JDC n° 29.indd - Friends of the Congo

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JDC n° 29.indd - Friends of the Congo
Supplément indépendant
d’informations électorales
Elections : à chaque candidat sa télé
Le nombre de télévisions et
de radios a atteint un chiffre record cette année en République
démocratique du Congo. Les
toutes récentes, bien qu’elles
s’en cachent, appartiennent à
des partis politiques qui préfèrent avoir leurs propres médias
à l’approche des élections…
existe aujourd’hui 58 chaînes de
ILaltélévision
sur l’ensemble du pays.
capitale, Kinshasa, compte,
à elle seule, 38 télévisions. Trois
autres sont en essai, selon le président de la Haute Autorité des Médias (HAM), Modeste Mutinga Mutuishayi.
Le foisonnement des radios est
encore plus impressionnant dans
ce gigantesque pays, où les besoins en communication restent
immenses. «Officiellement, nous
avons enregistré 171 radios dans
tout le pays. Mais il y en a qui naissent avant de se faire connaître»,
fait remarquer le président de la
HAM.
Prolifération des médias
Selon cette institution qui s’occupe de la régulation du secteur des
médias en RDC, toutes ces chaînes de radio et de télévision sont
commerciales, confessionnelles ou
communautaires. «Aucune d’elle
n’admet appartenir à un parti ou à
un homme politique», affirme Mutinga.
Alors qu’approchent à grands
pas les élections prévues fin juin,
la prolifération des médias ressemble, curieusement, au foisonnement
des candidatures aux élections pré-
sidentielle et législatives. Au 2 avril
2006, la Commission électorale indépendante (CEI) a enregistré 73
candidats à la présidentielle, dont
33 ont été validés, et plus de 8.000
dossiers pour la députation.
Depuis le début 2006, des nouvelles chaînes de radio et de télévision ont envahi l’espace audiovisuel congolais : Afrika TV, Radio
Lisanga TV, Molière TV, Mirador TV,
Numerica TV… Ces médias appartiennent ou sont proches des partis
politiques, ou des candidats aux
futures élections. Ils s’ajoutent sur
la liste d’autres radios et télévisions
créées il y a près de deux ans, qui
sont aussi connues comme appartenant à des hommes politiques.
Campagne prématurée
Au sein de leurs rédactions,
aucun responsable n’avoue l’appartenance de leur média à des clans
politiques. «Numerica TV est une
chaîne de divertissement à côté de
Tropicana TV (du même propriétaire) qui est une chaîne politique,
explique Jean-Pierre Kibambi Shintwa, un journaliste de longue date
qui a posé sa candidature à la députation. C’est vraiment un hasard
pour moi d’être entré en politique
au moment de la naissance de cette chaîne !».
Un éditeur de journal, ex-député,
Michel Ladi Luya, également candidat à la députation, a créé Mirador
TV et une radio portant la même
dénomination, en plus de ses journaux «Le Palmarès», «Visa 2000»...
Mais, il y a surtout les gros gabarits
de la politique qui possèdent aussi
leurs télés et radios. Montée par un
sujet croate, Nicolas Vazonne, en
association avec Janet Kabila, la
sœur jumelle de Joseph Kabila, Digital Congo est proche du président
de la République.
Tout nouveau, Afrika TV est présenté comme appartenant à Azarias Ruberwa du RCD (Rassemblement congolais pour la démocratie),
l’un des quatre vice-présidents qui
fait partie des 33 candidats à la
Magistrature suprême retenus par
la CEI. De même, le vice-président
Jean-Pierre Bemba, lui aussi candidat président, a, à son compte,
deux télévisions - Canal Congo Télévision (CCTV) et Canal Kin Télévision (CKTV) – et une station de
radio (Radio Liberté)…
Tous ces médias, la Radio télévision nationale congolaise (RTNC)
en tête, se sont déjà lancés depuis
plusieurs semaines dans la campagne électorale, avant terme. En
L’Union africaine s’implique
dans le processus électoral
Le Président de la Commission
de l’Union africaine (UA), Alpha
Oumar Konaré, tient au succès du
processus électoral en RDC. En
séjour à Kinshasa du 18 au 20 avril
derniers, l’hôte des Congolais
est venu s’enquérir de l’évolution
de la Transition et étudier, avec
les acteurs politiques et sociaux,
comment son institution peut s’investir davantage dans l’accompagnement des efforts déjà réalisés.
