Étymologie de la langue française/Introduction

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Étymologie de la langue française/Introduction
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Étymologie de la langue française/Introduction
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Étymologie de la langue française/Évolution et disparition des mots
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
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Étymologie de la langue française/Organisation des langues de la famille indo-européenne
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Étymologie de la langue française/Introduction
Étymologie de la langue française/Introduction
Les origines du vocabulaire
L'essentiel du vocabulaire des langues indo-européennes provient de racines indo-européennes au travers du latin, du
germanique ou du grec pour l'Occident, du slave pour l'Est et du nordique pour la Suède et la Norvège.
Pour la langue française, la source principale est le latin, soit par évolution spontanée (langue populaire) soit par
construction explicite (langue savante). Par exemple, le mot latin « prisonnier » (captivus) donne chétif dans la
langue populaire et captif en langue savante.
Une autre source importante d'un vocabulaire est l'emprunt à d'autres langues au travers, pour l'essentiel, du
commerce et des guerres. Pour la langue française ce furent le francique à l'époque des grandes invasions barbares,
l'arabe au Moyen-Âge, l'italien à la Renaissance, les langues d'Amérique du Sud lors de la découverte du Nouveau
Monde et plus récemment l'anglais. Ce dernier a beaucoup emprunté à la langue française au Moyen-Âge lorsque la
chevalerie anglaise parlait français d'où, de nos jours encore, la différence entre ox le bœuf élevé par les paysans et
beef (pour bœuf), ce même animal dans les plats de la noblesse puis, d'une façon généralisée, dans l'alimentation.
Quand au tunnel, il s'agit du mot tonnelle emprunté par les Anglais puis restitué avec un autre sens lors de
l'apparition du chemin de fer. Avant le chemin de fer, il y avait déjà des tunnels en France mais on les y appelait des
galeries, mot conservé en italien moderne (galleria).
Les autres sources notables sont l'emploi de noms propres comme noms communs (poubelle, barème), de sigles
(laser, snob), d'onomatopées (boum, gazouillis).
Enfin quelques mots constituent des créations tout à fait conscientes et circonstanciées (ordinateur, bikini,
monokini).
L'évolution et la disparition des mots
Les mots évoluent
• de façon interne par préfixation (courir --> accourir) ou dérivation
• de façon historique au fur et à mesure que la chose désignée évolue elle même (de nos jours un pantalon ou une
culotte n'ont plus grand chose à voir avec les premiers pantalons ou les sans culottes de la période révolutionnaire)
• de façon sémantique par analogie de forme, de couleur, de matière ou par application d'autres procédés voisins
des figures de la rhétorique (le tout pour la partie, par exemple).
Enfin, les mots disparaissent lorsque le signifié (= ce que désigne un mot : objet, action, sentiment) disparait, quand
ils ne sont plus compris ou sous l'évolution de la sensibilité sociale.
Au Moyen-Age, la fauconnerie (le dressage et l'emploi des faucons pour la chasse) constituant une haute technologie
et son vocabulaire s'est répandu dans le langage courant. Au XIXème siècle, le cheval était un "instrument"
économique et social de base et le vocabulaire de l'équitation était compris de tous ; il est aujourd'hui remplacé par
celui de l'automobile.
L'expression sans solution de continuité, de plus en plus mal comprise et parfois pour le contraire de ce qu'elle veut
dire est ainsi en voie de disparition au profit de sans arrêt ou 24/24 h - 7/7j etc, selon le contexte. Il soulait (il avait
l'habitude) ou peu m'en chaut (= peu m'importe) ont quasiment disparu.
Négre qui a appartenu au vocabulaire standard bien au delà de la deuxième guerre mondiale n'est plus en usage
aujourd'hui si ce n'est pour désigner la personne qui a écrit un livre à la place de celle qui le signe comme auteur.
Ces disparitions sont lentes. L'adjectif débonnaire reste un témoin de la fauconnerie. Sans pratiquer l'équitation on
comprend encore ce que signifie avoir des œillères.
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Étymologie de la langue française/Introduction
Plan
L'exposé suit l'enchaînement ébauché ci-dessus (origines - extension - évolution et disparition du vocabulaire)puis
l'illustre par le commentaire étymologique d'un message réellement envoyé (et quasiment pas retouché).
Étymologie de la langue française/Évolution et
disparition des mots
Évolution ou disparition des signifiés
Les mots évoluent et, éventuellement, disparaissent avec la chose, l'action ou le sentiment qu'ils représentent.
Cette évolution (disparition) peut porter sur des mots isolés ou des champs sémantiques entiers.
On pense immédiatement aux articles de mode (habillement ou décoration) par définition passagers. Ainsi culotte ou
pantalon ne désignent-ils manifestement plus aujourd'hui ce qu'ils désignaient au XVIIIe siècle. Nous ne comprenons
plus immédiatement en quoi des Révolutionnaires étaient qualifiés de sans culottes et même l'expression user ses
culottes sur les bancs de l'école apparaît désuète. Knickerbockers (abrégé en Knickers) très répandu entre les années
1920 et 1940 pour désigner un pantalon de golf est en passe de disparaître complètement. Gibus, chapeau haut de
forme que l'on peut aplatir pour le ranger grâce à un système de ressorts inventé par Monsieur Gibus dans les années
1830, est également largement oublié.
Toutefois l'ensemble du vocabulaire est concerné. Voici un retour sur une ou deux générations.
Dans les années 1950, tender, micheline et tub faisaient partie du vocabulaire standard. Aujourd'hui le premier n'est
plus d'un usage immédiat et les deux autres ont quasiment disparu.
• le tender (en anglais = serviteur de to tend, servir, qui partage son radical avec attendre, le serviteur étant à la
disposition de son maître) était le wagon que l'on accrochait derrière la locomotive à vapeur pour y stocker le
charbon et une partie de l'eau nécessaires au voyage
• la micheline était un autorail construit par la société Michelin avec des roues métalliques entourées de bandages
pneumatiques. Dépassant les 100 Km/h, elle était rapide pour l'époque et surtout confortable.
• le tub, anciennement écrit tob, est entré dans la langue française vers 1880. Il s'agissait d'une grande bassine (le
mot signifie baquet en anglais) que l'on installait au milieu de sa cuisine (car il y avait encore peu de salles de
bains) pour prendre une douche (en se versant sur la tête un broc d'eau chaude) ou un bain (en remplissant le tub
avec un broc - le mot broc est lui même en voie de disparition).
Pour s'en tenir à une époque plus récente, il y a 25 ans les manuels d'organisation de travail de bureau se référaient à
des stencils, à du verni correcteur et à des documents ronéotés, vocabulaire qui n'a plus cours aujourd'hui.
• le stencil (= pochoir en anglais, du verbe to stencil enluminer qui partage la même origine que le français
étinceler) était un support de papier que l'on passait entre deux rouleaux dont l'un était enduit d'encre
• lorsque l'on commettait une faute de frappe, on "rebouchait" la perforation du pochoir avec un verni proche du
verni à ongles dit verni correcteur
• Ronéo était le nom de l'entreprise qui produisait la machine (dépôt de la marque en 1921) encreuse. Le mot donna
ronéoté qui concurrençait polycopié ou multigraphié. Seul polycopié demeure aujourd'hui pour désigner le
support de cours donné par des professeurs à leurs étudiants, le sens du mot demeurant : qui est copié en plusieurs
exemplaires même si le mode de reproduction n'est plus le même.
Dans ces mêmes années 1950 on comprenait qu'un pharmacien fût amicalement appelé un potard car il préparait
encore quelques potions magistrales en mélangeant des produits puisés dans de nombreux pots comme on en voit
dans les musées de pharmacie et que l'on retrouve aujourd'hui plutôt chez certains marchands de thé.
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Étymologie de la langue française/Évolution et disparition des mots
A la même époque les centraux téléphoniques n'étaient pas encore entièrement automatisés et les demoiselles des
P.T.T. constituaient le personnel obligatoirement féminin qui assurait à la main la mise en relation (le demandeur
appelait le central, annonçait le numéro demandé et la jeune femme le connectait).
Parmi les champs sémantiques qui disparaissent on trouve
• le vocabulaire des chevaux qui n'est plus directement utilisé que par celles et ceux qui pratiquent l'équitation alors
que, inversement, le vocabulaire de l'automobile constitue un pourcentage appréciable du vocabulaire du français
moyen du début du XXIe siècle et s'adapte en permanence aux améliorations du véhicule : le mot starter pour
désigner un levier ou un bouton qui enclenchait un dispositif facilitant le démarrage des voitures a disparu en 20
ans car le démarrage est maintenant automatique mais ABS ou GPS sont des sigles connus de tous.
• le vocabulaire de l'héraldique, science des blasons, qui jusqu'à la fin du XXe siècle bénéficiait d'une planche en
couleur dans tous les dictionnaires classiques du type "Petit Larousse illustré" et dont la connaissance reste
nécessaire pour une bonne compréhension de la littérature française antérieure à la deuxième guerre mondiale
• le vocabulaire de l'industrie textile et de la métallurgie dans une France qui importe (pour le textile) ou d'usines
très automatisées (pour la métallurgie) et donc sans grands effectifs pour relayer le vocabulaire technique en
dehors du métier.
Les évolutions de la société
La notoriété respective des professions, l'importance des effectifs employés par les différentes branches économiques
ou le contenu des activités des contemporains expliquent aussi des évolutions.
Du temps où le service militaire pouvait durer jusqu'à trois ans pour un homme dont l'espérance de vie à la naissance
était de l'ordre de 60 ans, le vocabulaire courant comportait de nombreuses références à ces obligations civiques
aujourd'hui disparues ou en voie de disparition d'autant que l'armée est devenue plus technique.
A la même époque, le caractère essentiellement rural de la France faisait aussi que la plupart des des lycéens étaient
internes d'où des références linguistiques à ces longues années (de 7 à 10 ans) pas toujours faciles à en lire les récits.
Ce même caractère rural faisait aussi que quasiment chacun connaissait le vocabulaire de la campagne (culture et
élevage, oiseaux, fleurs).
