Evaluation de l`algorithme de l`Organisation Mondiale de la Santé
Transcription
Evaluation de l`algorithme de l`Organisation Mondiale de la Santé
INT J TUBERC LUNG DIS 15(7):919–924 © 2011 The Union Evaluation de l’algorithme de l’Organisation Mondiale de la Santé pour le diagnostic de la tuberculose à bacilloscopie négative des frottis de crachats associée au VIH D. Wilson,*† L. Mbhele,* M. Badri,‡ C. Morroni,§ J. Nachega,¶#** R. E. Chaisson,¶# G. Maartens** * Department of Medicine, Edendale Hospital, Pietermaritzburg, † Department of Medicine, University of KwaZulu-Natal, Pretoria, ‡ Department of Medicine, University of Cape Town, Cape Town, § Institute of Infectious Diseases and Molecular Medicine, University of Cape Town, Cape Town, Afrique du Sud ; ¶ Department of International Health and Epidemiology, Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, and # Department of International Medicine, Johns Hopkins School of Medicine, Johns Hopkins University, Baltimore, Maryland, Etats Unis ; ** Division of Clinical Pharmacology, Department of Medicine, University of Cape Town, Cape Town, Afrique du Sud RÉSUMÉ Les résultats finaux des recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (l’OMS) pour le diagnostic de la tuberculose (TB) à frottis négatifs (TPM–) ne sont pas connus dans les contextes à prévalence élevée du virus de l’immunodéficience humaine. É T U D E , P O P U L AT I O N E T M É T H O D E S : Nous avons appliqué rétrospectivement l’algorithme de l’OMS pour les TPM– sans signes de danger à une cohorte enrôlée de manière prospective et formée d’adultes ambulatoires suspects de TPM– au KwaZulu-Natal, Afrique du Sud. Les participants répondant aux critères spécifiés de TPM– ont reçu un traitement antituberculeux empirique, le reste de la cohorte étant soumis à observation. Tous ont été suivis jusqu’à 8 semaines. On a défini comme TB confirmée l’existence d’une culture positive ou de granulomes avec bacilles acidorésistants à l’examen histologique. R É S U LTAT S : Les critères d’entrée dans l’algorithme pour les TPM– ambulatoires de l’OMS ont été remplis rétrospectivement par 221 participants. La performance diagnostique de l’algorithme de l’OMS a été la suivante : valeur prédictive positive 0,34 (IC95% 0,26–0,43) ; valeur prédictive négative 0,86 (IC95% 0,76–0,92) ; ratio de probabilité positive 1,43 (IC95% 1,34–1,48) ; ratio de probabilité négative 0,46 (IC95% 0,38–0,56) ; et odds de diagnostic 3,1 (IC95% 1,52–6,34). On n’a pas observé de différence significative en ce qui concerne les pertes de suivi (n = 4), les hospitalisations (n = 6) et les décès (n = 5) entre ceux chez qui le diagnostic de TPM– a été porté ou non. C O N C L U S I O N S : L’algorithme TPM– ambulatoire de l’OMS possède une valeur prédictive négative raisonnablement élevée mais une faible valeur prédictive positive. La mortalité a été faible au cours d’une période de 8 semaines chez les participants qui répondaient aux critères d’entrée dans l’algorithme de l’OMS. M O T S - C L É S : tuberculose à bacilloscopie négative des frottis de crachats ; VIH ; OMS ; recommandations; performance CONTEXTE : LA TUBERCULOSE (TB) est une des causes principales de morbidité chez les adultes infectés par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) vivant en Afrique subsaharienne et est devenue la cause principale de décès en Afrique du Sud.1–6 L’examen microscopique des frottis de crachats à la recherche de bacilles acido-résistants (BAAR) est le seul test rapide de diagnostic de la TB disponible dans les con-textes à ressources limitées.7 Chez les patients infectés par le VIH, le diagnostic est souvent retardé en raison d’une fréquence plus importante de la tuberculose à bacilloscopie négative des frottis de crachats chez les patients en immunodépression.1,2,8,9 Par voie de conséquence, le traitement antituberculeux peut être mis en route trop tardivement dans le décours de l’infection pour améliorer la survie, ou bien les