L’occasion lui a semblé propice
pour affirmer le soutien moral de
l’Union africaine au processus
électoral et aux futurs élus.
aisant le point de sa visite de trois
F
jours à Kinshasa, l’ancien Président malien a estimé que l’absence
de certaines personnes dans le processus n’enlève rien à la légitimité
des futurs élus. Confirmant le soutien
de toute l’Afrique à la RDC, il a martelé que le temps de prendre le pouvoir
par les armes est révolu.
Pour le diplomate malien, l’unique
voie pour sortir le Congo de l’illégalité
reste les élections : «Ceux qui pensent que les élections n’auront pas
lieu ont tort. S’il n’y a pas d’élections,
cela veut dire qu’on reste dans la lo-
gique de la prise du pouvoir par des
armes, par des arrangements…» Konaré a déploré le fait que, quand il y
a une bonne voie à prendre, il y ait
toujours un petit sentier que les gens
empruntent pour perdre du temps.
Tous les interlocuteurs parlent
le même langage
Le président de la Commission africaine s’est réjoui de constater que,
pendant son séjour, tous ses interlocuteurs congolais ont parlé le même
langage, celui de la volonté d’aller aux
élections. Outre le président Joseph
Kabila, Oumar Konaré a également
rencontré les quatre vice-présidents
de la République, le nouveau président de l’Assemblée nationale, le président a.i. du Sénat, le président de
la CEI, des représentants des Eglises
et, enfin, Etienne Tshisekedi wa Mulumba, président national de l’UDPS.
Konaré a qualifié l’opposant congolais de «grand démocrate», de
«grand africain dans l’édification de la
démocratie et de la non violence». Il
a révélé lui avoir demandé d’apporter
sa contribution au processus électoral dans le cadre des textes approuvés. «Mon souhait le plus ardent, at-il souligné, est de voir la RDC faire
le premier pas, c’est-à-dire organiser
les élections démocratiques que le
peuple attend depuis bientôt un demisiècle».
La renaissance de l’Afrique
passe par la RDC
Cette étape constitue, pour Alpha
Oumar Konaré, la renaissance de
l’Afrique tant que la RDC est l’un des
jokers pour le continent africain. Il a
indiqué que l’Union africaine est prête à envoyer ses troupes au Congo
dans le cadre de la sécurisation des
élections. L’ancien chef d’Etat malien
précise toutefois que son institution
ne dispose pas de moyens financiers
suffisants pour atteindre cet objectif.
C’est à ce titre que l’UA appelle ses
partenaires à l’aider pour lui permettre de mettre des troupes à la disposition de la RDC.
Le président de la Commission de
l’UA a indiqué que l’Organisation met
la solidarité africaine à la disposition
des Congolais, tout en leur demandant d’y mettre un peu de volonté
pour trouver un compromis, comme
ils l’ont fait en mettant en place la formule «1+4» qui a engendré la paix,
l’unité, donné plus de pouvoirs aux
provinces, pemis de mettre en place
un code de nationalité et de voter une
Constitution.
Déo MULIMA
N°29 Semaine du 24 au 30 avril 2006
effet, selon la Loi électorale, celle-ci
ne doit débuter que 30 jours fermes
avant la date retenue pour le déroulement des élections présidentielle
et législatives.
Tournée pédagogique
Pour rappeler tout le monde au
respect de la loi, la HAM a entrepris
depuis début avril une «tournée pédagogique» dans toutes les télévisions de Kinshasa. L’équipe de Modeste Mutinga s’emploie à expliquer
aux responsables des principales
chaînes les règles du jeu en matière de traitement des informations
en période électorale: principes
d’accès des partis politiques dans
les médias publics et privés, code
de bonne conduite des journalistes
et des hommes politiques…
«Nous avons constaté que plusieurs médias ont effectivement
démarré la campagne électorale
prématurément. Au cours de notre tournée, nous leur rappelons
le contenu de la loi en la matière,
explique le président de la HAM.
Après, nous allons publier un communiqué en guise de dernier avertissement».
Mais les enjeux électoraux sont si
complexes et la situation du pays
si fragile que la HAM voudrait y
aller sans heurts. «Il n’est certes
pas bon de fermer ou de suspendre une radio ou une télévision en
cette période. Nous allons essayer
de bien gérer la situation pour éviter toute tension», déclare Mutinga.
La tournée pédagogique de l’autorité de régulation se poursuit, mais
il est difficile de dire si ses rappels à
l’ordre seront réellement entendus.
