Essais de valorisation des margines par épandage en oliveraies". M

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Essais de valorisation des margines par épandage en oliveraies". M
Revue Ezzaitouna 9 (1 et 2), 2003
ESSAIS DE VALORISATION DES MARGINES PAR
EPANDAGE EN OLIVERAIES
M. ABICHOU*, B. BEN ROUINA*, H. TAAMALLAH** et K. GARGOURI*
Résumé :
L’épandage des margines dans les sols sableux profonds du Sud
tunisien constitue une alternative intéressante pour l’évacuation contrôlée et
rationnelle de cet effluent polluant. Des apports de 50 à 100 m3 par hectare
durant six années successives ont permis une nette amélioration de la
fertilité du sol. Ses teneurs en matière organique, azote et potassium sont
augmentées. Le contenu du sol en phosphate et son pH restent inchangés.
L’accroissement de la teneur de la matière organique de 0,3% à 1% s’est
accompagné d’une amélioration de la capacité de rétention en eau du sol
sableux perméable. Grâce à ses effets à la fois liants et hydrophobes, la
margine a rendu le sol pulvérulent plus stable et a favorisé la création d’un
mulch empêchant l’évaporation de l’eau. Suite à ces améliorations de la
fertilité du sol et de ses caractéristiques physiques (perméabilité, rétention),
la croissance et la fructification des arbres sont nettement augmentées.
Mots clés : Margine, épandage, sol sableux, fertilité, olivier.
------------------------------------------------------------------------------------------THE USE OF OLIVE OIL WASTEWATER AS
AGRICULTURE’S FERTILISER
Abstract :
The spray of the olive oil wastewater (margine) in the deep sandy soil of the
Southern Tunisia constitutes an interesting alternative for the rational evacuation
of this sewage. A supply of 50 to 100 m3 per hectare during six successive years
had permitted a marked improvement of the soil fertility. Its contents of organic
matter, nitrogen and potassium are increased. Phosphate and pH remains stable.
Increasing from 0,3 % to 1%, the organic matter caused an improvement of the
retention capacity and water permeability of the sandy soil. Because of it’s
binding and hydrophobic effects, the margine made soil more stable and created
mulch preventing water evaporation. The growth and the yield of the trees are
highly increased resulting of soil fertility and its physical characteristics
improvement.
Key words : Margine, spray, sandy soil, fertility, olive tree.
------------------------------------------------------------------------------------------*Institut de l’Olivier, Sfax, Tunisie
** Institut des Régions Arides, Mednine, Tunisie
Collaboration technique : M. Yousfi, A. Jribi, J. Ben Khalifa, L. Labiadh et A. Melian.
1
I. Introduction
Les margines sont les effluents liquides des huileries, obtenues après
trituration des olives. Avec les procédés classiques d’extraction, la
transformation d’une tonne d’olives engendre la production de 450 litres de
margines. Avec le système continu à 3 phases, cette production varie entre
800 et 1200 litres. Ainsi, partant d’une production annuelle moyenne
d’olives de l’ordre de 850.000 durant la décennie 1990 – 2000, on peut
estimer que celle des margines serait d’environ 550. 000 tonnes par an dont
40 % proviennent du système à pression et 60 % du système continu.
Ces margines sont caractérisées par :
- Une production saisonnière échelonnée sur 2 à 5 mois par
campagne, selon l’importance des productions d’olives.
- Une charge importante en matières organique et minérale : le
résidu sec à 105 °C varie de 5 à 17 % du poids frais du produit selon les
systèmes d’extraction.
- Un pouvoir polluant équivalent à la charge des rejets issus d’une
population de 2,5 millions d’habitants pour chaque jour de la campagne qui
dure en moyenne 100 jours par an (MEAT, 1996). En Italie, Amirante
(1999), estime que la transformation d'une tonne d'olives engendre 36 kg de
DBO5, correspondant à la charge journalière de 650 habitants avec un
facteur de correspondance de 0,055 kg DBO5 / habitant.
En raison de sa forte charge en matières organiques et minérales
interdisant son traitement comme une eau usée domestique ou industrielle
dans les stations d'assainissement urbain, cet effluent est acheminé vers des
bassins de collecte aménagés à cette fin, où il est séché par évaporation
naturelle. Ainsi, le déversement illicite et non contrôlé des margines dans la
nature peut présenter des risques potentiels de pollution de l'environnement.
Pour se débarrasser des nuisances causées par cet effluent, de
nombreuses recherches sont développées dans différents pays producteurs.
Elles ont pour objectifs d'éliminer les risques de pollution dans une
première phase et de valoriser cet effluent en deuxième lieu. Les
recherches développées ont emprunté deux voies :
- L’utilisation de ce produit comme fertilisant en agriculture
(Fiestas de Ursinos 1981 ; Garcia Ortiz et al.,1995 - 1999 ;
Morisot et Tournier, 1986 ; Levi Menzi et al., 1992 ; Bricoli Bati &
Lombardo, 1990 ; De Montpezat et Denis, 1999 ; Ben Rouina, 1994, 1999 ;
Abichou, 2003).
- La production de bio-gaz et de produits d’intérêts spéciaux par
l'extraction d’antioxydants, d’enzymes pectinolytiques, de protéines et la
production d’organismes unicellulaires (Balice et al., 1985 ; Carrieri et al.,
1988 ; Salvemini, 1985 ; Sayadi et Ellouz 1993 - 1995 ; Hamdi, 1991 ;
Hamdi et al. 1991).
