Version française - Médecins sans frontières
Transcription
Version française - Médecins sans frontières
Sri Lanka 17 années d’action humanitaire Rapport Publié par Médecins Sans Frontières en juin 2003 Document en provenance du site internet de Médecins Sans Frontières http://www.msf.fr Tous droits de reproduction et/ou de diffusion, totale ou partielle, sous quelque forme que ce soit, réservés pour tous pays, sauf autorisation préalable et écrite de l’auteur et/ou de Médecins Sans Frontières et/ou de la publication d’origine. Toute mise en réseau, même partielle, interdite. Sri Lanka : 17 années d’action humanitaire sommaire Histoire & contexte page 3 17 ans d’actions MSF page 5 Trincomalee page 6 Jaffna & Point Pedro page 8 Batticaloa page 11 Vavaniya page 17 Madhu page 18 Témoignages & récits page 20 Ressources humaines page 25 Remerciements page 26 Crédits photos : Couverture et dernière de couverture : D. Lefèvre P. 3 : D. Lefèvre - P. 4 : E. Bouvet - P.5 : D. Lefèvre - P. 6 : Y. de Fareins - P. 7 : D. Lefèvre, MSF - P. 8 : MSF - P. 9 : D. Lefèvre, MSF - P.10 : MSF, D. Lefèvre - P. 11 : D. Lefèvre, S. Crisan/MSF - P. 12 : MSF - P. 13 : G. Myers/MSF, MSF - P. 14 : MSF, S. Crisan/MSF - P. 15 : MSF - P. 16 : MSF, Y. de Fareins - P. 17 : MSF - P. 18 : C. Perera/Gamma - P. 19 : D. Lefèvre - P. 20 : MSF - P. 21 : MSF - P. 22 : E. Bouvet - P. 23 : MSF - P. 24 : MSF. Couverture : Attente pour les consultations. Hôpital de Trincomalee, 1987 Dernière de couverture : des familles tamoules attendent la libération de leurs fils par l’armée sri lankaise. Point Pedro 1997. 2 deux Rédacteur en chef : Anne Fouchard Rédaction : Isabelle Ferry Co-rédaction : Remi Vallet Graphisme et fabrication : TC graphite Réalisation : juin 2003 Merci pour leur participation à la réalisation de ce dossier à : Arnaud L., Anouck S., Anoulack P., Diana T., Guillermo B., Karine P., Kate D., Sean H., Stéphanie P. et plus particulièrement à Chris B. et Yves C. Avec l’espoir d’une paix durable, la situation change petit à petit au nord et à l’est du Sri Lanka. Le système de santé de ces ex-zones de conflit reprend vie. Médecins et infirmières reviennent occuper des postes désertés durant de si longues années. Les populations qui souffraient des conséquences du conflit retournent dans leurs villages, essayant de reconstruire une autre vie. Ce document est né d’une idée simple : comment « marquer » l’arrêt de nos missions après 17 années passées dans cette région du monde si singulière ? Ecrire pour garder une trace, savoir remercier ceux qui y étaient, qui ont fait, qui ont collaboré… Mais aussi, écrire pour tous et pas seulement pour ceux qui ont vécu ou qui ont vu. En dehors des zones de conflits, le système de santé sri-lankais a toujours été fortement développé, efficace, avec du personnel de santé compétent, et surtout gratuit donc accessible aux plus indigents. Qu’espérer de mieux qu’il s’applique désormais dans tout le Sri Lanka, pour tous les Sri-lankais ? Toutes les raisons qui avaient jusqu’ici motivé la présence de MSF dans les parties de l’île isolées par le conflit n’existent plus aujourd’hui. C’est pourquoi, MSF a décidé de se désengager de toutes ses missions d’ici la fin du mois de juin 2003. Recueillir, décrire, témoigner pour mieux comprendre pour certains. Se souvenir d’un fait, se remémorer, revivre des émotions pour d’autres… C’est brut, sans analyse, ni critique, ni jugement. Rien que des faits, des souvenirs, des sensations… sans commentaires. Et sans chercher, c’eut été impossible, à être exhaustif. Merci à tous ceux qui ont collaboré, de près ou de loin, directement ou indirectement, à la réalisation de ce document. Pardon à tous ceux qui n’ont pas été sollicités pour des raisons évidentes de manque de temps, de distance… Pardon à tous ceux, personnel national et volontaires dont les noms auraient été oubliés dans la liste à la fin de ce document. Merci aux bailleurs de fonds qui nous ont permis de financer une partie de nos missions. Un grand merci tout particulier aux professionnels locaux sans qui le travail effectué pendant ces 17 années de missions n’aurait pas été possible. Sri Lanka Bienvenue au paradis ! repères Larme de terre versée dans l’Océan Indien, le Sri Lanka a tout d’un petit paradis posé au pied de l’Inde, dont il n’est séparé que par un bras de mer de 50 kilomètres. A en croire Marco Polo, le Sri Lanka – 430 km du nord au sud et 225 d’est en ouest - est la plus agréable des îles de cette taille. Architecture subtile, trésors archéologiques, danses traditionnelles mystérieuses, plages de sable blanc bordées de palmiers, plantations de thé à perte de vue, forêts tropicales, animaux sauvages à foison et, par dessus tout, habitants chaleureux et accueillants : les guides touristiques vantent à l’unisson les mérites de cette île presque aussi grande que l’Irlande. Vingt ans de guerre civile n’ont d’ailleurs pas fait fuir les vacanciers : en 2000, année où les affrontements entre l’armée et la rébellion tamoule faisaient 4 000 morts, 400 000 touristes étrangers envahissaient les plages du sud. UNE ÎLE CONVOITÉE La beauté et les richesses naturelles ont suscité bien des convoitises. Sous influence indienne du 14e au 16e siècle, l’île devient une colonie portugaise au 16e siècle, puis hollandaise au 17e siècle avant de tomber entre les mains des Britanniques en 1796. Ils en garderont le contrôle 152 ans. En 1948, l’île de Ceylan obtient finalement son indépendance, mais ce n’est qu’en 1972 qu’elle est rebaptisée Sri Lanka, à l’occasion d’un changement de constitution. Cette nouvelle constitution, parce qu’elle fait du bouddhisme la religion d’Etat, attise un peu plus les tensions entre les communautés cinghalaise (majoritairement bouddhiste) et tamoule (majoritairement hindouiste). Alors qu’ils occupaient l’essentiel des postes dans l’administration coloniale britannique, les Tamouls avaient été marginalisés après l’indépendance. Et déjà, en 1956, la proclamation du cinghalais comme seule langue officielle du pays avait provoqué leur colère. L’ année 1972 voit la création du mouvement armé de rébellion tamoule Tamil New Tigers (TNT) par Vellupillai Prabhakaran, qui fondera en 1976 le LTTE (Liberation Tigers of Tamil Eelam). Ces mouvements réclament la constitution d’un Etat indépendant regroupant les provinces du nord et de l’est du Sri Lanka. Les premières violences commencent, avec notamment l’assassinat par le TNT du maire de Jaffna, ville au cœur de la péninsule tamoule au nord du pays. Mais c’est en 1983 qu’éclate réellement la guerre civile. Treize soldats de l’armée sri lankaise sont abattus dans une embuscade tendue par le LTTE. Leurs funérailles à Colombo, la capitale, dégénèrent en émeutes au cours desquelles 3 000 Tamouls sont tués, tandis que l’armée lance de lourdes représailles autour de Jaffna. En vingt ans, le conflit a fait plus de 60 000 morts ainsi que des centaines de milliers de réfugiés et de disparus. sez-le-feu permanent, préalable à l’ouverture de nouveaux pourparlers de paix. Depuis, les mesures de détente s’accumulent. Les liaisons terrestres et aériennes entre la péninsule de Jaffna et le reste de l’île ont été réouvertes. Le désarmement a commencé, ainsi que l’échange de prisonniers de guerre. D’un point de vue politique, les tigres tamouls ont abandonné la revendication d’un Etat indépendant. De son côté, selon un accord conclu en décembre 2002, le gouvernement a accepté le principe de l’autonomie des régions à majorité tamoule dans le nord et l’est du pays. Et de nouveaux rounds de négociations, étaient programmés les 9 et 10 juin, au Japon. Mais le LTTE les a boycottés. Toutefois, si les tensions sont loin de s’être totalement volatilisées, l’espoir a refait son apparition à Sri Lanka. Nom officiel : République Démocratique Socialiste du Sri Lanka > Superficie : 65.610 km2, pour 1.340 km de côtes > Capitale : Colombo > Fête nationale : 4 février (en commémoration de l’indépendance, obtenue en 1948) > Population : 19 576 783 > Cinghalais : 74%, Tamouls : 18%, Maures : 7%, Autres (Burghers, Veddas, Malays) : 1% > Religions : Bouddhistes :70%, Hindous :15%, Chrétiens : 7%, Musulmans : 7%, Autres : 1% UN ESPOIR DE PAIX Après trois tentatives de négociations de paix infructueuses, les discussions engagées semblent sur la bonne voie. En février 2002, le gouvernement de cohabitation (la Présidente du Sri Lanka, Chandrika Kumaratunga, est membre de l’Alliance du Peuple, tandis que le Premier ministre Ranil Wickremasinghe provient des rangs du Parti de l’unité nationale) et les tigres tamouls ont signé un ces- trois 3 chronologie Médecins Sans Frontières au Sri Lanka > 1972 Nouvelle constitution. Le bouddhisme devient la religion d'Etat. Naissance du Tamil New Tigers (TNT), mouvement rebelle armé tamoule. > 1976 Le TNT devient le LTTE (Liberation Tigers of Tamil Eelam). > 1982 Elections présidentielles boycottées par le parti tamoul. > 1983 Déclenchement de la guerre civile. > 1985 Echec des premières négociations de paix. > 1987 Offensive armée. Le LTTE se replie dans la péninsule de Jaffna. Déploiement d'une force de maintien de la paix indienne. > 1987-1990 Multiplication des attaques LTTE contre les soldats indiens. Représailles de ces derniers sur la population civile. > 1990 Retrait des troupes indiennes. > 1991 Assassinat par le LTTE de Rajiv Gandhi, premier ministre indien. > 1993 Premadasa, président, tué dans un attentat à la bombe. > 1994 Chandrika Kumaratunga, élue présidente, rouvre des pourparlers de paix. 4 quatre Présente au Sri Lanka depuis 1986, Médecins Sans Frontières y a poursuivi sans relâche les mêmes objectifs : soigner les populations directement victimes ou isolées par le conflit tout en dénonçant les violations des Droits de l’homme ou du Droit humanitaire. Encadrée par ces grands principes, l’action de MSF s’est donc articulée autour de deux types d’interventions. D’une part, compléter le dispositif sanitaire déjà existant, pour assurer le fonctionnement de services essentiels dans les grands hôpitaux des zones de conflit. Dans un contexte de guerre civile, l’activité de chirurgie a été prédominante. En 17 années d’intervention, plus de 260 chirurgiens expatriés se sont relayés dans les salles d’opérations des hôpitaux sri-lankais. D’autre part, mettre en place des cliniques mobiles, pour garantir aux populations isolées un véritable accès aux soins. DES DEUX CÔTÉS DE LA LIGNE DE FRONT MSF a implanté ses missions tant dans les villes contrôlées par le gouvernement que dans les zones tenues par le LTTE. Dans le premier cas de figure, sa présence dans des hôpitaux d’état, aux mains du gouvernements comme à celles des Tigres (comme à Trincomalee, Point Pedro, Jaffna ou Batticaloa) visait à pallier le déficit en médecins spécialistes tamouls (beaucoup avaient choisi l’exil pour fuir le conflit) ainsi qu’en ressources matérielles. MSF a fourni des chirurgiens, des anesthésistes, des sages-femmes, des infirmières ou encore des pédiatres et gynéco/obstétriciens, ainsi, bien sûr, que des administrateurs et des techniciens. Organisation non gouvernementale internationale, MSF parvenait de plus à débloquer des moyens supplémentaires pour ces structures, usant de sa stature pour convaincre à la fois le ministère de la santé d’octroyer des ressources et le ministère de la défense de les laisser parvenir à destination. Dans les zones sous contrôle du LTTE ainsi que dans les « zones grises » (contrôlées par l’armée mais avec des poches de résistance LTTE), MSF s’est efforcée d’offrir un accès aux soins à des populations vulnérables, comprenant parfois de nombreuses personnes déplacées. A Madhu et dans toute la péninsule de Jaffna, ainsi qu’autour de Batticaloa, nous avons apporté une assistance médicale et nutritionnelle, ou encore mis en place des programmes de prévention épidémiologique et des campagnes de vaccination. Enfin, profitant de sa présence des deux côtés de la ligne de front, MSF a transporté et fait admettre dans des services appropriés de nombreux malades nécessitant des soins en urgence. Là encore, notre statut d’ONG indépendante nous a permis à maintes reprises de franchir les check-points et les zones de combats qui empêchaient l’acheminement de ces patients. Sri Lanka 17 ans d’actions dans un pays en guerre chrono (suite) 1988 La majorité des médecins dans le nord et l’est du pays s’exile pour fuir les combats. 50 chirurgiens et autant d’anesthésistes de MSF se relayent dans quatre hôpitaux en zone de guerre : Trincomalee, Mannar, Point Pedro et Batticaloa. Premières cliniques mobiles à Batticaloa. 1989-1991 Courte accalmie puis reprise du conflit provoquant un afflux de blessés sur Point Pedro. Sept missions au total dont toujours quatre en chirurgie. Premières cliniques mobiles à Mannar. 1992-1994 Dans le camp de déplacés de Madhu, quatre personnes assurent la petite chirurgie et évacuent les patients nécessitant une intervention plus lourde. Nouveau programme chirurgical et obstétrical à Kilinochchi (octobre 94). Premières cliniques mobiles à Madhu. 1995-1997 Escalade de la violence. L’aide apportée aux populations civiles est de plus en plus difficile. Les médicaments « stratégiques » (anesthésiants, antidouleur) et le matériel médical sont soumis à approbation avant d’être envoyés sur les zones de conflit. À Kilinochchi, ville LTTE, le gouvernement nous interdit toute activité chirurgicale. Les combats autour de Jaffna poussent les populations vers l’est, l’hôpital de Point Pedro devient seule structure chirurgicale accessible. Batticaloa assure plus de 3 400 interven- tions par an (20% de chirurgie de guerre). À Vavuniya, une équipe prend en charge la chirurgie et l’anesthésie (2 220 interventions par an). En 1996, l’hôpital de Jaffna est partiellement détruit. Un an plus tard, MSF obtient l’autorisation de s’y implanter et pratiquera plus de 8 500 interventions. > 1995 Echec des pourparlers, reprise des attentats à la bombe du LTTE. Offensive de l'armée dans le Nord : les troupes LTTE quittent Jaffna. > 1996 Attentat à Colombo. Etat d'urgence dans tout le pays. 1998-2000 L’ approvisionnement reste difficile. Un effort est fait sur les conditions d’interventions chirurgicales (hygiène, asepsie, stérilisation, suivi post-opératoire…). Fin 1999, nos équipes sont renforcées, les interventions d’urgence augmentent. Suite au bombardement de l’église de Madhu, MSF reprend en urgence son activité chirurgicale à Vavuniya. À Batticaloa, la réhabilitation des blocs opératoires et le réaménagement du bâtiment des brûlés améliorent les conditions d’intervention. En 2000, 13 354 patients sont admis en chirurgie, 5 000 actes sont pratiqués, dont 1 200 interventions majeures (une sur cinq pour blessure de guerre). En janvier 2000, Médecins Sans Frontières reprend également ses activités à Point Pedro. Un chirurgien et un anesthésiste sont envoyés en renfort. 2001-2002 Les efforts fournis pour la meilleure prise en charge des patients et l’amélioration des conditions de travail sont récompensés. A Batticaloa, un programme de prise en charge de la douleur chez les grands brûlés et les malades en phase post-opératoire est mis en place. Des postes de chirurgiens spécialisés (orthopédie, plastique) de courte > 1997 Nouvelle grande offensive militaire contre le LTTE. > 1999 Blessée dans un attentat, Chandrika Kumaratunga est réélue présidente. > 2000 Nouvelles avancées des Tigres. > Décembre 2001 Nouveau gouvernement. durée sont ouverts. En 2001, sur 24 067 personnes admises dans les trois services chirurgicaux de Batticaloa, Vavuniya et Point Pedro, 8 900 ont subi une opération, dont 2,5 % étaient liées au conflit. Un chiffre largement en baisse par rapport aux autres années. 