Godefroid BWITI LUMISA
InterCongo media/Syfia
Sommaire
 Campagne électorale : la HAM
invite les acteurs politiques à la patience .............................................P. 2
 Colin Nzolantima : « La communauté internationale doit pousser les
Congolais au travail pour leur éviter
une forte dépendance».................P. 3
 Des chefs coutumiers du SudKivu formés à la résolution des
conflits ..........................................P. 4
1
2
A chaud
Campagne électorale : la HAM invite
les acteurs politiques à la patience
La Haute autorité des médias (HAM) a tenu à mettre un
terme à la confusion qui a suivi l’annonce du démarrage
de la campagne électorale, samedi 15 avril par le porteparole Maï Maï de la Commission électorale indépendante (CEI), Dieudonné Mirimo. Ce n’était qu’une fausse
alerte due à une mauvaise lecture de la Loi électorale, a
clamé le président de cette institution, Modeste Mutinga,
lors d’un point de presse tenu mercredi 19 avril.
our s’en convaincre, MuP
tinga a évoqué l’article
110 de ladite loi : ‘‘Sans préjudices des dispositions de
l’article 28 de la présente loi
(Loi électorale), la campagne électorale est ouverte
vingt-quatre heures après la
publication de la liste définitive des candidats et prend
fin vingt-quatre heures avant
l’ouverture de scrutins (...)’’.
Cependant, l’article 28 de
la Loi n°06/006 du 9 mars
2006 portant organisation
des élections présidentielle,
législatives,
provinciales,
urbaines, municipales et locales stipule que ‘‘la campagne électorale est ouverte 30
jours au maximum avant la
date du scrutin et s’achève
24 heures avant cette date’’.
Suivant l’esprit de l’article
110, la campagne aurait démarré immédiatement après
la publication des listes définitives des candidats présidentiables si le calendrier
électoral était connu.
Une commission
de vigilance sur pied
Pour la HAM, c’est la CEI
qui devra fixer l’opinion sur
les dispositions qui ne violent
pas les principes de l’égalité
de chances par l’application
stricte de l’article 28. La HAM
a invité les candidats présidentiables et les députés à
prêcher par l’exemple, ‘‘eux
qui seront amenés à jurer sur
le respect des lois de la République. Il serait sage de ne
pas violenter le serment sur
les mêmes lois’’. Aux regards
de ces obligations d’impartialité et de neutralité, Modeste
Mutinga a affirmé que la
campagne électorale n’avait
pas encore débuté à travers
les médias.
Stricte application
de la déontologie
Vu la nécessité de renforcer sa capacité d’action durant la période électorale, la
HAM a institué en son sein et
pour une durée de 90 jours
une Commission de vigilance
et d’éthique électorale à travers les médias (CVEM), afin
de permettre à l’institution
citoyenne d’être au courant
de toutes les violations de la
Directive et des règles d’éthique et de déontologie journalistiques en vigueur.
La HAM a profité de la journée pour publier la Directive
relative à la campagne électorale à travers les médias.
‘‘Il s’agit, selon Mutinga, d’un
acte réglementaire de 61 articles, regroupés en quatre
chapitres traitant de généralités, des médias de service
public, des radios et télévisions privées ainsi que de la
presse écrite’’.
Pour le président de cette
institution d’appui à la démocratie, les médias seront
sollicités de manière intense
comme créneau incontournable dans la sensibilisation et
la vulgarisation de ces mécanismes de gestion.
La Directive de la HAM est
un support que le journaliste
devra observer, outre les règles relatives à l’éthique et
à la déontologie professionnelles, afin de connaître ‘‘les
normes concernant les règles
relatives à la déontologie du
journaliste qui doivent être
de rigoureuse application
pendant la campagne électorale’’.
Un face-à-face
dans les médias
Cette Directive insiste
entre autre sur l’interdiction
formelle de diffuser des messages incitant à la haine et
des résultats de sondages
d’opinions, 48 heures avant le
scrutin. La Directive consacre
le principe du pluralisme et
d’équilibre de l’information et
l’obligation pour tout organe
de presse de service public
de transmettre à la HAM la
liste de tout le personnel concerné.
Le temps d’antenne y est
également fixé : 45 minutes
d’émission radiodiffusée et
45 minutes d’émissions télévisées à répartir par tirage au
sort sur la durée de la campagne au premier tour du scrutin présidentiel.