2
Concernant l'utilisation des margines pour la fertilisation, les
premiers travaux remontent à la fin des années 50 quand Albi et
Fiestas de Ursinos (1960) signalent que l'apport de margine entraîne
l'enrichissement du sol en matières organique et minérale et l'amélioration
du rendement de la culture.
Toutefois, les résultats se rapportant à cet usage sont controversés
puisque certains auteurs signalent un effet dépressif suite à l'acidification,
la salification et à l'immobilisation de l'azote dans le sol
(Fiestas de Ursinos, 1981 ; Morisot et Tournier, 1986). D'autres auteurs ont
signalé la richesse de cet effluent en matière organique difficilement
biodégradable (Catalano et al., 1986), ainsi que son effet inhibiteur de la
croissance des végétaux, lié à la présence de composés phénoliques
(Cabrera et al., 1997 ; Balice et al., 1985).
En revanche, de nombreux auteurs signalent aussi un effet fertilisant
certain des margines dû à leur concentration élevée en potassium et à
moindre degré en azote (Albi et Fiestas de Ursinos, 1960 ; Catalano et al.,
1986 ; Ammar et Ben Rouina, 1999 ; De Montpezat et Denis, 1999) et en
matière organique (Garcia-Ortiz et Ruiz, 1995 ; Fiestas de Ursinos, 1981 ;
Ben Rouina, 1999 ; Ben Rouina et Ammar, 1999 ; De Montpezat et Denis,
1999). De ce fait ces auteurs pensent qu'elles peuvent être utilisées comme
amendement naturel des sols.
Ainsi en Andalousie, en utilisant des quantités allant jusqu'à 300
litres de margine par m² (soit 3000 m3 / ha), d'une façon continue pendant
10 ans dans les mêmes parcelles cultivées en maïs, Garcia - Ortiz et al.
(1995) obtiennent un excellent effet fertilisant et des productions deux fois
supérieures à celles données par le témoin sans margine. En effet, la
moyenne des productions de 5 ans est passée de 3749 kg / ha pour le témoin
à 8337 kg avec la dose de 200 l / m² et 7936 kg avec la dose de 300 l / m²
(effluent titrant 6,6 % de résidu sec à 105 °C).
En France, les travaux de De Monpezat et Denis (1999) montrent
qu’un apport de 333 m3 de margine par hectare dans une oliveraie plantée
sur un colluvion non lessivé, d’origine cryoclastique, graveleux, calcaire
avec 10 % d’argile, enrichit le sol. En effet, cet apport accroît la teneur du
sol en matière organique de 1 %, puisque celle-ci passe de 1,65 % à 2,93 %
après un mois et 2,25 % cinq ans plus tard. Dans cette même étude, la
teneur du sol en azote reste inchangée (N total 0,12 % avant épandage,
0,112 % un mois plus tard et 0,116 % après cinq ans). Cependant ces deux
auteurs concluent qu’en dépit d’un enrichissement durable du sol en
matière organique et de l’absence de déséquilibre au niveau des éléments
fertilisants, un apport excessif de margine présente des risques de pollution
certains en nitrates.
3
D'un point de vue pratique, seule l'Italie semble avoir mis en place
une série de réglementations concernant l’épandage de cet effluent sur les
sols agricoles ; puisque la loi n° 574 du 11 novembre 1996, autorise
l'utilisation agronomique des margines à concurrence de 50 m3 par hectare
et par an pour les effluents issus du système à pression et 80 m3 / ha / an
pour ceux issus du système continu (Tamburino et al., 1999).
En Tunisie, les premières tentatives de valorisation des margines en
agriculture remontent à 1986 (Ben Rouina, 1994 ; Ben Rouina et Jardak,
2000), mais en raison des difficultés matérielles rencontrées, le programme
fût arrêté l'année même pour ne reprendre qu'en 1994.
Dès son démarrage en 1994/95, ce programme a associé 3 équipes
de recherche appartenant à l’Institut de l’Olivier (en matière d’agronomie et
des sciences du sol), à l’Institut des Régions Arides (en matière des
sciences du sol) et à l’Ecole Nationale des Ingénieurs de Sfax (LARSEN,
en matière de biologie et de traitement des margines). En 1999, l'équipe du
LARSEN a cédé place à une autre équipe du Centre de Biotechnologies de
Sfax (CBS).
II. Matériel et méthodes
A. Description du site d’expérimentation
L’expérimentation a été réalisée dans quatre parcelles d’un hectare
de surface chacune, plantées d'oliviers âgés de 80 ans et situées à la ferme
Hachichina de l’Agro-combinat du Chaâl (60 km au Sud Ouest de Sfax,
latitude Nord 34° 3’, longitude Est 10° 20’) sous une pluviométrie annuelle
moyenne de 200 mm.
L’expérimentation a démarré en décembre 1994. Les épandages sont
faits systématiquement tous les ans en une seule fois au moment de la
période de repos végétatif entre décembre et février. La margine fraîche est
prélevée directement dans les bassins d'entreposage et est constituée d'un
mélange de margine de la chaîne continue et de celle issue des super presses (étant donné que l’agro-combinat dispose des deux systèmes
d’extraction qui déversent leurs effluents dans les mêmes bassins).
Les parcelles traitées à différentes doses sont séparées l’une de
l’autre par deux rangées d’arbres sans margines (48 mètres). Pour suivre et
évaluer l’impact de l’épandage des margines sur les caractéristiques du sol
et la croissance de l’olivier, ces parcelles font l’objet de contrôles réguliers
se rapportant à :
- La détermination de la composition chimique des margines sur des
échantillons prélevés durant l'épandage et stockés au réfrigérateur à 5 °C.
