Cinéma garanti sans 3D

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Cinéma garanti sans 3D
a
Ciném
garanti sans 3D
www.cinemas-utopia.org • Toulouse (24 rue Montardy - 05 61 23 66 20) • Tournefeuille (Impasse du Château - Ciné 05 34 57 49 45 - Bistrot 05 34 51 88 10)
FATIMA
Écrit et réalisé par Philippe FAUCON
France 2015 1h19
avec Soria Zeroual, Zita Hanrot, Kenza
Noah Aïche, Chawki Amari, Mehdi
Senoussi, Franck Andrieux, Yolanda
Mpele… Scénario ibrement inspiré
des ouvrages de Fatima Elayoubi :
Prière à la lune et Enfin, je peux marcher seule.
Fatima, c'est un magnifique portrait de
femme, c'est le portrait d'une foultitude
d'autres personnages attachants et naturellement, en filigrane, celui de notre
société. C'est un film qui vient plonger
au plus profond de nous-mêmes, nous
bousculer à tel point qu'il sera impossible de regarder de la même manière
les passantes inconnues que l'on croise
dans la rue têtes nues ou discrètement
voilées. Il n'y a qu'une chose à faire :
éteindre complètement son portable, se
lover dans son siège préféré puis se laisser porter pendant une petit heure dix
neuf minutes où tout est merveilleusement dit et montré, avec une justesse de
ton et une élégance discrète qui confirment que Philippe Faucon est décidé-
No 220 Du 30 septembre au 3 novembre 2015 / Entrée: 6,50€ / Séance sur fond gris dans les grilles : 4€ / Abonnement: 48€ les 10 places
Avant-première mardi 29 septembre à 20h30 à Toulouse, projection suivie
d’un débat organisé avec l’Université Populaire de Toulouse, en présence de
Hourya Bentouhami et Silvia Voser (achetez vos places à partir du 19 septembre).
Hourya Bentouhami est maître de conférence en philosophie à l’Université de Toulouse Jean Jaurès. Ses
recherches portent sur la pensée politique contemporaine, dans une perspective qui croise genre, classe et race.
Elle a publié récemment Race, cultures, identités : une approche féministe et postcolonial (Presses Universitaires
de France), et Le dépôt des armes, non-violence et désobéissance civile (PUF). Elle fait partie des comités de
rédaction Actuel Marx, Cahiers du genre et de la revue féministe et queer internationale Comment s’en sortir.
Silvia Voser est réalisatrice, journaliste et productrice de films (Ken Bugul, personne n’en veut).
FATIMA
ment un grand cinéaste (on n'a pas oublié Samia, Dans la vie, le prémonitoire
La Désintégration…). Et au fait, plus que
jamais : arrivez à l'heure ! Il est impensable de louper le premier plan !
Fatima, un prénom de princesse presque
devenu un nom commun tant on l'associe aux dames de ménage corvéables à
merci, prolétaires de l'ombre destinées
à la serpillère. Notre Fatima ne rompt
pas avec ce cliché. Le pâle sourire qui
illumine son visage débonnaire, son allure de quarantenaire plantureuse, vêtue
soigneusement mais sans souci d'effets de mode, son voile qui cache ses
cheveux : tout contribue à en faire une
Fatima semblable à ces milliers d'autres
qu'on voit circuler dans l'indifférence
générale de nos cités. Dans la grisaille
du petit jour, elle semble presque glisser, anodine et frêle, pour aller travailler
dans divers lieux où l'on s'adresse à elle
avec une condescendance déshonorante (plus encore d'ailleurs pour ceux
qui en font preuve que pour elle qui la
subit). Le soir, rentrée à l'appartement,
il lui reste encore à affronter l'arrogance
de sa plus jeune fille, Souad, qui du haut
de ses quinze ans la juge de manière
tranchante. Comme si Fatima était le
symbole de l'entrave à son intégration,
l'empêcheuse de se normaliser en rond.
Sa révolte se trompe d'ennemie, elle est
le fruit d'une société qui l'incite à avoir
honte d'une mère qui n'est bonne qu'à
« laver la merde des Français » et qui ne
sait même pas parler leur langue…
Heureusement son aînée, Nesrine, remet
un peu sa cadette en place. Elle connait
le prix de l'ascension sociale, les sacrifices maternels pour qu'elle parvienne
jusqu'au concours de médecine… Tout
un discours tellement ressassé par la
voix haut perchée de Fatima que Souad
le rejette en bloc et ne veut plus l'entendre. Elle mériterait bien des baffes
parfois, et on aurait presque envie de
secouer Fatima qu'on pourrait prendre
tout d'abord, bêtement, comme le fait
une bonne partie de son entourage,
pour le prototype de la femme soumise.
Progressivement on découvre combien
on a tout faux, à quel point on est tombé dans le piège du délit de faciès et
on fond d'admiration pour cette bonne
femme à la volonté tenace, pour son
obstination à ne céder ni à la violence
ni au mépris qu'on lui renvoie de toutes
parts. Elle a cette force insoupçonnable
de celle qui n'a rien à prouver. On peut
bien la prendre pour une imbécile, cela
n'altère en rien ce qu'elle est, ses mérites. Si elle ne fait pas de vagues, c'est
qu'elle reste tendue vers son but, ne s'en
détourne jamais : amener ses filles vers
un rivage qui l'a elle même rejetée ou en
tout cas bien mal accueillie. Et la traversée est tellement semée d'embûches
que dans la bataille, cette altruiste s'est
tout simplement oubliée, sacrifiant une
part d'elle-même. Plus on rentre dans
son intimité, plus on dépasse sa difficulté à s'exprimer, cette barrière de la
langue qui crée un fossé infranchissable
entre les humains, plus sa beauté intérieure se dévoile, irradie. Personnage
complexe et subtil, à l'intelligence vive,
aux propos pertinents. On souhaiterait
tous avoir une telle Fatima dans sa vie !
Pour l'heure Philippe Faucon nous l'offre
dans son film : ne la laissons pas passer !
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
Les rendez-vous de l’Université Populaire de Toulouse
28 septembre 20h30 Bourse du travail Le code du travail en danger Gérard
Filoche UD CGT31-FSU 31 avec le soutien de l’ UPT • 6 octobre 20h30
Bourse du travail Gérard Le Puill l’écologie peut encore sauver l’économie
• 13 octobre 20h30 salle du Sénéchal Nils Anderson Un autre ONU pour un
autre monde ATTAC AM Diplomatique, Espace Marx,Mouvement de la Paix,
UPT • 20 octobre 20h30 Bijou, Grèce enjeux et perspectives politique Nikos
Smyrnaios • 22 octobre 20h30 Bourse du travail Coopératives contre capitalisme Benoît Borrits AM Diplomatique E Marx UPT • 29 octobre 20h30
Bourse du travail Mettre en démocratie les technologies émergentes Sara
Angéli-Aguiton. www.universitepopulairetoulouse.fr
L’HOMME
IRRATIONNEL
(THE IRRATIONAL MAN)
Écrit et réalisé par Woody ALLEN
USA 2015 1h36 VOSTF
avec Joaquin Phoenix, Emma Stone,
Parker Posey, Jamie Blackley…
Si tous les films étaient écrits et mis en
scène avec le même talent, si tous faisaient preuve de la même fantaisie profonde, de la même légèreté grave pour
épingler nos travers et nos lubies, pour
en rire beaucoup et en pleurer un peu,
le cinéma serait un perpétuel bain de
jouvence. Depuis ses débuts, Woody
Allen est passionné par la philosophie.
Elle imprègne mine de rien ses films des
grandes questions existentielles qu'il
traite avec plus ou moins de noirceur ou
d'humour. L'Homme irrationnel prend la
philo à bras le corps, en fait sa matière
même, qu'il malaxe avec délectation…
Abe Lucas est donc prof de philo mais
pour l'heure c'est surtout un homme
seul, qui a perdu toute joie de vivre. Son
étude des grands penseurs ne l'a pas
rendu heureux et ne lui a pas apporté non plus de réponses satisfaisantes
quant au sens de la vie. S'il a autrefois
aimé son métier d'enseignant, il estime
aujourd'hui que ses cours n'auront aucune influence sur la plupart de ses étudiants. Bref, Abe déprime. C'est dans
ce sombre état d'esprit qu'il débarque
dans une petite bourgade de la côte est,
dotée d'une modeste fac où il doit en-
seigner pendant l'été. Précédé d'une
réputation sulfureuse (publications iconoclastes, rumeurs persistantes de
frasques sexuelles avec des étudiantes),
le professeur Lucas est donc attendu
avec une certaine fébrilité dans la communauté universitaire. Woody Allen ne
pouvait pas faire un meilleur choix que
de confier le rôle à Joaquin Phoenix :
son charisme, sa beauté inquiétante, la
fragilité qu'il dégage font que l'on croit
immédiatement en son personnage, et à
tout ce qui se dit sur lui. Il incarne ce prof
borderline avec une telle justesse, sans
effet ni maniérisme, que l'on touche à la
perfection.
Ce qui devait arriver arrive et peu de
temps après son arrivée sur le campus,
Abe entame deux liaisons. D'abord avec
Rita Richards (formidable Parker Posey),
collègue en manque d'affection qui
compte sur Abe pour lui faire oublier un
mariage qui s'ankylose. Ensuite avec Jill
Pollard, (lumineuse Emma Stone, déjà
présente et épatante dans Magic in the
moonlight). Elle est sa plus brillante étudiante et devient très vite sa meilleure
amie dans cette ville où il ne connaît personne. Et même si Jill est amoureuse de
son petit ami Roy, elle trouve très vite irrésistible le tempérament torturé et fantasque de ce prof imprévisible, capable
de lui proposer une gorgée de bourbon
en pleine journée au milieu du campus.
Mais la phase dépressive d'Abe s'aggrave et malgré les avances de plus en
plus pressantes de la belle étudiante, il
la rejette.
C'est alors que le hasard bouscule le
destin de nos personnages : Abe et
Jill surprennent dans une cafétaria une
conversation qui va les bouleverser. Elle
pousse Abe à prendre une décision cruciale, qui va le rendre à lui-même, prêt
de nouveau à jouir pleinement de son
existence, persuadé d'avoir repris les
choses en main. Mais cette décision aura d'autres conséquences…
Il est des artistes qui, comme un artisan
perfectionniste, remettent sans cesse
sur le métier leur ouvrage, recherchant la
forme idéale, chaise après chaise, toile
après toile, film après film. Woody Allen
est un de ceux-là, un des plus éminents,
en version stakhanoviste : un film par an,
sans exception, depuis trente-trois ans !
Cette régularité de métronome entraîne
forcément quelques réactions désabusées : « Déjà ! », « Encore ! », « Le dernier
n'était déjà pas terrible », « Il n'a rien fait
de vraiment bien depuis Match point »…
bla bla bla.
Laissons les bla-blasés faire la fine
bouche. Pour notre part, nous préférons nous souvenir des multiples moments de pur bonheur et de vive intelligence que nous avons partagés avec le
bonhomme. Nous choisissons le camp
des modestes jouisseurs, appréciant à
sa juste et haute valeur ce Woody Allen
2015.
TOURNEFEUILLE
LA MESSE EST DITE ?
« Comment faire pour continuer à développer un cinéma qui ne se contente pas
de se faire le relais du box-office mais
contribue à irriguer de diversité des cervelles menacées d’atrophie, comment
faire pour cohabiter dans la plus parfaite
harmonie ? » nous demandions-nous en
fin de l’édito précédent qu’on vous engage à relire… pour bien saisir toute la
saveur des derniers événements…
Il nous en tombe en effet sur la tête une
bien bonne… Puisque nous avions atteint la fin de notre bail, nous avions demandé à nos propriétaires, comme cela
se fait, de le renouveler, nous attendant à
une négociation sympathique autour d’un
petit vin de messe : il faut vous rappeler que l’immeuble d’Utopia Toulouse fait
partie des biens de l’église, probablement
une de ces donations faites par des bons
chrétiens dans l’espoir de donner une
chance à leur âme de filer plus vite au paradis. On le sait en effet, pour autant que
l’église prêche l’esprit de pauvreté, elle
doit néanmoins gérer un immense patrimoine immobilier joliment nommé « secteur temporel ». On s’attendait donc à une
discussion entre gens bien intentionnés,
et la chose nous attriste d’autant plus
que nous avons les meilleures relations
avec les très sympathiques représentants
de l’institution, pour qui nous avons la
plus grande estime : voilà-t-y pas qu’on
trouve, à notre retour de vacances, sans
le moindre petit mot gentil de nos interlocuteurs habituels, un commandement
d’huissier, tout sec, tout gris, nous signifiant sans préambule notre congé, associé comme il se doit à une proposition de
renouvellement de bail qui nous a laissés sur le popotin : « le demandeur entend que le nouveau bail ait une durée de
9 années moyennant un loyer de 150 000
euros par an… hors charges. Bigre !…
Et au bout des neufs années ? Une nouveau commandement d’huissier ?… Qui
triplerait à nouveau le loyer ?… Sans
que jamais le propriétaire n’ait participé
à l’installation, ni à l’embellissement, ni à
l’entretien du lieu… ni à tout le beau travail d’Utopia qui a fait la valeur du bail…
On sait que le rapport du denier du culte
n’est plus ce qu’il était, mais de là à nous
asséner un triplement du loyer qui devient pour le coup exorbitant surtout si on
sait que le bail en question est monovalent, soit : à usage « exclusif de cinéma,
de kermesse, de théâtre, de conférence
et tout autre spectacle de haute moralité », ce qui limite largement les capacités
de la bailleresse Utopia à équilibrer ses
comptes. En 2004, le montant du loyer
– il est vrai peu élevé, probablement en
raison des relations privilégiées entre les
propriétaires et nos prédécesseurs – avait
été une première fois triplé, passant à 33
180 euros par an, et il a depuis été régulièrement réajusté, après expertise indépendante, qui l’avait jugé d’un niveau raisonnable, étant de notoriété publique que
les salles d’art et essai tirent le diable par
la queue au point que toutes (à l’exception d’Utopia) sur la région de Toulouse
(mais aussi ailleurs) sont subventionnées
par les instances locales (mairies, conseil
général, région…). On s’attendait donc à
un réajustement, mais de là a grimper subitement à 150 000 euros ! Il s’agit d’un
grand bond en avant que rien ne justifie
mais parfaitement dans l’air du temps
puisqu’il place la valeur propriété très audelà du rapport du travail qui se réduit, lui,
comme peau de chagrin.
On comprend bien à cette occasion pourquoi peu à peu le centre des villes devient
la proie des grandes enseignes, qui seules
peuvent suivre l’augmentation constante
du coût de l’immobilier, écrasant toute
activité un peu originale, étouffant toute
possibilité d’initiative alternative… Si
vous ajoutez à la chose l’évolution de
normes de plus en plus contraignantes
qui obligent les établissements recevant
du public à des adaptations coûteuses et
étouffantes… On comprend vite qu’il n’y
aura bientôt plus dans le centre que des
structures appartenant à des multinationales ou des établissements subventionnés sur fonds publics pour leurs travaux
comme pour leur fonctionnement… au
moment où justement on ne parle que
restrictions budgétaires… Une politique
générale qui aboutit à une concentration
relayée en périphérie par les multiplexes
(d’initiative privée ou publique), qui tend
à l’accélération de la normalisation du cinéma (et du reste), qui accroit la polarisation sur les films porteurs et les banques
à confiseries, qui aboutit in fine à un appauvrissement culturel…
Utopia était très fier de son indépendance
économique (acquise après de longues
années d’efforts et de difficultés) parce
qu’elle nous semble indispensable à la
liberté de programmation, d’expression,
d’engagement, d’impertinence… qui font
désormais partie des gènes Utopiens. On
connait le danger de dépendre de ceux qui
« ont la signature du carnet de chèque »
– comme le disait très élégamment un
certain Jean Noël Guérini, alors président
de la fédération socialiste des Bouches du
Rhône, député de Marseille, président du
Conseil Général, laissant entendre qu’il
vaut mieux ne pas déplaire à ceux qui ont
pouvoir de distribuer la manne publique. Il
n’y a pas d’autonomie de pensée, de parole et d’action sans indépendance économique. Les femmes savent ça depuis
belle lurette.
Bon, au lieu d’une discussion œcuménique qui nous aurait permis d’arriver à un
accord raisonnable, il va donc falloir que
nous fassions à nouveau appel à avocats,
experts… ce qui nous plombe financièrement, en rajoute au climat d’incertitude
générale et ternit un peu le plaisir de plonger dans une rentrée pourtant fertile en
films magnifiques qui auraient pu suffire
à notre bonheur. Bellissimo novembre !
Ce nouveau problème s’ajoute à celui que
nous évoquions dans la gazette précédente de l’adaptation d’Utopia Toulouse
aux normes handicapés. Depuis l’édito
précédent, notre architecte est arrivée
au bout de son étude, on a bien fait les
comptes, tourné la chose dans tous les
sens… Malgré toute notre bonne volonté, le coût des travaux nécessaires (plus
de 400 000 euros), ajouté au nombre de
places perdues (70 sur un total de 415
fauteuils), plomberait définitivement notre
capacité à tenir un équilibre financier
dans lequel on n’avait même pas encore
pris en compte une éventuelle augmentation de loyer… Sans compter les inconvénients engendrés par la suppression
d’une des deux entrées de la salle 1, le
rétrécissement de l’espace de travail des
valeureux salariés d’Utopia… Il y a des
aménagements possibles et il est bien
évident que ceux là, on s’empressera de
les faire. Mais on va devoir se résoudre à
demander une dérogation…
À part ça… il est arrivé un sale coup à l’un
d’entre nous il y a une petite quinzaine :
une roue de vélo qui ripe sur le sable de
la forêt des Saumonards à Oleron (très
belle sous ce petit soleil de début d’automne), et celui avec qui je partage depuis longtemps le pain et la conversation se fracasse sur un de ces gros bancs
de pique-nique en bois massif qu’affectionnent les familles en vacances. À la
mine livide du bonhomme, je bigophone
aussi sec au Samu qui envoie sans hésiter des secours : un quart d’heure plus
tard, trois pompiers aimables et véloces
l’emballent avec délicatesse dans un truc
gonflable pour qu’il ne souffre pas trop,
lui filent un coup d’oxygène jusqu’aux urgences de Rochefort sur mer (vous savez, les Demoiselles, l’Hermione)… Huit
jours d’observation rapprochée dans un
service de soins intensifs, et transfert
dès que la chose est possible à l’hôpital Larrey à Toulouse, aussitôt accueilli
par un interne qui avait tout le dossier en
main, rapidité des examens… De l’ASH
au plus diplômé des toubibs en passant
par une armada d’infirmières : pas une
fausse note, pas l’ombre d’une critique
à formuler et diable sait qu’on a le ricanement facile… De l’humanité à tous les
étages, de la vigilance, de la gentillesse,
rapidité du geste, pertinence du diagnostic, pédagogie, humour… et moi qui suis
une fouineuse, je me faufilais un peu partout dans les services : je peux témoigner
qu’on n’avait pas droit à un statut particulier… même bienveillance pour tous,
même qualité de soins… (bon, on ne parlera pas de la bouffe… néanmoins servie
avec le sourire).
Alors les potos, s’il y a un truc qu’il ne
faut pas qu’on gâche, s’il y a un truc qui
mérite qu’on descende dans la rue pour le
défendre, c’est bien ce service public formidable : d’ailleurs nous-mêmes n’avons
jamais contesté le fait de payer des
charges sociales et des impôts pourvu
qu’ils servent à ce service public-là !… Et
qu’on pende haut et court ceux qui ne font
pas des fonds publics bon usage, ceux
dont les tricheries foutent en l’air tout ce
beau système-là.
Et pour ce qui nous concerne : courez
donc mettre un cierge à Sainte Rita (patronne des causes désespérées)… qu’elle
nous aide à trouver dans les meilleurs délais des solutions à ces difficultés. Nous
devrions savoir dans les trois mois qui
suivent s’il y a des perspectives d’avenir
pour Utopia Toulouse (Pour Tournefeuille
tout va bien !)… on vous racontera !
Marguerite
Xavier GIANNOLI
France 2015 2h07
avec Catherine Frot, André Marcon,
Michel Fau, Christa Théret, Denis
Mpunga, Sylvain Dieuaide, Aubert
Fenoy… Scénario de Xavier
Giannoli, avec la collaboration
de Marcia Romano
Florence Foster Jenkins était une richissime américaine qui se rêvait diva.
Persuadée d’être une grande soprano, elle fut beaucoup moquée, mais
termina son étonnante carrière sur un
concert mémorable à Carnegie Hall.
La particularité de cette grande originale était de ne pas s’entendre chanter, et donc d’être parfaitement inconsciente de la fausseté de sa voix.
Loin de briser sa carrière dans l’œuf,
ce petit inconvénient ne l’a pas empêchée de laisser une trace indélébile dans l’histoire du chant lyrique :
Orson Welles s’en est d’ailleurs inspiré
pour créer le personnage de l’épouse
de son Citizen Kane, et on dit même
que Hergé s’en est nourri pour créer
la Castafiore… Mais si son histoire a
été le point de départ du film, Xavier
Giannoli en fait une évocation toute
personnelle et superbe, fatalement
cocasse mais aussi pleine d’ambiguité, de beauté, d’émotions contradictoires, d’humanité, de poésie… Il baptise sa diva Marguerite et la fait vivre
en France dans les années 20, période
foisonnante aussi bien dans l’évolution
des mœurs que dans celle des arts,
l’entoure de personnages qui contribuent à donner au film un intérêt et une
profondeur bien au-delà du simple récit d’un destin surprenant. Et il a l’idée
imparable de confier ce rôle périlleux
à une Catherine Frot baroque et bouleversante.
