Contes et légendes à l`écran
Transcription
Contes et légendes à l`écran
Préambule – – – – Contes et légendes à l'écran Cinémaction – Dirigé par C. Aurouet Le conte et les formulettes : « il était une fois », « au temps jadis », « ils vécurent heureux... ». Entre l'incipit et l'excipit, se déroulent une multitude de péripéties qui échappent à toute temporalité et toute localisation. Le conte a une structure récurrente : la narration s'ouvre sur un état initial où harmonie et bonheur règnent et dans lequel adviennent des éléments perturbateurs qui vont engendrer le chaos. Dans ces conditions, le héros se doit de rétablir l'ordre et doit surmonter différentes épreuves. Les protagonistes sont ramenés à des traits symboliques, voire caricaturaux et apparaissent comme manichéens. L'objectif principal du conte est de divertir et de plaire. Il fait donc appel au beau et invente des pays merveilleux. Le surnaturel vient se mêler au réel. Le conte se caractérise donc par une forte préoccupation esthétique qui s'appuie sur une dimension imaginaire : le fantastique. L'autre objectif est de transmettre une morale : à l'issue du conte et du rétablissement de l'ordre initial, il convient de tirer une leçon du récit qui vient d'être fait. La fonction des contes étiologiques : avant l'apparition des explications apportée par la science, les contes sont un moyen pour l'homme de comprendre son environnement (la mythologie : »Les métamorphoses d'Ovide »), de faire état de ses préoccupations sociales et psychologiques. La fonction symbolique des contes : ces récits nous parlent de nous, de nos peurs, de nos angoisses, de nos tabous, de nos ambitions, de nos secrets, de notre soif d'évasion. Ils traitent ainsi de problèmes familiaux, de l'enfance, de la rivalité frère/sœur, du mariage, de la sexualité. Cette animation a pour objet d'éclairer les contes passés sur bobine. L'adaptation pose d'emblée plusieurs questions (1heure d'extraits) – – – – – La question du réalisme : Le conte de fées filmé pose la question du "réalisme" cinématographique. Dans le conte de fées, le merveilleux tire sa force d’un monde mal défini — lieux et corps archétypaux, hors du temps, visages sans traits. L’économie du récit, dans lequel aucune description ne fixe l’imagination, génère d’elle-même mystère et charme. L’écran, lui, est voué à attribuer un certain visage à Barbe-Bleue et aux fées, un style daté aux demeures princières et aux costumes, plus généralement un caractère déterminé aux lieux et aux objets. D’où, par principe, une inévitable "trahison" de l’écran qui donne une forme au merveilleux et à l'imagination. Celle liée à l'imaginaire : les conteurs proposent des mots au lecteur ou à l'auditeur, auxquels celui ci va donner forme dans son esprit s créant ainsi une représentation mentale des personnages mais aussi des situations..Le film donne ces images directement, des images fabriquées qui tiennent compte de contraintes techniques. Cela réduit-il la valeur du conte? Comment rendre compte de l'oralité? Voix off et question de la mise en scène du « Il était une fois ». Y a-t-il trahison quand il y a adaptation? Fidélité et explosion de convention, détournement, entreprise de démythification, processus d'actualisation : quelles sont les voies les plus empruntées? Le rôle de divertissement et de liaison sociale est elle aujourd'hui dévolue aux cinéastes? 1 - Promenade avec des conteurs de l'écran : quelques adaptations – George Méliès : certains des éléments de la définition page 65 s'accordent parfaitement à l'univers de Méliès, y compris dans les aspects plastiques. Le temps et l'espace « fluctuants », fonction anthropologique du conte qui n'a pas pour ambition de concurrencer le monde réel mais qui s'assigne la vérité profonde et permanente de l'imaginaire. Méliès invente en permanence. L'ironie des contes de Méliès, qu'il les invente ou non est très forte (traitement ironique du merveilleux comme surcodage culturel : c'est un clin d'œil au spectateur cultivé). Rappeler aussi la fonction illusionniste des films de Méliès, des scénarii qui lui permettent de faire ce qu'il sait faire. Le cinéma de cette époque avait de bonnes raisons d'aimer le conte merveilleux : « ce cinéma occupé à déployer dans le cadre de spectacles l'éventail des effets nouveaux mis à sa