Banques centrales - Etudes économiques du Crédit Agricole

Transcription

Banques centrales - Etudes économiques du Crédit Agricole
Apériodique – n°13/34 – 6 mai 2013
Banques centrales : évolution ou révolution ?

La politique monétaire de la Réserve Fédérale
devrait rester exceptionnellement accommodante
pendant encore deux ans. Les mesures nonconventionnelles resteront dépendantes de
l’évolution des objectifs quantitatifs et des
risques macro-économiques et financiers, sur
fond de transparence accrue et de meilleure
communication avec le marché.

La nouvelle équipe dirigeante de la Banque du
Japon mène une action audacieuse visant à
accroître la transparence et l’efficacité de la
politique monétaire, y compris son impact sur la
confiance et les anticipations d’inflation.

Le nouveau mandat de la Banque d’Angleterre a
confirmé le caractère flexible de la cible
d’inflation et mis l’accent sur les mesures non
conventionnelles. Des achats d’actifs restent
possibles, tandis que le niveau d’inflation
supérieur à l’objectif et le « paradoxe de
productivité » rendent plus problématique le
recours à une forward guidance assortie de
seuils intermédiaires au Royaume-Uni.

La Banque centrale européenne n’a pas épuisé
toutes
les
possibilités
d’assouplissement
monétaire, et l’histoire a montré que le Traité ne
constituait pas un obstacle insurmontable.
Toutefois, face aux actions des autres Banques
centrales, le risque demeure que la BCE, toujours
plus isolée, soit contrainte d’envisager des
mesures plus radicales si la contraction du crédit
venait à s’accentuer dans les pays de la
périphérie de la zone euro.

Pour
les
investisseurs
obligataires,
les
implications des politiques non conventionnelles
doivent être analysées à un niveau non pas
national mais global, compte tenu de la
corrélation élevée entre les taux de différentes
devises et du mécanisme de transmission à
travers les taux de change.

Les primes de risque des taux EUR peuvent
rester faibles pendant plusieurs trimestres mais,
à terme, représentent un risque important et
pourraient conduire à une correction marquée.

Du point de vue des taux de change, l’USD
devrait profiter de ce que la Fed commencera à
ajuster sa politique monétaire bien avant la
Banque du Japon et la Banque d’Angleterre. La
marge de manœuvre dont dispose encore la BCE
devrait limiter toute appréciation de l’euro,
d’autant plus que la perspective de l’adoption
d’un biais moins accommodant par la Fed
conjuguée à des perspectives de croissance plus
optimistes devrait orienter les flux de capitaux en
faveur de l’USD.
Sommaire
Résumé
Introduction
La réponse politique de la Réserve Fédérale
La Banque du Japon
La Banque d’Angleterre
Banque centrale européenne : est-elle si différente ?
Conclusion
Achevé de rédiger le 23 avril 2013. Traduit de l’anglais.
Michael P. Carey - Chef économiste – Amérique du Nord
Kazuhiko Ogata - Chef économiste – Japon
Frederik Ducrozet - Economiste senior – Zone euro
Slavena Nazarova – Économiste – Zone Euro/Royaume-Uni
2
2
4
7
9
12
15
Résumé
Les outils de politique monétaire et l’ampleur de la
réponse des grandes banques centrales à la crise
reflètent les différences au niveau des institutions et des
structures économiques entre Etats-Unis, Japon,
Royaume-Uni et zone Euro. Les réponses politiques ont
évolué au point qu’on peut désormais parler de
nouveaux régimes dans la politique des banques
centrales. Ces nouveaux outils font apparaître de
nouveaux risques et nécessitent une communication
accrue de la part des décideurs pour garantir l’efficacité
de leurs politiques et le maintien de la crédibilité des
banques centrales. À l’avenir, le mandat des banques
centrales devra souvent être revu pour incorporer
l’objectif de stabilité du système financier, sans
compromettre pour autant leur indépendance. Les
efforts visant à ouvrir l’accès au crédit à des segments
ciblés du marché, tels que celui des petites et moyennes
entreprises (PME) évoluent eux aussi. Après avoir
analysé les nouveaux outils et les nouvelles approches
mis en œuvre, nous formulons une série de scénarios
prédisant les évolutions probables de la politique
monétaire.
L’abaissement simultané des taux directeurs jusqu'à des
niveaux très bas conjugué à l’adoption d’une forward
guidance et à d’autres mesures d’assouplissement
monétaire ont entraîné une baisse des taux et un
aplatissement des courbes de taux spot et à terme. À
plus long terme, toutefois, la baisse ex ante des primes
de terme semble indiquer que, lorsque les anticipations
monétaires se retourneront, une correction brutale des
rendements pourrait se produire sur les parties
intermédiaire et longue de la courbe. Les variations de
change refléteront l’ampleur et la détermination des
politiques monétaires mises en œuvre ainsi que par la
performance relative de ces économies sous l’effet de
ces politiques. Compte tenu de notre analyse de ces
deux facteurs, l’euro semble receler un potentiel
d’appréciation limité dans l’avenir prévisible. Le JPY
devrait encore se déprécier par rapport à l’USD compte
tenu de l’action toujours plus énergique de la Banque du
Japon. 
Rapport de l’actif des Banques centrales au PIB
ECB
0.45
Federal Reserve
Bank of England
Bank of Japan
0.40
0.35
0.30
0.25
0.20
0.15
0.10
0.05
0.00
2006
2006
2007
2007
2008
2008
2009
2009
2010
2010
2011
2011
2012
2012
Source : Réserve Fédérale, Banque d’Angleterre, BCE, BEA, Eurostat, Bloomberg
Introduction
La crise financière survenue à la fin de la dernière
décennie a contraint les autorités monétaires à trouver
de nouveaux moyens de répondre à la crise économique
mondiale. Les différences liées aux aspects historiques,
aux mandats juridiques et à l’importance relative du
secteur bancaire et des marchés de capitaux dans le
financement de l’économie ont façonné la réponse de
ces institutions face à la crise. Pour la Réserve
Fédérale, la référence historique principale est la
Grande Dépression, tandis que pour la Banque centrale
européenne (BCE) la crise inflationniste de la
République de Weimar revêt peut-être une importance
égale. Au Japon, le phénomène déflationniste persistant
reste une préoccupation essentielle. La BCE et la
Banque du Japon (BoJ) évoluent dans des économies
où les banques occupent une place plus centrale et elles
N° 13/34 – 6 mai 2013
se sont, donc, focalisées sur les prêts au système
bancaire. La Fed et la Banque d’Angleterre (BoE) en
revanche, ont donné la priorité aux achats d’obligations
compte tenu de l’importance plus grande des marchés
de capitaux dans le financement de leurs économies.
Les différences dans les mandats des banques
centrales jouent peut-être également un rôle. La BoE, la
BCE et la BoJ ont une hiérarchie d’objectifs, le premier
d’entre eux étant la stabilité des prix. En revanche, la
Fed obéit à un double mandat qui la conduit à chercher
simultanément à parvenir à un niveau d'emploi maximal
soutenable et à la stabilité des prix. En temps normal,
les grandes banques centrales mènent des politiques
assez similaires. La norme consiste à maintenir l’inflation
autour de 2 % et de soutenir la croissance sans
compromettre la stabilité des prix. Toutefois, la période
2
actuelle est loin d’être normale dans la mesure où la
reprise de l’économie est médiocre ou tarde à arriver
dans beaucoup de grandes économies.
monétaires jouent un rôle important pour atténuer le
scepticisme des intervenants du marché et pour
expliquer la politique monétaire au grand public.
Dans la présente étude, notre équipe mondiale d’experts
passe en revue les réponses innovantes de la Réserve
Fédérale, de la Banque du Japon, de la Banque
d’Angleterre et de la BCE à la crise économique. Quels
objectifs les autorités monétaires ont-elles définis pour
mener leur politique ? Pourquoi certaines politiques ontelles été choisies et comment ont-elles été mises en
œuvre ? Si l’introduction de nouveaux instruments de
politique monétaire peut apparaître comme une réponse
ad hoc à des circonstances exceptionnelles, la question
d’un « changement de régime » pour les banques
centrales doit se poser. En outre, ces changements ont
suscité de nombreuses inquiétudes au sujet des risques
et des effets secondaires liés à certaines des nouvelles
politiques menées. Les intervenants du marché
s’interrogent sur les implications à court et à plus long
terme des nouvelles politiques pour la croissance,
l’inflation, les taux d’intérêt et les taux de change.
