Article de Philippe Noisette dans les Inrocks
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Article de Philippe Noisette dans les Inrocks
LES INROCKUPTIBLES SUPPLEMENT Date : N 0/2016 Page de l'article : p.2-5 Journaliste : Philippe Noisette Pays : France Périodicité : Parution Irrégulière Page 1/3 En dix editions, June Events a montre l'étendue des liens entre La danse et la musique, le plus souvent live Tous droits réservés à l'éditeur JUNE 9177208400503 LES INROCKUPTIBLES SUPPLEMENT Pays : France Périodicité : Parution Irrégulière Date : N 0/2016 Page de l'article : p.2-5 Journaliste : Philippe Noisette Page 2/3 "comme une ballade. Nombrer les étoiles est donc une pièce où la danse et la musique sont intrinsèquement liées puisque les deux médiums développent les mêmes structures de composition. Cette pièce est une traversée de/a nuit. "Un voyage dans le temps qui s'écrit Thomas Hauert ose, lui, un raccourci avec inaudible, chorégraphie à écouter (lire encadré ci-contre]. Il réunit George Gershwm et Maurô Lanza dans un même élan en complicité avec l'Ircam "Dans ma tête, c'est plutôt Lanza qui répond à Gershwm, car j'avais d'abord décidé de travailler avec la musique de Gershwm avant de chercher un contraste sonore qui pourrait dialoguer à plusieurs niveaux avec son œuvre aux connotations multiples Les deux musiques mélangent à leur manière des éléments de mondes opposés : Gershwm essaie d'unir des musiques populaires avec de la musique prétendument sérieuse Et Lanza utilise des sources dè son peu prestigieuses /se/on Lanza lui-même 'un univers sonore digne d'un monde à I envers, peuplé de pets, de rots, de crécelles, de couinements de canards en plastique et de trompes de ta plus simple confection'/ dans une composition très sophistiquée. Les deux traitent à leur manière de la problématique Témoin actif, Maud Le Pladec s'est engagée dès des hiérarchies. Des rapports de pouvoir, de prestige", ses premières pièces dans cette voie, imaginant affirme Thomas Hauert. même un cycle autour du collectif américain Bang Au-delà du compagnonnage entre un compositeur On A Can. Trois chorégraphies le composent : Ommous Funk, Democracyet Concrète, soutenu par June Events. et un chorégraphe, la question du live se pose . chacun laborde à sa façon, fort de ses acquis et cles limites "En 2012, j'ai eu envie de travailler sur un courant de cet échange. "J'ai eu des expériences très diverses en peu connu en France •. la musique postmmimaliste travaillant avec des musiciens, raconte Thomas Hauert. américaine. Dans la lignée de la musique mmimaliste, Il y en a qui souhaitent rester dans le rôle du musicien cette école rassemble de nombreux compositeurs qui vient donner un concert sur scène et d'autres dont les oeuvres trouvent leurs références autant dans qui prennent du plaisir à jouer un autre rôle, dans la mise le répertoire de Philip Glass ou de Steve Reich que en scène, dans la dramaturgie. Généralement, dans la musique classique ou encore dans les musiques les habitudes et les besoins concernant des répétitions dites actuelles : pop, rock, jazz, electro. Je me suis alors intéressée aux trois figures tutélaires de ce courant, sont très différents pour une production de danse et pour la préparation d'un concert. En musique, la présence de David Lang, Julia Wolfe et Michael Gordon, qui sont aussi la partition comme point de départ fait sauter une étape les membres fondateurs du collectif Bang On A Can ", qui, pour la plupart des processus de création en danse explique Maud Le Pladec. contemporaine, est fondamentale • le développement du Chaque fois, la chorégraphe fait se télescoper matériel, du contenu en matière de danse. Cette période sa danse et une œuvre musicale, comme france de Michael Gordon dans Concrète. "Au-delà de ma cunnsité d'expérimentation, de recherche, de construction est souvent inhabituelle pour des musiciens. Maîs je croîs que et de mon intérêt pour le courant postm/n/maliste c'est justement ce processus créatif qui attire ceux américain, j'avais envie de créer des ponts entre qui cherchent à collaborer avec la danse. " deux histoires et deux cultures • la danse française Maud Le Pladec - multirécidiviste de ces et la musique contemporaine des Etats-Unis C'est croisements - ajoute : "La musique