Savoir-faire anciens et exploitation de la lande et terres humides

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Savoir-faire anciens et exploitation de la lande et terres humides
Savoir-faire anciens et exploitation de la lande et terres humides
Rapport (juin 2007)
Tristan Arbousse-Bastide FR-Civam Bretagne
Ce rapport rend compte d'entretiens menés avec Perrine Cadoret (FD-Civam 29) durant la semaine du 21 au
25 mai 2007 dans la région de Brasparts auprès d'acteurs de la vie locale et d'agriculteurs sur le thème des
savoir-faire anciens en relation avec la lande et les terres humides :
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Louis Marie Guillon, chargé de mission « élevage et lande » ingénieur au Parc Naturel Régional
d'Armorique, et coordinateur du programme « INTERREG HEATH » sur la thématique de la
conservation durable des espaces de lande - Lundi 21 mai de 14h à 16h
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Jean-Luc Messager, agriculteur à Ploumeour Menez. Pratique la fauche de la lande, principalement la
bruyère utilisée et revendue comme litière pour les animaux, sur divers territoires (terres personnelles,
contrat environnemental avec le Parc Naturel Régional d'Armorique, parcelles privées). Le savoir faire
de Jean- Luc lui a été transmis dans le cadre de sa famille qui pratiquait la coupe de la lande de manière
traditionnelle - Mardi 22 mai dans la matinée
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Borris Prouff, paysan à mi-temps et salarié d'une association liée à la protection de l'environnement
« Bretagne Vivante » pratique l'élevage de races locales (bovins et ovins) sur prairies humides et fonds
de vallées. Borris est en lien avec de nombreuses personnes pratiquant des savoir-faire dans le cadre de
l'économie domestique - Mardi 22 mai dans l'après-midi
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Thierry Machard est un éleveur qui a travaillé dans les régions du Massif Central et de Touraine. Il s'est
installé dans la région de Brasparts depuis 5 ans et travaille à son compte depuis 3 ans. Thierry a
reconverti un ancien élevage, aux structures de production plutôt conventionnelles, pour développer un
élevage d'ovins destiné à la production de viande. Il pratique la pâture en estives sur les landes grâce à la
mise à disposition d'espaces anciennement communaux de la Montagne Saint Michel - Mercredi 23 mai
dans la matinée
En marge de ce travail sur la lande et les terres humides, j'ai réalisé, en compagnie de Jean-Claude
Guillonneau, un entretien auprès de Perrine Cadoret sur la question de la méthode qu'elle avait mise en place
lors des phases de prospection et d'enquête du projet PANIER - Jeudi 24 mai dans la matinée
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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Les landes témoignage de savoir-faire anciens et pratiques communautaires
Le paysage particulier des landes du centre Bretagne ouest apparaît aujourd'hui comme un environnement
naturel à protéger. Pourtant, il résulte d'une longue histoire alliant milieu naturel et usages paysans. Celle-ci
prend sa source dans les pratiques communautaires remontant au Moyen-Age tel que la Quévaise.
Aujourd'hui, la fauche des landes, le pâturage en estives, et certaines pratiques alternatives en matière de
construction constituent des pistes intéressantes permettant d'allier préservation de l'environnement et
exploitation agricole.
Les pâtures communes
Sous l'Ancien Régime et jusqu'au milieu du 19e siècle environ, chaque communauté villageoise exploitait sa
colline de landes sous forme de pâtis où les animaux déambulaient librement. Les landes présentent un
paysage beaucoup plus ouvert qu'aujourd'hui où domine la molinie (graminée), des bruyères et des ajoncs
fourragers plantés prioritairement sur les talus. Il est vraisemblable que certaines plantes de milieu ouvert ou
habituelles des prairies et pâturages se mêlent aux landes et enrichissent sa valeur nutritive pour les animaux.
Les déjections animales sont systématiquement collectées pour fertiliser les jardins près des habitations
maintenant ainsi l'environnement dans un appauvrissement volontaire parfois renforcé par des pratiques
particulières d'écobuage et de cultures temporaires. Les ajoncs poussés en bois sont coupés en hiver et
récoltés pour servir de combustible aux fours à pain.
La fauche de la lande
Dans le dernier tiers du 19e siècle, le démantèlement des pâtis communaux distribués aux paysans
probablement suivant l'importance de leur cheptel s'accompagne d'un mouvement de défrichage et
amendement des terres. Les cultures fourragères rendent petit à petit désuète l'usage des landes restantes
comme pâturage. La pratique de la fauche de lande se développe à cette époque et perdurera jusque dans les
années 1950. La lande coupée suivant un cycle de cinq ans sert de litière et de base pour un excellent fumier
organique adapté à l'agriculture biologique. Cette pratique de fauche s'est maintenue chez certains exploitants
des Monts d'Arrée qui l'ont modernisé en adaptant des outils agricoles tels que barres de coupe de
roundballer. Les subventions accordées à ces pratiques dans le cadre de l'entretien du milieu "naturel" ont
encouragé pendant un temps ces pratiques. Toutefois, l'empierrement des parcelles, leur dispersion, la
pénibilité du défrichage (les allergies liées à la poussière végétale) rend la fauche des landes peu attractive
pour les jeunes exploitants.
Les nouvelles pratiques pastorales
Aujourd'hui, les nouvelles expériences de pâturages ovins sur les landes permettent d'allier préservation de
l'environnement et maintien d'activités économiques et touristiques au niveau local. La perte des savoir-faire
traditionnels dans ce domaine et la rupture des chaînes de transmission nécessitent une forte capacité
d'adaptation au milieu naturel tant pour les animaux que le berger. Ces expériences font l'objet d'un suivi des
troupeaux tant du point de vue biologique que comportemental. Il faut aussi mesurer l'impact de l'élevage
extensif sur la faune et la flore naturelle pour éviter tout phénomène de « sur-pâturage ». Les nouvelles
pratiques pastorales sont un atout indéniable pour le développement local et sont en général bien acceptées
localement même si des résistances existent.
Les usages alternatifs de la lande
Au delà de la réactivation de savoir-faire anciens liés à l'élevage comme la fauche des landes et les pâturages,
les landes offrent de nombreuses ressources dont l'usage est à inventer ou réinventer. Certaines plantes
aromatiques pourraient servir à la préparation de boissons ou d'aliments (piment royal). L'usage de bois
d'ajonc pour la chauffe de four à pain peut constituer un plus au niveau du goût. Des bottes fauchées
provenant de la lande pourraient servir de matériaux de construction alternatifs à l'instar de la paille pour
l'éco-construction. Les associations de développement local ainsi que certains acteurs institutionnels ont un
rôle à jouer pour la promotion et la distribution de produits issus de l'exploitation raisonnée des landes.
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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Bibliographie
Lenaig Gourmelen, 1996 - Les landes : exploitation et représentations, D.E.A. culture et civilisation de la
Bretagne et des pays celtiques, ethnologie, (préparé sous la direction de M. Laurent, Université de Bretagne
Occidentale, 82p.
Lenaig Gourmelen, 1998 – Paysage et territoire en Bretagne : le cas des Monts d'Arrée, rapport
intermédiaire, mars 1998, 70p.
Écomusée des Monts d'Arrée, Mission du patrimoine ethnologique, 1992- Un espace déshérité des Monts
d'Arrée face aux enjeux contemporains, juillet 1992, 157p.