Souvent, ces nouvelles politiques n’ont pas été
préalablement « testées ». De fait, les efforts redoublés
de communication mis en œuvre par les autorités
Enfin, nous étudions différents scénarios sur l’évolution
future que peuvent prendre les différentes politiques
monétaires. En premier lieu, il importe de savoir si de
nouvelles politiques s’imposent pour parvenir aux
objectifs fixés actuellement par les responsables
politiques. La Banque du Japon doit-elle recourir à des
outils différents ou changer complètement d’approche
pour sortir le Japon de la déflation ? Faut-il ajuster les
politiques en Europe de manière à cibler certains
secteurs spécifiques, tels que celui des petites et
moyennes entreprises (PME) ? En second lieu, nous
nous intéressons au changement des objectifs euxmêmes. Par exemple, le rôle accru des banques
centrales pour contrer le risque systémique pourrait
influencer la gestion de la politique monétaire au-delà
des mandats traditionnels de lutte contre l’inflation et de
soutien à la croissance, conduisant les instituts
d’émission à tenir compte de la « surchauffe » des
marchés. Dans le contexte actuel de redéfinition du rôle
des banques centrales, nous élaborons quelques
scénarios sur les évolutions futures. 
Taux d’inflation sous-jacente relatifs entre les différents pays (en %)
4
3
2
1
0
-1
-2
Feb05
Oct05
Jun06
Feb07
Oct- Jun07
08
Japan
Feb09
EU
Oct- Jun09
10
U.K.
Feb11
US
Oct11
Jun12
Feb13
Source : US Bureau of Labor Statistics, Ministère japonais des Affaires internes et des
Communications, Office britannique des statistiques, Eurostat
N° 13/34 – 6 mai 2013
3
La réponse politique de la Réserve Fédérale
Objectifs, politiques, mise en œuvre et
risques
La réponse de la Réserve Fédérale à la crise financière
qui a commencé à la fin 2008 a comporté plusieurs
volets. La Fed a joué un rôle essentiel en tant que
prêteur en dernier ressort lorsque la liquidité s’est
tarie sur de nombreux marchés importants. La Fed a
réagi pour assurer la liquidité de marché tout en
étendant les lignes de swap de devises avec les autres
grandes banques centrales. Elle a mis en œuvre une
série de programmes, décrits par une longue série
d’acronymes, afin de pallier les dysfonctionnements des
différents segments de marché. L’octroi de liquidités aux
institutions qui ne reçoivent pas de dépôts et à des
segments de marché particuliers soulève un certain
nombre de questions sur le rôle de prêteur en dernier
ressort de la Fed. Il devient plus compliqué de distinguer
les concepts d’illiquidité et d’insolvabilité pour des
établissements sur lesquels la banque centrale dispose
d’informations limitées. Toutefois, les changements
apportés à la législation américaine limitent désormais
les prérogatives unilatérales de la Fed aux situations
d’urgence.
La Fed a dû faire face à une aggravation de la
récession, avec une contraction de près de 9 % de la
production américaine au quatrième trimestre 2008. Les
politiques monétaires non conventionnelles sont
apparues comme une nécessité lorsque l’objectif
nominal de taux d’intérêt de la Fed a atteint un
niveau plancher. Au printemps 2009, les principales
banques centrales avaient ramené leurs taux directeurs
jusqu'à 1 % voire en-dessous, le taux cible des Fed
funds étant compris entre 0,00-0,25 %. Toutefois, étant
donné l’ampleur de la hausse du taux de chômage et du
ralentissement de l’inflation sous-jacente par rapport aux
mandats de la Fed, une règle de type Taylor aura requis
des taux Fed funds très inférieurs à zéro, d’où la
nécessité de mettre en œuvre des politiques non
conventionnelles d’assouplissement quantitatif. La Fed a
estimé que son programme massif de rachat d’actifs
entraînerait une baisse des taux d’intérêt à long
terme et favoriserait une amélioration générale des
conditions sur les marchés financiers. Le programme
a soutenu la valorisation du marché actions, et l’effet
positif de cette évolution sur le patrimoine des ménages
a dopé la consommation. Différentes études montrent
que les programmes de la Fed ont entraîné une
baisse limitée des taux longs (0,25-0,50 point de
pourcentage). De fait, la reprise économique a
reposé sur les autres canaux de transmission.
En plus de l’assouplissement quantitatif le FOMC a
mis en place une politique de forward guidance
indiquant le timing de la prochaine hausse des taux
Fed funds. Cette politique vise une fois encore à
exercer une pression à la baisse sur les taux. La forward
guidance sur la période durant laquelle le taux des Fed
funds restera à des niveaux exceptionnellement bas est
passée de « période prolongée » à une approche basée
sur un calendrier (au moins jusqu'à la mi-2015) avant
l’approche actuelle basée sur des seuils chiffrés. Cette
dernière consiste à maintenir le taux cible des Fed funds
compris entre 0,00 % et 0,25 % aussi longtemps que le
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chômage restera au-dessus de 6,5 %, que l’inflation
prévue à 12-24 mois ne dépasse pas 2,5 % et que les
prévisions d’inflation à plus long terme restent bien
ancrées.
Les programmes d’assouplissement quantitatif (QE) ont
été critiqués par certains qui estimaient que la création
de réserves par la Fed (« le recours à la planche à
billets ») finirait par créer de l’inflation. Toutefois, la Fed
affirme que lorsque ces réserves excédentaires
commenceront à stimuler l’activité économique, elle
dispose des outils nécessaires (prises en pension,
dépôts à terme auprès de la Fed, taux d’intérêt payés
sur les réserves excédentaires et ventes fermes) pour
éviter la menace inflationniste éventuelle.
De fait, pour l’heure, l’inflation sous-jacente sur les
prix à la consommation reste inférieure à l’objectif
de la Fed. Toutefois, les craintes liées à
l’augmentation du bilan de la Fed devraient perdurer
dans la mesure où les difficultés que pourrait
rencontrer la Fed dans la mise en œuvre d’une
stratégie de sortie risquent d’augmenter avec la
taille de son bilan. De plus, le processus de sortie
n’a jamais été testé. M. Bernanke estime que les
avantages du programme actuel d’assouplissement
quantitatif l’emportent sur les coûts potentiels. Nous
anticipons
une
amélioration
significative
des
perspectives sur le marché du travail, ce qui devrait
conduire le FOMC à réduire progressivement ses achats
d’actifs (actuellement de 85 Mds USD par mois), à la fin
de cette année avant de mettre fin au programme au
printemps prochain. Toutefois, la Fed attendra beaucoup
plus longtemps, d’après notre analyse, avant de
commencer à normaliser l’objectif de taux sur les Fed
funds.
Un autre reproche adressé à la Fed est que ces achats
de bons du Trésor américains entraînent une
monétisation de la dette fédérale. Selon nous, on
reproche ainsi à la Fed d’utiliser l’expansion de la base
monétaire comme une source permanente de
financement pour les dépenses publiques. Or, étant
donné que la banque centrale américaine reverse au
Trésor les intérêts perçus sur son portefeuille d’actifs, le
gouvernement peut emprunter et dépenser gratuitement.
A l’évidence, toutefois, tel n’est pas l’objectif poursuivi
par la Fed et la stratégie de sortie prévoit de ramener le
bilan à un niveau normal à terme. Certes, à mesure que
les taux se normalisent, les ventes fermes pourraient se
traduire par des pertes sur le portefeuille de la Fed et
par une diminution des sommes versées au Trésor, mais
cela ne nous apparaît pas comme une contrainte sur la
stratégie de sortie de la Fed. Sur le cycle d’activité tout
entier, l’impact devrait être, au pire, neutre, dans la
mesure où la Fed reverse actuellement des montants
records au Trésor.
Ces deux critiques portent sur la question de
l’indépendance de la Fed et celle des excès de
réglementation du secteur financier. Si les investisseurs
se persuadaient que la Réserve Fédérale était assujettie
au gouvernement fédéral et qu’elle avait l’intention
d’aider le gouvernement à réduire le poids de sa dette
via l’inflation ou était contrainte d’acheter la dette du
Trésor, on pourrait avoir de sérieux doutes sur son
4
indépendance car elle se trouverait dans une situation
de « sujétion budgétaire »1. Il ne fait pas de doute que
les politiques non conventionnelles ont été décidées
dans un contexte d’écart élevé entre la croissance
réalisée et la croissance potentielle (« output gap »), et
pour parer aux risques déflationnistes, et non pas pour
aider au redressement de la position budgétaire du
gouvernement. Toutefois, à l’avenir, la Fed devra tenir
compte de ces critiques dans sa politique et dans sa
communication avec les marchés.