patients peuvent décéder sans que la TB ait été diagnostiquée.10 En 2007, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a publié des recommandations mises à jour comportant des algorithmes en vue de faciliter le diagnostic empirique de la TB à bacilloscopie négative (TPM–) pour la TB pulmonaire (TBP) et extrapulmonaire (TBEP) dans les contextes à ressources limitées avec prévalence élevée du VIH (prévalence prénatale ⩾1% ou prévalence chez les patients TB ⩾5%).11 Les recommandations de l’OMS incluent deux algorithmes pour le diagnostic de la TPM– chez les adultes séropositifs ou de statut inconnu pour le VIH et qui toussent depuis plus de 2 semaines, en fonction de la présence ou de l’absence de signes Auteur pour correspondance : D Wilson, Department of Medicine, Edendale Hospital, Pietermaritzburg, 3216 South Africa. Tel : (+27) 33 395 4146. Fax : (+27) 33 395 4060. e-mail : [email protected] [Traduction de l’article : « Evaluation of the World Health Organization algorithm for the diagnosis of HIV-associated sputum smear-negative tuberculosis » Int J Tuberc Lung Dis 2011; 15(7): 919–924] 2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease spécifiés inquiétants. Les algorithmes de l’OMS reposent largement sur une opinion d’expert sans base solide d’évidence pour plusieurs recommandations spécifiques. L’utilité diagnostique des algorithmes de l’OMS n’est pas connue et on ne dispose pas de données concernant les résultats finaux cliniques. Nous avons appliqué rétrospectivement l’algorithme de l’OMS destiné à des suspects de TPM– sans signes inquiétants à une cohorte prospective de suspects ambulants TPM– dans une zone à prévalence élevée du VIH et nous avons évalué les résultats finaux du diagnostic. POPULATION DE L’ÉTUDE ET MÉTHODES Population de l’étude L’algorithme de l’OMS destiné aux suspects de TPM– ne présentant pas de signes inquiétants a été appliqué de manière rétrospective à une étude de cohorte prospective composée de sujets traités en ambulatoire et suspects de TB à bacilloscopie négative des frottis de crachats enrôlés entre juin 2005 et février 2007 en provenance de polycliniques de soins primaires dans le District Umgungundlovu, KwaZulu-Natal, Afrique du Sud. Ce district est représentatif du fardeau élevé de TB et de VIH en Afrique du Sud : en 2006, la prévalence du VIH dans les consultations prénatales du secteur public était de 39% et l’incidence annuelle estimée de la TB était de 1.094 pour 100.000 habitants.12,13 On avait créé l’étude de la cohorte TPM– en vue de faciliter une mise en route rapide du traitement antituberculeux chez les participants répondant à des critères cliniques spécifiés pour la TB et/ou la TBEP (à l’exclusion de la méningite) que nous avions précédemment validés.14 Enrôlement dans la cohorte prospective de TPM– Les critères pour l’inclusion dans la cohorte TPM– ont été les suivants : tout symptôme compatible avec une TB (toux, sueurs nocturnes, fièvre ou perte de poids) persistant pendant plus de 2 semaines, au moins deux frottis de crachats négatifs pour les bacilles acido-résistants (BAAR) ou une impossibilité de fournir un échantillon de crachats, un âge supérieur à 18 ans et un consentement éclairé. Les critères d’exclusion ont été : un score de performance de Karnofsky inférieur à 40, une suspicion de méningite tuberculeuse, l’administration d’un traitement antituberculeux pendant plus d’une semaine, d’un traitement antirétroviral (ART) pendant moins de 3 mois ou celle d’une fluoroquinolone au cours des 6 derniers mois. Les participants se plaignant de toux pouvaient être traités par antibiotiques par les médecins de l’étude, mais ils avaient aussi l’option de la mise en route immédiate d’un traitement antituberculeux. Le traitement par antibiotiques a été utilisé dans l’étude pour traiter une suspicion d’infection bactérienne mais non en tant qu’outil de diagnostic. Procédures de l’étude pour la cohorte prospective de TPM– Les participants se sont