Marguerite vit dans un décor de rêve :
château cossu, lourdes tentures, lumière veloutée, personnel dévoué,
mari séduisant dont elle est profon-
dément amoureuse. La mode de
l’époque lui donne belle allure et sa
fortune lui vaut la bienveillance ostentatoire d’une petite cour qui se
presse dans ses salons pour participer aux soirées musicales qu’elle organise avec un sens du détail où se
manifeste sa nature généreuse. Pas de
doute, Marguerite sait recevoir et elle a
les moyens de ne pas lésiner. Elle est
la bienfaitrice d’un groupe de musique
qui lui doit son existence, et si des artistes de talent se produisent lors de
ses petits concerts privés, elle en est
la vedette obligée. Marguerite a pour
passion la musique et particulièrement
l’opéra. Une passion qui l’absorbe
tout entière, la dévore, fait exulter sa
vie : elle aime chanter, elle veut chanter et travaille comme une forcenée à
exercer sa voix, n’hésite pas à aborder les morceaux les plus ardus qu’elle
écorche avec une obstination qui force
l’admiration. Pas un de ses prétendus admirateurs n’ose lui dire qu’elle
chante horriblement faux, « sublimement faux, divinement faux, sauvagement faux » s’extasie un petit journaliste qui ne va surtout pas le lui répéter
mais qui va la convaincre au contraire
de se produire devant un vrai public.
Chacun l’encourage : par hypocrisie,
par intérêt financier, par lâcheté ou encore parce qu’elle est confondante de
gentillesse et que cette passion pour
le chant lui est tellement essentielle
qu’on imagine qu’elle s’écroulerait si
on l’en privait… Chanter est pour elle
à la fois souffrance et bonheur, un remède à sa profonde solitude, une tentative désespérée de gagner le cœur
d’un mari qui ne sait pas toujours s’il
a envie de fuir ou de la protéger, une
nécessité pour se sentir vivre, pour ne
pas sombrer… Il y a quelque chose de
grandiose, de drôle et de tragique dans
cette obstination à ne pas voir, à ne pas
comprendre le mensonge ambiant.
TOURNEFEUILLE
VIERGE SOUS
SERMENT
(Vergine giurata)
sailles, son épouse si elle lui désobéit.
Laura BISPURI
Italie/Albanie 2015 1h28
VOSTF (albanais et italien)
avec Alba Rohrwacher, Flonja Kodheli,
Lars Eidinger, Luan Jaha…
Scénario de Francesca Manieri
et Laura Bispuri, d'après le
roman d'Elvira Dones
Pourtant que la montagne est belle ! Au
début on ne sait rien de tout ce contexte :
simples spectateurs émerveillés par la
beauté incroyable de cette nature qui
s'étend sous nos yeux. Observateurs innocents de ces gens rêches qui vaquent
à leurs occupations, ceux qui arrivent,
celui qui s'embarque, que la caméra
va suivre désormais : Mark. Un taiseux,
un gringalet avare en sourires. Pas plus
qu'on ne sait vraiment de quel pays il
part, on ne sait dans lequel il arrive. Estce un autre, est-ce le même ? Le voici dans un lieu aux antipodes de son
point de départ, une ville grouillante qui
semble engloutir indifféremment femmes
et hommes. S'il est impressionné, notre
gars reste de marbre ; il observe, impavide. Étrange silhouette qui s'enfonce
dans la ville, fluette et dérisoire.
Puis le voilà parvenu devant une porte
d'appartement. Il frappe. On lui ouvre.
Hésitation, étonnement, malaise… On
le toise… Tant de sentiments contradictoires semblent se bousculer. Puis Lila,
sa sœur d'adoption et son époux, acceptent de l'accueillir. Seule Jonida, leur
fille, se montre peu aimable envers cet
oncle tombé du ciel qui commence par
lui piquer sa chambre. L'adolescente
qui vient de découvrir ce que c'est que
Dans les replis obscurs des Montagnes
des Damnés, au cœur de l'Albanie, se
terrent quelques hameaux lointains aux
maisons éparses. Les hommes y sont
rudes et rocailleux à l'instar du sol sur
lequel ils travaillent, loin de l'agitation
du monde moderne et de ses considérations. Des villages presque suspendus hors du temps. Les loi albanaises
n'arrivent pas jusque là. Seul le kanum,
le droit coutumier séculaire, régit les alliances, les conflits, la vie, la mort des
habitants. œil pour œil, dent pour dent…
Sauf si tu es une femme : peut-être alors
ne vaux-tu même pas le prix de tes dents.
Ici on n'endort pas les demoiselles avec
des contes de fées, inutile qu'elles attendent le prince charmant. Ici personne,
ni rien, ne les délivrera, si ce n'est la
balle de fusil que chaque père offre à celui qui épouse sa fille. Une balle pour que
le futur mari puisse abattre, sans repré-
d'avoir des seins qui poussent est très
désorientée par cet être androgyne qui
a le comportement d'un mâle sans en
avoir la carrure, ni la lourdeur…
C'est un premier film vraiment intrigant,
qui ne cède à aucune facilité, exigeant,
précis, anticonformiste. Laura Bispuri,
partant d'une histoire toute simple,
la transcende, dévide des multitudes
de pistes subtiles, passionnantes. Par
couches successives, les épaisseurs de
tissu tombent, jusqu'à aboutir à une mise
à nu intégrale et touchante de son personnage principal. Vous l'aurez peut-être
deviné, l'enfance de Mark fut celle d'une
jeune fille éprise de liberté, rêvant d'avoir
les mêmes droits que les garçons : arpenter les bois, porter une arme, être
considérée comme eux… Droits chèrement acquis au prix de sa féminité, de sa
sexualité, en devenant une de ces rares
« Vierges sous serment », statut curieusement accepté dans cette société patriarcale. En naviguant d'une époque à
une autre de son existence, on assiste à
sa mue touchante, complexe… Et c'est
paradoxalement en observant la déconstruction progressive de cette vierge
sous serment qu'on va peu à peu comprendre comment elle s'est construite.
TOULOUSE
LES CHANSONS QUE MES
FRÈRES M’ONT APPRISES
Écrit et réalisé par Chloé ZHAO
USA 2015 1h34 VOSTF
avec John Reddy, Jashaun St. John,
Irene Bedard, Taysha Fuller…
Découvert à la Quinzaine des Réalisateurs lors du dernier Festival de Cannes,
voici un premier film d'une maturité rare,
poignant de réalisme et bouleversant
d'amour. Les Chansons que mes frères
m’ont apprises décrit avec retenue et
sensibilité le quotidien d'une réserve indienne au cœur des grandes plaines du
Dakota du Sud. Passionnée par la communauté Lakota de Pine Ridge, la jeune
réalisatrice Chloé Zhao s'est immergée
pendant près de quatre ans dans cette
réserve avant de filmer avec respect et
humilité l'un des drames de l'histoire
américaine, la condition actuelle des
« Native Americans ».
Les deux héros principaux sont frère et
sœur : Johnny et Jashaun (formidables,
non professionnels comme la plupart
des acteurs du film) grandissent à Pine
Ridge, le cœur et les veines nourries du
sang de leurs ancêtres Lakotas.
Johnny, tout juste sorti de l'adolescence,
est plein d'espoir et de projets. Son avenir, c'est l'ouverture vers le monde, vers
l’ailleurs, très loin. Ici les espaces sont
à perte de vue, pourtant il se sent enfermé. Partir, suivre sa petite amie à Los
Angeles est la seule issue raisonnable
pour échapper à la pauvreté endémique
de sa communauté gangrenée par l'alcool, prohibé et donc objet de commerces sous-terrains et de guerres fraticides. Johnny veut s'envoler, mais son
père meurt subitement dans l'incendie
de sa maison : quitter sa sœur chérie, sa
mère esseulée, le peut-il ?
Sa jeune sœur Jashaun, gamine lumineuse, se construit au travers des traditions et de tous ceux qui l'entourent :
ses grands demi-frères, images tutélaires qui eux ont eu la chance de vivre
sous le toit paternel, et un grand-oncle
de substitution, formidable styliste marginal, hobo lunaire qui aurait pu sortir de
l'imagination d'un Kerouac et qui lui promet sa robe de pow wow.
La mise en scène est d'une belle élégance, d'une fluidité parfaitement maîtrisée, sans excès de style ni de séduction
mal placée, l'émotion monte, par saccades régulières, et ne nous laisse pas
tout à fait indemne. Les visages et les
gestes de Jashaun et Johnny sont d'une
justesse, d'une vérité saisissantes : cette
vie-là, c'est vraiment la leur, le film, c'est
bien leur quotidien. C'est sensuel, c'est
charnel, les êtres sont reliés viscéralement à leur terre, à leur peau d'Indien,
leurs chevaux, le rodéo est presque un
sport national. La réalisatrice a un vrai
sens du cadre et de l'espace, elle offre
à notre regard émerveillé les paysages
sublimes du Dakota du Sud, ses grands
espaces fascinants. Difficile de ne pas
penser au Terrence Malick de Badlands
ou Les Moissons du ciel… Les plaines
à perte de vue sont de vrais moments
de respiration, on s'y perd, s'y retrouve,
et pour nos héros ce sont le lieu des réponses et des silences nécessaires.
Dans un souci d'authenticité et de collaboration permanente avec les habitants
de la Réserve, la réalisatrice n'avait pas
de scénario définitif, juste une ébauche,
chaque scène étant écrite le matin
même, inspirée du quotidien. Certaines
séquences sont bien réelles mais replacées avec intelligence au fil de la fiction,
en accord avec les acteurs qui rejouent
ainsi leur bribe de vie disparue.
Comme le murmure un des héros du
film, Sitting Bull prophétisait que tout recommencerait avec la septième génération… Geronimo, lui, disait : « Nous
sommes en train de disparaître de la
surface de la terre, mais je continue à
croire qu’il doit y avoir une bonne raison
pour que Yoséné (Dieu) nous ait crées. »
Grâce à ce film magnifique, nous en
sommes plus que jamais persuadés.
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
BROOKLYN
Écrit et réalisé par Pascal TESSAUD
France 2015 1h23
avec KT Gorique, Rafal Uchiwa, Jalil
Naciri, Liliane Rovère, Despee Gonzales,
Véronique Ruggia, Blade MC…
Triple bonheur avec cet épatant premier film quasiment autoproduit, réalisé
en toute indépendance, avec une solide
connaissance du sujet comme moteur
et l'enthousiasme comme carburant :
celui de découvrir le visage rayonnant
et la forte personnalité de la rappeuse
helvético-ivoirienne KT Gorique ; celui de voir la banlieue – en l'occurrence
Saint-Denis – dans toute sa vitalité, loin
des clichés stigmatisants ; celui enfin de
plonger au cœur de la création hip hop
et slam, sa richesse, sa complexité, ses
contradictions.
On va suivre Coralie, une jeune rappeuse de 22 ans dont le nom de scène
est Brooklyn, qui quitte son père obtus et
sa Suisse natale – pas vraiment terre de
hip hop – pour venir s'installer et tenter
sa chance en région parisienne. A SaintDenis où elle pose ses valises, elle trouve
rapidement une chambre chez une vieille
dame (trop rare et géniale Liliane Rovère)
et un emploi de femme de ménage polyvalente dans une association musicale
de quartier où les apprentis MC tentent
de développer leur flow et enrichissent
leur écriture. Pour arrondir les fins de
mois plus que difficiles, elle se laisse
entraîner dans des petits larcins par un
complice gouailleur et sympa… Système
D pas vraiment recommandable mais
pas vraiment méchant…
Mais elle ne perd pas de vue son objectif, elle écrit dans sa chambrette des
textes inspirés et volontiers rageurs, elle
en interprète même un sur une scène
slam où elle fait forte impression, au
point de bluffer Issa, le bogoss local qui
perce dans le hip hop. Attraction réciproque mais la jeune femme veut aller
moins vite que le garçon, un peu trop
habitué à avoir tout tout de suite.
Et cette différence de comportement va
se retrouver dans la manière dont chacun va suivre son bonhomme de chemin
quotidien et artistique. Issa va se laisser détourner de l'atelier dirigé par Yazid
– animateur issu du quartier, connaisseur
passionné et lucide qui essaie de faire
en sorte que ses « poulains » gardent
les pieds sur terre – pour les mirages du
succès rapide, embobiné par un manager beau parleur. Coralie de son côté
persévère sur la voie qu'elle s'est choisie, rigoureuse, modeste, consciente.
Brooklyn ce n'est pas l'Amérique…
Le réalisateur Pascal Tessaud, fils d'ouvrier et familier de la périphérie parisienne, est un enfant de Saint-Denis
où il a été animateur culturel pendant
trois ans avant de réaliser ce Brooklyn.
Il connaît parfaitement son terrain, tout
son film respire l'authenticité et la justesse et s'avère un bel hommage à cette
ville parfois difficile mais forte d'une richesse culturelle, d'une tradition populaire, d'une solidarité active chez ses
habitants. Radiographie vivante et chaleureuse de la création hip hop au quotidien, Brooklyn en montre la créativité
– le film délivrant une belle série de performances d'artistes inconnus du grand
public – mais aussi ses paradoxes, son
attirance pour la culture américaine qui
n'empêche pas un fort ancrage dans
la réalité hexagonale, la tentation de la
culture bling bling et de l'argent facile
qui contraste avec l'esprit de la rue et
les textes réalistes sur le ghetto.
Comme annoncé d'emblée, Brooklyn
doit beaucoup à la performance lumineuse de la jeune KT Gorique, qui apporte toute sa fraîcheur et son talent de
rappeuse (elle fut malgré son jeune âge
championne de free style à New York,
première femme à avoir conquis ce titre)
et qui se révèle en outre excellente comédienne, subtile et intense, traduisant
bien les sentiments contrastés d'une
jeune femme indépendante, qui vit tour
à tour la galère, les espoirs, l'amour, la
trahison et l'amitié.
TOULOUSE
Film documentaire de Cyril DION
et Mélanie LAURENT
France 2015 2h
Qui n'a pas eu envie de changer le
monde ? Au moins de le rendre meilleur ? Qui n'a pas rêvé d'un monde où
chacun mangerait à sa faim, et sainement, aurait un toit, de qualité, pourrait
circuler librement, où l'argent ne serait
plus le roi, mais juste un moyen, où l'air
ne serait plus pollué jusqu'à l'asphyxie,
où les océans ne seraient plus pillés par
la pêche industrielle ni envahis par le
pétrole ou le plastique, où les champs,
les arbres, les animaux ne seraient plus
empoisonnés par les pesticides, infectés par la radioactivité invisible, inodore
? Un monde où l'intérêt commun serait
compris de toutes et tous : la nécessité de nous inventer une nouvelle et belle
vie, maintenant, pendant qu'il est encore
temps, pour que demain ne soit pas le
résultat inéluctable de nos errements…
Loin de l'écologie triste et punitive, loin
du discours sur le développement durable cher au greenwashing, vous allez
voir un film formidable, vivant, enthousiasmant sur notre extraordinaire capacité à rebondir face à l'adversité, notre
extraordinaire capacité à imaginer, notre
extraordinaire capacité à faire.
Mélanie Laurent et Cyril Dion sont allés rencontrer des gens passionnants à
travers le monde, qui œuvrent au quotidien à ce changement indispensable
: Inde, États-unis, Canada, Danemark,
Allemagne,
Islande,
Scandinavie,
Finlande, Grèce, France…
Le film est composé de cinq chapitres
: agriculture, énergie, économie, démocratie et éducation. Construction intelligente et pédagogique, dans le meilleur du sens du terme, qui nous montre
bien que tout est lié, qu'il s'agit bien
d'un problème politique, là aussi dans le
sens noble du terme. Et il présente des
actions, des alternatives concrètes qui
sont mises en œuvre, avec succès, dans
tous ces domaines. Mélanie Laurent :
« Mises bout à bout, les initiatives
comme la permaculture, les monnaies
locales, les énergies renouvelables, dessinent un monde possible. Ce qui peut
paraître démotivant, c’est qu’il ne s’agit
que d’initiatives isolées, mais en même
temps elles ne demandent qu’à être réunies ! Il y a déjà un monde qui tient la
route, qui existe, où tout est possible.
Des solutions sont déjà disponibles,
dans tous les domaines, c’est forcément
inspirant ! »
Tout s'enchaîne judicieusement et vient
renforcer la certitude qu'il faut d'urgence opérer une rupture symbolique,
mais aussi pratique avec notre système
actuel fondé sur le pétrole et les autres
énergies fossiles, sur le nucléaire, sur
le productivisme, sur le consumérisme,
sur la financiarisation de l'économie, sur
l'éducation normative et compétitive…
Pas de doute, Cyril Dion, co-fondateur avec Pierre Rabhi du mouvement
Colibris, et Mélanie Laurent, actrice et
réalisatrice, tous deux activistes pour un
monde meilleur, ont réussi leur coup : sur
les thématiques qu'il aborde, Demain est
un film-somme, essentiel, un outil d'information et d'action qui est aussi un
spectacle passionnant et exaltant.
TOULOUSE
LE CHANT D’UNE ÎLE
(RABO DE PEIXE)
Film documentaire de Joaquim
PINTO et Nuno LEONEL
Portugal 2004-2015 1h43 VOSTF
C'est beau Le Chant d'une île…
N'empêche ! On avait un petit faible pour
le titre original : Rabo de Peixe… De quoi
se gratter la tête quand on ne parle pas
portugais et imaginer plein de traductions exotiques avant de découvrir que
c'est tout simplement le nom du petit village où tout se déroule. « Rabo de Peixe »
veut dire littéralement « Queue de poisson » ! Ne riez pas ! Entre Longcochon
et Bouc Étourdi, certaines communes
françaises ne sont pas mieux servies ! Et
puis cette queue de poisson colle parfaitement à la peau de cette bourgade
de pêche et à celle de ses habitants. On
en vient même à se dire ironiquement
que ce nom était prédestiné et pourrait même qualifier les politiques européennes et internationales en matière de
pêche et d'écologie : des stratégies insaisissables, qui font des pieds de nez
aux humbles travailleurs, virent de bord
quand ces derniers pensent enfin tenir le
bon bout et finissent invariablement par
leur glisser entre les doigts ! Mais là, on
extrapole un peu…
Ce très beau film est d'abord le fruit d'une
rencontre insolite, au creux des Açores,
entre des insulaires imprégnés de traditions séculaires et une équipe de tournage venue d'un monde reformaté par
des technologies modernes. Ici à Rabo
de Peixe, nul besoin de réseaux sociaux
pour se sentir exister, ni de grandes
phrases pour ressentir pleinement ce
qu'est la solidarité. Traditionnellement
on partage ce qu'on a, on affronte en-
semble les tempêtes, et on reste soudés dans la fête autant qu'on le sera
pour faire face aux caprices de la nature.
On peut le dire, même si ce n'est jamais
évoqué explicitement : quand les deux
réalisateurs débarquent là, c'est d'abord
pour des raisons personnelles. Porteurs
du VIH, ils viennent dans ce coin reculé à la recherche d'un havre de tranquillité, pour se requinquer. Ce lieu de retraite va devenir pour eux un fascinant
sujet d'observation et donner lieu à un
premier reportage pour la télé sur les
techniques de pêche artisanales en voie
de disparition. Obligés de passer sous
les fourches caudines du petit écran, ce
premier travail achevé les laisse sur leur
faim et traîne dans son sillage un sentiment de frustration.
Dix ans passent… et les voilà qui re-
prennent l'ouvrage pour l'amener, en
toute liberté cette fois, à un aboutissement plus authentique. Le ton est tout
autre, sans clichés, et jamais il ne sombre
dans le mythe de l'objectivité pour nous
asséner un point de vue. Joaquim Pinto
et Nuno Leonel ne se contentent pas de
survoler un sujet, ils plongent dans la
réalité d'une humanité qui se bat pour
sa survie. En fait, toutes ces années, ils
n'ont jamais vraiment réussi à se détacher de Rabo de Peixe et se sont enracinés ici, comme ensorcelés par ces îles
et les chants silencieux de leurs sirènes
invisibles. Et c'est à notre tour d'être
fascinés par le courage, la soif de liberté de ces marins : de grands mots faciles à dire mais qu'ils mettent en œuvre
au quotidien pour affronter l'indifférence
d'un océan indomptable. Façonnés
dans leur lutte quotidienne, les voilà qui
se tiennent fiers et robustes, forgés dans
une matière aussi dure que les paysages
volcaniques qui les entourent. Ils attirent
le respect, l'empathie et on comprend
comment de simples sujets ils sont devenus de véritables compagnons de
route pour les réalisateurs. Cette proximité se ressent dans chaque plan, authentique, vivifiante comme ces amitiés
maritimes. Elle nous questionne sur les
routes qu'empruntent nos civilisations,
nous ramènent à l'essentiel : la beauté d'un paysage, la valeur de la vie, la
lutte indispensable pour la préservation
de notre planète. Ces simples pêcheurs
sont de vrais résistants, qui s'opposent
à la pêche industrielle qui les appauvrit à
force de draguer et de détruire aveuglément les fonds marins.
Rabo de Peixe, c'est mieux qu'un film,
c'est une leçon d'humanité. Et de beauté.