live est effectivement la raison pour laquelle j'ai imaginé une démarche au long un élément récurrent et constitutif de mon travail. cours, composée d'un cycle de trois pièces et d'une résidence de recherche Un projet capable de se déployer J'ai décidé de faire de la musique, et de la relation qu'elle entretient avec la danse, à la fois l'objet et le sujet de ma sur un temps défiant la nature éphémère et recherche Je travaille depuis sept ans à mettre en corps événementielle d'un spectacle, et pouvant abriter et en scène les œuvres de compositeurs d'aujourd'hui. plusieurs temporalités, donc possibilités de rencontres. " Il me semblait donc essentiel que celles-ci soient interprétées en live. C'est ainsi que la musique trouve son June Events sera riche de ces allers et retours : plein essor au plateau et que les subtilités d'interprétation, du duo Puce Moment/Cercueil avec L'Aveuglement d'orchestration, surgissent et apparaissent aux oreilles de la chorégraphe Mylène Benoit, à I'"enyoûfemenf et aux yeux des spectateurs. La contrainte du live, incluant vénéneux" des mélodies et poèmes de Jaufré Rudel, la présence en nombre de musiciens et des facteurs Thibaut de Champagne et autres ballades médiévales techniques considérables, rn 'incite à imaginer autrement. mises en danse par Alban Richard avec l'ensemble Alla Francesca. Le chorégraphe a composé sa création Je considère la présence des musiciens comme faisant corps avec celle des danseurs, et le live devient un L a liste des collaborations - et des envies?entre chorégraphes et compositeurs est un Bottin mondain où Igor Stravmsky côtoie Vaslav Nijinski, John Cage rencontre Merce Cunningham, Steve Reich s'acoquine avec Anne Teresa De Keersmaeker, pour ne citer qu'une poignée de noms. Les partitions se déploient en accompagnements enregistrés, maîs également en live sur le plateau. Une nouvelle génération de chorégraphes prend la suite, que met en avant June Events avec les invitations répétées à Maud Le Pladec ou Alban Richard. Faisant fi des contraintes techniques (une dizaine de musiciens par exemple pour Concrète de Maud Le Pladec, neuf dans Nombrerles étoiles d'Alban Richard), ces créateurs dialoguent littéralement avec la musique. Certains s'investissent au point de déchiffrer des partitions ou de se lancer dans un processus d'échange intensif avec les compositeurs. En fm de compte, c'est un courant continu qui relie le geste et la note, le mouvement et parfois... le silence. Tous droits réservés à l'éditeur JUNE 9177208400503 LES INROCKUPTIBLES SUPPLEMENT Pays : France Périodicité : Parution Irrégulière Date : N 0/2016 Page de l'article : p.2-5 Journaliste : Philippe Noisette Page 3/3 élément concret, factuel qui rn 'oblige à pousser les interactions entre les différents médiums en présence : danse, musique, espace, lumières et costumes. " Ce dialogue fécond est également un partage avec le spectateur qui se retrouve pris dans un maelstrom de sons, d'images, de mouvements. Et de sens. Thomas Hauert résume assez bien lenjeu : "Jepense que la danse et la musique sont deux incarnations du même désir de l'être humain d'ordonner ('expérience du temps etde l'espace. Hy a quelque chose de très fort, dejouissifet en même temps de très évident dans le lien entre musique et danse, lin grand nombre des partitions de mouvement ont une relation intime avec la musique - soit la musique elle-même, soit la musicalité du mouvement. Un potentiel inépuisable gît dans l'exploration des analogies, des interactions, des différences entre la musique et la danse. Les danseurs s'inspirent à plusieurs niveaux des musiciens - compositeurs et interprètes - aussi bien dans la création que dans l'exécution du mouvement. Je parle souvent en termes musicaux pour parler du mouvement. " Philippe Noisette id danse et la musique sont deux incarnations du même désir de l'être humain d'ordonner lexpérience du temps et de l'espace" Thomas Hauen Nombrer les étoiles chorégraphie Alban Richard le 7jum à 21 h, Théâtre de l'Aquarium, Paris XIIe L'Aveuglement chorégraphie Mylène Benoit, le 9 juin à 19h30, CDC Atelier de Paris, Paris XII" Concrète chorégraphie Maud Le Pladec, le 14 juin à 21 h, Théâtre de l'Aquarium, Paris XIIe. Soirée Adam! Tous droits réservés à l'éditeur JUNE 9177208400503