L'évolution des mentalités
Les grands courants comme l'abandon d'une vie religieuse quotidienne prégnante, l'émancipation de la femme, la
possibilité d'une consommation de biens et services élargie, un plus grand respect des handicapés ou la régression de
la xénophobie rendent malséantes voire des expressions autrefois courantes :
• mettre à l'index est une expression d'origine ecclésiastique pour "montrer du doigt (de l'index) les livres qu'un
Chrétien ne doit pas lire", la censure catholique n'ayant plus grande audience, la mise à l'index n'est plus comprise
de certains bacheliers.
• beaucoup de jurons autrefois fort inconvenants car ils enfreignaient le commandement le nom de Dieu
n'invoquera sont aujourd'hui oubliés voire précieux comme pardieu, palsambleu (= par le sang de Dieu),
sacrebleu (bleu y est aussi le substitut de Dieu)
• Tuer le mandarin, expression signifiant qu'on se souciait aussi peu d'une décision que de tuer un mandarin (=
lettré et haut fonctionnaire chinois) a quasiment disparu
• Betterave pour diabétique (la France a longtemps tiré l'essentiel de son sucre des betteraves de Champagne).
Cette évolution influence aussi la perception du corps et de ses fonctions. Le Moyen-Age était plutôt libre vis à vis
du corps et de sa nudité. Il y avait alors autant de vols à Paris qu'aujourd'hui mais le nombre d'heures de travail
nécessaires pour s'acheter un vêtement volé était considérablement plus élevé que de nos jours. Aussi, par temps de
canicule, les habitants se déshabillaient-ils chez eux et allaient-ils tout nus se baigner dans la Seine pour prévenir tout
chapardage. Les autorités ecclésiastiques fustigeaient cette façon de faire mais la fréquence de leurs rappels prouve
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Étymologie de la langue française/Évolution et disparition des mots
le peu d'impact de l'interdit. À cette même époque les femmes avaient des mamelles. Avec le Quattrocento italien
puis la Renaissance française elles eurent des seins en même temps que s'introduisaient des règles de convenance
réfrénant l'expression corporelle (ne pas émettre de bruits à table, ne pas y relater ses ébats amoureux, ne plus y faire
allusion à une prostituée,...) Le mot sein vient du latin sinus (= courbe) que l'on retrouve dans sinueux et sinus /
sinusite (les sinus sont des cavités de forme irrégulière). Il s'agit du pli que fait un vêtement (toge romaine ou robe
médiévale) au niveau de la poitrine. Il reste un souvenir de ce sens en français moderne : réchauffer un serpent (ou
un renard selon les versions) dans son sein. Cela ne veut as dire que l'animal en question va sortir du sein comme
Minerve du cerveau de Jupiter dans la mythologie mais que, pris de pitié on a placé (garçon ou fille) un renardeau
abandonné par sa mère dans son vêtement pour qu'il profite de la chaleur du corps et ne meure pas et qu'au lieu de
récompenser son bienfaiteur, cet animal le mord. Dès le XVIe siècle on désigne par le pli du vêtement ce qu'il y a
dessous. Le mot sein devient seul bienséant tandis que mamelle, populaire, disparaît sauf volonté spécialement
dépréciative. Au XIXe siècle deux phénomènes vont se superposer : d'une part, le mot sein est devenu le mot
standard et tout le monde comprend à quoi il renvoie, d'autre part, la pudeur (ou la fausse pudeur) est une valeur
montante. Le mot est alors remplacé par poitrine, beaucoup plus neutre et également employé pour les hommes (un
soldat blessé à la poitrine). On trouve même l'expression "poumon de maman" employée pour enseigner l'anatomie à
des jeunes enfants à une époque où le mot poumon est très connoté émotionnellement car lié à la tuberculose qui fait
d'immenses ravages. De nos jours on est revenu à la forme standard de la Renaissance française.
Autre exemple : les Plaideurs de Racine mettent en scène le procès burlesque d'un chien accusé d'avoir mangé un
chapon qu'un cuisinier s'apprêtait à rôtir. Des chiots, ses enfants, assistent au procès pour émouvoir le juge qui
constate, en vers, "ils ont pissé partout." A l'époque de Racine ce terme n'est ni grossier ni affecté. Il relève du
langage standard et on le retrouve chez Mme de Sévigné par exemple. Au XIXe siècle, avec la volonté affirmée de
cacher le corps et ses fonctions, le mot devient grossier ; des livres se contentent de l'imprimer sous la forme "p....."
et dans les années 1930 il est conseillé aux professeurs de lire "ils ont sali partout". Même faire pipi n'était pas à dire
sauf à un tout jeune enfant. Il convenait surtout de se taire et éventuellement d'utiliser des périphrases qui insistaient
sur le caractère négligeable de la fonction : petite commission, eau salée en français, dépenser un penny (to spend a
penny) en anglais. De nos jours le mot racinien reste pour le moins populaire et à éviter mais "faire pipi" tout en
étant officiellement familier relève quasiment du langage standard.
Au XIXe le terme virginité lui même était camouflé sous des périphrases comme (pour les filles) petit capital qui
témoigne d'ailleurs tant de la découverte des principes d'accumulation économique que du peu de considération que
l'on nourrissait pour les femmes assimilées à un avoir.
La politique scolaire et universitaire - l'environnement culturel
Depuis la formation des états européens modernes, les programmes scolaires façonnent la langue. Très
centralisatrice, la France a longtemps imposé des programmes détaillés tendant à l'instauration d'une culture
minimale commune à l'ensemble de la collectivité. Selon le contenu de ce programme des expressions naissent,
vivent ou disparaissent. Vous pouvez aisément constater que des expressions tirées des Grands Classiques comme
"avocat passons au déluge" (Racine), "Albe vous a nommé, je ne vous connais plus" (Corneille) ou "Voilà pourquoi
votre fille est muette" (Molière) ne sont plus utilisées de façon courante que par des personnes au bord de la retraite à
moins qu'une tradition familiale - et non un enseignement scolaire standard - ne les ait conservées dans la famille.
Une remarque identique peut être faite à propos d'autre auteurs comme José Maria de Heredia ou Leconte de Lisle
(fin XIXe). Lorsque Alphonse Allais met en scène le couple Timéo Danaos et Dona Ferrentes, tous les lecteurs de
son temps souriaient immédiatement, privilège aujourd'hui réserve aux titulaires d'un master de logique. [La formule
signifie "Je me méfie des Grecs, même lorsqu'ils apportent un cadeau", par allusion au cheval de Troie]. Les
différentes syllabes constituent un moyen mnémotechnique pour se souvenir des principes de la logique d'Aristote
qui ont été les seuls enseignés jusque dans les années 1950 où les travaux menés depuis la fin du XIXe à partir des
algèbres de relation et multivalentes se sont imposés et, surtout, ont été relayés par l'informatique.
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Étymologie de la langue française/Évolution et disparition des mots
La conception des livres pour enfants joue aussi un rôle important. La Révolution française a unifié les structure
juridiques de la France en supprimant les sénéchaux et les baillis et en remplaçant les lieues par les kilomètres ; les
boyard et les voïvodes n'ont pas survécu aux bouleversements de l'Europe de l'Est mais ces personnages continuent
de survivre dans les contes avec la fameuse "bobinette qui cherra" du Chaperon rouge. Au contraire à partir du
moment où, en préférant la simplification à la "couleur historique" les nouvelles éditions évoqueront simplement des
princes ou des seigneurs ou la porte qui s'ouvre, le vocabulaire se perdra rapidement.
L'inflation
Comme la monnaie, les mots se dévaluent à l'usage. L'image initiale s'estompe et doit être renouvelée. Aujourd'hui
nous pouvons être étonnées d'un simple résultat de calcul et vérifier les données ; à la période classique, l'étonné était
celui qui était frappé par le tonnerre (en fait l'éclair). Le sens était vraiment fort ; il était proche d'atterré, d'anéanti. À
l'époque de Littré, l'auteur du Dictionnaire, le sens commençait à s'estomper. On rapporte que Mme Littré étant
rentrée plus tôt que prévu et s'estimant surprise de trouver son mari en galante compagnie aurait obtenu cette réponse
de ce dernier : "surpris c'est nous qui le sommes ; vous, vous êtes étonnée."
Dans le même ordre d'idées, le coup de foudre était initialement un événement désastreux (mort, incendie,
naufrage,...) et ce n'est qu'à l'époque de Stendhal que la formule se spécialise dans le domaine amoureux d'abord pour
caractériser un amour aussi tragique que subit puis abandonne l'aspect tragique pour, aujourd'hui, presque relever du
domaine "moqueur" ou de l'application à des babioles comme dans j'ai eu un coup de foudre pour ce sac à main à 15
euros.
Avant le deuxième guerre mondiale, masochiste et sadique appartenaient strictement au vocabulaire médical
spécialisé. Ils sont ensuite passé dans celui de la littérature puis du journalisme puis du quotidien d'où des phrases du
type "tu es maso de ne pas mettre de la crème sur tes fraises".
A l'origine, merveilleux signifiait "surnaturel", sens conservé dans Alice au pays des Merveilles puis s'est
progressivement atténué au sens d'admirable (une actrice merveilleuse), d'exceptionnel. Les deux sens co-existent en
français moderne : le premier est vieilli, le second courant.
La médiocrité est étymologiquement ce qui se situe au milieu c'est à dire la moyenne mais avec le développement
des Lycées au XIXe siècle et le souci de ne pas blesser les parents... le médiocrité est passé du sens de moyen à celui
de moins que moyen.
Il en est de même de tous les mots familiers. A l'époque de ma grand mère un "je m'en fiche" dans un repas familial
entraînait une sévère réprimande. Aujourd'hui "je m'en fous" n'entraîne guère de blâme. La comparaison de deux
éditions d'un manuel de conversation franco-néerlandais montre que le même mot flamand était traduit en français
par mince il y a quinze ans et par merde aujourd'hui.
Les personnes qui troublent l'ordre public ont été appelées Apaches en 1902 puis sauvageons dans les années 1990
puis racaille. Les Apaches constituaient une tribu indienne passant pour être très violente vis à vis des ennemis
vaincus. Racaille est un très vieux mot normand [1138] venant lui même du latin populaire rasicare (= gratter) lui
même issu de radere (= raser, toujours en latin). Il donne en ancien français un mot rasche qui désigne une teigne
(dont les piqûres démangent comme celles des poux). Appartiennent à la même famille "racler" (une casserole) et la
raclée qu'on a peut être prise, enfant, quand on n'était pas sage.
