Apprendre à écrire

Transcription

Apprendre à écrire
Apprendre à écrire
Nathalie Bonneton-Botté
Objectifs

Rappel ou présentation des données
développementales
relatives
à
l’apprentissage de l’écriture manuscrite.

Présentation de quelques données issues
des
recherches
actuelles
afin
de
questionner les pratiques professionnelles.
Plan
Un point sur les programmes
 Un apprentissage complexe et laborieux
 Un apprentissage moteur
 Perspectives développementales

-Evolution des productions
-Pré-requis à l’écriture
-Etapes de l’apprentissage
Difficultés d’acquisition du geste graphique
 Place des apprentissages implicites à
l’école maternelle

Programmes 2002

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


Les attentes
« en fin d'école maternelle, copier une ligne de texte en
écriture cursive en ayant une tenue correcte de
l'instrument, en plaçant sa feuille dans l'axe du bras et en
respectant le sens des tracés »
Diversité des occasions d’action (outils, supports,
matériaux)
Place de la latéralisation
Place de la tenue (prise pouce /index avec comme support
le majeur)
Place de la posture/contrôle de l’avant bras
Variabilité du développement moteur (paradoxe/attentes)
Les programmes 2008 et l’écriture à
l’école maternelle

« Apprendre les gestes de l’écriture »
-Les enfants observent et reproduisent quotidiennement des
motifs graphiques afin d’acquérir le geste le mieux adapté et
le plus efficace.
-Importance des activités graphiques.
-Développer
des
compétences
de
perception
des
caractéristiques
des
lettres.
-L’écriture cursive est proposée à tous les enfants, en grande
section, dès qu’ils en sont capables ; elle fait l’objet d’un
enseignement guidé afin que ces premières habitudes
installées favorisent la qualité des tracés et l’aisance du geste.
Les programmes 2008 et l’écriture à
l’école maternelle

À la fin de l’école maternelle l’enfant est capable
de :
- Reconnaître et écrire la plupart des lettres de
l’alphabet.
- Copier en écriture cursive, sous la conduite de
l’enseignant, de petits mots simples dont les
correspondances en lettres et sons ont été
étudiées.
- Ecrire en écriture cursive son prénom.
Petite section et moyenne section


Petite section:
-Distinguer les lettres des autres formes
graphiques.
-Imiter les gestes amples dans différentes
directions.
Moyenne section:
-Reconnaître son prénom en écriture cursive.
-Reconnaitre des similitudes entre les mots.
Moyenne section
-Reconnaitre les lettres de l’alphabet
-Réaliser en grand les tracés de base de l’écriture
: cercle, verticale, horizontale, enchaînement de
boucles, d’ondulations, sur un plan vertical
(tableau),
puis
horizontal
(table).
- Imiter des dessins stylisés exécutés au moyen
de
ces
tracés.
- Écrire son prénom en majuscules d’imprimerie
en respectant l’horizontalité et l’orientation de
gauche à droite.
Grande section





Maitriser les tracés de base nécessaires à
l’écriture
Après avoir étudié le son d’une lettre, tracer la
lettre en cursive.
Copier (sous contrôle de l’enseignant) des mots
simples en écriture cursive.
Ecrire en contrôlant la tenue de l’instrument et la
position de la page.
Recopier […] pour améliorer la qualité, la taille et
l’enchainement des lettres.
Questions et remarques
2002 et 2008: l’écrit est surtout présenté
comme un produit fini, que l’enfant
observe, reproduit…
 Les attentes: qu’est-ce qu’un enfant qui
est capable de passer à l’écriture cursive?
Capable sur le plan conceptuel? Sur le
plan psychomoteur?
 Place
de
l’observation
dans
les
apprentissages? Observer quoi?

Apprendre à écrire
UN APPRENTISSAGE
COMPLEXE ET LABORIEUX
L’apprentissage de l’écriture: un modèle
(Ellis, 1989; Van Galen, 1991)
connaissances
linguistiques
représentations
orthographiques
agencement
point de prod.
connaissances
visuo-spatiales
représentations
allographiques
agencement
spatial
programmation
motrice
exécution
motrice
mode
proactif
mode
rétroactif
intégration
du feedback
commandes
neuro-musculaires
geste graphique
vision/tactilo-k.
Ecrire pour Vygotski…

Capacité d’abstraction
« développer un système symbolique de
second ordre »
Entité réelle→ Langage oral→ langage écrit
Importance de « l’écriture dans l’air »
Apprendre à écrire
UN APPRENTISSAGE MOTEUR
De bonnes raisons de s’intéresser au contrôle
perceptivo-moteur