vus offrir sur place un accompagnement et un test VIH volontaires. A l’enrôlement, les participants ont été évalués en matière de preuve de TPM– au moyen d’un protocole standardisé. Lors de la première consultation de l’étude, les médecins de soins primaires de l’étude ont réalisé un examen clinique et une évaluation du cliché thoracique (CXR). En cas d’une suspicion d’épanchement péricardique au CXR, les participants ont été référés pour confirmation par scanner ultrasonique ; ceux avec suspicion d’une TB abdominale ont été référés pour un scanner abdominal ultrasonique. Pour la cohorte prospective de TPM–, on a mis en route un traitement antituberculeux empirique en fonction des critères suivants : au CXR, caractéristiques compatibles avec une TB active (infiltrat pulmonaire, épanchement pleural, adénopathies hilaires ou médiastinales), épanchement péricardique confirmé par scanner ultrasonique, signes caractéristiques de TB au scanner abdominal ultrasonique (lymphadénites ou micro-abcès spléniques) et caractéristiques cliniques de TBEP. Tous les participants ont subi un test d’expectoration provoquée au moyen d’un nébuliseur diffusant une solution saline hypertonique. Les crachats provoqués et les échantillons obtenus à partir d’autres sites cliniquement pertinents ont été envoyés pour culture mycobactérienne. Si aucun site n’a été identifié, on a envoyé pour culture mycobactérienne un échantillon d’urine prélevé à mi-jet car nous avions montré précédemment le bon rendement de ce mode d’investigation chez les suspects de TPM– séropositifs pour le VIH.14 Les produits d’aspiration pleurale ont été inoculés immédiatement dans des flacons pour culture mycobactérienne en milieu liquide (Bactec Myco/F Lytic Medium, BD Diagnostic Systems, Sparks, MD, États-Unis) car cette technique s’avérait augmenter le rendement de la culture.15 On a pratiqué une ponction-biopsie centrale dans les ganglions >2 cm pour les cas de lymphadénite périphérique asymétrique.16 Tous les échantillons envoyés pour culture mycobactérienne ont été colorés en vue d’une recherche de bacilles acido-résistants au moyen de la microscopie à fluorescence et mis en culture en milieu liquide (BACTEC™ Mycobacteria Growth Indicator Tube [MGIT]™, BD Diagnostic Systems). Les cultures positives ont été identifiées comme Mycobacterium tuberculosis par le test à la niacine. La définition d’un cas de TB confirmée a correspondu soit à au moins un échantillon positif en culture pour M. tuberculosis soit à la présence de granulomes à l’examen histologique avec présence de bacilles acido-résistants. L’adhésion au traitement antituberculeux a été documentée par un accompagnateur de traitement choisi par le patient. Les patients qui ne répondaient pas aux critères pour bénéficier immédiatement d’un traitement antituberculeux empirique ont été mis en Diagnostic de la TB à bacilloscopie négative des frottis de crachats associée au VIH surveillance. Tous les participants ont été revus 2, 4 et 8 semaines après l’enrôlement et même plus fréquemment si c’était indiqué d’un point de vue clinique. Dans le groupe d’observation, les participants qui au cours du suivi avaient une bacilloscopie positive des frottis ou dont l’état s’était détérioré ont été mis sous traitement antituberculeux. On a demandé des décomptes de lymphocytes T CD4+ chez les participants infectés par le VIH. Une prophylaxie au cotrimoxazole a été mise en route chez les patients diagnostiqués comme TB ou chez qui le décompte des CD4 était < 200 cellules/μl ; après 8 semaines de suivi, tous les participants dont les décomptes de CD4 étaient < 200 cellules/μl ont bénéficié de l’ART à la polyclinique antirétrovirale de l’Hôpital Edendale, conformément aux directives nationales. Evaluation rétrospective de l’algorithme de l’OMS pour les patients ambulants séropositifs ou de statut inconnu pour le VIH sans signes inquiétants Les recommandations de l’OMS pour la TPM– ont été publiées11 à la fin de notre étude