‘‘En outre, un face-à-face
radiodiffusé et télévisé de 90
minutes avec les deux parties
sera organisé sous la supervision de la HAM’’ pour les candidats au second tour, après
les émissions de 60 minutes
dont ils disposeront chacun à
la radio et à la télévision pour
la campagne électorale du
second tour, a encore indiqué
Mutinga.
Plusieurs autres recommandations ont été édictées
en quatre actes, notamment
celles relatives aux prestations et aux dérapages des
acteurs politiques, sociaux et
autres à travers les médias.
Emmanuel MAKILA
Pas d’injures dans les médias
ne épée de Damoclès plane sur les médias pendant la
U
période de la campagne électorale. Les médias s’exposeront à des sanctions comme la fermeture s’ils laissent des
acteurs politiques déclarer que tel ou tel autre candidat est de
nationalité étrangère. C’est ce qu’a déclaré Modeste Mutinga,
président de la Haute Autorité des Médias (HAM), structure
publique de régulation, lors des journées portes ouvertes organisées par la Commission électorale indépendante (CEI) à
la Foire internationale de Kinshasa (Fikin) du 13 au 15 avril
2006.
Intervenant dans le cadre du groupe thématique «Médias
et élections», le 15 avril dernier, le n°1 de la HAM a interdit
tout usage des expressions telles que «ndeke» (oiseau), ou
encore «soso» (le coq). «Ces expressions ne seront pas tolérées pendant la campagne électorale», a-t-il averti.
Modeste Mutinga a expliqué que l’expression «ndeke» est
destinée à montrer aux électeurs que s’ils donnent leurs voix
à un oiseau qui est, en réalité, étranger, il s’envolera sous
d’autres cieux et ils auront tout perdu. Tandis que les voix données à un «soso» ou le coq, qui est toujours présent dans la
basse-cour constitue un meilleur choix, car il s’agit d’un fils du
pays qui connaît les réalités du milieu.
Modeste Mutinga était invité par la CEI pour parler de la
régulation médiatique de la campagne électorale. Présent à
la Fikin, Jean-Chrétien Ekambo Duasenge, recteur de l’Ifasic
(Institut facultaire des Sciences de l’Information et la Communication), a sollicité l’indulgence de tous envers les médias.
Il a estimé que les médecins, les juristes, les politiciens et
autres commettent tous des erreurs, faisant ainsi allusion à
la campagne électorale en Italie, où aucun média n’a été inquiété malgré les menaces qui planaient sur la presse.
Alain KABONGO
A savoir
Contentieux électoral : les personnes
habilitées à contester une élection
La République démocratique
du Congo s’apprête à organiser
ses premières élections libres, démocratiques et transparentes depuis 40 ans. Comme partout dans
le monde, la publication des résultats des urnes pourrait susciter
des contestations. Mais, qui sont
les personnes habilitées à contester ces résultats ? Quelles sont
les institutions compétentes pour
statuer sur ces cas ? Qu’a prévu
la Loi congolaise en la matière ?
Nous vous proposons quelques
pistes de réponse.
Il s’agit :
* pour les élections présidentielle et
législatives, de la Haute Cour ou Cour
suprême de justice ;
* en ce qui concerne les élections
provinciales, de la Cour d’Appel ;
* pour les élections urbaines et municipales, du Tribunal de grande instance ;
* pour les élections locales, du Tribunal de paix.
ar contentieux électoral, il faut
P
entendre tout litige ou conflit né
à la suite de l’organisation, du déroulement ou de la publication des
résultats des élections présidentielle,
législatives, provinciales, urbaines ou
municipales. Le contentieux électoral
implique donc un recours des parties
devant les cours et tribunaux pour
être départagées.
Qui a qualité de contester
une élection ?
Selon la Loi électorale du 9 mars
2006, le candidat indépendant ou
son représentant peut contester une
élection 72 heures après la publication des résultats provisoires par la
Commission électorale indépendante
(CEI).
De même, un parti politique, un regroupement politique ou encore leur
mandataire a qualité de contester une
élection, à condition d’avoir présenté
sa liste dans la circonscription électorale.
Compétence des tribunaux
Les tribunaux compétents en matière de contentieux électoral ont
également été déterminés par la loi.
N°29 Semaine du 24 au 30 avril 2006
Délais du jugement ou de l’arrêt
Si la Haute Cour est saisie d’une
requête concernant l’élection présidentielle, elle a sept jours pour se
prononcer, tandis que les autres juridictions (du Tribunal de paix à la Cour
d’Appel) disposent de deux mois pour
statuer sur les demandes en justice.
