Séance 7 - Cours du Professeur Julie KLEIN

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Séance 7 - Cours du Professeur Julie KLEIN
UNIVERSITE DE ROUEN
Année Universitaire 2015-2016
Travaux dirigés – 2ème année Licence Droit
FAIT JURIDIQUE - Cours de Mme le Professeur Julie KLEIN
SEPTIEME SEANCE
LA CAUSALITE
I.- IDEES GENERALES
L’exigence d’un lien de causalité – de cause à effet – entre le fait illicite et le dommage se
manifeste, en principe, dans tous les domaines de la responsabilité : responsabilité
contractuelle et responsabilité délictuelle, responsabilité du fait personnel, du fait des
choses et du fait d’autrui.
L’exigence d’un lien de causalité s’exprime tout d’abord à travers la nécessité d’un
dommage direct, c’est-à-dire, qui ne soit pas une conséquence trop éloignée du fait
générateur.
Mais elle est surtout une condition propre à la responsabilité, la victime d’un dommage
n’ayant vocation à réparation que si le dommage a été causé par le fait générateur : il faut
un lien de causalité entre la faute et le dommage, entre le fait de la chose et le dommage,
entre le fait d’autrui et le dommage…
Les difficultés, en ce domaine, sont nombreuses. Elles sont principalement au nombre de
trois.
II.- PREMIER THEME : L’APPRECIATION DE LA CAUSALITE
En premier lieu, l’appréciation même de la causalité est problématique, car, en amont d’un
dommage, maints événements peuvent être survenus : à partir de quand doit-on admettre
que l’un d’entre eux doit être considéré comme la cause du dommage ? C’est la question
de l’appréciation de la causalité. La détermination du rapport direct de cause à effet a
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donné lieu à de vives controverses doctrinales et à maintes hésitations en jurisprudence.
Faut-il admettre la théorie de l’équivalence des conditions et décider qu’il y a
responsabilité dès que le fait illicite a concouru à la réalisation du dommage ? Tout
événement intervenu dans la réalisation du dommage et sans lequel celui-ci ne se serait
pas produit en serait alors nécessairement la cause. Cette appréciation favorise
évidemment la victime. Mais est-elle justifiée ? Faut-il lui préférer la théorie de la causalité
adéquate. Dans ce système, le dommage est rattaché à celui de ses antécédents qui,
normalement, selon « le cours naturel des choses » était de nature à le produire, à la
différence d’autres antécédents du dommage, n’ayant contribué à sa réalisation qu’en
raison de circonstances exceptionnelles. Quelle position les juges adoptent-ils ?
Document 1 : Civ. 2ème, 7 avril 2005, RCA, 2005 comm. 173, note H. Groutel.
Document 2 : Civ. 2ème, 4 novembre 2010, Bull. civ. II, n° 177, JCP, 2011, 435, obs. ph.
Stoffel-Munck, D., 2011, chron. C. cass., p. 632, obs. Adida-Canac.
III.- DEUXIEME THEME : LES CAUSES EXONERATOIRES
En deuxième lieu, dans la série d’événements pouvant être à l’origine du dommage, il est
possible que plusieurs d’entre eux aient concouru à sa réalisation : les causes peuvent être
multiples. On pourra, sur cette voie, trouver le fait d’un tiers, voire le fait de la victime
elle-même. On pourra également considérer qu’un cas de force majeure est à l’origine du
dommage. La question sera alors de savoir si ces événements vont permettre à l’auteur
prétendu du dommage, celui contre lequel la victime agit, de s’exonérer et dans quelle
proportion. C’est la question de l’exonération de l’auteur du dommage.
Lorsqu’une présomption pèse sur l’auteur du dommage, il faut alors déterminer quelle est
sa nature, afin de savoir à quelles conditions il peut obtenir exonération : s’il s’agit d’une
responsabilité de plein droit, il ne peut s’exonérer en prouvant son absence de faute ; il
devra prouver la cause étrangère (cas fortuit, fait de la victime, fait d’un tiers).
Pour que l’exonération soit totale, la cause étrangère invoquée devra revêtir les
caractéristiques de la force majeure. La notion de force majeure n’apparaît pas alors
toujours parfaitement claire.
Document 3 : Ass. Plén, 14 avril 2006, Bull. AP, n°6 ; D. 2006 p. 1577, note P. Jourdain,
Defrénois, 2006, 1212, obs. E. Savaux ; JCP G, 2006, II, 10087, note P. Grosser.
Document 4 : Civ. 2ème, 13 juillet 2006, Bull. civ. II, n° 216
Document 5 : Civ. 1ère, 23 juin 2011, Bull. civ. II, n° 123.
En présence d’un fait de la victime ou d’un fait d’un tiers, l’auteur du dommage peut aussi
rechercher une exonération partielle, lorsque le fait invoqué ne revêt pas les
caractéristiques de la force majeure. La question se complique alors. On étudiera, au cours
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de la séance, chaque cas : quid dans l’hypothèse d’une responsabilité du fait personnel (art.
1382 c. civ.), d’une responsabilité du fait des choses ou d’une responsabilité du fait
d’autrui ?
