Complicité féline

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Complicité féline
Jeudi 9 décembre 2004
Photos Eric Bernier
SOCIÉTÉ & LOISIRS
18
Retrouver le goût
de vivre grâce à
une chèvre, c’est
l’expérience émouvante
que vit actuellement
Margarida de TreyTerés, une pétillante
Suissesse originaire
de Catalogne
A
u cœur de Romainmôtier
(VD), la maison de Margarida et Christian de TreyTerés respire la douceur de vivre.
Née à Barcelone, la maîtresse du
lieu à l’accent chantant a tenu à
marquer sa demeure du sceau de
sa Catalogne natale. Tout y est
clair, coloré, accueillant. Même
Cobi, le grand chien noir croisé
par
Martine Bernier
labrador-bouvier bernois, déborde d’affection pour les visiteurs inconnus.
Margarida
Trey-Terés
sourit à la
vie en
compagnie
de Capucine.
Fibre verte
Passionnée de nature, Margarida, depuis qu’elle est en Suisse,
s’est beaucoup investie pour l’environnement, créant notamment
l’association Recyclone, en faveur
du recyclage des déchets ménagers, animant des stands d’information, produisant des spectacles de rue sur les déchets et
lançant Echo-Passion, un bureau
de communication et de sensibilisation.
Lorsque, voici un an, Margarida a appris qu’elle souffrait d’un
cancer, elle a eu le sentiment que
sa vie s’arrêtait. Cette femme optimiste et énergique de 56 ans a
basculé dans une dimension
jusque-là inconnue: la peur. «Je
n’osais même plus dormir. J’étais
infiniment triste. J’ai pris l’habitude d’apporter à mon oncologue
un cake chaque fois que j’allais le
voir. Nous sommes devenus
é Animaux de compagnie
Chèvre providentielle
«J’avais toujours rêvé d’être
bergère, explique Margarida. A
l’entrée de notre maison, j’ai
d’ailleurs placé une catelle représentant des moutons. Mais depuis l’âge de 25 ans, j’ai une peur
viscérale des animaux, particulièrement des chevaux et des
vaches. Je ne savais pas comment
j’allais réagir face à une chèvre.
pour Margarida. Chez lui, Capucine a deux compagnons de son
espèce: Roméo et Juliette.
«Avec Capucine, je rattrape ce
que le cancer m’a enlevé, sourit
sa nouvelle propriétaire. Je récupère le terrain volé par la maladie, et je repars sur le chemin de
la félicité.» Parce que Capucine a
une véritable tête de mule et le
goût des escapades imprévues,
sa maîtresse a organisé un apéritif pour la présenter aux villageois et s’excuser par avance des
ennuis qu’elle pourrait leur causer lors de ses fugues.
Thérapie naturelle
Margarida de Trey-Terés entourée de Jean-Jacques et Anni Sordet, et de
l’un des ânes de la maison.
amis. A chaque étape de ma chimiothérapie, j’ai organisé un repas pour mes amis, dans un refuge, dans la forêt. Mais j’avais
perdu le goût du bonheur. Je
n’avais jamais connu cette peur
d’être heureuse.»
Pourtant, j’ai senti qu’il fallait que
j’appelle.» Chose dite, chose faite.
Quelques jours plus tard, Capucine, jolie chevrette blanche du
Tibet, fait une entrée triomphale
chez Marc Benoît, jeune agriculteur qui a accepté de l’héberger
Puis Margarida a décidé de
vaincre sa peur des vaches pour
pouvoir seconder les agriculteurs
dans leur travail, lorsqu’ils souhaiteraient prendre un jour de
congé. Pour cela, elle s’est abonnée à terre&nature, où elle puise
tous les conseils possibles, et s’est
adressée à plusieurs agriculteurs.
Elle est également allée se former
au gîte d’étape d’Anni et JeanJacques Sordet, à La Praz (VD),
où elle a appris à traire les
chèvres. Auprès d’eux et des vachers de la région, elle suit une
thérapie naturelle et reprend
confiance. «Là-bas, pendant que
je trayais les chèvres, j’ai senti
que j’avais trouvé ma place!