Les décisions rendues par cette
dernière catégorie des juridictions
sont susceptibles d’être attaquées 72
heures après que les requérants en
aient pris connaissance.
Et lorsque tous les recours sont
épuisés, ces juridictions doivent procéder à la proclamation des résultats
définitifs des élections.
Alain KABONGO
A coeur ouvert
3
Colin Nzolantima : « La communauté internationale doit pousser
les Congolais au travail pour leur éviter une forte dépendance»
En quoi les élections intéressent-elles l’homme d’affaires que vous êtes?
Les élections intéressent
tout le monde. C’est une chance pour le pays de pouvoir
se choisir de bons dirigeants,
des personnes qui doivent le
conduire vers des destinées
que Dieu a tracées pour les
Congolais. Nous devons savoir que la RDC a un destin
que nous ignorons parce que
nous ne voulons connaître ni
l’histoire, ni ce que préconise
la bible. Ces élections sont capitales, mais elles doivent être
organisées dans de bonnes
conditions et selon les critères
bibliques. La bible exhorte que
chacun aille dans sa tribu, qu’il
choisisse des hommes sages,
prêts à travailler pour le bien
commun, des hommes intelligents, pas nécessairement
porteurs des diplômes, mais
de bonne réputation.
Etes-vous impliqué dans
la sensibilisation électorale ?
Nous avons lancé notre
campagne de sensibilisation
avant celle de la Commission
électorale indépendante. Chaque samedi, de 8h30 à 12h00,
nous organisons des séances
de formation au profit des candidats députés ou autres. Notre objectif est de dispenser les
principes bibliques en rapport
avec les enjeux électoraux. J’ai
pris cette initiative à la suite
des lacunes que j’avais observées à la télévision. Je m’étais
rendu compte que les acteurs
politiques usaient de plus en
plus de l’arrogance pour parler
au public. Or, cette arrogance
est dangereuse pour l’avenir
du pays. J’ai conclu qu’il nous
fallait beaucoup d’humilité car,
tous, nous avons commis des
erreurs. Il ne faut pas que les
candidats se présentent devant
les électeurs comme des généreux bienfaiteurs, alors que,
pendant plusieurs années, ils
ont accumulé des biens dans
leurs maisons à leur seul profit. C’est comme s’ils n’attendaient que le jour des élections
pour penser au partage. Ils ont
oublié que, pendant tout ce
temps-là, le pays a enregistré
beaucoup de morts dans des
hôpitaux, sur les routes, etc.
Donc, il leur faut beaucoup
d’humilité durant la campagne
électorale.
truire sans une vraie fondation.
Autrement, la maison va se fissurer, puis finira par s’écrouler.
De la même manière, au niveau de la nation ou du foyer,
on ne doit pas tricher. Chaque
individu devrait faire son introspection, examiner ses péchés,
ses faiblesses, et prendre une
décision de repentance. Il doit
d’abord reconnaître qu’il a mal
agi et prendre la résolution de
réparer le préjudice commis.
Refuser de réparer suscite
de nouveaux conflits, parce la
personne lésée attend son tour
pour se venger. Nous sommes
ainsi partis de conflit en conflit.
C’est pour cela que nous disons aux candidats : «Reconnaissez d’abord votre propre
responsabilité dans la destruction du pays et ce, avant de
promettre quoi que ce soit».
C’est la première recommandation. La deuxième concerne les blessures intérieures,
conséquence des calomnies,
de tribalisme, d’injustice, etc.
C’est la couche la plus pernicieuse, on ne s’en rend pas
souvent compte. Beaucoup de
personnages historiques (Hitler, Marx…) ont été affectés
par des blessures intérieures,
dont les conséquences sont à
tout le moins dramatiques. Un
candidat ne doit pas aller devant les électeurs en brandissant ses blessures intérieures.
(Photo JDC)
Homme d’affaires, fervent croyant, Colin Nzolantima
est le président national de la Chambre de commerce
chrétienne internationale (CCCI), dont le siège est en Suède. A ce titre, il enseigne les principes bibliques dans les
milieux d’opérateurs économiques et s’occupe également
de la Fondation El Shaddaï, qui milite pour la scolarité gratuite des enfants au niveau primaire.
Colin Nzolantima s’insurge
contre toute démagogie.
Quel est votre apport dans
l’éducation électorale ?