Les décisions judiciaires
Il existe quelques cas de "condamnation à mort" d'un mot par décision judiciaire. Dans les années 1930, une société
française inventa un produit diffusé sous le nom de soie artificielle. Les producteurs de soie naturelle intentèrent un
procès pour faire cesser cette appellation qui fut interdite. Le produit fut renommé rayon car sa structure rappelait les
rayons d'une toile d'araignée et fut exporté aux U.S.A. sous ce nom qui s'y prononce rayonne. C'est avec cette
prononciation et cette orthographe qu'il rentra en France.
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Étymologie de la langue française/Évolution et disparition des mots
Les modalités de la disparition
La disparition d'un mot peut être lente, par exemple si l'expression initiale n'est plus comprise mais que la formule
paraît drôle (peut être d'autant plus drôle qu'on ne la comprend pas). Voici quatre exemples dont deux assez proches.
• En faire une pendule. Lors de leur apparition, les pendules de tables étaient des objets chers et de grande taille. Il
convenait de les décorer avec art. Le serrurier qui les construisait choisissait donc un "sujet de pendule" pour
illustrer le socle. Il s'agissait souvent d'un sujet historique ou mythologique en rapport avec les goûts, le passé ou
les ambitions du futur propriétaire de l'objet, bref quelque chose d'important et de solennel d'où l'expression qui
signifie : tu ne vas pas m'en faire quelque chose d'aussi important qu'un sujet de pendule. On trouvait encore une
expression similaire jusque dans les années 1960 : cela ferait un beau sujet de pendule pour se moquer de
quelqu'un qui donnait trop d'importance à ce qui lui était arrivé.
• En faire un fromage. On se situe quelques siècles après l'invention des pendules, au XIXe, dans le milieu du
spectacle. Les procédés d'impression des affiches de l'époque faisaient que l'on imprimait les couleurs une à une
sur du papier blanc puis que l'on terminait par l'impression du noir. Pour que les noms des principaux acteurs
ressortent mieux on les imprimait en noir sur fond blanc. Avant l'impression en noir, l'affiche présentait ainsi des
blancs que l'on appelait des réserves dans le langage officiel et fromage (car elles étaient le plus souvent de forme
ronde) dans la pratique. Vouloir en faire un fromage c'est donc vouloir avoir le premier rôle, placer son affaire au
premier plan.
• Coupe sombre. Lorsque les bucherons exploitent la forêt, ils peuvent effectuer soit des coupes limitées (pour
permettre à une nouvelle génération d'arbustes de pousser) soit des coupes plus importantes (par exemple pour
faire passer une route). Dans le premier cas la coupe est sombre car le feuillage global reste suffisamment
important pour empêcher le soleil de venir jusqu'au sol ; dans le second, elle est claire puisque l'absence de
couverture végétale permet aux rayons solaires de frapper le sol. Une coupe importante (par exemple dans le
budget d'un service ou les effectifs d'une entreprise) est donc, techniquement, une coupe claire. Dans les faits on
la dit souvent sombre car l'idée de sombre, de nuit, liée à celle de gravité, de difficulté l'a emporté sur l'aspect
"métier" du bucheron.
• Potasser. Lorsque nous potassons un examen puis un dossier, nous évoquons la révision des premiers wagons de
chemin de fer et de quelques autres machines de la grande époque mécanique. Les premiers wagons faisaient
l'objet de révisions périodiques selon une échelle allant de 1 à 5. Les révisions du premier niveau correspondaient
à l'entretien courant. Au niveau 5, les wagons étaient entièrement débarrassés de tout élément annexe ou
accessoire et plongés dans un bain de potasse pour en sortir parfaitement dégraissés et débarrassés d'oxydations.
Potasser c'est donc procéder à la plus grande révision possible.
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
Étymologie de la langue française/Commentaire d
un mail
Voici un e-mail réellement envoyé, à quelques mots près. Les mots en gras sont ceux qui font l'objet d'un
commentaire.
texte de l'e-mail
Cet après-midi, réunion de cadres : laïus soporifique de Raphaële sur le contrôle interne, mémo de Nadine sur la
Net-Etiquette car Renée a traité Sabine de conne sur sa messagerie, mon topo sur l'apport des nanotechnologies.
Le patron a enchaîné sur l'avenir de l'entreprise.
Mercredi et jeudi, je serai à Zurich pour élaborer la synthèse des travaux de juillet. J'emporterai dans ma valise
trois hauts dont deux sans manches, deux pantalons (le blanc et le kaki), mon combishort avec mes bottines
blanches, un pyjama et mon ours en peluche. Il faudra que je pense à prendre des francs suisses et montre
beaucoup de gentillesse à ma correspondante Samantha qui ne fume plus qu'un paquet de cigarettes par jour.
Bisous. Caresses à mon caniche préféré.
Commentaire
Laïus
Au XVIIIe siècle, on ne demandait pas aux élèves de disserter sur un sujet littéraire ou philosophique comme de nos
jours mais de rédiger le discours (éventuellement intérieur) de personnages historiques ou mythologiques dans des
circonstances bien connues de leur vie (César décidant de franchir le Rubicon, Hannibal se demandant s'il devait
marcher sur Rome après la victoire de Cannes où il avait écrasé les Romains supérieurs en nombre mais mal
commandés, etc.) Lors de la création de l'École Polytechnique, la première composition en français (et non en latin,
ce qui constituait une innovation), en 1804, eut pour sujet Laïus, roi de Thèbes qui avait bien des raisons de
s'interroger sur son sort. Un oracle lui ayant prédit qu'il serait tué par son fils, il décida d'abandonner celui-ci,
Oedipe, dans la montagne, dès sa naissance. Recueilli, le bébé fut élevé à Corinthe. Devenu adulte, il se querella
avec un voyageur et le tua. Ce voyageur se révéla être Laïus. Oedipe, toujours sans le savoir, épousa ensuite sa mère
Jocaste (d'où le complexe d'Oedipe marqué par une dépendance affective excessive d'un fils vis à vis de sa mère).
Pour finir, Jocaste se pendit et Oedipe se creva les yeux puis erra dans le désert guidé par sa fille Antigone.
Soporifique
Qui fait dormir. Sopor est le sommeil en latin. Le suffixe "fique" (ficus en latin) signifie qui fait , qui rend d'où
magnifique (qui rend grand), bénéfique (qui rend bon). Soporifique, attesté dès 1680, a remplacé soporifère (du latin
fero = apporter) soit qui apporte le sommeil, son aîné de deux siècles. Existaient aussi deux termes médicaux :
soporeux (construit sur le modèle de liquoreux) et soporatif (construit sur le modèle de roboratif). Bénéfique,
aujourd'hui employé couramment, a été forgé par Rabelais mais est resté d'un emploi rare jusqu'au XXe siècle. Dans
le champs sémantique du sommeil, to dream, traumen (= rêver, respectivement en anglais et en allemand)et dormir
ont la même origine : un radical indo-européen (dhreugh)signifiant faire illusion, tromper.
Le verbe fero (= porter en latin) est très répandu : fertile (= qui apporte des fruits avec son équivalent allemand
fruchbar). Le f passant à b, l'on rencontre, toujours en allemand, Bahre (la civière) que l'on retrouve en français avec
bard (sorte de brancard sur lequel on portait des graviers, de la terre comme des céréales) qui n'est plus guère
employé de nos jours où des moyens mécaniques de transports l'ont concurrencé mais qui subsiste dans l'expression
"une bardée de", c'est à dire le contenu de tout un bard. Les gens que l'on transporte sur une civière étant blessés,
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
feriti (mot à mot les transportés) signifie, en italien, les blessés comme - avec équivalence du f et du h entre les deux
langues - herridos en espagnol.
Contrôle interne
Il s'agit d'un faux ami anglais car il n'est pas question d'un contrôle au sens policier ou scolaire mais d'une aptitude à
maîtriser sa gestion comme dans le self-control. Mot apparu en 1610, contrôle est la contraction de contre - rôle,
connu dès le XIVe siècle pour désigner un registre tenu en double. Ce sens de "doublure" se retrouve dans le grade
de"contre amiral" qui double l'amiral.
Memo
C'est l'abréviation de memorandum, mot latin passé en français qui signifie "ce dont il faut se souvenir". Un mot
proche est memento, impératif du même verbe latin memini (= se souvenir)et signifiant don "souviens toi". Andum
est la marque d'un gérondif que l'on retrouve dans "agenda" qui signifie "ce qu'il faut faire" ou dans "référendum"
qui désigne ce qui doit être rapporté (referre = rapporter en latin) au choix du peuple. Memini est de la famille de
mens qui signifie l'esprit (d'où l'expression mens sana in corpore sano = un esprit sain dans un corps sain)que l'on
retrouve dans mental (calcul mental).Un dément est un être privé de raison : de/dé est ce que l'on appelle un préfixe
privatif, issu du latin "dis" qui marque une idée de séparation (comme dans disjoint, démembré)que l'on retrouve
dans dépressif (privé d'énergie) et dont le correspondant grec est le préfixe "a" comme dans asexuée (reproduction
sans gamètes), asocial, asepsie (sêpsis = putréfaction en grec) ou asphyxie (sphuxis = palpitation en grec). Monter et
mentir appartiennent aussi à la famille de mens. Un mensonge, pour être crédible, exige une certaine intelligence.
Démontrer, c'est utiliser son cerveau pour établir rationnellement la vérité d'une hypothèse ou, au contraire, établir
qu'elle est sans fondement.
Étiquette
De la même famille que ticket, ce mot est né dans la sphère du droit. L'étiquette était initialement une pancarte fixée
à un pieu auquel on attachait plus particulièrement les sacs contenants les documents d'un procès. Cette pancarte
mentionnait les noms des parties. Les juristes ont été procéduriers de tous temps. Le mot en est ainsi venu à désigner
l'ensemble des règles à respecter pour instruire correctement un procès puis un ensemble de codifications de la vie en
société édictées dès Philippe le Bel mais portées à leur apogée par Louis XIV qui y trouvait un moyen de discipliner
la cour. Par la suite le mot s'est étendu à tout système de convenances sociales.