Certains
ont
critiqué
les
politiques
d’assouplissement quantitatif comme étant des
politiques
protectionnistes
de
dévaluation
monétaire. M. Bernanke affirme que la politique
monétaire est accommodante dans la plupart des
économies industrielles avancées si bien « qu’on ne doit
pas s’attendre à des changements importants et
durables dans la configuration des taux de change entre
ces pays »2. Ces politiques accommodantes ont été
mises en œuvre pour soutenir la demande
domestique agrégée, ce qui aura des retombées
positives pour les partenaires commerciaux. Ces
mesures sont jugées positives par le G7 tandis que les
« dévaluations monétaires destinées à capter les
échanges commerciaux, ou les autres mesures
protectionnistes » sont condamnées.
Les économies émergentes qui favorisent la croissance
par les exportations craignent que les politiques de taux
bas des pays industrialisés n'entraînent une appréciation
des devises émergentes, et par là une érosion de leur
compétitivité tout en les exposant à des flux de capitaux
volatils susceptibles de créer des déséquilibres. Cette
inquiétude est légitime, mais il faut également tenir
compte des effets positifs de l’accroissement de la
demande des pays industrialisés. Les modèles de la Fed
semblent indiquer que ces effets « s’annulent peu ou
prou mutuellement ». De plus, il serait possible de
mettre en œuvre de manière sélective d’autres mesures
macroprudentielles, notamment les restrictions aux
mouvements de capitaux, pour pallier les déséquilibres
éventuels des marchés financiers.
La politique monétaire de la Fed a-t-elle
connu un changement de régime ?
D’après notre analyse, les circonstances ont
entraîné certains changements importants dans la
politique de la Fed pour apporter une réponse
appropriée à l’inflation et au chômage élevé. Ces
changements sont peut-être la conséquence de la
« grande modération » de l’inflation observée au cours
des deux dernières décennies, conjuguée à des risques
déflationnistes que la Fed n’avait jamais eu à prendre en
compte dans son histoire moderne. Les responsables de
la Fed ont toujours soutenu que les deux volets du
mandat de la banque centrale n’étaient pas
contradictoires dans la mesure où une situation durable
de plein emploi n’était pas compatible avec une hausse
de l’inflation. Selon nous, ce postulat indique donc que la
Fed était préoccupée avant tout par la maîtrise de
l’inflation et que le plein emploi devait en découler.
Toutefois, la Réserve Fédérale affirme désormais de
manière assez explicite que sa politique correspond à un
rééquilibrage dynamique de ses objectifs en termes
d’inflation et de chômage par rapport à son mandat. Par
exemple, si le chômage était très supérieur à l’objectif et
que l’inflation était légèrement au-dessus du niveau
cible, la Fed laisserait l’inflation s’éloigner un peu plus de
son objectif avant d’intervenir afin de trouver un
« équilibre » avec le taux cible de chômage. Cette
évolution nous apparaît comme un changement de ligne
politique, qui distingue la Fed des banques centrales
dont le mandat est axé essentiellement autour de la
stabilité des prix.
Ce changement transparaît également dans
l’évolution du jugement de la Fed sur les règles de
type Taylor (1993), définissant la réponse des taux
des Fed funds en fonction de déviations indues de
l’inflation et de l’output gap. Janet Yellen, viceprésidente de la Fed, a soutenu qu’une variante de la
règle de Taylor qui aurait « une capacité de réaction à
l’output gap deux fois supérieure » à celle des
spécifications antérieures « correspondrait mieux à
l’engagement du FOMC à poursuivre une approche
équilibrée pour obéir à notre double mandat ». 3 Une
simulation a été effectuée du « chemin optimal » des
Fed funds, c'est-à-dire permettant de minimiser la
fonction des coûts sociaux induits par des écarts de
l’inflation et du chômage par rapport aux objectifs de la
Fed. D’après cette analyse, les taux des Fed funds
devraient rester bas beaucoup plus longtemps que si
l’on appliquait une simple règle de Taylor, ce qui montre
l’importance accrue du taux chômage dans la fonction
4
de réaction de la Fed.
Orientations futures de la politique
monétaire
À l’avenir, l’orientation de la politique monétaire sera
influencée par le succès des politiques actuelles et les
changements législatifs induits par la crise financière.
Une tendance qui paraît claire est l’effort de
communication visant à rendre la politique monétaire
plus transparente. L’adoption d’une politique monétaire
basée sur des seuils numériques permet aux
intervenants du marché d’élaborer plus facilement des
projections sur la politique monétaire à court et à moyen
terme. Il en va de même pour les initiatives visant à
calibrer le montant des achats d’actifs de façon à obtenir
une amélioration notable des perspectives sur le marché
du travail. De fait, la forward guidance de la Fed nous
apparaît comme l’expression inachevée de la forme que
revêtira la politique monétaire américaine à l’avenir. Le
seuil en termes de taux de chômage est une donnée
effectivement vérifiable, même s’il ne s’agit pas d’un
facteur de déclenchement politique. Toutefois, les
projections d’inflation de la Fed ne constituent pas une
donnée vérifiable produite par les services de
statistiques du gouvernement. De fait, cela crée un
certain degré d’incertitude pour les intervenants du
3
1
Olivier Blanchard, Giovanni Dell’Ariccia, Paolo Mauro.
Rethinking Macro Policy II : Getting Granular. Note de
discussion du FMI, avril 2013.
2
Ben Bernanke. Monetary Policy and the Global Economy,
25 mars 2013.
N° 13/34 – 6 mai 2013
Janet Yellen, “Perspectives on Monetary policy” 6 juin 2012.
Janet Yellen préconise une « approche équilibrée » telle que
Rt = 2 + pt + 0,5(pt- 2) + 1,0Yt. Dans cette expression, R est le
taux des Fed Funds, p est le pourcentage de variation de
l’indice général des prix à la consommation par rapport à son
niveau quatre trimestres auparavant, et Y est l’output gap.
4
Janet Yellen op. cit.
5
marché en termes d’anticipation de l’évolution future de
la politique monétaire, dans la mesure où le FOMC
pourrait simplement modifier ses projections. La
forward guidance devrait évoluer dans le sens d’une
plus grande transparence, d’après notre analyse.
En revanche, des changements conduisant à
l’adoption d’un cadre alternatif pour la politique
monétaire, tels que la définition d’un objectif de
croissance du PIB nominal, nous paraissent très
improbables. La définition d’un taux de croissance cible
ou d’un niveau cible du PIB nominal poserait de très
grandes difficultés en termes de communication, dans la
mesure où les objectifs en termes d’inflation et de niveau
de production perdraient en lisibilité. La communication
avec le grand public deviendrait plus problématique et la
crédibilité de la Fed s’en trouverait réduite. Par exemple,
la Fed aurait beaucoup de mal à expliquer les
changements de politique liés à l’évolution du potentiel
de croissance de l’économie. Les révisions incessantes
et souvent significatives au PIB posent également des
problèmes d’analyse et de communication.
L’un des nouveaux défis que devra relever la Fed à
l’avenir consistera à jouer son rôle dans le maintien
de la stabilité du système financier sans préjudice
de ses objectifs traditionnels d’emploi et d’inflation.
D’après Jeremy Stein, l’un des gouverneurs de la
Réserve fédérale, il se pourrait qu’à terme, on assiste à
certains phénomènes tels qu’une période prolongée de
taux bas conduisant à une surchauffe sur certains
marchés de crédit liée à la chasse au rendement des
investisseurs.5 Bien sûr, la première réponse viendra du
canal réglementaire en vue de limiter des évolutions
telles qu’un déséquilibre du cours des actifs, un recours
excessif à l’effet de levier, une croissance démesurée
des flux financiers ou des fragilités structurelles sur les
marchés financiers induisant des risques systémiques.
Toutefois, Jeremy Stein envisage une situation dans
laquelle la voie réglementaire serait insuffisante, rendant
nécessaire un changement de politique (c'est-à-dire une
hausse des taux), même si une telle décision n’est pas
justifiée par les perspectives d’inflation ou la situation sur
le marché du travail.
S’il ne fait pas de doute que le Financial Stability
Oversight Council (Conseil de surveillance de la stabilité
du système financier) poursuit ses recherches sur la
question, l’intégration de ces objectifs dans le mandat de
la Fed pourrait signaler une politique plus soucieuse de
modérer l’évolution du marché en complément de la
réponse réglementaire. Par ailleurs, en l’absence d’outils
réglementaires parfaits et partant de l’hypothèse que la
prise de risque excessive est procyclique, certains
modèles semblent indiquer que la réponse politique
optimale à un choc négatif consisterait à abaisser les
taux encore davantage mais pendant une période de
temps plus brève que dans un cadre politique ne
comportant pas d’objectif de stabilité du système
6
financier, comme le montre le graphique ci-après. Plus
généralement, il semblerait raisonnable pour les
responsables politiques de concentrer leurs efforts sur
les actifs en surchauffe financés par le crédit bancaire,
ceux-ci s’étant avérés particulièrement dangereux. 