Association des Amis de l'Ecomusée des Monts d'Arrée, Commana, Mouezh ar Menez (revue), n°15 « Le
métier de charbonnier dans la montagne d'Arrée, Parc Naturel Régional d'Armorique Park an Arvorig, 39p.
Collection expérimenter pour agir, Parcs Naturels Régionaux de France « Paroles de Paysages, gestion des
espaces naturels, agricoles et forestiers 11p. n°5 décembre 1999. Fédération des Parcs Naturels Régionaux de
France (www.parcs-naturels-régionaux.tm.fr)
F. Gestin L. Gourmelen, « paysages de bocage » gestion des espaces naturels agricoles et forestiers,
Collection expérimenter pour agir, parc naturels régionaux de France, 45p.
http://www.pnr-armorique.fr/fr/expositions/menez.html : domaine de Ménez-Meur Hanvec, Parc
Naturel Régional d'Armorique.
C.G. 29 - L'arbre, la haie, le talus dans le paysage rural ; les guides du conseil général du Finistère, (contient
les paysages bocagers du Finistère, les talus, guide de reconstruction, haies bocagères et guide de plantation
Col. 1999 - « la chèvre des fossés », Le Viquet, parler et traditions populaires de Normandie, n° 124
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Entretien avec Louis Marie Guillon
(Parc Naturel Régional d'Armorique, domaine du Ménez-Meur)
T. Arbousse-Bastide FRCIVAM Bretagne et P. Cadoret FDCIVAM 29
Louis Marie Guillon (Chargé de mission « élevage et lande » ingénieur au Parc Naturel Régional
d'Armorique, et coordinateur du programme « INTERREG HEATH » sur la thématique de la conservation
durable des espaces de lande - lundi 21 mai de 14h à 16h
Le Parc Naturel Régional d'Armorique
Le rôle du Parc Naturel Régional d'Armorique et en particulier du domaine du Ménez-Meur est de proposer
des clefs pour ouvrir le regard sur le paysage. Nous ne sommes pas un Ecomusée, plutôt une porte par
laquelle on peut accéder à d'autres lieux culturels qui peuvent être plus spécialisés dans tel ou tel domaine.
Toutefois, pour développer cette mission d'éducation à l'environnement, nous devons nous baser sur l'étude
du site du Menez Meur et pas faire la démarche inverse (imposer une vision des pratiques durables au site).
C'est actuellement difficile de développer une démarche cohérente face à la multitude des approches qui
existent dans ce domaine. Nous avons besoin de temps d'expérimentation et d'apprentissage pour nos
équipes.
Quelle est l'histoire du domaine du Ménez-Meur ?
Le domaine du Ménez-Meur a une histoire tout à fait particulière. Autrefois siège d'une petite exploitation
agricole, il fut racheté dans le courant du 19e siècle par un ancien émigrant chercheur d'or parti pour les
Etats-Unis et revenu après y avoir fait fortune. Celui-ci créa tout un domaine autour d'un nouveau corps de
ferme. L'organisation paysagère d'une partie du domaine structuré de talus maçonnés et plantés d'arbres
taillés en cépées témoigne de cette époque. Après être passé par plusieurs propriétaires qui ont modifié à leur
tour la physionomie du site, il fut racheté par le Parc National d'Armorique en 1969 pour être aménagé dans
les années 1970 afin d'être le siège d'un parc animalier. Le projet a connu de nombreuses évolutions et est
devenu aujourd'hui un lieu d'élevage de races domestiques locales, de conservation et d'éducation à
l'environnement. Le site du Ménez-Meur accueille aussi diverses manifestations culturelles ayant attrait à la
vie locale.
L'espace du parc
Les 520 hectares sur lesquelles s'étend le Ménez-Meur se structurent en trois principaux espaces :
Les anciens bâtiments d'exploitation et l'espace environnant qui abrite l'accueil, des bureaux, divers
bâtiments d'exposition et structures de loisirs,
L'espace bocager comprenant des pâturages et des bois,
Les zones de landes occupant la superficie la plus importante (entre 250 et 300 hectares).
Les parcours thématiques dans le parc
Le parc propose actuellement trois parcours ou sentiers thématiques à vocation pédagogique permettant de
découvrir les particularités de la faune et de la flore. Le circuit animalier (3,3 km) passe à proximité de la
ferme et des enclos abritant animaux sauvages mais aussi des races domestiques et locales. Le circuit
forestiers (2,5 km) propose diverses lectures du paysage et présente à la fois les ressources naturelles que les
modes d'exploitations traditionnels et modernes qui y sont liés. Un dernier circuit dit « des paysages » de
8,5 kms propose une randonnée plus longue traversant les divers espaces du parc.
Le nouveau sentier des landes
Le sentier des landes qui sera bientôt inauguré met en avant la diversité des espèces végétales et animales
que l'on trouve dans cet environnement ainsi que les pratiques agricoles et savoir-faire anciens qui ont
façonné ce paysage. Il s'agit aussi de développer un lien entre les races locales, les systèmes agraires, les
milieux naturels. C'est une histoire du paysage au travers de l'entrée animale et du développement durable.
Notre sentier de la lande essaie de faire la démonstration du lien intime qui existait entre milieu naturel et la
culture paysanne avec ses savoir-faire.
Landes : milieu et usages
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Un espace doit avoir une vocation. Aujourd'hui, celle des landes est d'être un espace naturel protégé et
pourtant c'est un paysage issu intimement à une activité humaine. Le paysage des landes est le reflet d'un
équilibre entre savoir faire et économie traditionnelle à un moment de l'histoire. Comment intégrer ce
système et ces savoir-faire dans le cadre de l'économie actuelle ? Est-ce durable et raisonnable d'entretenir
aujourd'hui les landes et, dans le cas contraire, que faire de ce milieu ?
La lande un environnement particulier
La lande que l'on peut observer dans le cadre du parc du Ménez-Meur est un environnement qui a subi
l'influence humaine et dont l'équilibre est relativement fragile. Il s'agit d'une lande atlantique de l'intérieur
des terres qui est adaptée à un sol acide et pauvre et des conditions climatiques humides (proche de
l'atmosphère d'un sous-bois). On y trouve principalement des ajoncs, diverses variétés de bruyères, certaines
graminées dont la molinie et des fougères. Les conditions climatiques sont toutefois moins rudes que pour la
lande littorale et les sols sont plus profonds.
Landes et communaux
Avant les grandes périodes de défrichement des landes au cours du 19e siècle, ces territoires faisaient l'objet
d'une exploitation de « terres vaines et vagues » : cultures temporaires sur écobuage, pâtis communaux,
collecte de litière, fourrage pour les chevaux, tourbe et bois d'ajonc.
Les landes n'étaient pas un territoire déconsidéré, en comparaison aux terres plus fertiles. Les archives
témoignent de conflits entre villages au sujet des droits d'exploitation des landes. Chaque lieu-dit avait sa
colline où l'on laissait les animaux déambuler sous la garde des enfants qui gardaient les animaux « on
n’allait pas n’importe où ». Toute la production animale (déjections) était collectée pour fertiliser les terres
proches des exploitations et destinées aux cultures vivrières.