Con et quelques autres gros mots
Comme les autres, les "gros" mots ont une étymologie. Au cas particulier, le terme désigne initialement le sexe de la
femme comparé à un terrier. En effet, en latin, cuniculus est le lapin qui donne coniglio en italien moderne et
Kaninchen en Allemand (qui n'est pas le caniche) et konijl en néerlandais. En ancien-français on parlait de conil
avant que le mot lapin n'apparaisse au XVe siècle.
La plupart des gros mots ont des origines liées au sexe, aux excréments (et par assimilation, en anglais, au sang
menstruel d'où les bloody day, bloody guy) et, pour les plus anciens, au blasphème.
Leur grossièreté relative est fluctuante. Enfoiré est aujourd'hui imprimé sur des carnets de titres restaurant alors qu'il
figurait dans le top 5 de la grossièreté à l'époque de nos parents. Le français connaît deux mots 'foire' : un latin et un
d'origine franque. Le mot latin est de la famille de férié. Comme on ne travaille pas un jour férié, on en profite pour
aller au marché et le marché des jours fériés est un peu plus fourni ; de là, la notion de foire. Le mot franc signifie
diarrhée. On le retrouve dans l'expression "le projet a foiré" c'est-à-dire "est parti en diarrhée". Lorsque Molière met
en scène les Dr Purgon et Diafoirus tous les spectateurs de l'époque comprennent immédiatement qu'il s'agit des Dr
Purge et Diarrhée. En ce sens, un enfoiré est quelqu'un qui a fait caca-culotte ; à ceci près que le mot inclut la cause
de cet accident : une dilatation du sphincter anal supposée liée à la pratique régulière de la sodomie (entre garçon) à
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
une époque où elle était très réprimée tant par les autorités civiles que religieuses. A la même époque, était
également grossier le mot bougre (aujourd'hui en voie de disparition) qui signifiait Bulgare car l'on prêtait les mêmes
conduites aux habitants de la Bulgarie.
Faire la foire au sens de s'amuser vient de ce que le Moyen-Age n'ayant rien d'une société de consommation, les
foires annuelles ou semestrielles étaient l'occasion de mieux manger qu'à l'ordinaire, de se coucher plus tard et de
dépenser ses maigres économies en plaisirs variés.
Plus intéressants pour l'historien sont les gros mots transitoires issus de circonstances particulières. Par exemple,
lorsqu'au début du XXe siècle un puceron, le phylloxéra (mot à mot : feuille séchée) anéantit quasiment toutes les
vignes du Languedoc qui en constituaient la principale richesse, "phylloxéra" resta quelque temps une interjection de
rage ou de colère. Plus avant dans le temps, la pomme de terre, importée du Nouveau Monde, fut mal accueillie par
la population qui la réservait aux animaux - notamment au porc - et n'en consommait qu'en période de disette alors
que certains agronomes tentaient d'en faire une nourriture de base. La pomme de terre s'appelait alors, par
assimilation à la truffe (puisque toutes les deux poussent dans le sol), tartifle (étymologie conservée dans l'allemand
moderne Kartofel à partir d'une forme originale cartofle). Appliqué à autre chose qu'une pomme de terre, tartifle était
une grossièreté.
Pourquoi le mot lapin a-t-il remplacé le mot conil ? Jusqu'au XVe siècle, il y avait relativement peu de lapins en
France. Au XVe siècle, nos ancêtres connurent une pénurie de gibier et importèrent, pour y remédier, des lapins
d'Espagne où ils étaient nombreux, car les lapins se reproduisent vite et sont faciles à attraper. Avec l'animal, ils
importèrent son appellation ibérique de lapere (d'où lapereau) qui est une déformation de leporis (le lièvre en latin).
Lapere donna vite lapin. Les lapins s'endorment sous les diligences et partent avec elles. De là une vielle expression
"voyager en lapin" pour dire "voyager sans payer". Parfois la fraude se caractérise par un arrangement entre le cocher
et le client ; le lapin est alors le passager ou le colis que le cocher ne déclare pas. Ce passager non déclaré est, en
quelque sorte, inexistant d'où l'expression apparue à la fin du XIXe siècle de poser un lapin, c'est à dire se montrer
inexistant comme un passager clandestin.
Topo
En grec topos c'est le lieu, l'endroit, d'où topographie (description d'un lieu), toponymie (étude des noms de lieux) ou
topologie (étude des propriétés mathématiques d'une figure qu'elles que soient les déformations qui lui sont
progressivement appliquées, comme sur les écrans de veille des ordinateurs). Un croquis topographique est ainsi un
relevé sommaire d'un lieu qui en retrace le plan général et en donne les principaux repères ou caractéristiques (arbre,
pente plus ou moins prononcée, escalier, poteau,...). Par analogie un topo est une présentation succincte d'un sujet
qui en donne un périmètre global ainsi que les principaux traits. La distinction entre laïus, mémo et topo est la
suivante : le laïus est verbeux et ne sert pas à grand chose, le mémo doit déboucher sur une action et le topo informe.
Nanotechnologies
Les nanotechnologies s'attachent à la conception et à la fabrication de structures physiques ou biologiques en se
rapprochant du niveau atomique. Les préfixes qui expriment les multiples et sous-multiples du mètre sont les
suivants:
Pour les multiples, avec leur signification en grec et leur valeur : kilo (mille en grec), giga (géant = 1 milliard), tera
(monstrueux = 1000 milliards), peta (1000 tera) forgé sur le grec "penta" qui signifie 5 car 1 peta s'écrit avec un 1
suivi de cinq groupes de trois zéros : 1 000 000 000 000 000.
Pour les sous-multiples : milli (= 0,001), micro (petit en grec d'où micron, micromètre = 0,000 001)[dimension de la
taille des bactéries], nano (nain en grec) [dimension de la taille des molécules, équivaut à un cheveux divisé en
100.000 dans le sens de la longueur], Angström du nom d'un physicien suédois [niveau de l'atome], pico (de l'italien
piccolo, petit), fento (du danois '15' car c'est l'exposant de la puissance négative de 10) [dimension de la taille des
nucléons : protons et neutrons], atto (du danois '18', exposant de la puissance négative de 10) [dimension de la taille
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
des quarks]. Zepto (10 puissance moins 21) est utilisé en spectrométrie; ce nom a été imaginé par le Comité
International des Poids et Mesures et évoque le grec hepta (7) car la puissance 21 est égale à trois fois 7, soit 7 séries
de trois zéros. Dans la foulée a été forgé yocto qui rappelle octo (8) car il correspond à la puissance 24 soit trois fois
8 ; pour l'instant il n'a encore rien mesuré à ma connaissance.(Abréviations officielles à partir du pico : pm - fm - am
- zm - ym).
A propos des mesures, les marins expriment la vitesse des navires en noeuds car pendant longtemps pour mesurer les
déplacements on laissait filer une corde le long de laquelle on avait fait des noeuds à intervalle régulier et l'on
comptait le nombre de noeuds déroulés par intervalle de temps mesuré avec un sablier ou outil analogue.
Patron
A Rome, le patronus est le défenseur. Le mot dérive de pater, le père, qui donne patrimoine et patrie car un bon père
doit défendre son bien et son pays. Cette idée de protection explique l'expression "saint patron" (sainte Cécile pour
les Musiciens, Sainte Barbe pour les pompiers et les métallurgistes qui ont tous les deux à faire avec le feu).
L'idée de protection se retrouve dans celle de patronage. Initialement le mot désigne l'association de bienfaisance
constituée pour protéger les enfants puis il s'étend aux réalisations de ces associations. Au sens figuré on parle aussi
d'une conférence ou d'une revue éditée sous le patronage d'un chercheur de renommée internationale.
De patron au sens de personne qui commande à des apprentis ou des employés on est passé à l'idée de modèle (le
patron doit être un modèle pour son personnel) d'où le patron utilisé en couture et dans bien d'autres domaines.
Le singe, mot par lequel on désigne parfois le patron, est une trace du compagnonnage dans lequel chaque grade, de
l'apprenti au maître, avait une correspondance animale. Au Maître correspondait le singe, le plus proche de l'homme
et le plus malin.
Avenir
Contraction dès le XVe siècle de la locution "temps à venir" comme
• vinaigre est la contraction de vin aigre,
• charcutier de "chair cuitier" (qui vend de la chair cuite = de la viande cuite)
• tambouille est celle de "pot en bouille",variante régionale pour l'Ouest de la France de pot bouille où pot où l'on
fait bouillir les aliments par opposition aux aliments rôtis. L'opposition sociale entre ces deux types de cuisson a
été fondamentale jusqu'aux Trente Glorieuses : le bouilli étant la nourriture pauvre que l'on consommait soi-même
et le rôti la nourriture riche que l'on offrait à ses invités de marque.
Mercredi et le jours de la semaine
Un radical indo-européen que l'on note habituellement dyeu désigne le ciel bleu et clair. Il donne à la fois le mot jour
(dies en latin), le mot dieu et le nom grec Zeus (principal dieu de l'Olympe). Les mot dies correspond au -di que l'on
retrouve dans les noms des jours de la semaine : lundi ou jour de la lune, mardi ou jour de Mars, Mercredi ou jour de
Mercure, Jeudi ou jour de Jupiter, Vendredi ou jour de Vénus, Samedi ou jour de Saturne. Dimanche est le jour du
Seigneur : dies dominica qui donne diemenche par disparition du second d, passage du 'c' à "ch" et du 'a' à 'e',
évolutions phonétiques habituelles.
L'étymologie est semblable dans la plupart des pays européens où day (anglais), tag (allemand) sont le résultat
d'évolutions phonétiques de dies. Ainsi Monday ou Montag correspondent-ils à Lundi puisque Moon désigne la lune.
Dans Friday et Freitag (vendredi) le nom de Vénus déesse de l'Amour a été remplacé par Frigga, nom de l'épouse du
Dieu Odin (=Wotan, le Soleil, créateur du Monde) et dont la racine indo-européenne Pri qui désigne l'amour
(parallèlement à la racine Wen d'où Vénus), se retrouve dans free, friend (frei et Freund en allemand). Free et frei
signifient libre. Friend et Freund, ami. L'idée directrice est que les gens que l'on aime sont les membres de ma
famille (au sens de l'Antiquité qui est très élargi) et qui leur est permis d'agir librement. Avant de désigner des amis,
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
le mot Friend/Freund désignait d'ailleurs les parents. Dans Thursday et Donnerstag (jeudi), le nom du dieu de
'référence' est celui du tonnerre dans le panthéon germanique (cf. thunder (anglais), Donner (allemand) = le
tonnerre). Toutefois, en allemand, Mittwoch (le mercredi) signifie le 'milieu de la semaine'.