2003 Avec l’espoir d’une paix durable, les services de santé au nord et à l’est de l’île redeviennent relativement performants. Les programmes de chirurgie de guerre ne se justifient plus. Médecins Sans Frontières planifie son retrait du pays. > Février 2002 Signature d'un cessez-lefeu préalable à des pourparlers de paix. La Norvège est médiateur. > Septembre 2002 1er round de négociations en Thaïlande. Réouverture des liaisons terrestres et aériennes entre la péninsule et le reste de l’île. > Juin 2003 Discussions prévues au Japon et rencontre avec les pays donateurs pour la reconstruction de Sri Lanka. Boycott du LTTE. cinq 5 Et au début était Trinco témoignage « J'ai passé environ un an à Trinco, la mission « Club Med » comme la qualifiaient les anesthésistes qui appréciaient particulièrement la "plage des anesthésistes". Plaisanterie à part, quelques jours après mon arrivée, après une séance de dénonciation au stade de la ville, deux membres du personnel de la maison ont été arrêtés par l'armée lors d'une rafle matinale. Pendant plusieurs semaines, j'ai rencontré le chef militaire de la zone pour demander à les voir et à leur parler. Je voulais surtout m'assurer qu'ils étaient toujours en bon état et qu'ils n'avaient pas été déportés vers un autre camp. Le jour de la libération de Swanga et de son ami, ce fut une grande joie dans toute la maison MSF de Trinco. Cette même année, notre ambulance a été attaquée par l'armée sur la route de Madhu, ce qui a énormément bouleversé les équipes et désorganisé les programmes. Nous sommes restés en stand by pendant environ trois semaines, à refaire le monde et à réfléchir sur nos motivations à travailler pour MSF et les limites dans notre prise de risques. » Ariane Betz, infirmière anesthésiste à Trinco, puis en mission à Monaregala. De mars 1991 à mai 1992 6 six Après une première mission exploratoire en 1983 qui n’aboutira pas, MSF interviendra au Sri Lanka pour la première fois en 1987, avec un programme chirurgical à l’est de l’île dans la ville de Trincomalee. Retour sur l’actualité reprise dans Messages Sans Frontières de l’époque. MESSAGES N° 4 – SEPTEMBRE 1986 Françoise Body et Antoine Crouan ont récemment effectué une mission exploratoire à la suite de l’aggravation de la situation dans le nord et l’est du Sri Lanka. Le conflit oppose les deux communautés ethniques Cinghalaise (12 millions) et Tamoule (3 millions). Depuis 1982 des groupes armés de guérilla tamoule se sont constitués au nord et à l’est du pays. Ils réclament l’indépendance totale de cette partie de l’île. Des affrontements sanglants couvrent l’histoire de ces dernières années. En 1983, MSF s’était déjà rendu au Sri Lanka pour évaluer les besoins médicaux d’une population tamoule déplacée dans le Nord du pays (à l’époque, de nombreuses organisations ceylanaises prenant en charge ces populations, MSF n’avait pas réalisé de programme). La situation actuelle aggrave les déplacements de populations ainsi que leur isolement : c’est dans ce contexte que fut réalisée la mission exploratoire dans le district de Trincomalee à l’est de Sri Lanka. Ce district compte 50.000 personnes déplacées sur 250.000 habitants. De nombreux villages ont été détruits, tant par les mouvements de résistance que par les forces gou- vernementales. Cette zone est, comme celle de Jaffna et de Batticaloa, interdite aux étrangers. Le ministère de la Santé et celui de la Réhabilitation nous ont proposé, à la suite de notre évaluation, de collaborer à un programme d’assistance auprès de ces personnes déplacées autour de Trincomalee. Une équipe chirurgicale pourrait opérer dans l’hôpital central et une équipe prendrait en charge les camps et les villages isolés. Le conseil d’administration ayant accepté ce nouveau programme nous constituons la première équipe. MESSAGES N°6 – 31 OCTOBRE 1986 Un nouveau programme vient de démarrer au Sri Lanka. Une mission exploratoire s’est rendue au mois d’août 1986 dans les zones du nord et de l’est de l’île où s’affrontent une guérilla Tamoule et une armée gouvernementale. Le ministère de la santé avait accepté un projet d’assistance médico-chirurgicale aux populations civiles déplacées dans le district de Trincomalee au nord-est de Sri Lanka. Actuellement, le programme se met en place. Joaquim Miro et Anne-Françoise Basquin en assurent la coordination. Une équipe chirurgicale doit rejoindre rapidement la première équipe médicale. Cette équipe chirurgicale opérera dans l’hôpital de district, seule structure de référence pour une population de 250.000 personnes. Le climat de violence s’intensifie dans cette région stratégique. MESSAGES N° 10 – FÉVRIER 1987 L’équipe de Médecins Sans Frontières s’agrandit : neuf personnes travaillent mainte- nant en permanence dans le district de Trincomalee. Alain Rouvillois a remplacé l’ancien coordinateur Joaquim Miro. Un ophtalmologue rejoindra prochainement l’équipe chirurgicale. Depuis quelques semaines le conflit semble s’aggraver. Une nouvelle proposition de travail dans un autre district du Sri Lanka est à l’étude. MESSAGES N° 12 – AVRIL 1987 Vendredi 17 avril, un groupe armé massacrait 120 personnes et en blessait une cinquantaine à quelques dizaines de kilomètres de Trincomalee au nord-est de l’île. Pendant 48 heures, l’équipe chirurgicale de Médecins Sans Frontières opèrera sans relâche une cinquantaine de blessés. « Je me souviens de cette bombe qui explosa, en plein été 1989, sur le marché de Trinco. C’était un désastre, les corps mutilés, les blessés transférés à l’hôpital. L’horreur… Nous étions très inquiets qu’une partie de l’équipe ait pu aussi être victime de cette explosion. » Anne-Marie Gloaguen, infirmière à Trinco de février à août 1989. Sri Lanka Trinco Ma plus belle mission Elisabeth Szumilin, médecin désormais au siège à Paris, au département des techniques médicales, nous livre ici ses impressions sur ce que fut sa deuxième mission avec MSF. C’était en 1987-1988 à Trincomalee… « J’ai trop de bons souvenirs du Sri Lanka. Cela a été ma plus belle mission. Ça peut paraître incroyable, mais ce sont les seuls quinze mois de ma vie où j’ai pu me lever tous les jours à 5h30 du matin car nous devions attraper le bateau à 6h00. Je crois d’ailleurs que nous (moi et Gigi, l’infirmière) ne l’avons jamais râté. Je soupçonne même que si le capitaine du bateau ne nous voyait pas à 6 heures pile, endormies sur les cordages de l’avant, devenu très vite NOTRE place (car dedans, ça puait trop le gazoil, à faire vomir même une parisienne), il retardait un peu le départ. Aussi, dès que les villageois qu’on allait soigner ont compris qu’ils pouvaient compter sur les rendez-vous qu’on leur fixait, ils venaient, parfois si nombreux qu’on ne pouvait s’occuper que des cas les plus urgents. J’avais une peur horrible de devoir « opérer » dans la jungle. Le soir, ou la nuit, après mon travail, on allait aider l’équipe chirurgicale à « tenir les écarteurs ». Je voulais apprendre au cas où je devrais faire quelque chose en urgence dans une zone reculée. Notre équipe de chirurgiens a été superbe. Ils m’ont tous beaucoup appris, soutenue… Un jour les tigres ont attaqué Trincomalee. Mes chefs m’ont interdit d’y retourner ! Je leur en veux encore !!! Du coup, je suis restée plus longtemps. Comme je soutenais qu’il y avait encore de nombreux besoins dans cette zone, j’ai refais une mission explo, en vélo (à cause des mines – mais télécom- mandées. Un vélo, c’est sans risque à moins qu’on t’en veuille vraiment). Dans le premier village visité, on a du évacuer en urgence deux enfants, l’un atteint de déshydratation sévère, l’autre de pneumonie avec détresse respiratoire, tout ça à vélo… On a finalement repris le travail qu’on avait construit, sur le même mode que nous l’avions développé auparavant. MES MOINS BONS SOUVENIRS ? Un jour, je n’ai pas pu sauver le quatrième et dernier fils encore vivant d’une mère. Il avait commis une tentative de suicide par empoisonnement. Aujourd’hui encore, je me demande si je n’aurais pas pu mieux faire… Là aussi, l’anesthésiste a été super et a passé beaucoup de temps à m’expliquer que j’avais fait ce qu’il fallait. J’étais vraiment déprimée… Après une attaque d’un camp de l’armée, les tigres nous ont « fortement incité » à venir photographier un charnier tout récent : il n’y avait là que des femmes, des enfants et des vieillards tamouls brûlés dans leur maison. On s’était retrouvé au beau milieu de l’attaque du camp. Après quelques heures, lorsque nous sommes sortis de la maison où l’on s’était caché, que les armes s’étaient tues, on a essayé d’entrer dans le camp pour proposer notre assistance à d’éventuels blessés militaires. Ils ont décliné notre aide. Mais je persiste à croire que de tels « petits gestes » ont participé au fait que nous étions autorisé à aller partout dans les zones que le gouvernement ne contrôlait pas et donc nous permettre l’accès à ces populations tamoules qui n’avaient accès à aucun soin de santé, car ils n’osaient pas passer les check-points. De haut en bas : - Elisabeth Szumilin (médecin) et Master Léo (son traducteur) en consultation sur une île au large de Trincomalee. 1987. - Salle d’hospitalisation. - File d’attente aux consultations des cliniques mobiles.Trincomalee. 1987. D’UN CAMP À L’AUTRE La neutralité affichée par les équipes avec lesquelles j’ai travaillé est l’une des raisons pour laquelle je garde un aussi bon souvenir de cette mission. Elle nous a permis de continuer à être acceptés et respectés par les deux parties et donc de travailler. Cette neutralité n’était pas feinte. Je ne faisais aucune différence entre un malade tamoul, ou cinghalais. J’ai refusé d’apprendre l’une de ces langues ! Cela aurait été prendre partie ou alors, il aurait fallu que j’apprenne les deux langues en même temps ! Pour marquer notre neutralité, on travaillait aussi dans les structures de santé cinghalaises et on leur apportait des médicaments, je faisais des consultations avec eux, et ce, bien qu’ils en aient bien moins besoin. Les militaires savaient qu’on donnait des médicaments aux tigres. Je ne les donnais qu’à une seule personne, toujours la même : un étudiant en médecine de 2ème année, qui avait rejoint les tigres. Ce jeune homme a été tué. Un de nos jeunes volontaires civils aussi, et bien d’autres encore : le chef des militaires cinghalais dans un attentat suicide à Colombo, qu’on aimait bien. Il était curieux de nous, de notre culture…» sept 7 Jaffna et Point Pedro, au cœur de la péninsule témoignage Ouverture de Point Pedro L’intensification des combats dans la péninsule de Jaffna, au Nord de l’île, ces dernières semaines, a provoqué l’afflux massif et prolongé de blessés dans les hôpitaux de cette région, ainsi que des déplacements importants de population. Une équipe médico-chirurgicale, composée de 9 MSF (chirurgiens, médecins, infirmières), est partie le 2 juin. Le gouvernement a officiellement autorisé MSF à intervenir à Point Pedro. Les différentes parties semblent accueillir favorablement notre présence. Messages Sans Frontières, le 12 juin 1987 La péninsule de Jaffna, berceau des Tigres tamouls, est située au nord de l'île. Conséquence du conflit, sa population est passée de 1 000 000 à 500 000 habitants. Reliée au reste du Sri Lanka par deux ponts souvent fermés en raison des combats, la péninsule a rarement été accessible par la route, ce qui a amené les équipes MSF à emprunter la plupart du temps le bateau du Comité international de la Croix Rouge au départ de Trincomalee. Son approvisionnement était également problématique, en raison du blocus imposé par l’armée. L’histoire mouvementée de Médecins Sans Frontières sur la péninsule, démarrée en 1987 par l’ouverture d’un programme chirurgical dans l’hôpital de Manthikai à Point Pedro, a donc suivi les aléas de cette zone isolée, perpétuellement sous tension. La péninsule de Jaffna a subi de nombreux déplacements de population et la destruction de ses infrastructures, notamment de santé, au rythme des escalades de violence successives. Entre mouvements tamouls d’abord (de 1983 à 1992), entre le LTTE et la force de maintien de la paix indienne ensuite (de 1987 à 1990), entre le LTTE et l'armée Sri Lankaise enfin (de 1990 à décembre 2001). Près de 160.000 personnes ont été déplacées à l’intérieur de cette zone du fait des combats. Et l’ensemble de la population est resté isolé du reste de l’île, sans moyen terrestre de quitter la péninsule. UN ÉTÉ SANGLANT De 1992 à octobre 1995, la péninsule de Jaffna est toujours restée aux mains du 8 huit LTTE. Mais au cours de l’été 1995, l’armée lance une grande opération militaire, baptisée « bond en avant » pour partir à l’assaut de la péninsule. La ville de Jaffna est reprise en premier, ainsi que ses abords. En quelques semaines, l’offensive fait plusieurs centaines de morts dont beaucoup de civils. L’armée sri lankaise semble chercher plus à anéantir les forces armées tamoules, pour forcer leurs chefs à revenir à la table des négociations, qu’à réellement conquérir ce fief du LTTE. Malheureusement, les civils payent un lourd tribut aux combats. En septembre 1995, une nouvelle offensive de l’armée provoque un afflux dramatique de blessés à l’hôpital de Point Pedro où l’équipe de MSF travaille. Le 21 septembre, 14 blessés graves sont admis. Parmi eux, quatre enfants meurent des suites de leurs blessures. Le 22 septembre, le tableau s’assombrit encore. A 13 heures, 25 nouveaux blessés arrivent, essentiellement des femmes et des enfants. Dix décèdent, dont six enfants de moins de 10 ans. A 16 heures, 150 enfants blessés dans le bombardement d’une école sont hospitalisés. Quinze vont mourir. Ce n’est qu’en mai 1996 que l’armée reprend le contrôle d’une plus grande partie de la péninsule, contraignant les Tigres à battre en retraite. Pendant la bataille de Jaffna, l'hôpital de la ville est en partie détruit. C’était jusque-là le deuxième plus grand hôpital universitaire de Sri Lanka, avec une capacité d’accueil de plus de mille lits… En juin 1996, alors que l’embargo qui paralysait la population et les structures de santé est officiellement levé depuis plus d’un an, les produits d’usage courant, la nourriture, les médicaments ou le matériel médical font encore défaut. Car en réalité, le contrôle strict imposé par le ministère de la Défense rend les approvisionnements très difficiles. A l’hôpital de Jaffna, qui a repris ses activités avec une capacité de 600 lits, la plupart des services fonctionnent sans médecin spécialiste. C’est alors que MSF intervient, à la demande du ministère de la Santé sri lankais, et fournit les ressources humaines nécessaires au bon fonctionnement des services de chirurgie générale, de pédiatrie et de gynécologie obstétrique. UN PROCESSUS DE RECONSTRUCTION FRAGILE En 1997, le processus de reconstruction de la péninsule est engagé et près de 50.000 personnes peuvent revenir dans la région, devenue plus sûre. MSF renforce son équipe dans l’hôpital de Jaffna, avec un chirurgien et un pédiatre, et lance la réhabilitation d’une partie de l’hôpital, malgré les difficultés d’approvisionnement qui perdurent. Mais, rapidement, l’administration sri lankaise trouve les ressources pour faire fonctionner les services publics. Après