4
- L’enregistrement des températures et des précipitations dans la
station du Chaâl appartenant au réseau de l’Institut National de
Météorologie, située à 1,5 km de la parcelle expérimentale.
- L'analyse des caractéristiques physiques et chimiques du sol sur une
profondeur dépassant les 2 mètres pour les différents traitements. Ces
analyses sont réalisées juste avant le démarrage de l'épandage et 3 mois
suivant son application. A chaque fois 17 échantillons sont prélevés et
analysés séparément à raison d’un échantillon par arbre (densité de
plantation de 17 oliviers / ha). Ces analyses intéressent : la matière
organique, le pH du sol, la conductivité électrique, l’azote, le phosphore, le
potassium, le calcium, le sodium et le magnésium.
- Le suivi annuel de la croissance végétative et de la fructification de
la totalité des arbres.
B. Conditions d’épandage des margines
Transportée au champ dans une citerne vide fosse actionnée par la
prise de force du tracteur, la margine est épandue sur le sol, durant la
période hivernale, par aspersion aux doses respectives de 50, 100 et
200 m3 / ha à côté d'un témoin sans margine (Fig. 1).
Caractérisé par une texture sableuse sur une profondeur qui dépasse
3 mètres, le sol est bien filtrant avec une faculté notoire de lessivage.
Comme la plupart des terrains isohumiques de la région, ce sol est très
pauvre en matière organique (MO < 0,3 %). Son pH est franchement
basique (pH compris entre 8 et 8,5) et sa conductivité électrique est très
faible (0,8 à 1,2 mS / cm).
Vue de la parcelle au moment de l’épandage des margines
5
Vue des parcelles immédiatement après l’épandage des margines (au fond
la parcelle ayant reçu 200 m3/ha et au premier plan, celle recevant 100 m3).
Vue d’un arbre juste après l’épandage des margines.
Fig. 1 : Vue de l’opération d’épandage et de l’aspect du sol juste avant le
recouvrement de l’effluent par le travail du sol.
C. Méthodes d’analyse chimique
1. Analyses physico-chimiques des margines
La teneur en eau :
L’échantillon de margine est pesé puis séché à l’étuve à 105°C jusqu'à
constance du poids. Après refroidissement dans un dessiccateur il est de
nouveau pesé. La détermination de la teneur d’eau est faite par différence
entre le poids frais du sol et le poids sec (Pauwels & al, 1992).
6
La matière organique :
L’échantillon sec de margine est calciné dans un four à moufle à
450°C. Après refroidissement dans un dessiccateur il est pesé. Se basant sur
l’hypothèse que les cendres récupérées sont constitués à 100 % de matière
minérale, la détermination de la teneur de matière organique est faite par
différence entre le poids sec et le poids après calcination (Pauwels & al,
1992).
L’azote total :
La teneur de la margine en azote total se fait par la méthode de
Kjeldahl qui consiste en une minéralisation de l’échantillon à chaud avec un
mélange d’acide sulfurique concentré et d’acide salicylique. Après ajout de
la soude sur le produit de la minéralisation qui libère l’azote sous forme
d’ammoniac, celui-ci est entraîné à la vapeur et piégé dans l’acide borique
puis titré avec l’acide chlorhydrique (Pauwels & al, 1992).
Le potassium, le calcium, le sodium et le magnésium :
Après calcination des margines à 450°C et dissolution des cendres
dans l’acide nitrique, la détermination de la teneur en potassium et en
sodium s’effectue par spectrophotométrie à flamme. Tandis que celle en
calcium et en magnésium se fait par spectrophotométrie à absorption
atomique (Pauwels & al, 1992).
Le phosphore :
Après calcination des margines et dissolution des cendres dans
l’acide nitrique la teneur en phosphore est déterminée par la méthode
d’Olsen (Pauwels & al., 1992).
Le pH et la conductivité électrique :
Le pH et la conductivité électrique sont directement mesurés sur la
margine fraîche par un pH mètre et un conductimètre.
2. Analyses du sol
Le pH :
Une suspension de sol est préparée avec un rapport 1/2,5
(10 g de sol dans 25 ml d’eau distillée). Après équilibre pendant 16 heures,
le pH est déterminé à l’aide d’un pH mètre (Pauwels & al., 1992).
La conductivité électrique :
La mesure de la conductivité électrique se fait sur l’extrait de la pâte
saturée du sol. Cet extrait est préparé en introduisant dans un récipient
200 g de terre auxquels est ajoutée l’eau distillée. Le mélange terre - eau est
malaxé jusqu'à l’obtention de la pâte saturée. Après un repos d’environ
quatre heures, une centrifugation est effectuée pour récupérer l’extrait de la
pâte saturée sur lequel est mesurée la conductivité électrique à l’aide d’un
conductimètre (Pauwels & al, 1992).
7
L’azote total :
La méthode utilisée est celle décrite pour les margines.
La matière organique :
La teneur en matière organique est déterminée selon la méthode de
Walkely et Black qui consiste au dosage du carbone après son oxydation à
froid par le bichromate de potassium (K2Cr2O72-) en milieu acide. L’excès
de bichromate de potassium est titré par le sulfate ferreux (Fe SO4 7H2O).
Le pourcentage de carbone représente 58 % de la matière organique
(Pauwels & a.l, 1992).