IV.- TROISIEME THEME : LA PREUVE DE LA CAUSALITE
En troisième lieu, se pose le problème de savoir qui supporte le fardeau de la preuve de ce
qui est à rapporter, selon les schémas précédemment envisagés aux points précédents.
C’est la question de la preuve du lien de causalité et de la cause exonératoire.
On doit admettre que c’est à la victime de prouver le lien de causalité entre le fait
générateur et le dommage, tandis que l’auteur du dommage devra, pour s’exonérer,
prouver ensuite l’intervention d’une cause étrangère exonératoire.
Mais là aussi, des difficultés surviennent, qui tiennent à l’hétérogénéité des solutions et des
appréciations. Ainsi, à s’en tenir à la responsabilité du fait des choses, tout dépend des
circonstances : si la chose est inerte, c’est à la victime de rapporter la preuve qu’elle a été
l’instrument du dommage, tandis que si la chose est en mouvement et en contact avec la
victime, son rôle causal est présumé. On se souviendra ici de ce qui a été vu à propos de
l’exigence d’anormalité dans la responsabilité du fait des choses.
Plus généralement, parce que la preuve de la causalité peut être très difficile à rapporter
pour la victime, la charge de la preuve a, dans certaines hypothèses, été allégée.
Ainsi, en matière médicale, la loi a édicté certaines présomptions de causalité en faveur de
la victime. C’est le cas de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades
et à la qualité du système de santé en son article 102.
Document 6 : Article 102 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des
malades et à la qualité du système de santé.
La Cour de cassation a à son tour allégé le fardeau probatoire pesant sur les victimes en
matière médicale. On a notamment vu apparaître une nouvelle manière de raisonner, à
propos de la causalité dite alternative.
Document 7 : Civ. 1ère, 24 septembre 2009, Bull. civ. I, n°187 ; D., 2009. AJ 2342, obs.
Gallmeister, JCP, 2009. 381, note Hocquet-Berg ; RTDciv. 2010. 111, obs. Jourdain.
Document 8 : Civ. 1ère, 17 juin 2010, Bull. civ. I, n° 137, RTD Civ., 2010, p. 567, obs. P.
Jourdain, RDC, 2010, p. 1247, note G. Viney.
La preuve de la causalité soulève encore une difficulté particulière lorsqu’il existe un doute
scientifique. La question est alors la suivante : la preuve de la causalité juridique supposet-elle au préalable que soit établie la preuve de la causalité scientifique ? Ou peut-on au
contraire admettre que la preuve d’un lien de causalité juridique entre un fait générateur et
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la survenue d’un dommage puisse être rapportée alors même qu’il existerait une
incertitude sur le point de savoir si un tel fait générateur est scientifiquement susceptible
d’entraîner un tel dommage ? La Cour de cassation l’admet, en permettant aux victimes de
recourir dans une telle hypothèse à des présomptions graves, précises et concordantes
pour démontrer l’existence d’un lien de causalité.
Document 9 : Cass. civ. 1ère, 22 mai 2008, JCP, 2008, II, 10131, note Grunbaum, et I,
186, n° 6, obs. Ph. Stoffel-Munck, RDC, 2008.1186, obs. J.-S. Borghetti, RTD Civ.,
2008.492, note P. Jourdain.
Document 10 : Cass. civ. 1ère, 10 juillet 2013, Bull. civ. I, n° 157, RDC 2014/1.37, obs. G.
Viney, RTD Civ. 2013.852, obs. P. Jourdain.
V.- EXERCICE
Commentaire de l’arrêt rendu par la première chambre civile le 24 septembre 2009
(Document 7).
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Document 1 : Civ. 2ème, 7 avril 2005, RCA, 2005 comm. 173, note H. Groutel.
Vu l’article 1384, alinéa 1er du Code civil ;
médicaments en cas de surdosage entraînent
l’un et l’autre une défaillance respiratoire et
une insuffisance circulatoire ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Michel
X..., alors qu’il effectuait des courses dans un
magasin, a été renversé par la chute d’une
tête de gondole ; qu’hospitalisé le lendemain
après constatation de la fracture d’une
vertèbre, il est décédé quelques jours plus
tard ; que sa veuve, et ses deux filles, ont fait
assigner devant le tribunal de grande
instance la société Lattes discount,
exploitante du magasin, et son assureur la
société Assurances générales de France
(AGF) en responsabilité et indemnisation de
leurs préjudices ;
que le problème hépatique de Michel X...
avait
provoqué
une
surcharge
médicamenteuse, elle-même entraînant une
dépression
respiratoire
provoquant
l’asphyxie du patient ; que l’expert a relevé
qu’aucun bilan biologique n’avait été fait sur
Michel X... pendant son séjour à l’hôpital ;
que par voie de conséquence, la cour d’appel
dira que le décès de Michel X... est dû à une
surcharge médicamenteuse qui n’a aucun
lien causal direct avec la fracture de la
deuxième vertèbre lombaire causée par la
chute d’une gondole dans le magasin Leader
Price de la société Lattes Discount ;
Attendu que pour rejeter les demandes,
l’arrêt énonce qu’il résulte d’un rapport
d’expertise judiciaire que Michel X... était
atteint de séquelles d’un cancer chronique
d’origine tabagique et d’un alcoolisme
chronique ; que le décès de Michel X... était
intervenu au cours d’une crise de delirium
tremens, complication de l’alcoolisme
chronique qui était connu dès l’entrée de la
victime à l’hôpital, de même que son
insuffisance respiratoire en raison de son
atteinte par un cancer du poumon ; que
l’expert a constaté que l’extrême agitation de
Michel X... avait nécessité un traitement
associant Equanil et Tranxene ; que ces deux
Qu’en statuant ainsi, alors que Michel X...