TOULOUSE
MARYLAND
Alice WINOCOUR
France 2015 1h40
avec Matthias Schoenaerts, Diane
Kruger, Paul Hamy, Zaïd ErrouguiDemonsant, Percy Kemp…
Scénario d'Alice Winocour
et Jean-Stéphane Bron
Musique de Gesaffelstein
Tiens, un film d'action à Utopia…
C'est rare ! Pas de danger que nous
ayons changé notre bazooka d'épaule,
mais il se trouve simplement que ce
Maryland présente un intérêt particulier.
Romanesque, il assume les ficelles du
genre et en joue de manière inhabituelle.
On peut tout aussi bien le voir au premier
degré comme un très bon suspense ou y
entrer à des niveaux plus subtils, distanciés, presque moqueurs. Peut-être estce le fait qu'une femme soit derrière la
caméra. De façon très culottée, la réalisatrice d'Augustine (son premier film) se
confronte à un domaine généralement
réservé aux hommes (quelques exceptions, dont Kathryn Bigelow en Amérique
ou Claire Denis chez nous) et lui imprime
sa marque. Alors qu'elle met en exergue
chez son actrice principale (Diane
Kruger) son côté femme objet, « femme
trophée », sa caméra caresse son acteur
presque amoureusement (le corps filmé
a du répondant : c'est celui du Matthias
Schoenaerts de Bullhead, De rouille et
d'os, Loin de la foule déchaînée…). Alice
Winocour fait de son héros un objet de
désir animal tout en nous immergeant
dans son monde déglingué.
Le monde de Vincent… c'est celui de la
guerre. L'action, les camaraderies viriles,
l'adrénaline qui monte au combat. Il en
est devenu tellement accro que le retour
à une vie normale lui semble plus qu'insipide : inaccessible. Musclé, surentraîné, efficace, en état d'alerte permanent… Il est à lui tout seul l'incarnation
du plan vigipirate appliqué par Rambo.
Plus vite dit : il est complètement barré !
Même s'il a conservé son intégrité physique, il est à l'intérieur tout autant estropié que ses camarades qui ont sauté
sur une mine. Dans sa tête, ça fourmille
comme dans un jeu vidéo frénétique.
Tendu tel un jaguar en chasse, toujours
prêt à bondir, il guette le moindre son,
le moindre geste, la moindre présence
comme si c'était celle d'un ennemi potentiel : réflexes vitaux sur un champ
de bataille mais inutiles, voire handicapants, dans la vie civile. D'autant que les
cachetons qu'il s'est habitué à prendre
massivement pour tenir le coup altèrent
son jugement. La réalité se distord, lui
demandant des efforts considérables
pour faire la part des choses et ne pas
déraper. Il a beau essayer de tricher auprès des médecins militaires, ceux-ci
refusent de le renvoyer en mission, sa
seule manière de vivre…
Là où l'armée fait preuve d'un minimum
de bon sens, le monde du travail se
montre beaucoup moins circonspect : le
voilà donc qui reprend du service dans
une société de surveillance. Sa carrure
massive, sa gueule impénétrable, son
regard presque fou en font naturellement un vigile crédible dont émane une
autorité immédiatement dissuasive.
Et c'est ainsi qu'il se retrouve parmi la
bande de gros bras embauchée pour
surveiller, lors d'une sauterie friquée,
une incroyable propriété : Maryland.
Vincent est une véritable bombe à retardement paranoïaque qui traine au milieu
de l'équipe. La soirée bat son plein, les
voitures sombres défilent, déposant des
personnages importants, les femmes
les plus sexy. Au milieu de tout ça, nos
hommes en noir louvoient, parés d'oreillettes, costard/flingue, l'œil happé par
une profusion d'écrans de vidéo surveillance… Mais l'œil de Vincent est surtout
happé par le décolleté audacieux de la
maîtresse de maison. Entre eux s'installe peu à peu un jeu de regards de plus
en plus troublants, tandis que Vincent
commence à mettre le nez là où il ne devrait pas…
Les allusions indirectes à des affaires,
à des conflits internationaux, laissent
libre cours à toutes les interprétations.
Maryland pourrait se situer n'importe où
sur la planète. C'est le symbole d'une
caste aussi privilégiée que peu vertueuse, pour laquelle l'humain n'a de
valeur que lorsqu'il lui rapporte et qui
n'a aucun scrupule à s'en servir comme
de la chair à canon : ce que fut et reste
Vincent… Boucle infernale dont il bien a
du mal à s'extirper…
TOULOUSE
Jeudi 15 octobre à 20h30 à Toulouse, séance unique
suivi d'une rencontre avec le réalisateur Léo Ponge,
Phillippe Coudray, animée par Cinébouleg et avec la
participation d'Hortense ! (Prévente à partir du 3 octobre)
Au cœur de la forêt
de Sasquatch
Léo PONGE
documentaire France 2013 1h
avec Philippe Coudray, Robert Kennedy,
Debbie Kennedy, Léon Brenig…
Scénario de Léo Ponge, avec la
collaboration de Florent Barrère.
Dans ce village global ultra-connecté
qu'est devenue notre planète, il reste encore des lieux sauvages et la croyance
populaire dit qu'ils sont habités par des
créatures mythiques. Parmi elles, le
Bigfoot, également appelé Sasquatch,
un grand bipède velu qui arpenterait les
forêts profondes d'Amérique du Nord,
tandis que son cousin le Yéti se cacherait dans les contreforts de l'Himalaya.
Mystère de la nature ou big bullshit ?
Pour tenter de répondre à cette épineuse question, Léo Ponge a suivi avec
sa caméra une expédition sur les traces
du géant poilu, dans l'Ouest du Canada.
Il en a tiré un documentaire épatant, Au
cœur de la forêt du Sasquatch.
Le Sasquatch, Robert Kennedy l'a vu.
Son épouse aussi, à une autre reprise.
Depuis ces rencontres du troisième type,
Robert traque la bestiole, questionne les
chasseurs et les pêcheurs, compile les
récits d'autres témoins visuels. Bref, il
est devenu spécialiste. Mais il a besoin
d'une caution scientifique pour prouver
au monde l'existence du Bigfoot. Le voici
en contact avec Léon Brenig, physicien
francophone qui est prêt à relever le défi. Le chercheur débarque donc en terre
canadienne avec son compère Philippe
Coudray, artiste multiforme et cryptozoologiste…
Robert a identifié une zone d'habitat possible, il transmet son savoir, imite le cri
du Sasquatch (rien à voir avec celui de la
chouette), révèle comment communiquer
avec lui en tapant sur des troncs d'arbres.
Les deux Européens écoutent gravement
et se mettent en marche. « Faut aller là où
ça monte », dit l'un. « Ça monte partout »,
répond l'autre…
Incroyable ! Il semblerait que des cinéastes fassent
encore des films ici, en région ! Quand en plus ils
veulent repenser la façon de les montrer ça donne : Ciné
Bouleg ! (de l'occitan : Bolegar : secouer) Tous les deux
mois, Ciné Bouleg ! bouscule les pratiques de spectateurs lors d'une soirée atypique où l'on voit des films d'ici qu'on ne voit pas ailleurs !
Pour cette troisième soirée, et comme pour toutes les soirées Ciné Bouleg, le film sera accompagné de surprises imaginées et peut-être même imaginaires ! A la suite du
film nous vous embarquerons au cœur de la forêt pour continuer ensemble l'aventure avec le
réalisateur et avec Philippe Coudray, tout droit revenu de sa dernière expédition canadienne !
TÊTE BAISSÉE
Kamen KALEV
Bulgarie/France 2015 1h45 VOSTF
avec Melvil Poupaud, Seher Nebieva,
Lidia Koleva, Sunai Siuleiman, Aylin
Yay… Scénario de Kamen Kalev et
Emmanuel Courcol
Depuis la chute du Mur et la faillite des
régimes socialistes plus ou moins totalitaires, quelques cinéastes nous racontent avec brio et lucidité les mutations et souvent le chaos qui s'est
installé en lieu et place de l'économie
planifiée et du contrôle social à la soviétique. Montée des nationalismes et
des ressentiments xénophobes, consumérisme effréné, inégalités sociales flagrantes, corruption, régimes mafieux et
économie souterraine sont le lot de l'Europe orientale et le revers de la médaille
des prétendues démocraties libérales.
Le cinéaste bulgare Kamen Kalev (découvert avec l'excellent Eastern plays,
disponible en Vidéo en Poche) est un de
ces brillants témoins en images.
Dans Tête baissée, il mêle thriller, histoire d'amour atypique et plongée sociale dans la communauté tzigane. Son
personnage principal, Samy, est un petit voyou français qui, par quelque circonstance qu'on ne connaitra pas, s'est
fait une spécialité du transport de fausse
monnaie entre Sofia et Marseille pour le
compte de la mafia bulgare. Une activité à haut risque qui le conduit fatalement un jour, à la descente de l'avion,
au contrôle douanier de trop. Les flics
français, bien plus intéressés par les
trafics humains endémiques liés à la
prostitution qu'à ses quelques liasses
de faux biftons, lui mettent un marché
en main : la prison ou sa collaboration
pour démanteler les filières qui amènent
jusqu'aux trottoirs de Marseille les prostituées bulgares, la plupart du temps tziganes et mineures. Il opte évidemment
pour le deuxième choix…
Après avoir enlevé la jeune Elka du
bouge où elle se vendait, la vie de Samy
va basculer quand il va trainer l'adolescente pour découvrir l'envers cruel du
trafic qui se joue dans les taudis Rroms
des périphéries des villes bulgares. Il
va devoir fuir à la fois la mafia qui avait
acheté Elka et ses complices de trafic
de fausse monnaie qui veulent coûte
que coûte qu'il continue à faire le passeur pour eux.
Le film se construit donc sur un rythme
de thriller, au gré de la cavale de Samy
et Elka, tout en décrivant la naissance
d'une drôle d'histoire d'amour sans issue. Car Elka, lolita désemparée, grandie trop vite, commence par détester
Samy avant de s'attacher à lui, parce
qu'il est plutôt gentil avec elle, et surtout
parce qu'elle sent bien au fond d'ellemême qu'elle a besoin coûte que coûte
de sa protection… Et face à elle, Samy
essaie de se concentrer sur sa calamiteuse mission, et ne sait pas trop comment prendre ces tentatives de séduction, rejetant d'abord cette fille trop
aguicheuse, puis s'attachant à son tour
à la gamine plombée par un destin cruel.
En arrière-plan de cette cavale, Kamen
Kalev décrit un monde où rien n'est ni
tout blanc ni tout noir, où certaines mères
n'ont apparemment d'autre choix que
de vendre leurs filles pour mille euros
à des réseaux de prostitution, des filles
qui se persuadent qu'elles s'ouvrent ainsi une porte vers un avenir meilleur dans
les pays occidentaux. Avec des personnages secondaires fascinants comme
cette maquerelle à la fois protectrice et
séductrice qui bat en brèche tout manichéisme…
TOULOUSE
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7-18 o 2015
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FA M IL
SAM. 10 OCT. > 11H00
église du Gesu
L’ORGUE DES ANGES
Concert de glassharmonica
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LE
FA M IL
DIM. 11 OCT. > 14H00 & 15H30
église du Gesu
ANATOMIE D’UN ORGUE
À la découverte de la fabuleuse
machine musicale
Nombre de places limité
LUN. 12 OCT. > 20H30
espace Cobalt
RÉCITAL DE CAMERON
CARPENTER
JEU. 15 OCT. > 20H30
basilique Saint-Sernin
CINÉ-CONCERT :
LA PRINCESSE AUX
HUÎTRES D’E. LUBITSCH
Emmanuel Le Divellec, orgue
TI O N
CRÉA
20 15
VEN. 16 OCT. > 20H30
église Notre-Dame la Dalbade
CARTE BLANCHE
À BERNARD LUBAT
Des grands récitals
des concerts du Midi
 des concerts Ateliers de l’orgue
 des escapades en région
 une Nuit de l’Orgue
et bien d’autres
manifestations...


www.toulouse-les-orgues.org
+33 (0)5 61 33 76 87
SAM. 17 OCT. > 11H
église du Gesu
CONCERT
DE PIANO-PÉDALIER
E
ORGU
EN
LE
FA M IL
SAM. 17 OCT. > 15H
TI O N
CRÉA
20 15
église du Gesu
CINÉ-CONCERT :
CARTOONS & ORGUE
Emmanuel Le Divellec, orgue
SAM. 17 OCT. > 20H30
TI O N
CRÉA
20 15
auditorium
Saint-Pierre des Cuisines
CHANTONS
LA VIE MODERNE !
La clique des Lunaisiens /
In Nomine
Arnaud Marzorati, direction /
Yves Rechsteiner, harmonium
Youth
(LA GIOVINEZZA)
Écrit et réalisé par Paolo SORRENTINO
Italie/GB 2015 1h58 VOSTF (anglais)
avec l'irrésistible duo Michael Caine
– Harvey Keitel et Rachel Weisz, Paul
Dano, Jane Fonda…
Au cœur des Alpes suisses, dans un
grand hôtel réservé aux plus fortunés,
où tout ne devrait être que luxe, calme
et volupté, nous allons en fait côtoyer
une belle bande d'agités : un jeune acteur en plein questionnement sur son
prochain rôle, un couple qui semble ne
jamais échanger le moindre mot, un ancien footballeur argentin en surpoids
(eh oui, c'est lui), Miss Univers en personne, un guide de montagne probablement plus habitué au charme spartiate
d'un refuge, une masseuse de l'hôtel
qui se rêve danseuse, une jeune prostituée désabusée… Mais nous fréquenterons surtout, pour notre plus grand plaisir, un vieux réalisateur venu travailler à
ce qui devrait être son film-testament
– Harvey Keitel – et son meilleur ami, un
chef d'orchestre à la retraite – Michael
Caine. Ce dernier se verra proposer par
un émissaire de la reine d'Angleterre de
reprendre la baguette pour diriger un
morceau particulier à la fête d'anniversaire du prince Philip. Il opposera un refus ferme et définitif à cette demande…
Mais n'est-ce pas de toute façon le privilège de l'âge de pouvoir se détacher
de certaines obligations et se permettre
d'envoyer paître la reine d'Angleterre ?
Cela dit, même à 80 ans, les choses ne
sont pas si simples, surtout quand on a
une grande fille qui est aussi son agent
personnel et qui a des idées bien arrêtées sur ce qu'est la carrière d'un grand
maître de la musique…
La présence de ces personnages dans
ce lieu de rencontre naturel qu'est l'hôtel va permettre de multiples échanges
qui seront source de réflexion et même
d'évolution pour certains. La vie, la mort,
la création, la beauté, le sens des choix
que l'on fait, le temps qui passe, l'amitié, la paternité, l'amour, la fidélité, ce qui
nous obsède, ce dont on se souvient,
ce que l'on préfère oublier… autant de
thèmes évoqués ou sous-entendus
lors de ces discussions plus profondes
qu'elles n'en ont l'air sur le moment.
Cela n'empêche d'ailleurs pas nos octogénaires d'aborder des questions
plus terre à terre, comme de s'enquérir
chaque jour du nombre de gouttes qu'ils
auront réussi à pisser ! Et l'on peut faire
confiance à Paolo Sorrentino pour déployer tout au long du film une finesse,
une subtilité, une tendresse, une drôlerie
qui font tout son prix.
Ce nouveau film de l'Italien Sorrentino est
tourné en anglais et l'immense Michael
Caine prend en quelque sorte le relais de
Toni Servillo, l'acteur fétiche du réalisateur, dans le rôle de l'homme d'âge mûr
impassible, au regard affûté, qui occupe
son temps à scruter les habitudes et les
manies de ses semblables. Les autres
acteurs sont tout autant à leur place dans
l'univers de Sorrentino, Paul Dano, parfait, ou Harvey Keitel dont vous n'oublierez pas le face à face avec Jane Fonda.
Plus encore que dans ses précédents
films, La Grande Bellezza ou Il Divo, l'humour est ici très présent : il s'exprime
essentiellement à travers des dialogues
savoureux, mais aussi au détour de
quelques épatantes trouvailles visuelles.
Bref, un qualificatif résume bien la forte
impression que nous fait ce film : brillant !
TOURNEFEUILLE
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AMOURS, LARCINS
ET AUTRES COMPLICATIONS
Muayad ALAYAN
Palestine 2015 1h34 VOSTF Noir & Blanc
avec Sami Metwasi, Maya Abu Alhayyat,
Ramzi Maqdisi, Riyad Sliman…
Scénario de Muayad et Rami Alayan
C'est une comédie policière enlevée et
trépidante, avec en tête d'affiche imparable un personnage de loser que vous
allez adorer, parce qu'il est l'incarnation vivante de la loi non moins imparable des emmerdements maximum ! Et
ce petit polar hilarant représente en plus
une grande première puisqu'il se déroule dans les territoires palestiniens, où
la sus-dite loi des emmerdements maximum et autres complications s'applique
mieux encore sans doute que dans la
plupart des autres coins du monde.
Il faut dire d'emblée que les emmerdes,
Mousa, notre héros, les cherche avec
plus de constance que Lancelot le Saint
Graal. Il pourrait gentiment suivre les
traces de son pauvre père qui se tue
à la tâche sur des chantiers en Israël,
après avoir obtenu au prix de moult démarches le sacro-saint laissez-passer.
Ben non : à peine a-t-il commencé à
touiller le béton sous un soleil de plomb
qu'il se décourage et abandonne le bleu
de travail et son paternel désespéré sur
l'échafaudage pour aller traîner dans les
beaux quartiers à la recherche d'une bagnole à tirer…
Le jeune homme est un voleur, soit. Il
pourrait au moins courtiser une honnête
jeune fille… Mais non : il préfère forniquer avec une riche épouse à qui, on le
comprend vite, il a fait jadis une enfant,
qu'il a été contraint d'abandonner.
La vie de Mousa est donc déjà très très
compliquée, mais elle va le devenir encore plus quand il va s'avérer que, dans
le coffre de la voiture qu'il a volée (celle
dont il était question trois lignes plus
haut, il faut suivre !), se trouve un soldat israélien qui a de toute évidence été
enlevé ! Voilà-t-y pas que notre Mousa,
qui au final n'aspire qu'à extorquer
suffisamment de sous pour partir de
Palestine grâce à un entraîneur de foot à
corrompre, se retrouve dans une situation impossible, avec sur le dos :
1/ des fedayin très remontés d'avoir perdu leur otage
2/ un flic israélien sadique et sous cocaïne qui le soupçonne intuitivement
d'être pour quelque chose dans l'enlèvement
3/ un soldat/otage un peu benêt à qui
notre loser ne veut pas de mal mais dont
il ne sait que faire
4/ éventuellement un mari jaloux qui
pourrait découvrir le pot
aux roses à tout moment
Ce premier et réjouissant
film de Muayad Alayan
fonctionne excellemment,
sur le double registre du
burlesque et du polar tendu. On pourrait le croire
totalement apolitique, tant
son personnage principal,
héros lunaire et taciturne
tout occupé à se dépatouiller de son petit destin
personnel et bordélique,
semble se foutre royalement du Grand Destin de
son pays et des tractations autour de l'échange
de prisonniers dont il est
un des acteurs largement
involontaire. Pourtant, au
fil des mésaventures de
Mousa, Muayad Ayalan
montre bien quelques
unes des caractéristiques qui font l'infernal quotidien des territoires palestiniens : la nécessité de survie qui oblige
à faire allégeance à l'occupant comme
le fait le père, la corruption généralisée
incarnée par le riche mari de l'aimée de
Mousa et par la figure rocambolesque
de l'entraineur de foot, la pression permanente qu'exercent les autorités israéliennes, qu'on ressent bien à travers
la paranoia et le zèle quasi-maladif du
flic israëlien (l'œil rivé sur les images
de drones qui surveillent tous ls faits et
gestes de Mousa – qui connait d'ailleurs
parfaitement leur existence)…
Mais malgré tout ça, croyez le ou non,
l'amour triomphera…
TOULOUSE
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vous
«Fall Fell Fallen»
dans le cadre de L’Européenne de Cirques
Sam 17.10 ● 20h30
Dim 18.10 ● 17h00
© Philippe Laurençon
CIE LONELY CIRCUS - En partenariat avec La Grainerie
FESTIVAL JAZZ SUR SON 31 - Conseil départemental de la Haute-Garonne
Mer 21.10 ● 20h30
© Sylvain Gripoix
Kyle Eastwood
Sam 24.10 ● 20h30
© Jamie Jung
DIRECTION JOSEPH SWENSEN / VIOLON, ITAMAR ZORMAN
«Gala des Etoiles» Ballet filmé de La Scala de Milan
Ven 30.10 ● 20h00
© Rai.com
ALL OPERA
«Bonjour ma chérie» / «Octave» / «duo 1»
CIE EMMANUEL GRIVET / CIE MMCC / CIE SOPHIE CARLIN
Dim 01.11 ● 16h00
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Trois formes chorégraphiques pour jeune public
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www.mairie-tournefeuille.fr / rubrique Billetterie spectacles
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TournefeuilleCulture
© Joseph Lazaro
ECOLE D’ENSEIGNEMENTS ARTISTIQUES TOURNEFEUILLE
Licences d’entrepreneur de spectacles n°1-1081748 / 2-1081749 / 3-1081763
Orchestre National du Capitole de Toulouse
FOU D’AMOUR
Écrit et réalisé par Philippe RAMOS France 2015 1h45
avec Melvil Poupaud, Dominique Blanc, Diane Rouxel,
Lise Lametrie, Jacques Bonnafé, Jean-François Stévenin…
RED ROSE
Sepideh FARSI Iran 2014 1h27 VOSTF
avec Mina Kavani, Vassilis Koukalani, Shabnam Tolouei,
Babak Farahani, Javad Djavahery…
Scénario de Javad Djavahery et Sepideh Farsi
C'est une histoire d'amour sur fond de révolte et de manifs :
Téhéran en juin 2009, au lendemain d'une élection présidentielle très contestée, un an avant les printemps arabes, la ville
s'agite. Une bande de manifestants déboule dans l'appartement d'Ali pour se mettre un moment à l'abri. Les manifs, il
connait… mais les siennes étaient pour le renversement du
Shah dans les années 80 et ces jeunots viennent bousculer
une vie qu'il voudrait en retrait. Sara a des yeux étranges. S'il
est sur la réserve, elle est bigrement délurée et va prendre l'initiative d'une relation passionnelle, exacerbée par un contexte
non moins passionnel. A la première accalmie, la bande retourne dans la rue, mais Sarah revient sur ses pas…
Si on garde à l'esprit que le régime iranien actuel n'est pas
indulgent du tout du tout pour les contestataires, n'apprécie
pas la représentation de femmes non voilées et interdit toute
relation physique à l'écran… on se dit en voyant le film que
réalisatrice, acteurs, et tous ceux qui sont au générique ne
sont peut-être pas près de refaire du cinéma en Iran.