Évolution de la réponse de politique monétaire à un
choc négatif
rate
"leaning against the wind"
time
Source : Agur et Demertzis, « Leaning Against the Wind » et
The Timing of Monetary policy, Crédit Agricole CIB
5
Jeremy C Stein, Overheating in Credit Markets: Origins,
Measurement, and Policy Responses. Février 2013. Site web
du conseil des gouverneurs.
N° 13/34 – 6 mai 2013
6
Agur & Demertzis, “Leaning Against the Wind” and the Timing
of Monetary Policy. Document de travail du FMI. Avril 2013.
6
La Banque du Japon
Dotée d’une nouvelle équipe dirigeante,
la Banque du Japon entend rattraper la
Fed
La BoJ (Banque du Japon) opère une métamorphose
spectaculaire sous la conduite d’une nouvelle
équipe dirigeante extrêmement accommodante, qui
est entrée en fonction le 21 mars, soutenue par le
nouveau Premier ministre Shinzo Abe. Haruhiko Kuroda,
nouveau Gouverneur de la BoJ, (ancien gouverneur de
la Banque asiatique de développement), et l’universitaire
Kikuo Iwata, son nouveau vice-gouverneur, sont connus
pour être des détracteurs notoires de la politique suivie
par la BoJ au cours des deux dernières décennies. Ils
plaident pour un changement de régime dans la politique
de l’institut d’émission japonais. Signalons que Haruhiko
Kuroda est un ancien haut responsable au Ministère des
Finances sans aucune expérience à la BoJ, ce qui
contraste fortement avec les personnalités qui ont dirigé
la BoJ au cours des 15 dernières années : Masaru
Hayami (1998-03), Toshihiko Fukui (2003-08) et
Masaaki Shirakawa (2008-13) avaient tous exercé
d’importantes responsabilités à la BoJ.
Ces gouverneurs issus de la BoJ n’ont pas réussi à
enrayer la déflation durant leur mandat, malgré
l’utilisation d’un certain nombre de politiques
monétaires
non
conventionnelles,
lesquelles,
toutefois, ont atténué les effets néfastes de la crise du
secteur bancaire de 1997-2003, ainsi que le choc qui a
suivi la faillite de Lehman Brothers en 2008. Plusieurs
mesures politiques extraordinaires ont en effet été
prises :

La politique de taux d’intérêt zéro (ZIRP) décidée
par Masaru Hayami en 1999-00.

La politique d’assouplissement quantitatif menée
par Masaru Hayami et Toshihiko Fukui entre 2001
et 2006, consistant à fixer des objectifs en termes
de comptes courants déposés auprès de la BoJ 7
(au départ à 5 000 Mds JPY et finalement à 3035 000 Mds JPY) et à accroître le montant des
achats fermes de bons du Trésor japonais (JGB) à
long terme (opérations Rimban).

L’assouplissement monétaire de grande ampleur
effectué par Masaaki Shirakawa entre octobre 2010
et avril 2013 (ex. : programme d’achat d’actifs, qui
permet de financer les achats de JGB à long terme
ainsi que des actifs à risque tels que des obligations
corporates, des trackers et des fonds J-REIT.
L’objectif du programme d’achat d’actifs à la fin de
l’année a fini par être porté à 101 000 Mds JPY
(dont 44 000 Mds JPY pour les JGB à long terme),
alors qu’il était de 35 000 Mds JPY (dont 1 500 Mds
JPY pour les JGB à long terme) au départ.
7
Les soldes des comptes courants sont les réserves détenues
par les établissements financiers auprès de la BoJ. La BoJ
ciblait les soldes des comptes courants, dont le montant est
égal à la base monétaire diminuée des espèces en circulation
(et non pas la base monétaire elle-même, la BoJ estimant qu’il
serait difficile de contrôler les mouvements à court terme des
espèces en circulation).
N° 13/34 – 6 mai 2013
La différence fondamentale entre le nouveau et
l’ancien régime de la BoJ est que la nouvelle équipe
dirigeante a clairement indiqué que sa priorité était
de sortir de la déflation, tandis que les anciens
responsables de l’institut d’émission japonais
étaient réticents à combattre la déflation. De fait,
Haruhiko Kuroda et Kikuo Iwata expriment résolument
leur intention de tout mettre en œuvre pour atteindre cet
objectif d’inflation de 2 % le plus tôt possible au cours
des deux prochaines années. Masaru Hayami, Toshihiko
Fukui et Masaaki Shirakawa avaient tous trois fait
preuve de réticence à introduire toute forme de politique
fondée sur une cible d’inflation. Masaaki Shirakawa a
seulement introduit une cible d’inflation (et non pas un
« objectif ») de 1 % en octobre 2010, en définissant une
fourchette acceptable de 0-2 %, mais sans fixer de date
buttoir pour y parvenir. À la demande pressante du
Premier ministre Shinzo Abe, Masaaki Shirakawa a fini
par accepter un « objectif d’inflation de 2 % » en janvier
2013, mais la tâche d’y parvenir a rapidement été
confiée à son successeur deux mois plus tard.
Les premières mesures prises par
Haruhiko
Kuroda
attestent
d’un
« changement de régime »
Quelles ont été les premières mesures prises par la
nouvelle équipe dirigeante de la BoJ lors de sa toute
première réunion de politique monétaire des 3 et 4
avril ? Les marchés s’étaient largement préparés à ce
que la BoJ, sous la conduite de Haruhiko Kuroda et de
Kikuo Iwata, prenne dès le départ des mesures très
accommodantes. Toutefois, le timing et le caractère
quantitatif de ces mesures ont largement dépassé nos
anticipations et celles des investisseurs.
La première surprise réside dans la décision de la
nouvelle équipe dirigeante de la BoJ d’intégrer sans
hésiter les achats de JGB dans le programme d’achat
d’actifs et l’opération Rimban dès la première réunion.
Une telle option était généralement réputée très difficile
du point de vue à la fois technique et administratif. Ce
changement de dispositif visait à simplifier l’ensemble
des opérations de rachat de JGB par la BoJ pour
améliorer la visibilité des investisseurs sur les intentions
des responsables politiques. Parallèlement à l’unification
des deux types d’opérations sur les JGB, la BoJ a
décidé d’abandonner la « banknote rule » sur ses avoirs
8
en JGB , et d’inclure les JGB à 40 ans parmi les actifs
éligibles aux opérations de rachat, ce qui lui permet ainsi
d’acheter des obligations sur toutes les maturités, la
duration moyenne sur le portefeuille de JGB étant
également relevée de 3 à 7 ans. En outre, sur le front
quantitatif, la Banque du Japon a également décidé
8
Règle interdisant à la BoJ de détenir plus de JGB à long terme
que de monnaie fiduciaire en circulation. Mise en place par la
BoJ elle-même en mars 2001, lors du lancement de la première
version de l’assouplissement quantitatif menée par Masaru
Hayami, la « banknote rule » visait à empêcher la BoJ de
monétiser la dette publique. Toutefois, cette règle a cessé de
fonctionner dans la mesure où le montant du portefeuille de
JGB à long terme de la BoJ dépasse clairement le montant des
billets et pièces en circulation détenus par la BoJ à l’heure
actuelle.
7
d’augmenter de 50 000 Mds JPY le montant annuel de
ses achats de JGB, et de pratiquement doubler le
montant mensuel des achats de JGB à 7 500 Mds JPY
(contre 3 800 Mds JPY sous M. Shirakawa (programme
d’achat d’actifs : 2 000 Mds JPY, Rimban : 1 800 Mds
JPY).
Par ailleurs, la BoJ a également décidé d’augmenter le
montant annuel de ses achats d’actifs à risque (achats
d’ETF et de J-REIT augmentés de 1 000 Mds JPY et
30 Mds JPY respectivement, alors que nous attendions
une augmentation de seulement 40 Mds JPY au total).
La seconde surprise réside dans l’adoption plus rapide
que prévu d’un « objectif de base monétaire » par la
BoJ. La BoJ compte ainsi désormais augmenter la
base monétaire en circulation d’un montant annuel
de 60-70 000 Mds JPY, à travers des achats massifs de
JGB, tant et si bien que la base monétaire en circulation
devrait atteindre 200 000 Mds JPY d'ici à la fin de 2013,
et 270 000 Mds JPY à la fin 2014.
Si l’on suppose une parité USD / JPY à 95, 270 000 Mds
JPY équivalent à 2 840 Mds USD – un montant qui
correspond exactement à la base monétaire américaine
à la fin février. Par conséquent, la BoJ a effectivement
déclaré qu’elle augmenterait son bilan aussi
rapidement que celui de la Fed au cours des deux
prochaines années.