de cohorte. Les caractéristiques-clé de cet algorithme de l’OMS sont d’accélérer le recours à la culture mycobactérienne. Dans notre cohorte prospective de TPM–, les modalités d’étude ont été très similaires aux recommandations de l’OMS : les antibiotiques ont été administrés sans réserve aux patients qui se plaignaient de toux mais n’ont pas été utilisés en tant qu’outil de diagnostic, et on a encouragé la mise en route rapide d’un traitement antituberculeux empirique (après envoi des cultures mycobactériennes) chez les patients chez qui deux frottis de crachats étaient négatifs et chez qui le cliché thoracique ou un examen clinique était suggestif de TB. Pour évaluer les résultats finaux obtenus par l’algorithme de l’OMS pour les adultes ambulants séropositifs ou de statut inconnu pour le VIH sans signes inquiétants, nous avons appliqué rétrospectivement cet algorithme à notre cohorte prospective de TPM–. Pour l’analyse des résultats à partir de l’algorithme de l’OMS pour les patients ambulants sans signes inquiétants de notre cohorte, nous avons introduit dans notre base de données des critères additionnels d’inclusion et d’exclusion. Les critères d’inclusion ont été : 1) une toux depuis plus de 2 semaines et 2) la séropositivité ou un statut inconnu pour le VIH. Les critères d’exclusion ont été : 1) la séronégativité pour le VIH ; 2) le diagnostic de TB porté uniquement à partir du scanner abdominal ultrasonique, puisque ce diagnostic n’est pas spécifié dans la directive de l’OMS ; 3) la présence d’au moins un des signes inquiétants définis par l’OMS (rythme respiratoire >30/minute ; fièvre >39°C ; pouls >120/min lors du dépistage, impossibilité de se déplacer sans une aide [défini comme un score de Karnofsky inférieur à 40) ; et 4) les participants attribués au bras d’observation non traités par un antibiotique (puisque 3 l’algorithme de l’OMS spécifie que les patients évalués comme « TB improbable » devaient être traités pour une infection bactérienne). Après application rétrospective de ces critères additionnels d’exclusion et d’inclusion, les participants qui avaient été attribués au groupe de traitement antituberculeux empirique répondaient aux critères de diagnostic de « TB probable » et ceux attribués au groupe d’observation répondaient aux critères de diagnostic de « TB improbable » dans l’algorithme de l’OMS. Analyse des données Les données des participants ont été codées dans une base de données Microsoft Access (Microsoft Corp, Redmond, WA, États-Unis) et analysées en utilisant Analyse-it pour Microsoft Excel (version 2.11). La comparaison entre les différents groupes a été faite pour les données catégorielles en utilisant le test χ2 de Pearson, pour les ODDS de diagnostic par le test exact de Fisher et pour les données continues par le test de Mann-Whitney. Bilan éthique L’étude a reçu l’approbation des Biomedical Research Ethics Committees de l’Université du KwaZulu-Natal et de l’Université de Cape Town ainsi que celle du Département de la Santé du KwaZulu-Natal. Tous les participants ont donné par écrit un consentement éclairé avant l’enrôlement. RÉSULTATS Caractéristiques des participants éligibles pour une évaluation de l’algorithme de l’OMS L’enrôlement des participants et les résultats à la semaine 8 sont résumés dans la Figure. Les caractéristiques cliniques des 221 participants éligibles pour l’évaluation de l’algorithme de l’OMS destiné aux patients ambulants apparaissent au Tableau 1 : 127 (51%) sont séropositifs pour le VIH (décompte médian des CD4 : 140 cellules/μl ; extrêmes interquartiles [IQR] 92–273 chez les 79 participants qui ont bénéficié du test au cours de la période d’étude) et 94 ont refusé le test VIH. Trois participants (1%) étaient sous ART depuis plus de 3 mois et chez deux d’entre eux, on a porté le diagnostic de TPM– ; 201 (91%) ont été référés avec deux ou davantage bacilloscopies négatives des crachats et 20 (9%) ont été incapables de fournir des crachats. Prescription