disposition. Attraction de foire ou ciné-concert, il fait la part belle aux joies immédiates procurées par l'illusion, la vivacité, la composition des tableaux (calque des compositions scéniques du théâtre de l'époque) et les couleurs artificielles. La féerie y est comme chez elle avec costumes chatoyants, trucs de machinerie et apothéose finale, les tours de passe passe du montage en plus. A inscrire dans le goût de son temps pour les spectacles féeriques. Enfin les liaisons sont secondaires, les transitions abruptes. ➢ Présenter le Cendrillon : 1899, 120m, 6mn environ, 20 tableaux. Le formatage "normatif" de Walt Disney : Le reformatage des contes aux normes du spectacle familial et des valeurs dominantes est de règle chez Walt Disney qui réalise en 1937 le premier long-métrage d’animation de l’histoire : Blanche-Neige et les Sept Nains. Disney y fait de l’éloge des vertus domestiques, repris en 1950 dans Cendrillon : la qualité des héroïnes semble se mesurer à la bonne grâce qu’elles mettent dans les tâches ménagères. Ses dessins animés déploient cependant un riche imaginaire de l’effroi, quand les délires intérieurs ne se contiennent plus et envahissent le monde visible. Blanche-Neige, dans sa fuite éperdue au fond de la forêt, se voit arrêtée, écorchée, épouvantée par une nature étrangère qui la rejette. Dans La Belle au Bois dormant, des décors gothiques ténébreux, très stylisés et sans profondeur ont chassé les habituelles rondeurs de l’univers disneyen : buissons d’épines impénétrables et pignons aigus du château proclament le règne de la fée Maléfique, qu’elle prenne l’aspect d’une femme hiératique ou d’un dragon hérissé. – Jean Cocteau « La belle et la bête » : À la Libération, Jean Cocteau réalise une splendide adaptation de La Belle et la Bête dans des conditions matérielles extraordinairement précaires malgré les apparences. Le caractère unique de l’œuvre vient de l’union improbable du réalisme, vocation du cinéma, et du merveilleux : château de la Bête, bras candélabres du grand corridor ou cariatides vivantes encadrant la cheminée… La magie propre du film tient à l’union, comme s’ils appartenaient au même univers, du pays ouvert et lumineux de la Belle avec le domaine secret et sombre de la Bête : miracle de la lumière trouvée par Henri Alekan, identique à elle-même en ses variations, miracle aussi des costumes de Christian Bérard qui, se loue Cocteau, "est arrivé à nouer ensemble le style de Ver Meer et celui des illustrations de Gustave Doré dans le grand livre à couverture rouge et or des contes de Perrault". À contrario, le Barbe-Bleue de Christian-Jaque (1950) apparaît comme une version bon enfant et insipide du conte avec décors proprets et clichés sur le Moyen Âge, malgré l’interprétation haute en couleur de Pierre Brasseur. - Peau-d’Âne de Jacques Demy (1970) ➢ Extrait début du film - 5' Jacques Demy marque sa dette envers Cocteau quand il tourne Peau-d’Âne en 1970. Plusieurs éléments l’évoquent : les statues vivantes, le miroir magique, et bien sûr Jean Marais, en roi veuf tombé amoureux de sa propre fille. Demy rend également hommage au Disney de son enfance. Pour la chanson de la confection du gâteau, il dira s’être souvenu de la scène où Blanche-Neige confectionne une tarte aidée par des oiseaux. Mais, comme dans ses comédies musicales, la forme supposée innocente cache toujours chez lui la lucidité et l’âpreté. Non seulement Demy ne camoufle pas le désir incestueux du roi, transparent chez Perrault, mais sa fille accepterait bien de l’épouser si la fée des Lilas, sa marraine, ne jouait pour elle le rôle d’une censure morale. Quand le roi et la fée refont leur apparition au dénouement, mariés, celle-ci paraît bien s’être souciée comme d’une guigne de Peau-d’Âne pour arriver à ses fins… Les questions posées par l'adaptation Peau d'âne de J.Demy Extrait Les réponses apportées ➔ Réalisme/imaginaire - l'anachronisme - le merveilleux inscrit dans le quotidien ➔ L'oralité - un narrateur au début ➔ Les modalités d'adaptation - multiples (fidèle à l'histoire, complexité, anachronismes, chansons.) 