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I 047/2010 FIN Le 18 août 2010 FIN C Interpellation 1174 Hofmann, Berne (PS-JS) Cosignataires: 0 Déposée le: 15.03.2010 L’étranger va-t-il nous aider à rendre notre système fiscal plus juste ? Le 7 juin 2007, j’ai déposé une interpellation intitulée « Fraude à l’AI et fraude fiscale ». La question 3 a la teneur suivante : « Quel est le montant des dommages subis annuellement par le canton de Berne du fait de la fraude fiscale (personnes physiques seulement) ? Quel est le nombre de fraudeurs et quel est donc le dommage par personne ? Les cas mineurs sont exclus de cette statistique. » Le Conseil-exécutif a répondu ce qui suit : « Il n’est pas possible de chiffrer précisément les cas de soustraction d’impôt non sanctionnés dans le canton de Berne, et l’on ne dispose pas de suffisamment d’indices significatifs même pour fournir une simple estimation en la matière. Le Conseil-exécutif juge cependant que, compte tenu des informations à la fois nombreuses et variées dont dispose l’Intendance des impôts en procédure de taxation, le potentiel de dissimulation des revenus ou de la fortune est réduit à un niveau acceptable. L’instrumentaire qui permet de recenser de façon exhaustive les éléments imposables comprend notamment des mesures législatives, administratives et techniques. En combinant et en rapprochant les données issues de différentes sources, on obtient une vision globale fiable de chaque contribuable qui reflète en règle générale sa situation réelle en termes de revenus et de fortune. » Dans l’alinéa qui suit, le gouvernement précise que les recettes provenant des cas de soustraction d’impôt sanctionnés s’élèvent annuellement à environ sept millions de francs en moyenne des cinq dernières années. Lorsque cette interpellation a été discutée au Grand Conseil, le 22 janvier 2008, les parlementaires bourgeois se sont rangés à l’avis du Conseil-exécutif. Andreas Blank de l’UDC a même déclaré : « Nous avons trouvé que le Conseil-exécutif a répondu correctement à la question et de manière détaillée, de sorte que cette interpellation est en réalité un autogoal [trad.].» En se servant de la même méthode (n’indiquer les chiffres qu’en ce qui concerne les cas sanctionnés), la directrice des affaires sociales de la ville de Berne avait tenté quelque temps auparavant de montrer que dans le domaine social, la part de fraudeurs était inférieure à un pour cent. Elle avait déclenché avec ce mode de calcul une telle tempête de protestations qu’elle a été forcée de chiffrer une estimation des fraudeurs potentiels, soit 5 pour cent. Or, quand le gouvernement a utilisé le même type d’argumentation dans le domaine fiscal, il n’y a pas eu de protestations. Au contraire, le gouvernement a été approuvé. J’ai été pratiquement le seul à désapprouver et j’ai tenté de réunir sur Internet les chiffres qui manquaient. Sur la base des études que j’ai pu consulter, j’ai abouti à une estimation pour toute la Suisse et par année de 10 milliards de francs, ce qui pour le canton de Berne reviendrait à un manque à gagner fiscal d’un milliard de francs. Cette estimation a été très mal accueillie lors de la discussion de l’interpellation le 22 janvier 2008. C:\Program Files (x86)\Neevia.Com\Document Converter\temp\CONVERT_75aaa44034354053bdc3bbbd5831da66.doc 2 Dans l’intervalle, la crise financière a fait son œuvre dans le monde. Les grandes puissances accusent les banques suisses de permettre à leurs citoyennes et citoyens de frauder le fisc de leur pays, et elles n’ont pas tort. La discussion sur la fraude à l’aide sociale a fait place à la discussion sur la fraude fiscale. Ce qu’un simple député n’a pas réussi à faire en 2007, les Etats-Unis, l’Allemagne, la Francs etc. l’ont obtenu ensemble. Il faut souligner qu’en matière fiscale, les gouvernements de droite ont à peu près le même type de raisonnement que les gouvernements de gauche (exception : le gouvernement Bush et la Suisse). De toutes les publications récentes que j’ai lues concernant le débat sur la fraude fiscale, je tirerai un exemple : dans le Bund du 3 février 2010, sous le titre « Les contribuables suisses soustraient eux aussi des milliards [trad.] », on pouvait lire la phrase suivante : « Les experts estiment entre 5 à 10 milliards de francs par année le manque à gagner causé par la fraude fiscale. Il est probable que de tels délits seront en augmentation [trad.] ». Voilà la réponse (non officielle, hélas) à la question 3 de mon interpellation du 7 juin 2007. L’article du Bund répond même à la question 4, « Existe-t-il actuellement des indices d’une augmentation ou d’une diminution de la fraude