d’antibiotiques Des antibiotiques ont été prescrits à 184 participants (83%) pour une suspicion d’infection bactérienne avant ou durant le processus d’évaluation : 175 (95%) ont reçu de l’amoxicilline, 3 (2%) une autre béta-lactamine à large spectre, 2 (1%) du cotrimoxazole et 4 (2%) de l’érythromycine. Parmi les 4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease improbable ; P = 0,001). Les performances du diagnostic de l’algorithme ambulatoire de l’OMS pour une TB confirmée ont été : sensibilité 0,80 (intervalle de confiance [IC] 95% 0,67–0,89), spécificité 0,44 (IC95% 0,37–0,52, valeur prédictive positive 0,34 (IC95% 0,26–0,43), valeur prédictive négative 0,86 (IC95% 1,34–1,48) ratio de probabilité positive 1,43 (IC95% 1,34–1,48), ratio de probabilité négative 0,46 (IC95% 0,38–0,56) et Odds de diagnostic 3,1 (IC95% 1,5–6,3). Sur les 137 participants diagnostiqués cliniquement comme TPM–, 67 (49%) étaient atteints uniquement d’une TBP, 44 (32%) d’une TBP et d’une TBEP et 26 (19%) uniquement d’une TBEP. Les participants atteints d’une TBEP étaient significativement plus susceptibles d’être atteints d’une TB confirmée que ceux atteints seulement d’une TBP : la TB a été confirmée chez 32/70 participants (46%) atteints de TBEP par comparaison à 15/67 (22%) de ceux atteints uniquement de TBEP (P = 0,004). Sur les 70 participants atteints uniquement de TBEP, deux (3%) souffraient d’une lymphadénite périphérique tuberculeuse sans preuve de TB au niveau du cliché thoracique. Figure Enrôlement des participants, diagnostic et résultats à 8 semaines. * Raisons d’exclusion : incapable de se présenter pour un suivi régulier (n = 28), pas de symptômes actifs (n = 17), autre diagnostic médical (n = 4), score de Karnofsky <40 (n = 5), pneumonie à Pneumocystis (n = 4), consentement informé non obtenu (n = 3), crachats à bacilloscopie positive (n = 3), déjà sous traitement antituberculeux (n = 3), autres (n = 6). † Rythme respiratoire >30/min, température >39°C, pouls >120/min. ‡ P = 0,07 pour la comparaison. § P = 0,93 pour la comparaison. ¶ P = 0,81. TPM− = tuberculose à bacilloscopie négative ; VIH = virus de l’immunodéficience humaine. 137 participants chez qui le diagnostic de TPM– avait été porté, 100 (73%) ont reçu un antibiotique, comme cela fut le cas chez tous les participants du bras d’observation. Sur les 184 participants, 120 (65%) ont reçu un antibiotique prescrit par une infirmière de soins primaires avant d’être référés à l’équipe de l’étude. Résultats finaux du diagnostic chez les participants évalués par l’algorithme de l’OMS Les résultats du frottis et de la culture par type d’échantillon apparaissent au Tableau 2. Au total, 59 participants ont été diagnostiqués comme TB confirmée ; 47 (34%) du groupe diagnostiqués comme TPM– (TB probable) ont vu la TB confirmée, comme ce fut le cas chez 12 (14%) du groupe d’observation (TB Morbidité et mortalité au cours des 8 semaines de suivi Sur les 221 participants, 193 (87%) ont terminé les 8 semaines de suivi ; 5 (2%) sont décédés, 3 (1%) sont revenus sur leur consentement, 10 (4%) ont déménagé, 4 (2%) ont été perdus de vue pour le suivi et 6 (3%) n’ont pas terminé l’étude pour d’autres raisons. Six participants (3%) ont été hospitalisés au cours des 8 semaines de suivi. La proportion de participants qui sont décédés ou qui ont été perdus de vue n’a pas été différente entre la TPM– (TB probable) et les groupes d’observation (TB improbable ; Figure). Dans le bras d’observation, deux des 12 participants chez qui la culture était positive sont décédés avant d’avoir reçu le résultat de la culture et un dont l’état de santé s’était détérioré s’est rétabli après la mise en œuvre d’un traitement antituberculeux empirique selon le protocole. Dans le bras d’observation, trois participants chez qui la culture était négative et dont l’état s’était détérioré ont commencé un traitement antituberculeux et se sont rétablis. Dans le groupe TPM–, chez trois participants