était décédé durant son hospitalisation
rendue nécessaire par la fracture d’une
vertèbre provoquée par la chute d’une
gondole dans un magasin, de telle sorte que
le décès ne se serait pas produit en l’absence
de cet accident qui en était la cause certaine,
la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
ANNULE, (…)
:
CASSE
ET
Document 2 : Cass. Civ. 2ème, 4 novembre 2010, Bull. civ. II, n° 177, JCP, 2011,
435, obs. ph. Stoffel-Munck, D., 2011, chron. C. cass., p. 632, obs. Adida-Canac.
d’accompagnement professionnel et des
pensions civiles du ministère de la défense a
alloué à Mme Y..., fille de la victime,
certaines sommes en réparation de son
préjudice moral personnel et de celui de son
fils mineur, Tanguy, mais a rejeté sa
demande d’indemnisation au titre du
préjudice de sa fille, Maeve, née le 31
octobre 2008 ; que Mme Y...a formé un
recours contre cette décision auprès d’une
juridiction de sécurité sociale ;
Vu l’article L. 452-3 du code de la
sécurité sociale, ensemble l’article 1382
du code civil ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en
dernier ressort, que Marcel X..., ouvrier
d’Etat à la direction des constructions
navales de Lorient, a été reconnu atteint
d’une affection professionnelle liée à
l’inhalation des poussières d’amiante due à la
faute inexcusable de l’employeur ; qu’il est
décédé le 12 juillet 2008 ; que le service
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Attendu que pour accueillir ce recours et
condamner le ministère de la défense à
indemniser le préjudice moral subi par
l’enfant Maeve, le jugement retient que le
préjudice tenant au fait que l’enfant est
privée de son grand-père et des liens
affectifs qu’elle aurait pu tisser avec lui est
nécessairement relié par un lien de causalité
au décès, lui-même conséquence de la faute
inexcusable de l’employeur ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il n’existait pas
de lien de causalité entre le décès de Marcel
X..., survenu avant la naissance de l’enfant
Maeve, et le préjudice allégué, le tribunal a
violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
ANNULE, (…)
:
CASSE
ET
Document 3 : Ass. Plén, 14 avril 2006, Bull. AP, n°6 ; D. 2006 p. 1577, note P.
Jourdain, Defrénois, 2006, 1212, obs. E. Savaux ; JCP G, 2006, II, 10087, note P.
Grosser.
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 29 juin
2004), que le corps sans vie de Corinne X... a
été découvert, entre le quai et la voie, dans
une gare desservie par la Régie autonome
des transports parisiens (la RATP) ; qu’une
information ouverte du chef d’homicide
involontaire a révélé que l’accident, survenu
lors du départ d’une rame, était passé
inaperçu, aucun témoin des faits ne s’étant
fait connaître ; que M. X..., époux de la
victime, agissant tant en son nom personnel
qu’en qualité de représentant légal de ses
deux enfants mineurs, a demandé que la
RATP soit condamnée à réparer le préjudice
causé par cet accident ;
Mais attendu que si la faute de la victime
n’exonère totalement le gardien qu’à la
condition de présenter les caractères d’un
événement de force majeure, cette exigence
est satisfaite lorsque cette faute présente, lors
de l’accident, un caractère imprévisible et
irrésistible ; qu’ayant retenu que la chute de
Corinne X... sur la voie ne pouvait
s’expliquer que par l’action volontaire de la
victime, que le comportement de celle-ci
n’était pas prévisible dans la mesure où
aucun des préposés de la RATP ne pouvait
deviner sa volonté de se précipiter contre la
rame, qu’il n’avait été constaté aucun
manquement aux règles de sécurité imposées
à l’exploitant du réseau et que celui-ci ne
saurait se voir reprocher de ne pas prendre
toutes mesures rendant impossible le
passage à l’acte de personnes ayant la
volonté de produire le dommage auquel elles
s’exposent volontairement, la cour d’appel a
décidé à bon droit que la faute commise par
la victime exonérait la RATP de toute
responsabilité ;
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt d’avoir
rejeté cette demande alors, selon le moyen,
qu’en application de l’article 1384, alinéa 1er
du Code civil, la faute de la victime
n’exonère totalement le gardien de sa
responsabilité que si elle constitue un cas de
force majeure ; qu’en constatant que la chute
de la victime ne peut s’expliquer que par
l’action volontaire de celle-ci et que la réalité
de la volonté de provoquer l’accident est
confortée par l’état de détresse apparent de
la victime, alors qu’un tel comportement ne
présentait pas les caractères de la force
majeure, la cour d’appel a violé de façon
flagrante les dispositions de l’article précité ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
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Document 4 : Civ. 2ème, 13 juillet 2006, Bull. civ. II, n° 216
Vu l’article 1384, alinéa 1er, du code civil ;
train a dépassé la vitesse de roulement de 7
km/h ; que cependant, et en cas de danger,
elle a imaginé un système de neutralisation
de cette fermeture automatique par un
dispositif nécessitant de tirer sur une
manette plombée placée sur la plate-forme