Le dosage du phosphore assimilable :
Le phosphore assimilable est déterminé par la méthode d’Olsen
modifiée. Il s’agit d’une extraction du phosphore par le bicarbonate de
sodium 0,5N avec un rapport sol / solution de 1/20. Après complexion avec
le molybdate d’ammonium une coloration bleue est obtenue. L’intensité de
cette coloration est mesurée par colorimétrie à 580 nm (Pauwels & al.,
1992).
Le potassium, le sodium, le calcium et le magnésium assimilables :
L’extraction de ces éléments du sol est effectuée avec l’acétate
d’ammonium (CH3CO2NH4) avec un rapport sol/solution égal à 1/20. Le
dosage du sodium et du potassium se fait par spectrophotométrie à flamme.
Tandis que celui du calcium et du magnésium s’effectue par
spectrophotométrie d’absorption atomique (Pauwels & al., 1992).
III. Résultats et discussions
A. Caractéristiques climatiques et édaphiques du site
d’expérimentation d’épandage
L’expérimentation a été installée dans la région sud de Sfax au
domaine de l’agrocombinat du Chaâl situé à 53 Km de Sfax sur la route
menant à Gabès. Appartenant à l’étage aride supérieur, la zone d’étude
reçoit des précipitations annuelles de 181 mm (moyenne 1923 - 2000). La
moyenne pluviométrique des six années d’épandage est de 196 mm / an.
Les précipitations sont caractérisées par une irrégularité interannuelle considérable, puisque les écarts entre deux années successives
peuvent être de 10 fois (36,5 mm en 1995 et 362 mm en 1996). En plus, une
irrégularité intersaison au sein de la même année est à mentionner. Par
année, le nombre moyen de mois secs est supérieur à 5 et peut atteindre
9 mois (cas de l’année 1998 où la pluviométrie annuelle est de 191 mm
dont 125 mm pour le seul mois de septembre).
8
En plus du déficit hydrique, la zone d’étude se caractérise par un
climat chaud à hiver doux. Les températures minimales moyennes
enregistrées au cours des mois de janvier et de février sont respectivement
de 4,7 et 5,8 °C. Les maximales moyennes atteignent plus de 34°C en
Juillet – Août (Tableau I).
Tableau I : Données climatiques du site d’étude.
Mois
Sept.
Précipitations (mm) 20,2
Températures min. 20,5
moyennes (°C)
Températures max. 28,1
moyennes (°C)
Temp.
moyennes 24,3
mensuelles (°C)
Oct. Nov Déc. Janv. Fév. mars Avr. mai Juin Jllet Août
37,7 20,6 18,7 19,6 14,9 19,5 13,6 8,2 4,2 0,7 3,3
14,7 10,7 7,5
4,7
5,8
8,5 14,0 15,7 19,3 19,8 20,5
25,4
22,0 19,2
16,9
18,8
20,4
25,3
25,9 33,0 34,0 34,3
20,2
16,3 13,3
10,8
12,8
14,5
16,9
20,2 24,7 26,9 27,4
Etant situé dans un bas fond, le sol de la parcelle siège des
expérimentations, est très profond. De texture sableuse en surface et sabloargileuse en profondeur (10 % d'argile à partir de 1,25 m), il présente des
teneurs relativement élevées en calcaire actif (2,5% en surface et 6 % à
2 m) et très faibles en gypse (Tableau II). Les diverses strates du sol sont
colonisées de racines et de débris de racines qui descendent au-delà de 3 m
de profondeur à la recherche de l’eau du sol en périodes sèches.
Tableau II : Granulométrie et caractérisation chimique des différents
horizons du sol.
Profondeur
Granulométrie (en %)
Densité Calcaire ( en %)
De l'horizon A* L STF SF
SG
Total Actif
0 - 20
4,7 1,3 4,1 78,5 11,4
1,62
4,3
2,5
20 - 115
3,5 1,1 3,8 87,9 3,7
1,65
8,3
2,5
115 - 125
8,3 4,1 6,2 78,1 3,8
1,61
6,5
2,0
125 - 185 10,3 5,7 1,9 78,3 3,8
1,60 10,8
5,0
185 - 235 10,8 4,4 2,5 78,5
3,9
1,58 10,8
6,0
A* = argile, L = limon, STF, SF et SG = sable très fin, fin et grossier.
Gypse
(en %)
0,14
0,29
0,44
0,17
0,08
B. Caractéristiques chimiques des margines utilisées
Les margines utilisées durant toute la période de l’expérimentation
contiennent des quantités appréciables d’éléments organiques et minéraux
pouvant remplacer une partie des nutriments apportés par la fertilisation
classique (tableaux III et IV).
En effet, cet effluent est très riche en substances organiques
(107 g/litre) composées essentiellement de sucres (15 g /litre), de protéines
(12 g/l), des phénols (6 g/l) et de matière grasse (4,5 g/l). Cette richesse en
matières organiques explique les demandes chimiques et biologiques en
oxygène relativement élevées (DCO = 105 g/l et DBO5 = 55 g/l).
9
En outre, à l'état frais, cet effluent se caractérise par un contenu élevé
en matière minérale (13,7 g/l), composée essentiellement de potassium
(7,5 g/l), de sodium (1,31 g/l), d'azote (0,74 g/l), de calcium (0,71 g/l), de
magnésium (0,65 g/l), de chlorures (0,56 g/l) et de phosphates (0,40 g/l). De
plus, la margine à une conductivité électrique élevée (18,6 mS/cm à 25 °C)
et un ph acide (5,5).