Ecrire pour être lu…Importance de la
lisibilité

Nécessité de l’automatisation du geste
pour libérer l’attention nécessaire à
d’autres tâches (Fayol, 2006)
De bonnes raisons de s’intéresser au contrôle
perceptivo-moteur



Lien étroit entre signe et représentation motrice.
La récupération de la lettre en mémoire fait appel
à sa trace motrice (Zerbato-Poudou,Velay,
Longcamp, 2004).
L’écriture manuscrite participe aux processus
d’apprentissage de la lecture (Bara, Gentaz, Colé,
2007).
Importance d’une relative synchronie entre
développement moteur et conceptuel
Perspectives développementales

Evolution des deux systèmes de notation

Pré-requis pour entrer dans l’écriture

Apprendre à écrire: un modèle de
développement.
Evolution des productions entre 3 et 7 ans
E. Ferreiro (1988)

Indifférentiation dessin/graphisme
Remis en question par Karmilloff-Smith en 1995

Différentiation dessin/graphisme
Anderson & Damasio(1990) Double dissociation
Noyer et Baldy (2002) Différentiation à 4 ans.
Adi-Japha et Freeman (2001) Effet du contexte congruent et
effet facilitateur de l’écriture / dessin
Perméabilité des systèmes.
Evolution des productions entre 3 et 7 ans
E. Ferreiro (1988)
Hypothèse syllabique (GS)
Hypothèse alphabétique (CP)
Hypothèse orthographique (Fin CE1)
Orthographe inventée




utilisation du nom des lettres plutôt que
de la valeur phonique (j v pour j’y vais)
la transcription de son que les enfants
perçoivent et se représentent mais que
les adultes ne perçoivent pas
La transcription de sons qu’ils perçoivent
différemment des adultes
Une segmentation des énoncés (milieu
cp) qui leur est propre (jevéso marché).
Pré-requis pour entrer dans
l’écriture
L. Lurçat (1970)
En maternelle, mise en place de
compétences de base:
-
Sur le plan moteur
Sur le plan perceptif
Sur le plan représentationnel
Apprentissage implicite et observation
La
motricité
est
soumise
aux
apprentissages
implicites
(Vinter
&
Perruchet, 2002).
 Les enfants de grande section identifient
correctement un problème de fluidité du
geste
mais
pas
un
problème
d’organisation du tracé (Bonneton, De La
Haye, soumis).
 Cette connaissance est implicite

Apprentissage et lois neuromotrices

Loi de développement céphalo-caudal

Loi de développement proximo-distal

Loi de la variabilité

Rôle de la culture sur le développement
psychomoteur (Bril, 1985).
Cycle 1



Moteur : réaliser des tracés circulaires dans les
deux sens? Avec les deux mains? Contrôle
perceptivo-moteur?
Perceptif: l’enfant prend-il en compte la taille de
l’espace graphique avant de réaliser un dessin ?
essaie t-il de respecter le cadre ? Peut-il exercer
un contrôle local de son dessin par exemple,
réussir à fermer un cercle ou un carré ? Relier
deux adresses spatiales?
Représentationnel : L’enfant réalise t-il deux
productions différentes pour un mot et un dessin
? Accorde t-il une signification à la trace qu’il
laisse ? où en est-il dans le dessin du bonhomme
(représentation de soi) ?
Cycle 2
 Statique
 Contrôle
de la force et de la pression
 Régulation tonique
 Latéralisation
Du point de vue de la statique
Quelle est la position de l’enfant?
redressé? Couché sur sa feuille ?
= gros effort = difficulté de prise
d’informations sur le modèle, la trace, la
main.
Si c’est le cas, le faire travailler sur un plan
vertical et l’abaisser progressivement.
Aider l’enfant a prendre conscience de sa
posture, modifier la position du modèle?
Contrôle de la force et de la pression
Est-ce que l’enfant abîme sa feuille en
appuyant ? Est-ce qu’il a des difficultés à
laisser une trace ?
Trop de pression: Travail au velleda / craie
Pas assez:éducation psychomotrice
/monotype/graphisme sur terre
La régulation tonique
Est-ce que la fatigabilité de l’enfant est importante?
Fait-il de nombreuses pauses ? (avec ou sans
modèle devant les yeux ?).
Si c’est le cas…
Travailler des alternances de forme graphique: Segments et
vagues en alternance, hachurage, aider l’enfant à prendre
conscience de son état de régulation tonique (danse,
relaxation).
Travailler la fluidité du geste à partir de la peinture, exercices
d’expression corporelle, de danse, jeux de graphisme sans
lever de crayon.
Latéralisation
Processus long (8- 10 ans)
 Rarement homogène
 Latéralité d’usage/latéralité graphique
 Droitier/Gaucher
pas d’incidence sur
qualité et rapidité
 Seul
cas dans lequel l’efficience est
moindre chez l’adulte: posture semiinversée