près de la porte d’accès afin de permettre le
déverrouillage de la porte ; qu’une alarme
sonore avertit de la survenance de cette
manoeuvre afin que le dispositif soit remis
en service par la suite avec un nouveau
plomb ; que les consorts X... ne rapportent
pas la preuve que le système ainsi mis en
place par la SNCF sur toutes les voitures de
train corail présente un défaut de sécurité ou
de conception, ce système ayant été conçu
pour assurer la sécurité des voyageurs en cas
de blocage des mécanismes électriques ;
qu’en procédant à l’arrachage du plomb de
protection alors qu’aucun danger n’était
signalé sur ces portes ou dans le train, et en
ouvrant volontairement ensuite la porte de la
voiture pour en descendre alors que le train
circulait à très grande vitesse, Salim X... a
commis une faute qui est la cause exclusive
de son dommage, son comportement
revêtant pour la SNCF, gardien de la porte
du train, les caractères d’imprévisibilité et
d’irrésistibilité de nature à l’exonérer de
toute responsabilité ;
Attendu, selon l’arrêt infirmatif attaqué, que
Salim X..., âgé de 19 ans, alors qu’il se
trouvait à bord d’un train de la SNCF, a
ouvert une porte du convoi, après avoir
actionné la manette permettant son
déverrouillage, et a fait une chute mortelle
sur la voie ferrée ; que sa mère ainsi que sa
soeur et son frère (les consorts X...) ont
assigné la SNCF en responsabilité et
indemnisation devant le tribunal de grande
instance, sur le fondement des articles 1147,
1382 et 1384, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que, pour débouter les consorts X...
de leurs demandes fondées sur l’article 1384,
alinéa 1er, du code civil, l’arrêt énonce que
Salim X..., monté en gare de Rouen dans le
train corail à destination de Paris, désirait
descendre à la gare du Val de Reuil ; que,
cependant, ce train était sans arrêt jusqu’à
Paris ; que les passagers de la voiture où il se
trouvait ont déclaré avoir vu, sur la plateforme en bout de wagon, un jeune homme,
alors qu’au moment où le train franchissait la
gare de Val de Reuil, une sonnerie stridente
se déclenchait ; qu’à l’arrivée en gare, il
apparaissait que le système de plombage du
verrou de la porte avait été forcé ; que le
corps sans vie de Salim X... était découvert
sur la voie ferrée peu après la gare de Val de
Reuil, démuni de billet ; que l’enquête de
gendarmerie a permis de penser que le jeune
X... était parvenu à ouvrir cette porte et, soit
avait voulu sortir volontairement du train,
soit avait été happé par le souffle de l’air
s’engouffrant dans le train à la vitesse
retenue de 160 km/h à laquelle il circulait à
cet instant ; que la SNCF, qui ne peut
positionner devant chacune des portes des
voitures un agent destiné à en surveiller
l’ouverture ou la fermeture, a mis en place
un système de fermeture automatique des
portes qui ne peuvent s’ouvrir dès lors que le
Qu’en statuant ainsi, par des motifs dont il
résulte que le comportement de la victime ne
présentait pas les caractères de la force
majeure seule de nature à exonérer
totalement la SNCF de sa responsabilité, la
cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses
dispositions, l’arrêt rendu le 27 janvier 2004,
entre les parties, par la cour d’appel de
Rouen ;
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Document 5 : Civ. 1ère, 23 juin 2011, Bull. civ. II, n° 123.
Attendu qu’Eric X..., passager d’un train,
ayant été mortellement blessé de plusieurs
coups de couteau par M. Y..., sa mère Mme
Z... a assigné ce dernier ainsi que la SNCF
en réparation de son préjudice moral ;
de surveillance ; qu’il résulte des propres
constatations de la cour d’appel que la SNCF
n’avait pris aucune mesure particulière pour
la protection des voyageurs lors du parcours
ferroviaire vers Saint-Etienne où devait se
dérouler un match de football et que
l’agresseur, anglais, monté dans le train sans
titre de transport n’avait pas été contrôlé ;
qu’ainsi faute de déduire de ces constatations
qu’en l’absence de toute preuve ou allégation
de quelconques mesures de prévention, il y
avait lieu d’écarter l’existence d’un cas de
force majeure faute d’irrésistibilité de
l’agression, la cour d’appel a derechef violé
l’article 1148 du code civil ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué
(Grenoble, 5 janvier 2010) d’avoir rejeté sa
demande dirigée contre la SNCF alors, selon
le moyen :
1°/ que le transporteur ferroviaire, tenu
envers les voyageurs d’une obligation de
sécurité de résultat de les conduire sains et
saufs à destination, ne peut s’exonérer de sa
responsabilité qu’en apportant la preuve
d’un cas de force majeure, à savoir de
circonstances imprévisibles et irrésistibles ;
que les agressions de voyageurs dans un
train sont prévisibles ; qu’ainsi, la cour
d’appel ne pouvait décider que l’agression
mortelle de Eric X... dans le train GrenobleLyon par un voyageur, au demeurant démuni
de titre de transport, était imprévisible, au
motif
inopérant
du
trouble
de
comportement de l’agresseur, sans violer
l’article 1148 du code civil ;
Mais attendu qu’après avoir constaté que M.