Origine des pratiques communautaires
Le développement de l'exploitation des landes est souvent moins évoqué que les systèmes de « quévaise »
qui se sont mis en place au cours du Moyen Age. Les moines encourageaient la colonisation de la
« montagne », en octroyant un journal ou deux par foyer. Ce patrimoine n'appartenait pas au paysan mais
pouvait être transmis pour exploitation au plus jeune héritier (droit de juvénerie). Il semble que ce système se
soit perverti petit à petit car il ne fonctionnait plus très bien lors de la période révolutionnaire. La gestion
globale des terres défrichées serait restée dans les mains du clergé (ordres monastiques) jusqu'à la révolution.
Ce type d'organisation et d'exploitation se voit encore de nos jours dans la structure de certains villages
importants comme celui de « la Feuillée ».
Un appauvrissement volontaire du milieu
Au niveau de la gestion des terres, on ne cherchait pas à mettre la lande en valeur mais plutôt à maintenir un
déséquilibre volontaire. La récupération d'humus, l'écobuage, la récolte des déjections animales sont des
exemples de ces pratiques qui existaient dans la plupart des autres zones de landes d'Europe. La récupération
d'humus après découpage et décapage des landes permettait l'amendement des parcelles cultivées à proximité
des fermes. L'ensemble des déjections animales résultant des pâtures communes était récolté dans ce but.
Écobuage et cultures sur landes
L'écobuage que l'on pratiquait sur les landes dans les Monts d'Arrée ne consistait pas à provoquer des feux
de lande mais plutôt à une opération en plusieurs étapes :
- Etrépage (extraction de mottes de terres de bruyère),
- Séchage des mottes,
- Brûlage des mottes ?
- Epandage des cendres sur les terres décapées.
L'épandage des cendres issues de l'écobuage sur les terres défrichées permettait de pratiquer une culture
temporaire offrant trois à quatre cultures annuelles avant rotation des cultures. Des expériences menées sur le
parc ont montré que les terres ainsi préparées étaient particulièrement favorables à la pousse du blé-noir.
Certaines populations pauvres (Pen Tier) ont pu vivre en « nomadisant » sur la lande grâce à ce système. Des
lopins étaient cultivés jusqu'à épuisement des terres avant d'être abandonnés pour d'autres parcelles.
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Le morcellement des landes
Les différents paysages que nous pouvons observer dans le parc sont les témoignages de l'abandon progressif
depuis le début du 19e siècle des pratiques communautaires et tout particulièrement de l'usage de la lande en
pâtis communaux. Après la Révolution Française, les zones de landes autrefois exploitées en commun furent
partagées en une multitude de propriétés privées. Les pratiques d'héritage égalitaires ont augmenté de
génération en génération le morcellement des terres et rendent aujourd'hui la gestion des questions foncières
particulièrement difficiles.
Défrichement, amendements, et cultures fourragères
Au cours du 19e siècle, le développement des amendements et des cultures fourragères ont contribué à
l'abandon d'exploitation traditionnelle collective des landes. C'est une nouvelle période de défrichement des
landes et d'amendement des terres. On utilisait notamment du sable marin (« treiz ») pour baisser le niveau
d'acidité des sols. Il s'agissait de sables marins principalement issus du dragage régulier du goulet de Brest
souvent ensablé. Les dragueurs s'échouaient sur les bancs de sable à marée basse, remplissaient leurs cales
puis repartaient avec la marée montante. Les cargaisons étaient vidées dans les ports de la rade (ex : Faouët).
Le témoignage des fougères
La présence de fougères sur des parcelles témoigne souvent d'un enrichissement des terrains liés à une
activité humaine par exemple un « sur-pâturage » ou des amendements associés à une culture. C'est une
plante dont la multiplication pose des problèmes au parc. La fougère est considérée comme toxique à hautes
doses pour les animaux qui évitent naturellement de la pâturer. Toutefois, nous en avons en pâtures du
mouton des landes qui est un animal habitué aux terres froides et mange aussi la fougère. On dit aussi que
l'on mangeait autrefois les pousses ou crosses naissantes des fougères que l'on nommait « asperge du
pauvre ». Lorsque le couvert de fougères est trop dense, il empêche le développement des sous étages
d'herbes. Le développement des fougères s'accompagne souvent de celui des ronces et annonce une
progression vers des stades forestiers. La myrtille et l'escargot de Quimper sont des indices qui indiquent ce
processus. Il faut ajouter que les conditions climatiques très humides des Monts d'Arrée créent un couvert
atmosphérique avec des conditions proches du couvert forestier. L'élimination des fougères peut se faire par
des fauches répétées en début de croissance qui finissent par appauvrir le rhizome. D'autres systèmes
consistent à passer un rouleau qui écrase et abîme les fibres des tiges.
La fauche de la lande
Après l'appropriation individuelle des anciens communaux, la pâture collective a été abandonnée. C'est alors
que s'est mise en place la pratique de fauchage des landes pour en faire de la litière pour les animaux. Il est
probable que cette pratique existait déjà auparavant mais qu'elle était limitée au bord des routes et aux
bordures des marais. La fauche de la lande est une pratique qui a perduré pendant longtemps dans la région
des Monts d'Arrée et s'est plus ou moins éteinte (ou a beaucoup diminué) depuis une dizaine d'années. C'était
une activité qui concernait essentiellement l'exploitation de la lande secondaire résultant d'une activité
humaine. La fauche se pratiquait lorsque les landes sont sèches en fin d'été. C'est une pratique qui du point
de vue physique appauvrit le milieu et en ce sens se rapproche du « brûlis ». Cet appauvrissement est
favorable à certaines plantes des landes et notamment la bruyère en particulier dans les Monts d'Arrée.
La fauche de la lande était presque devenue un « tabou » mais la pratique a été remise au goût du jour par les
subventions accordées aux agriculteurs pour l'entretien des landes. Les systèmes de fauches pour la
production de litière ont été dynamisés pendant un temps mais la question des pâturages sur lande reste en
suspens. Le respect d'un cahier des charges précis préservant le milieu est un problème.
La reprise de landes en fauches se passe de la manière suivante. Après une première fauche, ce sont les
graminées qui repoussent les premières, viennent ensuite les bruyères après deux ou trois ans et enfin les
ajoncs vers 6-7 ans. Ainsi, les rythmes de fauches se succèdent tous les trois à six ans.
Ainsi pour qui possède 10 à 15 hectares de landes, il fallait faucher selon un cycle d'environ trois hectares
par an, ce qui permet de produire environ 20 tonnes de litière à chaque fois.
La lande comme litière et base de fumier organique
La bruyère sert de litière, l'ajonc de fourrage mais aussi de combustible. Pour que la litière de lande soit de
bonne qualité, il faut un bon équilibre entre les espèces végétales qui ont chacune leur qualité. Trois quarts de
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tonnes de lande sont l'équivalent d’une tonne de paille.
La molinie, variété de graminée détaillée ci-après, absorbe les jus des déjections, la bruyère forme la
structure de la litière. Contrairement au fumier de paille, celui qui est à base de landes doit être composté un
peu plus longtemps avant d'être utilisé.