Synthèse
Tithêmi c'est poser en grec. Syn est l'équivalent grec de cum en latin, qui signifie 'avec'. La thèse est l'argument que
l'on propose. L'antithèse est l'argument que l'adversaire oppose, la synthèse l'ensemble des arguments que l'on pose
ensemble soit qu'on les ait puisés pour partie dans la thèse et pour partie dans l'antithèse, comme dans les examens
soit que l'on ait réuni des éléments de différentes branches, par exemple les aspects scientifiques, techniques,
juridiques et financiers d'un projet. La prothèse (dentaire ou mammaire) est ce que l'on pose à la place de l'organe
malade où 'pro' signifie 'à la place de ' comme dans procuration où l'on s'occupe (curo) de quelque chose à la place de
quelqu'un d'autre. La métathèse est un changement de position d'une lettre à l'intérieur d'un mot (= une lettre que l'on
pose ailleurs) comme le font les personnes qui déplacent le 'r' d'infarctus en disant infractus et comme l'on fait nos
ancêtres en passant du formage ou fromage (production laitière qui se caractérisait par l'usage d'une forme). La
justice étant ce qui pose les règles de vie en société, sa déesse est Thèmis, nom conservé par une collection de
manuels de base pour les étudiantes en droit.
Thèque est l'endroit où l'on pose et plus particulièrement le coffre d'où :
• bibliothèque = coffre à livres puis meuble puis rayonnages puis salle de consultation puis l'ensemble du bâtiment
voire des bâtiments comme dans la Très Grande Bibliothèque
• discothèque où l'on rangeait les disques de vinyle puis où on les écoute puis où on danse sur leur musique
• pinacothèque :Musée de peinture, de pinax = tableau en grec.
Apothèque, en grec, est l'endroit où l'on pose pour échanger c'est à dire le magasin. Le mot donne apothicaire qui
s'est spécialisé dans le sens de pharmacien (dont le nom moderne reste Apotek en allemand) car c'est l'une des
professions qui détenait le plus de stocks de produits différents. Le mot initial, mal prononcé par des générations de
clients et de vendeurs, a donné bottega en italien (d'où boutique en français) et bodega en espagnol.
Syn (= avec, ensemble) est également présent dans nombre de mots européens :
• la sympathie est ce que l'on exprime quant on partage les souffrances (= pathos d'où pathétique) de quelqu'un
donc lorsque l'on souffre avec elle
• synchroniser deux choses c'est faire qu'elles se produisent ensemble (chronos = le temps)
• la syncope (mot à mot maladie avec arrêt) caractérise un arrêt cardiaque
• symbole est ce que l'on envoie avec. Initialement le symbole était l'équivalent de nos ID et mots de passe. Un
texte était gravé sur une plaque de bois ou de terre cuite qui était cassée en deux. Chaque signataire emportait la
moitié du texte. Pour rétablir le texte complet il fallait rapprocher les deux morceaux. Le procédait prévenait ainsi
les falsifications et les usurpations. Par la suite le mot a désignait tout ce qui était lié comme les deux parties du
morceau de bois ou de la tablette : le lion est le symbole du roi car dans tous les textes de notre culture il est
associé au roi.
Élaborer - Travail
En latin, le travail se dit labor. Ce mot est à l'origine de labour, laboureur, laborantin, laboratoire, labeur,
collaborateur, laborieux et élaboré. Initialement tout travailleur, autre qu'artisan, avait de fortes chances d'être un
laboureur mais comme la société était essentiellement agricole, le mot s'est spécialisé dans le sens actuel.
Le laboratoire est le lieu où l'on travaille ; le mot s'est également spécialisé dans les domaines techniques et
scientifiques mais il désigne encore quelques lieux de travail non nécessairement humains comme la chambre d'un
fourneau où la matière se transforme. La référence à une hygiène parfaite dans les laboratoires pharmaceutiques a
conduit, ces dernières années, à appeler laboratoires les cuisines de restaurants ou de traiteurs manipulant des
produits alimentaires sensibles à des risques de contamination. Le mot laborantin puise à la même source mais n'est
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
entré dans la langue française qu'au XXe siècle par emprunt à l'allemand d'où sa terminaison en tin qui caractérise les
professions en allemand alors que le français utilise plutôt "ier / eur" (instituteur, épicier, chausseur, vendeur,
cordonnier, pâtissier,...)
De même si labeur ne désigne plus aujourd'hui qu'un travail pénible et long, il avait autrefois un sens plus large. Le
secteur de l'imprimerie insiste sur ce caractère de pénibilité en distinguant les travaux de labeur (impression
d'ouvrages ou d'imprimés en un grand nombre d'exemplaires pour les Administrations) et les travaux dits 'de ville',
en petites séries et sans difficultés majeures également appelés bibelots voir bilboquets pour souligner leur 'légèreté'.
Laborieux a caractérisé le travail (très fatiguant) deux siècles avant de qualifier le travailleur susceptible de fournir
l'effort correspondant. Le premier sens est encore présent dans l'expression familière 'c'est laborieux !'. Un style
laborieux est un style embarrassé au travers duquel on sent que l'auteur a éprouvé des difficultés pour exposer ses
idées.
Elaboré est la résultante du travail (mot à mot : ce qui sort du travail : ex labore en latin). L'idée contenue dans cet
'ex' est celle d'un processus lent, réfléchi, non immédiat que l'on retrouve dans des expressions comme 'une coiffure
compliquée' ou 'une cuisine élaborée' qui peut utiliser une sauce 'élaborée' qui, elle, n'est pas nécessairement
compliquée à faire mais emploie des substances qui vont mettre du temps à se mélanger intimement.
Travail est une métaphore. Palus est le poteau ou le pieu en latin. Pour entraver les animaux, les maréchaux - ferrants
avaient imaginé un dispositif constitué de tris pieux montés en faisceau ou tripalium (= trois pieux). La souffrance
des animaux (le fer est porté au rouge avant d'être rivé sur le sabot et les maréchaux-ferrants marquaient aussi le
bétail par une brulure au fer rouge) fait que, par comparaison, on a aussi parlé de travail au sens de supplice ou de
torture pour les hommes. Le sens de douleur importante est encore présent dans "le travail de l'accouchement". Il en
est de même de l'expression "ça me travaille" en parlant d'un problème ou d'une situation qui revient sans cesse à
l'esprit. Par analogie on dit aussi que l'on travaille quelque chose lorsqu'on la malaxe comme l'argile en poterie ou la
pâte en cuisine.
Travail fait au pluriel travaux comme cheval fait chevaux alors que chacal fait chacals. A l'origine, travail (ou
cheval) faisait travails (chevals) au pluriel comme tous les autres mots de la langue française. Cependant les copistes,
pour gagner du temps, utilisaient des ligatures, c'est à dire, pour simplifier, des signes destinés à remplacer des
syllabes ou des groupes de lettres. Un de ces signes qui correspondait à "ls" ressemblait à un x. Mal compris il
entraina le pluriel travax, chevax. Phonétiquement la syllabe "ax" est instable et passe à "aux" d'où les travaux et les
chevaux. Lorsque au XVIe siècle on se rendit compte de l'erreur on se garda de l'appliquer aux noms des "nouveaux"
animaux que l'on découvrait comme le chacal entré en France et en français vers 1646.
En grec, le travail se dit ergon que l'on retrouve dans
• ergonomie (= la loi du travail) ensemble des règles qui permettent de travailler en minimisant l'effort - physique
ou mental - du travailleur
• ergothérapie (traitement par le travail).
En grec un atelier s'appelait ergastêrion, mot repris par les Romains pour désigner une ... prison. Toujours en grec,
allos c'est l'autre d'où l'allergie qui est le 'travail que fait l'autre' : en effet l'allergie est l'ensemble des réactions d'un
organisme en présence d'un agent pathogène avec lequel ila déjà été mis en contact et qui l'a déjà 'travaillé'.
Latin (laVOR) et grec (ERG)comme anglais et allemand (work et werk) ont un radical indo-européen commun :
werg qui signifie lui même travailler.
Trimer et turbiner sont deux mots familiers qui rappellent deux fleurons de l'expansion économique française de
jadis : le textile et la métallurgie. La trime est un élément du métier à tisser qui ne cesse d'être en mouvement, la
turbine (d'où turbo) tourne très vite d'où le passage à la description d'une activité soutenue.
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
Juillet
Juillet est le mois de Jules (César) qui, au demeurant, réforma le calendrier en usage jusque là en créant un calendrier
fondé sur une année solaire de 365,25 jours et dénommé de ce fait 'calendrier julien'.
Le nom de Jules César est à l'origine de nombreuses légendes :
• pour les uns, son nom viendrait de ce qu'il serait né par césarienne (de caedo, couper) mais cette hypothèse peu
vraisemblable n'est pas confirmée par les historiens latins ; inversement, c'est cette légende qui fait que nous
parlons de césarienne,
• pour d'autres, César tirerait son nom d'un de ses ancêtres qui, au péril de sa vie et témoignant d'une force hors du
commun, aurait tranché la patte d'un malheureux éléphant enrôlé par les troupes carthaginoises contre Rome car
Kesar désigne l'éléphant en punique.
Ce qui est certain c'est que le titre de César au sens d'Empereur s'est répandu dans toute l'Europe puisqu'on le
retrouve dans l'allemand Kaiser ou le russe Tzar.
Août est le mois d'Auguste, le nom pris par Octave, le fils adoptif de Jules César. Auguste a pour racine un mot
indo-européen qui traduit une idée de croissance que l'on retrouve dans auteur, auxiliaire (un moteur auxiliaire
renforce le principal), autorité (un projet mené avec autorité se développe plus vite qu'un projet non dirigé), autoriser
(la personne autorisée dispose d'un pouvoir accru) et, bien sûr, augmenter.