Par ailleurs, la déclaration de politique monétaire précise
désormais explicitement que « la Banque du Japon
parviendra à un objectif de stabilité des prix de 2 %
sur la base du rythme annuel de variation de l’indice
des prix à la consommation le plus tôt possible, en
se fixant un horizon d’environ deux ans ». Cette
annonce a renforcé l’engagement de la BoJ, qui a
déclaré explicitement qu’elle « poursuivrait sa politique
d’assouplissement quantitatif et qualitatif aussi
longtemps que nécessaire pour parvenir à un rythme de
hausse des prix stable à 2 % ». On est loin des
déclarations vagues de Masaaki Shirakawa qui déclarait
vouloir poursuivre cette politique « … aussi longtemps
que la banque le jugerait nécessaire ».
Après la décision agressive de la BoJ les 3-4 avril, le
rendement sur le JGB 10 ans est retombé en dessous de
0,43 %, un point bas historique qui n’avait pas été atteint
depuis juin 2003. Néanmoins, nous doutons que ce soit la
fin de l’histoire, et l’on ne peut exclure la possibilité que la
Banque du Japon ne mette en œuvre des mesures
N° 13/34 – 6 mai 2013
supplémentaires d’assouplissement à l’avenir, dans la
mesure où le taux de change USD / JPY n’a pas encore
atteint le niveau de 100 correspondant à un retour vers la
moyenne. À ce niveau, le Japon peut encore utiliser
l’excuse que l’évolution observée sur le marché des
devises est seulement une correction de la survalorisation
de la devise japonaise, d’après notre analyse. Si la BoJ
veut encore affaiblir le JPY pour parvenir plus tôt
possible à l’objectif de base monétaire de 270 000 Mds
JPY, elle pourrait porter le montant mensuel des
achats de JGB à 8 000 MdJs PY voire au-delà, contre
7 500 Mds JPY actuellement. Ce faisant, la Banque du
Japon pourrait rattraper la Fed. De fait, le montant
mensuel des achats de MBS effectués par l’institution
d’émission américain s’élève actuellement à 40 Mds USD,
en plus des achats mensuels de Treasuries de 45 Mds
USD; soit un total mensuel de 85 Mds USD, ce qui équivaut
à 8 000 Mds JPY sur la base d’une parité USD / JPY de 95.
Il est donc tout à fait possible que la BoJ décide
d’augmenter encore davantage le montant de ses achats
mensuels de JGB.
La nouvelle équipe dirigeante de la BoJ n’hésiterait pas
à prendre des mesures « énergiques », mais elle est
également très soucieuse de la transparence de sa
politique. Plus la politique monétaire est transparente,
mieux les marchés financiers pourront comprendre les
messages sous-jacents ou les intentions des responsables
politiques, ce qui rendrait les prévisions d’inflation plus
efficaces. En somme, la nouvelle équipe dirigeante de la
BoJ est résolue à : (1) effectuer des achats massifs de
JGB, (2) augmenter la base monétaire, (3) utiliser
davantage le « mécanisme de transmission de la
confiance » et tenter de travailler sur les prévisions
d’inflation, (4) favoriser une baisse des taux d’intérêt,
une dépréciation de la monnaie, et une hausse du
cours des actions, (5) tenter de relancer l’économie et,
surtout (6) atteindre l’objectif d’inflation de 2 %. Dans
ces
conditions,
des
mesures
supplémentaires
d’assouplissement monétaire passeraient toujours par un
relèvement de l’objectif de base monétaire à travers
l’augmentation du montant des achats de JGB. Après tout,
le fonctionnement de la politique monétaire deviendrait
beaucoup plus simple que par le passé, et l’impact sur les
marchés de devises devrait donc être plus immédiat. Dans
ce cas, si la BoJ voulait affaiblir le Yen, il lui suffirait de
relever l’objectif de base monétaire, et pour ce faire,
d’augmenter le montant des achats de JGB. 
8
La Banque d’Angleterre
Réponse politique : repousser
limites du risque sur la crédibilité
les
Tout comme les autres grandes banques centrales, la
Banque d’Angleterre (BoE) a mis en œuvre une série
d’instruments
non
conventionnels
tout
en
maintenant son taux directeur à un point bas
historique. Le principal élément de ces mesures non
conventionnelles est le programme d'achats d'actifs
(« Asset Purchase Facility », APF) mis en place en mars
2009, et qui a atteint 375 Mds GBP en novembre 2012.
Comme le montre le graphique ci-après, les achats
d’actifs de la BoE depuis 2010 se sont concentrés
presque exclusivement sur les achats de bons du Trésor
britannique (Gilts), principalement des papiers à moyen
et à long terme.9 Aujourd'hui, les achats de Gilts par la
BoE représentent environ 24 % du PIB nominal annuel.
Ces interventions visent directement à abaisser les taux
d’intérêt à long terme dans l’économie, ce qui contribue
à un assouplissement des conditions sur les marchés
financiers. L’effet des achats de Gilts effectués par la
BoE a fonctionné à travers le « canal du rééquilibrage de
portefeuille ». En rachetant des Gilts aux établissements
privés non bancaires, notamment aux compagnies
d’assurance et aux fonds de pension, la BoE augmente
leurs avoirs monétaires, qui sont alors placés dans des
actifs à risques tels que les obligations corporates et les
actions. Ce processus augmente le prix de ces actifs de
manière générale, enrichit les investisseurs et réduit les
rendements et donc les coûts d’emprunt pour les
entreprises et les ménages, ce qui stimule la
consommation.
Une étude réalisée par la BoE10 a démontré que la
première vague d’achats d’actifs (200 Mds GBP au total
entre mars 2009 et janvier 2010) avait eu des effets
significatifs sur l’économie. Cette étude estimait que
l’impact sur l’économie britannique était équivalent à une
baisse de 150-300 pb du taux directeur, avec un degré
d’incertitude élevé, même dans cette fourchette. Les
différentes méthodes d’estimation utilisées par la BoE
semblent indiquer que l’assouplissement quantitatif
pourrait avoir conduit à une hausse du PIB réel de 1,52,0 % et à une augmentation de l’inflation comprise
entre 0,75 et 1,50 point de pourcentage.
Au cours de l’année 2012, la BoE a cessé de se
concentrer uniquement sur les mesures d’assouplissement quantitatif pour se doter d’autres moyens de
renforcer sa politique monétaire et d’accroître son
efficacité. Alors que l’activité restait atone depuis
presque deux ans malgré une politique monétaire
extrêmement accommodante, l’intensification de la crise
de la dette de la zone Euro au cours de l’été 2012 a
9
Au départ, l’APF a porté sur des achats d’obligations privées
investment grade financés par l’émission de bons du Trésor. À
l’époque, il s’agissait seulement d’améliorer l’accès au crédit
pour les entreprises en améliorant la liquidité sur certains
marchés de capitaux. Toutefois, lorsque le Comité de politique
monétaire a décidé de financer les achats d’actifs par la
création de réserves de la banque centrale, l’APF a été utilisé à
des fins de politique monétaire, et des achats de gilts ont
également été introduits.
10
Michael Joyce, Matthew Tong & Robert Woods,” The United
Kingdom’s quantitative easing policy: design, operation and
impact”, BoE Quarterly Bulletin, 2011 Q3.
N° 13/34 – 6 mai 2013
entraîné une hausse du coût de financement des
banques. En vue de prévenir un resserrement des
conditions de crédit, deux dispositifs ont été mis en
place l’année dernière, visant précisément 1) à réduire
les coûts de financement des banques et 2) à stimuler
les prêts bancaires au secteur privé. Le 20 juin 2012, la
BoE a activé l’Extended Collateral Term Repo Facility,
lancée au départ en décembre 2011. Il s’agit d’une
réserve de liquidité d’urgence conçue pour les cas de
« tensions de nature exceptionnelle sur le marché ». Il
s’agit d’une allocation mensuelle de lignes de liquidité en
GBP d’une maturité de 6 mois et d’un montant bid/offer
minimal de 5 Mds GBP.
En complément des mesures d’assouplissement
quantitatif, et conjointement avec le Trésor, la BoE a
lancé en juillet 2012 le Funding for Lending Scheme
(FLS). Ce dispositif répond à un problème particulier, à
savoir le niveau élevé des coûts de financement des
banques lié à l’aggravation de la crise en zone Euro. Si
les mesures d’assouplissement quantitatif fonctionnent
en contournant le secteur bancaire, le FLS vise à réduire
les coûts d’emprunt en passant directement par le
secteur bancaire. Le FLS est conçu précisément pour
encourager les banques et les sociétés d’épargne
logement à prêter davantage aux ménages et aux
sociétés privées non financières (PNFC) britanniques –
l’économie réelle11. Ce dispositif permet aux banques de
se procurer un financement à long terme à des taux
inférieurs à ceux du marché en contrepartie d’une
gamme élargie de collatéraux. À cet égard, ce dispositif
est analogue à l’opération de refinancement à long
terme (LTRO) de la BCE, avec toutefois une différence
essentielle, à savoir son caractère conditionnel. Ce
dispositif est lié au montant des prêts accordés par les
banques aux entreprises. Il répond donc explicitement à
l’objectif d’empêcher les banques à réduire leur octroi de
prêts.