La molinie
La molinie est une graminée appétente appréciée par les animaux tant que la plante reste verte (c'est-à-dire
de mai à octobre environ). C'est l'espèce clef lorsque l'on parle de pâturage traditionnel sur les landes. Elle
pousse en milieu acide sur des terres faiblement fertiles indépendamment des conditions d'humidité ce qui
explique que l'on en trouve des marais jusqu'aux landes. Par contre, elle tend à disparaître si les terres sont
enrichies. Autrefois, le pâturage se faisait toute l'année sur la lande mais la charge en animaux n'était pas
suffisante pour risquer la « sur-paturation » ni la transformation du milieu naturel par enrichissement des
terres. Dans les landes, les contraintes physiques naturelles sont restées plus fortes que la pression animale.
En plus de son usage comme nourriture animale, la molinie pouvait servir de combustible. On la coupait
sèche en mottes pour la cuisson de la nourriture des cochons. Dans la région des Monts d'Arrée, son usage
comme combustible était vraisemblablement limité car les mottes produisent beaucoup de fumée.
L'ajonc
L'espèce d’Ajonc d'Europe « Lann Ki » est un fourrage traditionnel mais aussi un combustible. C'est une
plante qui fut introduite et cultivée à des fins fourragères et que l'on donnait aux chevaux sous forme de
jeunes pousses hachées et écrasées. Les ajoncs fourragers étaient plutôt plantés sur les talus (c'était par
exemple le cas dans le Léon) afin de les protéger de la prédation des animaux domestiques. On utilisait
parfois des parcs spécifiques pour la culture de l'ajonc pour en faire du fourrage et pour la production de bois
combustible principalement utilisé pour la chauffe des fours à pain.
Les nouvelles pratiques de pâtures
Comme en témoignent les archives (on connaît les statistiques pour l'élevage dans les Monts d'Arrée depuis
la fin du 19e siècle jusque dans les années 1960 grâce à un intéressant travail de recherche mené par Luc
Alvarez), les landes n'ont plus été utilisées comme pâtures depuis longtemps. De notre côté, nous essayons
de faire paître les animaux de race locale élevés au parc sur la lande. Il s'agit d'entretenir la lande sans la
« sur-pâturer » car elle risquerait de se transformer en prairie et nous raterions notre objectif de conservation.
Pour atteindre cet objectif, nous ne pouvons nous permettre de faire seulement paître des animaux sur la
lande, il faut aussi maintenir d'autres pratiques humaines tel que le fauchage (aujourd'hui mécanisé
gyrobroyeur) et de l'écobuage (brûlis contrôlé).
L'expérience du Parc
Nos expériences de pâtures sur la lande du parc ont connu des réussites diverses. Au Menez Meur nous
avons eu de nombreux problèmes avec les chevaux. Ces derniers ne s'alimentaient pas bien, contrairement
aux chèvres et aux vaches. En ce qui concerne les moutons, nous manquons de recul.
Pour remettre en pâture des landes, il semble qu'une bonne méthode soit de faire ouvrir le terrain par des
chevaux car leur capacité de piétinement est importante, puis de faire intervenir des bovins et enfin des
moutons (cet animal n'est pas un grand défricheur). L'intérêt des pâtures mixtes (mêlant différents animaux
sur un même terrain) est de permettre une meilleure rentabilisation des ressources. Chaque animal ayant ses
préférences et sa hauteur de coupe. C'est un savoir faire qui s'est perdu en ce qui concerne les landes des
Monts d'Arrée.
Nous suivons avec intérêt les expériences menées sur les landes de Paimpont du côté de Mauron.
Dans notre objectif de préservation du milieu des landes, nous craignons principalement le « sur-pâturage ».
C'est un aspect qui est souvent mal compris par les éleveurs.
Notre collaboration à l'expérience de Thierry Machard
Thierry Machard est aujourd'hui le moteur de pratiques équilibrées entre élevage et préservation. Son
expérience suscite de l'intérêt auprès des populations locales malgré quelques rejets ponctuels et la résistance
des chambres d'agriculture. Il faut valoriser et diffuser cette expérience afin de questionner plus largement la
place de l'agriculture dans l'entretien des espaces naturels.
Il pourrait être opportun de développer une formation sur la manière dont on peut intégrer un espace naturel
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protégé au sein d'une exploitation agricole. Thierry Machard, éleveur de mouton, berger, a compris cet enjeu
de préservation et travaille avec nous dans ce domaine.
L'adaptation des animaux au milieu
Les problèmes avec nos chevaux sont probablement dus au déficit d'apprentissage des animaux. La rusticité
de la race n'est pas le seul facteur qui détermine une bonne adaptation à un milieu tel que les landes.
L'implantation, ex nihilo, de races anciennes sur les landes est une expérience qui fut déjà tentée durant les
années 1970 à des fins scientifiques et qui s'est soldée par un échec
Il est difficile de consacrer suffisamment de temps et d'énergie pour poursuivre les expérimentations avec
nos animaux et le pâturage de la lande. L'évolution de la santé de nos animaux mis en pâturage sur les landes
est un facteur qu'il faudrait mesurer avec plus de soin ainsi que l'impact des pâtures sur la flore et la faune
sauvage. Le suivi comportemental des animaux est un aspect qui me tient particulièrement à cœur. Il est
intéressant d'étudier la mise en place des parcours d'animaux au sein des enclos en fonction des ressources
naturelles. Toutes ces observations nécessiteraient une démarche approfondie à long terme.
Malheureusement ce n'est pas la mission première du parc et nous n'avons pas mobilisé des équipes de
recherches comme celles de l'INRA.
Le programme INTERREG était une des sources de financement importante pour ces expérimentations de
pâtures sur la lande mais il prend bientôt fin. Nous ne pourrons en conséquence pas mettre tous nos animaux
sur les landes ni poursuivre le rythme actuel des pesées.
Le rôle du parc
Le site du Menez Meur n'a pas pour vocation l'expérimentation mais la démonstration. Néanmoins, il peut
apporter un cadre approprié à des discussions techniques comme la période la plus appropriée pour mettre les
bêtes en pâtures sur la lande, la taille critique pour des enclos de pâtures et enfin, est-il judicieux de créer des
estives collectives dans la région des Monts d'Arrée ?.
La réactivation de pratiques de pâturages communaux se heurte au morcellement du foncier mais l'espace
public du parc naturel d'Armorique peut apporter des réponses.
Nous aimerions mettre en place un programme de formation sur ce sujet afin d'aller plus au fond de ces
questions. Il s'agit de favoriser l'expression des attentes et projets locaux concernant l'usage des milieux de
lande ou zones humides.
Le lien entre la production agricole et les efforts de préservation de la nature doit être mis en valeur pour
aider à la commercialisation des produits. Mais il est difficile de savoir quelle démarche adopter. Doit-on
mettre en place un label spécial lié au parc naturel comme cela a pu être fait dans de cadre d'autres parcs ?
Le Parc Naturel d'Armorique peut apporter son soutien dans la résolution de problèmes liés au morcellement
du patrimoine foncier voire réactiver l'idée de pâtis communaux puisque le territoire du parc est une
propriété publique. Nous avons peut-être plus de légitimité et de moyens pour l'installation de clôture ou
l'aménagement d'un outil d'élevage tel que, par exemple, l'implantation d'un système d'abreuvoir pour les
animaux.