Valise
Comme toute science, l'étymologie a ses limites. l'origine de certains mots reste inconnue (indication 'o.i.' dans les
dictionnaires) ; pour d'autres, seules des hypothèses peuvent être bâties. Ainsi en est-il de valise, emprunté à l'italien
valiglia en 1560 et que certains rapprochent de l'arabe walïha (sac de blé). Initialement, il s'agissait d'un long sac de
cuir que l'on transportait sur la croupe des chevaux. L'aspect que nous connaissons depuis le dernier tiers du XIXe
n'est que l'aboutissement de transformations.
Sac a une origine qui n'est pas indo-européenne mais sémitique, d'une langue que l'on parlait en Cilicie (Turquie)
avant la conquête grecque et à laquelle les Grecs empruntèrent le mot. Initialement, il s'agissait d'une étoffe
grossière. Le premier sac a donc été désigné par la nature de son tissu. Par la suite, le mot s'est centré sur l'idée de
contenant et sur sa forme.
On retrouve ce mot, bien plus au Nord, dans l'allemand Sakman (= homme de sac) pour désigner le sac d'une ville où
les soldats triomphants emportent le maximum de richesses dans des sacs.
Après avoir empli un sac on en ressort le contenant. S'il est mal rangé ou trop rempli, il faut parfois tirer pour obtenir
l'objet désiré comme c'est parfois le cas dans nos sacs à mains. L'action de retirer un objet d'un sac c'est, en espagnol,
le sacar qui va donner, en français, saccade et saccader qui insistent sur les efforts à fournir pour extraire l'objet
recherché. L'idée de tirer violemment donne aussi un verbe 'sachier' puis 'saquier' qui signifie précisément 'tirer
violemment' et qui connaîtra différentes prononciations selon les provinces, surtout au Nord de la Loire. Sacquer
quelqu'un, expression familière de la fin du XIXe siècle, est probablement un mixte de cette violence et de l'image de
l'ouvrier licencié qui reprend son sac pour partir. Initialement, l'expression signifiait uniquement "licencier" puis
l'idée de mésentente l'a emporté, d'où la multiplicité des situations où deux personnes (voire deux chiens) ne peuvent
pas se sacquer.
Au Moyen - Age, les malfaiteurs étaient soit enfermés dans des sacs soit pendus. Un 'homme de sac et de cordre"
était donc un malfrat ; parfois l'aspect aventureux du gredin l'emportait sur l'aspect immoral et l'expression en vint à
désigner quelqu'un prêt à tout.
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
Manche
Au Moyen-Age où le tissu coûtait cher, on avait observé que les manches se salissaient (et s'usaient) plus vite que le
reste du vêtement. On les fit donc amovibles pour pouvoir les changer sans remplacer l'habit dans son entier. Les
artisans donnaient ainsi des manches en cadeau à leurs ouvriers d'où l'expression française 'faire la manche'
(demander quelque chose comme l'ouvrier qui sollicitait une nouvelle paire de manches) ou le mot italien moderne
'macia' qui signifie officiellement 'pourboire'.
Au XIXème siècle, les fonctionnaires et les employés aux écritures usaient encore leurs manches sur les bureaux. Ils
les protégeaient donc par des "sur - manches" en lustrine qui étaient régulièrement brocardées par les chansonniers.
Comme ils étaient également fort sédentaires et que la nourriture n'était pas équilibrée, il craignaient les hémorroïdes
et s'en protégeaient en plaçant sur leur siège une espèce de mince bouée de cuir qui évitait une pression trop
importante propice à la formation de stases veineuses. Ce peu glorieux accessoire leur valut le nom de ronds de cuir,
encore utilisé de nos jours dans le langage familier.
Pantalon
Les mots qui désignent les vêtements sont de ceux qui changent le plus rapidement. Jupe est ancien mais n'a pas
toujours décrit la même chose. Emprunté à l'arabe (djubba) au XIIe siècle, le mot désigne initialement un long
vêtement de laine que portent garçons et filles sous les vêtements de dessus. Jupon apparaît en 1319 et conserve
encore ce sens de vêtement de dessous en français moderne. Jupe-culotte date de 1935, jupette de 1952 et mini-jupe
des années 1970. L'idée d'un vêtement qui va de la taille à une certaine distance du sol a d'abord été reprise par les
ingénieurs pour désigner le carénage en tôle ajouté au bas des wagons pour améliorer leur aérodynamisme puis par
l'industrie automobile pour l'appliquer aux voitures. Les tôliers se sont, quant à eux, inspirés de l'aspect globalement
cylindrique du vêtement pour désigner par jupe la partie cylindrique des cuves.
Pantalon est le nom d'un vieillard de la commedia dell'arte italienne vêtu à la mode vénitienne de l'époque, c'est à
dire d'un habit unique couvrant tant le torse que les jambes. Les premiers pantalons, composés d'un haut de chausse
étroit lié aux bas, rappelaient cet habit et prirent le nom du personnage.
Tout le monde sait que short veut dire court en anglais et qu'il s'agit donc d'un raccourci et même, à l'origine, le plus
souvent purement et simplement coupé. Bien que associé au tennis chez la plupart des locuteurs d'aujourd'hui, c'est
le sport où il est apparu en dernier. Dès la seconde moitié du XIXe siècle, les boxeurs ou les rugbymen portaient des
shorts qui ressemblaient globalement à ceux que portent ces sportifs aujourd'hui. Les footballeurs l'adoptèrent autour
de 1900. Le tennis ayant l'Angleterre pour patrie et l'Angleterre Mary pour reine, celle-ci assistait aux principaux
tournois mais comme elle s'offusquait à la vue du moindre pouce carré de peau nue ce ne fut qu'en 1933 qu'un
premier joueur eût le courage de se présenter ainsi sur les courts devant la Cour. A la fin des années 1950 on trouvait
encore quelques joueurs qui n'avaient pas adopté le short. Mini-short date des années 1970, micro-short est un mot
du XXIe siècle et combi-short se situe entre les deux (vers 1990) par contraction de combinaison (au sens de
combinaison de plongée ou de garagiste) et de short.
Combinaison a pour origine le latin combinare (=assembler deux, puis plusieurs, éléments). Combiner un plan c'est
organiser des éléments d'une façon efficace. Le mot était neutre à ses origines (le duc a combiné un plan de bataille);
un bon plan comportant toutefois une part de ruse, le mot prit au fil des temps un sens péjoratif d'où une combine et
un combinard. En russe, les combinats sont des industries qui associent plusieurs secteurs d'activité, si possible en
synergie. A propos des co-générateurs nucléaires (réacteurs produisant à la fois de l'électricité et de la chaleur pour
l'industrie chimique par exemple) on parle de production combinée. Le combiné téléphonique des vieux appareils
fixes associait l'émission et la réception de la voix d'où son nom. Associant un haut et un bas, la combinaison - dont
les ventes diminuent ce qui risque d'entraîner une 'mise à la retraite' du mot - justifie son nom.
Pull over est le mode d'emploi : on le tire (pull) par dessus (over) la tête. L'étymologie de chandail tient de la facétie.
A une époque où la publicité lumineuse n'existait pas, les marchands des foires hurlaient le nom de leurs produits :
marchand d'ail, marchand d'huile, marchand d'eau, souvent abrégés en "chand d'ail", "chand d'eau",.... L'épais
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
vêtement qu'ils portaient a donc été appelé d'après leur cri. A noter qu'à l'époque l'ail constituait un produit beaucoup
plus important que de nos jours.
La ceinture est ce qui ceint (= entoure, du verbe ceindre) comme les enceintes autrefois et les boulevards de ceinture
de nos jours entourent les villes. Ceindre n'est plus guère utilisé aujourd'hui que pour les rois (ceindre la couronne),
les maires (l'écharpe tricolore) et les Académiciens (l'épée dont le fourreau est cousu sur une sorte de ceinture).
En italien, le string se nomme perizoma où zoma vient de zone, mot grec pour ceinture. En géométrie, une zone est
une surface allongée comme une ceinture puis, par extension, toute sorte de surface. La zone industrielle est la partie
qui entoure la ville.
Bottines
L'origine du mot 'bottes' est incertaine.
Pyjamas
Pyjamas est apparu dans le 'Journal des jeunes personnes' de 1837 avec l'orthographe pyjaamah via l'anglais
pyjamas. Le mot est d'origine hindî pae-jama où pae = de jambes et jama = vêtement. Il s'agit initialement d'un
vêtement ample et bouffant mais qui ne se porte pas spécialement la nuit.
Ours
L'ours en peluche est né d'une belle histoire. En 1897, Théodore Roosevelt, président des États-Unis, participait à
une chasse comme cela se faisait à l'époque où les ours constituaient une menace encore réelle pour les habitants de
certains états de l'Union. Au cours de cette chasse, il épargna un jeune ourson. La presse s'empara de ce fait divers
qui témoignait d'une grande sensibilité pour son temps et des artisans mirent sur le marché des petits ours en peluche
qui illustraient cet événement. En anglais, ours en peluche se dit aussi teddy boy ou teddy bear où teddy est le
diminutif de Théodore.
Ours est à l'origine d'oursin que l'on appelait au XVIe siècle orsin de mar (= ours de mer). Ce fut une question
théologique et scientifique majeure du XVIe au XVIIIe siècle de savoir si les animaux marins étaient spécifiques ou
s'ils étaient la transcription des animaux terrestres. Cette seconde hypothèse prévalait et les savants recherchaient une
analogie entre les êtres terrestres et marins dont il reste des traces dans le vocabulaire comme :
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le lion de mer
l'araignée de mer (un crabe)
le marsouin, déformation de maris suin c'est à dire cochon de mer
l'otarie, soit également ours marin (l'otarie rappelle l'ours par sa masse, l'oursin par son aspect revêche)
la langouste, c'est à dire sauterelle de mer. Langouste vient du latin locusta qui désigne la sauterelle et le mot
langouste désigne cet insecte jusqu'au XIIIe siècle. Par la suite le mot provençal sauterelle (exactement salterele)
qui le concurrençait depuis 1120, le remplaça pour l'insecte terrestre car il était plus imagé ; langouste se
spécialisa alors pour l'espèce marine.
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Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail
Blanc - Kaki
Les indo-européens connaissent trois couleurs : le blanc, le rouge et le noir. Pour chacune d'elles, leur vocabulaire
distinguait de nombreuses nuances en fonction de leur intensité et de leur brillance. Pour le blanc, les Romains
utilisaient les mots 'albus' (blanc mat) et 'candidus' (blanc brillant).