Y... s’était soudainement approché d’Éric
X... et l’avait poignardé sans avoir fait
précéder son geste de la moindre parole ou
de la manifestation d’une agitation anormale,
la cour d’appel a estimé qu’un tel geste, en
raison de son caractère irrationnel, n’eût pu
être empêché ni par un contrôle à bord du
train des titres de transport, faute pour les
contrôleurs d’être investis du pouvoir
d’exclure du train un voyageur dépourvu de
titre de transport, ni par la présence
permanente d’un contrôleur dans la voiture,
non plus que par une quelconque autre
mesure à bord du train ; qu’elle en a déduit à
bon droit que l’agression commise par M.
Y... présentait pour la SNCF un caractère
imprévisible et irrésistible ; que le moyen
n’est pas fondé ;
2°/ que d’autre part, l’agression de Eric X...
étant survenue au moment de la coupe du
monde de football de 1998 dans une région
où se déroulaient des matches, l’afflux de
population et de supporters qui devaient
alors emprunter les transports imposait à la
SNCF
de
prendre
des
mesures
exceptionnelles de précaution, notamment
en renforçant son personnel de contrôle et
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Document 6 : Article 102 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des
malades et à la qualité du système de santé.
« En cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le virus de
l’hépatite C antérieure à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur
apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine
une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du
sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette
transfusion ou cette injection n’est pas à l’origine de la contamination. Le juge forme sa
conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il
estime utiles. Le doute profite au demandeur ».
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Document 7 : Civ. 1ère, 24 septembre 2009, Bull. civ. I, n°187 ; D., 2009. AJ 2342,
obs. Gallmeister, JCP, 2009. 381, note Hocquet-Berg ; RTDciv. 2010. 111, obs.
Jourdain.
Vu l’article 1382 du code civil, ensemble
l’article 1315 du même code ;
collective, ce fait n’étant pas en relation
directe avec le dommage subi par Mme Y...,
et qu’aucun élément de preuve n’établissait
l’administration à celle-ci du distilbène (R)
fabriqué par la société UCB pharma ni du
Stilboestrol Borne fabriqué par la société
Novartis santé familiale ;
Attendu que Mme X..., épouse Y..., atteinte
d’un adénocarcinome à cellulaires claires du
col utérin qu’elle imputait à la prise, par sa
propre mère, durant sa grossesse, de
l’hormone
de
synthèse
dénommée
diéthylstilbestrol (DES), a assigné la société
UCB pharma et la société Novartis santé
familiale, toutes deux fabricantes de la même
molécule distribuée sous deux appellations
différentes ;
Qu’en se déterminant ainsi, après avoir
constaté que le DES avait bien été la cause
directe de la pathologie tumorale, partant
que Mme Y... avait été exposée in utero à la
molécule litigieuse, de sorte qu’il appartenait
alors à chacun des laboratoires de prouver
que son produit n’était pas à l’origine du
dommage, la cour d’appel a violé les textes
susvisés ;
Attendu que pour débouter les consorts X...
Y... de leur demande en réparation de leurs
préjudices dirigée contre les deux
laboratoires, l’arrêt retient que le fait que
ceux ci aient tous deux mis sur le marché la
molécule à l’origine du dommage, fait non
contesté, ne peut fonder une action
PAR CES MOTIFS, CASSE ET ANNULE,
(…)
Document 8 : Civ. 1ère, 17 juin 2010, Bull. civ. I, n° 137, RTD Civ., 2010, p. 567, obs.
P. Jourdain, RDC, 2010, p. 1247, note G. Viney.
Vu les articles 1315 et 1147 du code civil ;
Qu’en statuant ainsi, alors que, lorsque la
preuve d’une infection nosocomiale est
apportée mais que celle-ci est susceptible
d’avoir été contractée dans plusieurs
établissements de santé, il appartient à
chacun de ceux dont la responsabilité est
recherchée d’établir qu’il n’est pas à l’origine
de cette infection ; qu’en déboutant les
consorts X... de leurs demandes, aux motifs
qu’ils ne rapportaient pas la preuve du lieu
de contamination, la cour d’appel a violé les
textes susvisés ;
Attendu que pour débouter les ayants cause
de Pascal X..., décédé le 4 juillet 2000 d’une
infection nosocomiale après avoir reçu des
soins ou subi des examens dans six
établissements pendant cent neuf jours, de
leurs demandes contre la Clinique SaintMartin et le Centre hospitalier privé Clairval
(la Clinique Clairval), la cour d’appel a
relevé, en se fondant sur le rapport
d’expertise, que si l’infection dont Pascal X...
était décédé avait un caractère nosocomial, il
était impossible de déterminer lequel des
deux établissements était à l’origine de cette
infection ;
PAR CES MOTIFS, (…) CASSE ET
ANNULE, (…)
-9-
Document 9 : Civ. 1ère, 22 mai 2008, JCP, 2008, II, 10131, note Grunbaum, et I, 186,
n° 6, obs. Ph. Stoffel-Munck, RDC, 2008.1186, obs. J.-S. Borghetti, RTD Civ.,
2008.492, note P. Jourdain.