Tableau III : Composition chimique des margines utilisées
(valeurs moyennes calculées sur cinq ans).
Caractéristiques
Valeurs
Humidité (%)
87,9
5,5
pH eau
CE (mS/cm)
DCO (g/l)
DBO5 (g/l)
Matière organique (g/l)
Sucres réducteurs (g/l)
Glucose (g/l)
Phénols (g/l)
Matière grasse (g/l)
Matière minérale (g/l)
Azote (g/l)
Phosphates (g/l)
Potassium (g/l)
Magnésium (g/l)
Sodium (g/l)
Calcium (g/l)
Chlorures (g/l)
Chlore actif
Sulfures
18,6
105,0
55,0
107,0
11,4
3,9
5,8
4,5
13,7
1,4
0,32
7,5
0,65
1,31
0,71
0,56
Absent
Absents
Les données consignées dans le tableau IV montrent que selon la
dose appliquée, la margine apporte au sol : 6 à 24 tonnes / an de matière
organique, 37 à 148 Kg d’azote, 16 à 64 Kg de phosphore et 375 à 1500 Kg
de potassium/an/ha.
10
Tableau IV : Résidus secs, matière organique, matières minérales
totales et NPK apportés par la margine en fonction de la dose
d'épandage (en kg par hectare).
Doses
Solides totaux
105°C (kg)
MO
(kg)
Matières
Minérales (kg)
N
(kg)
P
(kg)
K
(kg)
50 m3
6 035
5 350
685
37
16
375
100 m3
12070
10 700
1370
74
32
750
200 m3
24 140
21 400
2740
148
64
1 500
C. Effet de l'épandage des margines sur la fertilité du sol
Les données collectées dans les divers traitements et consignées
dans le tableau V montrent que le sol s’est enrichi d’une manière notable en
matière organique et en potassium. Cependant, ses teneurs d’azote et de
phosphore n’ont pas été significativement modifiées.
Tableau V : Composition chimique du sol traité à la margine après
1 an et 6 ans consécutifs en comparaison avec la situation initiale
avant l'application des effluents.
Traitement
Témoin
50 m3
100 m3
200 m3
Temps
pH
Initial
6 ans
Initial
6 ans
Initial
6 ans
Initial
6 ans
8,0
7,6
8,1
7,7
8,3
7,7
8,4
8,4
CE
mS / cm
1,1
0,7
1,2
1,9
1,4
4,1
0,8
4,5
MO
%
0,17
0,06
0,10
0,41
0,10
0,71
0,05
1,27
N
ppm
176
130
187
123
155
275
180
280
P
ppm
42
47,0
42
54,8
35
51,0
42
48,4
K assim.
ppm
130
132
151
790
72
880
113
1500
C total
ppm
986
348
580
2378
580
4118
290
7366
1. Effet sur le pH
Le suivi régulier au fil des ans de l'évolution des caractéristiques
physiques et chimiques du sol des différents traitements ne fait pas
apparaître d'effets notables sur le pH du sol consécutifs à l'usage annuel des
margines (tableau V). En effet, malgré le pH acide des margines (5,5),
l'épandage répétitif de cet effluent laisse inchangé le pH du sol
(proche de 8) quelle que soit la dose. Ceci pourrait découler du pouvoir
tampon élevé des sols du Sud tunisien riches en calcaire actif (25 à 60 %0
selon la profondeur de l’horizon) et de l’ammonification intense par la
microflore résultant d’une augmentation notable des teneurs en matière
organique en présence de conditions climatiques favorables (humidité et
températures du sol).
11
2. Effet sur la conductivité électrique
Malgré le contenu relativement élevé de la margine en éléments
minéraux (13,7 g/litre), la forte perméabilité des sols sableux et le lessivage
important qui en découle semblent empêcher la conductivité électrique
d'augmenter d'une manière menaçante (tableau V). Les valeurs enregistrées
après 6 années d'apports successifs, évoluent peu aux doses 50 m3/ha
(CE = 1,9 mS/cm). Avec les doses élevées (100 et 200 m3/ha), ces valeurs
initialement de1,4 et 0,8 mS/cm atteignent respectivement 4,1 mS/cm et
4,5 mS/cm.
Comparées à une parcelle d’oliviers plantés sur un sol sableux
d’alluvion, irriguée au goutte à goutte à la dose de 600 mm / an avec une
eau saumâtre titrant 6,5 g de résidu sec (verger expérimental de l’Institut de
l’Olivier) dont la conductivité électrique du sol oscille au cours des saisons
entre 4 et 8 mS/cm, les valeurs induites par les margines aux doses élevées
de 100 et 200 m3/ha restent acceptables et ne présentent pas de danger
immédiats de salification du terrain.
3. Effet sur le taux de matière organique
Riche en substances organiques (107 kg / m3), la margine apportée
améliore d’une façon immédiate le contenu du sol en cette matière. Les
valeurs observées trois mois après épandage, régressent légèrement à la fin
de l’année. Cela pourrait résulter d’un début de minéralisation de ces
substances sous l’action des micro-organismes du sol en présence
d’humidité satisfaisante et de températures favorables.
Après le premier épandage, le taux de matière organique
initialement très faible (0,05 à 0,17 %) se trouve au moins triplé pour les
différents traitements. Ses valeurs sont passées de 0,10 à 0,28 % avec la
dose de 50 m3, de 0,10 à 0,31 % à la dose de 100 m3 et de 0,05 à 0,56 %
avec la dose de 200 m3.
