Symbios ou comment une prothèse se fait oublier

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Symbios ou comment une prothèse se fait oublier
VENDREDI 18 AVRIL 2008
24 HEURES
ÉCONOMIE
Symbios ou comment
une prothèse se fait oublier
RÉCOMPENSE
La société medtech
yverdonnoise a reçu hier
le Prix de l’entreprise suisse
romande 2008 de la part
du Swiss Venture Club.
ANNE GAUDARD
ARC /EAN-BERNARD SIEBER
«Q
u’un patient nous
oublie reste le
meilleur gage de
notre
succès.»
Pour l’heure, Jean Plé ne peut
guère se fondre incognito dans le
paysage économique romand. Le
fondateur de Symbios Orthopédie a en effet reçu hier à Lausanne le Prix de l’entreprise
suisse romande 2008. Dynamique, innovante et bien ancrée
dans son tissu régional, telle devait être la société recherchée
par le jury réuni par le Swiss
Venture Club. Cette année, c’est
donc la firme yverdonnoise qui,
parmi les finalistes, répond le
mieux à ces critères.
Créée en 1989, Symbios assoit
depuis sa réputation dans la niche des prothèses orthopédiques
sur mesure pour les hanches,
mais aussi pour les genoux. Sur
mesure? «Nous avons été les
promoteurs de l’analyse de la
hanche en 3D», raconte Jean Plé.
S’en est suivi la prise de conscience de la diversité des cas et
donc de la nécessité de mieux
s’adapter parfois aux besoins du
patient. Parfois, car certaines
personnes correspondent en revanche parfaitement aux produits standards. L’appréciation
finale revenant au chirurgien. Et
aujourd’hui le sur-mesure couvre
2% à 3% des marchés de la
hanche et du genou, qui pèsent
2 milliards d’euros en Europe et
10 milliards dans le monde.
Symbios se glisse ainsi «entre
l’ingénieur et le praticien», vise à
créer «la symbiose entre les
deux, d’où son nom», explique
son fondateur. Symbiose aussi
avec le corps du patient. Qui doit
oublier qu’il a souffert, qu’il a
subi une intervention. Et Jean
Plé tient à ce que ce moment
s’éternise. S’il insiste sur ce que
l’on pourrait appeler le service
après vente, il cherche aussi à ce
que le porteur de prothèse ne
doive pas la changer après dix ou
quinze ans.
Car le patient d’aujourd’hui
n’est plus forcément une personne du troisième âge. Il y a
aussi les enfants du baby-boom
SUR MESURE
Jean Plé, fondateur de Symbios Orthopédie, a reçu son prix hier à Lausanne
des mains de Hans-Ulrich Müller, président du Swiss Venture Club devant un parterre
de plus de 1000 personnes.
LAUSANNE, LE 17 AVRIL 2008
La saveur premium de Tante Agathe
Ils étaient six et il n’en reste
finalement pas qu’un. Les cinq
autres finalistes du Prix de
l’entreprise suisse romande ne
repartent pas les mains vides.
La société jurassienne Humard
Automation, spécialisée dans les
presses hydrauliques, repart
avec le deuxième prix. Et Pouly
et son pain paillasse montent
sur la troisième marche du
podium. Quant aux trois derniers nominés, ils se retrouvent
ex aequo à la quatrième place. Il
s’agit de DC Swiss Automation
de Malleray (outil de filetage
haut de gamme), de CP Automation sise à Villaz-Saint-Pierre
(ingénierie appliquée) ainsi que
l’autre société vaudoise, Tante
Agathe.
Si la présence dans ce palmarès de la mécanique de précision, de l’automation ou du
medtech confirme la place de la
Suisse dans ces secteurs de
pointe, Tante Agathe incarne la
diversité du paysage des PME
romandes. De ce nom émanent
des odeurs de pâtisserie, de
confitures bouillonnantes et
autres produits du terroir. Fon-
dée en 1954, mais réinventée en
2003, Tante Agathe s’est appuyée sur ses Cœurs de l’Oranger pour mieux rebondir dans le
haut de gamme. Au-delà de ce
biscuit, la firme de Lonay tient à
personnaliser une certaine
tradition, un certain savoir-faire,
de la recette au packaging. Elle
a su trouver les justes voies
menant aux consommateurs.
Autre point commun avec ses
consœurs primées hier, c’est à
l’exportation qu’elle réalise
l’essentiel de ses ventes.
aux cartilages irrémédiablement
usés – qui ont mal géré leur
engagement dans le sport par
exemple. Et qui, à la cinquantaine active, exigent de pouvoir
retrouver une fonctionnalité parfaite. Face à cette demande, la
chirurgie orthopédique se sophistique. Et Symbios gagne en
parts de marché. Elle réalise
30 millions de francs de chiffre
d’affaires, dont 75% à l’exportation. Soit en Europe, car le marché américain est trop dangereux pour une petite société qui
pourrait se retrouver au cœur
d’un procès la dépassant.
Depuis un peu moins de vingt
ans, Symbios explore ces deux
parties du corps essentielles à la
mobilité et étoffe son catalogue
de produits, qui compte déjà
quarante pages.
Et demain? Jean Plé ne croit
pas à l’imminence de la concurrence de la régénération du cartilage. «Dans les vingt prochaines années, rien ne remplacera
la prothèse.» Le chemin de la
croissance suit donc la toujours
plus grande sophistication d’implants toujours plus fiables, durables et confortables. Et, pour
justifier encore si besoin est le
prix reçu hier, Symbios assure un
ancrage durable dans sa région.
L’entreprise emploie une centaine de personnes dont quelque
soixante en Suisse. «Nous travaillons sur des machines complexes qui exigent notamment
une main-d’œuvre très qualifiée», précise Jean Plé en ajoutant que Symbios n’aurait jamais
pu se développer sans l’apport
des centres de recherche voisins
– EPFL, UNIL, etc. – voire plus
lointains puisque, en 1989, il s’est
lancé dans l’aventure avec le professeur Aubaniac d’Aix-Marseille.
Une croissance sur mesure.
A. GD