dix années d’exercice, MSF met donc fin à ses activités de chirurgie dans les hôpitaux de Jaffna et de Point Pedro. En revanche, MSF poursuit ses activités de pédiatrie à Jaffna, mission qui venait tout juste de commencer après un diagnostic très négatif effectué sur le service de prématurés et de soins intensifs. En janvier 1998, des élections locales doivent permettre de tourner la page de l’administration militaire, pour laisser place à un semblant de démocratie. Mais l’assassinat du maire de Jaffna, en mai de la même année, vient bien vite compromettre cette transi- Sri Lanka Jaffna & Point Pedro repères tion. La situation, déjà très instable pendant les trois premiers mois de l’année, dégénère et la spirale de la violence reprend ses droits. A partir de décembre 1999, le secteur dit du Passage des Eléphants devient le théâtre de terribles affrontements entre le LTTE et l’armée. Menacés par les combats lourds et les importants mouvements de troupes, 150 000 civils n’ont d’autre choix que de se déplacer. Dès l’intensification des combats en décembre, MSF rouvre un programme chirurgical dans l’hôpital de Point Pedro, envoyant une équipe et du matériel d’urgence, qui manquaient tous deux cruellement. Parallèlement, à Jaffna, les cliniques mobiles en pédiatrie qui avaient débuté depuis un mois s’arrêtent momentanément en raison des combats. Les activités pédiatriques au sein même de l’hôpital, tout juste renforcées par l’arrivée d’un deuxième pédiatre puis d’une sagefemme, peuvent, elles, continuer. VERS UNE PAIX DURABLE En 2001, l’armée décide, dans les territoires qu’elle a reconquis, de renvoyer les gens chez eux. Ces déplacements forcés précipités, en ex-zone de conflit, résultent en de multiples accidents causés par les mines antipersonnel qui truffent le terrain. Dans les services de chirurgie, les amputations de membres inférieurs sont constantes. Les équipes de MSF font alors du lobbying pour que l’armée ne force plus les gens à rentrer avant que de véritables opérations de déminage aient été conduites. A cette époque, même si les échanges de tirs restent la routine quotidienne et si la situation est encore assez fragile, la situation est enfin redevenue relativement calme, sans combats visibles. Mais il faut attendre décembre 2001 pour que l’apaisement soit plus marqué : le nouveau gouvernement signe le cessez-le-feu proposé par le LTTE et, surtout, les deux parties respectent cet accord. Dès le mois suivant, l'embargo sur les équipements médicaux et les médicaments est levé par le gouvernement. Les biens et surtout les personnes sont à nouveau presque libres de circuler. Et les approvisionnements redeviennent possibles en zones de contrôle LTTE. MSF en profite pour relancer des cliniques pédiatriques mobiles depuis Jaffna dans trois endroits de la péninsule : l'île de Kayts, Tellipalai et Chankanai. La levée de l'embargo sur les médicaments et sur l’équipement médical améliore indéniablement l’aide que MSF peut apporter aux populations. La dernière activité maintenue dans la péninsule consiste en une surveillance épidémiologique auprès des dizaines de milliers de personnes encore déplacées dans tous les camps de la région (à Tenmarachchi, à l'est de la ville de Jaffna vers Vadamarachchi, ou encore dans la zone de Weligaman) vivant dans des conditions sanitaires précaires. Compte tenu de la concentration de la population dans certaines zones, un système de « surveillance sentinelle » des différents sites de déplacés est mis en place : chaque semaine, le réseau des étudiants en médecine se rend sur le terrain pour collecter des données afin d’éviter le développement d’épidémies. Parallèlement, les équipes commencent à étudier les capacités des personnes à se déplacer vers des endroits plus sûrs, en collaboration avec les services d'hygiène et d’autres ONG. En février 2002, le protocole d’accord signé par le nouveau gouvernement et le LTTE formalise définitivement le cessez-le-feu et engage le processus de paix. Quelques mois plus tard, en décembre 2002, MSF peut donc transférer la supervision de son projet de surveillance épidémiologique aux autorités de l'hôpital. Et en 2003, jusqu’à l’arrêt complet de ses activités en mai, MSF continue de fournir une équipe chirurgicale ainsi que quelques médicaments et de l’équipement médical aux hôpitaux de Point Pedro et de Jaffna. Programme de Jaffna Assistance chirurgicale, pédiatrique et obstétrique > Ouverture en mars 1997 > Fermeture en mars 2003 > Population couverte : 500 000 personnes > Personnel MSF année 2002 : 3 personnes dont deux pédiatres et une infirmière > Personnel local : 4 personnes > Hôpital Universitaire de Jaffna : nombre total d’admissions en pédiatrie en 2002 : 7 950 Programme de Point Pedro Assistance chirurgicale > Ouverture initiale : 1987 > Fermeture provisoire : 1997 > Réouverture : 1999 > Fermeture définitive : mai 2003 > Population couverte : 100 000 personnes > Personnel international (2002): 4 personnes dont un chirurgien, un anesthésiste, un gynécologue-obstétricien et une infirmière > Personnel national : 3 personnes neuf 9 Jaffna & Point Pedro De haut en bas : - Attente pour les consultations pré-natales, hôpital de Point Pedro. - Entrée de l’hôpital de Point Pedro. - Check-point près de l’hôpital avec contrôle d’identité des civils par l’armée. L’enfer près du paradis Maria Cartwright a fait deux missions avec MSF au Sri Lanka. En 1998 tout d’abord, en tant que responsable terrain à Jaffna pendant 10 mois. Puis en tant que coordinatrice médicale pendant quatre mois en 1999. Maria est aujourd’hui directrice des ressources humaines pour MSF Australie, à Sydney. Elle se souvient de sa première mission dans la péninsule. « En 1998, la majeure partie de la péninsule de Jaffna était contrôlée par les forces gouvernementales. Mais il était impossible d’y entrer par voie terrestre car les Tigres Tamouls tenaient la partie nord de l'île. La seule manière que nous avions de l’atteindre était par mer. Nous partions donc de Colombo en voiture jusqu’à Trincomalee, où nous prenions le bateau du CICR. Une véritable épopée : départs aléatoires en fonction de l’intensité des combats dans la péninsule et de l’état de la mer, voyage à 50 kilomètres des côtes afin d’éviter tout tir, 20 heures de trajet jusqu’à Kankesanturai (KKS), port rempli de bateaux bombardés signalant que d’importants combats avaient eu lieu ici ! Une fois à KKS, le périple n’était pas terminé, puisqu’il fallait prendre la route en grand convoi jusqu’à la ville de Jaffna. La sécurité ? Je n’ai réalisé à quel point le coin était dangereux qu’au moment où j’y ai mis les pieds. Au départ du bateau, les soldats fouillaient tout, jusqu’aux paquets de tampons ! Nous avons eu beaucoup d'ennuis pour apporter certains médicaments, car les agréments de transport dépendaient du ministère de la Défense. La fois où nous avons voulu apporter de l'ergométrine, destiné à stopper les hémorragies, les autorités nous l’ont interdit car elles ne voulaient pas que les Tigres les utilisent pour soigner leurs blessures de guerre. Nous avons toujours eu des problèmes pour emporter des anesthésiques et des antalgiques. La ville de Jaffna était tout aussi peu sûre. C’est d’ailleurs là que j’ai vécu l’expérience la plus dangereuse de mon séjour au Sri Lanka. Un jour, nous étions près d’un bâtiment civil où se tenait une grande réunion avec le maire et des responsables militaires. Les Tigres y ont fait sauter une bombe. Après l’énorme explosion, nous sommes allés à l'hôpital voir si nous pouvions aider. Les Nations Unies nous ont signalé que deux expatriés auraient été tués. Nous étions vraiment effondrés car nous les connaissions tous. Nous les avons cherchés dans tout l’hôpital jusqu’à la morgue. Quand je suis retournée dans la salle des urgences, j’ai eu la vision la plus dingue de ma vie, je ne peux trouver les mots pour l’exprimer. Il y avait là des corps allongés sur le sol… Au final, nous nous sommes rendus compte que les deux expatriés étaient en fait des soldats dont la peau arrachée par l’explosion paraissait blanche. C’était affreux. L’un de mes meilleurs souvenirs, en revanche, c’est lorsque nous sommes sortis dans les îles à l'ouest de Jaffna. C’est la mission explo la plus agréable que j’ai jamais faite. Après avoir visité l'hôpital de Kayts pour voir si tout fonctionnait bien et évaluer les besoins, nous sommes partis pour ces îles où les personnes qui cherchaient à se réfugier en Inde faisaient escale. La population paraissait aller bien et avait un accès aux soins décent. Et cet endroit ! Ses îles de corail, son sable blanc, ses palmiers : c’était comme une carte postale, juste un endroit magnifique.» pour être spontané. Jaffna vidée de sa population, l’armée cinghalaise s’empare d’une cité désertée. Le lion qui orne le drapeau national veille aujourd’hui sur la ville abandonnée par les Tigres. Victoire militaire pour les uns, victoire politique pour les autres. Dès le milieu du mois d’octobre, des milliers de bateaux ont, chaque jour, traversé la lagune qui sépare la péninsule de Jaffna du reste du pays. Le passage est gratuit ou payant, c’est selon…Selon les « rapports » qu’entretiennent les familles avec les Tigres de Libération d’Eelam Tamoul (LTTE) et avec sa branche « humanitaire » (TRO)… À leur arrivée, chargés au mieux de quelques sacs et valises, ceux qui ont tout laissé derrière eux se voient offrir une tasse de thé ou de soupe. Les transports sont ensuite organisés vers Kilinochchi. Pour les organisations humanitaires présentes, il est difficile d’évaluer les véritables besoins de la population. Sur près de 170 000 déplacés dans le district de Kilinochchi, 148 000 personnes sont accueillies chez des proches, 22 000 dans les écoles, les bâtiments publics et dans les multiples temples… témoignage On avait un peu oublié. Les photos des plages du Sud de l’île avaient repris place dans les guides des tour-opérateurs. Mais les touristes n’auront pas accès au Nord du Pays, ni à l’Est. Depuis le printemps dernier, la rupture du cessez-le-feu par les séparatistes tamouls a plongé le pays dans une nouvelle spirale de violence. Au mois de juillet, les offensives de l’armée ont repris le pas sur les négociations. Le gouvernement a engagé toutes ses forces dans une bataille féroce pour reprendre Jaffna, capitale de la rébellion tigre. Devant l’avancée militaire, la péninsule est peu à peu vidée de sa population : un exode de plusieurs milliers de personnes trop bien organisé 10 dix Valérie Brouchoud, visite terrain communication, Messages, janvier 1996 Sri Lanka Batticaloa, piégée à l’est repères Conséquences, plusieurs milliers de personnes sont privées d’accès aux soins, les cliniques du districts ont été abandonnées et pour accéder au seul hôpital fonctionnant encore, celui de Batticaloa, il faut se prémunir d’un tas de papiers et réussir, ensuite, à passer les différents barrages militaires. Batticaloa ou Batti comme souvent on la surnomme, est située en pleine zone dite « uncleared », instable, à l’est de l’île. 50 km avant d’atteindre la ville, sur la route qui la relie au reste du pays, la présence militaire se fait déjà fortement sentir, les check-points se multiplient. Si la ville est sous contrôle de l’armée, ainsi que la route qui permet d’y accéder, les alentours, eux, sont aux mains des Tigres. Les combats ont régulièrement lieu entre les deux parties rendant la circulation des biens comme des personnes extrêmement difficile. Tout accès à la zone est bloqué. MSF démarre ses programmes dans l’hôpital en 1987 et reste la seule présence étrangère dans la zone jusqu’en 1989. Dès le début, notre intervention est cruciale pour soigner les populations mais aussi témoigner des violations des droits humanitaires. Dans un premier temps, nous intervenons dans l’un des services de chirurgie de l’hôpital car tous les chirurgiens ont déserté les lieux en raison de la guerre et ceux qui ont pu rester ne sont pas suffisamment nombreux pour assurer les urgences en cas d’afflux de blessés. MSF a donc complété le dispositif hospitalier fournissant essentiellement des chirurgiens et des pédiatres. En octobre 1990, alors que l’escalade de la violence isole davantage les populations autour de Batticaloa et les prive d’un accès aux soins, MSF met en place ses premières cliniques mobiles. Pour accomplir cette activité, les équipes font face à de nombreux problèmes de sécurité mais au-delà de l’aide médicale apportée aux personnes des villages les plus isolés, notre seule présence conforte les populations qui peuvent confier leurs problèmes, exprimer leurs craintes. Nos visites se révèlent donc plus qu’utiles car nous sommes les rares témoins étrangers de la situation qu’ils vivent. Ce n’est qu’en août 1997, que MSF augmente le nombre de ses cliniques mobiles en collaboration étroite avec le ministère de la Santé. AMÉLIORER LES CONDITIONS DE SOINS Autant des années durant, MSF s’est concentrée sur la chirurgie d’urgence et de guerre, autant durant les dernières années l’accent a pu être mis sur l’amélioration de l’environnement des actes chirurgicaux. Dès 1998, l’objectif est d’améliorer les conditions d'hygiène et d’asepsie autour des activités chirurgicales. MSF réhabilite en 1999 le bloc opératoire et le gouvernement rénove de son côté quatre des cinq services de chirurgie, ce qui permet largement d’améliorer les conditions d’hygiène. Ce travail continue dans le courant des années 2000 et 2001 par la gestion et l’élimination des déchets hospitaliers. Par ailleurs, MSF travaille avec les infirmières et les médecins sur l’organisation du suivi des patients. Aussi, partant du constat que l’environnement des actes chirurgicaux s’améliore, MSF peut décider d’envoyer en mission des spécialistes sur de courtes durées afin d’effectuer des actes de chirurgie spécialisés (réparatrice, orthopédie) dont nous avons les moyens d’organiser le suivi. Nous avons ainsi introduit la chirurgie de la main et amélioré la prise en charge des brûlés, très nombreux à Batticaloa. Le Sri Lanka a l’un des taux de suicide les plus élevés au monde et l’immolation par le feu est souvent fréquente et les séquelles importantes. Dès le début de notre présence à Batticaloa nous avons commencé à améliorer la prise en charge des patient brûlés puis en octobre 2002, nous avons aidé ces brûlés à travers un programme de prise en charge de la douleur en leur faisant bénéficier d’une chirurgie plastique, et d’une écoute active. Programme de Batticaloa > Ouverture en 1987 > Fermeture en juin 2003 > Population couverte sur l’ensemble de la zone : 500 000 personnes dont 2/3 de Tamoules et 1/3 de Mulsulmans. Hôpital de Batticaloa > 600 lits dont 165 en chirurgie > 13 354 admissions en 2000. 