Après six épandages successifs, ces taux deviennent respectivement
de : 0,41 %, 0,71 % et 1,27 % pour les doses de 50, 100 et 200 m3 / ha. Cet
enrichissement notable du sol en composés organiques induit des
améliorations de la fertilité et de la capacité de rétention de l’eau du sol, de
l’activité des micro-organismes et par voie de conséquence de la croissance
et de la fructification des arbres.
L’augmentation des taux de matière organique dans le sol est
proportionnelle à la dose appliquée. Les différences observées pourraient
être attribuées à la cinétique de minéralisation de la matière organique
dépendant de l’importance des micro-organismes dans le sol traité (nombre
et qualité). Ces résultats sont analogues à ceux de Cabrera et al. (1996) qui
mentionnent que l’apport annuel sur un sol sableux contenant initialement
0,45 % de MO de 37 ou de 61 l / m² de margines pendant trois années de
suite, engendre un accroissement de la matière organique (1,62 % et 1,98 %
respectivement).
12
4. Effet sur les teneurs en K
Eu égard au contenu élevé des margines en potassium (7,5 kg / m3,
soit un apport de 1500 kg/ha/an avec la dose de 200 m3), la teneur de cet
élément dans le sol a évolué d’une manière significative mais sans risque
réel de pollution par salification du sol. Après six apports successifs, la
teneur de K assimilable passe de 130 ppm dans la parcelle témoin à 790 et
880 ppm dans les parcelles ayant reçu les doses de 50 m3 et de 100 m3
respectivement et 1500 ppm pour la dose la plus élevée.
Comparés aux résultats rapportés par Cabrera et al. (1997) selon
lequel la teneur initiale de 1,3 mmol/kg de potassium échangeable passe à
des valeurs respectives de 53,3 et 60 mmol/kg selon que la dose est 37,3 ou
61 l/m², nos valeurs restent faibles et ne paraissent pas affecter les qualités
agronomiques du sol, probablement en raison des facilités de lessivage des
éléments minéraux dans un sol sableux filtrant.
5. Effet sur les teneurs en N et P
Après 6 épandages annuels et réguliers de quantités allant de 50 à
3
200 m d’un effluent contenant en moyenne 1,4 kg d’azote total par mètre
cube et 0,32 kg de phosphate, les teneurs du sol en ces deux éléments n’ont
pas augmenté de manière significative.
D'une valeur initiale oscillant entre 155 et 180 ppm d’azote total par
kilogramme de sol dans les 4 parcelles, ces teneurs passent à 123 ppm à la
dose de 50 m3, 275 ppm à la dose de 100 m3 et seulement 280 ppm avec
celle de 200 m3. Il s’ensuit que l’apport soutenu de margines ne modifie pas
d’une manière appréciable la teneur du sol en azote total malgré un contenu
relativement élevé (148 kg/ha/an pour la dose la plus élevée). Ceci pourrait
être attribué au lessivage intense dans les sols sableux d’une part et aux
besoins élevés de l’olivier durant les différentes phases de son cycle
biologique, d’autre part.
Cette même tendance est observée avec le phosphate dont les taux
initiaux qui varient de 35 à 45 ppm dans les quatre parcelles, restent
inchangés aux différentes doses testées. Après six épandages, les valeurs
sont identiques dans toutes les parcelles et sont comparables à la situation
de départ.
D. Effet de l'épandage des margines sur les caractéristiques
physiques du sol
1. Impact sur la structure
Outre son effet sur les caractéristiques chimiques du sol, l'épandage
des margines en modifie sa structure physique. Les données relevées
représentées sur la figure 2 indiquent une nette amélioration de la texture
des sols sableux pulvérulents et de leurs réserves hydriques utiles
(Tableau VI).
13
Taux (%)
80
60
40
100 m3
20
Témoin
Témoin
50 m3
0
-1
2,
0
1,
6
-2
,6
-1
1,
0
-1
0,
5
0
-0
,5
0
100 m3
Classe (mm)
200 m3
Fig. 2 : Différentes classes d’agrégats du sol en fonction de la
dose de margine.
Tableau VI : Evolution comparée de la perméabilité de la couche arable,
de la classe de terre fine et des réserves utiles en eau du sol,
en fonction de la dose de margine.
Perméabilité Humidité au point Humidité à la
Réserves
Ks (cm / h)
de flétrissement
capacité au
hydriques
permanent (%)
champ (%)
utiles (mm)
Témoin
Initial
21,66
2,57
6,26
6,53*
6 ans
21,72
3,65
8,10
5,63**
50 m3
Initial
21,22
2,62
7,2
6,40
6 ans
14,41
4,05
9,98
7,46
100 m3
Initial
21,00
3,57
7,95
6,68
6 ans
12,77
4,02
9,81
7,13
200 m3
Initial
21,72
3,41
9,2
6,43
6 ans
4,68
7,10
16,81
11,08
Dans les 4 parcelles, les valeurs de l’humidité sont calculées sur la couche arable au cours
de la première année (*) et sur une profondeur allant de la surface à 1 m de profondeur la
sixième année (**).
Traitement
Temps
Grâce au pouvoir liant des margines, l'apport au fil des ans de cet
effluent induit une conglomération de la terre fine composée de particules
ayant un diamètre inférieur à 2 mm. Le taux de cette fraction passe de 90 %
au démarrage des expérimentations, à des taux de 75,6 ; 67,5 et 61,1% pour
les doses de 50, 100 ou 200 m3 / hectare respectivement. Cet effet améliore
la structure du sol en consolidant ses agrégats constitués de terre fine (effet
liant de la margine) et améliore d’une manière notable ses réserves
hydriques (Tableau VI), sans toutefois le rendre imperméable (caractère
hydrophobe des margines).