Les effets bénéfiques du FLS ont commencé à se faire
ressentir dans les conditions de crédit, y compris des
baisses des taux sur les prêts. Les taux sur les
financements à plus long terme des banques
britanniques – pour les activités de banque de détail et
de banque d’investissement – ont beaucoup diminué
depuis l’annonce du FLS. L’offre de prêts hypothécaires
a commencé à s’améliorer de manière significative au
second semestre 2012 et l’accès global au crédit pour le
secteur privé s’est beaucoup amélioré depuis le
quatrième trimestre 2012. Toutefois, compte tenu de
l’effet de retard qui prévaut dans le mécanisme de
transmission, l’impact du FLS ne sera pas visible
immédiatement dans les encours nets. L’activité de
prêt des banques en faveur de l’économie réelle
continue de stagner et l’on observe des écarts
immenses d’un secteur à l’autre : croissance légèrement
positive des encours de prêts aux ménages et poursuite
de la contraction des prêts aux entreprises. Plusieurs
facteurs pourraient continuer à limiter l’efficacité du FLS,
11
Au minimum, une banque peut emprunter un montant initial
pouvant atteindre jusqu'à 5 % du montant des prêts déjà
octroyés (en juin 2012) à l’économie réelle. En outre, les
banques ont la possibilité d’emprunter un financement
supplémentaire d’un montant égal à l’encours net positif
qu’elles auraient accordé pendant la période de 18 mois
comprise entre le 30 juin 2012 et le 31 décembre 2013.
9
à savoir la faible demande de crédit des entreprises et
des ménages britanniques dans un contexte
d’incertitude économique, et la nécessité pour certains
établissements de reconstituer leur bilan.
APF : stock d’actifs détenu par la BoE (depuis le début du processus
d’assouplissement quantitatif)
400
350
GBP bn
GBP bn
2.5
2
300
250
1.5
200
150
100
1
50
0
Feb-09 Aug-09 Feb-10 Aug-10 Feb-11 Aug-11 Feb-12 Aug-12 Feb-13
gilts
commercial paper (RHS)
0.5
0
corporate bonds (RHS)
Source : Banque d’Angleterre, Crédit Agricole CIB
Croissance des prêts au secteur privé non financier
% YoY
20
15
10
5
0
-5
00
01
02
03
04
05
Households
06
07
PNFC
08
09
10
11
FLS measure of lending
12
13
Source : Banque d’Angleterre, Crédit Agricole CIB
A-t-on assisté à un changement de
régime dans la politique monétaire de
la Banque d’Angleterre ?
La politique monétaire britannique opère dans un
cadre flexible fondé sur une cible d’inflation depuis
1992. Toutefois, l’indice retenu pour l’objectif et les
seuils a évolué au fil du temps. Entre 1992 et 1997,
l’objectif était 2 % au maximum à long terme pour
l’indice des prix de détail hors intérêts hypothécaires
(RPIX), mais jusqu’à la fin de la législature, « l’inflation
sous-jacente devait être maintenue dans une fourchette
cible de 1-4 % ». Le Bank of England Act de 1998 a
donné au comité de politique monétaire l’indépendance
opérationnelle sur la politique monétaire. Au départ,
l’inflation devait être maintenue autour de 2,5 % telle que
mesurée par l’indice des prix de détail RPIX. En
décembre 2003, cet objectif a été ramené à 2,0 % tel
que mesuré par l’indice des prix à la consommation IPC.
La BoE a souvent mis en jeu la crédibilité de son
engagement à la stabilité des prix. Depuis le début du
programme d’assouplissement quantitatif en mars 2009,
l’inflation de l’IPC est restée constamment au-dessus de
l’objectif de 2 % sauf au second semestre 2009. L’inflation
a atteint un point haut de 5,2 % en septembre 2011, mais
cela n’a pas empêché la BoE d’annoncer immédiatement
N° 13/34 – 6 mai 2013
une nouvelle vague d’achats d’actifs pour 75 Mds GBP. La
Banque d’Angleterre a souligné que le dépassement de
l’objectif d’inflation était dû à des facteurs ponctuels (prix
réglementés et administrés, hausse du taux de TVA, prix
de l’énergie, dépréciation de la GBP), ce qui lui avait permis
de ne pas réagir face à la « rigidité » à la baisse de
l’inflation, jugée comme temporaire. La BoE s’est donc
implicitement focalisée sur l’inflation sous-jacente générée
par les facteurs domestiques. Le taux de chômage élevé, la
stagnation des salaires, la faiblesse de la productivité, les
capacités non utilisées qui transparaissent dans les
enquêtes de conjoncture, tous ces éléments suggèrent
l’existence de capacités de production inemployées
importantes dans l’économie, qui devraient continuer à
exercer une pression à la baisse sur l’inflation. D’après la
BoE, ces facteurs devraient déclencher une baisse de
l’inflation vers son objectif à moyen terme, « le
redressement graduel de la productivité atténuant la
croissance des coûts unitaires domestiques tandis que les
pressions
externes
sur
les
prix
diminueront
progressivement ».
Dans le Budget 2013, après avoir étudié des approches
alternatives, le gouvernement a affirmé le caractère
flexible de la cible d’inflation dans le mandat du
comité de politique monétaire, tout en maintenant
l’engagement à la stabilité des prix à moyen terme au
cœur de la mission de la BoE. L’objectif d’inflation de
10
2 %, tel que mesuré par le glissement annuel de l’indice
des prix à la consommation IPC, a été réaffirmé. Cet
objectif est jugé essentiel à l’ancrage des prévisions
d’inflation. « L’objectif d’inflation revêt un caractère
prospectif afin de veiller à ce que les prévisions
d’inflation soient bien ancrées à moyen terme. » Le
nouveau mandat de la BoE est donc conforme aux
statuts en vigueur depuis 1998 : maintenir la stabilité des
prix et, à cette condition, soutenir la politique
économique du gouvernement. La politique monétaire
fait ainsi partie intégrante de la stratégie économique du
gouvernement, de même que la réduction du déficit, la
réforme du système financier et les réformes
structurelles.
Le mandat de la BoE, même s’il donne toujours la
priorité à la stabilité des prix, autorise une approche
équilibrée entre cible d’inflation et volatilité de
l’activité. Ce nouveau mandat reconnaît toujours que
l’inflation peut s’éloigner de l’objectif sous l’effet de
chocs et de perturbations. Ceci reflète les arbitrages à
court terme nécessaires entre inflation et volatilité de
l’activité. Dans ces situations, le comité de politique
monétaire est autorisé à laisser l’inflation s’écarter de
manière temporaire de l’objectif afin d’éviter une volatilité
indésirable de l’activité. Le mandat précise clairement
que « dans des circonstances exceptionnelles, en cas
de chocs particulièrement importants ayant des effets
durables, le comité de politique monétaire risque de
devoir effectuer des arbitrages plus significatifs entre la
vitesse de convergence du taux d’inflation vers la cible
et l’importance à accorder à la variabilité de l’activité ».
Désormais, la BoE devra fournir une explication plus
détaillée des arbitrages qu’elle aura dû effectuer pour
définir sa politique monétaire.
Politiques futures : la BoE cherche
l’inspiration chez les autres Banques
centrales
La Banque d’Angleterre a passé en revue toute la
panoplie d’instruments de politique monétaire possibles,
autres que les achats de Gilts, pouvant être mis en
œuvre si une nouvelle relance s’avérait nécessaire. Ces
instruments comprennent les achats d’autres actifs, la
réduction du taux directeur et la modification du taux
marginal de rémunération des réserves bancaires
auprès de la BoE. La BoE a toutefois jugé que toutes
ces options comportaient des inconvénients. L’APF
reste l’outil préféré du comité de politique monétaire car
il permet efficacement d’abaisser les taux d’intérêt et de
soutenir le cours des actifs. Toutefois, dans le contexte
actuel, l’APF est jugé insuffisant pour améliorer les
perspectives de croissance. Le comité de politique
monétaire a exprimé ses craintes que le processus de
désendettement des acteurs économiques et le niveau
élevé d’incertitude ne réduisent l’effet des achats d’actifs
sur l’économie réelle. De nouvelles mesures sont
nécessaires pour dynamiser l’activité de crédit dans
N° 13/34 – 6 mai 2013
l’économie britannique, notamment de la part des
prêteurs non bancaires.