dont l’état s’était détérioré, on a diagnostiqué une méningite à Cryptocoques, un sarcome de Kaposi et un mycétome pulmonaire. DISCUSSION Nous avons appliqué le nouvel algorithme de l’OMS pour le diagnostic de la TPM– chez des patients ambulants dans un contexte à prévalence élevée de VIH à une cohorte de suspects de TPM– enrôlés prospectivement. La TB a été confirmée chez 47 des 137 participants (34%) diagnostiqués comme TPM– et chez 12 des 84 participants (14%) du groupe d’observation. Diagnostic de la TB à bacilloscopie négative des frottis de crachats associée au VIH 5 Tableau 1 Caractéristiques des 221 participants séropositifs pour le VIH ou de statut VIH inconnu se plaignant de toux et répondant aux critères de l’algorithme de l’OMS pour les patients ambulants sans signes inquiétants Age, années Hommes Sans emploi Traitement antérieur pour tuberculose Fumeur de tabac Perte de poids Anorexie Sueurs nocturnes abondantes Fatigue Douleurs thoraciques Fièvre et frissons Dyspnée Hémoptysie Gonflement des ganglions Score de performance de Karnofsky Rythme respiratoire, respirations/min Temperature, °C Pouls au repos Index de masse corporelle, kg/m2 Cohorte d’évaluation de l’algorithme OMS (n = 221) n (%) ou médiane [IQR] Groupe TPM− (TB probable) (n = 137) n (%) ou médiane [IQR] Groupe d’observation (TB improbable) (n = 84) n (%) ou médiane [IQR] Valeur de P* 35,8 [29,9–42,9] 115 (53) 120 (54) 74 (33) 48 (22) 156 (71) 146 (66) 142 (64) 129 (58) 126 (57) 111 (50) 85 (38) 21 (9) 21 (9) 70 [60–80] 24 [20–28] 36,5 [36,0–37,0] 98 [80–102] 20,8 [18,8–23,3] 34,0 [29,8–40,8] 71 (52) 75 (55) 34 (25) 26 (19) 109 (79) 103 (75) 89 (65) 83 (60) 81 (59) 77 (56) 58 (42) 11 (8) 19 (14) 70 [60–80] 24 [22–28] 36,8 [36,3–37,4] 100 [88–110] 20,7 [18,5–24,1] 37,4 [31,6–45,2] 44 (52) 45 (53) 40 (48) 22 (26) 47 (56) 43 (51) 53 (63) 46 (55) 45 (53) 34 (40) 27 (32) 10 (12) 2 (3) 70 [70–80] 21 [20–24] 36,0 [36,0–36,5] 86 [80–98] 21,4 [19,7–25,1] 0,02 0,73 0,86 0,0005 0,22 0,0002 0,0003 0,78 0,39 0,42 0,02 0,13 0,34 0,005 0,03 <0,0001 <0,0001 <0,0001 0,12 * Pour la comparaison entre le groupe TPM− (TB probable) et le groupe d’observation (TB improbable). VIH = virus de l’immunodéficience humaine ; OMS = Organisation Mondiale de la Santé ; IQR = extrêmes interquartiles ; TPM− = tuberculose à bacilloscopie négative. L’algorithme de l’OMS pour les patients ambulants suspects de TPM– sans signes inquiétants a une valeur prédictive négative raisonnablement élevée mais une faible valeur prédictive positive. La faible positivité de la valeur prédictive peut être expliquée en partie par notre standard de référence strict qui n’a pas inclus certains patients qui pourraient avoir été atteints d’une TPM– avec culture négative. Le nombre de décès a été relativement faible au cours des 8 semaines de suivi et n’a pas été significativement différent entre les participants attribués au groupe d’observation et au groupe TPM–. Notre observation d’une TB confirmée chez 34% des participants diagnostiqués avec une TPM– est similaire aux 39% confirmés lors d’une étude antérieure au Malawi.17 Toutefois, la proportion de participants atteints d’une TB confirmée a été considérablement plus basse que les 71% que nous avions signalés dans une étude chez des patients infectés par le VIH référés à un hôpital régional.14 L’explication probable de cette Tableau 2 Envoi d’échantillons de frottis et de cultures en provenance de 221 participants Echantillons Expectoration provoquée Biopsie à l’aiguille de ganglions Ponction pleurale Urine Echantillons envoyés n BAAR positifs n (%) Culture positifs n (%) 221 4 (2) 51 (23) 11 33 177 4 (36) N/A 0 4 (36) 11 (33) 2 (1) BAAR = bacilles acido-résistants ; N/A = non applicable (les produits de ponction ont été inoculés directement dans le milieu de culture liquide). proportion plus élevée de patients atteints d’une TB confirmée dans notre étude antérieure basée sur l’hôpital est que les participants de cette dernière étaient