9 180 interventions entre septembre 2000 et septembre 2001 dont 845 majeures, 3 222 mineures, 254 urgences et 50 relatives à la guerre. > Personnel international (2002): 4 permanents > Personnel national : 11 personnes Hôpital de Batticaloa. onze 11 Jusqu’au plus profond du bush chronologie de guerre > Juin 1990 Le LTTE commande toute la zone. > 1992 Les troupes gouvernementales reprennent Batticaloa, les principales villes et routes. Les forces du LTTE sont retranchées dans la jungle. > Avril 1995 Reprise des hostilités. La zone de Batticaloa est le lieu de tensions permanentes. > 1996 – 1997 Les opérations militaires dans la région du Vanni à l’ouest ont des répercussions à l’est. Les incidents de sécurité augmentent. > Fin 1998 Accrochages et combats réguliers dans la ville. Les blessés de guerre arrivent par vague à l’hôpital. > Octobre 1999 Les autorités militaires limitent les cliniques mobiles, l'accès à la population en zone sous contrôle LTTE est impossible. > Décembre 1999 Les cliniques mobiles reprennent. La situation des villes côtières est très instable, tantôt aux mains du SLA, tantôt à celles des Tigres. > 2000 Année particulièrement violente. Les bombes 12 douze Environ 400 000 personnes ont pu bénéficier de soins à travers les cliniques mobiles mises en place par MSF en 1990, alors même que les populations du district de Batticaloa sont de plus en plus isolées par le conflit. L’équipe composée habituellement d’un médecin et d’une infirmière expatriés, d’un médecin local, d’un traducteur et d’un chauffeur parcouraient les villages aussi bien en zone sous contrôle LTTE que de l’armée. De checkpoints en check-points, de négociations en négociations, d’incidents en incidents, il a toujours été difficile aux équipes d’atteindre ces populations mais à la lecture des témoignages de ces trois femmes qui y ont travaillé, le risque en valait la peine. Récits d’aventures dans le bush de Batti… ELISABETH BERGERON, INFIRMIÈRE RESPONSABLE DES CLINIQUES MOBILES BATTICALOA, SEPTEMBRE 1990 À MARS 1991 « Ouvrir les cliniques mobiles à Batti ... Que de souvenirs ! Etablir les relations avec les autorités cinghalaises, rencontrer le responsable LTTE régulièrement pour lui rappeler le bon ordre des choses : pas d'armes dans les lieux médicaux, pas d'uniformes non plus, pas de pression sur le staff local, pas de détournement de médicaments pour les camps d'entraînement entre autres .... Que de diplomatie nécessaire ! Evaluer les lieux d'intervention, protéger l'équipe locale, se déplacer quotidiennement d'une zone sous contrôle gouvernementale jusque dans le bush sous contrôle LTTE .... Tous les jours avoir à mesurer les risques pour tous : que de responsabilités ! Sans mon chauffeur, notre contact à la base militaire, la bonne volonté et l'intelligence des médecins et infirmières détachés de l'hôpital, rien n'aurait pu se faire. Trois petites histoires me reviennent en mémoire : - Un jour du haut de mes 25 ans , j’ai tapé des pieds et piqué une colère face au Brigadier responsable de l'armée régulière car la distribution d'essence était interdite ce matin-là ! Je me souviens lui avoir rappelé nos accords et qu'il n'avait pas le droit de nous empêcher d'aller soigner les gens… A ma grande surprise, il a éclaté de rire et m'a délivré les bons d'essence nécessaires. - Une fois par semaine, nous allions à la limite Nord du district à plus de deux heures de piste. Sur notre trajet, nous connaissions l'emplacement d'un camp d'entraînement LTTE . Un jour un soldat au bord de la route nous a arrêté, nous a demandé si nous ne pouvions pas envoyer un dentiste dans le camp… Jusqu’en 2003, MSF a fournit tous les médicaments et le matériel nécessaire à la réalisation de ces cliniques qui parcouraient à la fin du programme plus de 10 villages du nord au sud de la zone de Batticaloa : Kattiravelly, Vakaneri, Pondukalchenai, Kithul, Thihliveddai, Kirumichchai, Kaddumurivu, Vakarai, Mathuramkulam, Ammanthanavelly. Après toutes les considérations d'usage, nous avons trouvé un dentiste Birman qui nous a accompagné une seule fois. Pour une fois, une grande majorité d'hommes se trouvait à notre consultation ! A la fin de la journée, un seau était à moitié rempli de dents arrachées - Un matin, je passe un appel de sécurité pour savoir si l'on peut aller effectuer nos cliniques quelque part au centre du district : réponse négative pour raisons militaires. Après trois jours d’attente, nous avons enfin pu y aller. Quelqu'un nous à guider sur le lieu d'un camp de déplacés entièrement brûlé et désert ...Vision de désastre ! » CATHERINE BRUNN, MÉDECIN DES CLINIQUES MOBILES, DE DÉCEMBRE 2000 À MAI 2001 « Un soir sur le chemin du retour, un homme nous arrête pour porter secours à une femme en train d’accoucher. Il est 16h environ. Me voilà partie dans la campagne, la trousse d’urgence à la main, me demandant sur quelle catastrophe je vais encore tomber. En fait, l’enfant est né à 5h du matin et le placenta n’a toujours pas été expulsé. Je m’accroupie dans l’obscurité de la hutte pour prendre la tension artérielle et le pouls de la dame qui en est à son 9ème accouchement. Tension artérielle : 8.5, pouls : 130 pulsations minutes. Pas terrible mais le saignement a l’air de s’être à peu près tari. L’infirmier lui place deux voies veineuses. La TA remonte à 10. Tout en m’approchant, j’entends un bruit d’enfant. J’écarte les jambes de la dame, soulève la jupe. Et là, Ô surprise, la petite est sur le sol de terre battue toujours accrochée à son cordon. Je prédis une longue vie à la demoiselle qui doit être bien robuste pour avoir passé plus de 11 heures par terre toujours reliée à sa maman. C’est un joli bébé. Je pose deux clamps, je coupe le cordon et sors la petite dans mes mains en disant « tankatchi » ce qui signifie « fille ». Après avoir réclamé un linge propre, je la tends à sa grand-mère. Pendant ce temps, Simon, mon traducteur, a donné des consignes pour fabriquer un brancard. Les hommes s’affairent, récupèrent deux grands bâtons, de la toile de sacs de fertilisants, un coussin et c’est parti. On fait le chemin inverse au milieu des huttes et des rizières. On s’installe dans le 4X4. On arrive tant bien que mal à laisser notre patiente allongée tout en emmenant aussi les deux autres mères et enfants déjà assis dans le véhicule, Simon, Pascaran et Norbert. La grand-mère veut venir aussi, j’essaye vainement de m’y opposer mais elle est déjà dans la voiture poussée par toute la famille, voisins et amis rassemblés pour l’occasion. Finalement, je suis contente qu’on la prenne, elle pourra prendre soin du bébé surtout si ça tourne mal pour la mère. On part. On roule doucement en essayant d’éviter les à-coups. Arrivés à 19h30, on s’écrit joyeusement « Batti ! ». La patiente passe au bloc. Elle est sortie d’affaire et a depuis rejoint sa nombreuse famille. C’est une histoire qui finit bien mais ce n’est pas toujours le cas. La population de la région dans laquelle nous travaillons n’a aucun accès aux soins. Pas de médecins, pas d’infirmiers, quelques très rares volontaires ont suivi des cours de secourisme et font ce qu’ils peuvent. Le premier hôpital est souvent à une heure de route en voiture alors qu’ils n’ont que des bicyclettes, parfois un tracteur ou une moto pour les plus riches.» REBECCA SOUTH, MÉDECIN, SE SOUVIENT DE SA MISSION DE SEPT MOIS À BATTICALOA EN 1998. « Il y avait souvent des incidents mineurs aux nombreux points de contrôle. Il fallait que les soldats fouillent la voiture, que nous engagions les pourparlers avec eux pour passer. Parfois c’était autour d’une tasse de thé car ils s’ennuyaient beaucoup et une jeune femme blanche était pour eux une vraie curiosité ! Après quoi, éventuellement, ils nous laissaient continuer notre chemin. Un peu plus loin sur la route, on arrivait en territoire contrôlé par les Tigres, et il fallait là aussi négocier pour avoir la voie libre. Nous prévenions toujours un mois à l’avance les deux camps de l’itinéraire que nous allions emprunter et le respections toujours afin qu’ils sachent tous deux où nous étions. Nous vîmes beaucoup de cas de paludisme et de diarrhée (certaines personnes en sont mortes d’ailleurs). Nous craignions fréquemment le choléra mais la maladie ne s’est jamais vraiment manifestée. Il y avait aussi des cas de traumatismes, certains liés à la guerre. Nous vîmes occasionnellement des cas plus exceptionnels, comme la lèpre. Nous faisions des consultations, donnions des médicaments, ramenions des personnes à l’hôpital si elles en avaient besoin et si elles pouvaient être transportées. La sécurité était toujours un problème même si je n’ai jamais eu peur pour ma vie, il y Sri Lanka Batticaloa chronologie (suite) tuent ou blessent les civils, les tirs sont réguliers. Les attaques sont fréquentes en périphérie. > Début 2001 La situation reste tendue avec explosion régulière de bombes, de mines … Les personnes essayent d'envoyer leurs enfants hors la région de Batticaloa pour les préserver du recrutement forcé du LTTE. > Fin 2001 et le début de 2002 Les tirs sont la routine quotidienne et la situation reste très fragile mais le cessez-le-feu puis la levée de l’embargo améliorent largement la situation. > 2003 La zone est entièrement ouverte et les personnes peuvent circuler librement. >>> treize 13 >>> avait des incidents fréquents. Une fois, nous avons été réveillés par une attaque dirigée contre un poste de police un peu plus bas dans la rue. Une autre fois, nous étions dans une petite clinique plus au nord sur la côte et un navire commença à bombarder à cent mètres de là où nous étions. Nous avions prévenu l’armée que nous nous trouverions là, mais ils rétorquèrent que le vaisseau n’en savait rien. Ce fut probablement le moment le plus effrayant que j’ai vécu, nous sommes remontés en voiture et sommes partis rapidement.» AMALATHAS STANISLAUS, TRADUCTEUR, BATTICALOA « Quand j'ai rejoint MSF en 1993, il y avait seulement deux cliniques mobiles. À ce moment là, la zone de Batticaloa était divisée en deux parties, l’une appelée « cleared » contrôlée par l’armée et l’autre « uncleared » sous contrôle LTTE. MSF était la seule ONG qui fournissait des soins aux personnes des régions isolées du district de Batticaloa. Les équipes avaient également pris en charge le service des enfants de l’hôpital général de Batticaloa et fournissait un médecin pour faire fonctionner le service. Quelques souvenirs d’incidents et de nos responsables de terrain : La réhabilitation et la gestion des déchets hospitaliers ont pris une part importante dans le programme durant les dernières années. en haut : le bloc de chirurgie principal en cours de rénovation. au milieu et en bas : deux étapes de la construction de l’insinérateur de Montfort désormais utilisé dans beaucoup de missions MSF. 14 quatorze Quand Isabelle était responsable terrain, MSF a commencé à travailler à Mutur dans la zone de Trincomalee. Un jour, Isabelle est partie en vacances à Pottuville, elle s’est fait tirer dessus par une personne inconnue. C'était la première fois que du personnel MSF subissait des tirs. Plus tard, c’est Catherine qui a été nommée responsable terrain. Un jour, tandis que MSF était occupée à faire ses cliniques mobiles à Kathiraveli, plusieurs personnes du village voisin Vakarai étaient blessées à cause d’une explosion et de coups de feu tirés par l’armée. L’équipe est venue au secours de ces personnes, leur a apporté les premiers soins avant de les transporter à l'hôpital général de Batticaloa. Quand Yradj était coordo, un obus est tombé non loin du véhicule MSF et a explosé, alors qu’ils revenaient d'une clinique dans Pondukalchenai, mais heureusement personne n'a été blessé. Mari, un médecin du Japon, a été assisté pour la première fois par un médecin local. MSF a continué à étendre ses services en organisant des cliniques dentaires ou pour les yeux dans plusieurs secteurs difficiles et beaucoup de gens ont pu en bénéficier. A la fin 2002, la coordonnatrice Christine a prêté une attention toute particulière aux soins des enfants et a nommé une infirmière pour s'occuper plus spécifiquement d'eux. Et enfin, Claire qui lui a succédé a continué, elle aussi, à s’intéresser plus spécialement aux problèmes de malnutrition et de santé infantile. » KANDIAH SIVASHANMUGARAJAH, GARDIEN PENDANT 10 ANS À BATTICALOA « En mai 1996, l’une de nos voitures des cliniques mobiles (la « mobile 9 ») se rendait avec notre responsable terrain, Catherine, dans un village appelé Kankachiweddai. Sur le chemin du retour à notre base, ils ont entendu des coups de feu mais sans savoir ce qui se passait. La responsable de terrain m'a appelé par radio et m’a demandé de contacter la brigade 232. Quand j'ai reçu cet appel aucun expatrié n’était dans la maison. J'ai contacté la brigade 232 immédiatement et les ai informé que notre véhicule était sur le chemin du retour à notre base. La brigade m’a averti qu’à cet endroit, appelé Vellaneli, le LTTE et l'armée se battaient. J'ai passé le message au personnel de l’armée, leur demandant qu’ils arrêtent leurs coups de feu pendant 10 minutes, le temps de laisser passer notre véhicule à cet endroit, rapidement. Alors j'ai informé notre voiture par radio et ils sont revenus à la base, indemnes, environ une demi-heure après. Je n'oublierai jamais ça. Une autre fois, les autorités de l'hôpital ne pouvaient pas nous fournir l'eau. Avec la permission de notre coordinatrice terrain, je suis allé au Secrétariat de la Division où j'ai rencontré le comptable et lui ai demandé de nous fournir l'eau deux fois par semaine. Il a donné un ordre écrit à l'officier responsable de l'approvisionnement pour que MSF puisse obtenir de l’eau gratuitement. Aussi, je peux le dire, lorsque MSF va quitter Batticaloa, les personnes vivant dans les régions éloignées et souffrantes ne pourront pas obtenir les soins appropriés. Les services de chirurgie dans l'hôpital de Batticaloa feront face aux mêmes problèmes. Mais je remercie MSF pour le travail effectué dans Batticaloa. » SIMON JESUTHASAN, TRADUCTEUR, BATTICALOA En 1999, la voiture 5, est restée embourbée sur le chemin, à Thihiliweddai. Un véhicule a été obligé de venir de Batticaloa pour la remorquer. Décembre 1999, nous faisions une clinique à Kaddumurivu. Il y avait alors un camp SLA. Comme nous ne les avions pas informés de notre arrivée dans ce village, le SLA a commencé à nous convoqué. Le médecin des cliniques mobiles a dû leur faire face. En 2000, alors que nous faisions une clinique à Vakarai, des affrontements ont soudainement commencé entre le LTTE et le SLA. Nous avons dû remballer nos affaires et vite quitter les lieux. Toujours en 2000, notre équipe voyageait près de Paddipalai, quand une mine a sauté. Nous avons vécu des périodes où nous avons eu peur. En 2002, nous revenions de Vakarai. La voiture 18 s’est « décomposée » à Mankerny. Un véhicule a dû venir de Batticaloa pour les réparations. De nombreuses fois, des femmes enceintes ont été transportés à l'hôpital et trois ont accouché dans le véhicule MSF. Beaucoup d'enfants ont été transportés à l'hôpital dans un état critique. Un de Pondukalchenai, un de Vahaneri et un de Thihiliveddai sont morts en route. Un jour de fête, nous avons vu beaucoup de pneus et de troncs brûlés sur les routes. Nous avons dû nous détourner vers d’autres routes pour revenir à Batticaloa. Au final, nous avons sauvé beaucoup de vies en transportant des personnes à l'hôpital.» Sri Lanka Batticaloa Consultation avec le docteur Aya Theagalingam. Clinique mobile à Kitu, district de Batticaloa. gestion de la douleur Malgré la volonté des équipes, depuis le début, la prise en charge de la douleur restait extrêmement difficile à réaliser. En juin 2001, l'équipe de Batticaloa organise une conférence pour tous les médecins de l'hôpital au sujet de la douleur. En octobre, un état des lieux est réalisé au sein des services montrant que la prise en charge de la douleur est très insuffisante : les médicaments utilisés sont inadéquats, le personnel médical et paramédical est peu formé aux problèmes de la douleur chez les patients. En novembre 2001, les infirmières des salles des services de chirurgie sont sensibilisées à une meilleure évaluation de la douleur des malades et à l’introduction de nouveaux médicaments. À la demande de l’équipe chirurgicale un programme spécifique a démarré. En octobre 2002, une équipe composée d’un médecin et d’une infirmère spécialistes donnent au personnel les moyens de faire face et de mieux prendre en charge la douleur. Des protocoles sont établis préconisant l’utilisation d’antalgiques simples mais plus adaptés ainsi que des outils de mesure de la douleur. Une formation est dispensée au personnel médical et paramédical. Après six mois, les améliorations sont modestes mais les habitudes de prescrition et l’attitude des soignants vis-à-vis des patients commencent à changer. On peut espérer que les choses vont aller en s’améliorant. quinze 15 Batticaloa S’infliger le mal chiffres > 345 brûlés admis entre juin 1999 et juillet 2001 L’augmentation croissante du nombre de brûlés admis à l’hôpital de Batticaloa -et, parmi eux, le nombre alarmant de suicides chez les femmes- a amené les équipes MSF à prendre en charge ces nouveaux types de blessures en 2000. > 64% d’accidents > 25% de tentatives de suicide > 78,5 % des victimes d’origine tamoule, 19 % d’origine musulmane > Age moyen : 21 ans (17 ans pour les accidents, 29 pour les suicides) > Au-delà de 50 % de la surface du corps brûlée, l’issue est fatale > 27 % des patients admis sont décédés. Dans les cas de tentative de suicide, ce taux monte à 71% Le problème des brûlés à Batticaloa n’avait pas été pris à bras le corps depuis l’arrivée de MSF en 1987 jusqu’à ces dernières années. Pourtant une étude, menée par Véronique Laloe, responsable chirurgie à l’hôpital, entre juillet 1999 et juin 2001, a montré qu’en deux ans 345 patients avaient été hospitalisés pour cause de brûlures. 