Au-delà de l’APF qui, d’après le gouvernement restera
en place pendant l’année fiscale 2013/14, et le FLS, qui
sera prolongé et modifié, pour soutenir les prêts aux
PME, d’autres instruments non conventionnels
pourraient être mis en œuvre pour soutenir
l’économie britannique à l’avenir, « notamment
certains de ceux qui ont été déployés par les autres
banques centrales ces dernières années ».
La BoE pourrait utiliser un nouveau style de
communication en vue de gérer les anticipations sur
la politique monétaire future. En l’occurrence, la BoE
pourrait recourir à une forward guidance explicite
comportant
des
seuils
intermédiaires
–
« engagements politiques évoluant en fonction des
développements économiques futurs » – en vue
d’influencer les anticipations des marchés et partant,
d’atteindre plus efficacement ses objectifs. Il semble
qu’il s’agirait d’engagements politiques basés sur
des seuils numériques, et non pas sur une forward
guidance fondée sur un horizon de temps (ou sur
des dates futures). En tout état de cause, il s’agit
largement d’un outil de communication et non pas d’un
nouvel instrument non conventionnel.
Quant aux seuils intermédiaires, de quels
indicateurs s’agirait-il ? Le gouvernement ne les a pas
mentionnés explicitement. Selon nous, la BoE pourrait
recourir, outre le taux d’inflation, à un (ou plusieurs)
indicateurs clés de capacités non utilisées dans
l’économie, tels que le taux de chômage par exemple.
L’utilisation d’indicateurs tels que l’output gap, la
croissance réelle ou nominale du PIB pourrait également
être envisagée, mais cela nous paraît moins probable en
raison des inconvénients qu’ils comportent qui
pourraient rendre leur utilisation difficile en pratique. Ces
indicateurs sont disponibles uniquement sur une base
trimestrielle et, dans le cas de l’output gap, assez
difficiles à estimer de manière précise. En ce qui
concerne le taux de chômage, le « paradoxe de
productivité » britannique (faiblesse marquée et durable
de la productivité malgré la hausse du taux de chômage
au sens de l’OIT) semble indiquer que l’érosion des
capacités d’offre dans l’économie risque d’être définitive.
Dans ce cas, le taux de chômage cesserait d’être un
indicateur fiable des capacités inemployées dans
l’économie dans la mesure où il pourrait conduire à
sous-estimer les pressions inflationnistes domestiques.
C’est peut-être la raison pour laquelle le comité de
politique monétaire pourrait hésiter à adopter le taux de
chômage comme variable clé pour ses seuils
intermédiaires. Il faudra attendre le mois d’août où la
BoE, à la demande du gouvernement, fournira une
opinion sur les mérites de l’approche en général et des
seuils intermédiaires dans son Rapport trimestriel sur
l’inflation. 
11
La Banque centrale européenne : est-elle si différente ?
Une Banque centrale innovante en
dépit de contraintes institutionnelles
La réponse apportée par la BCE à la grande crise
financière se distingue de celle des autres banques
centrales, même si son bilan a augmenté dans les
mêmes proportions que celui de la Réserve fédérale
américaine au cours des dernières années. Cette
hausse est toutefois liée, dans une large mesure, à la
demande de liquidité des banques entraînant un
accroissement de la taille des opérations d’openmarket, plutôt qu’à des programmes de rachats fermes
d’actifs.
En l’absence de risques majeurs de déflation, la BCE est
réticente à acheter des titres de dette publique en
grande quantité, craignant qu’une violation flagrante des
termes de son mandat ne compromette sa crédibilité. De
façon générale, la BCE est souvent perçue comme une
banque centrale extrêmement prudente, sinon « behind
the curve », i.e. avec un temps de retard par rapport aux
autres. Cette prudence apparente de la part de la BCE
tient à trois raisons principales. Premièrement, la BCE
est contrainte par les dispositions du Traité et tout
particulièrement celles relative à son mandat unique, à
savoir le maintien de la stabilité des prix à moyen terme
et à l’interdiction de financer les déficits publics12. Ces
dispositions étaient destinées à prévenir et à corriger les
mauvaises incitations budgétaires et à empêcher que
des redistributions fiscales aient lieu par des voies
détournées dans une zone monétaire imparfaite. Si la
BCE peut toujours décider de mettre en œuvre un
programme d’assouplissement quantitatif classique
comme le prônent certains, cela impliquerait une
ventilation des achats d’actifs entre les pays de la zone
euro en fonction de la participation de chacun d’entre
eux au capital de la BCE, elle-même proportionnelle à la
taille de chaque économie. Autrement dit, l’Allemagne et
la France seraient les principaux pays à en bénéficier
alors que leurs taux souverains se situent à des plus bas
historiques. La zone euro a d’ores et déjà transformé ce
cadre institutionnel avec le programme OMT (Outright
Monetary Transactions) qui peut constituer une
bonne alternative à des options plus radicales
comme la mutualisation totale des dettes. L’union
bancaire et, à terme, la « Fourfold Union » ont pour
objectif d’empêcher l’aggravation des déséquilibres
macrofinanciers, en vue d’améliorer les canaux de
transmission de la politique monétaire et de permettre à
la BCE d’envisager de nouvelles mesures de soutien. En
particulier, l’obligation faite par l’OMT de mettre en place
un programme (allégé) via le Mécanisme Européen de
Stabilité (MES) et une supervision renforcée suggère
que la BCE n’entend pas prendre le risque de détériorer
son bilan en soutenant un pays dont la dette peut être
insoutenable. Quoi qu’il en soit, la BCE reste fermement
12
Les principaux articles du Traité sur le fonctionnement de
l’Union européenne sont les articles 123 (interdiction du
financement monétaire) et 125 (« clause de nonrenflouement »). Les articles 127 et suivants décrivent le
mandat de la BCE et notamment son objectif principal, à savoir
le maintien de la stabilité des prix et, sans préjudice de cet
objectif, la promotion de la croissance et de l’emploi dans la
zone euro.
N° 13/34 – 6 mai 2013
engagée à maintenir la stabilité des prix et à limiter les
éventuels effets de redistribution de ses politiques.
La deuxième raison pour laquelle la BCE a toujours
hésité à envisager des mesures plus radicales, à l’image
d’un programme d’achats d’actifs à grande échelle
(Large-Scale Asset Purchases ou LSAP), est liée à la
structure des économies (hétérogènes) de la zone euro.
Les prêts bancaires représentent la majeure partie
du financement du secteur privé, pour environ 70 %
13
du financement externe des sociétés non financières
quand ils n’en représentent que 20% aux Etats-Unis. On
comprend dès lors pourquoi la BCE a toujours fait de
l’aide directe et indirecte aux banques sa priorité.
L’introduction, à la fin 2008, des procédures d’appels
d’offres illimitées et à taux fixe,,toujours en place
aujourd’hui, a constitué à cet égard une véritable force
de frappe pour la BCE visant à assurer une liquidité
bancaire en dernier ressort et éviter un « Lehman »
européen. Dans une certaine mesure, les opérations de
refinancement à long terme (LTRO) (à 6 mois tout
d’abord, puis à 12 mois et, enfin, à 3 ans à la fin de
l’année 2011) et l’assouplissement des règles
d’utilisation des collatéraux s’inscrivent dans le
prolongement des mesures de soutien mises en place
en 2008, l’objectif étant d’améliorer l’efficacité de la
politique monétaire tout en s’assurant que toutes les
banques des pays de la périphérie aient accès à une
liquidité bon marché, y compris, parfois, par le biais des
mécanismes d’urgence. La dépendance plus marquée
de la zone euro à l’égard du financement bancaire laisse
également penser que les baisses de taux directeurs
peuvent avoir un impact positif, malgré la
fragmentation financière et les dysfonctionnements
des canaux de transmission de la politique
monétaire.
Outre le statut de prêteur en dernier ressort de la BCE
(pour les banques), les appels d’offres illimités ont
probablement contribué à éviter un processus de
désendettement
désordonné
du secteur
privé
(principalement financier) ainsi qu’une crise du crédit
plus grave encore dans les pays de la périphérie. Dans
14
une étude récente, Cour-Thimann et Winkler montrent
en quoi les mesures non conventionnelles adoptées par
la BCE n’ont pas été motivées par les mêmes raisons
que les programmes d’assouplissement quantitatif (QE),
en basant leur analyse sur une approche par les flux de
financement. Dans ce cadre, les achats fermes de
titres et les mesures de soutien à la liquidité avec
élargissement des collatéraux peuvent être
considérés comme des réponses aux pressions
liées au désendettement sectoriel et à la
désintermédiation, la BCE agissant comme « un
intermédiaire en dernier ressort » en cas de
13
Cette différence structurelle entre les deux économies s’est
aussi accentuée sous l’effet de conditions de crédit favorables
et de l’innovation financière, dont le développement de la
titrisation
et
des
prêts
syndiqués ;
voir
http://www.ecb.int/press/key/date/2012/html/sp120720_1_slides
.en.pdf?d07d76a72624c70b15fa8c55010bd20c
et
http://www.ecb.int/pub/pdf/mobu/mb200904en.pdf.