plus immunodéprimés, avaient des décomptes plus bas de CD4, qu’il y avait des biais de référence et que de nombreux patients étaient hospitalisés. Dans l’étude actuelle, le rendement de la culture des urines, qui reflète une TB disséminée dans le contexte du VIH, a été faible, mais il est comparable à celui des observations récemment publiées d’une étude transversale chez des patients thaïlandais et vietnamiens.18 Dans notre présente étude, le rendement de la culture a été relativement bon pour les échantillons extrapulmonaires autres que l’urine. Toutefois, cette observation peut être difficile à reproduire dans des contextes à ressources plus limitées qui ne peuvent mettre en culture que les échantillons de crachats. Nos observations ont plusieurs implications en santé publique. Bien que la valeur prédictive négative de l’algorithme de l’OMS soit élevée (0,86), une minorité significative de patients qui ne répondent pas aux critères d’un traitement antituberculeux empirique souffrent de TB et doivent être suivis. La faible valeur prédictive de l’algorithme pose problème et suggère que de nombreux patients seront traités abusivement s’il est mis en œuvre largement. Chez la majorité de nos participants diagnostiqués comme TBEP, il y a des anomalies du cliché thoracique (épanchements pleural ou péricardique, ou une lymphadénite intrathoracique), indiquant que le CXR reste important pour le diagnostic de la TPM–. Nous soutenons la recommandation de l’OMS à savoir que le CXR 6 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease ainsi qu’une formation en interprétation radiographique devraient être largement accessibles.11 Notre étude comporte plusieurs limitations. Premièrement, nous avons appliqué l’algorithme ambulatoire de l’OMS rétrospectivement à notre cohorte prospective. Toutefois, notre étude de TPM– a été prospective, et l’algorithme de l’OMS a reflété de près nos procédures pour la mise en route d’un traitement antituberculeux, sauf que nous n’avons pas exigé un traitement avec antibiotiques dans le groupe d’observation. Dès lors, ces participants ont été exclus plus tard. Deuxièmement, notre période de suivi n’a duré que 8 semaines et la mortalité pourrait avoir été plus importante avec une durée prolongée de suivi.3–5 Troisièmement, la faible mortalité que nous avons observée est survenue dans un contexte de suivi soigneux aussi bien clinique que de laboratoire, en accord avec le protocole de l’étude et dans un contexte d’utilisation importante d’antibiotiques. Dans les contextes à ressources limitées où l’accès aux antibiotiques et à la culture mycobactérienne est limité, où un contrôle clinique de suivi est difficile à obtenir, les résultats pourraient être considérablement plus mauvais. CONCLUSION L’algorithme de l’OMS pour le diagnostic de la TPM– a détecté la majorité des cas ambulants de TB confirmée et a été de pair avec une faible mortalité. L’algorithme de l’OMS doit être évalué dans des contextes différents avec une prévalence du VIH plus faible que la prévalence extrêmement élevée de notre contexte. Le diagnostic clinique de la TB est imprécis—il est nécessaire de disposer d’urgence dans les lieux de soins de tests de diagnostic simples, accessibles financièrement et précis. Remerciements Les auteurs remercient P Bartman et Z Mgcaba (infirmières de l’étude), S Carries (gestionnaire de données), L Ngubane et L Gabuza (cliniciens de soins primaires de l’étude). L’aide de D Bangsberg a été appréciée pour l’élaboration du manuscrit. L’étude n’aurait pas été possible sans le soutien du Dr J Muller, du Département de Santé du KwaZulu-Natal, des polycliniques de District de Umgungundlovu et de l’Hôpital Edendale. Cette étude a bénéficié du soutien de Bristol Meyer Squibb Secure the Future. GM a été soutenu en partie par le Fogarty International Center Grant N° U2RTW007370. Le contenu est entièrement sous la responsabilité des auteurs et ne représente pas nécessairement les vues officielles du Fogarty International Center ou des National Institutes of Health. Références 1 Colebunders R, Bastian I. A review of the diagnosis and treatment of smear-negative pulmonary tuberculosis. Int J Tuberc Lung Dis 2000; 4: 97–107. 