fiscale ? » Le choix des experts du Bund est d’ailleurs intéressant: le professeur Bruno S. Frey, avec lequel mes recherches m’avaient mis en contact, et le chef de l’intendance des impôts de la ville de Zurich, Paul Anschwanden. Dans le même article, j’ai trouvé intéressante également la déclaration de Friedrich Schneider, économiste, selon lequel la part souterraine de l’économie suisse représente environ 10 pour cent. « Une bonne partie de ces 40 milliards échappent probablement au fisc. Des études antérieures faites sur la base des données de l’Office fédéral de la statistique laissent à penser que même largement plus de 10 pour cent du total des revenus des contribuables suisses ne sont pas imposés [trad.].» Dans cet article du Bund, on pense également que les risques de fraude fiscale ont augmenté (cf. question 4 cidessus). Les chiffres régulièrement publiés concernant l’argent sale provenant de l’étranger qui est déposé dans les banques suisses pourraient permettre de déduire les quantités d’argent sale de provenance suisse. Quand je lis des articles comme celui dont j’ai parlé, j’en conclus que j’avais raison en estimant à 10 milliards de francs la soustraction fiscale. Je me permets de citer encore une fois un passage de la réponse du Conseil-exécutif à ma question 3 : «Le Conseil-exécutif juge cependant que, compte tenu des informations à la fois nombreuses et variées dont dispose l’Intendance des impôts en procédure de taxation, le potentiel de dissimulation des revenus ou de la fortune est réduit à un niveau acceptable.» Ce hiatus inadmissible entre les estimations des experts et la réponse du Conseil-exécutif à mon interpellation de 2007 m’amène à poser les questions suivantes : 1. Quelle est selon l’estimation du Conseil-exécutif la perte de recettes fiscales chaque année (canton et communes) due à la non-déclaration de revenus ? 2. Combien le canton de Berne pourrait-il encaisser de plus selon ses estimations s’il y avait un flux d’informations automatiques des banques aux autorités fiscales, ce qui dans l’Union européenne est la procédure ordinaire ? 3. Quelle pourrait être la réduction de la quotité d’impôt en dixièmes, selon la réponse à la question 2 (canton et communes), sans que le revenu fiscal ne baisse le moins du monde par rapport à ce qu’il est aujourd’hui ? Cette dernière question a pour but de montrer que la grande majorité des contribuables honnêtes, surtout les salariés qui reçoivent un certificat de salaire, pourraient en profiter si l’on se décidait à supprimer certaines échappatoires bancaires accessibles seulement à une petite minorité de gens très riches. La motion de Margreth Schär « Egalité de traitement pour le fisc bernois! » du 10 septembre 2009 m’a encouragé à poser ces questions une nouvelle fois. Le gouvernement est prêt à recommander l’adoption de cette motion, ce qui montre qu’elle est disposée à bouger. 3 Réponse du Conseil-exécutif Question 1 Cette question reprend en substance la question 3 (1ère phrase) de l’interpellation 169/2007 Hofmann, Berne (PS-JS) «Fraude à l’AI et fraude fiscale» du 7 juin 2007. Le Conseil-exécutif renvoie en l’espèce à sa réponse du 5 décembre 2007 qui, à ses yeux, garde toute sa validité. Les études et opinions citées dans la présente interpellation ne changent rien au jugement exprimé alors. 1 – L’étude de l’année 2008 intitulée «Schattenwirtschaft und Steuermoral» (économie sou- terraine et éthique fiscale [trad.]; ci-après «étude») que mentionne l’auteur de l’interpellation souligne elle-même combien il est difficile d’établir le volume des soustractions d’impôt. D’après elle, toutes les méthodes indiquées souffriraient d’imprécisions spécifiques aux unes et aux autres. Les méthodes directes, comme les sondages et les estimations établies sur la base des soustractions d’impôt découvertes, ne donneraient que des résultats très approximatifs. Il y aurait aussi les méthodes indirectes, qui comparent par exemple le revenu des ménages au revenu cantonal, calculés indépendamment l’un de l’autre (analyse dite des écarts). Mais des erreurs de mesure et d’autres motifs à l’origine de l’écart entre deux agrégats calculés indépendamment l’un de l’autre mettraient aussi les résultats de ces méthodes en doute. Le mérite des analyses de ce type serait moins d’établir le volume des soustractions d’impôt en valeur absolue, que de montrer son évolution dans le temps (page 26 de l’étude). Si les auteurs admettent finalement que les diverses méthodes permettent tout de même à elles toutes de refléter une bonne image de la soustraction d’impôt effective (page 21 de l’étude), ils n’indiquent pas comment ils parviennent à