J’étais exactement à l’endroit qui
me correspondait. Je n’ai pas en-
Grâce à Capucine
Le jour où elle a appris à sa fille
qu’elle était malade, celle-ci lui a
annoncé la naissance prochaine
de son petit-fils. Margarida aurait
pu se raccrocher à cette nouvelle.
Mais elle a pensé que «se nourrir
uniquement de cet enfant sans
rien avoir à lui apporter en retour
serait nocif pour lui.». Elle a donc
continué son combat contre la
maladie, tout en poursuivant sa
propre quête intérieure.
Jusqu’au jour où, il y a deux
mois, alors qu’elle va prendre un
train, elle découvre un petit écriteau sur lequel est écrit: «Gentille
petite chèvre à donner, qui aime
les enfants.»
Chez Marc Benoît, agriculteur à Romainmottier qui a accepté d’héberger
la chèvre du Tibet, Capucine a rencontré deux compagnons de son espèce: Roméo et Juliette.
core tout à fait vaincu ma peur
des vaches, mais c’est en bonne
voie.»
Et le miracle a lieu...
Depuis, Margarida se porte
bien. Jamais elle n’a l’air aussi
heureuse qu’en compagnie de Capucine. Celle-ci, grâce au boulanger qui lui prête un terrain, va déménager ces jours-ci dans un
enclos juste derrière l’abbatiale,
sous les fenêtres de sa maîtresse.
Pour ne pas qu’elle s’ennuie, elle
sera bientôt rejointe par une
deuxième biquette, Anémone,
une chèvre angora de 8 mois.
Margarida a retrouvé le goût de
vivre, mais elle n’en restera pas là.
Pour transcender sa souffrance et
en faire une expérience positive et
utile, elle souhaite raconter son histoire et celle de Capucine sous
forme de conte aux enfants malades, dans les hôpitaux. En leur disant que la chèvre existe et attend
leur visite. Elle rêve aussi de trouver un chalet d’alpage inoccupé
pour y monter de temps en temps,
avec ses deux chevrettes. En attendant, elle rayonne d’espoir et d’enthousiasme qu’elle sème derrière
elle, partout où elle passe.
M. B.
é A la page
Complicité féline
Lorsque Cyrus est entré dans la vie de
Clea Simon, journaliste et écrivain, l’existence de cette dernière n’était pas au
beau fixe. Le chaton a déclenché en elle
une passion à laquelle elle ne s’attendait
pas. Grâce à cette boule de poils devenue complice de sa vie affective, la
jeune femme va découvrir l’univers des
chats et les liens quasi magiques qui
les unissent aux femmes.
Dans son livre Comme Femme et
Chat, l’auteure se livre à une véritable
enquête, collectant le témoignage de
femmes vivant une relation privilégiée avec leurs félins domestiques.
Eleveuses, bénévoles dans un refuge, passionnées de chats, elles ont toutes
une histoire, que Clea Simon narre avec tendresse, entrecoupant
ses rencontres par le récit de son expérience personnelle. Elle explore
également la littérature, le cinéma et l’histoire pour expliquer pourquoi,
de Cléopâtre à Catwoman, en passant par Colette, la femme-chat inspire
de la fascination, de la crainte, voire parfois de la moquerie.
Cyrus, auquel le livre est dédié, est resté dix-sept ans dans la vie de
Clea. Cette histoire d’amour, elle la raconte avec humour et émotion,
dans un style vif et tonique. Elle relate, sans concession, le lien subtil qui
transforme certaines femmes en «femmes à chats», dans le sens le plus
noble du terme. Que l’on soit «à chat», «à chien» ou «à rien», chacun y
trouve son bonheur.
M. B.00
Comme Femmes et Chats, par Clea Simon, Editions Le Pré aux Clercs.