civils en Israël ACRI s’est traduite
en 2014 par une injonction à l’aéroport Ben Gourion de mettre
fin à la pratique qui consiste à ouvri à l’encontre des
Palestiniens r et fouiller les bagages de la plupart des
passagers arabes dans le hall des départs, à proximité des
comptoirs d’enregistrement.
Raghad Jaraisy, chef de l’unité :droits de la minorité arabe
d’ACRI, a dit que les contrôles consistaient également à vider
les bagages et à inspecter leur contenu à proximité d’autres
passagers. Maintenant de nouvelles machines inspectent les
bagages après l’enregistrement.
« Le profilage racial n’a pas pour autant cessé, » a-t-elle
déclaré à Al Jazeera. « L’utilisation de nouvelles machines
signifie qu’une grande partie se fait ailleurs, hors de la vue
du public. »
Mme Jaraisy dit qu’elle a elle-même été placée dans une pièce
sécurisée, escortée jusqu’à l’avion par du personnel de
sécurité et s’est vue confisquée son bagage. « La plupart de
mes amis ont eu à subir le même traitement. Nous y sommes
tellement habitués, que nous ne nous donnons même pas la peine
de nous plaindre. Nous savons que nous sommes considérés comme
suspects dès la naissance. »
Elle dit que les plaintes reçues par ACRI laissent à penser
que le pourcentage de passagers arabes soumis aux fouilles
corporelles et aux escortes est de fait en augmentation.
Il y a trois ans, il est apparu que Natour, importante agence
de voyages israélienne, demandait à son personnel d’informer
l’aéroport Ben Gourion à l’avance de la présence de passagers
arabes dans des groupes de touristes étrangers.
Il semblerait que les citoyens palestiniens peuvent être en
mesure d’obtenir un dédommagement limité des tribunaux
israéliens s’ils peuvent prouver qu’ils ont été victimes de
traitements discriminatoires et offensants.
L’an dernier un juge a accordé 1800 dollars d’indemnisation à
Nadera Shalhoub-Kevorkian, professeur de droit à l’université
hébraïque de Jérusalem pour avoir subi une inspection de
sécurité d’une durée de trois heures que le juge a qualifiée
d’ « excessivement intrusive ».
Néanmoins, les tribunaux israéliens ont toujours refusé de
statuer sur la question générale de la légalité du profilage
racial.
En 2012, le tribunal du district de Nazareth a rejeté un
recours collectif en justice de trois citoyens palestiniens
pour avoir subi chacun séparément des contrôles de sécurité
humiliants. La juge a déclaré qu’elle ne traiterait les cas de
traitement discriminatoire que sur une base individuelle.
En attendant, Mme Jamal dit qu’elle se disposait à poursuivre
en justice les Autorités aéroportuaires. « Peut-être que si ça
leur coûte financièrement, elles réfléchiront à deux fois à la
manière de nous traiter. »
* Jonathan Cook a obtenu le Prix Spécial de
journalisme Martha Gellhorn. Il est le seul
correspondant étranger en poste permanent en
Israël (Nazareth depuis 2001). Ses derniers
livres sont : « Israel and the Clash of
Civilisations : Iraq, Iran and the to Remake the Middle East »
(Pluto Press) et « Disappearing Palestine : Israel’s
Experiments in Human Despair » (Zed Books). Consultez son site
personnel.
29 septembre 2016 – Al-Jazeera – Traduction : Chronique de
Palestine – MJB