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Jean-Luc Messager
Plonéour Menez, Mardi 22 mai de 9h à 12h sur son exploitation
T. Arbousse-Bastide FRCIVAM Bretagne et P. Cadoret FDCIVAM 29
Jean-Luc pratique la fauche de lande sur son exploitation tous les deux ans afin d'obtenir de la litière pour
son élevage bovin. C'est un savoir-faire que détenaient déjà ses parents et grands-parents. Ces dernières
années, il a bénéficié d'aides publiques dans le cadre de contrats d'entretien de la lande.
Comment se met en place un cycle de fauche de lande ?
La lande doit être fauchée régulièrement suivant un cycle de cinq ans. Après une première fauche, un
nouveau passage doit être effectué après deux ans. Certaines qualités de landes sont très fines. Je recherche à
obtenir le plus de molinie (graminée) possible. Celle-ci pousse sur la lande jeune ce qui explique qu'il faut
effectuer des coupes régulières. J'effectue la fauche de 15 à 20 hectares de landes par an dans le cadre d'un
circuit qui s'étend sur une centaine d'hectares. Les terrains de lande que je fauche ne sont pas tous situés à
proximité de mon exploitation.
Quand et comment pratiques-tu la fauche de lande ?
La période de fauche ne commence pas avant le 15 juillet. C'est une contrainte légale qui interdit de pratiquer
la fauche du 15 mars au 15 juillet afin de préserver la ressource naturelle. La molinie doit présenter un aspect
blanchi décoloré. Il me faut environ trois à six heures pour faucher un hectare de lande ce qui représente de
25 à 35 ballots. Après la coupe, la lande est laissée trois à quatre jours sur place pour la sécher puis on la
collecte et on la rassemble en ballots avec un roundballer.
Quelles sont les difficultés que tu rencontres ?
Certaines parcelles sont faciles à faucher et d'autres posent des problèmes d’épierrage. J'utilise de vieilles
barres de coupe car la casse est fréquente en raison des nombreux cailloux qui se trouvent sur les parcelles de
lande. Ces derniers sont recouverts par la végétation et très difficiles à détecter. Autrefois, ce type de
problème n'existait pas puisque l'on pratiquait une fauche manuelle avec la faucille. La fauche de la lande
peut présenter des inconvénients en raison des nombreuses particules irritantes en suspend dans l'air. Cela me
provoque une allergie respiratoire et cutanée légère.
Quels sont les avantages de la litière et du fumier de lande ?
J'utilise la lande comme litière tout au long de l'année. Ce matériau tient mieux que la paille. J'utilise trois à
quatre ballots par jour en hiver. Le fumier produit avec la litière est particulièrement bon pour la terre.
L'avantage du fumier issu de litière de lande est de permettre un bon équilibrage nutritionnel des terres. La
bruyère présente dans mon fumier apporte plus de carbone que ne le ferait un fumier à base de litière de
paille conventionnel. La litière doit passer au moins deux mois dans l'étable avant son épandage. Il vaut
mieux la stocker sous abri si l'on ne veut pas que la pluie la lessive et que ses qualités nutritionnelles
disparaissent.
Lande et nourriture animale ?
Autrefois, on utilisait l'ajonc broyé pour la nourriture des chevaux de labours. La molinie est aussi un végétal
qui peut être mangé par les animaux. Ces derniers la consommaient autrefois lorsqu'ils étaient mis en pâture
sur les landes. Toutefois, sur les terrains de lande que je fauche, je ne pratique pas de pâture.
Comment as-tu appris ce savoir-faire ?
Mes parents qui pratiquaient la fauche de la lande ne m'ont pas directement appris ce savoir-faire mais j'ai pu
l'observer régulièrement avant de le mettre en pratique. La fauche à la faux et à la faucille est une pratique
ancienne et s'accompagnait de l’épierrement des parcelles en limite des champs et parfois même dans le
champs du voisin.
Aujourd'hui par rapport au secteur du parc quelle proportion de lande te paraît fauchable ?
Je fauche une partie des terres de landes du parc, en ce moment 12 hectares dans le cadre d'un contrat de
5 ans. Je pense que l'on pourrait faucher beaucoup plus de landes mais les jeunes agriculteurs semblent peu
intéressés.
Cela prend du temps et cela demande du savoir-faire pour éviter la casse. De plus, les aides destinées à la
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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fauche de landes entrent souvent en concurrence avec d'autres aides.
Si les aides destinées à favoriser la fauche de lande diminuent continueras-tu cette activité ?
Ces dernières années, je recevais 100 € par hectare de lande fauchée. Si les aides disparaissaient, je
continuerai la fauche car j'ai besoin de litière, c'est une activité qu'a toujours pratiqué ma famille, mais je me
limiterai aux terrains de ma propriété qui sont les moins empierrés. C'est pour moi une activité indispensable
puisqu'il me serait bien difficile de me procurer de la paille localement et en particulier bio.
Il semble qu'il existe des équipements plus adaptés à la coupe de lande ?
Il existe une barre de coupe italienne, multiples lames mobiles destinées à la récolte du chanvre qui est une
plante particulièrement résistante. Toutefois, je ne suis pas sûr que cet équipement soit très bien adapté à la
lande. Qui plus est, ce sont surtout les pierres qui sont la cause de la casse.
Y-a-t-il de la demande de la part des éleveurs pour de la litière lande ?
Oui, particulièrement dans le cadre de l'agriculture biologique. Je vends une partie de ma récolte à 17 euros
le ballot. Je pourrais produire une bonne moitié de plus que ce que je produis actuellement et l'écouler
facilement. Mes ballots de litières sont vendus dans un rayon de 20 kms. Toutefois, le séchage et le stockage
est difficile. Il vaut mieux stocker les ballots de litière lande sous des hangars ou au moins des bâches mais
c'est moins adapté.
Quelle part de travail collectif est nécessaire lors de la fauche de la lande ?
Je demande de l'aide à des amis ou des voisins pour transporter les ballots de landes après la coupe et la
récolte. Une journée de travail de groupe est nécessaire.
Envisages-tu de transmettre ou de former quelqu'un à la fauche de lande ?
Mon neveu aimerait reprendre mon exploitation après mon départ à la retraite dans une dizaine d'années. Il
vient souvent faucher avec moi et faire des ballots de lande. Toutefois, je ne le laisse pas faucher la lande
seul car c'est un travail difficile et la casse arrive vite. Mon neveu comprend vite. C'est un avantage car je
n'aime pas trop me répéter. Les techniques évoluent si vite qu'il apparaît parfois superflu de les transmettre.
Possèdes-tu ton propre matériel pour faucher la lande ?
Le matériel que j'utilise pour la fauche est en CUMA, par contre j'ai acheté le roundballer. Je l'ai adapté à la
collecte de la lande en remontant la hauteur du collecteur. La lande est un matériau assez facile à collecter et
j'évite ainsi des accidents avec les cailloux.
Quelles mesures pourrait-on prendre pour faire revenir les jeunes ?
Les investissements importants que les agriculteurs sont amenés à faire régulièrement sur leurs exploitations
augmentent le prix de rachat de leur exploitation par les nouvelles générations. Ce n'est presque plus rentable
pour un jeune de s'installer dans ces conditions. Par conséquent, il devient aussi presque impossible de
vendre son exploitation en fin de carrière. Les petits projets d'installation apparaissent les plus raisonnables
et pourtant ils ne sont pas pris au sérieux et peu soutenus. Accéder à 10 ha de terre est alors presque
impossible.