Il y a plus de deux ans, nous
avions commencé nos enseignements dans quelques églises, puis à travers les médias.
Nous restons accrochés à la
doctrine de Jésus-Christ. Notre apport à l’éducation des
Congolais est illustré par l’enseignement qui recommande
de bâtir sur du roc. Nous décourageons les gens de cons-
Micro baladeur
Un troisième enseignement
concerne la motivation des
candidats. Vont-ils en campagne pour que, une fois élus,
ils règlent les problèmes de
la nation ou les leurs ? Est-ce
le besoin de se servir qui les
conduit ou le désir d’un changement réel au profit de tous?
Voilà , en quelques mots, comment nous sensibilisons les
gens autour du changement
de mentalité avant les élections.
Comment appréciez-vous
l’aide de la communauté internationale?
Un sage dit qu’ un marié ne
peut pas faire une fête en portant un habit d’emprunt. Il ne
saurait pas danser au risque
de le salir et de mécontenter
le propriétaire. Les Chinois
rendent mieux l’idée, en demandant aux bienfaiteurs de
leur apprendre à pêcher. Ceci
dit, je remercie la communauté
internationale pour son aide au
processus. Mais, je souhaiterais ardemment qu’elle pousse
plutôt les Congolais au travail,
pour leur éviter une trop forte
dépendance. Qu’elle aide les
Congolais à se développer,
car c’est également dans son
intérêt.
Propos recueillis par
Ben-Clet KANKONDE
et Yves KALIKAT
Que pensez-vous des élections sans l’UDPS ?
Dhika Nzangu Manu , 32 ans,
ex-combattant (FNI), Bunia
Refuser de prendre part aux
élections revient à dire qu’on
prépare encore des actions
de sabotage, c’est-à-dire ne
pas reconnaître les résultats.
Il est temps que l’UDPS rentre dans la logique des élections, comme les ex-combattants de l’Ituri sont rentrés
dans la logique de la démobilisation et de la réinsertion
communautaire.
Achille Nlandu Malonda,
Coordination des candidats
indépendants, Matadi
Jacquie Kambine,
directrice d’école, Goma
Je demande ouvertement
à l’UDPS de reconnaître qu’à
toute chose, il y a une fin.
Nous avons pris les armes
en Ituri et, aujourd’hui, nous
sommes démobilisés. Nous
avons suivi la voie de la raison, en acceptant de remettre les armes à la Conader
et de rentrer à la vie civile.
En tant que vieux parti politique, l’UDPS est appelé à se
conformer à la réalité, à aller
aux élections. Nous n’avons
plus besoin de la formule 1 +
4 au sommet de l’Etat. Nous
voulons avoir des autorités
démocratiquement
élues.
Je trouve que la priorité
devrait être accordée à l’organisation des élections. Les
dirigeants de l’UDPS vivent
à Kinshasa et n’apprennent
notre misère qu’à travers les
médias. Qu’on les mette dans
les mêmes conditions que les
nôtres, et je crois qu’ils changeront de langage !
Avec ma petite expérience politique, je suis convaincu que nous sommes en
train de bâtir un monument
sur du sable. Que nous le
voulions ou pas, l’UDPS demeure la première formation
de l’opposition politique dans
notre pays. Son implication
est indispensable pour que
les élections soient réellement démocratiques et crédibles. Son écartement du
processus entraînera, j’en
suis persuadé, un climat politique malsain et discréditera les résultats des élections.
Si la réouverture des centres
d’enrôlement en faveur des
partisans de l’UDPS allait
retarder les élections, comment expliquer ces incessan-
tes prolongations observées
notamment lors du dépôt
des candidatures ? Pourquoi le président de la CEI
s’accorde généreusement
tous les reports qu’il refuse
à l’UDPS ? N’est-ce pas la
politique de deux poids deux
mesures ?
Elise Nowa, 37 ans,
enseignante, Kikwit
L’espoir des Congolais
repose aujourd’hui sur les
élections qui pourront sortir
ce pays du gouffre de la souffrance. Logiquement, tout le
monde doit s’impliquer sans
Béatrice Yalala, 40 ans,
présidente d’une ONG,
Kindu
Nous sommes optimistes:
il y aura des élections, avec
ou sans l’UDPS. Nous disons non à cette politique de
distraction du peuple congo-
préalables. Pourquoi l’UDPS
veut-elle toujours s’opposer
à tout depuis l’époque de
Mobutu ? Ce parti ne veut-il
pas que la RDC puisse aller
de l’avant, vers un changement salutaire ? Pour moi,
avec ou sans UDPS, les
Congolais doivent se prononcer par la voie des urnes.