Albus reste présent dans de nombreux mots français :
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aube (la blancheur du ciel lorsque le soleil se lève), aubépine (l'arbuste aux épines blanches).
aube, la tunique blanche des communiantes
l'ablette : la petite able ou poisson blanc
l'albumine protéine essentielle du blanc d'oeuf dont la désignation officielle est albumen (au XVIe siècle, on
appelait encore 'aubin' le blanc d'oeufs dans la langue courante).
• albinos et albinisme. Est qualifié d'albinos un animal au pelage blanc et aux yeux bleus très clairs du fait d'une
altération génétique qui se traduit par l'absence de mélanine. Ces animaux voient très mal. À son apparition, en
portugais en 1665, le mot s'appliquait aux hommes et, plus particulièrement, à une tribu africaine de Noirs blancs.
• le mot de la famille le plus fréquemment employé aujourd'hui est album, d'illustre naissance puisqu'il s'agissait à
l'origine d'une sorte de tableau blanc où l'on inscrivait le nom des grands personnages de l'État (romain). La
notion se perdit puis des érudits allemands, à la charnière des XVII et XVIIIe siècles la ressuscitèrent en créant un
album amicorum où ils demandaient à leurs amis d'écrire quelques mots (c'était l'ancêtre de ce que nous appelons
un livre d'or). Par la suite, l'usage du support s'élargit aux notes de voyage (= carnet de voyage) puis se généralisa
à bien d'autres activités avant de désigner le support indépendamment du contenu d'où un album philatéliste (pour
les collections de timbres poste), un album photo...
• passé en russe, le radical y donna biely d'où bieluha introduit en 1575 en français pour désigner un poisson sous la
forme béluga puis, en 1775, un dauphin etplus particulièrement un grand dauphin blanc (l'orthographe bélouga est
recommandée).
Le descendant français d'albus fut rapidement remplacé par le francique blank qui désignait originellement le blanc
brillant que les Romains dénommaient candidus, issu d'une racine indo-européenne "cand" signifiant "brûler" et plus
particulièrement "chauffer à blanc un métal pour le forger". Cette idée de brillance (une ampoule électrique classique
chauffe à blanc le filament) aboutit à des blancheurs concrètes ou symboliques :
• chandelle (cierge vient, quant à lui, de cera la cire que l'on retrouve dans cérumen, sécrétion de l'oreille externe),
• encens (mot à mot : chose allumée qui brille). A noter, à propos de ce mot, l'expression 'encenser' en parlant d'un
cheval qui remue sa tête de bas en haut comme l'enfant de choeur qui secoue l'encensoir.
• candeur, blancheur éclatante et symbole de pureté d'où le candidat qui se doit d'être moralement parfait (les
candidats aux fonctions électives romaines devaient d'ailleurs s'y présenter vêtus de blanc et cette pureté allait très
loin puisque ne pouvait y participer un citoyen qui avait été "souillé" par la mort d'un proche parent dans l'année).
• canitie : c'est le fait d'avoir des cheveux blancs.
• incendie est de la même famille.
Kaki. Le fruit a une couleur qui rappelle le kaki. Pourtant les deux mots n'entretiennent aucune parenté. Le fruit est
d'origine japonaise : il fut importé en 1873, en même temps que le mot qui signifie "plante" en japonais. La couleur
apparut 25 ans plus tard en français ; le mot est hindî et signifie "poussière". Les hommes de l'armée anglaise des
Indes furent les premiers à porter un uniforme de cette teinte qui s'est d'abord écrit khakee en anglais.
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Pied
Le mot latin pes / pedis a donné pied en français, foot en anglais et Fuss en allemand. Dans les premières années, les
officiers ne se distinguaient pas tant par leurs capacités stratégiques que par la possession d'un cheval. On distinguait
ainsi les cavaliers et les piétons (= les fantassins qui vont à pieds) qui constituaient le gros des troupes, mal payées et
intermittentes (souvent on ne se battait pas en hiver et les soldats n'étaient pas payés pendant cette période de
chômage forcé). Les piétons formaient la piétaille. Le mot se transforma en peon puis en pion (d'où le pion du jeu
d'échec qui a moins de valeur que les pièces) et le morpion (= un pou qui mord les pions dont les conditions de vie
ne facilitaient pas l'hygiène). Quant au péage, il représente la taxe que les piétons devaient payer pour employer un
pont et éviter de franchir la rivière à gué (les chars devaient aussi payer le péage mais ils étaient bien moins
nombreux).
Franc et autres monnaies ou termes associés
Lors des premières transactions commerciales, la contrepartie était constituée par du bétail, pecus en latin qui reste
présent dans le français pécuniaire. Les Indous utilisent, de la même façon, la roupie qui trouve sa source dans rupâ,
le troupeau.
Vers 400 avant J.C., les Romains imaginèrent un système d'échange plus simple à base de morceaux de bronze. En
latin, bronze se dit aes d'où les as (monnaie que l'on rencontre au hasard des films peplum) et l'airain (vieux mot pour
bronze qui est un alliage de cuivre et d'étain).
L'Antiquité classique connaissait déjà la dévaluation en ce sens que le poids de métal de chaque pièce diminuait
lentement. Constantin, entre 311 et 313 mit en oeuvre un premier contrôle des prix en fixant par décret le prix de
quasiment tous les biens et services en usage dans l'empire. En parallèle, il décida une nouvelle dévaluation, en
fondant 72 pièces au lieu de 60 avec la même quantité d'or mais en affirmant que ce serait la dernière et que la
monnaie serait désormais stable. Stable se dit solidus en latin d'où le mot sou, après un passage par sol. Le franc est
né de la même idée : une monnaie franche (au sens de constante).
Le florin qui fut une monnaie forte de l'Europe du XIII au XVIème siècle doit son nom à la fleur de lys qui le
distinguait des autres monnaies et rappelait ses origines florentines (la fleur de lys est le symbole de Florence). Le
commerce du textile avec le Nord fait, qu'avant l'euro, les Hollandais utilisaient le florin et que les Hongrois
emploient toujours le florint. Le zloty polonais a aussi cette filiation.
La livre (comme la lire) est une unité de poids : c'est celle qui sert de référence pour le découpage des pièces de plus
petite valeur et c'est elle qui explique la monnaie anglaise (et d'autres pays du Commonwealth) comme de l'Italie
avant l'euro.
Le thaler était une monnaie allemande forgée à partir de l'argent extrait des mines de Joachimsthale (aujourd'hui en
République Tchèque). Frappé dès 1518, il fut très apprécié dans la seconde partie du XVIIIème siècle et devint la
monnaie des U.S.A. sous le nom de dollar. Lorsqu'il se prononça sur la langue nationale à retenir, le nouveau peuple
américain était divisé entre tenants de l'anglais et tenants de l'allemand ; les premiers ne l'emportèrent que d'une voix.
Quant au rouble, il signifie haché en russe, les premières pièces ayant été découpées à la hache dans des lingots de
métal précieux. Enfin, le leu (unité monétaire de la Roumanie jusqu'en 2012 où ce pays 'migrera' à l'euro) vient de ce
que les premières pièces représentaient un lion (leu en roumain).
Le mot soldat vient de la solde qui le rémunère c'est à dire des sols (sous) qui lui sont donnés. Les fonctionnaires
civils perçoivent un traitement, les artistes un cachet : au XVIIIe siècle les professeurs, essentiellement de
professions dites aujourd'hui artistiques, étaient déjà payés à la leçon ; ils avaient une carte sur laquelle les élèves, en
appliquant leur cachet, attestaient de la réalité du cour et s'engageaient à les payer.
Initialement le bénéfice (de bien et faire donc faire du bien) était une faveur que l'on accordait à quelqu'un. Ce sens
demeure en français moderne dans des expressions comme 'le bénéfice du doute' ou 'des circonstances atténuantes'.
Ce fut ensuite une faveur très concrète sous forme d'une concession de terres accordée par le roi ou un seigneur puis,
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par glissement de sens, le patrimoine attaché à une fonction ecclésiastique. A partir du XVIIème siècle, avec le
développement du commerce, le bénéfice désigna le gain tiré d'une opération commerciale ou financière, d'où le sens
actuel.
Le revenu est, comme l'indique le mot, ce qui revient. Initialement le terme ne s'appliquait qu'aux revenus agricoles
puisque les fruits, les céréales ou les bébés des animaux domestiques reviennent tous les ans, puis il y eut extension
aux loyers - appelés d'ailleurs fruits du produit loué - puis extension à toute source financière qui paraît constante
dans le temps comme les salaires ou les retraites (impôt sur le revenu).
Le mot salaire vient de sel. Le sel est indispensable à la vie (et à la conservation des aliments). Aujourd'hui grâce à
nos moyens de transport c'est un produit très peu coûteux. Il en était différemment à une époque où il fallait le
transporter sur des chariots tractés par des boeufs depuis des marais salants ou des mines jusque sur les lieux de
consommation. Une des principales voies romaines (de Rome à Brindisi) s'appelait d'ailleurs, mot à mot, la voie du
sel car elle servait au précieux approvisionnement de la capitale.
L'expression de mauvais aloi est d'origine monétaire. La plupart des pièces a toujours été fait d'alliage (alloy en
ancien français comme en anglais) et il était tentant de tricher sur les quantités respectives de métal noble et de métal
vil. La fausse monnaie était au demeurant un des crimes les plus sévèrement punis au Moyen Age avec dans les cas
les plus grave immersion du contrevenant dans un baquet d'eau bouillante.
Le mot monnaie vient du lieu de frappe des premières pièces romaines proche du temple de Juno Moneta c'est à dire
Junon (l'épouse légitime de Jupiter) l'Avertisseuse. Monéo se retrouve dans moniteur (celui qui avertit l'apprentie de
ce qu'il faut faire ou ne pas faire).
Patraque, mot familier en désuétude (sauf dans le Sud-Est)pour désigner un état de mal être physique a une histoire
très liée à l'argent : un mot arabe (bâ-tâqua) a été introduit en espagnol sous la forme pataco, abrégée en patac, pour
désigner une pièce d'argent qui était souvent altérée d'où patard puis patraco en provençal et patraque en français
pour désigner une monnaie usée ou plus ou moins faussée et, par analogie, un état de mal-être.