2 – Comparaison entre la littérature de jeunesse et le cinéma : La littérature de jeunesse pose t elle sensiblement des questions identiques sans le mouvement...? Comment le cinéma utilise le mouvement? ➔ Extrait de La belle et la bête – Cocteau - l'arrivée du père au château de la Bête - 5' La place de l'outil pour les élèves, qui permet d'apprendre à comprendre!! « La Belle et la bête » - Editions être – Texte de Madame Leprince de Beaumont, images de Nicole Claveloux La belle et la bête – Texte de Madame Leprince de Beaumont – Illustration d'Anne Romby Extrait du texte de l'album Passage du film (images/ dialogues) « ...mais il fut bien surpris de ne trouver personne dans les cours. Son cheval, qui le suivait, voyant une grande écurie ouverte, entra dedans; et ayant trouvé du foin et de l'avoine, le pauvre animal qui mourait de faim se jeta dessus avec beaucoup d'avidité. Le marchand l'attacha dans l'écurie, et marcha vers la maison, où il ne trouva personne ; mais, étant entré dans une grande salle, il y trouva un bon feu et une table chargée de viandes, où il n'y avait qu'un couvert »... « l attendu pendant un temps considérable; mais onze heures ayant sonné sans qu'il vit personne, il ne put résister à la faim, et prit un poulet qu'il mangea en deux bouchées et en tremblant... » Y'a quelqu'un? Y'a personne? Proposition d'activité Éléments de comparaison - le rôle joué par la musique qui alterne avec l'image en mouvement.et le silence. - le mouvement permet de montrer l'implicite. - les points communs : le noir et blanc (image en réseau : gravure de Gustave Doré) - La notion d'auteur et de style. - écrire sous chaque image du film le passage du texte de l'album qui lui correspond -comparer les illustrations de l'album et les images du film - réaliser sa propre illustration d'un passage du conte Proposer aux enseignants de faire le même exercice avec les deux extraits suivants : ➢ ➢ Peau d'âne (extrait déjà visionné) Le petit soldat de plomb : version de Paul Grimault - 1948 - 10' 3 - L'interprétation cinématographique – Sarah Moon « 4 contes » : « Le petit soldat de plomb », « Barbe bleue » ➢ « L'effraie » - 16'45 La notion d'interprétation diffère de l'adaptation, le réalisateur est nourri du conte mais aussi de ce qu'il se souvient, de ce qui l'a enchanté. ➢ Liberté de création par rapport au texte original ➢ la transformation réside dans la modernisation de l'histoire et du cadre spatio temporel ➢ l'inscription des personnages dans la réalité (une maison vide à louer) avec un passé déterminé. ➢ Suppression ou ajout de personnages, change leur biographie, ➢ introduit des éléments inédits ➢ des procédés qui renvoient à la magie des contes (verbal/non verbal, animé/non animé, ombre/lumière, flou/netteté, fiction/réalité, réel/imaginaire, N&B/couleur...) ➢ la narration faite par la réalisatrice : atmosphère inquiétante Ce que dit Sarah Moon : Figure de l'eau : sorte de passage de l'inanimé à l'animé, c'est l'eau qui transforme. La course, la marche : sont des façons d'aller vers son destin, aspect dramatique du cinéma (précipitation vers la chute). Pas de sorcières ni de fées : juste un destin maléfique. ➢ Jean-Philippe Labadie : « Le roi Jean » - 19' Faire remplir le tableau par les enseignants. Peau d'âne - d'après l'œuvre de C. Perrault – illustrations de C. Degans Peau d'âne - d'après l'œuvre de C. Perrault – illustrations d'Anne Romby Peau d'âne – J. Demy - 1970 Extrait du texte de l'album Passage du film (images) Éléments de comparaison V1 -« Parmi toutes les richesses que ce roi accumulait sans relâche, il était un bien pour lequel il eût, sans la moindre hésitation sacrifié toute sa fortune. Ce trésor, qui lui était aussi précieux que les battements de son cœur, n'était pas dissimulé au fond d'une cachette, mais s'offrait aux yeux de tous, au beau milieu des écuries du palais. A cette place où l'on aurait pu s'attendre à admirer quelques fougueux pur-sang, ne se tenait pourtant qu'un âne, semblable dans l'allure à tous les autres baudets de la création. Or cet animal, dont l'oreille avait été effleurée par la baguette d'un magicien, possédait une particularité bien extraordinaire : il ne salissait pas sa litière d'un vulgaire crottin, mais la couvrait chaque matin d'un amas d'écus et de Louis d'or. » V2 - ... » La nature l'avait doté d'un don si extraordinaire que sa litière au lieu d'être malpropre, était couverte, tous les matins, de beaux écus et de louis d'or de toutes espèces, qu'on allait recueillir à son réveil. » Proposition d'activités