C’est une nécessité.
lais qui a beaucoup souffert.
Que l’UDPS ne trompe pas
l’opinion nationale et internationale ! Si nous avions suivi
son mot d’ordre, nous ne
nous serions pas enrôlés.
N°29 Semaine du 24 au 30 avril 2006
Propos recueillis par
Badylon KAWANDA (Kikwit),
Dieudos
MWADI
(Matadi),
Raoul
BILETSHI
(Kindu),
Delphin WAISSALA (Bunia)
et Rozaly ZAWADI (Goma)
Correspondants InterCongo media
Echos des provinces
4
Brèves
Une sélection de
Athanase MASSIKINI
 Musulmans. La Communauté
islamique du Congo (Comico)
a mis la main à la pâte dans le
cadre de l’éveil de la conscience
de la population du Maniema
pour un vote responsable. Avec
le concours de l’ONG sudafricaine Eisa, elle a mené une
campagne qui a rassemblé 200
personnes issues de toutes les
confessions religieuses. Cette
campagne d’éducation civique
et électorale avait pour but de
former la population, à travers
des vulgarisateurs, à opérer un
choix utile lors des élections.
 Bas-Congo. La population
de la province du Bas-Congo se
déclare plus confiante aux candidats qu’à leurs partis. Selon
une enquête menée sur place,
nombre d’habitants de cette
province estiment que les critères de choix des candidats procèdent plus de leur personnalité
et charisme que de leur appartenance aux formations politiques.
«Ce sont plus les candidats qui
vivent avec nous et qui jouissent
de notre estime en raison de
leurs réalisations que les partis
politiques», pensent la plupart
d’entre eux.
SUD-KIVU
Des chefs coutumiers formés
à la résolution de conflit
Comment résoudre les conflits?
Comment plusieurs communautés tribales peuvent-elles vivre
en paix ? Quelles précautions
prendre pour les prochaines élections? Un séminaire a formé des
leaders sociaux du territoire de
Kalehe (Sud-Kivu) à faire face à ce
type de situation…
ne centaine de personnes, dont
U
des chefs coutumiers, ont été
formées au mois de mars dernier à
la résolution de conflits, à la construction de la paix et au processus
électoral à Nyabibwe, une localité
du territoire de Kalehe, située à 100
km de la ville de Bukavu (Sud-Kivu).
Ce territoire est le foyer de diverses
tensions à caractère ethnique ou tribal, qui freine le développement de
la région.
Pour éviter tout conflit lors des prochaines élections, les participants à
la formation de Nyabibwe ont exigé
que les électeurs adoptent avant,
pendant et après les scrutins, des
comportements qui encouragent
les candidats à respecter le verdict
des urnes, à s’interdire de cultiver
la haine, le tribalisme, le régionalisme, la fraude et le triomphalisme.
«Ils doivent adopter des comportements citoyens pour le bien de tout
le monde», ont-ils unanimement recommandé.
Les participants ont tous reconnu
que ce séminaire a permis de promouvoir la coexistence pacifique
entre les différentes tribus de Nyabibwe.
«Il est temps que nos populations
s’entendent»
«Ce séminaire nous permettra de
promouvoir la culture de la paix sur
notre terre et la sensibilisation des
décideurs dans les domaines de la
paix, de la sécurité et du développement», commente Jean-Claude
Bisimwa, le chef coutumier de Mbinga-Nord, dont la contrée a beaucoup
souffert de la crise née autour du
problème de découpage territorial,
effectué par l’ancienne rébellion du
Rassemblement congolais pour la
démocratie (RCD).
La caravane d’éducation civique et électorale
récolte un franc succès au Kivu
e Réseau des radios et téléviL
sions communautaires de l’est du
Congo (Rateco) et le Centre natio-
nal d’appui au développement et à
la participation populaire (Cenadep)
ont organisé récemment une caravane d’éducation civique et électorale
dans les territoires de Fizi et d’Uvira,
au Sud-Kivu, ainsi que dans ceux de
Beni et de Lubero, au Nord-Kivu.
Cette caravane visait à favoriser la
participation massive et responsable
de la population aux échéances électorales qui lui permettront de se choisir librement ses propres dirigeants
en fonction des programmes présentés par les différents candidats.