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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Borris Prouff
Le 22 mai dans l’après-midi au siège de son exploitation
T. Arbousse-Bastide FRCIVAM Bretagne et P. Cadoret FDCIVAM 29
Quel est ton parcours ?
Je suis né à Morlaix et suis originaire de Plouigneau. Après le Bac, j'ai commencé un DEUG B mais cela m'a
déplu et j'ai laissé tomber. J'ai travaillé par la suite comme animateur dans des classes de mer, le tourisme
social avec la CAF et le Secours Populaire auprès d'un public défavorisé comprenant, par exemple, des
réfugiés politiques. Pendant ce temps, j'ai fait une demande pour passer mon BTS GPN en candidat libre à
La Roche/Yon en Vendée. J'ai fait mon stage sur les landes du Cragou avec l'association « Bretagne
Vivante ». C'est dans ce cadre que j'ai découvert les Monts d'Arrée et que j'ai décidé d'y rester depuis 1996.
J'ai tout d'abord travaillé en tant qu’animateur bénévole indemnisé dans la région du Cragou, de Brénnilis, et
de l'abbaye du Relec. Ensuite, j'ai effectué mon service civil de 17 mois en tant qu'objecteur de conscience
puis j'ai bénéficié d'un emploi jeune et ensuite d'un CDI.
En quoi consiste ton travail pour "Bretagne-Vivante"?
Aujourd'hui, mon travail pour l'association « Bretagne Vivante » consiste essentiellement en de la gestion et
du suivi naturaliste. Il s'agit de contrôler l'impact du pâturage sur la végétation, la faune et tout
particulièrement les oiseaux nicheurs. J'interviens aussi en soutien pour d'autres études. L'association
possède quelques vaches et poneys que nous faisons pâturer sur des terres de landes humides et du bas
marais qui sont en petite partie la propriété de la SEPNB ou appartiennent au Conseil Général.
Gestion du pâturage et transmission du savoir-faire
J'ai appris en travaillant auprès de Daniel Pesquer à Pleyber Christ. C'est le salarié qui s'occupait de nos
bêtes. Quand les vaches sont arrivées sur le site, c'est un paysan qui s'en occupait mais c'était beaucoup de
travail pour lui. On a travaillé ensemble un certain temps puis on a pris la maîtrise complète de nos vaches.
Pour l'instant, les vaches et juments sont séparées mais je pense que nous allons les rassembler. Ces animaux
ont des comportements complémentaires, ils "taillent leur chemin" ensemble. Les vaches commencent à un
endroit en mangent devant elles et les juments suivent en broutant plus sporadiquement.
Les problèmes de « sur-pâturation » ?
On a plutôt de la lande humide et seulement trois hectares et demi de prairie humide. Les terrains pâturés
s'abîment vite par endroit et la gestion n'est pas facile. On a essayé de répartir la pression en utilisant des
clôtures volantes mais c'est inadapté au terrain et cela demande beaucoup de travail. Il s'agit pour nous
d'essayer de maintenir une mosaïque de végétation.
Le suivi des animaux
Nous avons des vaches et taureaux de race nantaise. Les veaux mâles sont revendus pour la viande. Nos
poneys sont de race Dartmoor. Les premiers animaux étaient nés ailleurs mais ils se sont bien habitués à
l'environnement local. Ils connaissent les parcelles et font leur circuit seuls. Les pesées pour les poneys
indiquent que nos animaux sont en bonne santé. Chaque jument produit un poulain par an.
Le calendrier du pâturage
La saison du pâturage pour la molinie commence le 15 mars et finit mi-octobre début novembre. La
difficulté est d'avoir des endroits où mettre les animaux au début du printemps et en fin d'automne. Pour
l'hiver, on achète notre foin à l'extérieur et on utilise environ un ballot par semaine.
Les systèmes de clôture
On utilise la clôture électrique qui était déjà en place. Un double rang électrique installé sur des piquets fixes
convient aux poneys et aux vaches. Nous n'utilisons pas de barrières mobiles. Les piquets en plastique
utilisés pour les barrières mobiles et plantés dans la tourbe ne tiennent pas. Le gardiennage serait une
solution mais c'est trop onéreux. Nous utilisons moins les clôtures pour les animaux que pour limiter l'accès
par rapport au public des visiteurs.
Lande et tourisme vert
Nous proposons des visites guidées ou libres et des animations durant la période estivale. Il s'agit de valoriser
la lande comme milieu naturel tant au niveau de la faune et de la flore. Le public est intéressé mais il est tout
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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de même moins nombreux que sur la côte. Ce sont surtout des personnes qui bénéficient d'un hébergement
de vacances localement et qui ont le temps de se promener. Toutefois, les visites restent insuffisantes pour
financer entièrement le site et les salaires. Les visiteurs sont surpris de la richesse de la lande qu'ils imaginent
souvent comme une sorte d'étendue désolée. Nous parlons aussi des usages traditionnels de la lande et
essayons de promouvoir l'agriculture durable.
Une plante aromatique des marais
Le piment royal (myrica gale) est un buisson avec des feuilles proches du saule mais plus petit. Lorsque l'on
en frotte des rameaux, ils dégagent une forte odeur de piment. Il existait des recettes de bière « le gouet »
aromatisées avec cette plante, mais on se servait surtout du piment royal pour masquer le goût faisandé de la
viande sur les bateaux. Toutefois, son usage nécessite quelques précautions car c'est un fort laxatif. Ce n'est
pas une plante protégée mais elle est sur la liste rouge.
Quel est ton usage des landes ?
Pratiques-tu une installation progressive ?
J'ai acheté mon actuelle propriété fin 1999. Afin de m'installer progressivement à partir de 2002, j'ai
demandé de requalifier mon contrat en mi-temps. J'arrive aujourd'hui à 15 mères (vaches), 25 brebis,
5 chèvres, 1 truie, 1 vachette.
Fauche et défrichage
J'ai quelques terrains de landes mais dans des endroits plutôt escarpés. Ce sont des "landes hautes" où je
pratique des pâtures. Toutefois, on y trouve pour l'instant plus d'ajoncs que de bruyère et de molinie. Un
défrichage est souvent nécessaire. Sur une de mes parcelles de 3 000 m 2, certains ajoncs atteignaient parfois
3 à 4 mètres de hauteur. J'ai dû la passer au broyeur en Janvier dernier. La fauche de lande est une activité
ancienne dans le coin. Elle me permet d'obtenir une litière de bonne qualité.
Pâtures de landes
La molinie doit être broutée tendre sinon les animaux la refusent. J'y mets mes animaux dès fin mai. Ce sont
surtout les vaches armoricaines que j'emmène pâturer sur ces parcelles de landes assez loin du siège de mon
exploitation. Je préfère garder les moutons et les chèvres à proximité de ma maison pour les protéger des
chiens errants.
L'avantage des landes
Les landes permettent de mettre en repos les autres pâtures et l'on peut aussi pratiquer la fauche pour obtenir
de la litière. Je n'avais pas envie d'acheter de la paille pour faire mon fumier. J'ai décidé de prendre presque
7 ha de lande pour faire de la nouvelle fauche en contrat MAE. Ces aides me permettront d'acquérir un
rounder. Si j'avais pu, j'aurais acheté à mon compte plus de landes.