64% étaient de nature accidentelle et au moins 25% étaient auto-infligées, le reste étant des brûlures par agression ou des cas non élucidés. Les femmes dominaient largement dans toutes les catégories sauf les causes criminelles. UNE OFFRE DE SOINS INSUFFISANTE « Ces brûlures sont tout a fait majeures puisqu’en moyenne c’est 25 % de la surface du corps qui est brûlée, 49% dans les cas de tentative de suicide, explique Véronique. Ces patients sont facilement négligés par un personnel déjà bien occupé, du fait de la lourdeur des soins infirmiers. C’est aussi un travail peu gratifiant car un patient brûlé sur quatre meurt de ses brûlures. Le taux de suicide au Sri Lanka est l’un des plus fort au monde. Pour tenter d’expliquer ce phénomène, le psychiatre de l’hôpital de Batticaloa avance avec discernement que c’est un trait de caractère propre à son peuple. Il voit notamment dans le suicide une « incapacité à résoudre les problèmes », avançant que la plupart des personnes sont incapables de faire face à une simple difficulté quotidienne. 16 seize C’est donc bien plus meurtrier que la guerre du moins ces dernières années. » En plus, il n’y avait au Sri Lanka qu’un service de brûlés, à Colombo, la capitale, à huit heures de route. « Pas question d’y transférer des patients dans un état critique, poursuit Véronique, car ils ont besoin de quantités massives de liquides de perfusion, ce qui est en pratique impossible à réaliser dans l’ambulance non médicalisée qui assurait les transferts. » Impossible donc d’ignorer les conditions épouvantables d’hospitalisation de ces patientes, d’être insensible à leur immense souffrance physique et psychique, aux stigmates qu’elles porteront toute leur vie. Impossible également de ne pas tenir compte des effets repoussants et négatifs qu’ont les brûlés sur l’ensemble des équipes soignantes. L’équipe a travaillé en collaboration avec les équipes du ministère de la Santé afin d’humaniser et d’améliorer les soins apportés aux brûlés socialement mis à l’écart et surtout, les cas de suicide, très nombreux et tabous. LEUR OFFRIR UNE PLACE PLUS DIGNE ... Des groupes de discussions avec le personnel soignant ont été monté avec la contribution du service psychiatrique de l’hôpital. Celuici s’est engagé à suivre les infirmières des services de chirurgie pour leur poser des questions, les conseiller ou simplement leur parler du suicide afin de le rendre moins stigmatisant. Car, « sous prétexte de les isoler pour éviter les surinfections, les patientes étaient recluses dans un espace du service d’hospitalisation éloigné des yeux de tous, explique Véronique. Les difficultés de prise en charge de ces patients dans un service de chirurgie générale sont majeures car elle doit être multidisciplinaire pour avoir quelque chance de réussir». Un meilleur aménagement du service grâce à la réhabilitation des locaux, un travail auprès du personnel infirmier, un effort sur la nutrition et le contrôle de la douleur, des tentatives de kinésithérapie, un recours aux services du psychiatre et une écoute journalière des patients par une personne recrutée par MSF ont contribué à une certaine amélioration des conditions générales de soins. Sans oublier la chirurgie plastique ponctuelle pour corriger les séquelles très fréquentes. On peut affirmer aujourd’hui que l’équipe a réussi à attribuer une place plus prépondérante pour les brûlés au sein de l’hôpital et à démystifier les cas de suicide. « Beaucoup reste à faire mais j’espère que nous aurons contribué à diminuer les souffrances de ces femmes et à faire évoluer les mentalités du personnel soignant », conclut Véronique. Sri Lanka Vavuniya, ville stratégique Vavuniya est une grande ville tamoule au nord du pays, située en zone gouvernementale, à quelques kilomètres au sud de la ligne de front. Sous administration militaire, cette ville, jamais prise par les Tigres, a vécu sous un climat de tension permanente tout au long du conflit. Les quartiers sont contrôlés par différentes milices tamoules pro ou antiLTTE, et la contrebande avec le nord du pays y est très importante. En avril 1995, suite à l’intensification des combats dans la zone, MSF a été amenée à intervenir dans l’hôpital de Vavuniya, qui manquait de chirurgiens. Avril 1995. Les hostilités entre le LTTE et le gouvernement de Sri Lanka reprennent de plus belle. Jusque-là, 400 000 personnes environ, habitant dans la zone de guerre sous contrôle des Tigres, au nord de la ligne de front entre Kilinochchi, Mannar, Mullaitivu et Vavuniya, n’avaient pas accès à un service de chirurgie. Dans le meilleur des cas, les Tamouls étaient transférés sur Anuradhapura, à 60 km au sud de la ligne de front, en zone cinghalaise. Mais beaucoup redoutaient d’aller dans cette zone, d’autant que les soins post-opératoires semblaient être moins bien assurés pour eux que pour les Cinghalais. UN RÔLE DE PIVOT LOGISTIQUE Sur demande du ministère de la Santé, une équipe MSF composée d’un chirurgien, d’un anesthésiste et d’une infirmière prend alors en charge la chirurgie d’urgence dans l’hôpital de Vavuniya. Une activité qui couvre l’ensemble de la population civile, aussi bien tamoule que cinghalaise, de la région de repères Vavuniya mais aussi de celle du Vanni, au nord de la ligne de front. MSF assure donc également des transferts de malades vers l’hôpital depuis cette région isolée en zone Tigre ou depuis des zones « uncleared », afin que tous puissent accéder à des soins de qualité. Programme de Vavuniya > Chirurgie, hygiène et réhabilitation des salles de chirurgie > Ouverture : avril 1995 > Fermeture définitive : mars 2003 Outre l’activité chirurgicale et le suivi de la qualité de prise en charge des malades en phases pré et post-opératoires, les équipes se chargent de suivre les patients référés dans d’autres services comme la neurologie, la pédiatrie, ou bien encore l’obstétrique. Par ailleurs, Vavuniya est pour MSF un lieu stratégique au niveau logistique : la ville sert de pivot entre Colombo et notre mission de Madhu, de l’autre côté de la ligne de front, tant pour le matériel que pour les médicaments. C’est là que sont négociés tous les transports de matériels par convois jusqu’aux zones tenues par les Tigres. Près de quatre ans après avoir pris ses quartiers à Vavuniya, en janvier 1999, MSF ferme son programme de chirurgie. Une décision justifiée par le déplacement de la ligne de front plus au Nord et la baisse consécutive du nombre d’opérations. Mais dès novembre 1999, une équipe chirurgicale de MSF reprend du service à l’hôpital de Vavuniya : les Tigres sont aux portes de la ville (à tel point que le LTTE demande à la population d’évacuer), les combats s’intensifient et le nombre de blessés remonte en flèche alors qu’aucun chirurgien national n’a encore été nommé à l'hôpital. Cette nouvelle mission, d’abord limitée à un an en raison de l’instabilité de la zone, se prolongera finalement jusqu’en septembre 2002, date à laquelle les > Population couverte : 150 000 personnes environ en 2001/2002 Hôpital de Vavuniya > Environ 250 lits dont 55 en chirurgie > Année 2002 : 16 500 admissions et 2 400 opérations > 20% des admissions chirurgicales en provenance de zones « uncleared » activités chirurgicales sont remises à un chirurgien sri lankais. Entre temps, en mars 2000, sur recommandation d’un chirurgien et d’un logisticien, l’un des axes du programme porte sur l’amélioration des conditions d’hygiènes dans le domaine de la chirurgie et notamment de l’asepsie ainsi que le triage et l’incinération des déchets. Un incinérateur de type Montfort a été construit à Vavuniya et a suscité un fort intérêt de la part des autorités sanitaires sri-lankaises. Cet incinérateur a, par ailleurs, été construit à Point Pedro, Mannar et Batticaloa. En décembre 2002, ces activités, notamment celles concernant la gestion des déchets sont transmises au personnel de l'hôpital. Et quelques mois plus tard, en mars 2003, la mission ferme définitivement ses portes. > Personnel international (2002) : 3 permanents et 3 en soutien technique pour de courtes durées > Personnel national : 6 personnes dix-sept 17 Notre Dame de Madhu sous les bombes témoignage « En novembre 1999, les Tigres lançaient des offensives tout azimut. La mission de Vavuniya a été ouverte le jour même du bombardement de l’église de Madhu. Véronique, la chirurgienne de Batticaloa était arrivée le matin même et dans la nuit, elle a reçu une soixantaine de blessés ! Nous avons pris la décision d’ouvrir Vavuniya. Après les événements de Madhu, les équipes ont cherché à retourner dans le sanctuaire alors fermé à toute aide humanitaire. L’équipe est partie à deux voitures. Arrivée au check-point, elle a « forcé » le passage insistant pour voir les populations et ce qui se passait derrière. Ils ont réussit à passer sauf qu’ils n’ont pas pu revenir. C’était le risque, ils le connaissaient. Plus moyens de faire demi-tour et de passer dans l’autre sens, ni d’acheter de quoi manger. L’équipe avait les bagnoles pleines de médicaments mais pas une brosse à dents, à peine un tee-shirt MSF. Ils sont restés ainsi bloqués pendant trois semaines, à bosser bien sûr mais à manger la nourriture que leur donnaient les déplacés de Madhu et à dormir avec eux ». Guillermo Bertoletti, responsable du programme, Paris, 1997-2001 18 dix-huit Madhu n’est pas une ville comme les autres. Ce sanctuaire chrétien, situé dans le district de Mannar sur la côte nord-ouest de l'île, est devenu un grand lieu de pèlerinage car la Vierge y aurait fait une apparition. Lorsque la guerre a éclaté, ce lieu saint a servi de refuge à une dizaine de milliers de civils et s’est donc très vite transformé en un camp pour les personnes déplacées. Grâce aux infrastructures destinées à accueillir les pèlerins (système d’adduction d’eau, terrains pour l’installation de tentes et d’abris provisoires), tout était réuni pour éviter un vrai désastre sanitaire. Seul problème : aucune structure et aucun personnel de santé n’étaient présents. C’est dans ce contexte que Médecins Sans Frontières a ouvert, en 1990, un programme d’assistance aux populations déplacées dans le sanctuaire de Madhu. Le premier programme véritablement installé en zone rebelle des Tigres, juste derrière la ligne de front. DES BESOINS DE PLUS EN PLUS IMPORTANTS D’offensives en contre-offensives, le district de Mannar est au fil de la guerre civile le théâtre de nombreux combats entraînant d’importants mouvements de populations et, de fait, des besoins humanitaires croissants. MSF y démarre ses activités dès 1987, avec un programme de chirurgie et d'obstétrique dans l'hôpital de Mannar. Puis, en 1988, MSF vient en aide aux populations qui s’étaient réfugiées en Inde et rentrent au Sri Lanka. Enfin, en 1990, la mise en place de cliniques mobiles - d’abord au départ de Mannar puis directement depuis Madhu – permet d’apporter une assistance médicale à toutes les populations isolées de la région en mettant l’accent sur le suivi materno-infantile et la vaccination des enfants. Désormais présentes au sein même du petit hôpital de Madhu, construit dans l’ancienne école, les équipes MSF offrent aux populations environnantes des soins complets et de qualité. Ce n’est qu’en 1995 que les équipes mettront en place un système de transport par ambulance des personnes les plus gravement malades vers l’hôpital de référence, Vavuniya, en zone gouvernementale ou, si cela était impossible, à Kilinocchi avant le bombardement de l’hôpital puis à l’hôpital de Mallavi (à partir de 1997), au cœur même de la région Tigres de Vanni où MSF Hollande avait jusqu’ici une mission chirurgicale. L’aide humanitaire doit faire face à d’importantes difficultés de déplacements. Les transferts de malades prennent parfois Madhu semblait protégée, mais, comme ailleurs les combats ont fait rage et les bombes, des dégâts humains dramatiques. jusqu’à quatre heures, au lieu de l’heure et demi normalement nécessaire pour le trajet. Lorsque ces transferts sont impossibles, c’est l’hôpital de Kilinocchi puis en 1997, celui de Mallavi, où MSF Hollande mène une mission chirurgicale, qui servent de solution de repli, au cœur même de la région Tigre du Vanni. L’approvisionnement en médicaments et en matériel médical de toute cette zone, et particulièrement de Madhu, est rendu extrêmement difficile par les délais administratifs très longs et l’embargo imposé par le ministère de la Défense sri lankais. « Nous attendions souvent des semaines l’autorisation de faire passer notre matériel et nos médicaments, se souvient Nicolas Beaudoin, logisti- cien volant en 1996/1997. Dès que nous l’obtenions, nous devions tout passer en revue avec les militaires de Vavuniya avant de partir pour le poste militaire sur la ligne de front, juste avant le no man’s land de deux kilomètres qui nous séparait de Madhu.. Il ne fallait pas transporter plus de choses que ce que stipulait l’autorisation et il fallait préciser sur nos listes jusqu’au nombre de rouleaux de papier toilette. Certains médicaments comme les antidouleurs ou les anesthésiants étaient purement et simplement interdits, tandis que d’autres produits étaient très contrôlés, par exemple les piles avec lesquelles le LTTE pouvait fabriquer des détonateurs de bombe ! ». DE LA RESTRICTION À LA SUSPENSION DE NOS ACTIONS Jusqu’en 1999, les activités MSF suivent leur cours. Le dispensaire de Madhu devient le seul centre de référence du secteur et le système de transfert des malades vers les hôpitaux environnants ainsi que les activités de cliniques mobiles fonctionnent très bien. Puis, fin mars 1999, l’armée reprend le contrôle de Madhu et l’accès aux zones sous contrôle du LTTE, où MSF conduisait ses cliniques mobiles, devient de