Le film est passionnant à plus d'un titre : tourné pour les intérieurs dans un appartement d'Athènes (produit en partie par
un Grec), toutes les séquences des manifs qu'on voit ont été
tournées in vivo sur des téléphones portables, par des anonymes, seul moyen (risqué pour celui qui filme !) de pouvoir
témoigner de ce qui se passe sur le terrain. Une façon de
rendre hommage à tous ceux qui ont risqué leur vie pour filmer ce soulèvement post-électoral particulièrement énorme,
ainsi que la répression qui lui a répondu.
Le huis-clos de cette histoire d'amour nourrie autant que perturbée par la différence de génération des deux amants, qui
sont loin d'être neutres par rapport à ce que vit leur pays,
ne cesse donc d'être lié aux événements extérieurs par ces
images exceptionnelles.
TOURNEFEUILLE
Le 22 Décembre 1959, un homme est emmené à la guillotine et exécuté sur le champ. C’est sa tête tranchée qui va
nous raconter le pourquoi et le comment de cette fin tragique.
Mais que les âmes sensibles se rassurent, il n’y a absolument
rien de gore ici. Juste un procédé qui va permettre que se
mette en place une narration à la première personne dans une
langue élégante sans être pédante, rappelant par moments
celle des meilleurs auteurs de romans libertins du xviiie siècle.
Nous priant de convenir avec lui qu’il y a quelque chose de
fort désobligeant à se voir brutalement séparé d’une partie de
soi-même, ce narrateur peu ordinaire va s’employer à nous
convaincre, si ce n’est de son innocence, du moins de sa
culpabilité minimale.
Puni par l’évêché en raison, nous le devinons vite, de sérieuses négligences dans l’observance de son vœu de chasteté, le héros de cette histoire, un curé trentenaire, arrive dans
sa nouvelle paroisse qui, loin d’être le désert souhaité par sa
hiérarchie, se révèle très vite à ses yeux une « divine et charnelle cité terrestre ». En effet, au milieu de paysages bucoliques de toute beauté, ce séducteur comprend immédiatement, grâce à la position stratégique que lui confère son
rôle de confesseur, que le quotidien de ses paroissiennes est
triste à mourir et qu’il n’aura aucun mal à cueillir les fruits délicieux que le Seigneur, dans son infinie bonté, a déposés sur
son chemin…
Des images somptueuses. Des acteurs parfaitement justes
avec, en plus des trois déjà cités, Melvil Poupaud entièrement
convaincant dans ce personnage de curé hédoniste et égoïste et Diane Rouxel lumineuse en aveugle à la beauté simple
qui aimante tous les regards. Un texte enfin dont les qualités littéraires justifient la conduite du récit par une voix off. Si
l’on ajoute un humour constamment présent, voici de nombreuses raisons de ne pas manquer ce film, dont le seul véritable défaut est le titre.
TOULOUSE
LA DANTE ALIGHIERI
Cours
d’italien
Inscriptions du 1 au 25 septembre du
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mardi au vendredi de 15h30 à 18h30
ou sur site. Journées portes ouvertes les
samedis 5, 12 et 19 septembre de 10h
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couples, étudiants, sans emploi.
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Tarifs réduit ado., étudiant et chômeur.
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Dans la Gazette
[email protected]
06 70 71 53 55
ALPHABET
Film documentaire
d'Erwin WAGENHOFER
Allemagne/Autriche 2014 1h48 VOSTF
Après avoir mis en évidence l’absurdité et la fin programmée du système alimentaire insustriel (We feed the world),
puis celles du système financier ultra-libéral (Let’s make money), Erwin
Wagenhofer s’attaque à un autre mammouth, moins polémique sur le papier
mais pas le moins important des trois :
le système éducatif. Et une fois de plus,
l'étude est argumentée, le constat sans
concession.
On le sait : le système éducatif dominant ne laisse que trop peu de place à la
créativité, à l’imagination, à l’esprit critique…
On le sait : la course aux bonnes notes,
aux bons résultats, aux meilleurs classements est devenue plus qu’un simple
objectif, une véritable obsession.
On le sait : les élèves et étudiants sont
stressés, fatigués, épuisés par des programmes trop lourds, angoissés par la
peur de rater.
On a beau le savoir, la démonstration en
images et en mots, ceux de quelques
éminents pédagogues, chercheurs,
théoriciens de l’éducation aux quatre
coins du monde, n'en est pas moins
édifiante. Car la machine éducative, modèle hérité de la révolution industrielle,
fonctionne trop souvent comme un rouleau compresseur.
L’exemple le plus hallucinant est sans
doute celui de la Chine qui, en faisant le
grand bon dans la société de consommation, a fait de son système éducatif une gigantesque usine à concours.
Et les « boîtes » censées préparer les
élèves – souvent dès leurs plus jeune
âge et au prix de moult sacrifices financiers des parents – aux diverses «
Olympiades » sont devenues des multinationales puissantes cotées en bourse.
L’Europe n’est pas en reste et forme de
bons petits soldats qui viendront grandir les rangs d’une armée toute dévouée
au Dieu business et ils sont tout aussi
effrayants, ces jeunes étudiants bien habillés qui participent au concours du futur super big boss de demain.
Le pire étant sans doute que personne
ne s’interroge vraiment sur le sens de
tout cela et que chacun (parents, enseignants, ministres de l’éducation) participe à sa manière, consciente ou non,
à nourrir, à son échelle, un système qui
dévore ses enfants, ne leur laissant plus
le temps de s’ennuyer, de rêver, de jouer.
Alors quoi, c’est fichu ? Il ne nous reste
plus qu’à pleurer ? Il est déjà trop tard ?
Au secours, nos enfants font tous finir
lessivés du cervelet ?
Heureusement, il a toujours existé des
chemins de traverses, des écoles buissonnières, des alternatives à la pensée
unique, au modèle dominant. C’est sans
doute là qu’il faut aller chercher les clés
pour penser l’école autrement, c'est là
que le film d'Erwin Wagenhofer va filmer
des expériences stimulantes.
Peut-être devrait on s’inspirer de la pédagogie d’Arno Stern et de ses ateliers
de peinture où il n’y a d’autre consigne
que celle de se faire plaisir. Peut-être
faudrait-il écouter cette étude qui raconte que libre arbitre et sens critique
sont bien plus forts chez un enfant de
4 ans que chez un jeune adulte de 18.
Ou simplement s’inspirer de notre cerveau qui fait fonctionner ses deux hémisphères en parfaite collaboration,
sans que l’un cherche à écraser ou à
avoir une meilleure notre que l’autre.
Alors parents, enseignants, Ministres
(re) voyons notre Alphabet, réfléchissons
et agissons !
TOULOUSE
Café Botanique
Les rendez-vous mensuels des AJT
dans le coin cheminée d’Utopia
Vendredi 9 octobre à 20h30
Philosophe, naturaliste
et poète…
Soirée « Jean Henri Fabre »,
homme de science, écrivain
passionné de nature. Nous
donnerons un coup de
projecteur sur ce fou d’insectes
et de botanique et sur son
œuvre hors du commun,
en partageant ses textes.
www.jardiniersdetournefeuille.org
06 32 32 07 00
NOUS VENONS EN AMIS
ne peut pas voler de nuit et assure venir « en ami », expression qui rappelle
autant un épisode de Star Trek que les
paroles lénifiantes servies par les colonisateurs aux populations des contrées
qu'ils s'apprêtaient à envahir…
Film documentaire écrit
et réalisé par Hubert SAUPER
Autriche 2014 1h50 VOSTF
Prix Spécial du Jury, Festival de
Sundance 2014 • Prix de la Paix,
Festival de Berlin 2014
Il faut bien avouer qu'on n'entrave souvent pas grand chose à la géopolitique
africaine. Il faut bien avouer aussi que
les médias dominants entretiennent soigneusement le flou, laissant entendre
aux oreilles de l'Occidental inquiet et
point trop curieux que ces peuples-là ne
sont pas comme nous, que les guerres
tribales sont inévitables, que les conflits
ethniques existent depuis le début des
temps, que les Africains, on le sait, sont
querelleurs, autant que les Allemands
sont travailleurs… Plus sérieusement
et pour en venir au film qui nous intéresse ici, que savons-nous de la guerre
du Darfour qui, il y a moins de dix ans,
a fait au bas mot 300 000 morts et bien
plus encore de déplacés ? Que savonsnous du Soudan, pourtant premier pays
d'Afrique par sa superficie ? Les gesticulations de la star Georges Clooney
nous ont « appris » que sévissaient làbas des super méchants, les Janjawids,
des guerriers arabes agissant avec la
complicité du super méchant président
soudanais Omar El Béchir, évidemment
musulman, alors que les malheureuses
victimes faisaient partie des minorités chrétiennes ou animistes. La vérité
est évidemment un chouïa plus compli-
quée… Et d'abord, ce que vous ne saviez probablement pas plus que moi,
c'est que le Soudan s'est divisé depuis,
le Soudan du Sud chrétien ayant fait sécession en 2011 à l'issue d'un référendum…
Et c'est bien de colonisation qu'il sera
question dans ce film passionnant autant que secouant. Car derrière la partition du Soudan, c'est une guerre économique et coloniale qui se trame,
opposant les deux super puissances
que sont la Chine, soutien du Soudan
Nord, et les Etats-Unis, à la manœuvre
derrière les nouveaux dirigeants du
Soudan Sud, dont le matamore président arbore fièrement un chapeau de
cow-boy offert par George W. Bush luimême. Une sale guerre dont les victimes
collatérales sont évidemment les populations, spoliées, déplacées, humiliées.
Sauper va ainsi à la rencontre des ingénieurs pétroliers chinois, qui se soucient
comme d'une guigne d'avoir empoisonné la rivière proche, seule source d'eau
pour des milliers de paysans… Côté
Sud, il découvre un vieil homme effondré qui, après avoir lutté vingt ans durant pour l'indépendance de son pays,
s'est fait honteusement spolier par ces
Américains qui prétendaient aider son
peuple, en l'occurrence un Texan qui a
soutiré à son village 600 000 hectares
pour à peine 25 000 dollars… Nous ne
sommes pas prêts d'oublier le visage
en larmes de ces écolières habituées à
vivre presque nues, seulement vêtues
de leurs bijoux traditionnels, et obligées
par des missionnaires américains à revêtir un uniforme ridicule… Car la colonisation va de pair avec la négation de
l'identité de l'autre.
Après avoir vu le film implacable de
Hubert Sauper, on se prend à penser que
les Africains auraient peut-être dû faire
comme cette tribu insulaire des Sentinele,
dans l'Océan indien, qui a toujours farouchement repoussé tout accostage
de navigateurs venus de l'extérieur…
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
Hubert Sauper nous apporte quelques
informations essentielles – et souvent
sidérantes – avec Nous venons en amis.
Hubert Sauper, vous ne l'avez pas oublié, c'est ce documentariste autrichien
auteur du fameux Le Cauchemar de
Darwin. Familier de l'Afrique Orientale,
Sauper, l'homme de tous les défis, s'est
fait fabriquer un avion miniature – entre
ULM et caisse à savon volante – pour
parcourir le Soudan inhospitalier à partir de 2011, en plein partage du pays. Se
posant ainsi dans un village et accueilli
par des hommes en armes qui semblent
assez mal disposés à son égard, il prétexte avoir atterri en urgence parce qu'il
MUCH LOVED
Écrit et réalisé par Nabil AYOUCH
Maroc 2015 1h45 VOSTF
avec Loubna Abidar, Asmaa Lazrak,
Halima Karaouane, Sara Elmhamdi
Elaloui, Abdellah Didane…
C'est un film audacieux qui balaie fièrement les obscurantismes, les préjugés
faciles et surtout les grandes hypocrisies, les uns se nourrissant des autres.
D'ailleurs ça n'a pas manqué : dans son
pays d'origine, le Maroc, Much loved a
fait l'effet d'une bombe. Censure préalable du film, qui ne sera probablement
montré que clandestinement, attaques
très violentes contre l'équipe allant
jusqu'aux menaces explicites de mort
contre le réalisateur et son actrice principale, la géniale Loubna Abidar… Alors
même que ses contradicteurs ne l'ont
généralement pas vu, le film déchaine
les réactions de haine. Et pourtant c'est
bien un formidable film d'amour. De quel
crime parle-t-on ? Celui de montrer sans
stigmatisation ni édulcoration le quotidien de quatre prostituées marocaines,
dans un pays où cette activité est offi-
ciellement interdite, mais pourtant omniprésente pour qui a fréquenté un jour
les lieux de nuit des grandes villes marocaines, tout spécialement celles qui
attirent touristes et hommes d’affaires
en goguette. Ces hommes, qu’ils soient
Marocains, Européens ou ressortissants
des Emirats, ces pays utlra rigoristes qui
exportent de nombreux millionnaires en
pleine frustration sexuelle et accros aux
relations tarifées.
On va suivre, à Marrakech, Nora, Randa,
Soukaina et plus tard Hlima. Les premières scènes sont pour le moins explicites. Les trois comparses se rendent,
accompagnées de leur toujours serviable
chauffeur Saïd, à une fête organisée par
des Saoudiens. L'alcool pourtant interdit coule à flots. Rapidement les danses
lascives s'enchaînent devant les émiratis
enivrés… et la suite ne fait aucun doute.
Les propos des filles entre elles sont
crus et ont dû choquer autant les notables cannois (Much loved était sélectionné à La Quinzaine des Réalisateurs
lors du dernier Festival) que nombre
de Marocains, pourtant conscients de
cette réalité : l'une demande à l'autre
si elle sait faire un 8 avec ses fesses,
puis rigole d'avoir « la chatte en sang »
après une nuit avec un client inépuisable et plus tard fait sa toilette intime au Coca pour chasser les règles…
Nabil Ayouch montre la crudité mais pas
que ça. Refusant les clichés misérabilistes aussi bien qu'angéliques, il décrit avec tendresse le paradoxe de ces
femmes qui donnent leurs corps pour
nourrir une famille qui pourtant les méprise, en totale hypocrisie ; il montre aussi la formidable solidarité de ces sœurs
de lupanar qui, malgré les engueulades
mémorables, se soutiennent envers et
contre tout et tous, font bloc dans les
moments difficiles. Des femmes qui
tentent d’aimer aussi, même si tout est
réuni pour leur prouver que c’est impossible…
Ce qui génère probablement l'agacement voire la haine de certains et certaines, c'est que Nabil Ayouch (un récidiviste qui avait déjà su gratter la
société marocaine là ou ça fait mal dans
Ali Zaoua et Les Chevaux de Dieu) fait de
ces prostituées parfois grossières et tonitruantes des héroïnes formidables de
générosité et de liberté, incarnées par
des actrices non professionnelles non
moins formidables qui insufflent à leur
personnage une authenticité implacable.
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
PETITES
CASSEROLES
Tarif unique : 4 euros pour tous
Programme de six films d'animation
réunis par Les Films du Préau
Suède / Irlande / France / Russie / Allemagne
2005-2014 41min
POUR LES ENFANTS À PARTIR DE 4 ANS
Ces six petits films sur l'enfance et ses questionnements
abordent avec humour, justesse et fantaisie les difficultés que
l'on peut rencontrer pour dépasser ses peurs, se faire accepter par les autres malgré nos différences, faire plaisir à ceux
qu'on aime, concrétiser ses rêves ou être tout simplement
soi-même.
Les Cadeaux d'Aston : Aston fait pleins de cadeaux à ses
parents : il est l'as de l'empaquetage ! Le jour de son anniversaire, c'est à son tour de déballer ses cadeaux mais une pluie
tenace l'empêche d'en profiter pleinement…
Peur de voler : Dougal est un petit oiseau craintif qui ne sait
pas voler. Il en cauchemarde ! Lorsqu'il tombe amoureux de
Lucie, il rêve de la suivre sous le soleil du sud tropical. Va-t-il
réussir et comment ?
La Petite casserole d'Anatole : des casseroles on en traîne
tous, mais Anatole en traîne une au sens propre et cela ne lui
rend pas la vie facile tous les jours. Grâce à la rencontre d'une
belle personne, il va apprendre à vivre au quotidien avec cette
différence qui finit même par être appréciée de ses proches.
La Promenade d'un distrait : Giovanni est un petit garçon
distrait qui part faire une promenade mais il est tellement
dans la lune qu'il oublie l'essentiel en route malgré les mises
en garde de sa maman. On ne vous dira pas tout ce qu'il perd,
mais en tout cas pas son sourire !
La Taupe au bord de la mer : dans la station balnéaire surpeuplée, la petie taupe ne se sent guère à son aise. Elle en
rêvait pourtant, d'aller à la mer ! Mais pas avec tout ce monde
entassé et énervé ! Une fois la nuit tombée et le calme retrouvé, la taupe décide d'aller se baigner…
Les Agneaux : une famille de moutons tente d'apprendre au
petit dernier à bêler correctement mais celui-ci s'entête à meugler comme une vache ! Rien à faire, il fait « meuh » ! Il va décider de cultiver sa différence, quoiqu'en disent ses parents…
TOURNEFEUILLE
PHANTOM BOY
Film d'animation d'Alain GAGNOL
et Jean-Loup FELICIOLI
France 2015 1h24
avec les voix d'Edouard Baer,
Audrey Tautou, Jean-Pierre Marielle,
Jacky Berroyer…
VISIBLE PAR TOUS
ENFANTS À PARTIR DE 7/8 ANS
Après le formidable Une vie de chat
(2010) le duo Alain Gagnol / Jean-Loup
Felicioli nous entraîne dans une intrigue
policière et fantastique tout aussi réjouissante, en plein cœur d'un New York
merveilleusement recréé. Avec un graphisme magnifique, le film nous entraîne
dans les aventures d'un super-héros pas
comme les autres, rendant un hommage
élégant et plein d'humour aux comics
américains qui ont enflammé bien des
enfances plus ou moins prolongées…
Léo, un garçon de douze ans atteint
d’une grave maladie, possède un pouvoir pas banal : il peut sortir de son
corps ! Comme un fantôme, invisible de
tous, il passe à travers les murs et vole
au dessus de Manhattan avec la légèreté d’un oiseau. Mais Léo ne doit pas se
servir trop longtemps de cette extraordinaire faculté, au risque de ne pouvoir
revenir dans son corps.
Un jour, un mystérieux gangster défiguré, surnommé « l’homme au visage
cassé », menace de parasiter New York
avec un virus informatique de son invention. Cet homme imposant, toujours vêtu d’un chapeau et d’un imperméable,
s’exprime avec grandiloquence et vouvoie tout le monde, y compris Rufus, le
petit chien hargneux et très bruyant qui
l’accompagne. La journaliste Mary est
sur le scoop, avec son esprit vif et malicieux. Elle est secrètement amoureuse
de l’intrépide inspecteur Alex. Lequel
Alex se retrouve un peu par hasard sur
la piste de l’homme au visage cassé.
Mais l'inspecteur est blessé en tentant
d’arrêter l’horrible malfaiteur, se retrouve
immobilisé à l’hôpital, où il fait la rencontre de Léo, ce garçon singulier doté de son étrange super pouvoir. Léo,
qui adore les histoires policières, ne va
pas laisser passer sa chance : l’occasion trop belle d’aider ce drôle de policier avec une jambe dans le plâtre. Alors
que l’homme au visage cassé plonge la
ville dans l’obscurité totale, Alex décide
de poursuivre son enquête depuis son
lit d'hôpital, efficacement secondé par
Mary et surtout par Phantom Boy (vous
devinez qui se cache derrière ce pseudo
qui fleure bon le super-héros)…
Phantom Boy va réconcilier tous les fans
d'aventures fantastiques déçus par les
méga-productions qui envahissent les
écrans, souvent simplettes et assommantes. Les auteurs reprennent à leur
compte l’esthétique des comics des
années 60, tout particulièrement l'univers de Stan Lee, le créateur de Spider
Man. Ils ancrent leur récit dans un NewYork graphique et imaginaire qui va réjouir tous les cinéphiles : les gratte-ciel,
les taxis jaunes, et même un superbe
clin d'œil au Manhattan de Woody Allen
quand Phantom Boy survole un couple
assis sur un banc au pied du pont de
Brooklyn…
Les voix des protagonistes sont aussi pour beaucoup dans la réussite de
Phantom Boy : Jean-Pierre Marielle est
le super vilain au visage cassé, Edouard
Baer est Alex, le policier casse cou à
l'humour charmeur et Audrey Tautou est
l’espiègle Mary.