Chèvres et landes
J'ai quelques chèvres des fossés que je laisse le plus souvent avec mes moutons sauf lorsque je les mets en
pâture dans les vergers. Ce sont des animaux bien adaptés aux landes car ils s'attaquent à n’importe quel
ligneux et le piétinement est peu important. Pour l'instant, je ne pratique pas la traite mais j'arrive bien à
vendre des chèvres pour la conservation de la race et les femelles sont mêmes achetées avant la naissance.
La lande, matériau de construction
Les bottes de lande pourraient servir à faire de la bio-construction. Nous avions fait un essai assez concluant
de construction de cabanes pour les poneys de "Bretagne Vivante". La lande a les mêmes qualités que les
bottes de pailles que l'on utilise en architecture. On pourrait s'en servir pour des bardages dans les bâtiments
d'exploitation et notamment isoler des courants d'air.
Les fagots d'ajonc comme combustible
Autrefois, on faisait des fagots d'ajoncs que l'on revendait au boulanger afin de chauffer les fours. J'ai
participé à une expérience similaire avec des amis qui font du pain dans le cadre de leur association
« croqueurs de pain ». On utilise l'ajonc d'Europe en raison de son haut port. Les buissons doivent avoir au
minimum cinq ans pour produire des rameaux de 5 à 15 cm de diamètre. La coupe s'effectue en hiver et les
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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branches sont laissées sur place pour sécher et faire tomber les aiguilles. Le bois est rassemblé en fagots pour
le transport. Il nous a fallu deux jours de collecte en équipe de 15 personnes pour récolter une surface de
3 000 m2 et un autre dimanche entier à 10 personnes pour le transport. Les fagots sont défaits pour alimenter
le four lors de la chauffe. Il semblerait, au dire des anciens, que la cuisson à l'ajonc donne un goût particulier
au pain. C'est une plante qui a de l'odeur.
Le ramassage des graines d'ajonc
L'ajonc est une plante que l'on cultivait dans la région. Pour récolter les graines, on pose un parapluie en
dessous des plantes à la fin de l'été avant que les gousses n'éclatent et on frappe les branches. Il est nécessaire
de faire un tri. Autrefois, les femmes ramassaient les graines pour les semer. L'ajonc servait pour la
nourriture des chevaux.
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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Thierry Machard
Le 23 mai au matin au Lycée Agricole Le Nivot
T. Arbousse-Bastide FRCIVAM Bretagne et P. Cadoret FDCIVAM 29
L'usage traditionnel des landes
Lorsque l'on évoque l'usage traditionnel des landes, on pense souvent à des pratiques relativement récentes
qui correspondent au paysage existant dans les années 1950. Il s'agit essentiellement des pratiques de fauche
destinées à produire de la litière pour les animaux. Le pâturage sur landes est plus ancien et remonte à une
période essentiellement antérieure à la première guerre mondiale. Les archives du Parc Naturel Régional
d'Armorique nous indiquent que l'on comptait environ 6 000 brebis sur la commune de Brasparts dans les
années 1870. Peu avant 1914 le cheptel, s'était réduit de moitié et les moutons avaient presque disparu entre
les deux guerres. L'élevage de moutons sur les landes est une forme d'utilisation des terres qui avait
complètement disparu. L'usage des landes pour l'élevage d'animaux correspond à des traditions anciennes
dans les Monts d'Arrée remontant, pour la plupart, à l'Ancien Régime. Certains vestiges de parcellaire
circulaire observés dans la région suggèrent un usage pour le parcage des animaux qui remonterait à l'Age du
Bronze.
La fauche de landes
La fauche des landes correspond essentiellement à une période qui va d'avant la guerre de 1914-1918 et qui a
perduré jusqu'au début des années 1970. Cette lande était peu utilisée localement en raison du faible nombre
de vaches que les paysans possédaient localement. On la destinait essentiellement à la vente sous forme de
litière. La lande fauchée était transportée par camion dans le Léon au cours des années 1940.
Lande et conservation de l'environnement
La lande, comme espace naturel, a changé de fonction depuis les années 1960. Aujourd'hui, on parle de
conservation plus que d'élevage ou d'agriculture.
Une rupture des chaînes de transmission
L'oubli dans lequel est tombé l'élevage ovin dans la région est considérable. Il existe un trou culturel énorme
par rapport à un pastoralisme qui a existé autrefois. Il ne reste par exemple aucune recette de cuisine liée au
mouton alors qu'il était encore présent localement entre les deux guerres. Les personnes qui pratiquaient cet
élevage ont disparu et leur savoir-faire avec eux. Toute la culture pastorale de Bretagne semble s'être
évanouie et pourtant sur le terrain, la toponymie rappelle en bien des endroits cette pratique.
Le morcellement des pâtis communaux
Les pratiques de pâturages communaux ont disparus suite aux premières transformations cadastrales au
moment de la révolution de 1789. Les terrains indivisés (terres seigneuriales, communaux, terres appartenant
à l'église) ont été distribués aux paysans en proportion du nombre de bêtes détenues par les communautés ou
éleveurs. Auparavant, chaque village était lié à sa colline de landes exploitée en commun. Les plus tourbeux
devaient servir à l'extraction du combustible tandis que toutes les parcelles praticables comme estives étaient
utilisées en pâturages collectifs, voire par endroit comme lieu de cultures.
Les races rustiques de Bretagne
Les races dites locales et rustiques que nous connaissons aujourd'hui en Bretagne sont issues de
reconstitutions par sélection réalisées en fonction de critères fixés dans les années 1920-1930. Il semblerait
qu'il n'y ait pas véritablement eu de démarche de recherche autre qu’esthétique. On est parti de l'imagerie
animale et des comparaisons par rapport au cheptel de l'époque. On n’a pas vraiment cherché à recréer une
race à partir de qualités appréciées localement. Depuis, la consanguinité est importante en raison de la
faiblesse des cheptels. Pour ces raisons, les races dites locales ne sont pas très pratiques. Ainsi par exemple,
la laine des moutons Lande de Bretagne est grossière et cassante. On ne peut s'en servir que pour des draps et
matelas.
La brebis d'Ouessant n'est pas non plus une véritable race locale, il s'agirait plutôt d'une cargaison d'animaux
issus d'un échouage de bateau. Le mouton de Belle-Ile est un autre exemple paradoxal car sa capacité à se
reproduire vite est très importante et semble incompatible avec l'espace limité d'une île.
Le taux de consanguinité a réduit progressivement la taille d'animaux locaux qui devaient avoir un plus gros
format, autrefois entre 50 et 60 kg. Ces raisons peuvent expliquer le déclin de l'élevage ovin en Bretagne.
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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L'évolution du paysage des landes
Les landes d'aujourd'hui sont très différentes du paysage de landes pâturées et fauchées d'autrefois. Le niveau
de fauche était beaucoup plus important, les plantes légumineuses devaient être mêlées à la lande afin que le
taux de plantes nutritives soit plus important. La valeur alimentaire des landes était importante et c'était lié à
une terre plus riche en raison d'un taux de pâturage plus important et régulier. La couleur de la molinie, ellemême, change énormément d'un champ pâturé à un champ de friches. La molinie de pâture est d'un vert
beaucoup plus prononcé tandis que la molinie non pâturée est pâlotte et plus claire.