Vu l’article 1353 du code civil, et l’article
1147 du même code interprété à la lumière
de la directive n° 85-374 du 25 juillet 1985 ;
relation entre la vaccination contre l’hépatite
B et la survenue d’une sclérose en plaques ;
que s’il existe un risque, il est minime et peut
être lié à des facteurs personnels ; que, par
ailleurs, la sclérose en plaques est d’étiologie
inconnue, et reste une maladie mystérieuse à
forte composante auto-immune ; qu’enfin, la
seule éventualité d’un risque d’apparition de
la maladie en relation avec la vaccination
litigieuse ne pouvait suffire à démontrer le
lien de causalité direct, de nature à engager la
responsabilité du producteur du vaccin ;
Attendu que M. X..., qui avait été vacciné, le
27 novembre 1997, contre l’hépatite B par
M. Y..., médecin, au moyen d’une injection
du vaccin Engerix B 20, a ressenti, peu
après, d’importants troubles qui ont conduit,
en juin 1998, au diagnostic d’une maladie
inflammatoire démyélinisante du système
nerveux central de type sclérose en plaques ;
qu’imputant l’apparition de cette maladie à la
vaccination, M. X... a assigné en
indemnisation M. Y... et la société
Smithkline Beecham aux droits de laquelle
est
venue
la
société
Laboratoire
Glaxosmithkline ; que la CPAM de la HauteGaronne a été appelée en cause ;
Attendu, cependant, que si l’action en
responsabilité du fait d’un produit
défectueux exige la preuve du dommage, du
défaut et du lien de causalité entre le défaut
et le dommage, une telle preuve peut résulter
de présomptions, pourvu qu’elles soient
graves, précises et concordantes ;
Attendu que pour débouter M. X... de ses
demandes, après avoir relevé qu’âgé de vingt
ans et en bonne santé au moment de la
vaccination, M. X... n’était pas porteur de
facteurs favorisants connus, et que la
sclérose en plaques avait été diagnostiquée,
en juin 1998, quelques mois après sa
vaccination, l’arrêt retient que le collège
d’experts qui l’avait examiné indiquait que
l’étude des cas notifiés, les données de
pharmacovigilance et les études de cas
témoins à disposition ne permettaient pas
d’affirmer de façon certaine l’existence d’une
D’où il suit qu’en se déterminant comme elle
l’a fait, sans rechercher si les éléments de
preuve, qui lui étaient soumis par M. X...,
constituaient, ou non, des présomptions
graves, précises et concordantes du caractère
défectueux du vaccin litigieux, comme du
lien de causalité entre un éventuel défaut et
le dommage subi, la cour d’appel n’a pas
donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, CASSE ET ANNULE,
(…)
- 10 -
Document 10 : Cass. civ. 1ère, 10 juillet 2013, Bull. civ. I, n° 157, RDC 2014/1.37,
obs. G. Viney, RTD Civ. 2013.852, obs. P. Jourdain.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans,
31 octobre 2011), que Mme X..., qui,
alors âgée de 17 ans, avait reçu, les 11 et
29 juillet 1995, des injections du vaccin
contre l'hépatite B, dénommé Engerix B
et
fabriqué
par
la
société
Glaxosmithkline, a, d'abord, rapidement
déclaré ressentir des engourdissements et
fourmillements des membres, puis, après
six mois, présenté des troubles oculaires
graves, conduisant, en 1997, au
diagnostic de la sclérose en plaques ;
qu'imputant cette pathologie au vaccin,
elle a assigné la société Glaxosmithkline
en réparation de son préjudice ;
concordantes ; que le doute scientifique,
qui ne prouve ni n'exclut l'existence d'un
lien de causalité entre le dommage et le
défaut, est un élément neutre que le juge
ne peut retenir en faveur ou au détriment
de l'une ou l'autre des parties ; qu'en
l'espèce, la cour d'appel a retenu de façon
générale que « la preuve contraire à celle
recherchée par Mme X... s'évince même
de l'évolution des données statistiques
qui n'a pas démontré de pic alarmant des
déclarations de sclérose en plaques au
terme d'une période non négligeable de
quatre années de vaccination obligatoire
en France » ; qu'en prenant en
considération
l'absence
de
démonstration, sur un plan scientifique,
d'un lien de causalité entre la sclérose en
plaques et la vaccination contre l'hépatite
B, la cour d'appel s'est prononcée au
regard d'un élément qui n'aurait pas dû
influencer son appréciation et qui a
irrémédiablement faussé celle-ci ; en
conséquence, elle a violé l'article 1147 du
code civil, interprété à la lumière de la
directive CEE n° 85-374 du 25 juillet
1985 ;
Attendu qu'elle fait grief à l'arrêt de la
débouter de toutes ses demandes, alors,
selon le moyen :
1°/ que l'action en responsabilité du fait
d'un produit défectueux exige la preuve
du dommage, du défaut et du lien de
causalité entre le défaut et le dommage ;
qu'en exigeant que la demanderesse
démontre non seulement le dommage,
mais encore « l'imputabilité » du
dommage à l'administration du produit,
avant de prouver le défaut du produit et
le lien de causalité entre ce défaut et le
dommage, la cour d'appel a ajouté une
condition que la loi ne comporte pas, en
violation de l'article 1147 du code civil,