plus en plus difficile, restreignant les déplacements des équipes et les lieux de visites. Les activités dans le dispensaire de Madhu sont néanmoins maintenues afin de continuer à offrir aux populations une prise en charge médicale. À partir d'avril 1999, seul le camp de déplacés de Palampidy est accessible à l’équipe des cliniques mobiles en raison des restrictions militaires. Le service d'ambulance sert aussi bien au transfert des patients qu’à l’acheminement des kits de traitements du choléra pour Madhu. En juin 1999, lorsque la population de Madhu est entièrement évacuée, MSF décide de suspendre ses activités dans le dispensaire et confie au personnel local en place un stock d’urgence. Le système de transfert par ambulance est lui aussi interrompu. La seule clinique mobile subsistante de Palampidy est poursuivie depuis l’hôpital de Murunkan, où MSF a ouvert au début de l’année 1999 un programme de cliniques mobiles. L’ATTAQUE DE L’ÉGLISE DE MADHU En novembre 1999, les combats s’intensifient dans la région, entraînant à nouveau d’importants déplacements de personnes qui cherchent refuge à Madhu. Alors que les Tigres tamouls et l’armée sri lankaise se disputent le contrôle du sanctuaire, se produit un événement dramatique. Le 20 novembre, à 11 heures du soir, l’église de Madhu est bombardée à quatre reprises, sans que l’on sache avec certitude à quel camp attribuer cette attaque. L’église de Madhu abritait environ 3 000 personnes. Trente-huit meurent sous les bombes, dont treize enfants. Six autres personnes meurent des suites de leurs blessures, pendant leur transfert vers l’hôpital de Vavuniya ou après leur admission. Au final, ce bain de sang fait 44 morts et plusieurs dizaines de blessés. A l’hôpital de Vavuniya, l’équipe chirurgicale de MSF admet 68 patients dans la nuit du 20 au 21 novembre. Parmi eux, 51 femmes et enfants. Le 23 novembre, le LTTE est à nouveau maître de Madhu. Quelques jours plus tard, à l’occasion du Prix Nobel de la Paix, les équipes MSF à Colombo, le 10 décembre, en profitent pour dénoncer ces pratiques de guerre irrespectueuses des populations civiles ainsi que l’usage de mines antipersonnelles et demandent officiellement aux autorités gouvernementales et à celles du LTTE, de stopper leurs attaques sur des civils et de laisser l'aide humanitaire accéder librement à cette zone. « En vertu de la loi humanitaire internationale, les parties aux conflits ne doivent pas attaquer directement les civils ou ce qui relève de leur propriété. Le bombardement de l'église de Madhu, connu des civils comme « sanctuaire sûr », était une violation claire de cette loi », déclare le communiqué publié pour l’occasion. Trois jours plus tard, l'équipe reçoit l'autorisation de retravailler dans cette région et les deux parties au conflit acceptent de faire de Madhu une zone démilitarisée et sécurisée. MSF reprend donc ses activités d’appui au dispensaire, de cliniques mobiles et de transports ambulanciers. Elle porte également assistance aux populations de la ville de Tatchanamadhu, prise en tenaille entre deux lignes de fronts. Après le cessez-le-feu signé en février 2002 entre le LTTE et le gouvernement sri lankais, l'embargo est supprimé et deux accès vers la zone LTTE du district de Mannar sont ouverts. Petit à petit, les populations déplacées du sanctuaire de Madhu regagnent leurs villages. MSF adapte alors ses activités en mettant en place davantage de cliniques mobiles afin d’être au plus près des populations rentrées dans leurs villages respectifs. Ces cliniques mobiles permettent d’atteindre environ 18 000 personnes, tandis que le dispensaire de Madhu couvre, lui, 25 000 personnes. Sri Lanka Madhu repères > 1987 Chirurgie et obstétrique dans l'hôpital de Mannar. > Juin 1990 Cliniques mobiles depuis Mannar pour toute la zone de Madhu. > Fin 1990 Soutien à l’hôpital de Madhu, cliniques mobiles et transferts ambulanciers des malades > Mars 1999 Appui à l’hôpital de Murunkan et cliniques mobiles > Juin 1999 Suspension des activités de Madhu > Novembre 1999 Réouverture de la mission de Madhu avec mêmes activités > Février 2000 Multiplication des cliniques mobiles dix-neuf 19 Le coin des «au revoir» Nous ne le répéterons jamais assez : sans les Sri Lankais, les missions de Médecins Sans Frontières n’auraient pas pu être menées à bien. A l’heure où nous fermons nos dernières missions, beaucoup d’entre eux ont le cœur serré, comme beaucoup de volontaires expatriés d’ailleurs. Nombreux sont les membres du personnel national qui ont vécu l’aventure avec MSF depuis le début ou presque. Avec une patience et une motivation sans faille, ils ont vu des centaines de volontaires défiler sous leurs yeux. Quelques-uns d’entre eux rendent ici hommage à l’association, et certains d’entre nous à eux … séquence souvenirs ! BY RECILDA DALIMA, EX-FIELD COORDINATOR, VAVUNIYA « Durant les seize dernières années, j’ai travaillé avec MSF France. De doux, tristes et 20 vingt remarquables souvenirs font resurgir un passé que j’aimerais partager avec vous. J’espère que les quelques lignes qui suivent vous apporteront un peu de bonheur à mesure que je raconte mon expérience avec MSF France à Mannar, Madhu et Vavuniya. En mai 1988, j’ai rejoint MSF comme aide soignante. Ce n’est que maintenant que je réalise à quel point ce jour fut important pour moi : depuis lors, MSF m’a confié de nombreuses responsabilités (missions), enrichissant ainsi mes compétences, m’offrant jusqu’à un poste de coordinatrice de terrain, dont je suis très reconnaissante. Après avoir travaillé un certain temps comme aide soignante, j’ai été choisie pour être la traductrice d’un médecin. J’ai commencé à travailler à Dalai Mannar, ma ville natale, où arrivaient les réfugiés sri-lankais en provenance de l’Inde. Plus tard, MSF a dû transférer ses activités plus à l’intérieur de la province de Mannar, suivant la demande du HCR et du ministère de la Santé. Ensuite, on nous a communiqué que des personnes étaient évacuées et s’entassaient dans l’église de Madhu pour des raisons de sécurité, nous sommes donc partis visiter… Nous avons été bien reçus par les autorités. Après cette visite nous avons décidé d’appeler l’endroit Camp de Madhu et MSF continua à y travailler. La mission de MSF à Madhu était très appréciée par le public. A l’époque, j’ai eu l’opportunité d’être traductrice à la fois pour le public et pour les expatriés. J’aimais beaucoup mon travail, même si tous les jours le nombre de patients augmentait. Le centre de santé de Madhu devint bientôt un vrai hôpital, avec une section spéciale pour la maternité, permettant à l’hôpital de faire face à n’importe quelle urgence autre que chirurgicale. Personnellement, il me semble que la formulation de « Médecins Sans Frontières » et sa traduction en anglais « Doctors without borders » reflète la réalité. Les médecins travaillant avec MSF ne se sont jamais limités à travailler uniquement pour la communauté Tamul. Les tamuls qui avaient trouvé refuge au Camp de Madhu ont été les plus chanceux de la région de Vanni, d’un point de vue médical. Faisant moi-même partie de la communauté Tamul, j’aimerais en son nom exprimer ma gratitude à MSF, mais les mots me manquent pour le faire. Un jour, alors que l’équipe MSF était en déplacement, un hélicoptère de l’armée sri lankaise commença à tirer sur notre voiture. Immédiatement, le personnel est descendu de la voiture et a commencé à agiter le teeshirt blanc MSF pour faire arrêter les coups de feu, mais l’armée sri lankaise ne s’est pas arrêtée. Ils ont été blessés et grâce à l’aide d’un représentant du CICR, ils ont été transférés vers l’hôpital de Colombo par un avion spécial. Un délégué spécial nous a rendu visite à cette occasion. Il s’appelle Olivier. La première chose qu’il a fait en arrivant c’est d’aller voir le chauffeur de la voiture et seulement après lui avoir parlé, il est allé voir les expatriés qui avaient été blessés. Cela montre bien l’attention que MSF porte au personnel autochtone. A la demande du ministère des Affaires étrangères, MSF a étendu les services d’un chirurgien expatrié à l’hôpital de Vavuniya, et ce, depuis 1995 jusqu’en décembre 2002. Le poste de Vavuniya a eu un rôle majeur dans l’approvisionnement du matériel nécessaire à Madhu et Murunkan. Entre 1988 et 2002, il n’était pas facile de passer les points Sri Lanka de contrôle, mais MSF prit toujours la responsabilité de transporter les patients avec leurs documents et de les emmener à travers tout le pays quels que soient les risques, lorsqu’il y en avait besoin, ils faisaient office d’ambulanciers. C’est une qualité qu’il me serait difficile de décrire à sa juste valeur, je crois qu’aucune organisation n’aurait été prête à rendre un pareil service au peuple. A Madhu, la simplicité des médecins expatriés a joué toujours un rôle éthique important, ils se mêlaient aisément aux réfugiés et respectaient toujours leur culture. MSF cherchait à rendre un service de qualité aux moments opportuns pour aider les plus nécessiteux, et ils y réussirent à Madhu. J’étais à Murunkan jusqu’en novembre 1999, jusqu’à ce que je sois transfèrée au poste de Vavuniya. Depuis lors, jusqu’en 2003, j’ai eu le plaisir de travailler à des postes très divers avec MSF : agent sanitaire, traductrice, aide soignante, pharmacienne, opératrice radio, chargée de transfert, assistante administrative et finalement coordinatrice de terrain. Pendant 16 années, j’ai passé en revue de nombreux postes grâce à l’exécutif de MSF au niveau local et également plus haut dans la hiérarchie. Je suis fière de dire que j’ai passé 25 % de ma vie avec MSF, que j’ai acquis beaucoup d’expérience sur beaucoup d’aspects différents et grâce à cela, je me permets de donner mon avis pour de prochaines missions : 1. Avant de prendre une décision, essayer de contacter plusieurs personnes du staff national individuellement et tenter d’avoir leur opinion qui pourra ensuite donner une bonne indication sur la meilleure voie à emprunter, ou qui éventuellement corrigeront certaines fausses idées. 2. Côté logistique, prêter plus d’attention aux achats : il faudrait avoir un suivi en ce qui concerne l’essence des voitures et les distances qui ont réellement été parcourues. Je manquerais à mes devoirs si je ne parlais pas d’au moins un petit nombre de ceux que j’ai rencontré à MSF. Le docteur Peter Noel a été le premier à m’avoir embauchée pour travailler avec MSF. Il a également été le premier à me donner une lettre de référence. Pareil pour Sabine, infirmière et pour Sologne. Ce fut un plaisir de travailler avec mexicain. J’appris beaucoup de lui. Je pense également aux chefs de mission . Guillermo, qui actuellement fait partie de l’équipe exécutive au QG international à Paris, à qui a succédé Gabriel, qui essaya de comprendre la douleur des autres ; Manana, la coordinatrice médicale, avec qui nous pouvions discuter de tout ce qui nous semblait important et à n’importe quelle heure. Maintenant il me faut parler de ma résiden- Anne-Marie Gloaguen, infirmière à Trinco de février à août 1989. « Un hommage tout particulier à l’infirmière de bloc de Trinco, Shitra. Elle était si intéressée et attachée à MSF qu’elle s’est réfugiée en France en 1991, plutôt qu’en GrandeBretagne où elle avait pourtant de la famille. Nous l’avons accueillie, elle a été prise en charge par beaucoup de MSF ayant travaillé avec elle à Trinco. C’était un bout d’aventure sri lankaise qui continuait. Maintenant elle s’est mariée et vit à Londres depuis 2002. » Guillermo Bertoletti elles. Ainsi qu’avec Marie, médecin, nous étions toutes très soudées. Egalement, le docteur Corinne qui m’a montré et enseigné comment agir en situation d’urgence. Le Dr Mew, un docteur américain, qui avait le pouvoir de prédire de quelle maladie était atteint le patient avant même que la consultation n’ait lieu. Florence, sagefemme qui est restée le temps de deux contrats de 16 mois à Madhu. Le Docteur Raoul des Philippines que les patients aimaient tellement. Véronique, en visite de courte durée, et enfin le Docteur Richard, un ce, la maison MSF à Vavuniya. Pascale, Estelle, Luca ; il m’est facile d’écrire ces noms. Il m’est impossible d’effacer de mon cœur, Yves et Oana, des partenaires à la fois dans la vie et dans l’administration. Ils étaient respectivement chef de mission et administratrice. Je n’est travaillé que deux ans sous leur direction mais leur délicatesse envers les employés embaumait toujours comme une fleur fraîche… Lorsqu’ils avaient quelque chose à rectifier, leur politesse adoucissait si bien ce qu’ils avaient à dire que l’employé écoutait et s’exécutait immédiate- « En tant qu’ancien médecin à Batticaloa, en 1992, chef de mission à Colombo en 1996-1997 et enfin, responsable du programme à Paris entre 1997 et 2001 mes souvenirs du Sri-Lanka ne peuvent être que nombreux. De peur d’oublier ne serait-ce qu’une seule personne, je préfère n’en citer aucune mais, bien au contraire, les saluer toutes. Je voulais ici rendre un hommage à l’ensemble de notre staff local, le remercier pour sa précieuse collaboration, sa patience et sa gentillesse. J’espère pouvoir faire partie de la fête à la fin du mois de juin pour le départ d’MSF et me remémorer de vive voix les bons comme les mauvais moments. Bonne continuation à tous. » vingt-et-un 21 Poetry done by MSF Colombo security guard – Anthony ment. Certains jours, je les contactais 4 ou 5 fois au téléphone, et j’écoutais leurs douces voix, aujourd’hui, je remercie sincèrement ce couple. Good Bye MSF Time has come for us to say good-bye. To leave behind the dearest part of life. Away from MSF shade work and hardness To faraway place…. It grieves us to bid you good-bye To leave behind our soul Knowing that MSF is very breadth each spadework Keep us alive……. We shall miss you oh!, so much Look into our eyes and you will see you in them Look into yours and we see the depth of your love Boundless as the blue ocean Steady as the sunrise Farewell my endless farewell…… Je dois aussi remercier Pascale Noterdaeme, dont j’ai beaucoup apprécié l’approche en tant que coordinatrice médicale. Si je regarde le personnel administratif et de terrain, je crois que 90 % des expatriés ont servi avec conviction la communauté Tamul. Si vous regardez un glaieul prêt à éclore, vous verrez plusieurs bourgeons sur la même tige, mais ces bourgeons n’éclosent pas tous en même temps et le processus d’éclosion risque d’être gâté pour un ou deux bourgeons déjà fanés. Cependant, les fleurs continuent de s’épanouir jusqu’à ce que le dernier bourgeon ait fleuri. Voilà comment je décrirais MSF, malgré une ou deux mauvaises attitudes, en gros MSF a servi pleinement la communauté. Il faut également dire qu’aucune autre organisation n’a eu tant d’honneurs que MSF France. Moi, Recilda Dalima ai aimé, aime et aimerai toujours MSF France. Voici donc ma conclusion. Je profite de cette occasion pour remercier tous et chacun des expatriés ou du personnel national, pour leur coopération et leur aide envers moi sur tous les aspects. Je remercie également les autorités compétentes de me permettre de rédiger ces quelques lignes. Je sais bien que vos services sont attendus ailleurs dans le monde par des gens qui sont profondément dans le besoin. Il est temps que vous partiez. J’espère avoir une chance de rencontrer mes anciens collègues n’importe où dans le monde, à n’importe quel moment. Espérons que Dieu m’aidera pour cela. Au revoir.» 