fiche pedagogique virtuelle l`indivision

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Fiche à jour au 11 décembre 2010
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Matière : Droit des biens
Web-tuteur : Béatrice Kan-Balivet
L’IINNDDIIVVIISSIIO
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I. ENONCE
2 II. 3 PROPOSITION DE CORRECTION
Date de création du document : année universitaire 2008/09
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I.
Enoncé
Juliette vient de perdre son père dans un accident de la circulation. Il a
laissé l’ensemble de ses biens à elle, son frère, Vincent, et sa sœur,
Noémie.
Noémie et Juliette souhaitent procéder à la vente de l’appartement, mais
Vincent, attaché à ce lieu de leur enfance, s’y oppose.
Elles sont surprises par le comportement de leur frère, lequel s’est déjà
installé dans l’appartement et n’entend pas leur verser un quelconque
loyer. Il a entrepris par ailleurs certains travaux sans demander l’avis des
sœurs. Ses travaux étant liés à un effort qu’il est le seul à avoir fourni,
Vincent entend être le seul à pouvoir bénéficier de la plus-value apportée
au bien en question.
Qu’en pensez-vous ?
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II. Proposition de correction
Juliette, Noémie et Vincent sont devenus propriétaires indivis des biens
de leur père, à son décès.
1) Les deux sœurs souhaitent vendre l’appartement, mais Vincent y est
opposé.
Il faudra s’interroger sur la faisabilité de la vente d’un bien indivis en cas
d’opposition de l’un des trois indivisaires.
Les règles de majorité en matière d’indivision dépendent de la nature de
l’acte. Les articles 815-2 et 815-3 du Code civil opèrent une distinction entre les
actes conservatoires qui peuvent être pris seul par un indivisaire, les actes de
gestion courante qui peuvent être pris par le ou les indivisaires titulaires d’au
moins deux tiers des droits indivis et les actes excédant l’exploitation normale des
biens indivis, qui doivent être pris à l’unanimité.
La vente d’un bien immobilier est un acte de disposition. Il nécessite donc un
accord de tous les indivisaires.
L’appartement ne peut donc pas être vendu sans l’accord de Vincent.
Néanmoins plusieurs possibilités restent envisageables.
D’abord, il faut vérifier s’il n’est pas possible de suppléer le désaccord de
Vincent par voie judiciaire. En effet, aux termes de l’article 815-5 du Code civil,
un indivisaire peut être autorisé judiciairement à passer outre le refus d’un
indivisaire, si un tel refus met en péril l’intérêt commun. Tel peut être le cas si la
vente du bien indivis est nécessaire au paiement des droits de succession (Civ.1re,
14 février 1984). Des informations complémentaires seront donc nécessaires pour
déterminer quelle est la cause de la vente.
Ensuite, si une autorisation judiciaire ne peut être obtenue, les indivisaires
peuvent, comme tout propriétaire, vendre leur bien. La vente du bien indivis ne
sera opposable aux autres indivisaires qu’à concurrence de la quote-part de son
auteur. En effet, la première chambre civile de la Cour de cassation a pu juger que
chaque indivisaire peut valablement disposer de sa quote-part de droits sur un
bien indivis. Nul ne pouvant être contraint à demeurer dans l’indivision, aux
termes de l’article 815 du Code civil, le frère ne pourrait pas s’opposer à ce que
les deux sœurs vendent le bien dans la limite précitée, sauf s’il est sursis au
partage par jugement ou convention.
Il faut néanmoins souligner que si les deux sœurs recourent à cette
solution, elles auront l’obligation de proposer à leur frère en priorité la vente du
bien. En vertu de l’article 815-14 du Code civil, les indivisaires bénéficient en
effet d’un droit de préemption.
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Juliette et Noémie peuvent ainsi sortir de l’indivision, mais elles seront
contraintes de proposer la cession à leur frère en priorité.
2) Par ailleurs, Vincent occupe l’appartement sans vouloir verser de
loyer.
Il faut s’interroger sur la légitimité de la jouissance de Vincent et sur l’absence de
contrepartie.
Aux termes de l’article 815-9 du Code civil, « chaque indivisaire peut user
et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure
compatible avec le droit des autres indivisaires (…) ». Aussi chacun peut-il jouir
du bien, en sa qualité de propriétaire, dans le respect des droits des autres
indivisaires. Vincent peut donc jouir du bien, mais il ne peut le faire en excluant
ses sœurs. Il faut donc procéder à une distinction.
Si la jouissance de Vincent ne porte pas atteinte à la jouissance du bien par
les deux sœurs, aucune contrepartie ne sera due par Vincent (Civ. 1re, 13 janvier
1998).
Si la jouissance de Vincent porte au contraire atteinte à la jouissance des
deux sœurs, il résulte d’un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour
de cassation du 15 avril 1980, que les indivisaires privés de la jouissance du bien
peuvent demander à faire cesser tout acte accompli par un indivisaire en
contradiction à leur propre droit. Quoi qu’il en soit, dans une telle hypothèse,
l’indivisaire qui jouit privativement du bien, est redevable d’une indemnité
d’occupation et non pas d’un loyer. Le loyer est en effet propre au contrat de bail.
Or l’indivisaire n’est pas un preneur à bail, mais un propriétaire. Il doit
l’indemnité jusqu’au jour du partage. Les indivisaires peuvent néanmoins l’en
dispenser, mais tel ne semble pas être le cas.
Si les indivisaires ne se mettent pas d’accord sur le montant de
l’indemnité, les juges du fond en déterminent le montant souverainement (Civ.1re,
30 juin 1987).
Il est donc probable, sous réserve d’un complément d’information, que Vincent
soit redevable d’une indemnité d’occupation.
3) Enfin, il entend bénéficier seul de la plus-value résultant des travaux
qu’il a lui-même effectués.
Les plus-values sont attachées à la propriété des biens. Elles bénéficient
donc à l’indivision. Ainsi la Cour de cassation a considéré, dans un arrêt de la
première chambre civile du 29 mai 1996, que la plus-value résultant de la gestion
d’un fonds de commerce par l’un des indivisaires, dans le cadre d’une indivision
post-communautaire, accroît à l’indivision. Dans une telle hypothèse, l’activité du
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gérant ne peut être assimilée à une dépense d’amélioration. Le gérant peut
seulement avoir droit à une rémunération pour l’activité déployée.
Il en va autrement s’il s’agit de travaux d’amélioration. En effet, aux
termes de l’article 815-13 du Code civil, « lorsque l’un des indivisaires a amélioré
à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu
égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de
l’aliénation du bien ». Il est à souligner que lorsque l’indivisaire jouit
privativement du bien et qu’il est redevable d’une indemnité d’occupation, cette
indemnité se compense avec l’indemnité dont il peut bénéficier en cas de travaux
d’amélioration (Civ.1re, 27 octobre 1992).
Il résulte, en outre, d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de
cassation du 13 décembre 1994, que l’indivisaire peut être privé d’indemnisation,
s’il n’est pas justifié de l’utilité des dépenses.
Un complément d’information devra donc être demandé pour déterminer
si Vincent aura droit à une plus-value.