2 Harries A D, Maher D, Nunn P. An approach to the problems of diagnosing and treating adult smear-negative pulmonary tuberculosis in high HIV prevalence settings in sub-Saharan Africa. Bull World Health Organ 1998; 76: 651–662. 3 Connolly C, Davies G R, Wilkinson D. Impact of the human immunodeficiency virus epidemic on mortality among adults with tuberculosis in rural South Africa, 1991–1995. Int J Tuberc Lung Dis 1998; 2: 919–925. 4 Van den Broek J, Mfinanga S, Moshiro C, et al. Impact of human immunodeficiency virus infection on the outcome of treatment and survival of tuberculosis patients in Mwanza, Tanzania. Int J Tuberc Lung Dis 1998; 2: 547–552. 5 Mukadi Y D, Maher D, Harries A. Tuberculosis case fatality rates in high HIV prevalence populations in sub-Saharan Africa. AIDS 2001; 15: 143–152. 6 Statistics South Africa. Mortality and causes of death in South Africa, 2007: finding from death notification 2009. Pretoria, South Africa: Stats SA, 2007. http://www.statssa.gov.za/ publications/statsdownload.asp?PPN=P0309.3&SCH=4507 Accessed November 2009. 7 Hopewell P C, Pai M, Maher D, Uplekar M, Raviglione M C. International standards for tuberculosis care. Lancet Infect Dis 2006; 6: 710–725. 8 Meintjes G, Schoeman H, Morroni C, Wilson D, Maartens G. Patient and provider delay in tuberculosis suspects from communities with a high HIV prevalence in South Africa: a crosssectional study. BMC Infect Dis 2008; 8: 72. 9 Millen S J, Uys P W, Hargrove J, van Heerden P D, Williams B J. The effect of diagnostic delays on the drop-out rate and the total delay to diagnosis of tuberculosis. PLoS ONE 3; 2008: e1933. 10 Cohen T, Murray M, Wallengren K, Alvarez G G, Samuel E Y, Wilson D. The prevalence and drug susceptibility of patients dying in hospital in KwaZulu-Natal, South Africa: a postmortem study. PLoS Med 2010; 7: e1000296. 11 World Health Organization. Improving the diagnosis and treatment of smear-negative pulmonary and extrapulmonary tuberculosis among adults and adolescents. Recommendations for HIV-prevalent and resource-constrained settings. WHO/ HTM/TB/2007.379. Geneva, Switzerland: WHO, 2007. http:// whqlibdoc.who.int/hq/2007/WHO_HTM_TB_2007.379_eng. pdf Accessed March 2011. 12 National Department of Health, South Africa. The national HIV and syphilis survey, South Africa. Pretoria, South Africa: National Department of Health, 2007. http://www.doh.gov. za/docs/reports/2007/hiv/part1.pdf Accessed April 2010. 13 The Italian Cooperation in South Africa. Demographic and health indicators KwaZulu-Natal. Pretoria, South Africa: Italian Cooperation in South Africa. http://italcoop.co.za/Public Documents/Demographic_Health_Statisticaldata_KW_EC_ SA%20_EN.pdf Accessed April 2010. 14 Wilson D, Nachega J, Morroni C, Chaisson R, Maartens G. Diagnosing smear-negative tuberculosis using case definitions and treatment response in HIV-infected adults. Int J Tuberc Lung Dis 2006; 10: 31–38. 15 Maartens G, Bateman E D. Tuberculous pleural effusions: increased culture yield with bedside inoculation of pleural fluid and poor diagnostic value of adenosine deaminase. Thorax 1991; 46: 96–99. 16 Wilson D, Nachega J, Chaisson R, Maartens G. Diagnostic yield of peripheral lymph node needle-core biopsies in HIV infected adults with suspected smear-negative tuberculosis. Int J Tuberc Lung Dis 2005; 9: 220–222. 17 Hargreaves N J, Kadzakumanja O, Phiri S, et al. What causes smear-negative pulmonary tuberculosis in Malawi, an area of high HIV seroprevalence? Int J Tuberc Lung Dis 2001; 5: 113– 122. 18 Monkongdee P, McCarthy K D, Cain K P, et al. Yield of acidfast smear and mycobacterial culture for tuberculosis diagnosis in people with human immunodeficiency virus. Am J Respir Crit Care Med 2009; 180: 903–908.