voir l`article de MNH de novembre 2012
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Initiative Thibault en action À Toulouse, L’ESCALADE A DROIT DE CITÉ « À 3 heures, très loin, main gauche à midi… c’est ok »… Ce drôle de dialogue a lieu au pied d’un mur d’escalade. A priori rien de particulier, hormis que la scène se passe à l’Institut pour jeunes aveugles (IJA) de Toulouse (31). Pour cette initiative, la MNH a décerné une mention spéciale coup de cœur dans le cadre du 15e Trophée de l’innovation handicap. par Marie-Thérèse Holecek Le jeune Arvin Vadoud, étudiant issu de l’IJA a été sélectionné en équipe de France handisport et a participé aux championnats du monde d’escalade et escalade handisport à Paris Bercy en septembre 2012. 20 | MNH revue 178 C e jour-là les apprentis grimpeurs, Gabriel, Simon, Thibault et Hugo sont tout excités car ils sont encadrés par Koba. Koichiro Kobayashi dit Koba, est un grimpeur japonais qui pratique l’escalade depuis qu’il a 16 ans. Atteint d’une cécité évolutive depuis l’âge de 28 ans, il continue de vivre sa passion en adaptant sa façon de grimper en fonction de sa dégénérescence rétinienne. Après les championnats du monde d’escalade et escalade handisport à Paris Bercy en septembre 2012 où il a terminé second dans sa catégorie, il a rejoint l’Institut avec qui il entretient des liens privilégiés, et fait profiter les jeunes de son expérience. La pratique de l’escalade a débuté à l’Institut des jeunes aveugles en 2002 dans des locaux mis à disposition par la mairie de Toulouse. Actuellement, deux éducateurs de l’IJA, Éric et Bertrand, formés à l’encadrement pour l’escalade, sont impliqués dans cette action en collaboration étroite avec Koba qui a développé la technique de grimpe pour les non-voyants. L’Institut possède depuis peu un pan d’escalade au sein de son gymnase (3 mètres de haut, 9 de large avec 3 parties distinctes offrant des inclinaisons différentes). Les chemins sur les parois sont signifiés par un ensemble de prises de même couleur. Grâce à ce code, les éducateurs peuvent graduer les difficultés et les gestes techniques en fonction des chemins, des voies qu’ils imaginent. Pour les grimpeurs non-voyants, des repères tactiles sont installés (cordelette, bande collante) pour identifier les voies et ils sont guidés grâce aux indications d’une personne voyante mais peuvent aussi grimper de façon libre. Ce mur est utilisé en priorité par les plus jeunes et les enfants déficients visuels avec un handicap associé. Pourquoi l’escalade ? C’est une discipline complète qui fait appel simultanément à l’expression corporelle et intellec- tuelle et aux capacités mentales du pratiquant. L’environnement est adapté à la déficience visuelle : le milieu est stable et sécurisé. L’escalade développe la force, la souplesse, l’endurance et l’équilibre. Les supports ludiques sont multiples : des petits jeux à thèmes MONKEYMAGIC est une association japonaise de grimpeurs en situation de déficience visuelle fondée par Koichiro Kobayashi en 2005. Elle gère une école de grimpe pour les aveugles. L’école n’enseigne pas seulement comment grimper, mais comment trouver les mouvements par soi-même, ainsi que son chemin. Le but de Koba : « aider à l’insertion, accroître le lien social, permettre une meilleure compréhension entre voyants et non-voyants. Partager une même activité comme l’escalade c’est une bonne opportunité ». Koba est très disponible et curieux, n’hésitez pas à lui laisser des messages sur [email protected] u www.monkeymagic.org.jp Koichiro Kobayashi pour travailler la confiance ou des gestes techniques plus appropriés à la déficience visuelle. L’escalade stimule l’activité manuelle par la manipulation des équipements : harnais, chaussons, systèmes d’assurage… et fait travailler la latéralisation, la coordination, le développement postural. De gauche à droite Bertrand, Thibault, Koba et Simon Mais c’est aussi une ouverture sociale « Nous tenons à ce que les jeunes fréquentent des lieux communs aux autres habitants de notre ville. Si nous défendons le droit à la différence, les jeunes ont aussi le droit à la ressemblance », précise Bertrand, éducateur référent de la section escalade à l’IJA. Ainsi, 2 fois par semaine, les jeunes se rendent dans une salle d’escalade privée à l’extérieur, pendant les ouvertures au public si possible, pour se mélanger à la communauté… Là, ce sont des parois de 8 mètres qui les attendent ! Gabriel et Koba Gabriel n’a peur de rien Une visée éducative Nos varappeurs doivent compenser leur handicap (sensoriel et autres) pour se hisser jusqu’au sommet. Cette pratique les encourage à puiser dans leurs ressources physiques et psychiques. Chacun se retrouve face à lui pour gérer sa peur, ses doutes, ses efforts, mettre en place des stratégies adaptées et reproduire les gestes techniques appris pour réussir le défi qu’il s’est lancé. Quelle fierté alors de toucher le sommet et d’arriver au bout de ce qui a été entrepris, audelà du handicap ! Ils adorent tous l’escalade. Simon a « l’impression de monter dans le ciel », Thibault « aime bouger » et Guillaume « grimpe dans la montagne ». Des projets Trouver des financements, développer l’activité avec la fédération française de Montagne et d’Escalade, faire de l’événementiel, et … aller rendre visite à Koba, au Japon. Hugo et Koba Jacques Montauriol, directeur de l’IJA Le centre d’éducation spécialisée pour déficients visuels – Institut des jeunes aveugles – (CESDV-IJA) a été fondé en 1866. Il reçoit des enfants aveugles et mal-voyants des deux sexes (avec des handicaps associés), en demi-pension, en internat et externat, et des adultes en formation professionnelle. Le développement de l’autonomie, sous toutes ses formes, de la personne en situation de handicap visuel, est son objectif directeur. Il accompagne ainsi les personnes qu’il accueille vers une indépendance maximale (en fonction de leurs capacités et de leurs envies) sur le plan de la vie quotidienne, dans la vie scolaire ou dans l’emploi. Å d’infos u www.ijatoulouse.org http://ijagrimpe.over-blog.com IJA - 37 rue Monplaisir 31400 Toulouse MNH revue 178 | 21