cette conclusion. Aussi le Conseil-exécutif estime-t-il que cette étude ne permet de tirer aucun enseignement concret sur la situation du canton de Berne. – L’auteur de l’interpellation cite ensuite l’étude intitulée «Deterrence and morale in taxa- tion» de l’université de Zurich datant de l’année fiscale 20022, qu’il avait déjà évoquée le 22 janvier 2008 lors des débats sur l’interpellation 169/2007. Cette étude traite du rapport entre éléments dissuasifs (probabilité de la découverte, montant de l’amende) et soustraction d’impôt. Elle évalue le montant des impôts soustraits sur la base de la différence entre le revenu des ménages déclaré aux autorités fiscales et le revenu brut des ménages ressortant de la comptabilité nationale. L’étude elle-même reconnaît que les résultats de cette méthode ne sont pas probants (cf. critique en note de bas de page 2 de l’étude). De l’avis du Conseil-exécutif, les études et opinions citées ne permettent d’établir aucune estimation fiable des soustractions d’impôt non sanctionnées. Seules celles qui ont été découvertes et effectivement sanctionnées permettent de tirer des conclusions fiables. Sur les cinq dernières années, le produit tiré des soustractions d’impôt sanctionnées (rappels d’impôt, amendes et intérêts) s’élevait à environ 7 millions de francs par an en moyenne. Comme les soustractions d’impôt découvertes ne constituent forcément qu’une partie des soustractions d’impôt effectives, le manque à gagner annuel résultant des revenus non déclarés devrait au total se chiffrer en dizaines de millions. Le milliard de francs d’impôts soustraits estimé par l’auteur de l’interpellation est irréaliste. Les mécanismes de contrôle opérant sur les revenus effectivement déclarés dans le canton de Berne montrent en effet que le risque de défaut de déclaration d’autres revenus est limité. 1 Kompaktwissen, Schattenwirtschaft und Steuermoral (Friedrich Schneider, Benno Torgler, Christoph A. Schaltegger, Zurich/Coire 2008), p. 21 ss. 2 Deterrence and morale in taxation (Bruno s. Frey, Lars P. Feld, CESiro Working Paper n° 760, août 2002): http://www.cesifo-group.de/pls/guestci/download/CESifo%20Working%20Papers%202002/CESifo%20Working %20Papers%20August%202002/760.pdf 4 Le tableau ci-après montre que 90 pour cent des revenus déclarés émanent de sources fiables et aisément contrôlables (telles les employeurs, les assureurs, l’Evaluation officielle). Les mécanismes de contrôle existants jouent aussi un rôle dans la limitation du risque de dissimulation d’autres revenus. S’agissant des informations sur les entreprises, il faut en outre souligner que l’Administration fédérale des contributions (AFC), division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), est une instance de contrôle importante, qui est à l’origine de la découverte d’une grande partie des soustractions d’impôt sanctionnées. Principales catégories de revenu Revenus déclarés dans le canton de Berne en mia CHF Part dans le total des revenus Mécanismes de contrôle existants Revenus salariaux (activité professionnelle salariée) 24,4 61 % Les employeurs envoient les certificats de salaire directement à l’ICI. L’ICI contrôle les comptes des employeurs. Rentes (AVS, AI, etc.) 7,6 19 % Revenu tirés de biens immobiliers: Valeur locative et revenus locatifs Revenus d’activité professionnelle indépendante 4,0 10 % 1,9 4,7 % Revenus tirés des biens meubles 1,1 2,7 % Autres (pensions alimentaires, etc.) 1,0 2,6 % Comparaisons croisées entre débiteurs et bénéficiaires des rentes. Signalements des assureurs et de l’AFC. Les valeurs locatives sont fixées d’office, intégralité garantie par le registre foncier. L’ICI exige des comptes annuels conformes au droit commercial. L’ICI (dotée maintenant de 40 experts supplémentaires) contrôle les comptes ; signalements de la division de la TVA. Comparaisons croisées entre les débiteurs et les bénéficiaires des prestations, même dans les relations commerciales avec des particuliers (notamment en matière de travaux déductibles, tel l’entretien immobilier). Impôt anticipé de 35 % servant d’impôt de garantie. Comparaisons croisées entre débiteurs et bénéficiaires des prestations. Comparaison avec l’évolution de fortune et le train de vie. Etablissement d’inventaires en cas de décès. Risque de défaut de déclaration d’autres revenus Faible Faible Faible Faible Faible Faible Le Conseil-exécutif est fermement convaincu qu’il faut combattre la soustraction d’impôt avec détermination en employant toutes les ressources nécessaires. Il l’a réaffirmé dans sa réponse du 25 juin 2008 à la motion 129/2008 PS-JS (Schär-Egger, Lyss) «Lutte contre 5 la soustraction d’impôt» du 10 