Des débats radiophoniques sur le
processus électoral ont été organisés dans les lieux publics (avenue
Aebaz de la cité de Baraka, stade
municipal de Beni ou colline Ibambiro de la cité de Kanyabayonga) ou
dans les studios des radios locales
(Radio Messager du peuple d’Uvira,
Radio Moto d’Oicha).
Le débat de Baraka était directement diffusé par le studio mobile
de la Radio Caravane à partir d’un
émetteur de 300 watts sur la fréquence de 88.0 Mhz, les autres animations l’étant en différé sur un plus
large rayon de couverture.
Les radios Messager du peuple
d’Uvira, Muungano de Beni et rurale
de Kanyabayonga ont vu leurs anciens émetteurs artisanaux de moins
de 20 watts remplacés par les modernes de 300 watts. La caravane
distribuait aussi des exemplaires en
photocopies des textes légaux (la
nouvelle Constitution de la RDC, la
Loi électorale, la répartition des circonscriptions des députés nationaux,
la liste définitive des partis politiques
arrêtés à la date du 9 mars 2006)
et des exemplaires du «Journal du
Citoyen». Des bousculades ont été
aussitôt au rendez-vous dans la foule des curieux qui tenaient à s’emparer de la documentation.
Les populations visitées posaient
surtout des questions d’éclaircissement sur la loi portant sur la nationalité, la Loi électorale et la sécurisation du territoire. Elles regrettaient
de voir que peu d’acteurs politiques
participaient aux débats.
Dieudonné MALEKERA
Correspondant IPP
BAS-CONGO
La population sensibilisée aux dérives
en période électorale
uel est le régime pénal prévu
Q
dans le contexte de la Loi
électorale ? Très peu de citoyens en
savent quelque chose… «Le fait de
faire savoir votre opinion ou encore
de demander à la personne qui veut
voter son choix, ou à celui qui vient de
voter le choix qu’il a fait est érigé en
infraction par la loi électorale». Alors
qu’on s’approche des élections, très
peu de Congolais connaissent cette
disposition liée à la Loi électorale.
Au Bas-Congo, des membres
de l’Observatoire Paix et Droits de
l’Homme (OPDH) - une Association
sans but lucratif - vulgarisent la Loi
électorale et expliquent notamment
le régime pénal prévu dans le cadre
de ce texte de loi. Au début du mois
d’avril, une délégation de cette association s’est rendue à la cité d’Inga (où
est érigé le célèbre barrage hydroélectrique du même nom), dans le territoire de Seke-Banza, pour expliquer
à l’élite locale les contours de la loi du
8 mars 2006 portant organisation des
élections présidentielle, législatives,
provinciales, urbaines, municipales et
locales.
Pour Me Antoine Ntadila, la Loi
électorale est la matérialisation de
l’article 5 de la nouvelle Constitution.
Elle marque, a-t-il dit, une étape décisive dans le processus d’organisation des élections libres, régulières et
transparentes en RDC. «Cette loi est
très explicite au sujet du régime pénal
lié aux élections», a indiqué Me JeanClaude Lutete Nsakala, le secrétaire
général de l’OPDH.
La rencontre de l’OPDH avec l’élite
d’Inga a permis à cette association à
caractère politico-culturel d’atteindre
certains de ses objectifs. Créée en
2002 par Fuka Unzola, le vice-gouverneur de la province du Bas-Congo
chargé des questions politiques et
administratives, l’OPDH poursuit entre autres comme objectifs la promotion des associations de défense des
droits de l’Homme et l’encadrement
de la jeunesse par la vulgarisation
des textes légaux.
Dieudos MWADI
InterCongo media/Syfia
N°29 Semaine du 24 au 30 avril 2006
La formation a retracé l’histoire
des élections en RDC et décrit le
caractère tribal des partis politiques
à l’indépendance du pays en 1960,
ainsi que les conflits nés du déficit
de la culture démocratique.
Lors des échanges, les participants
ont soulevé quelques questions liées
à l’organisation des élections, à l’indépendance des partis politiques, à
la gestion des candidats perdants, à
la promotion du nationalisme et à la
souveraineté de l’Etat congolais.
«La culture électorale n’est pas
suffisamment enracinée chez nous,
a reconnu le chef coutumier des
Haut-Plateaux, Alphonse Marandura. Les défis à relever sont multiples,
notamment la sensibilisation à l’éducation civique. Il est temps que les
populations meurtries s’entendent».
Baudry ALUMA
InterCongo media/Syfia
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