14
Ces résultats rejoignent ceux de Mellouli (1996) qui signale que la
margine, grâce à ses pouvoirs hydrophobe et liant, favorise la formation
d’un mulch plus efficace que celui naturel (sable seul) dont la porosité et la
structure joue le rôle d’une barrière contre l’évaporation. En outre, ils
peuvent être comparables à ceux de Gabriels et al (1973) qui, en traitant un
sol sableux par des émulsions bitumeuses, démontrent l’efficacité du mulch
constitué d’agrégats ayant une épaisseur inférieure à 5,35 mm permettant
une meilleure stabilité du sol et une réduction substantielle de
l’évaporation.
2. Effet sur les réserves hydriques
Au démarrage des expérimentations, les réserves hydriques du sol
sont similaires dans les quatre parcelles (de 6,4 à 6,68 mm). Au terme de
six épandages annuels des margines, elles ont évolué de 5,53 mm chez le
témoin aux valeurs de 7,46 ; 7,13 et 11,1 mm aux doses respectives de 50,
100 ou 200 m3. Ainsi, nous constatons que les doses de 50 et 100 m3 / ha
n’ont engendré qu’une faible amélioration des réserves utiles en eau du sol
(1 mm). Avec la dose élevée (200 m3 / ha), cette amélioration est d’environ
5 mm. Elle est due à l'effet mulch de la margine d'une part et à
l'enrichissement du sol en matières organiques d'autre part.
Outre les réserves en eau du sol, les propriétés hydriques de celui-ci
ont évolué avec l’apport de margine, puisque les valeurs de l'humidité au
point de flétrissement permanent et à la capacité au champ, sont
significativement modifiées. A pf 4,2, ces valeurs respectives après le 6ème
épandage ont passé de 2,57 % chez le témoin à 7,1 % dans la parcelle ayant
reçu 200 m3. A pf 2,5, ces mêmes valeurs sont de 6,26 % chez le témoin et
16,81 % avec la dose la plus élevée. Dans les parcelles ayant reçu 50 et 100
m3, ces valeurs sont de 10 %.
D’un point de vue agronomique, l’épandage de cet effluent améliore
les réserves hydriques disponibles à la culture. En agissant sur la
distribution des agrégats du sol et en enrichissant celui-ci en matière
organique, l’application des margines occasionne un changement des
valeurs de l’humidité du sol aux points caractéristiques du potentiel
matriciel (pf 2,5 et pf 4,2). Ce phénomène déjà signalé par Mellouli (1996)
et par Cabrera et al. (1997).
En revanche, aux doses élevées de margines (100 et 200 m3), la
perméabilité de la couche arable du sol sableux initialement égale à 21 cm /
heure est réduite aux valeurs respectives de 12,8 et 4,7 cm/h
respectivement. Cette imperméabilisation du sol pourrait être induite par les
matières grasses résiduelles, qui donnent à cet effluent ses caractères
hydrophobe et liant.
15
Ce constat est rapporté par Mellouli (1996), qui suggère que
l’hydrophobie des agrégats stables du mulch établi par la margine, induit au
début de la pluie, un écoulement préférentiel au niveau des macro-pores
tout en humectant lentement les agrégats. Toutefois, à un certain moment
(1 heure après), lorsque le mulch atteint sa capacité de rétention,
l’écoulement se trouve ralenti et l’infiltration devient plus importante. D’où
il en résulte une humidité plus importante que celle dans le sol sans
margine.
E. Effet de l'épandage des margines sur la production de
l'olivier
L’apport hivernal de quantités croissantes de margine lors du repos
végétatif des arbres n’a provoqué aucun effet phytotoxique chez l’olivier.
Au contraire, il s'est traduit par une amélioration de leur croissance et de
leur fructification (tableau VII).
Tableau VII : Croissance moyenne et caractéristiques du fruit des
différents traitements en relation avec la dose de margine durant
les six années d’observation.
Témoin
50 m3
100 m3
200 m3
Poids
Long. d’une Nb. de Nb. de grappes
Nb. de
pousse (cm) feuilles / florales initiales fruits noués moyen de
/ pousse l’olive (g)
pousse
/ pousse
13,8
12,7
8,3
9,5
1,02
15,0
17,3
9,0
10,6
1,09
17,7
19,5
12,3
14,2
1,24
16,9
18,7
11,9
12,6
1,22
Taux
d’huile
(%)
22,93
23,91
23,80
23,36
Les données relatives à la croissance et à la production de l’olivier
ayant reçu les margines durant six années successives, consignées dans le
tableau VII, montrent que l’effet fertilisant de cet effluent engendre une
amélioration de la croissance des arbres et du calibre de leurs fruits.
Chez les arbres témoins évoluant sur un sol très pauvre en matières
organiques et minérale, la croissance végétative annuelle des rameaux
fructifères est de 13,8 cm / pousse. Ces pousses portent en moyenne 8,3
grappes florales, qui après floraison, nouaison et chute physiologique des
fruits, donnent naissance à 9,5 olives/pousse. Dans les parcelles traitées aux
margines, les pousses formées sont relativement plus vigoureuses (15 cm à
la dose de 50 m3 et 17,7 cm avec 100 m3) et portent plus de grappes florales
et de fruits (respectivement 10,6 et 14,2 olives / pousse aux doses
respectives de 50 et 100 m3).