Intelligent, drôle, rythmé, Phantom Boy
se montre aussi extrêmement sensible
quand il s'agit d'exalter sans pathos le
courage de ces petits super-héros du
quotidien qui se battent contre la maladie.
TOURNEFEUILLE
Tarif unique : 4 euros
SAMETKA, LA CHENILLE QUI DANSE
Programme de deux films d'animation
Russie et République tchèque 1965 et 1976 Durée totale : 40 mn
EN VERSION FRANÇAISE
POUR LES ENFANTS À PARTIR DE 3 ANS
Pour donner à vos enfants l'envie de venir découvrir ce petit programme animé, il suffit de leur dire que le second film, le plus
long, celui dont l'héroïne est la chenille Sametka, est l'œuvre du
réalisateur des fameuses, des sensationnelles aventures de la
Petite Taupe, le tchèque Zdenek Miler.
Il y a toutes les chances que ce rappel d'un de leurs personnages animés favoris fera piaffer d'impatience vos bambins qui
n'auront qu'une envie : filer dare-dare à Utopia.
Les deux films au programme :
LES VACANCES DU LION BONIFACE
Fiodor KHITRUK – Russie 1965 22 mn
Boniface, lion de cirque qui se sent fatigué et qui a une folle envie
de partir en vacances, décide de rendre visite à sa grand-mère
en Afrique. Armé de son filet à papillons et de son maillot de bain
rayé, il rêve de passer ses journées à flâner, à se baigner dans le
lac, à prendre le soleil…
Mais les enfants du village vont peut-être le faire changer d’avis !
SAMETKA, LA CHENILLE QUI DANSE
Zdenek MILER – République tchèque 1976 28 mn
Sametka est une chenille vraiment pas comme les autres : elle a
l'oreille musicale, le sens du rythme, et elle danse à ravir !
Alors quand elle est recueillie par un garçon qui est non seulement très gentil mais en plus joue de l'harmonica, c'est le bonheur ! Les deux vont faire la paire. Ils donnent des spectacles
et ils commencent à avoir du succès. Sametka découvre alors
ce qu'est le quotidien, pas toujours facile, des vedettes de la
scène…
LES ANIMAUX
FARFELUS
Programme de six films d’animation 42 mn
Pour les enfants à partir de 3 ans,
Tarif unique : 4 euros
LES FABLES
DE MONSIEUR
RENARD
Programme de 6 courts-métrages d’animation 40 mn
POUR LES ENFANTS À PARTIR DE 3 ANS,
Tarif unique : 4 euros
Chaque histoire explore l’univers des bois ou des villes, avec
comme fil conducteur six renards qui partent en quête de
nourriture, d’amis et d’aventures. Six fables cocasses et rigolotes empruntes de délicatesse. Un régal poétique et sonore
pour les tout-petits.
L’oiseau et l’écureuil
Lena von Döhren Suisse 5 mn
C’est l’automne. Oiseau et écureuil s’occupent de leurs provisions. Mais un renard les guette…
Chanson pour la pluie
Yawen Zheng Chine 8 mn
Alors qu’il pleut, un petit garçon rencontre un renard bien
mystérieux, il l’aide à récolter de l’eau de pluie…
Le renard et la mésange
Evan Derushie Canada 7 mn
Une mésange se fait prendre au piège par un renard. Mais avant
qu’il ne la mange, elle lui propose un marché : l’aider à trouver
à manger pour l’hiver plutôt que de lui servir de casse-croute.
Brume, cailloux et métaphysique
Lisa Matuszak France 5 mn
Au cœur d’une forêt, un renard médite, assis près de l’eau.
Sur la rive opposée, un canard s’amuse à faire des ricochets.
Le renard et la musique
Fatemeh Goudarzi Iran 10 mn
Les bois et ses habitants carillonnent, tintent, résonnent. Un
petit renard silencieux remonte jusqu’à la source de cette musique.
Les amis de la forêt
Sabrina Cotugno USA 4 mn
En chassant dans les sous-bois, Beopup, un renard, tombe
nez à nez avec des ombres inquiétantes.
TOULOUSE
Farfelus, drôles, colorés ou complètement azimuthés, les animaux de ce sympatoche programme d’animation ont tous en
commun une particularité : ils ne veulent rien faire comme
ceux de leur espèce, voire cherchent carrément à échapper
à leur condition. Et ça nous donne un programme de très
grande qualité où les histoires s'enchaînent avec poésie, fantaisie et humour tout en ayant chacune son style.
5 mètre 80 – Nicolas Deveaux – France 2012 5 mn
Un troupeau de girafes se lance dans un enchaînement de
plongeons acrobatiques de haut vol dans une piscine olympique déserte… Quoi ? Vous trouvez ça bizarre ?
Le Lapin et le cerf – Peter Vacz – Hongrie 2013 16 mn
L’amitié entre le lapin et le cerf est mise à rude épreuve à
cause de la nouvelle obsession de l'animal à bois : il veut sortir de sa feuille de papier et devenir un corps en volume pour
découvrir un nouveau monde… Et tout cela à cause de quoi ?
D’un rubik’s cub !
À la française – M. Boyer, J. Hazebroucq, Ren-Hsien Hsu,
E. Leuleu et W. Lorton – France 2012 7mn
C’est un après-midi ordinaire, à Versailles, au temps de Louis
XIV… Ordinaire ? Ben oui, nous sommes à la (basse) cour et
les courtisanes sont des poules !
Les Chats chantants – Miran Miosic – Croatie 2013 6 mn
La cité des chats compte dans ses rangs un chaton gai et sociable qui chante tout le temps. Mais son « miaou » musical
est un cauchemar pour son entourage… Comment diable le
lui dire sans lui faire de peine ?
L’Oiseau rare – Leslie Pandelakis – France 2013 5mn
Augustin est un homme qui se sent seul, tout seul, trop seul. Il
va retrouver le sourire grâce à un oiseau… qui rêve de liberté,
tout comme Augustin.
Oktapodi – J. Bocabeille, F.X. Chanioux, O. Delabarre, T.
Marchand, Q. Marmier et E. Mokhberi – France 2008 3 mn
Pour échapper à la plancha d’un commis cuisinier et rester ensemble, deux poulpes amoureux se lancent dans une
course poursuite burlesque dans les rues d’un village grec.
Accrochez vos tentacules !
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PROGRAMME
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Les séances sur fond gris sont à 4 euros.
(D)=dernière projection du film. L’heure indiquée
est celle du début du film, soyez à l’heure, on ne laisse
pas entrer les retardataires. www.cinemas-utopia.org
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BLADE RUNNER
Ridley SCOTT
USA 1982 1h57 VOSTF
avec Harrison Ford, Rutger Hauer,
Sean Young, Daryl Hannah, Joanna
Cassidy, Edward J. Olmos,
M. Emmet Walsh, William Sanderson,
Brion James, Jœ Turkel…
Scénario de Hampton Fancher
et David Peoples, d’après le roman
de Philip K. Dick, Les Androïdes
rêvent-ils de moutons électriques ?
VERSION DÉFINITIVE « FINAL CUT »
COPIE NUMÉRIQUE RESTAURÉE
Ceci est donc la version définitive de
Blade Runner, peaufinée en 2007 par
Ridley Scott, et présentée pour la première fois en copie numérique. Il faut
rappeler que le film avait été modifié au
dernier moment à l’époque de sa sortie,
en 1982, par crainte de trop bousculer
les petites habitudes des spectateurs
américains. Scott avait donc ajouté la
voix off de Harrison Ford qui explicitait
les méandres de l'intrigue, ainsi qu'un
dénouement qui imposait une improbable happy end.
Escamotée la voix off, balancé le happy
end, l’œuvre prend toute sa dimension,
visionnaire, prophétique, et profondément tragique.
À l'heure où on attend avec une inquiétude légitime un opus 2, les aficionados
qui ont vu le film dix huit fois dans ses
différentes versions le verront une dixneuvième, les nouveaux venus seront
subjugués pour le compte et viendront
grossir les rangs des adorateurs de
Blade Runner, joyau inégalé du cinéma
de science-fiction, merveille des merveilles qui délivre des plaisirs nouveaux
à chaque nouvelle vision…
Deux mots de l'histoire pour ceux qui
débarquent… L'action se passe en
2020. Los Angeles est devenue une gigantesque cité cosmopolite, tout entière
vouée au culte de la technologie, embrumée en permanence et noyée sous
des pluies diluviennes.
Pour accomplir les tâches subalternes, les humains ont inventé les
« Répliquants », des robots hyper-sophistiqués qui sont à l'image parfaite
de l'homme mais sont entièrement soumis à sa volonté… Aussi, lorsque quatre
Répliquants s'évadent pour vivre leur
vie, c'est tout le système qui tremble sur
ses bases. La police charge donc un flic
spécialisé, un « Blade runner », de retrouver coûte que coûte les fuyards.
Scénario classique, façon polar, mais
magnifiquement mené, qui ouvre, au fil
de son développement, des perspectives passionnantes : voir en particulier la scène finale, inoubliable. Mais ce
n’est pas la seule…
Blade Runner est d'une beauté visuelle
exceptionnelle, qui vous frappe dès les
premiers plans : la ville, véritable monstre
grouillant et fumant… Et puis il y a deux
acteurs magnifiques (entre autres), au
summum de leur charisme : Harrison
Ford et Rutger Hauer… Et puis… Et puis
c'est formidable et voilà tout !
TOULOUSE
2015
09 > 25 OCTOBRE
RCS TOULOUSE B 387 987 811
© Shutterstock
jazz31.haute-garonne.fr
ALFIO ORIGLIO 4TET • ANDREA MOTIS & JOAN CHAMORRO GROUP • BIG BAND 31 • BIG DADDY
WILSON • CHICK COREA & THE VIGIL • CLARACOR • CYRILLE AIMÉE 5TET • DEE ALEXANDER
4TET • DMITRY BAEVSKY TRIO • ELVIN BIRONIEN • FRANÇOIS THUILLIER ET ALAIN BRUEL •
FRANÇOISE GUERLAIN • GARCIA-FONS & DORANTES • GREG LAMAZÈRES • GRÉGORY PRIVAT &
SONNY TROUPÉ • INITIATIVE H • JAMES BRANDON LEWIS • JEAN-MARIE ECAY TRIO •
JEAN-PIERRE COMO "BOLÉRO" • JEAN-PIERRE COMO "EXPRESS EUROPA" • JOHN
ABERCROMBIE • KYLE EASTWOOD LAURA JURD 4TET • LES ROGER'S • MACEO PARKER •
NICOLAS FOLMER • NILOK 4TET • OFFGROUND TAG • OKIDOKI • OLIVIER BOGÉ 4TET • OLIVIER
KER OURIO TRIO • ORAN ETKIN • OTIS BROWN III • PULCINELLA • RÉMI PANOSSIAN TRIO •
RON CARTER • ROY HARGROVE 5TET • SAMY THIÉBAULT 4TET • SNARKY PUPPY • STANLEY
CLARKE BAND • STÉPHANIE PONS & TRIO SVP • SUGAR BONES • SULLIVAN FORTNER •
TANTE JACO • THIERRY OLLÉ TRIORG • TRIO SCHAERER - ROM - EBERLE • URI CAINE TRIO •
VÉRONIQUE HERMANN SAMBIN • YARON HERMAN DUO
JAZZ 31 2015 AP utopia 186x254.indd 1
25/06/15 11:08
UNE ENFANCE
Écrit et réalisé par Philippe CLAUDEL France 2015 1h40
avec Alexi Mathieu, Angelica Sarre, Pierre Deladonchamps,
Jules Gauzelin, Patrick D'Assumçao, Philippe Claudel…
LA VIE EN GRAND
Mathieu VADEPIED France 2015 1h33
avec Balamine Guirassy, Ali Bidanessy,
Guillaume Gouix, Joséphine de Meaux, Léontina Fall…
Scénario d'Olivier Demangel, Vincent Poymiro
et Mathieu Vadepied
Le héros de La Vie en grand a quatorze ans et s'appelle
Adama, il vit depuis toujours à Stains. Plutôt finaud, il n'en est
pas moins considéré comme un cancre : lui et l'école ne sont
pas en phase… Sa situation familiale n'est pas folichonne : sa
mère, obligée de se séparer de son père à cause de la loi sur
la polygamie, se débrouille comme elle peut. Mais les petites
tracasseries du quotidien – la machine à laver qui tombe en
panne, qu'on ne peut pas réparer, qu'on ne peut même pas
envisager de remplacer – empoisonnent la vie. Alors, quand
son copain Mamadou, onze ans, tombe par hasard sur un savon de shit tombé lors de la cavalcade d'un dealer, la perspective de l'argent facile semble vouloir illuminer le quotidien.
D'autant que les deux garçons, repérés par un grand frère qui
ne leur veut pas que du bien, vont se lancer un peu forcés
dans un trafic de plus en plus pharaonique en direction des
lycées des beaux quartiers voisins…
Bien loin des clichés réducteurs, moralisateurs et plombants
sur la banlieue, La Vie en grand ne tombe pas pour autant
dans l'angélisme mais désamorce les situations graves par
l'humour, comme dans cette scène très drôle où les deux
amis, qui tentent d'être insoupçonnables auprès de l'équipe
enseignante, découpent et pèsent les barrettes tout en apprenant les répliques de Marivaux afin de réciter parfaitement
leur leçon le lendemain. Car malgré les petites magouilles de
la cité, l'école est bien présente, à travers une CPE bienveillante qui impose à Adama un contrat de bonne conduite ou un
professeur d'EPS (formidable Guillaume Gouix) qui croit dur
comme fer en l'intelligence du môme. Et là encore contrairement aux clichés, c'est bien grâce à un dialogue avec l'école
que les deux comparses vont savoir trouver leur voie, par forcément dans les clous rigoureux de la légalité, mais en composant avec elle, et sans que le réalisateur ne porte un jugement.
TOURNEFEUILLE
Ce gosse-là, pas bien haut sur pattes, a déjà toute l'attitude
d'un petit mec : râblé, bien planté, ll semble porter sur ses
épaules toutes les désillusions d'un monde qu'il observe avec
un regard noir, rebelle, sans jamais esquisser un sourire. Entre
Pris (sans doute un diminutif de Priscilla ?), sa mère, éternelle immature, et Duke, son compagnon, qui ne l'est pas
plus (mature), c'est Jimmy qui fait figure d'homme de la famille malgré ses treize ans. C'est lui le garant des repères de
la maisonnée. Lui qui veille sur son petit frère Kevin, le lave,
l'envoie se coucher, l'oblige à respecter les horaires. Lui qui
fait le ménage indispensable, les courses, la popote et qui
galère le lendemain à l'école parce qu'il a oublié de faire des
choses pour lui-même, notamment ses devoirs.
Jimmy semble vivre une enfance peu digne de ce nom et
pourtant tout n'est pas sombre ! D'abord, Pris sait être lumineuse quand elle est en état, et c'est clair qu'elle aime son
fils à sa manière de grande môme larguée par la vie. Même si
la plupart du temps, c'est plus Jimmy qui veille sur elle que
l'inverse. Et puis il y a ce drôle de ouistiti enthousiaste qu'est
Kevin, qui voue à son grand frère une admiration inconditionnelle…Et il y a encore tous les autres adultes qui l'entourent
et qui posent sur lui un regard compréhensif doublé d'impuissance.
Pris, Duke, Kevin, Jimmy… des prénoms qui semblent tout
droits sortis des mauvaises séries américaines dont les
abreuve la télé entre deux scandales financiers à la sauce
Cahuzac. Pas étonnant qu'il y ait parfois de quoi se tromper
d'ennemi. Et on voit bien comment un gamin élevé dans ce
contexte peut devenir prêt à tout pour s'en sortir…
Il y a longtemps que je t'aime, Tous les soleils et maintenant
Une enfance… de bien jolis films de Philippe Claudel…
TOURNEFEUILLE
CRÉATION
D’APRÈS LE FILM DE
JEAN-LUC
GODARD
VARIATIONS
AGATHE
MÉLINAND
MISE EN SCÈNE
LAURENT
PELLY
6-24
OCTOBRE
2015
THÉÂTRE
NATIONAL
DE
TOULOUSE
MIDI
PYRÉNÉES
TNT-CITE.COM
05 34 45 05 05
CHU & BLOSSOM
Charles CHU & Gavin KELLY
USA 2015 1h38 VOSTF
avec Charles Chu, Ryan O’Nan, Caitlin
Stasey, Alan Cumming, Richard Kind…
Scénario de Charles Chu
et Ryan O'Nan
Il y a des petits films qui ne vont pas révolutionner l'histoire du cinéma mais qui
vont aisément transformer une journée
moyenne en une grande et belle journée
ensoleillée. Chu & Blossom est de ceux
là !
Ça commence avec le portrait de Joon
Chu, jeune coréen, qui expose, dans un
anglais sommaire, sa candidature pour
intégrer une école américaine. Vus de la
Corée du Sud, les États-Unis sont bien
attirants : les grands espaces, la liberté,
un idéal d'acceptation de toutes les différences et de toutes les cultures, des
établissements universitaires réputés et
reconnus… Joon Chu en a rêvé. Étape
après étape, le voici accepté dans une
fac prestigieuse : avec ce voyage, c'est
le rêve de toute sa famille qu'il va réaliser.
Comme vous vous en doutez, l'arrivée
sur le sol américain sera chargée de désillusions… Joon Chu débarque dans
une petite ville où la marginalité n'a
pas tellement sa place, on est loin de
la grosse pomme et de son légendaire
melting pot. Joon est logé chez une famille d'accueil au racisme primaire, pas
vraiment méchante, mais préférant s'en
tenir à des a priori approximatifs sur la
culture asiatique plutôt qu'apprendre à
connaître son hôte. À l'école c'est un
peu la même chose et Joon s'enferme
assez vite dans son rôle d'élève studieux et brillant, en marge de toute interaction sociale. Pourtant il est doué, et
pas uniquement dans les matières censées lui permettre de devenir un grand
ingénieur. Les activités artistiques et
notamment la photo l'attirent, mais ses
tentatives restent proprettes, figées,
assez conventionnelles… tout en renvoyant inexorablement à un rêve… toujours le même… un rêve d'enfant.
Butch Blossom de son côté n'a jamais
quitté son village natal. Il est l'original de
service au service de l'art. Le concept
artistique et la performance sont pour
lui un nouvel american way of life, il veut
bousculer les conventions et fait de son
travail créatif une nécessité absolue.
Face à Joon, sage et discret, cet énergumène passe pour un excentrique un peu
fou. Mais c'est justement la marginalité
qui va les rapprocher… Buch va entraîner Joon là où il n'a encore jamais osé
aller, et à travers cette relation d'amitié, c'est tout un monde qui va s'ouvrir
pour le jeune Coréen. Quitte à être hors
normes, autant choisir comment, autant
assumer sa différence et ses rêves !
Voici une histoire d'amitié dans laquelle
on se laisse embarquer toutes voiles
dehors ! Ces personnages réveillent
en nous les rêves d'enfant qu'on a un
peu laissés de côté mais qu'on aimerait avoir le courage de réaliser un jour.
L'ensemble déborde de tendresse et
d'optimisme, sans tomber dans le travers des comédies mièvres et sans saveur. C'est pleins de trouvailles, farfelu
et gentiment décalé.
TOULOUSE
SCUM
Alan CLARKE GB 1979 1h38 VOSTF
avec Ray Winstone, Mick Ford, Julian Firth,
John Bludell, Phil Daniels… Scénario de Roy Minton
LE TOUT NOUVEAU
TESTAMENT
Jaco VAN DORMAEL Belgique 2015 1h52
avec Benoît Pœlvoorde, Yolande Moreau, Catherine Deneuve,
François Damiens, Pili Groyne, Marco Lorenzini…
Scénario de Jaco van Dormael et Thomas Gunzig
Première nouvelle : Dieu a une femme ! Seconde nouvelle :
il a une fille ! On ne peut pas dire que jusqu'à présent il l'ait
crié sur les toits… Pas étonnant quand on le découvre enfin
en chair et en os, Dieu : il a tout l'air d'un phallocrate minable,
belge et méchant ! Benoît Pœlvorde dans toute la splendeur
du mari tyrannique de Yolande Moreau. Dans le genre couple
divin détonnant, on ne peut guère imaginer pire ! Elle, avec sa
tendre frimousse rêveuse, timidement effacée, lui diablement
irascible, avec sa bedaine aux tablettes de chocolats dissoutes dans la bière, ramollie par des heures avachies devant
la téloche et les matches de hockey sur glace… Si l'on peine
à croire qu'il ait eu la finesse de créer l'univers et tout ce qui
l'habite, on comprend mieux, puisqu'il a créé l'homme à son
image, pourquoi l'humanité rencontre quelques problèmes…
Faut le voir fulminer, tel un diable en cage d'immeuble,
dans son appart trois pièces en haut d'une tour paumée à
Bruxelles. Ses proches ne l'ont pas en odeur de sainteté. Pas
étonnant que Jésus (JC pour les intimes) se soit tiré et que sa
fille Éa, du haut de sa préadolescence, décide d'entrer en résistance et de venir à la rescousse des humains malmenés…
Ça va être un sacré capharnaüm ! La colère divine va se déchaîner…
Ce testament complètement déjanté revu à la sauce wallone
est particulièrement réjouissant, jusqu'à prendre des allures
de conte philosphique déluré dont la morale serait : croissez,
multipliez-vous, embrassez, aimez qui vous voulez… La vie
est courte et vous le rendra au centuple.