La conservation des landes
Aujourd'hui, il faut concilier la pratique du pâturage avec les impératifs de la conservation du milieu. Des
évolutions seront toutefois inévitables. Les landes que j'ai repris en pâturage avaient brûlé en 1996 et
n'avaient pas été exploitées depuis longtemps. Le milieu était devenu trop fermé et la molinie ainsi que bien
des plantes de sous étages n'avaient pas suffisamment d'accès à la lumière ou photosynthèse. Il reste bien des
graines d'anciennes légumineuses liées aux anciens pâturages des landes dans le sol puisque, après le passage
de mes brebis, certaines plantes fourragères ont repoussé naturellement. La pratique de conservation
environnementale dans les pâturages, c'est peut-être de faire cohabiter plantes des pâturages qui étaient
autrefois présentes et les plantes des landes.
Comment es-tu devenu berger et pourquoi ?
Après une expérience décevante en tant que leader étudiant en lycée technique, j'ai connu une petite période
d'errance durant laquelle j'ai rencontré un berger. C'est lui qui m'a donné envie d'exercer ce métier. Mes
premières expériences dans ce métier se sont déroulées dans la Vienne. Je me suis formé en partie sur le tas
et au fil de multiples expériences dans diverses régions de France (Limousin, Berry, Vosges, Auvergne,
Aveyron, Alpes, Vercors, Gers, Touraine) et d'Europe. Je me suis ainsi sensibilisé au système herbager, aux
pâturages sur terres pauvres en plein air ou semi-plein air, notamment en Irlande dans un environnement non
clôturé. J'ai pratiqué de nombreuses transhumances en montagne dans des conditions parfois difficiles. J'ai
ensuite travaillé dans l'élevage industriel mais ce fut pour moi une expérience traumatisante.
Dégradation des paysages entre 1930 et 1950
Les systèmes agricoles de mélanges de céréales telles que le seigle et le blé que l'on trouvait autrefois en
Bretagne permettaient de limiter la pousse de mauvaises herbes. Le maintien de prairies à pâtures était une
manière de maintenir un sol couvert. Avec le recours systématique aux engrais chimiques durant les années
1930, les mélanges des céréales cultivées est devenu impossible. Certaines variétés arrivaient beaucoup plus
vite à maturité que d'autres et il devenait impossible de récolter le seigle et l'épeautre en même temps. Le sol
agricole était finement hersé après les labours pour faciliter la pousse des espèces plantées par rapport aux
mauvaises herbes. A partir des années 1950, l'arrivée du désherbant a rendu tout retour en arrière impossible
et les labours sont devenus grossiers.
Quand et comment t'es tu installé en Bretagne ?
J'ai tout d'abord été berger pour le Lycée Agricole du Nivot. Malheureusement, après 6 mois, la ferme-école
a été partiellement fermée. Le conseil d'administration a décidé de conserver les vaches laitières et les
cochons mais pas les moutons. J'ai proposé de reprendre le troupeau sur les terres de l'école anciennement
destinées aux céréales. Ce projet d'installation a été accepté en juin 2004. Depuis, je travaille aussi sur les
terres de landes du PNR dans un objectif de conservation selon un cahier des charges rigoureux.
Le pâturage sur landes
Mes expériences d'élevage extensif en tout plein air dans d'autres régions de France m'ont beaucoup servi. Je
me suis adapté au climat et la topographie des lieux. Le choix des zones de pâturage sur St Michel
correspondent à un ressenti personnel. Je n'ai pas souhaité intervenir trop fortement sur le milieu. Je voulais
qu'il y ait une adaptation des bêtes au milieu et pas le contraire.
Les animaux ont d'ailleurs retrouvé seuls les anciens sentiers des pâturages. Aujourd'hui après quelques
années, il y a une forte évolution du secteur pâturé.
Le débroussaillage mécanique des landes
Certaines zones d'ajoncs de « Le Gall » restent toutefois trop denses et il faudra probablement que j'ouvre le
Tristan Arbousse-Bastide, FRCIVAM Bretagne juin 2007
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milieu mécaniquement. Le débroussaillage des landes par des moyens mécanisés est dangereux en raison des
nombreuses pierres qui se trouvent en surface. Le passage des barres de coupes peut provoquer des étincelles
et des projections pouvant allumer un feu qui se propage alors très vite.
La brebis « Suffolk »
L'élevage de brebis est très spécifique aux races et aux lieux. Il y a une notion de pays qui a dû disparaître ici
durant les années 1950. Je savais que la brebis « Suffolk » serait adaptée aux landes. C'est une brebis
herbagère pas trop lourde qui accepte de beaucoup marcher. C'est ce comportement indépendant des animaux
qui m'a sauvé de la catastrophe l'an dernier lors d'une tempête (fort vent de 110 km/h, pluie et froid). Les
animaux ont cassé la clôture pour aller se réfugier dans un endroit abrité.
Comment ont réagis les gens du coin à ton installation ?
Beaucoup ont pris ma démarche comme l'action d'un marginal, mais après une année certains ont été surpris
de voir la bonne santé de mes bêtes dès la première descente des brebis. Il a pu y avoir des jalousies et des
malentendus au sujet de subventions et certaines dégradations ont été constatées sur les clôtures. Toutefois, je
suis aujourd'hui bien accepté et la transhumance des brebis est devenue, après trois ans, un événement
attendu.
Quel est ton cheptel ?
J'ai aujourd'hui 350 brebis adultes, 60 jeunes de l'année, et 50 petits. 410 animaux pour le cheptel
reproducteur. Je ne veux pas plus car il faudrait intensifier ou reprendre de la surface en plus et il n'y en a
pas.
Quelles sont tes relations avec les chasseurs ?
Cela aurait pu mal se passer mais ils sont intéressés d'avoir un meilleur entretien des milieux naturels. Les
lapins qui étaient sur les sommets redescendent, les faisans commencent à entrer dans la lande plutôt que de
rester en périphérie. Mon installation correspond aussi à une période où les chasseurs souhaitaient
communiquer positivement sur l'environnement.
Quel est le suivi de la lande pâturée ?
Il existe un suivi botanique et ornithologique de la lande mais peu de suivi par rapport à la faune et
notamment les insectes. Une vie autre s'installe mais personne ne suit son développement. Ce serait
intéressant d'étudier le changement de la valeur nutritive alimentaire de la lande et notamment de la molinie
pour mieux communiquer sur l'utilité de ce système d'élevage. Cela pourrait être un outil de promotion par
rapport à d'autres utilisations des landes. On pourrait par exemple trouver des équivalents en génisse.
Quel avenir pour l'élevage sur la lande ?
Il y aurait beaucoup de place pour faire de l'élevage sur la lande. Ce serait bien sur des estives plus courtes de
2 ou 3 mois mais de bonnes économies sont possibles.
Pourrait-on valoriser l'image et la commercialisation des produits ?
Certains Centres Commerciaux nous ont contactés suite aux articles de Ouest France mais je ne n'ai pas
suffisamment de viande à proposer. Je prépare aussi un site internet mais il est surtout destiné à la
commercialisation de la laine.
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