avril 2008. Mais il a aussi clairement expliqué pourquoi il estime qu’après diverses réorganisations et la création de 40 postes supplémentaires d’expert-e-s au sein de l’Intendance des impôts, le dispositif de contrôle et la dotation en personnel sont maintenant suffisants pour garantir une imposition complète et équitable. Lors des débats parlementaires qui ont suivi, le Directeur des finances de l’époque a également réaffirmé qu’il lui paraissait juste de créer un réseau étroit de mesures visant à lutter contre la soustraction d’impôt, mais que cela ne pouvait pas aller jusqu’à transformer le canton de Berne en un Etat policier et totalitaire. Aux yeux du Conseil-exécutif, il n’y a pas lieu d’engager d’autres actions au niveau cantonal. Il attire l’attention sur les mesures prises ces dernières années par la Confédération et les cantons pour lutter contre le travail au noir et inciter à la déclaration des biens dissimulés aux autorités fiscales. Ces mesures sont elles aussi de nature à limiter la soustraction d’impôt: 3 – Lutte contre le travail au noir: la loi fédérale sur le travail au noir est entrée en vigueur er le 1 janvier 2008. Pour enrayer le travail au noir, cette loi prévoit la perception simplifiée, par la caisse de compensation, des impôts et des cotisations d’assurance sociale d’une part et, de l’autre, un renforcement des contrôles par les autorités et de l’échange d’information entre elles. La perception simplifiée des impôts a été inscrite dans la loi bernoise sur les impôts le 1er janvier 2008. De son côté, l’Intendance des impôts a pris toutes les mesures propres à garantir la communication, la réception et le traitement des informations concernées. – Déclaration de biens dissimulés aux autorités fiscales: la loi fédérale sur la simplification du rappel d’impôt en cas de succession et sur l’introduction de la dénonciation spontanée non punissable4 est entrée en vigueur le 1er janvier 2010. Depuis lors, toute première dénonciation spontanée de l’auteur d’une soustraction d’impôt est considérée comme l’expression de remords, évitant les sanctions pénales à son auteur. L’impunité pénale sur dénonciation spontanée n’est accordée qu’une seule fois dans une vie. Elle n’empêche pas la perception d’un rappel d’impôt et d’intérêts moratoires sur les dix dernières années au plus comme c’est le cas pour toute soustraction d’impôt. De plus, la période sur laquelle peut porter un rappel d’impôt est ramenée à trois périodes fiscales pour les héritiers de l’auteur d’une soustraction d’impôt, au lieu des dix ans ayant précédé le décès que prévoit la réglementation applicable jusqu’en 2009. S’apparentant à une amnistie, ces deux mesures doivent inciter les contribuables à se remettre dans la légalité vis-à-vis de l’administration fiscale en déclarant les biens qu’ils ont dissimulés jusque-là. Agissant par le biais de la Conférence suisse des impôts (CSI), les cantons et l’Administration fédérale des contributions ont bien étoffé le système d’échange d’informations ces dernières années. Grâce au projet informatique «CH-Meldewesen», diverses autorités échangent déjà différents renseignements, qui permettent d’améliorer les dossiers fiscaux et, par là-même, d’éviter toute nouvelle soustraction d’impôt ou de mieux les repérer. Le raccordement de tous les cantons et services fiscaux communaux resserrera les mailles du filet et contribuera, dès la prochaine année de taxation, à une nette amélioration de l’information sur les fortunes et revenus extra-cantonaux. Concernant les revenus des capitaux mobiliers, l’impôt anticipé de 35 pour cent constitue un impôt de garantie fiable, qui enlève tout intérêt à la dissimulation de ces revenus. Pour reprendre ce qui vient d’être dit, le Conseil-exécutif reste convaincu que les trois moyens d’action que sont le dispositif de contrôle existant en matière de taxation, les nouvelles mesures de lutte contre le travail au noir et d’incitation à la déclaration de biens dissimulés que la Confédération a mises en place pour lutter contre la soustraction d’impôt et 3 Loi fédérale du 17 juin 2005 concernant des mesures en matière de lutte contre le travail au noir (loi fédérale sur le travail au noir, LTN ; RS 822.41) 4 Loi fédérale du 20 mars 2008 sur la simplification du rappel d’impôt en cas de succession et sur l’introduction de la dénonciation spontanée non punissable (RO 2008 4453) 6 l’extension des possibilités d’échange d’informations entre administrations fiscales sont suffisants. Question 2 Comme indiqué, il est impossible de répondre à cette question. Question 3 Comme indiqué, il est impossible de répondre à cette question. Au Grand Conseil