Argent est un terme générique car s'il y eut des pièces en bien des matières (par exemple en cuir chez les
Carthaginois) et même si, parfois, la pénurie de métal conduisit à utiliser d'autres suports pour monnayer les
échanges (comme les grains de poivre), l'argent est resté le métal le plus prisé, après l'or, pour les monnaies
d'importance.
Gentil - Débonnaire - Ingénu - Méchant
Gens est un mot latin très prolifique. Il désigne la famille au sens large et, plus précisément, la lignée noble. Ainsi est
gentil quelqu'un de bien né, de bonne famille, d'illustre naissance comme on disait autrefois. Un 'gentil homme' est
un noble et le titre de Molière "le bourgeois gentilhomme" était bien compris comme une incompatibilité par la Cour
de Versailles. De l'idée de noblesse on passe à celle de justice, de hauteur de vue, de magnanimité, de pardon et de
clémence (les vertus, au moins théoriques, du prince). De cette dernière idée on glisse à celle de gentillesse au sens
actuel. On remarquera que 'être gentille avec' est une des rares expressions actuelles qui n'a pas le même sens selon
qu'elle a pour objet une fille ou un garçon.
Débonnaire a une histoire curieuse. À l'origine, il y a le mot aire (= surface) que l'on retrouve dans l'aire
géométrique. Un faucon de bonne aire était un faucon qui "régnait" sur une grande surface. Par analogie un seigneur
de bonne aire était un seigneur de qualité et donc vertueux puis il y eut une évolution semblable à celle de gentil.
Un ingénu c'est aussi, initialement, celui qui est né libre. Cette naissance libre l'empêche de nuire, de faire du mal
(c'est le deuxième sens) mais cette incapacité à faire le mal a été perçue comme le signe d'une certaine niaiserie (c'est
le sens actuel)... les gens sont méchants...
Quant au méchant c'est initialement celui qui a de la malchance (XIIe siècle). Malchanceux il devient miséreux.
Misérable, il est prêt à tout pour survivre et devient 'enclin à faire du mal' (XIVe siècle) puis le mot a acquis son sens
actuel.
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Cigarette
Cigaro est un mot espagnol d'origine inconnue né vers 1680 qui ne se répandit en France qu'après les expéditions
militaires françaises en Espagne de 1823 et ce sous trois formes : cigarette, cigareto et cigaret. Ces trois mots se
firent une âpre concurrence de 1830 à 1840 où cigarette l'emporta définitivement sur ses deux rivaux.
Les différents noms familiers ou populaires donnés à la cigarette illustrent les différents modes de création
lexicologique.
Cibiche : c'est un jeu phonétique populaire classique du style "Cool Raoul" avec recherche d'assonance
Pipe de 9 ou Tube de 9 : c'est la marque de la France industrielle où la cigarette est comparée à un outil (la pipe est
ici la clef recourbée des garagistes) de 9 millimètres de diamètre (le diamètre standard des cigarettes)
Une séche. Les premières cigarettes étaient confectionnées par les fumeurs eux-mêmes en roulant du tabac dans une
feuille de papier à cigarette qu'ils léchaient pour la coller sur elle-même. La cigarette était donc 'mouillée' de salive.
Par opposition, une cigarette industrielle était sèche.
Caresse
Carus, en latin, signifiait cher avec le même double sens affectif et financier qu'a ce mot en français, d'où les
enchères où l'objet de la vente revient à celui qui le paie le plus cher. En italien, carus a donné caro de même sens et
un verbe carezzare qui signifiait chérir mais désignait aussi les gestes de tendresse correspondants et, plus
particulièrement les caresses. Le substantif latin correspondant à l'adjectif carus est caritas qui a donné charité, le
prochain devant être cher au cœur du chrétien.
Caniche - Fox - Teckel - Epagneul - Berger allemand
Caniche vient de cane, les caniches étant jadis dressés pour ramener sur le bord des étangs les canards tués ou blessés
par les chasseurs. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle on les tondaient partiellement afin qu'ils ne risquent pas de
se noyer sous l'effet de l'eau que leur fourrure absorbe comme une éponge.
Plusieurs noms de races de chiens sont liés à l'espèce qu'ils chassaient avec le plus de succès. Ainsi le fox est-il un
chien pour la chasse au renard (fox en anglais) et le teckel pour la chasse au blaireau (Dachs en allemand, avec la
correspondance habituelle entre le d et le t). Le schnauzer est un mot suisse-allemand qui désigne les moustaches,
caractéristique de ce chien. Ces deux derniers mots sont entrés dans la langue française au XXème siècle seulement.
L'épagneul est un chien de chasse introduit d'Espagne. Quant au berger allemand il doit son nom à ce qu'un officier
allemand ait été le premier à en entreprendre le dressage ; à sa mort, tout son élevage fut conduit sur sa tombe et tous
les chiens aboyèrent ensemble pendant une minute (de silence).
Préféré et autres dérivés du verbe latin fero
Avec préféré on retrouve le verbe fero (= porter) qui donne entre autres :
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•
avec ad (vers) = afférents : les vaisseaux afférents apportent le sang aux muscles
avec cum (avec) = conférence : se porter ensemble en un même lieu
avec de (en dehors) = déferrer (devant le juge) mais aussi déférence ou attention en dehors (au delà) du commun
avec prae (mettre devant) = préféré
avec pro (mettre en avant) = proférer (dans proférer une injure l'image est que l'on jette violemment l'injure sur
l'adversaire comme un javelot)
• avec sub (sous) = souffir c'est à dire porter une charge bien lourde sur ses épaules
et aussi
• conifères ou arbres qui portent des fruits en forme de cônes
• aurifère : qui contient (porte) de l'or.
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Enfin puisque le voleur emPORTE les bien qu'il dérobe le vol se disait furtum en latin, mot dont il reste une trace
dans le français furtif (qui se fait à la dérobée).
Généralité des mécanismes illustrés ci-dessus
L'ensemble des mécanismes illustrés ci-dessus se retrouve peu ou prou dans toutes les langues, y compris des
langues non européennes. Par exemple si l'on se penche sur le japonais on observe
• que le signe qui signifie repos est à l'origine un homme couché au pied d'un arbre avec son chien couché à coté de
lui
• que la neige est ma juxtaposition des symboles de la pluie et la main, la neige étant la pluie que l'on attrape avec
la main
• que lumineux, brillant est la conjonction (non l'éclipse) du soleil et de la lune, les deux principales sources de
clarté
• que le mois de février est celui où l'on porte plusieurs vêtements et
• le mois d'août celui des feuilles comme avril est celui des lapins
• que lundi est aussi le jour de la lune (mardi celui du feu)
• que le signe qui signifie noir est originellement le dessin du fond d'une marmite (avec ses deux anses, vue de
dessous) noirci par le feu de la cuisson
• et que le feu est symbolisé par un volcan.
Le mot dispute est très sexiste puisqu'il a pour étymologie deux femmes.
Enfin l'appellation des maffieux (yakuza) signifie mot à mot "8-9-3", combinaison perdante d'un jeu de cartes. En
effet, à l'origine, ces criminels étaient recrutés parmi les plus pauvres et les exclus, c'est à dire les "perdants" de la
société.
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Étymologie de la langue française/Organisation des langues de la famille indo-européenne
Étymologie de la langue française/Organisation
des langues de la famille indo-européenne
Quelques remarques sur le tableau donné ci-après.
A défaut d'une colonne supplémentaire, précisions que le flamand est issu du néerlandais, le corse de l'italien comme
le sarde.
Le gheg est un dialecte albanais parlé au Nord, le tosk est le dialecte albanais du Sud ainsi que dans la plupart des
colonies albanaises de Grèce de d'Italie.
Le celtibérien était une langue de la péninsule ibérique à l'époque où l'on parlait gaulois dans ce qui allait devenir la
France.
Le roman a donné deux langues disparues en tant que telles : le picard, largement intégré dans le français noderne et
l'anglo-normand.
Bien qu'il s'écrive en caractères arabes, l'iranien est une langue européenne.
Le finnois, le hongrois et l'estonien ne sont pas des langues indo-européennes mais des langues caucasiennes que l'on
retrouve en Sibérie et auxquelles se rattache probablement (mais ce n'est pas une certitude) le basque. Le français
leur a emprunté quelques mots dont le morse (le lapon est aussi une langue caucasienne), papikra, hussard, toundra et
sauna (finnois).
Évolution simplifiée de l'indo-européen (étape 1)
étape 2
étape 3
Indo-aryen
Sanscrit
Anatolien
Hittite
Mycénien
Grec classique
étape 4
étape 5
étape 6
Grec moderne
Thrace - illyrien
Albanais
Gheg
Tosk
Phrygien
Celte
Arménien
Celte continental Gaulois
Celtibérien
Celte insulaire
Gaëlique
Irlandais
Gaëlique écossais
Pré-breton
Breton
Gallois
Germanique G. oriental
Vandale
Lombard
Gothique
G. nordique
Vieux norvégien
Norvégien
Danois
Suédois
Islandais
G. occidental
Vx bas allemand
Néerlandais
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Vx haut allemand
Allemand
Vieil anglais
Anglais
Francique
Balte
Vx prussien
Letto-lituanien
Letton
Lituanien
Italique
Latin vulgaire
Italien
Romanche
Roumain
Gallo-romain
Ancien français Français
Occitan
Provençal
Roman
Ombrien
Ibérien
Galicien
Portugais
Castillan
Espagnol
Catalan
Slave
Slave oriental
Russe
Biélorusse
Ukrainien
Slave occidental
Polonais
Slave méridional
Bulgare
Serbo-croate
Iranien
Avestique
Perse Ancien
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Sources et contributeurs de l’article
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Étymologie de la langue française/Introduction Source: http://fr.wikibooks.org/w/index.php?oldid=261595 Contributeurs: PAC
Étymologie de la langue française/Évolution et disparition des mots Source: http://fr.wikibooks.org/w/index.php?oldid=274096 Contributeurs: JackPotte, PAC, 1 modifications anonymes
Étymologie de la langue française/Commentaire d un mail Source: http://fr.wikibooks.org/w/index.php?oldid=289371 Contributeurs: PAC, 2 modifications anonymes
Étymologie de la langue française/Organisation des langues de la famille indo-européenne Source: http://fr.wikibooks.org/w/index.php?oldid=271712 Contributeurs: PAC, 1 modifications
anonymes
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