interprété à la lumière de la directive
CEE n° 85-374 du 25 juillet 1985 ;
3°/ que si l'action en responsabilité du
fait d'un produit défectueux exige la
preuve du dommage, du défaut et du lien
de causalité entre les deux, une telle
preuve peut résulter de présomptions,
pourvu qu'elles soient graves, précises et
concordantes ; qu'en conséquence,
l'appréciation des juges du fond doit
nécessairement prendre en compte
l'existence conjuguée des différents
éléments personnels invoqués par la
victime qui, pris séparément, n'auraient
pas une force probante suffisante ; qu'en
l'espèce, la cour d'appel a analysé de
2°/ que, si l'action en responsabilité du
fait d'un produit défectueux exige la
preuve du dommage, du défaut et du lien
de causalité entre les deux, une telle
preuve peut résulter de présomptions,
pourvu qu'elles soient graves, précises et
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façon
totalement
séparée
et
indépendante chacun des éléments
personnels avancés par Mme X..., qu'il
s'agisse du facteur chronologique, de
l'absence d'autre cause possible pour la
pathologie développée par elle, ou de son
jeune âge lors de l'apparition de la
maladie ; qu'elle a ainsi énoncé que
chacun de ces éléments, pris séparément,
présentait une « faible valeur probante » ;
qu'en statuant ainsi, sans rechercher si,
combinés entre eux, le facteur
chronologique, l'absence d'autre cause
possible pour la maladie et le jeune âge
de Mme X... lors de la survenue de celleci, ne constituaient pas des présomptions
graves,
précises et
concordantes
permettant de retenir la responsabilité de
la société Laboratoire Glaxosmithkline, la
cour d'appel a privé sa décision de base
légale au regard de l'article 1147 du code
civil, interprété à la lumière de la directive
CEE n° 85-374 du 25 juillet 1985 ;
administré à Mme X... en juillet 1995 ne
comportait pas la mention, dans son
annexe II destinée aux patients, du risque
de développer une sclérose en plaques au
titre des effets indésirables du produit ;
que
la
société
Laboratoire
Glaxosmithkline reconnaissait ainsi ellemême que cette mention avait été «
insérée
dans
le
résumé
des
caractéristiques du produit (RCP) et non
dans la notice patient » ; qu'en retenant
cependant qu' « en l'absence de précision,
le tribunal ne pouvait (…) juger de façon
certaine que la notice du vaccin
administré à Mme X... n'était pas
conforme au RCP et au VIDAL », la
cour d'appel a méconnu les termes du
litige et violé l'article 4 du code de
procédure civile ;
6°/ qu'en s'abstenant de provoquer les
observations des parties sur la teneur de
la notice patient du vaccin Engerix B
administré à Mme X..., la cour d'appel a
violé l'article 16 du code de procédure
civile ;
°/ que le défaut de sécurité du produit
doit s'apprécier, notamment, au regard de
la gravité des effets nocifs constatés ; que
Mme X... soutenait que « le défaut d'un
médicament est fonction de la gravité des
effets nocifs au regard de la finalité
thérapeutique recherchée » et que le
vaccin Engerix B qui lui avait été
administré présentait des risques majeurs
mettant en jeu le pronostic vital du
patient, ce qui le privait de la sécurité à
laquelle celui-ci pouvait légitimement
s'attendre ; qu'en énonçant cependant
qu'il convenait « d'écarter d'emblée la
notion du défaut intrinsèque du produit
puisque cette question n'est pas invoquée
par Mme X... », la cour d'appel a
dénaturé les écritures d'appel de celle-ci
et violé l'article 4 du code de procédure
civile
;
7°/ qu'un produit est défectueux lorsqu'il
n'offre pas la sécurité à laquelle on peut
légitimement s'attendre ; que dans
l'appréciation de cette exigence, il doit
être tenu compte, notamment, de la
présentation du produit, de l'usage qui
peut en être raisonnablement attendu et
du moment de sa mise en circulation ;
qu'en conséquence, le fabricant d'un
produit est tenu envers l'acquéreur d'une
obligation de renseignement sur les
dangers, même exceptionnels, que
comporte l'utilisation du produit ; qu'en
retenant que le vaccin Engerix B ne
pouvait être qualifié de défectueux,
cependant que les termes du litige
établissaient que le dictionnaire Vidal et
le RCP faisaient figurer au nombre des
effets secondaires indésirables possibles
du produit la poussée de sclérose en
5°/ que les parties au litige s'accordaient
à dire que la notice du vaccin Engerix B
- 12 -
plaques, tandis que la notice de
présentation du produit ne contenait pas
cette information, la cour d'appel a violé
l'article 1147 du code civil, interprété à la
lumière de la directive CEE n° 85-374 du
25 juillet 1985 ;
défaut et le dommage ; que la cour
d'appel, qui a énoncé qu'il appartenait à
Mme X... de rapporter la preuve du
dommage, de l'imputabilité du dommage
à l'administration du produit puis du
défaut du produit et du lien de causalité
entre ce défaut et le dommage, a retenu
que les experts sont quasi unanimes pour
conclure qu'un lien de causalité entre la
vaccination et la sclérose en plaques ne
pouvait être démontré, que l'évolution