Quant à la prestation hallucinante de la grande Catherine
Deneuve qui semble interpréter une nouvelle version du
« Gare au gorille » de Brassens… No comment. Il fallait oser !
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
Sorti à la toute fin des années 70, dans le sillage des premiers
films de Ken Loach et largement imprégné lui aussi du climat social qui prévalait dans cette Angleterre accablée déjà
par les effets du néo libéralisme thatchérien, Scum apparut
alors comme un diamant noir d'autant plus important à montrer chez nous qu'il mettait en lumière un réalisateur quasiment inconnu en France.
Alan Clarke était en effet plus un téléaste qu'un cinéaste. Il
n'avait donc, à ce titre que fort peu de chance d'attirer l'attention des distributeurs du « vrai » cinéma et des critiques
français sur son travail. Sauf que Scum, produit par la BBC,
compagnie de service public réputée pour l'excellence de ses
productions et l'audace de ses choix, connut pour sa diffusion à l'antenne un problème de taille : une interdiction pure et
simple d'apparaître sur le petit écran de la chaîne, eu égard à
sa représentation peu aimable, et c'est un euphémisme, des «
borstals », les maisons de correction de sa gracieuse majesté.
Alan Clarke n'eut alors d'autre choix, pour contourner la censure frappant son film, que de se transformer pour la première
fois en cinéaste pour en tourner une nouvelle version, deux
ans plus tard, destinée cette fois-ci au cinéma.
Trois jeunes délinquants, Carlin, Davis et Angel, arrivent dans
un centre de détention pour mineurs. Carlin, campé par un
tout jeune et extraordinaire Ray Winstone, souhaite au départ
se fondre dans la masse et se faire oublier. Gagné progressivement par la brutalité qui imprègne les lieux, il va rendre
coups pour coups à ses jeunes co-détenus et aux surveillants, finissant même par prendre la tête, malgré lui, d'un véritable mouvement insurrectionnel…
Refusant la surenchère dans la représentation de la violence, Clarke capte néanmoins constamment notre attention
en signant des images qui restent gravées dans la mémoire.
Comme cette incroyable et libératrice explosion de colère qui
voit toutes les lourdes tables d'un réfectoire voler en l'air en
même temps. Censuré par la Dame de fer, Scum garde aujourd'hui encore toute sa force intacte.
TOULOUSE
LA DANSE DU DIABLE + LE BAC 68
PHILIPPE CAUBÈRE
13  18 OCT.
DIALOGUE D’UN CHIEN
AVEC SON MAÎTRE…
J.M. PIEMME/ S. BOURNAC
3  7 NOV.
Conception : Delphine Cordier + Boris Igelman
Licences : 1-1078576/ 1-1078577/ 2-1078603/ 3 -1078604
QUE FAIRE ? ( LE RETOUR )
BENOÎT LAMBERT
11  15 NOV.
LA BRIQUE
GUY ALLOUCHERIE
20 NOV.
05 81 917 919
www.sorano-julesjulien.toulouse.fr
Vendredi 23 octobre à 20h30 à Toulouse, en partenariat avec Polars sur Garonne (polarsurgaronne.fr) et pour fêter les 70 ans de la Série Noire (qui publia le roman de Steve Shagan dont est
tiré le film), la projection sera suivie d’une rencontre avec Éric Libiot, rédacteur en chef des pages
Cultures de L’Express, animée par Ida Mesplède (achetez vos places à partir du 10 octobre, le film est
ensuite programmé jusqu’au 3 novembre). Et à partir du 19 octobre, les salles de Toulouse s’habilleront
de l’exposition de portraits géants en Noir et Blanc d’auteurs de livres noirs, avec entre autres ceux de :
Caryl Férey, Marcus Malte, Benoît Séverac, Stéphane Bourgoin, Mouloud Akkouche, Marc Villard...
LA CITÉ DES DANGERS
(Hustle)
Robert ALDRICH
USA 1976 1h58 VOSTF
avec Burt Reynolds, Catherine
Deneuve, Paul Winfield,
Ben Johnson, Eileen Brennan,
Eddie Albert, Ernest Borgnine…
Scénario de Steve Shagan,
d'après son roman
Gloria Hollinger, âgée de vingt ans, est
retrouvée morte nue, sur une des plages
de Malibu. Sur les instances de son supérieur, Philip Gaines (Burt Reynolds),
le lieutenant chargé de l’enquête, est
prêt à conclure à la thèse du suicide.
Mais il poursuit officieusement ses recherches et essaie de contenir la colère
et le chagrin du père de la jeune morte,
un homme simple, vétéran de la guerre
de Corée en quête de vérité et de justice,
symbole d'une Amérique droite dans ses
bottes mais complètement déphasée…
Du stupre et de la violence mais surtout
beaucoup de mélancolie dans La Cité
des dangers où un flic de Los Angeles
désabusé et obsédé par l’Italie (Burt
Reynolds dans l’un de ses meilleurs
rôles) est amoureux d’une pute française
(Catherine Deneuve). Ce désir d’Europe
qui traverse le film – on y entend chanter Charles Aznavour, le couple va au
cinéma voir Un homme et une femme
de Lelouch – exprime le romantisme du
personnage principal, mais surtout sa
volonté de s’extraire d’un pays en pleine
déliquescence morale, ébranlé par le
scandale du Watergate, où le mouvement hippie a dégénéré en freak show…
Le film entrelace une intrigue sentimentale dans laquelle le flic souffre des rela-
tions tarifées de sa maîtresse, et une enquête policière sordide sur la mort d’une
jeune fille après une orgie de sexe et de
drogue, organisée par Leo Sellers, un
puissant avocat mafieux, criminel et pervers sous une façade de respectabilité
et de richesse, au-dessus des lois…
Cinéaste politique, Aldrich dresse un
constat extrêmement pessimiste sur
l’Amérique. Sur le plan formel, La Cité
des dangers est un film en rupture avec
toutes les conventions du polar urbain
qu’il semble épouser pour mieux les inverser, sous le signe de l’aléatoire… L’air
de rien, dans le giron de la production
commerciale de l’époque Aldrich signe
avec ce film malade l’un des chefsd’œuvre inconnus du cinéma américain
moderne. (O. Père, arte.tv)
TOULOUSE
saison
2015/2016
Midi-Pyrénées
Groupe de Recherche pour l’Éducation et la Prospective
•
Mercredi 13 Octobre 18h00
salle Duranti-Osète Entrée libre et gratuite
— Lectures croisées —
“Au cœur des ténèbres”
de Joseph Conrad
Roland EGENSBERGER et Nicole GAUTHEY,
animateurs du GREP
Jeudi 29 Octobre 20h00 - TBS (ESC)
“L’Anthropocène,
une histoire de la crise environnementale”
Jean-Baptiste FRESSOZ, historien des sciences
au CNRS, enseignant à l’EHESS, co-auteur
de L’événement anthropocène
Vous pouvez consulter
et télécharger
le programme de la saison
2015/2016
sur notre site
www.grep-mp.fr
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Vous pouvez également
adhérer en ligne.
Entrée : 6 €, réduit 2€, gratuit pour les adhérents
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Dans la Gazette
[email protected]
06 70 71 53 55
LIFE
Anton CORBJIN
USA 2015 1h52 VOSTF
avec Robert Pattinson, Dane
DeHaan, Ben Kingsley, Jœl Edgerton,
Allessandra Mastronardi…
Scénario de Luke Davies
Le film est inspiré de l'amitié bien réelle
qui s'est développée entre le photographe Dennis Stock et James Dean
lorsque Stock entreprend un reportage photographique sur le jeune acteur encore inconnu mais dans lequel il
pressent déjà la star. Stock est persuadé qu'il tient le sujet qui va faire de lui un
photographe de renom et que le fameux
magazine Life lui achètera ses photos.
Stock avait 26 ans et il était presque
vieux avant l'âge lorsque, dans son
monde très collet monté, est apparue
le phénomène nommé James Dean. Un
esprit libre dans un corps triomphant de
jeunesse, grâce à qui la culture populaire
allait abandonner les costumes pour les
jeans et passer de la mode des acteurs
confirmés, adulés par les ménagères, à
celle des étoiles filantes, coqueluches
pour adolescentes. Le reportage va les
entrainer tous les deux dans un voyage
photographique à travers les États-Unis,
de Los Angeles à New York puis dans
l'Indiana, changer radicalement la vie de
Stock et donner naissance à quelques
unes des images les plus emblématiques de l'époque.
Plus d'un demi-siècle après sa disparition dans un accident de voiture, avec
seulement trois films à son actif (À l'est
d'Eden, La Fureur de vivre, Géant),
James Dean continue de fasciner. Sa
vie et sa mort ont de quoi nourrir la légende. Il aurait été simple et sans doute
fastidieux de retracer la vie de l'acteur
en un biopic classique et exhaustif dont
les studios d'Hollywood sont friands. La
première bonne idée de Corbjin, c'est
d'aborder cette vie hors norme en racontant uniquement les deux semaines
précédent l'explosion du phénomène
James Dean. La seconde, c'est de nous
offrir aussi un portrait du photographe
Dennis Stock, dont tout le monde aujourd'hui, sans connaître son nom, a vu
les photos qu'il réalisa pendant cette
courte période et qui sont devenues de
véritables icônes de la culture populaire.
La rencontre de ces deux artistes tient
du pur hasard.
C'est lors d'une soirée donnée par le
réalisateur Nicolas Ray, dans laquelle
il traîne paresseusement son appareil photo, que Stock découvre Dean.
Commence alors une sorte de jeu
du chat et de la souris entre les deux
hommes. D'un côté Stock est persuadé qu'il tient avec ce jeune acteur un
sujet qui va changer sa vie. De l'autre
Dean fuit autant que faire se peut toute
forme de promotion, ne voulant abso-
lument pas précipiter sa surexposition
médiatique, se disant que celle-ci ne
tardera pas quoi qu'il arrive. En effet
l'incontournable Jack Warner – interprété par un truculent Ben Kingsley –, faiseur de stars autant que destructeur de
carrières selon son bon vouloir, presse
Dean pour qu'il se rende dans toutes
sortes de manifestations du genre élection de Miss Honolulu ou conférence de
presse pour magazines people. L'acteur
s'ingénie donc à disparaître de la circulation mais Stock ne le lâche pas et finira
par le convaincre que son approche est
avant tout artistique et pas du tout promotionnelle…
Qui de mieux pour raconter cette histoire entre un photographe et son sujet
qu'un cinéaste qui a lui-même commencé sa carrière en prenant des photos ?
Anton Corbjin est l'homme de la situation, lui qu'on a découvert grâce au formidable Control, dans lequel il évoquait
la vie météorique de Ian Curtis, le leader
de Joy Division, alors même qu'il avait
entamé sa carrière en photographiant
le groupe à ses débuts. La boucle est
bouclée… Life est ainsi une œuvre surprenante et singulière, subtile et raffinée,
presque timide et anti spectaculaire,
exactement à l'image des deux artistes
qui en sont les protagonistes.
TOURNEFEUILLE
Mémoires de jeunesse
James KENT
GB 2015 2h09 VOSTF
avec Alicia Vikander, Kit Harington,
Taron Egerton, Colin Morgan, Emily
Watson, Hayley Hatwell, Dominic West,
Miranda Richardson…
Scénario de Juliette Towhidi,
d'après les ouvrages et la
correspondance de Vera Brittain
C'est un film aussi beau et romanesque
que bouleversant, une fresque historique et intime qui nous plonge au
cœur de la tragédie que fut la première
guerre mondiale tout en brossant le portrait passionnant d'une femme passionnante : Vera Brittain.
Tout commence paradoxalement par
une scène de liesse. Nous sommes en
1918 dans les rues de Londres et tout
le monde fête l'armistice. Dans la foule,
une belle jeune femme garde un visage
grave, étrangère à l'allégresse générale. Son regard est celui d'une génération perdue, décimée, passée de l'innocence à la conscience de l'indicible.
Cette femme, c'est Vera Brittain, qui deviendra quelques années plus tard une
grande écrivaine et une militante antiguerre acharnée…
Puis le film nous ramène à l'été 1914,
dans le bucolique Derbyshire, au bord
d'un lac qui invite à la baignade. Vera est
une jeune fille de la bonne société qui vit
une existence heureuse et confortable
auprès de parents aimants, même si son
père fait preuve d'un autoritarisme et
d'un conformisme pesants : leur sujet de
conflit principal est la volonté irréductible
de Vera d'intégrer Oxford. À l'époque,
une telle ambition universitaire est hors
de propos pour une fille (les premiers diplômes ne seront délivrés aux femmes
que dans les années vingt). Mais soutenue par son frère cadet Edward, Vera
ne va rien céder et va réussir à rejoindre
les bancs de la prestigieuse université
britannique. C'est durant ce même été
1914 qu'elle trouve l'amour en la personne avenante de Roland Leighton, un
ami de son frère, féru de poésie, romantique exalté et moderne comme certains
jeunes hommes savent l'être en cette
période qui fait suite à plusieurs décennies victoriennes étouffantes.
L'arrivée de la guerre va évidemment
tout changer, tout bouleverser. Roland,
Edward et leur ami Victor (profondément
bien que discrètement amoureux de
Vera) partent gonflés d'élan patriotique
sur les terribles champs de bataille de
la Somme, eux qui sont passés par les
meilleurs et les plus nationalistes lycées
militaires. Et Vera, transie d'angoisse
pour les hommes de sa vie, va comprendre rapidement que pour l'heure,
sa place n'est plus entre les bois séculaires de l'université d'Oxford mais auprès des combattants, à la mesure de
ses moyens : elle s'engage donc en tant
qu'infirmière volontaire d'abord dans un
hôpital londonien puis à proximité du
front, dans le terrifiant hôpital de campagne d'Etaples.
La puissance évocatrice du film doit
sans doute beaucoup aux récits de Vera
Brittain dont il est directement inspiré. Mémoires de jeunesse montre cette
guerre d'hommes à travers les yeux
d'une femme qui y a participé et dont
la vie a définitivement basculé. Sans surenchère ni complaisance, le film n'édulcore à aucun moment l'horreur des combats telle qu'elle apparaît aux équipes
soignantes débordées : voir cette scène
magnifique – dont on imagine qu'elle a
contribué à forger le pacifisme viscéral
de la future écrivaine – où Vera recueille
les dernières paroles d'un officier allemand agonisant, qui dans son délire la
prend pour sa femme sans qu'elle le détrompe, le laissant partir avec un ultime
sourire…
Le film montre comment toute une génération enthousiaste et prometteuse a
été brisée, fauchée en pleine jeunesse
ou hantée à jamais par le souvenir de
l'horreur, avec la farouche détermination du plus jamais ça. Et la tragédie est
d'autant plus saisissante qu'on la voit
dans les yeux limpides, le visage lumineux de Vera, incarnée par la merveilleuse actrice suédoise Alicia Vikander…
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
MON ROI
MAÏWENN
France 2015 2h10
avec Vincent Cassel, Emmanuelle
Bercot, Louis Garrel, Isild Le Besco…
Scénario de Maïwenn
et Étienne Comar
Festival de Cannes 2015 :
Prix d'Interprétation féminine
pour Emmanuelle Bercot
l'humanité maladroite des protagonistes
nous bouscule. Entre rires et larmes,
calme et hystérie, agacement et apitoiement, le cinéma organique de Maïwenn
n'est décidément pas un havre de tout
repos, il garde toujours les sentiments et
les acteurs sur la brèche. On ressent une
véritable jubilation dans le jeu de Vincent
Cassel et d'Emmanuelle Bercot qui interprètent les deux rôles principaux.
C'est fou comme Maïwenn finit par
rendre attachante une histoire dont on
pourrait se foutre royalement ! Laissemoi devenir l'ombre de ton ombre mais
ne me quitte pas car ma vie sans toi
serait comme une pizza sans anchois !
Non mais, j'vous jure ! Cette injonction
à aimer les anchois et le couple comme
étant la panacée ! Bref dans Mon roi on
retrouve tout ce qui est « trop mignon »
sur le papier mais qui opère comme
un parfait tue l'amour répulsif dans la
vraie vie. Et pourtant ça fonctionne !
Étonnamment, passé le premier réflexe
de fuite, on se retrouve pris au piège
comme les personnages de cette histoire passionnelle tumultueuse. C'est
qu'il y a quelque chose d'extrêmement
honnête, une spontanéité rafraîchissante qui se permet une impudeur totale,
dérangeante et qui devient progressivement hypnotique. C'est presque comme
un thriller psychologique et même s'ils
font souvent plus que frôler le ridicule,
Tony est avocate, mais on s'en aperçoit
peu… Elle est tellement encombrée de
Georgio, de leurs dix ans de vie commune, que plus rien ne semble avoir de
consistance. Pas plus son métier que sa
vie familiale, amicale… Sans cet homme
à ses côtés, tout est un grand vide, elle
même semble en être un, insignifiante,
lamentable. Quand elle chute sur une
piste de ski, ce n'est pas seulement
dans la poudreuse qu'elle semble s'enfoncer, mais dans une déprime incommensurable.
Le centre de rééducation où elle atterrit
la coupe de son monde, devient comme
un cocon, un espace régressif où il
suffit de se laisser bercer… Accepter
tout, même l'analyse de comptoir que
lui balance une psy : « Ce n'est pas
rien, vous vous êtes pété le genou…
« Genou », dites-le lentement - « je » « nous »… La perte de son autonomie
physique l'infantilise, la voilà qui pleurniche comme une gamine à qui on au-
rait volé son poupon, puis qui virevolte
au milieu d'une bande d'ados futiles.
Tout pour fuir son manque, ses souvenirs. Mais ils s'imposent à elle et
l'obligent à passer en revue les dix dernières années de sa vie, de son couple.
Les moments de folle exaltation, les fulgurances, les ébats coquins. Elle rumine
les trahisons, ressasse les lâchetés d'un
Georgio lumineux et insaisissable. Leurs
blagues à deux balles, leurs sorties grivoises, leur insouciance, leurs émerveillements, leurs folies anti-conventionnelles… Ou le croyaient-ils. Puis vient
le temps de faire la part entre les moments d'aveuglement et ceux de lucidité froide où Tony prenait conscience des
côtés sombres de son homme : égoïste et manipulateur. Épisodes d'abattement, de faiblesse, où elle fait le compte
de ce qu'elle a accepté jusqu'à se sentir
détruite. Elle se revoit la morve au nez,
le suppliant, abandonnant tout amour
propre, lui se drapant dans une ironie
mordante, lui opposant un regard glacial, exigeant d'elle un peu de retenue,
de décence… Pire que ses taquineries
acérées : son indifférence, son manque
d'empathie affichée ! Ils sont risibles
et on ne s'en prive pas, Maïwenn non
plus… Mais au final ils nous émeuvent
autant qu'ils nous agacent… Cette plongée vertigineuse dans les jardins secrets de ces êtres ballotés par la houle
de leurs addictions devient troublante.
Pour Tony, on comprend vite qu'il n'y a
effectivement pas seulement une intégrité physique à reconstruire mais aussi
l'estime d'elle-même.
TOURNEFEUILLE
Jeudi 29 octobre à 20h30 à Toulouse
L'association l'APIAMP, qui fédère les producteurs audiovisuels
de Midi-Pyrénées, vous propose un regard sur leurs récentes
productions documentaires : projection unique suivie d'une
rencontre avec le producteur du film Pierre Mathiote
(Cinérgie Productions). Achetez vos places à partir du 17/10.
Ungersheim : un village
en transition
Après Sacrée croissance !, qui
a été réalisé grâce au soutien
de 3700 souscripteurs, MarieMonique Robin prépare un nouveau film, tourné en France. Vous
pouvez le soutenir en pré-achetant le DVD édité en tirage limité,
avec des bonus et un livret, voir :
m2rfilms.com
Alors que le climat déraille, que
les ressources s’épuisent et que
les inégalités s’envolent, une petite commune alsacienne montre
qu’un autre monde est possible
ici et maintenant : Ungersheim,
considérée comme « un modèle
de la transition écologique vers
l’après-pétrole » (Libération).
En 2009, le village (2000 habitants) a rejoint le mouvement
des « villes et villages en transition », lancé par le Britannique
Rob Hopkins. Grâce à un programme baptisé « 21 actions
pour le xxie siècle » mené par la
municipalité, les habitants ont
développé des actions qui visent
à atteindre l’autonomie alimentaire et énergétique du territoire,
à encourager la production et la
consommation de proximité, à
promouvoir des formes d’habitat durable, à créer des emplois
locaux pérennes, à préserver
la biodiversité, et à nourrir les
liens communautaires. Une histoire exemplaire qui montre que
la transition vers une société
plus durable et décarbonée est
l’affaire de tous et qu’elle est
le fruit d’une rencontre entre la
volonté d’individus de repenser leur mode de vie et celle des
autorités publiques de stimuler
les initiatives. Face à la morosité
et l’inquiétude dues aux crises
économique, sociale et environnementale, le film est une vraie
bouffée d’air frais. Soutenez le !