Les étapes d’apprentissage
Les méthodes d’étude
Produit fini/Geste
 Les indices
- fréquence de production ou vitesse
- Qualité du produit fini (lisibilité,
harmonie)
- Caractéristique spatio-temporelle (qualité
du geste)

Ajuriaguerra, Auzias et Denner (1971) :
3 étapes entre 6 et 11 ans

Pré- calligraphique (6-7 ans)

Calligraphique infantile (8-10 ans)

Post-calligraphique (après 10 ans)
Modèle de Zesiger (2003)

2-5 ans:
Gribouillage, dessins et pseudo-écriture
Mise en place des bases

5-6 ans:
Premières productions qui se rapprochent
de la norme adulte (prénom)
Copie servile de formes (avec inversions,
déformations, etc.)
Modèle de Zesiger (2003)

6-7 ans:
Apprentissage systématique de la forme
des lettres
Ordre fixe et direction spécifique MAIS
juxtaposition de petits segments (=
contrôle
rétroactif),
aspect
cabossé,
grande taille
Contrôle rétroactif
Modèle de Zesiger (2003)

8-10 ans:
Passage progressif au mode proactif
Développement de programmes moteurs
Modèle de Zesiger (2003)

10-11 ans:
Centration sur la rapidité Augmentation
temporaire de la pression et de la
variabilité spatiale

12 ans et plus:
Maîtrise quasi adulte, affranchissement
des normes calligraphiques scolaires,
écriture plus personnalisée et plus
efficiente, au détriment de la lisibilité.
L’écriture chez l’enfant de 12 ans
Que contiennent les représentations
motrices ?
-Schémas moteurs ou unité motrice
-Des règles motrices (ex: vitesse).
Difficultés d’acquisition du
geste graphique
Profils
Raideur et tension
 Relâchement graphique
 Impulsivité
 Maladresse
 Recherche de précision entraînant la
lenteur
 Refus

Le dysgraphique est celui chez qui la
qualité graphique est déficiente alors
qu’aucun
déficit
neurologique
ou
intellectuel
n’explique
cette
différence(Zesiger, 2000).
 Un
outil récent : le BHK (Charles,
Soppelsa, Albaret, 2000.

Zesiger et coll., 2000

Les difficultés d’apprentissage de l’écriture
sont hétérogènes




Écriture lente et dysfluente  difficulté de
programmation motrice
Variabilité spatiale (temporelle)  difficulté
d’exécution motrice
Ecriture grande  stratégie de compensation
(maximisation des sensations tactilokinesthésiques)?
Profils mixtes
Troubles de la coordination motrice?






Démarche maladroite, lent à courir,
sauter, monter et descendre les escaliers
Difficultés à apprendre à lacer les
chaussures, boutonner, lancer et attraper
des balles
Tendance à laisser tomber les objets, à
trébucher, à buter sur des obstacles
Malhabile pour l’écriture
Dessin, jeux de construction, jeux de
ballons faibles
Mauvaises performances sportives
Conclusion pour l’école maternelle
Nécessité de prendre en compte les
capacités motrices
 Importance des occasions d’action offertes
à
l’enfant
pour
accompagner
le
développement psychomoteur
 Importance du désir d’écrire
 Importance des occasions d’action offertes
à l’enfant d’observer un adulte en train
d’écrire.

Bibliographie
Amiguès R., Zerbato-Poudou M.T., « Comment l’enfant devient
élève, les apprentissages à l’école maternelle ». Paris, Retz
pédagogie , 2000.
Zesiger, P., Ecrire: Approches cognitives, neuropsychologique et
développementale. Paris : PUF, 1995.
Velay, J.L., Longcamp, M., et M. T., Zerbato-poudou, “De la plume
au clavier: est-il toujours utile d’enseigner l’écriture manuscrite?”
in E. Gentaz et P. Dessus (eds), Comprendre les apprentissages,
Paris, Dunod, 2004, pp.69-82 .
Gentaz, E., Dessus, P., « Comprendre les apprentissages ». Paris,
Dunod, 2004.