22 vingt-deux AYA. THEAGALINGAM MÉDECIN CLINIQUES MOBILES BATTICALOA. « Je suis arrivé au Sri Lanka en 1997 pour travailler d’abord pour le gouvernement puis dans un hôpital privé. Le 22 mars 1999, je suis entré chez MSF comme médecin itinérant. Plus je travaille pour MSF, plus je m’y sens bien. C’est très motivant de travailler pour une telle association qui comprend les difficultés des gens, les écoute, prend véritablement en compte leurs besoins, bref, établit une vraie relation avec la population qu’elle soigne. Lorsque MSF est arrivée au Sri Lanka, elle a su immédiatement prendre les décisions qu’il fallait pour faire face aux besoins : embauche de chirurgiens et d’infirmières pour ainsi adapter ses effectifs aux nécessités du terrain. Le gouvernement a abandonné de très nombreux secteurs de la médecine, et MSF pallie ce vide en fournissant les médicaments nécessaires et en payant du personnel médical. En qualité de médecin itinérant, je travaille dans des endroits reculés. Je me sens réellement soutenu par MSF. La population aussi se sent écoutée, considérée. La relation avec MSF est très appréciée. Les relations entre le personnel local et les volontaires expatriés sont très bonnes. Je suis très triste de quitter cette mission en juin. J’ai l’impression que MSF partie, il faudra du temps pour combler le grand vide qu’elle laisse. Il y aura des hôpitaux, mais sans médecins. J’ai le sentiment d’abandonner la population et je crains que la population ne se sente, elle aussi, abandonnée. J’ai en effet travaillé pendant 22 années avant d’entrer à MSF mais je n’ai trouvé nulle part ailleurs une telle relation humaine. Je souhaite remercier les médecins avec qui j’ai travaillé, ainsi que toute mon équipe. » ELISABETH SZUMILIN, MÉDECIN À TRINCO EN 1987 ET 1988 « J’ai une pensée toute particulière pour Master Leo, mon traducteur tamoul de 60 ans bien sonnés, qui n’a jamais voulu de cette guerre. Egalement pour le cuisinier « Apu » qui veut dire papa, ou grand-père ainsi qu’à sa famille. Toutes les équipes qui se sont succédées à Trincomalee ont gardé de cet homme un souvenir merveilleux. En plus, ça tombe bien pour un cuisinier, il faisait super bien la cuisine. Lorsque je dis que je me levais tôt…il se levait encore plus tôt pour nous préparer notre pique-nique. Souvent, c’était le son de la noix de coco qu’il râpait pour nous (l’équipe mobile) qui me réveillait. Il a donc dû en supporter des vertes et des pas mûres ! Les équipes MSF expats : nous nous sommes toujours super bien entendu (même avec les chir, réputés caractériels !!!!). Maintenant, quand j’entends le nombre de problèmes d’équipes qu’il y a parfois dans les missions, je me demande toujours…mais comment aije eu autant de chance dans toutes mes missions pour que ces problèmes ne soient jamais à l’ordre du jour ? Toujours réglés entre nous. J’ai enfin une pensée particulière pour mon ami, même s’il ne fait pas partie d’MSF, Rohan Mendis, cinghalais, plongeur de profession, qui m’a fait découvrir la beauté des fonds marins de cette île et tant d’autres choses encore. J’aimerais pouvoir le retrouver. » SIMON JERUTHASAN – TRADUCTEUR « Je suis interprète pour MSF depuis 1997. C’est un de mes amis qui m’a informé à l’époque que MSF cherchait un interprète. J’ai commencé par un poste de six mois, puis un poste à temps partiel et enfin un poste à temps plein. Avant MSF, j’ai occupé diffé- Sri Lanka rents emplois, dont un au profit du gouvernement. Les médecins ont toujours été très agréables avec moi. Les relations entre le personnel local et les expatriés sont très bonnes. Je peux citer plusieurs exemples personnels. Les coordinateurs m’ont aidé à obtenir un prêt, m’ont aidé ainsi que ma belle-mère sur le plan financier lorsque nous avons eu de grandes difficultés. Un autre exemple, l’un des médecins, une femme française, a refusé de me laisser seul avec des soldats qui voulaient me parler car elle voulait me protéger. D’autre part, nous avons eu beaucoup d’occasions d’être avec le personnel expatrié : soirées, fêtes de Noël … Nous sommes donc très tristes lors du départ de certains expatriés, …pour d’autres, non. MSF a fait beaucoup de travail : intervention dans des cliniques, intervention sur la délinquance, dans le domaine dentaire, fourniture de médicaments, transport de malades. Il y avait également les formations de volontaires sur plusieurs journées. C’était très bien. J’ai été très heureux de voir la population secourue, soignée et défendue. MSF aujourd’hui quitte l’île. En ce qui me concerne, sur le plan professionnel, j’ai l’opportunité de devenir chef de produit pour NDO. Si cela ne marche pas, je retourne chez moi. Aujourd’hui, il est nécessaire que les autorités sri lankaises prennent le relais et assument la responsabilité médicale qui leur est dévolue. MSF a fait un très bon travail, a montré la voie, le chemin à suivre. Mais le gouvernement est aveugle, et je crains qu’il ne fasse rien.» SUREASH KIRUBARAKAN, LOGISTICIEN-ADMINISTRATEUR « Avant le Sri Lanka, je travaillais en Arabie Saoudite. Puis j’ai eu l’opportunité de tra- vailler en tant que volontaire pour la Croix Rouge. Je me suis alors marié et j’ai eu deux enfants. Je ne pouvais donc pas rester volontaire, ça ne rapportait pas assez d’argent. A ce moment là, MSF cherchait une personne eux. Nous avons vu des tas de morts. Notre équipe voulait savoir ce qui se passait, ce qu’on nous cachait. Les militaires nous demandaient alors de partir sans poser de questions. Nous devions ramasser les corps Ariane Betz, infirmière anesthésiste à Trinco, puis mission à Monaregala. De mars 1991 à mai 1992. « J'aurais un remerciement tout particulier pour Apu, le cuisinier de Trinco qui nous faisait de si bon curry de crabes. Mais la mission étant déjà fermée depuis longtemps cela est peut-être un hommage qui tombe dans les eaux de la baie. Je trouve sinon cette initiative très sympa. Si les programmes ferment au Sri Lanka c'est que les choses vont mieux, voire bien, et je ne peux que m'en réjouir.... polyvalente. J’ai rencontré un coordinateur MSF américain. Il m’a demandé si j’avais de l’expérience dans le domaine de la radio. Je lui ai répondu que non, j’avais juste vu faire mais je n’y avais jamais touché. Quelques jours de formation ont suffi et c’était bon pour moi. J’étais le premier opérateur radio, et je m’occupais aussi de toute la logistique et de l’administration. Plus tard j’ai accepté de travailler en tant que conducteur pour les cliniques mobiles. J’ai fait ça pendant trois ans. Nous n’arrêtions pas de nous déplacer sur des sites dangereux. En fait, la majorité des civils ne pouvaient pas franchir les check-points à cause des militaires qui le leur interdisaient. Comme ils ne pouvaient venir jusqu’à nous pour se faire soigner, nous devions donc aller jusqu’à et partir. La population a été accueillante avec nous, elle nous a soutenu. Lorsqu’elle avait des informations sur les attaques, elle nous les faisait parvenir. Aujourd’hui la situation s’est améliorée. Les gens peuvent se déplacer facilement d’un point à un autre. J’ai vécu une belle et très forte expérience au sein de MSF. J’ai eu l’opportunité de devenir assistant logisticien niveau 6, en 2002. Et depuis peu, niveau 7. Je remercie tous les expatriés et le staff national. J’espère que MSF pensera à moi, si elle revient par ici, même si je ne dis pas qu’elle ne doit pas partir. Comment j’envisage mon avenir ? J’aimerais retravailler avec une autre ONG, même si ma préférence va à MSF, la meilleure organisation humanitaire que j’ai connue. C’est vrai En espérant que la paix tienne plus longtemps cette fois ! » Une pensée pour : - Bernard qui un jour a décidé de mettre fin à ses jours. - Hooshang, premier chirurgien permanent MSF, décédé en 1997 à son retour d’Éthiopie. Il a participé à 52 missions dont 16 au Sri Lanka. vingt-trois 23 que j’ai toujours été satisfait des expats MSF mais il aurait suffit qu’une personne de l’équipe n’aille pas, pour que tout soit gâché.» Emmanuel Baron, médecin, Madhu, avril à novembre 1995. « Je souhaite saluer la compétence, la gentillesse et l’engagement du Docteur Sabah de Madhu.» Sincèrement SHOBANA CHRISTY, TRADUCTEUR PUIS RADIO-OPÉRATEUR « Juste un petit incident que je voudrais partager avec vous tous. J’étais à l’époque à Madhu et nous étions partis faire les cliniques mobiles dans Tachchinamadhu. À cette époque, la zone était considérée comme « uncleared ». Ce jour-là, en mai 1997, l'ar- ROCKSON COLLINS, LOGISTICIEN, A REJOINT MSF EN 1996 DANS L’HÔPITAL DE JAFFNA. HOMMAGE ACROSTICHE Memories flow sweet and hard like ebb and tide in our hearts. And Events are twinkling as morning stars on our pool minded sky. Then Doctors, nurses travel on a train called “expats services” Enjoyed the journey with log and admin and also the national team Carried the duty with spirit and honest in our shoulders – to the way along In and out from 8 to 5 is the time for us from 1986 – In this pearl November on 99 was the greatest month on my track in MSF life – As Started the mission again in Madhu with my superiors on that time Suffering people get the relief from sickness and diseases Appreciate its service with joyful and thankful Nothing is impossible in emergency to start and rundown Speed and selection are the need of necessity France has the head quarters of our association Refugees praised always its service in precarious situation Overall decisions always get us in front of leading North and East, West and South, all are the parts of its body Thank you again for its service in our island for seventeen years I’ll follow all my way of its way Everywhere in missions are the good memories for public Remembrance cannot be erasable from our hearts End of the mission and leave the country will not clear the mark of MSF because Still it’s living and covering all of our soul 24 vingt-quatre mée de Sri Lanka est entrée dans la région de Madhu par surprise. Les gens ont commencé à crier et à courir, essayant de fuir. De Madhu, MSF nous a appelé par la radio nous indiquant de revenir d’urgence à la base. Nous avions vraiment peur mais nous avons pris notre véhicule et sommes partis, laissant derrière nous seulement une personne du staff car nous ne savions pas ce qui pourait nous arriver sur le trajet entre Tachchinamadhu et Madhu. Nous avons entendu quelques bruits de tirs et nous avons même pu voir du sang sur la route. Nous étions morts de trouille et nous pensions tous que nous allions mourir. De Madhu, ils nous ont rappelé encore par la radio. Notre coordonnatrice terrain a arraché la radio et a commencé à appeler : "Mobile 8, Mobile 8 ?". Mais il n'y avait aucune réponse de l'autre côté. En tant que traducteur à ce moment là, je faisais les mêmes appels qu'elle. Mais toujours aucune réponse. Nous sommes finalement arrivés dans Madhu. Et c’est seulement à ce moment là que notre médecin a remarqué que le microphone que je tenais toujours dans ma main n’était plus relié à la radio ! En outre, lorsque nous appelions « mobile 8 » par radio, nous ne risquions pas d’obtenir une réponse car nous étions dans la « mobile 8 ». Plus tard, nous avons beaucoup ri de cette aventure. Je me suis vraiment amusé avec MSF. Nous avons fait beaucoup pour les gens dans les secteurs « uncleared ». J’espère que MSF sera de plus en plus actif dans le monde.» JACQUES BRIOIS, INFIRMIER ANESTHÉSISTE, VAVUNIYA, AOÛT 1995 « J’étais à Vavuniya durant un mois avec Abdeslam Khairouni, chirurgien et Patrice Vastel, le log. L’hôpital avait une équipe adorable, Yogi, l’infirmière a dû nous supporter et nous avions énormément de travail. Un jour, je n’ avais plus de gaz anesthésiant, j’ai angoissé quelques jours et Ô miracle le ministre de la Santé de Sri Lanka m’a ramené de Colombo le produit tant attendu. C’était une femme d’une volonté et d’une ténacité incroyable ! Une autre petite histoire : un jour, j ai planté un arbre devant la maison MSF et j’espère qu il grandira dans un pays en paix. Merci a tous. » 210 personnels nationaux et 860 volontaires internationaux Avec une moyenne de 70 départs par an environ, le Sri-Lanka a toujours été l'une des plus grandes missions de MSF en terme de gestion de ressources humaines. Ce qui caractérise aussi ce pays, c'est le turn-over important des volontaires en raison des activités de chirurgie d'urgence. Ainsi 253 chirurgiens, 145 médecins anesthésistes, 70 infirmières anesthésistes ou de blocs s'y sont rendus, souvent à plusieurs reprises mais pour de très courtes missions. vingt-cinq 25 merci aux 210 personnels nationaux A.S. Recilda DALIMA, A. Benadad CROOS, A. FERNANDO, A. Jayanthy FATIMA, A. MARY LUCIA,A. MOHAMED AZAD, A. NESARAJAH, A. NICOLAS, A. PRISKA VOJINI, A. THEAGALINGAM, A. UTHAYAKKUMAR, A.A. LOBENDHAN, A.F. REGINOLD, A.J. SRITHARAN, A.L. Godwin PHILLIP, Aloysa PIETEREZ, Anthony ANPARAJI, Anusha RUPASINGHE, B. AMIRTHAKUMAR, B. THURAISINGAM, B.S. Ishanthi I.SAMARAWEERA, Bernard R. COOMARASWAMY, C. ANTHONIPILLAI , C. SIVARATNAM, Chandra SELVARATNAM, Christopher S. KUNANAYAGAM, Dorin PRIYADHARSHINI, E.B.M. SHANTHIKUMAR, E.P. PONNIAH, Elizabeth SIMION, Elvis DELIMA, F.KANIKKAINATHAN, Gabriel AROKIYAVATHY, Ira NAVALEESVARAN, J. ANNAMMAH, J. JEGASOTHY, J. JESUTHASAN, J. JEYATHA , J. KALANITHY, J. MARGRET, J. MARIYADAS, J. SEEMANPILLAI, J. Stalyn ISAC, J. THURAISAMY, J. VAITHIYANNATHAN, J.A. PREMALATHA, J.R. INDRANI, Jesus MARY, Jude F. VIJAYAKUMAR, K. BALASUBRAMANIAM, K. JAYAKUMAR, K. JEYARAJAH, K. KUGARANJINI, K. LEDCHUMYKANTHAN, K. MAHENDRAN, K. PATHUMANITHY, K. PURANTHARAKUMAR, K. RAVEENDRAN, K. SHANTHINI DEVI, K. SIVANATHAN, K. SIVASHANMUGARAJAH, K. SUBRAMANIAM, K. SUREASH, K. THAMAYANTHY, K. THAMMAYANTHY, K.M.MANIVE, K.SABARATNAM, Karuppaiah THANGAIYA, Kathirkamu SIVANATHAN, L.M. Srinath GOONARATN, L.S.Dammika WIJEYAWARDENE, M. ANSALAM, M. Anton CHARLES, M. GOVINDARAJAH, M. INDRANI, M. JOSEPH, M. MANOHARAN, M. MYLVAGANAM, M. Nihal PERIS, M. RAMAYEE, M. RANGANATHAN, M. RATNASINGAM, M. SIVASHANMUGAM, M. STEPHEN, M. Vijitha SRIMURUGAN, M.A. WIJENDRAN, M.C. PATHINATHAN, M.E. METTILDA, M.F.J. ELAMURUGAN, M.N. AMUTHINI, M.P. ASOK KUMAR, M.T. PATHINATHAN, Maheshwaran FREDRICK KUMAR, Maria A. MATHALENA, Marie Dorres RODE, Marimuthu RUDRAN, Mary Pamela DISSANAYAKE, Mary S. MACTALIN, Michael CROOS, Murugesu JEYARANI, N. AMIRTHALINGAM, N. IYATHDURAI, N. JEGATHEESWARY, N. MAHENDRARASA, N. RAJENDRAN, N. SELLATHURAI, N. VARATHARAJ, N. VELAYUTHAPILLAI, N. VIJEYARANI, NAVARATANAM SUHANTHAN, Nirmalie Lucille PERERA JAYASINGHE, Nirosha V. BENEDICT, P. ARUMUGAM, P. MARY CHRISTIN, P. Michel CROOS, P. RITAMMA, P. SHANTHINY, P.D. DHARMAWANSA, P.Ranjan SIRIWARDANE, Paul GUNASEKARAM, Prarthana Sanjeewani KALUARACHCHI, R. INDIRAGANDY, R. MEGANATHAN, R. PARAMARAJ, R. PUSHPAMALA, R. RAJAGUMAR, R. SELAVAMALA, R. SILVIYA PRIXIC, R. SINNAIAH, R. SUBRAMANIAM, R.K.ROHAN, R.P. GUNASENA, R.RANAGANATHAN, Rajini PASUPATHI, Ramanathan KUMAR, Regina SANTHIAPILLAI, Rockson C. MARIYANAYAGAM, Roshan KUMARASWAMY, Roshini WIJESIRI, S. AMALATHAS, S. ANTHONIPILLAI DAISY, S. ARUNTHAVACHELVAN, S. ARUNTHAVACHELVAN, S. CHRISTY REVAL, S. CONCELLA, S. EASWARATHASAN, S. ELANKESWARN, S. JAYASEELAN, S. JESUTHASAN, S. KUMAR, S. Mactalin JOICY, S. MAHENDRAN, S. MARIYATHAS, S. NAKULAN, S. NILANTHY, S. PASKER BAGILON, S. PATHMANATHAN, S. PUVANENTRAN, S. RAGAVAN, S. RASANAYAGAM, S. SAVARI, S. SEBASTIYAMMA, S. SELASTINA MARIA, S. SELVARAJAH, S. SIVARAJAH, S. SIVARAJAH, S. SOROJINIDEVI, S. SUPPIAH, S. Suresh KUMAR, S. THONIAMMAH, S. VAKEESAN, S. VIJEYASRI, S. YOGARASA, S.G. JEBAMALAI , S.G. VIJAYAKUMAR, S.L.J. Stanley BABU, S.P. RAGUNATHAN, S.S. FIGIRADO, S.S. RAJASINGHAM, Samson JEROME, Santhan MICKALShobana CHRISTY, Simeon R. UTHAYAMALAR, Sinniah AMIRTHAMANY, Suppaiah DRAVADAKALA, T. ARIYAMALAR T, T. Eugene MICHAEL, T. MAHENDRAN, T. NASERATHAMMAH, T. NAVARATNAM, T. PRABAHARAN, T. PUSHPARAJAH, T. RAJASINGHAM, T. SIVAPRAGASAM, T. THARMARAJAH, T.S. SUBAHARAN, T.T. ANNATHURAI, V. A. REETAMMAH, V. AINGARALINGAM, V. ARUMUGAM V. ATHIMUTTULINGAM, V. NAVARATNARAJAH, V. SATCHITHANANTHAN, V. SEBAMALAI, V. SITHIVICNESWARAN, V. SIVAKUMARV.D.M.S. SUARIS, V.FERNANDO, W.A.Jayantha P. GUNEWARDANE, Yacintha THARAMALINGAM, MICHELE ABRIQUET, LOUIS AKIKI, ZOEF ALATAS, NICOLE ALLARD, DOMINIQUE ALLEGRINI, JEAN CLAUDE ALT, ARTURO ALVAREZ LOPEZ, CHRISTELE AMIGUES, SOISIC AMOURIAUX, ALESSANDRO ANDREONE, DANIEL ANGER, MANANA ANJAPARIDZE, PAUL LOUIS APPRIOU, TAKAKO ARAI, RODOLFO ARCOVEDO, MATTIAS ARMSTRONG, ERIC ARTHOT, MARGO ASWAD, VERONIQUE AUBIN, HELENE AUDOIN, ANNIE AUGE, BERNARD AUMAITRE, OSCAR AVOGADRI, CHARLES-LOUIS AYOUN, BRUNO BACHELARD, JACQUES BAILLEAU, LIDIA BAIOCCHI, KEVIN BAKER, ANNE BALLIGAND, PHILIPPE BARAIZE, JOANNE BARBIERI, MARGARET BARCLAY, CLAUDETTE BARDIN, PASCALE BARNEAU, EMMANUEL BARON, LOICK BARRIQUAND, ISABELLE BARTE DE SAINTE FARE, HELENE BARTHELEMY, THIERRY BARTHES, MURIEL BARTHOME, ANNE FRANCOISE BASQUIN, PIERRE BATAILLE, GUY BATTEUR, PIERRE BAUDINNE, BRIGITTEBAUDOIN, PATRICK BAUDRY, EDGAR BAYLE, NICOLAS BEAUDOUIN, INGRID BEAUJARD, FLORENCE BEAUVILLIER, DAVID BECKER, PIET BEKAERT, CARLO BELLONI, LAURE BELOIN, PIERRE BELOSSI, MOHAMED SABEUR BEN BEN HADJ HAMIDA, ANDRE BENBASSA, GILLES BENISTAND, JEAN PAUL BERARD, PHILIPPE BERARD, JEAN CLAUDE BERERD, ELISABETH BERGERON, MARIE ROSAIRE BERIOT, JEAN BERNARD, JEAN DOMINIQUE BERNARD, PIERRE BERNARD-GRIFFITH, HELENE BERNEUIL, JOSE BERNEX, GUILLERMO BERTOLETTI, MICHELLE BERTSCH, DIDIER BESSOU, ARIANE BETZ, ODETTE BEUGNET, FRANCOIS BEUZART, EMILIE BIARE, CLAUDINE BIRAIS DEBOEUF, JEAN-PIERRE BISSUEL, FLORENCE BLANCHET, FRANCOIS BOILLOT, EMMANUELLE BOLLEY, LAURENCE BOLSIGNER, RAUL BONIFACIO, DANY BONIJOL, MARYSE BONNEL, JEAN MICHEL BONNET, FRANCESCO BONSANTE, MARIE-THERESE BONY, JEAN PIERRE BORELLI, MARK BORST, MABROUK BOUALLAG, ODYSSEAS (ULYSSE BOUDOURIS, JEAN JACQUES BOUGAULT, GUY BOULOUDRINE, MICHEL BOULVAIN, BRUNO BOURDARIAS, MARTINE BOURGANEL, ANDRE BOURGEON, NADEGE BOURSE, CLAUDINE BOUYSSOU, AGNES BOVERHOF, MADO BOYER, PIERRE BOYER, AICHA BRAHMI, JEAN BRANELLEC, MICHEL BRAUN, BERNARD BREE, VERONIQUE BRIAND, MARION BRINKER, JACQUES BRIOIS, JULIO BRIZ EYSSEN, LADISLAS BRODI, ANNIE BROUCHET, ANTOINE BRUEL, JEAN BRUNEAU, CATHERINE BRUNN, INGRID BUCENS, VINCENT BUDILLON, DAVID BUNKER, SYLVIE BUQUET, FREDERIC BUREL, LORRAINE (LORI) BURGESS, MARIA DEL MAR BURON NUNEZ, BERNARD BURTEY, DIDIER BUSCAIL, GEORGES BUSSIOS, ERIK BUTIN, CARSTEN BYRN, PHILIPPE CABANEL, ISIS CACHO, ROBERT CAMBERLIN, DOMINIQUE CAMBON, CHRISTINE CAMPO, PIERRE CANELLAS, SILVIA CARBONELL, VALERIE CARLIER, MURIELLE CARON, PIERRETTE CARON, CHARLES CARRO, MARIA CARTWRIGHT, RICHARD CASEY, JEANNE (GENEVIEVE) CASTEL, JEAN CAUSSIN, BERNARD CAVALIE, ERIC CERCIAT, EDMUND CHALONER, BERTRAND CHAMARTY, MARIE GENEVIEVE CHANSON, FREDERIQUE CHAPUIS, SYLVAIN CHARBONNEAU, GUY CHARIGNON, LAURENT CHARPENTIER, SANDRINE CHARPENTIER, COLETTE CHARRIER, YVES CHARTIER, IOANA CHARTIER GUGONEA, JACQUELINE CHATENET, CLAUDE CHAUSSENDE, EMMANUELLE CHAZAL-BERTOLETTI, JOCELYNE CHEBANCE, ALAIN CHIAPELLO, DOLORES CHOLET, DOMINIQUE CHRAIBI, JEAN-LUC CHUZEL, CATHERINE CLEMENT, JACQUES CLEMENT, MARIE ANNE CLEMENT, REMI CERFEUILLE, PHILIPPE COCHET, BENOIT COLOT, CHRISTIAN COMMENCAIS, MADELEINE CONTE SIFUENTES, AMILCAR CONTRERAS, LAEL CONWAY, MARZIA CORINI, PASCALE CORION, REMI COSSON, JEAN PAUL COURT, ANNE COURTRAI, IAN CREE, ANTOINE CROUAN, PHILIPPE DABADIE, RABAH DAHMANI, RICHARD DALE, JEAN MARIE DANO, JEAN FRANCOIS DARCQ, ASISDAS, LAURENT DAUMAS, CATHERINE DAUNAY, ALAIN DAUTHY, PATRICK DAVID, CHRISTIAN DAVYDOFF, HELENE DAVYDOFF, SEGOLENE DE BECO, LUC DE CHAMPS, VERONIQUE DE CHASTEIGNER, MARIE JACQUES DE CHAZELLES, YANN DE FAREINS, CATHERINE DE LA BOUSSINIERE, CAROLINE DE LAMINNE, JEAN YVES DE LEMPS, LAURENT DE MONES, CAIO MARIO DE VECCHIS, DAVID DE WAVRIN, YVES DEBAILLE, JEAN MICHEL DEBARACE, CECILIA DEBERDT, FRANCOISE DEBRABANT, JEAN-PHILIPPE DEBUS, STEVEN DEFAUW, LAURENT DEFONTAINES, BRUNO DEHAYE, MARIE BERTILLE DEHOUCK, MARIE ANNE DELAUNOY, MARC DELGRANGE, PATRICK DENESLE, FRANCOISE DENIAU, FRANCOISE DESBOIS, DENIS DESCHESNES, JEAN CLAUDE DESLANDES, SOLANGE DESRUES, CHRISTINE DETOUR, PATRICK DEWAN, FRANCOIS DIOT, JEAN-PAUL DIXMERAS, MARIE-CHRISTINE DONVAL, BRIGITTE DOSNE, JEAN DOMINIQUE DOUBLET, BRIGITTE DOUCET, MONIQUE DOUX, JEAN-NOEL DRAULT, SOPHIE DRAUX, JACQUELINE DREXLER, JEAN BAPTISTE DRIENCOURT, ERIC DROUILLY, JOSEPH DUBICQ, FRANCOISE DUBOIS, JEAN DUBOIS, VERONIQUE DUBOIS, MAGALI DUCLOS, CLAUDIO DUEK, JEAN-BAPTISTE DUFOURCQ, DANIEL DUMAS, MARIE FRANCE DUMAS, ALAIN DURAND, MURIEL DURAND, THIERRY DURAND, GEORGES DUVAL, JOHN JEREMIAH DUWEL, JOSETTE DYCKMANS, WENDY; DYMENT, VINCENT ECHAVE, CAROLINA ECHEVERRI, FRANCOISE ECK, JERRY EHRLICH, STEFAN EIDEN, KAREN EIGEN, GHAZI EL HAJJAR, MELIKA EL YOUNSI, JANE CATHRYN ELLIS, MARIA ERNFRIDSSON, RICHARD ERNST, SABELLE ESQUIRO, FLORENCE ETTORI, MARIE EULRYBERIER, HELTRAUT EXNER, LUC EYROLLE, GENEVIEVE FALISE, PIERRE FALISE, CHRISTIAN FALLEVOZ, PIERRE FARRET, CHRISTIAN FASSIN, PATRICK FAURE, CHRISTINE FAYAUD, ROLAND FAYOLLE, ROLAND FELIX, XAVIER FENET GARDE, PASCAL FENOUIL, FERNANDO OLINTO FERNANDES, CLAIRE-MARIE FEVRE, CLAUDINE FICHOU, ALAIN FILLET, MARIE ALETH FILLEUL, GABRIELA FILLON, JEAN PIERRE FILLON, RUDIGER FINGER, VLADISLAV FIRAGO, MICHELE FLAMENT, DONATO FLATI; JÜRGEN MARCUS, FLEISCH, EVELYNE FLORIS, ANNETTE FOMPEYRINE, LUC FOURGEAUD, XAVIER FOURIE, GILLES FOURTANIER, BRUCE FRANK, VIVIENNE FRIES, BRIGITTE FRIRY, SYLVIE FRITSCH, JEAN FROMENT, VINCENT FRUHAUFF, JUANITA FU, JACQUES GAILLARD, JOSEPHINE PATRICIA GALASSI, CAROLINE JANE GALE, DENIS GALLOT, PATRICK GANANSIA, MIGUEL GARCIA LOPEZ, ALAIN GAROU, LAURENT GAURIAU, CATHERINE GAUTIER, JEANINE GAYRAUD, OLIVIA GAYRAUD, EMMANUELLE GEFFRAY, NADINE GERAUD, ROGER GERAUD, BRUNO GERBAUD, BERNADETTE GERGONNE, GILLES GERMAIN, CHRIS GILBERT, ISABELLE GIRET, CHRISTINE GLE, merci aux 860 volontaires internationaux 26 vingt six ANNE MARIE GLOAGUEN, EDELMIRA GO, PAUL GODEFROY, CHRISTINE GODIN, NATHALIE GODON, ALIOCHA, GOLOOUSSENKO, VALERIE GONOPOLSKI, LENNA GORE, DOMINIQUE GOSSOT, MICHELE GOUINEAU, STEPHANE GOUPIL, PHILIPPE GOURAUD, ADOLPHE GOURGUE, CATHERINE GOUTTENOIRE, MATTHIAS GRADE, DAVID GRAFF, JEAN-ROBERT GRAIRE, JETTE HARTVIG GRAVSEN, DALE GREENE, JEAN GRISEZ, MARIA GUASCH CARBONELL, FREDERIC GUENIN, LAURENT GUERDER, JEAN MICHEL GUERIN, PATRICIA GUERINEAU, CHRISTIAN GUERY, FLORENCE GUILLARD, GILLES GUILLARD, CLOTILDE GUILLET, BERNARD GUILLON, YRADJ GUINDJEI, GEORGES GUIOT, MARIE HELENE HAAS, YACINE HAFFAF, CAMILLA HAKANGARD, KARIMA HAMMADI, MICHAELA HAMSCHMIDT, JEAN HANRIOT, SABINE HARDY, SALAH HARFOUCHE, DOMINIQUE HARO, HEATHER HARRIS, PHILIPPE HAVRET, MICHEL HEISERT, JOSE HERNANDEZ, VALERIE HERNANDEZ, PAULA HERTEL, BERNADETTE HERVE, VOLKER HERZOG, BEATRICE HIRSCH AELLEN, ELISABETH HODE, MEDERIC HOFFET, DIDIER HOMMEL, PIERRE HONEGGER, FREDERIQUE HONORE, MARY ANN HOPKINS, PAULINE HORRILL, CHRISTIAN HUET, LUCE HUGEUX, BRIGITTE HUIBAN, FRANCOISE HUMBERT, JACQUES HUREIKI, CATHERINE HUSA-HUSSEINI, MIHO ILIC, HOOSHANG IMANI, MARIKO ITO, KENJI IWAMOTO, DENISE JACCOUD, ALAIN JACOB, MAGALI JACOB, CORINNE JACOBZONE, FREDERIC JACQUOT, ALEXANDRE JAMBOR, MARC JANOYER, HELEN JANSSON, CHANTAL JANUEL, ALETH JAUROU, BERNARD JAVANAUD, GUDRUN JELLINGHAUS, DEBORAH JENKINS, GENEVIEVE JEZEQUEL, NADINE JOQUEL, FRANCOIS JORDA, PIERRE JOSUE, JEAN LUC JOUVE, PATRICK JOYEUX, ANDREA KAISER, ALAIN KALFON, KRZYSZTOF KAMINSKI, TOMOKO KANTO, HACENE KEDACHE, KUSSAY KEILANI, MICHELLE DIANE KELLY, BARBARA KENNEDY, ELIZABETH KENNEDY, JONATHAN DONALD KENNEDY, JACQUES KEROMNES, CHARLIZE KESSIN, SINAN KHADDAJ, ABDESLAM KHAIROUNI, REGINALD KINGSTON, MARIE-BERNADETTE KLEIN, NAOYUKI KOBAYASHI, JEAN PIERRE KOHEN, MARJA LIISA KOKKONEN, SERGUEI KORYAK, MARIA KOURNIOTI, BRUNO KOWALCZEWSKI, KRASTU KRASTEV, STEPHAN KRIEGER, ROSHAN KUMARASAMY, JEAN-PIERRE KUNTZ, NOBUKO KUROSAKI, HIROMITSU KUSAGAYA, MARIE JEANNE LA QUOC, PHILIPPE LABALME, PIERRE LABORDE, DOMINIQUE LACAZE, CHRISTOPHE LACOSTE, PHILIPPE LACOUX, EVELYNE LAFORGE, LAURENT LAGRIFFOUL, DANY LAIGRET, STEPHANIE LAKE, VERONIQUE LALOE, GERALDINE LAMBOLEY, KARL LAMPL, FRANCIS LANGLET, CHANTAL LANG-MERLET, CONSTANCE LANSADE, REGIS LANSADE, JEAN LAPEYRIE, PHILIPPE LARRUE, JOHANNA LARUSDOTTIR, XAVIER LASSALLE, DOMINIQUE LAULAN, ANNE LAURENT, CORINNE LAURENT, SYLVIE LAURET, JAMES LAWSON, MARIE LE, ALAIN LE BRAS, BERNARD LE CHEVILLIER, RALPH LE DINH, DONALD LE HERON, PIERRE LE PELTIER, DANIEL LE ROUX, JEAN-PIERRE LECHAUX, COLETTE LEC'HVIEN, MARC LECLERC DU SABLON, PASCAL LECOMTE, ISABELLE LECOURTIER, CATHERINE LEFEBVRE, DOMINIQUE-BERNARD LEFEVRE, GABRIELLE LEFEVRE, AGNES LEFORT DES YLOUSES, CHRISTIAN LEISTER, CORINNE LEJEUNE, YANN LELEVRIER, STEPHANE LEMAN, FRANCOIS LEROUX, CLAUDIA LESSARD, CORINNE LETOUZE, VIVIANE LEU, WAI YIN LEUNG, HENRI LEVADOUX, ROBERT M. LEVIN, BERNARD LHUILLIER, MARY LIGHTFINE, ERIK LINNANDER, MICHAEL LIPPERT, JOANNE LIU, CARLOS ANTONIO LLANO WHITE, COROLEU LLETGET, ANDRE LOBERA, ELEONORE LOBMEYR, COLETTE LOBSTEIN, JEAN FREDERIC LOBSTEIN, ANDRE LOEWENTHAL, MENNO LONT, MARIE JOSE LOPEZ, MONIQUE LOUSTALET, CATHY LOVE, YVAN LUCAS, CORNELIS IZAK LUIJK, ANTHONY LUX, ROLAND LUZUY, AHMED MABROUK, IGOR MACALA, PETER MACLAREN-TOUSSAINT, PHILIPPE MAFRAY, CATHERINE MAGAGNA, NATHALIE MAGNES, JOSIANE MAHIER, HASAN MAHMUD, JEAN NOEL MAILLARD, GIAN LUCA MAINO, FRANCOIS MALAURIE, CAMILLE MALO, FREDERIQUE MANCINI, BERNHARD MANDRELLA, STEPHEN J MANNION, CATHERINE MANOUSSAKI, FREDERIQUE MARCHAL, BRUNO MARCHAND, ENRICO MARCHIS, LUCIENNE MARCUCCI, JEAN CHRISTOPHE MARGAIX, BERTRAND MARION, OSCAR MARQUEZ OVANDO, PHILIPPE MARTEL, MARIE-DOMINIQUE MARTIN, MICHAEL MARTIN, ROBERT MARTIN, JEAN-LOUIS MARY, JEAN CLAUDE MASCARELL_FURIO, JOSIANE MASCARINI, MATTHEW JOHN MASEL, SUSAN JANE MASEL HYDE, CHANTAL MASSIAS, VERONIQUE MATHEVET, JEAN MATHIE, LAURENT MATHON, WALID MATTA, CLAUDINE MAURY, YVON MAURY, STEVEN MAYNARD, ALBERTO MAYORGA, KEYVAN MAZDA, SYLVIE MAZOYER, PETER MEADE, ULRIKE MEDDING, CLAIRE MELEC, KHALED MENAPAL, JEAN LOUIS MENCIERE, MARIE ANDREE MERCIER, BERNARD MERKLEN, DJAMILA MESSAOUDEN, JOANNA MESURE, MAURICE MEUNIER, HENRIKE MEYER, FREDERIC MEYLAN, PIOTR MICHALOWSKI, JEROME MICHON, LUCIEN MIGEON, ANTOINE MIHAS, PIERRE MILLON, JOAQUIM MIRO, CHRISTELLE MIZERA, SOPHIE MONTGERMONT, PHILIPPE MORCHOISNE, FRANCOIS MOREL, LUC MORIN, MARY ESTHER MORING, BRUNO MOROT, MARTIN MOSCHEL, NGER MOSSBERG, JOHAN MOSTERT, ABDELKADER MOUKEL, PATRICK MOULY, ISABELLE MOUNIAMAN-NARA, FRANCOIS MOUNICOT, PATRICE MOURET, FRANCK MOYNIER, DIETER MUEHL-BENNINGHAUS, CATHERINE MULLER, FRANCESCO GIOVANNI MUSAJO, PIERRE-ANDRE MUSY, GARY DEAN MYERS, BOUZIANE ABEL NAAS, MARLENE NABITZ, MARI NAGAI, JEAN LUC NAHEL, CHRISTINE NAUJAC, DUONG NEAK, ROLAND NEFF, DENISE NEMIROVSKI, BIRGIT NEUDECKER, EMILIE NEUVILLE, CHRISTINE NEVEU, CHARLES NGUYEN-HUY-LAI, JEAN PAUL NICODEME, JACQUES NICOLAS, PIERRE NICOLLET, HERVE NIEL, LARS NILSSON, NOBUYUKI NISHIKIORI, JASON NOBLE, PIERRE NOEL, GILLES NOROTTE, PASCALE NOTERDAEME, PIERRE-MARIE NOTERDAEME, DOMINIQUE YVES NOURY, HELEN OAKEY, STEPHANE OBRY, NAOKI OKADA, RAUL FABIAN OLEAS CHAVEZ, JEAN-JACQUES OLIVIER, ISABELLE OLLIEUZ, GUNNAR OLOFSSON, PETER OLSSON, JOELLE ORIOL, ANDREA OSWALD, MARIE OTAEGUI, FRANCK OUAKIL, REZVAN OWHADI, DOMINIQUE PAGEOT, FRANCOIS PAILLET, PIERRE PANEL, ANGELICA PANNES, ANNA PAPARIZOU, LAURENT PAQUAY, HORACIO ABEL PASQUALINI, JEAN -CHARLES PASQUIER, ALAIN PEDECH, ERIC PEDEN, NORMAN CLAYTON PEELER, FRANÇOIS PELCRAN, MYRIAM PELE, MARIE-FRANCOISE PENSEC, MARC PERINEAU, GEORGES PERNOT, JEAN LOUIS PERONI, ESTELLE PERROT, MARIE EDITH PETITJEAN, LOUIS MARIE PEYROUX, MINH LY PHAM MINH, SERGE PHIL, JIM PICKEN, BEATRICE PILON, PASCALE PINAY, DONNA MAREE PINI, PHILIPPE PLAGNOL, EDUARD R.M. PLANTINGA, DOMINIQUE PLASSON, GEORGES PLATONIOTIS, FABIENNE PLOUVIER, HUBERT POIFFAUT, GILLES PONSERRE, MONIQUE PONT, ALAIN POTIER, GUILLEMETTE POULAIN, HELLE POULSEN DOBBYNS, DIDIER POULY, VERONIQUE PRIEM, CECILE PROTTE, BRUNO PROVENSAL, SONIA PRUDENT, JEAN PHILIPPE PUGET, OLIVIER QUESNEL, CATHERINE QUILLET, BRIAN QUINN, MARC QUINTYN, LORENZO RACCANELLI, BRIAN FRANCIS RALEIGH, CHARLES-VICTOR RANDRIANASOLO, DICK RAWSON, BENOIT RAY, CHRISTIAN REGAIRAZ, ODILE REGNIER, ANDREA REIS, DOMINIQUE RENAULT, FRANCOISE RENNETEAU, BROOKE RHODES, FABIENNE RICHARD, DOMINIQUE RICHE, JEAN PAUL RIEU, ISABELLE RIEUX, JEAN RIJS, FRANCIS RIOU, SANDRO RIZOLI, NIVONIRINA ROBINOT,; JEAN-FRANCOIS ROGER, REGIS ROHN, SYLVIE ROLAND, STEPHANE ROMANO, SABINE ROQUEFORT, WILLY ROUAM, OLIVIER ROULEAU, GENEVIEVE ROUMEAS, AMANDA ROUSE, ALAIN ROUVILLOIS, FABIENNE ROUX, MARCEL ROUX, RENE ROUZAUD, JEAN CHRISTOPHE RUFIN, ANDREW RYAN, HASSAN SAAF, LAURENT SABARD, MONTSERRAT SABOYA NAVARRO, MALIKA SAIM, LABROS SAKKAS, JEAN MARC SALADINI, SHAFIK SALEH, JEROME SALES DE GAUZY, JEAN PAUL SALLIOU, DIDIER SAMSON, AMBROGIO SANGALLI, ANGELEKE SARIDAKIS, PIERRE SARRADON, SYLVIE SAUVION, BARBARA SCHLESINGERGOMEZ, DAGMAR SCHMIDLA, GHISLAIN SCHMITT, ISABELLE SCHMITT MICHAEL SCHUBERT, MARK SCHWARTZ, TUPPIN, EDWARD SCRASE, BERNARD SEHEDIC, MARIE SEITZ, FRANCOISE SEMBEIL, CELINE SENECAL, HERVE SENEGAS, CHRISTOPHER SENKOWSKI, SYLVIE SERIN, PATRICE SEVEGNES, ANNE SEZNEC, TRISTY SHAW, MOHAMED REZA SHAYAR, ERIC SHECLER, REINER SHETTY, NEIL SHORNEY, COSTAS SIDERIS, MEGGAN SMELZER ZSEMLYE, LOU SMITH, JACOB SNELLEN, JACEK SOBIERAJSKI, PIA THORSO SORENSEN, GIUSEPPE SORIANI, PHAVADY SOUCANH, GHIATH SOUDAN, FREDERIC SOULIER, FRANCINE SOUQUET, FRANCE SOURNIES, JUDITH SOUSSAN, REBECCA SOUTH, GERALDINE SOVRAN, BOGDAN SOZANSK, ANN BRADLEY SPIRES, ARMAND SPRE, ABDUL KHALIL SULIMANKHIL, LIVIU SULTAN, JOHN SUNDIN, MONIQUE SUPIOT, CHRISTINE SURMONT, CLAUDE SUZAT, MOTOI SUZUKI, TAKAKO SUZUKI, ELIZABETH SZUMILIN, MICHEL TARDAT, EMMANUEL TARLA, DAVID TAVERNIER, AURORA TEIXEIRA, JOHN TENDA, MARC TERMONIA, LAURENCE THAVAUX, MICHEL THENE, MARION THEOLAT, CECILE THIEBAUT, CATHERINE THOMAS, GEORGES THUILLEUX, CHARLES THURBER, ANNIE TICHADOU, LOIC TIENGOU, MATTHIAS TISCHHAUSER, JOELLE TISCHHAUSER-BONVIN, MICHELE TISSIER, NICOLE TIZON, VAN TRUNG TO, SHATARI TOMOO, GEORGES TORNIVUCAS, PHILIPPE TOUCHARD, YVELINE TOURTIER, MAGALI TRA, EVA ANNA MARIA TROTSMAN, FABIENNE TROUDE, GABRIEL TRUJILLO-ESCUDERO, JOSEPHINE TSAI, FLORENCE TUROUNET, SABINE TURRINI, STEVEN UNTRACHT, MALIN UPPER, KEITH URSEL, BERNARD USER, RITSURO USUI, JENNIFER VAGO, VERONIQUE VAINI, MARIE FRANCOISE VALORGE, JOHANNUS VAN DER BYL, DICK VAN GELDERE, BOB VAN SOEST, WILLEM VAN ZWAM, CHARLES VANGEENDERHUYSEN, JACQUELINE VAREILLE, STEPHANE VARENE, PATRICE VASTEL, JACQUES VAZEUX, ALAIN VEYRET, EDITH VEYRIER, PATRICK VIAL, MICHEL VILETTE, JEANNE VILLEMIN, ANNE VINCENT, MICHELE VITSE, ROGER VIVARIE, CARINE VOIRET, ROLAND VOORHOEUE, MICHEL VOURCH, MATHIAS WAGNER, VIRGINIA WAGNER, VERONIQUE WALDMANN, CECILE WALLART, ERIC WEBBER, DANIEL WESTBURY, JOHN WETHERBY, CHRISTINE WHITESIDE, BRIGITTE WILLEMS, ROGER WOLFE, MESFIN WONDIMU SENBETO, MICKAEL WOODMAN, LIEVEN WOSTYN, JULIE WYNNE, EDUARDO ENRIQUE YANEZ, SIEW TIN YANG, LOUISA SIRIPORN ZEBIC, DIRK ZEILER, PIERRE ZICKLER.