L'ARBRE
Hakob Melkonyan
France/Arménie 2015 1h10
Quand il était petit, le réalisateur Hakob
Melkonyan entendait des histoires terribles racontées par sa grand-mère. Un
siècle plus tard, il se rend en Anatolie pour
refaire le parcours de sa déportation depuis le village de Kharakoniz. Il interroge
des centenaires à la mémoire encore vive
et l'historien Raymond Kévorkian, pour
rendre avec le plus de précision possible
le déroulement des événements. Le récit reconstitué de son aïeule lu en voix
off accompagne des images hivernales
des lieux traversés durant ces « marches
de la mort », sur lesquelles apparaissent
parfois des archives en surimpression,
à la façon d'une projection de cinéma.
Hakob Melkonyan signe avec L'Arbre un
travail de mémoire éprouvant mais né-
cessaire, dont la rigueur formelle est à la
hauteur du sujet.
« L’Arbre est l’histoire de ma grand-mère
Azniv Martirossian. C’est elle qui m’a raconté le génocide de 1915 dont elle fût la
seule survivante des trente huit membres
de ma famille. Involontairement, cela est
devenu une partie de ma vie. J’étais si
profondément impressionné que j’ai le
sentiment d’avoir tout vu de mes propres
yeux. Ses récits sur les massacres des
enfants se sont imprimés dans ma
conscience. Je me souviens que lorsque
ma grand-mère me racontait son histoire,
elle devenait parfois silencieuse et son
visage restait distant, froid ; elle disait
qu’elle ne se souvenait plus de rien. Plus
tard, après sa mort, j’ai compris qu’elle
se souvenait de tout mais qu’elle ne voulait pas gâcher notre insouciance d’adolescents avec ses récits d’horreurs perpétrés par le gouvernement turc. Après
un siècle de séparation, je reviens en
Anatolie qui fût autrefois l’Arménie occidentale, pour refaire le parcours de sa
déportation. Cette histoire personnelle
appartient à l’histoire collective de tous
les arméniens. » Hakob Melkonyan
Chronic
Écrit et réalisé par Michel FRANCO
Mexique/USA 2015 1h33
VOSTF (en anglais)
avec Tim Roth, Sarah Sutherland,
Robin Bartlett, Rachel Pickup…
Festival de Cannes 2015,
Prix du scénario
Un sacrément beau film sur un sujet
sacrément pas facile, et un magnifique
hommage à une profession à la frontière
de la vie et de la mort, une profession
de l'ombre qui pénètre au cœur de l'intimité des êtres, qui affronte l'indicible.
Les premiers plans nous saisissent, qui
montrent une jeune femme au corps dénudé dont on devine qu'elle fut belle mais
dont la maigreur extrême trahit la maladie qui la ronge. Un homme s'occupe
d'elle avec précaution, avec douceur, il
la lave, l'habille, la soutient jusqu'à son
fauteuil. David est un infirmier à domicile qui prend soin des personnes en
fin de vie. Des personnes qui, il y a encore quelques mois, menaient une existence peut-être heureuse, peut-être trépidante, et qui maintenant ont besoin
de quelqu'un comme David pour les aider dans le moindre geste du quotidien.
Même ceux qui ont une famille ont besoin d'un David : le regard souvent gêné
et triste de leurs proches, leurs attitudes
empruntées, constituent une épreuve
supplémentaire. Seul un intervenant extérieur peut vraiment leur apporter l'assistance, la compréhension, le réconfort
indispensables… Les images de cette
femme squelettique, au corps crûment
exposé, pourrait être choquante mais
c'est tout le contraire : en quelques secondes c'est un immense respect, une
infinie tendresse qui s'imposent, tant
David apporte toute son humanité dans
sa pratique professionnelle, ses gestes
simples, naturels. Car au-delà des soins
essentiels qu'il prodigue, c'est bien de la
chaleur humaine qu'apporte David à ces
gens qui savent qu'il sera leur principal
compagnon de vie pour le peu de temps
qu'il leur reste.
Il y a d'ailleurs des moments de complicité, voire de gaieté, entre David et
ses patients. Comme avec cet homme
victime d'un AVC, habité d'une colère
sourde, qui peste contre sa sœur et ses
filles dont il déteste l'ostentatoire compassion. Cet homme encore vert peut
avec David redevenir celui qu'il était :
l'architecte coté qui peut partager sa
passion avec son infirmier – celui-ci
pousse l'intérêt jusqu'à acheter des
bouquins d'archi et aller visiter d'anciennes réalisations de son patient ; le
vieil érotomane qui regarde des vidéos
porno sur sa tablette en cachette de ses
filles…
On devine, au détour de séquences qui
lèvent par bribes le voile, que la vie passée de David et ses propres fêlures ne
sont pas étrangères à son extraordinaire
implication auprès de ses patients…
Le jeune cinéaste mexicain Michel
Franco (on se souvient de son Despues
de Lucia) a été inspiré par la fin de vie
de sa grand mère. Avec une sobriété et une intensité impressionnantes, il
décrit remarquablement le parcours de
David, sans jamais en dire trop, laissant quelques questions sans réponse
immédiate et c'est tant mieux, semant
ici et là quelques indices comme ces
énigmatiques consultations de pages
Facebook qui ponctuent le film. Fort de
sa construction et de sa progression
dramatique, Chronic n'a pas volé son
Prix du Scénario au Festival de Cannes.
Mais il est incontestable le film est largement porté par l'extraordinaire prestation de Tim Roth. Crédible de bout en
bout, il impose sa force discrète et taiseuse, lézardée de blessures enfouies,
il incarne formidablement cet altruisme
qui ne confine jamais à la pitié. Le comédien – pas né de la dernière pluie, il
reconnaît pourtant que ce rôle l'a profondément troublé – nous donne ici une
belle et grande leçon de vie.
TOURNEFEUILLE
ÉvÉnements de la rentrée au musée
L A S E MAINE DE L’ÉTUDIANT
Mardi 6 octobre, à partir 21h30
Le musée inaugure la Semaine de
l’Etudiant, par une soirée Clutchorama
mixant différents domaines culturels :
musique, performances, spectacle
vivant...)
:: Entrée libre, ouvert à tous
Jeudi 8 octobre, 18h30
Regards croisés sur une œuvre
récemment restaurée entre les
restauratrices C. Juillet, F. Meyerfield
et le conservateur
:: ouvert à tous, réservation 05 61 22 39 03 ou
http://semaineetudiant.univ-toulouse.fr
Mercredi 14 octobre
La première visite conversation pour
les étudiants sur le thème des Œuvres
d’art et la philosophie.
LE FESTIVAL TOULOUSE LES
ORGUES
Le musée reçoit le festival les
dimanche 11 (visite à 15h et concert
inauguration à 18h), lundi 12 à 12h30
(improvisation sur orgue et ipad) et
vendredi 16 octobre à 18h15 (l’atelier
de l’orgue).
Tout le programme sur
www.toulouse-les-orgues.org
:: réservé aux étudiants, réser : 05 61 22 39 03
ou http://semaineetudiant.univ-toulouse.fr
Les rendez-vous au musée / Réservation : 05 61 22 39 03
L’Œ UVRE DU MOIS
Jeudi 1 octobre à 12h30
Le Buste du chevalier d’Astier, de
Bernard Lange, dernière acquisition du
musée par C. Riou, conservatrice.
er
C ONF ÉRENCE PROPOSÉE PAR
LE S AMIS DU MUSÉE
Jeudi 1er octobre à 18h
L’image de François 1er dans la peinture,
mythe ou réalité ? par Cédric Michon,
professeur d’histoire . Attention,
conférence salle du Sénéchal 17, rue de
Rémusat / sans réservation, ouvert à tous.
COURS DE MODÈLE VIVANT
Vendredi 2 octobre à 19h
Le salon rouge par J. P. Escafre (Atelier
l’Imaginaire).
COURS DE DESSIN ANNUEL
Premier cours le samedi 3 octobre à
10h. Avec Jeannette Giannini.
Les rendez-vous tout public petits et grandS
Le 1er dimanche du mois
Gratuité pour tous et activités à
découvrir en famille ou entre amis.
• à 11h : Visite en famille
• de 14h à 17h30 : Atelier des familles
Les autres dimanches
Un rendez-vous à 16h destiné aux
familles voir agenda sur
www.augustins.org
Vacances d’automne
• mercredi 21 octobre,16h : Un clown
enquête au musée
• jeudi 22 octobre, 14h30 : Visite à
croquer
• dimanche 25 oct. 16h : Parcours conté
samedi 31 octobre, à 20h : Spécial
Halloween, La chasse aux fantômes !
avec Culture en Mouvements
Plus de renseignements sur www.augustins.org ou accueil du musée : 05 61 22 21 82
Abonnez-vous à notre e.lettre mensuelle sur augustins.org
21, RUE DE METZ
31000 TOULOUSE
TÉL 05 61 22 21 82
Métro Esquirol
www.augustins.org
VERS L’AUTRE RIVE
Kiyoshi KUROSAWA
Japon 2015 2h08 VOSTF
avec Eri Fukatsu, Tadanobu Asano,
Yû Aoi, Akira Emoto, Masao Komatsu…
Scénario de Kiyoshi Kurosawa
et Takashi Yujita, d'après le roman
de Kazumi Yumoto
« Pétri d’éléments puisés dans la spiritualité japonaise, ce film offre aux esprits
occidentaux une possibilité de penser
autrement la mort, tout comme la vie. »
Masa Sawada, producteur du film
Avec son nouveau film, il semblerait bien
que Kiyoshi Kurosawa soit parvenu à un
lumineux et splendide dépassement de
son art, à une sorte d’épure débarrassée de ce qui, de l’épouvante cinématographique nipponne, résistait encore
à sa singularité. Les fantômes philosophiques de l’auteur de Kairo ne font
plus peur. Ils témoignent, par un apparent paradoxe, de l’unicité et de l’étrangeté d’une réalité qui ne se laisse pas
réduire par les étroites conceptions des
humains.
Revenue de son travail, une jeune femme
retrouve, brusque apparition plantée au
milieu de son salon, son mari. Celui-ci
est mort il y a plusieurs années, disparu
en mer, et pourtant il est là. Ce spectre
que rien ne semble distinguer d’un être
bien vivant propose à son épouse d’entreprendre un voyage sur les lieux d’un
passé commun, une petite ville, un village d’enfance, autant d’endroits d’où
remontent divers souvenirs, peuplés de
personnages accueillant l’homme et la
femme comme s’ils revenaient d’une
longue absence.
Certaines des personnes qu’ils retrouvent sont, comprend-on progressivement, mortes aussi, revenants familiers d’une mémoire qui se revivifie au
cours de ce périple. Mais ce voyage est
l’occasion, pour les deux protagonistes,
de tenter de trouver une réponse à diverses questions laissées ouvertes par
la mort de l’homme et que le récit laissera d’ailleurs irrésolues.
La figure du fantôme est essentiellement
associée à l’obsession de la vengeance,
au remords et à la culpabilité. Si ces
deux sentiments ne sont pas absents
de cette odyssée de la remémoration, ils
sont très vite submergés par celui, plus
fort, du deuil impossible et de la résignation nécessaire. Bouleversante quête
d’un sens introuvable, Vers l’autre rive
souligne que la seule réconciliation possible n’existe que dans la conscience
de son impossibilité. Sans doute, pour
la première fois de façon directe et littérale, apparaît dans un cinéma marqué
depuis toujours par le questionnement
philosophique une de ses sources possibles, le shintoïsme.
Et sans doute le film devait-il déboucher sur une séquence particulièrement
étrangère à l’inquiétude clinique qui caractérise la filmographie de Kurosawa,
une scène au cours de laquelle l’homme
et la femme s’unissent enfin, et à nouveau, charnellement. Le sexe est ici
exalté comme ce qui demeure la seule
réalité possible et vitale de l’amour.
(J.F. Rauger, Le Monde)
Ce n’est pas une découverte mais
Kiyoshi Kurosawa est un grand metteur en scène, créant le trouble par de
simples raccords, par la disposition des
présences dans des espaces géométriques et souvent symétriques, une extrême attention aux corps et des visages
– quelques gros plans très marquants
où les personnages ont les yeux plantés dans ceux du spectateur : on pense
évidemment à Ozu. On retient aussi des
compositions du décor et un travail sur
la lumière admirables. Il fait naître ici de
superbes suspenses émotionnels par le
(simple) dévoilement de nouvelles parcelles d’espace par des recadrages
dans le plan en usant de travellings ou
zooms arrière délicats.
(A. Hée, critikat.com)
TOULOUSE
DHEEPAN
Jacques AUDIARD
France 2015 1h55 VO (en tamoul) STF
avec Antonythasan Jesuthasan, Kalieaswari Srinivasan,
Claudine Vinasithamby, Vincent Rottiers, Marc Zinga…
Scénario de Jacques Audiard, Noé Debré
et Thomas Bidegain, très librement inspiré
des Lettres persanes de Montesquieu
Palme d'Or – Festival de Cannes 2015
MEDITERRANEA
Écrit et réalisé par Jonas CARPIGNANO
Italie 2015 1h47 VOSTF
avec Koudous Seihon, Alassane Sy, Pio Amato,
Annalisa Pagano, Paolo Sciaretta…
Chaque jour des migrants tentent de traverser la Méditerranée
pour gagner l'Italie. Chaque jour beaucoup en meurent. Le
risque est connu de tous, et si tant d'hommes, de femmes et
d'enfants tentent leur « chance », c'est qu'il leur est impossible de rester dans leur pays.
Ce n'est pas aux raisons du départ que Jonas Carpignano a
décidé de s'intéresser. Il ne choisit pas non plus de nous faire
vivre une de ces traversées apocalyptiques. Il se concentre
sur ce qui arrive à ceux qui sont passés, le voyage étant rapidement évoqué, en quelques scènes courtes et efficaces.
Partis du Burkina Faso, Ayiva et son cousin Abas retrouvent
en Calabre des membres de leur village et vont bénéficier
de leur aide : pour trouver un logement, un travail, pour apprendre les codes de la vie du clandestin. Mais tout est compliqué quand on n'a pas les papiers qui attestent du droit à
vivre sur tel ou tel bout de terre. Dans un premier temps, chacun fait avec ce qu'il a, et le logement n'est qu'une tente dressée sur un terrain vague au sein d'un campement illicite. Les
petits boulots qu'on peut décrocher sont durs, la cueillette de
fruits n'est pas réputée comme étant une bonne planque. Et
si le patron est plutôt cool, s'il prend Ayiva en sympathie, cela
n'en reste pas moins de l'esclavage moderne. Et puis l'argent
gagné a vocation à aider la famille demeurée au pays. Reste
donc le strict minimum, rien de plus…
La force du film tient à l'intelligence, à la précision du scénario et à la mise en scène attentive, tout en retenue, de Jonas
Carpignano. Et à la qualité de l'interprétation des deux acteurs principaux, en particulier Koudous Seihon. Mediterranea
brosse un tableau sans aucun doute parfaitement réaliste de
la vie de ces migrants africains. Réaliste mais jamais misérabiliste, jamais enjolivé non plus. Mais ce qui nous marquera
pour longtemps, c'est le portrait d'Ayiva, grand et beau personnage de cinéma.
TOURNEFEUILLE
Dheepan, c'est le prénom du héros. Qui donne son titre à ce
film qui claque comme une arme à double détente. Première
salve : un cinéma social, presque organique. Deuxième
salve : basculement complet dans le cinéma de genre, un « vigilante », où Dheepan se transformera en justicier des temps
modernes.
Mais nous n'en sommes pas là. Nous sommes, tout d'abord,
dans un camp de réfugiés qui veulent fuir le Sri Lanka et sa
guerre civile. Là, dans un bureau improvisé, on peut se procurer des passeports illicites et s'ils mentionnent une famille
on s'en compose une fictive sur le champ. C'est ainsi que
deux inconnus deviennent officiellement mari et femme, lui
endossant l'identité d'un certain Dheepan, elle d'une certaine
Yalini. La première orpheline venue sera l'enfant qui complète
le tableau de famille. Trois êtres solitaires aux devenirs désormais étroitement liés : voilà un équipage de fortune constitué par pur intérêt, une triple alliance frustrante où chacun
s'efforce de jouer le jeu, faisant taire ses états d'âmes, ses
peurs, ses colères. Celles de Dheepan sont féroces, façonnées par des années d'engagement en tant que tigre de la
libération. L'ancien militaire n'a que mépris envers sa nouvelle compagne tamoule, restée en retrait au lieu de s'engager dans la lutte armée et qui rêve benoîtement d'Angleterre,
comme si ce pays était la panacée. Quant à la gamine, rebaptisée Ilayaal, elle semble être la seule à oser réclamer un peu
detendresse… Puis c'est l'arrivée à Paris…
L'essentiel du film réside dans la complexité des personnages, dans leur rapport à autrui, leur évolution comme autant de petites révolutions intérieures. Chaque acteur joue
tout en retenue, c'est criant de vérité. On peine à imaginer
que pour la plupart c'est une première apparition à l'écran. Il y
a d'ailleurs une résonance autobiographique pour Jesuthasan
Antonythasan qui interprète Dheepan et dont le parcours
d'enfant soldat a servi de matière à ses romans.
TOURNEFEUILLE
THE LOOK OF SILENCE
Film documentaire de
Joshua OPPENHEIMER
Danemark/Indonésie 2014 1h43 VOSTF
Festival de Venise 2014 :
Grand Prix du jury
Festival d'Angers 2015 : Prix du Public
Festival de Berlin 2015 : Prix de la paix
« The Look of silence est profond,
visionnaire, stupéfiant. » Werner Herzog
On a en mémoire plusieurs très grands
films qui rendent justice à la petite et la
grande Histoire. On pense évidemment
à Claude Lanzmann qui, il y a trente ans,
avait trouvé la forme juste pour évoquer la Shoah, on pense à Rithy Panh
qui a consacré la plus grande partie de
son œuvre documentaire à autopsier les
massacres de masse commis par les
Khmers Rouges. Mais un génocide restait sans images ou presque, inconnu du
plus grand nombre : celui, en 1965, des
communistes indonésiens ou des citoyens considérés comme tels (dans la
vision des tortionnaires, la famille et les
proches des dits communistes étaient
tout aussi coupables et méritaient eux
aussi d'être massacrés). Ce sont pourtant, selon les experts, entre 500 000
et un million de personnes qui disparurent en quelques mois, jetées dans les
fleuves, enterrées vivantes, sommairement mais massivement exécutées par
les milices anticommunistes téléguidées
par le nouveau régime en place.
La spécificité de ce génocide est que
ses responsables n'ont jamais été punis. Pire encore, certains d'entre eux
sont encore aux manettes du pouvoir
cinquante ans plus tard. Jamais repentance n'a été faite et on enseigne encore
aujourd'hui aux jeunes écoliers combien
ces massacres ont été nécessaires face
à des communistes que l'histoire officielle présente comme les vrais tortionnaires en puissance, qu'il fallait absolument éradiquer.
Cette histoire a passionné le jeune documentariste danois Joshua Oppenheimer,
qui a déjà réalisé en 2012 un premier film
sur le sujet, The Act of killing, qui donnait la parole aux bourreaux : témoignant
d'une désinvolture glaçante et d'une absence totale de remords, ceux-ci racontaient tous leurs crimes. Le résultat était
terrible, au point d'en devenir quasiment
irregardable.
The Look of silence prend un point de
vue différent et beaucoup plus ouvert,
plus empathique, puisqu'il suit Adi, un
jeune opticien rural ambulant qui profite
de ses tournées pour interroger le passé obscur de sa famille. Adi est né peu
après l'exécution de son frère aîné. Et
avec un courage, une abnégation et une
sérénité impressionnante, il va aller à la
recherche puis à la rencontre des meurtriers de son frère et de leurs complices,
y compris au cœur de sa propre famille.
Une quête qu'il conduit sans jamais se
dissimuler, gardant toujours un calme
apparent face à des monstres septuagénaires qui racontent leur crime avec
bonhomie. Mais peu à peu Adi parvient
à déstabiliser ses interlocuteurs, en particulier un préfet régional très mal à l'aise
avec ses questions calmes et incisives.
Et avec une simplicité lumineuse, le film
parvient à remettre en cause la chape de
plomb qui pèse sur le pays depuis cinquante ans. Adi et Joshua Oppenheimer
ont fait en sorte que The Look of silence
soit désormais largement diffusé en
Indonésie, contribuant ainsi à bousculer par le cinéma – et quel cinéma ! – le
cours de l'histoire.
TOULOUSE
LAMB
Écrit et réalisé par Yared ZELEKE
Ethiopie/France 2015 1h34 VOSTF
avec Rediat Amare, Kidist Siyum,
Welela Assefa, Surafel Teka, Rahel
Teshome, Indris Mohamed…
Très beau film visible par tous,
à partir de 10/12 ans
L’enfant enfouit sa main dans la fourrure,
l’animal est tout contre lui, chaud, rassurant, il sent son cœur qui bat la chamade
à chacun de leurs pas qui vont en cadence, inséparables. Ephraïm et Chuni,
le garçon et sa brebis. C’est une amitié comme seule l’enfance sait les faire
naître, une amitié à la vie à la mort à laquelle les adultes ne peuvent rien comprendre… Ici sans doute encore moins
qu’ailleurs, sur ces terres magnifiques et
sauvages d’Ethiopie où l’homme doit arracher au sol sa pitance, dans la peine et
la souffrance. Un animal est avant tout
une richesse, une viande qui nourrit, pas
un compagnon de route, ni un confident,
ni un complice. Mais Ephraïm a su imposer à son entourage la douce et tendre
relation qui l’unit à sa brebis et le gamin,
par son ingéniosité, sa malice et son
obstination peut cheminer sans crainte
avec Chuni à ses côtés. Il faut dire que
Chuni était la brebis de sa mère et sa
mère vient de mourir… Avancer dans la
vie avec Chuni, c’est un peu comme tenir encore un peu la main de celle qui le
rassurait, le consolait, le berçait.