des données statistiques n'avait pas
démontré de pic alarmant des
déclarations de la sclérose en plaques au
terme d'une période non négligeable de
quatre années de vaccination obligatoire
en France en dépit du nombre élevé de
doses administrées ; que, prenant en
considération les éléments propres à
Mme X..., elle a ajouté que les
manifestations décrites dès les deux
injections ne reposaient que sur ses
seules affirmations et que la chronologie
du diagnostic, deux ans après la
vaccination, était trop peu probante dans
la mesure où il pouvait ne s'agir que
d'une simple coïncidence, que l'absence
de manifestations antérieures de la
maladie et de toute autre cause possible
envisageable était elle-même de faible
valeur probante, la preuve ne pouvant
être rapportée par ces faits négatifs qui
sont aussi le lot de nombreux autres
sujets affectés par la sclérose en plaques
sans avoir jamais été vaccinés, que
l'apparition spontanée de la maladie à
l'âge de 17 ans, dénuée de caractère
exceptionnel, n'était pas un élément
déterminant en l'espèce, que la maladie
frappant l'oncle de Mme X... pouvait
s'interpréter aussi bien en faveur d'une
présomption de causalité qu'en faveur
d'une prédisposition congénitale en
dehors de tout contexte vaccinal, d'autant
que des chercheurs ont relevé une
susceptibilité génétique, et que, dans ces
conditions, les éléments invoqués par
8°/ que le défaut d'un produit peut aussi
bien
résulter
d'une
information
insuffisante sur les dangers liés à
l'utilisation du produit que du caractère
anormalement dangereux du produit luimême ; qu'en cas de défaut lié à une
information insuffisante ou inexistante
relative au produit, le lien de causalité
avec le dommage est établi dès lors qu'il
peut être démontré qu'en possession
d'une information claire, loyale et
complète, l'utilisateur du produit n'en
aurait peut-être pas usé ou en aurait usé
différemment ; qu'en affirmant de façon
péremptoire que « le lien de causalité
entre un défaut provenant d'une
information insuffisante et la sclérose en
plaques ne saurait être qualifié de direct
alors qu'une éventuelle contamination ne
pourrait provenir que de l'administration
du produit lui-même », la cour d'appel a
derechef violé l'article 1147 du code civil,
interprété à la lumière de la directive
CEE n° 85-374 du 25 juillet 1985 ;
Mais attendu que, si la responsabilité du
fait des produits défectueux requiert que
le demandeur prouve le dommage, le
défaut et le lien de causalité entre le
défaut et le dommage, la participation du
produit à la survenance du dommage est
un préalable implicite, nécessaire à
l'exclusion éventuelle d'autres causes
possibles de la maladie, pour la recherche
de la défectuosité du produit et du rôle
causal de cette défectuosité, sans pour
autant que sa simple implication dans la
réalisation du dommage suffise à établir
son défaut au sens de l'article 1386-4 du
code civil ni le lien de causalité entre ce
- 13 -
Mme X... étaient insuffisants pour
constituer des présomptions graves,
précises et concordantes de nature à
imputer la sclérose en plaques dont elle
souffre à la vaccination qu'elle a subie ;
que les juges du second degré ont, en
outre, considéré que la preuve du défaut
du vaccin n'était pas démontrée dès lors
que l'examen du carnet de vaccination de
Mme X... ne permettait pas de savoir,
avec certitude, si elle avait reçu le vaccin
à faible dose, dont la notice faisait
apparaître, dès 1994, les risques
neurologiques, ou le vaccin à forte dose,
dont la notice ne les avait mentionnés
qu'en 1995, sans qu'il soit précisé à quel
moment cette mention avait été portée,
par rapport aux injections effectuées en
juillet de cette année, et qu'en l'absence
de ces précisions, il n'était pas établi que
la notice du vaccin administré à Mme X...
n'était pas conforme au résumé des
caractéristiques du produit et aux
énonciations du dictionnaire Vidal ; que
la cour d'appel, qui s'est prononcée, non
pas en considération de l'absence de
preuve scientifique, mais à la fois par des
observations d'ordre général tendant à la
démonstration du caractère positif du
rapport bénéfice/risque de nature à
exclure la corrélation entre la vaccination
et la survenance de la maladie et au
regard de l'ensemble des éléments
propres à la patiente, a ainsi
souverainement estimé que la preuve
n'était pas rapportée de la participation
du vaccin litigieux à l'apparition de la
maladie de Mme X..., non plus, en tout
cas et sans méconnaître les termes du
litige, que celle du défaut du vaccin du
fait de la présentation de la notice dont la
teneur était dans le débat ;
septième branches et inopérant en ses
quatrième et huitième branches, ne peut
être accueilli ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le
pourvoi ;
que le moyen, mal fondé en sa première
branche et, en tout cas, manquant en fait
en ses deuxième et troisième branches,
mal fondé en ses cinquième, sixième et
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