Chez l’olivier ayant reçu des doses croissantes de margines,
l’amélioration de la croissance et de la production (Tableau VIII)
s’explique par un enrichissement du sol traité en matières organique et
minérale (par m3 l’apport s’élève à 107 Kg de MO et 13,7 Kg de MM). De
surcroît, l’épandage régulier des margines a un effet bénéfique sur la
structure du sol et sur ses réserves hydriques.
16
Tableau VIII : Productions annuelles moyennes et celles de la campagne
2000/2001 chez l’olivier ayant reçu 6 épandages successifs de margines en
comparaison avec le témoin.
Doses
Témoin
50 m3
Production 2000/2001
Production
Production / ha
moyenne
(kg)
/ arbre (kg)
57,0
1139,0
Productions moyennes 1995/2001
Production
Production annuelle
moyenne
/ ha (kg)
/ arbre (kg)
43,5
739,5
76,5
1300,5
49,8
846,6
100 m
94,0
1598,0
56,1
953,7
3
93,5
1589,5
52,9
899,3
3
200 m
Au cours de la campagne 2000/2001 caractérisée par une forte
production d’olives, la récolte enregistrée dans la parcelle témoin est de
1139 Kg / ha. Elle est de 1300 Kg / ha dans la parcelle ayant reçu 50 m3 de
margines et atteint 1598 et 1589 Kg / ha aux doses de 100 et de 200 m3
respectivement. Par arbre, ces productions ont varié entre 57 Kg chez le
témoin et 94 Kg chez les arbres ayant reçu 100 m3 / ha.
Durant les six années d’expérimentation, la production moyenne
annuelle des arbres témoins n'est que de 739,5 kg / hectare soit une
moyenne annuelle de 43,5 kg par arbre. En revanche pour les doses de 50 et
100 m3, elle tend à augmenter pour atteindre 846,6 et 953,7 kg / hectare,
respectivement, puis baisse légèrement avec la dose de 200 m3 pour
atteindre la valeur de 899,3 kg / ha.
Par son effet fertilisant certain et l’amélioration des réserves
hydrique du sol, la margine apportée aux doses de 50 et 100 m3 / ha permet
un accroissement de la vigueur des oliviers et le développement de pousses
fructifères plus longues et portant plus de feuilles que celles du témoin,
avec pour conséquence un effet positif sur le niveau de floraison et de
fructification exprimé par le nombre de grappes et des fruits noués. Les
différences entre le témoin et les parcelles traitées persistent jusqu’à la
récolte par l’obtention de fruits plus gros (1,24 g pour la dose 100 m3 contre
1,02 g seulement chez le témoin) et à teneur en huile plus élevée.
Comparativement à la dose de 100 m3/ha l’augmentation de la
conductivité électrique du sol et l’accroissement de la salinité pour la dose
de 200 m3/ha se traduisent par un léger effet dépressif sur la croissance et la
production des arbres
17
IV. Conclusion
Les résultats préliminaires des recherches entamées depuis six ans sur
la valorisation des margines par épandage en oliveraies situées en sol sableux
profond sont prometteurs. Ils montrent que ce sous-produit naturel obtenu de
l’extraction de l’huile d’olives, induit une amélioration de la fertilité du sol,
de sa structure physique et de sa capacité de rétention en eau.
L'apport moyen en éléments fertilisants procuré par l'épandage de 1
m3 de margine sur le sol est de 107 kg de matière organique et de 13 kg de
matière minérale dont 1,4 kg d'azote, 0,34 kg de phosphate et 7,5 kg de
potassium. L’effet de 6 épandages successifs sur la conductivité électrique du
sol montre que la dose de 50 m3 / ha ne provoque pas la salification du sol (la
CE a passé de 1,2 à 1,9 mS / cm). Au contraire, les doses de 100 et de 200
m3/ha risquent d’engendrer la dégradation des aptitudes agricoles du sol par
l’augmentation de la salinité (CE passe de 1 mS/cm à 4,1 et 4,5 mS/cm,
respectivement après 6 années d’épandage).
A forte dose (200 m3) la margine provoque une légère
imperméabilisation du sol dont la valeur chute de 21 cm/heure à seulement
4,7 cm. Cette imperméabilisation pourrait résulter de la présence de
matières grasses résiduelles. Cependant, elle améliore d’une manière
notoire la structure du sol par l’agrégation de la terre fine et des réserves
hydriques par la création d’un mulch qui s’oppose à l’évaporation de l’eau.
Avec des apports modérés de 50 et 100 m3/ha les productions
annuelles ont passé de 43,5 kg/arbre (740 kg/ha) chez le témoin à 49,8 kg et
56,1 kg/arbre respectivement soit des augmentations annuelles de 107 kg et
214 kg par hectare et par an par rapport au témoin.
Toutefois, certains aspects jusqu’alors non abordés doivent être
élucidés, Il s’agit essentiellement de :
- La caractérisation des poly phénols présents dans la margine
(identification et quantités) ;
- l’étude de la cinétique de migration et de dégradation de ces
composés ;
- l’étude des aspects relatifs aux possibilités de colmatage, par les
résidus gras, des interstices du sol et son impact sur les échanges gazeux et
hydrique de celui-ci ;
- le suivi de l’évolution quantitative et qualitative de la microflore
du sol ;
- et enfin, l’étude à longue échéance et en cas d'apports annuels
répétés de l’impact de cette fertilisation sur la vie des végétaux et ses effets
sur l'environnement pour une agriculture durable.
18
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