Mais les temps sont durs. La pluie n’est
pas venue, le sol est sec, la famine
guette. Il faut partir, quitter le village
pour chercher du travail ailleurs, là où
les cieux seront peut-être plus cléments.
Ephraïm et son père partent, n’emportant rien car ils n’ont rien, rien excepté
Chuni, la fidèle brebis.
Confié à des parents éloignés, Ephraïm
va devoir s’adapter à sa nouvelle vie,
une vie qui ne lui plaît pas : pas assez
de place pour rêver, plus de longues
promenades, plus assez de temps collé contre sa brebis. C’est un garçon, on
veut faire de lui un homme : il va devoir
travailler et le travail d’un homme, c’est
la terre… Ephraïm, lui, préfère la compagnie des femmes et il est bien plus doué
pour confectionner de délicieux beignets que pour manier la charrue.
Drôle de gamin, qui n’est nulle part à sa
place mais qui garde, en dépit des vents
contraires, suffisamment de force et de
volonté pour surmonter sa solitude, son
chagrin et ses déboires. Car il n’est pas
au bout de ses peines : bientôt, c’est
jour de fête et la tradition veut que l’on
sacrifie une bête…
Portrait initiatique tendre et doux d’un
gamin aux grands yeux tristes confronté à la rudesse du monde des adultes,
Lamb est une superbe histoire d’amitié. Mais c’est aussi la rencontre avec un
pays dont on n’imaginait même pas qu’il
pouvait être aussi beau… Il faut rendre
hommage à la persévérance de Yared
Zeleke, dont c’est le premier film – largement autobiographique – qui a su mener à bien son projet et nous offrir cette
histoire si belle et parfois triste où il est
aussi question de la place des femmes
dans une société largement patriarcale
qui veut que les filles soient très vite mariées pour devenir à leur tour épouses,
puis mères et cuisinières… Pourtant, il y
a un véritable espoir, incarné par le personnage de la cousine d’Ephraïm, gamine aux cheveux rebelles qui refuse
d’être belle pour son prétendant désigné
et qui préfère aux tâches ménagères la
lecture des journaux. Les yeux pleins
de rêves et d’envie d’ailleurs, elle et
Ephraïm symbolisent peut-être le changement d’une société où il est possible,
aussi, de rêver en cinémascope.
TOURNEFEUILLE
ASPHALTE
Samuel BENCHETRIT
France 2015 1h40
avec Isabelle Huppert, Gustave
Kervern, Valeria Bruni Tedeschi,
Tassadit Mandi, Jules Benchetrit,
Michael Pitt… Scénario de Samuel
Benchetrit et Gabor Rassov, adapté de Chroniques de l'asphalte de
Samuel Benchetrit
À coups de gags hilarants, de situations
cocasses, de dialogues ciselés, Samuel
Benchetrit réussit le tour de force de
nous parler de sa banlieue sans la caricaturer et en bousculant les clichés. Son
Asphalte est une merveille de comédie
loufoque, intelligente et humaine, qui
fuse en tous sens.
Qui dit immeuble dit ? Copropriété ! Qui
dit copropriété dit ? Réunion des copropriétaires ! Le début des emmerdements donc ! Quoi de plus laborieux que
d’essayer d’obtenir l’unanimité dans un
tel groupe ? Eh bien là, pour une fois,
c’est idyllique : tous sont d’accord pour
se cotiser afin d’avoir enfin un ascenseur qui fonctionne. Tous ? Lorsque
qu’on s’apprête à voter pour entériner la
décision, un doigt désabusé se lève, le
doigt d’un gros ours bourru apathique…
« Oui ? Monsieur Sternkowitz ? » interroge le meneur de la réunion, découragé par avance… « Moi je suis pas
d’accord » laisse tomber le gonze partisan de l'escalier pour tous, qui n'est
autre que Gustave Kervern au sommet
de son art de bougonneur magistral.
Consternation, agacement, argumentation : conciliabule entre les autres usagers. Sentence : Sternkowitch est dispensé de mettre la main à la poche mais
il lui est formellement interdit d’utiliser le
dit monte-charge. Bien sûr, le destin va
lui jouer un fameux tour, un retour de pédale pour son manque de solidarité ! Et
l’entêtement de ce locataire du premier
va prendre des proportions telles qu’on
ne pourra que rire de ses malheurs en
se disant que, décidément, certains on
l’art de scier la branche sur laquelle ils
sont assis.
Aux autres étages aussi il s’en passe,
des choses ! De véritables tragi-comédies inattendues dans lesquelles
l'absurde tutoie le poétique. Au troisième, c'est une grande actrice qui vient
s'échouer, tel un cétacé en perdition,
un peu désorientée d'être tombée de
son piédestal (Isabelle Huppert, qui excelle décidément dans les rôles drôles).
Un brin pimbêche mais d'une telle fragilité attachante que Charly, son voisin
de palier, un ado joli comme un cœur,
va venir à sa rescousse… C'est une rencontre gourmande entre ces deux êtres
délaissés, où chacun met la barre haut,
ne fait aucun cadeau à l'autre et l'oblige
à se redresser. Mention spéciale à Jules
Benchetrit, le fils du réalisateur, qui interprète Charly et fait une première apparition brillante au cinéma !
Chaque étage recèle ainsi sont lot d'humanité bariolée. Et même sur le toit, il
y a de la vie ! Surtout quand un cos-
monaute tombé du ciel atterrit sous le
nez de junkies tellement stone qu'ils ne
cillent même pas en apercevant capsule spatiale et parachute. Notre pauvre
Yankee, paumé, à la recherche d'une
âme secourable, sonne à la porte de
Madame Hamida, un vrai bonheur de
femme généreuse qui a le cœur sur la
main, la langue bien pendue et du couscous à revendre. Trop heureuse de cette
compagnie inespérée, la voilà qui se
colle à ses tajines et essaie de lui faire
avaler tous les plats qu’elle ne peut plus
cuisiner pour son fils (de retour à la case
prison). Notre agent de la NASA, qui
ne pige mot, est d’abord méfiant : tout
adorable qu’elle soit, cette dame est incontestablement arabe et donc possiblement « terroriste » ! Ce que redoute
également son QG… Mais une sombre
histoire de rivalité entre nations (pour la
conquête des étoiles) fait que ses compatriotes sont prêts à laisser leur camarade en pâture à l'inconnue…
Plus loin, une infirmière au regard et à
la voix extrêmement suaves (forcément :
c'est Valéria Bruni Tedeschi) trompe l'ennui en faisant des ronds de fumée dans
la solitude de la nuit… Jusqu'à l'arrivée
d'un prince bedonnant chevauchant un
étrange destrier, prince du bitume qui
n'est autre que Sieur Sternkowitch, toujours en guerre contre son ascenseur, à
moins que ce ne soit l'inverse !
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
THE LOBSTER
Yorgos LANTHIMOS
GB/Grèce 2015 1h58 VOSTF (anglais)
avec Colin Farrel, Rachel Weisz, Jessica
Barden, Olivia Colman, Ashley Jensen,
Ariane Labed, Angeliki Papoulia, John
C. Reilly, Léa Seydoux…
Festival de Cannes 2015, Prix du Jury
Fifigrot 2015, Amphore du Peuple
(traduisez Prix du public)
Dans un cinéma mondial qu'on peut raisonnablement trouver trop sage, de plus
en plus timoré dans la forme, de moins
en moins radical dans le fond, ce film
follement imaginatif et visionnaire du
jeune cinéaste grec Yorgos Lanthimos
nous fouette les sangs de son souffle
aussi décoiffant que vivifiant.
The Lobster est une formidable et hilarante fable dystopique (la dystopie est
en gros le contraire de l'utopie, et décrit
une société qui va à l'encontre du bonheur des hommes) qui impose son univers unique dès la première séquence :
dans un paysage de landes dénudées
(on saura plus tard qu'on est en Irlande),
une femme s'arrête au bord de la route
à côté d'un âne qu'elle abat froidement.
On comprendra pourquoi, mais pas tout
de suite… Puis on se retrouve dans un
endroit étrange, « l'Hôtel ». Dans la société flippante de The Lobster, il n'est
pas toléré de vivre seul. Alors on tente
de redonner une chance aux contrevenants à « l'Hôtel » : les célibataires et les
veufs y séjournent et ont 45 jours pour
y trouver l'âme sœur. Diverses activités leur sont proposées pour les aider à
conclure : thés dansants, séjours en duo
sur une île de l'amour, jeux stupides…
mais aussi chasses à l'homme sur lesquelles nous reviendrons… Pendant
leur séjour, tout plaisir solitaire est rigoureusement interdit, sous peine de
se voir passer les doigts au grille-pain
! Et le malheureux ou la malheureuse
qui, au terme fatidique des 45 jours,
n'a pas réussi à former un couple sera
transformé… en l'animal de son choix.
« L'Hôtel » tient donc à la fois du séminaire de cadres sinistre et du reality
show débilitant…
David fait partie des nouveaux pensionnaires, après que sa femme l'ait quitté.
Il est venu avec son frère, transformé
en chien après un séjour non concluant.
David a quant à lui choisi d'être transformé, en cas d'échec, en homard (le
« lobster » du titre). Pourquoi ce choix ?
Parce que le homard vit longtemps,
parce qu'il vit dans l'eau, parce que ses
capacités de reproduction sont remarquables…
On a découvert Yorgos Lanthimos avec
le décapant Canine, qui mettait en scène
une famille bourgeoise séquestrant ses
enfants pour les préserver des dangers
du monde extérieur. Il atteint une autre
dimension dans The Lobster en imaginant une société normative jusqu'à
l'absurde, qui oblige ses membres à
l'amour, même le plus factice. Chacun,
terrifié par la menace de transformation,
est prêt à tout pour former un couple :
un jeune homme se fracasse le nez pour
séduire une jeune fille atteinte de saignements réguliers, David tente de dissimuler qu'il est un homme bon pour séduire
la femme sans cœur avant de rencontrer la femme myope… Face à cette tyrannie du couple, il y a des résistants,
les « Solitaires », qui vivent dans la forêt
et tentent d'échapper aux battues organisées par « l'Hôtel ». Mais Lanthimos
n'épargne pas non plus les Solitaires
qui s'avèrent tout aussi dogmatiques
puisqu'ils interdisent toute relation sentimentale ou sexuelle, prévoyant même
des sévices physiques, comme la couture des lèvres pour toute déclaration
d'amour coupable.
Le récit est jubilatoire, nourri de comique
absurde, enchaînant les situations
ubuesques, les trouvailles burlesques.
Yorgos Lanthimos a entraîné dans
l'aventure une brochette de comédiens
célèbres qui jouent à merveille le jeu du
contre-emploi : Colin Farrell, désopilant,
moustache de comptable et petite bedaine, tout en maladresse et timidité ;
John C. Reilly, parfait en mauvais camarade ; Rachel Weisz, absolument craquante en femme myope amoureuse ;
sans oublier Léa Seydoux en paramilitaire impitoyable, chef sans partage des
« Solitaires ».
TOULOUSE
ELSER, UN HÉROS ORDINAIRE
Route de Grenade à Seilh (31)
dim. 8 novembre 2015 - 16h30
Aline Zylberajch & Martin Gester
Fantaisies concertantes
pour orgue et clavecin
Vivaldi, Mozart, J.S. Bach, C.P.E. Bach...
dim. 14 février 2016 - 16h30
Muza Rubackyté, piano
Double jeu
Schumann, Prokofiev, Čiurlionis
dim. 10 avril 2016 - 16h30
Magali Léger, soprano / Laure Urgin,
conteuse / Frédéric Denépoux, guitare
Dans les jardins d’Espagne
hasard et surtout par amitié dans le Röter
Kampferbund (l'unité combattante du
parti communiste), ce garçon bien plus
intéressé par le jazz et les filles – qui le lui
rendent bien – que par la politique et le
militantisme, a failli changer le cours de
l'histoire, un certain 8 Novembre 1939.
Seul, sans aucun appui, sans aucune
« formation » aux techniques de l'action
secrète ou de commando, et au bout
de plusieurs mois de préparation minutieuse, l'homme discret va fabriquer une
bombe, à partir de mécanismes d'horlogerie et d'explosifs volés dans la carrière
la plus proche, et la placer, après des
nuits de planque assidue, dans un des
piliers de la Bürgerbraükeller, la brasserie munichoise où Hitler a prévu de prononcer un discours pour commémorer
son coup d'état raté de 1923. On connait
malheureusement la suite : Hitler, préoccupé par les préparatifs de la guerre,
écourte son discours et part plus tôt que
prévu vers Berlin avec sa garde rapprochée, si bien que l'attentat ne va tuer
que quelques seconds couteaux. C'est
le premier d'une longue série d'attentats
ratés contre Hitler (pas moins de 7, on
se dit qu'il n'y a vraiment pas de justice
divine) et surtout le seul accompli par un
civil, tous les autres le seront par des militaires du régime.
Le cœur du film tourne autour du fascinant triangle que forme Elser, rapidement arrêté alors qu'il essayait de passer en Suisse, et ses interrogateurs et
bourreaux, Heinrich Müller, chef de la
Gestapo, et Arthur Nebe, chef de la police judiciaire. Les deux nazis ne peuvent
pas croire que le jeune homme a agi
seul et ils veulent lui faire avouer le nom
de ses complices ou commanditaires.
Agents étrangers ? Cellule communiste ?
Mais malgré leurs efforts zélés, qui vont
évidemment jusqu'au recours à la torture, il faut se rendre à l'évidence, même
si le Fürher la refuse obstinément : Elser
est un simple citoyen porté par la conviction profonde de devoir « agir ainsi pour
éviter que plus de sang ne soit versé »…
Le film est passionnant parce que, audelà du huis-clos carcéral qui va durer
de longues années au cours desquelles
Elser affrontera les mêmes protagonistes, le film revient en flashback sur
son parcours, sur tout ce qui l'a fait
évoluer depuis le début des années 30.
Années encore heureuses où le jeune
Elser et ses amis profitent de la nature
splendide (on est tout près du superbe
lac de Constance), aiment librement tout
en ne dédaignant pas la tradition catholique, font la fête au rythme de la musique traditionnelle bavaroise tout en découvrant le jazz. Un monde où jeunes
communistes et nationaux socialistes
s'asticotent sans que les deuxièmes ne
tentent d'exterminer les premiers. Puis à
peu à peu le nazisme s'installe et la progression de l'épidémie est magnifiquement décrite : le maire un peu crétin,
dont on se moquait volontiers, se rallie
aux idées simples du national socialisme,
les chrétiens pratiquants sont ridiculisés
par les adeptes du paganisme, les croix
gammées recouvrent tout et l'asservissement de chacun est inéluctable alors que
tout communiste ou supposé tel est arrêté et torturé. C'est tout cela que refuse
Georg Elser, c'est pour combattre tout
cela qu'il va accomplir son acte hors du
commun. Un héros ordinaire auquel l'acteur Christian Friedel (découvert en instituteur dans Le Ruban blanc de Michael
Haneke) donne une épaisseur, une énergie, un charme extraordinaires.
TOULOUSE & TOURNEFEUILLE
Garcia Lorca, de Falla, Granados...
dim. 22 mai 2016 - 16h30
Liana Gourdjia, violon &
Marc Coppey, violoncelle
Suites, sonates… en duo, en solo
Bach, Mozart, Ysaÿe, Ravel
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05 62 72 23 35 - [email protected]
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UNE JEUNESSE ALLEMANDE
Mardi 20 octobre à 19h30
à Toulouse, la projection
sera présentée par Stéphane
Auclaire, distributeur du film.
Film documentaire
de Jean-Gabriel PÉRIOT
France 2015 1h33 VOSTF (Allemand)
Si ce film documentaire impressionne et
captive autant, c'est pour plusieurs raisons qui nous frappent immédiatement,
pendant la vision, ou un peu plus tard, à
la réflexion : sa construction qui le rend
immédiatement prenant et extrêmement
vivant, actuel ; son parti pris de ne travailler qu’à partir d'images d’archives,
de ne pas surligner le propos de dates,
de didactisme, un choix qui nous pousse
donc à suivre les événements comme si
on y était, en direct ; le choix pertinent
de la musique révoltée et urgente de
l’époque qui nous plonge dans son ambiance ; et surtout peut-être le fait qu’il
nous immerge dans les réflexions des
protagonistes, sans prononcer de jugement, sans prendre parti. Clairement, la
plupart des questions qu'ils se posent,
on les a tous plus ou moins partagées.
Les analyses qu’ils font résonnent avec
les nôtres. Comment se faire entendre
d'un pouvoir qui oppresse, d'une société de consommation qui avilit, de médias
qui abêtissent ? Quelle latitude cette société nous laisse-t-elle pour s’exprimer ?
Quels sont les moyens efficaces pour résister, lutter ?
Ulrike Meinhof (journaliste), Holger
Meins (cinéaste), Horst Malher (avocat), Gudrun Ensslin et Andreas Baader
(étudiants)… Nés autour de la seconde
guerre mondiale, ces jeunes Allemands
brillants qui vont de plus en plus se radicaliser sont le fruit de la démocratie ouest
allemande. Engagés, ils testent tous les
moyens à leur portée pour faire entendre
leur différence : l’art, la création d’un
journal, les meetings… L’effondrement
du mouvement étudiant, fin 1968, va les
pousser vers ce qu’ils appelleront une «
guérilla urbaine ». En 1970 nait la RAF :
Rote Armee Fraktion ou Fraction Armée
Rouge… Si le groupe, entré dans la clandestinité, commence par braquer des
banques pour se procurer des subsides,
il n’en restera pas là… Bombes, enlèvements : s'engage une épopée sanglante
qui bouleversera l’Allemagne… et toute
l'Europe avec elle ! Leurs actions vont
avoir des répercussions particulièrement
fortes dans les pays limitrophes comme
la France, qui suivra chaque étape de
cette montée de violence avec effroi.
C'est qu'au delà du cas allemand, le
phénomène de la radicalisation interroge
nos systèmes politiques et leurs limites.
On peut étendre la réflexion du film à
d'autres organisations qui connaîtront
le même basculement. On se souvient
facilement de l'IRA, de l'ETA, du FLN,
des Blacks Panthers, un peu moins des
Tigres de la libération de l'Îlam Tamoul…
On a un peu plus oublié l'ASA (Armée
Secrète Arménienne pour la libération de
l'Arménie), le FLQ (Front de Libération
du Québec)… Ce serait bien sûr simpliste et faux de les mettre tous dans
le même sac. On ne peut se contenter
d'analyses de comptoir alors qu'on pénètre sur un terrain miné, truffé de peurs,
de morts et de souffrances. Les moteurs
de ces mouvements, leurs idéologies, la
nature de l'oppression qu'ils subissent
ou pensent subir… tant de choses diffèrent. Mais dans tous les cas la ligne de
démarcation semble parfois ténue entre
ce qui distingue un justicier d'un criminel. Qu'est-ce qui légitime la prise des
armes, les victimes qui en résultent ? En
1942, en France, Monseigneur Piguet,
évêque de Clermont, ne qualifiait-il pas
de terroristes les actes de ceux que l'on
a par la suite décorés et appelés des
résistants (certes on était en temps de
guerre) ?
À bien les décortiquer, tous ces pans
d'Histoire épineux nous offrent un éclairage fascinant sur notre époque contemporaine et nous en restituent toute la
complexité. Ce n'est certes pas anodin
si des cinéastes s'en emparent actuellement. Les hommes heureux n'ont pas
d'histoires… Comblé, en sécurité, qui
éprouverait le besoin de fuir son pays
ou d'en contester violemment les fondements ?
Le travail de Jean-Gabriel Périot est rigoureux, impeccable : sans faire l’apologie du terrorisme, il le questionne et
le documente, en montre toutes les facettes, ses conséquences sur le peuple,
l’opinion, son traitement par les médias.
C’est vraiment passionnant, très dense,
et on est presque frustré quand ça s’arrête.
TOULOUSE
Ciném
a garanti sans 3D
www.cinemas-utopia.org • Toulouse (24 rue Montardy - 05 61 23 66 20) • Tournefeuille (Impasse du Château - Ciné 05 34 57 49 45 - Bistrot 05 34 51 88 10)
ELSER, UN HÉROS ORDINAIRE
Projection en avant-première dimanche 11 octobre à 10h à Toulouse
Oliver HIRSCHBIEGEL
Allemagne 2015 1h54 VOSTF
avec Christian Friedel, Katarina
Schüttler, Burghart Klaussner,
Johann Von Bülow…
Scénario de Fred et
Léonie-Claire Breinersdorfer
C'est un film formidable qui exalte l'esprit de résistance, qui nous captive avec
un personnage et un épisode presque
oubliés d'une période historique sur laquelle on croit pourtant tout savoir.
A la fin des années 1930, alors que le
régime nazi a déjà bien assis son pou-
voir, Georg Elser est un modeste menuisier de la Souabe, la partie occidentale
de la Bavière. Une région aussi rurale
qu'industrielle, marquée à la fois par un
fort catholicisme et une conscience ouvrière et syndicale très puissante. Et ce
Georg Elser ordinaire, entré presque par
No 220 Du 30 septembre au 3 novembre 2015 / Entrée: 6,50€ / Séance sur fond gris dans les grilles : 4€ / Abonnement: 48€ les 10 places