14
Cour-Thimann. P. and Winkler, B. (2013), “The ECB’s nonstandard monetary policy measures: the role of institutional
factors and financial structure”, Oxford Review of Economic
Policy.
12
dysfonctionnement des canaux de transmission
traditionnels de la politique monétaire. L’analyse des
auteurs montre que les opérations de refinancement à 3
ans (LTRO) en particulier ont constitué un filet de
sécurité pour l’économie permettant une évolution
progressive et non brutale de la taille et de la
composition des bilans privés.
Enfin, la prudence apparente de la BCE s’explique aussi
par un troisième facteur : le risque d’aléa moral. La
BCE estime depuis longtemps que la crise actuelle a
pour origine les lacunes institutionnelles de l’UEM –
notamment un cadre de supervision trop laxiste pour
éviter (ex ante) et corriger (ex post) les déséquilibres
macroéconomiques et budgétaires en dépit du Pacte de
stabilité et de croissance. Rien d’étonnant dès lors à ce
que la BCE ait toujours veillé pendant la crise à
maintenir
les
incitations
nécessaires
pour
encourager tous les acteurs, publics et privés, à
poursuivre les réformes institutionnelles et
structurelles ainsi que les ajustements de bilan. La
conditionnalité du programme OMT ne répond qu’en
partie à ces craintes, et la flexibilité grandissante à
l’égard des objectifs budgétaires – sinon leur
contestation pure et simple par certains pays
périphériques – n’est pas près de dissiper les
inquiétudes de la BCE. Au final, la principale raison pour
laquelle la BCE a décidé de lancer le programme OMT
n’est
autre que
le risque grandissant
de
« redénomination » (soit, en clair, d’éclatement de
l’UEM) – une menace reléguant au second plan le
risque d’aléa moral. De plus, le risque d’aléa moral n’a
pas empêché par le passé la BCE de fournir un soutien
adapté et il ne devrait pas davantage lui interdire
d’introduire de nouvelles mesures à l’avenir, si
besoin. Comme nous le soutenions récemment, la
solution pourrait consister pour la BCE à assouplir
encore sa politique monétaire tout en fixant un nouveau
cap et une nouvelle dynamique. Ainsi pourrait-elle
(re)lancer l’idée des « contrats de réforme » afin de
déplacer le curseur, des programmes d’austérité vers les
réformes structurelles (et, partant, vers une croissance
potentielle) et de prendre de nouvelles initiatives en
faveur de la croissance, de l’emploi et des transferts
vers la périphérie qui soient plus acceptables pour les
pays du Nord. En l’état actuel, nous sommes encore loin
des mesures de soutien dont l’Europe a besoin pour
combattre le chômage de masse des jeunes, en
particulier.
En résumé, la BCE a réagi différemment aux tensions
financières parce qu’elle a privilégié la restauration des
canaux de transmission de la politique monétaire dans
une économie hétérogène et financée par le secteur
bancaire, au lieu de court-circuiter ce secteur et de
racheter directement des actifs financiers. L’expérience
montre que les contraintes juridiques peuvent être
dépassées
dans
certaines
« circonstances
exceptionnelles » tout en préservant autant que possible
la cohésion et la crédibilité du Conseil des gouverneurs.
Etant donné que la fragmentation financière perturbe
encore beaucoup les mécanismes de transmission
monétaire, que le chômage ne cesse d’augmenter et la
grogne sociale de monter face aux plans d’austérité et à
la monnaie unique en général, il y a de grandes
chances que la BCE reste soumise à de fortes
pressions, à tort ou à raison, en tant que seule
institution crédible capable de limiter la contagion.
Que fera-t-elle si des événements comme à Chypre, en
N° 13/34 – 6 mai 2013
Italie, en Espagne, au Portugal ou en Grèce nécessitent
un nouvel assouplissement monétaire ?
Que reste-t-il dans la boîte à outils de la
BCE (au cas où…) ?
L’option la plus naturelle consisterait à activer les
mécanismes existants. Le programme OMT reste
ouvert à tous les Etats qui en feraient la demande, et
les conditions sur lesquelles il repose sont relativement
bien connues. Il convient de demander en premier lieu
une ligne de crédit via le MES, la conditionnalité étant
liée à la fois à des mesures quantitatives
d’assainissement
budgétaire
(similaires
aux
programmes « allégés » de la Troïka) et à la supervision
étroite des réformes structurelles par la Commission
européenne, en particulier. Certes, la BCE pourrait
faciliter l’accès au programme OMT en faisant des
commentaires positifs sur les réformes engagées par le
pays concerné. En situation d’extrême urgence, si l’Etat
membre n’avait pas suffisamment de temps pour lancer
la procédure de demande officielle, la BCE pourrait
même réactiver le programme de rachat de titres
souverains (Securities Market Programme ou SMP) qui
remonte à 2010-2011, pour une transition en douceur
vers un nouveau régime, en cas de nouveaux risques
avérés pour la stabilité de la zone euro. Par ailleurs, sa
position quelque peu ambivalente à l’égard de l’Irlande
et du Portugal peut s’expliquer par des préoccupations
liées à l’aléa moral dans un contexte de fragilité politique
en Italie, en Espagne ou à Chypre. Au-delà des pays
sous programme, la position très ferme des pays du
« cœur » et de la BCE sur une stricte conditionnalité
laisse penser que la mise en œuvre du programme
OMT va rester une question sensible sur le plan
politique, surtout après l’accord conclu sur Chypre, les
craintes liées à une implication (bail-in) du secteur privé
s’étant renforcées.
Par ailleurs, le ralentissement économique pourrait
également justifier à lui seul une intervention de la BCE.
Certes, la marge de manœuvre en termes
d’assouplissement conventionnel semble désormais
limitée, mais la BCE pourrait encore baisser son
principal taux directeur. La baisse du taux « Refi » à
un niveau proche de la borne zéro aurait un impact sur
les anticipations du marché via un effet « taux bas
pour longtemps ». La BCE pourrait essayer d’accroître
cet effet en tenant un discours plus accommodant, dans
la même veine qu’en avril, s’engageant implicitement à
maintenir des conditions de taux bas et de liquidité
abondante « aussi longtemps que nécessaire ». Elle
pourrait même le faire pour un horizon de temps
correspondant à l’objectif de stabilité des prix. En
pratique, la BCE pourrait par exemple laisser entendre
qu’elle pourrait tolérer un dépassement temporaire de
l’objectif d’inflation, le cas échéant, pendant la reprise,
une position totalement opposée à l’approche longtemps
préconisée par l’ancien Président Trichet depuis 2005,
et de nouveau pendant la Grande récession. M. Draghi y
a fait également allusion tout en faisant preuve d’une
plus grande souplesse.
Outre une action (limitée) sur les taux d’intérêt, la
BCE peut également agir sur d’autres points, et de
ce point de vue le Traité n’est pas selon nous un
obstacle insurmontable en cas de risques de
fragmentation. Tout d’abord, la question d’un taux de
13
dépôt négatif a fait l’objet de nombreux débats. La
BCE ne semble pas prête à faire un tel saut en territoire
inconnu, qui pourrait avoir des conséquences
préjudiciables pour les banques dans une période déjà
difficile. Certes, l’option des taux négatifs pourrait faire
son chemin en cas d’augmentation notable des risques
de déflation. La BCE pourrait toujours ensuite durcir
le ton. La menace de taux négatifs, que la BCE a déjà
utilisée dans le passé, pourrait de nouveau avoir sa
place dans la boîte à outils de la communication. Par
ailleurs, Peter Praet, membre du Conseil exécutif a
évoqué la possibilité pour la BCE d’avoir recours à une
forme de guidage plus explicites des anticipations de
taux, voire d’évoquer un relèvement éventuel de
l’objectif d’inflation. Aucune de ces mesures n’a, selon
nous, de fortes chances d’être sérieusement examinée
par le Conseil des gouverneurs, sauf choc déflationniste
majeur. P. Praet n’en a pas moins établi un parallèle
entre ce type de « forward guidance » et certaines
mesures de la BCE en faveur de la liquidité, dont les
appels d’offres à très long terme qui ont contribué à faire
baisser les taux et les primes de risque sur l’ensemble
de la courbe des taux « sans avoir à s’engager sur
l’orientation future de la politique monétaire pour piloter
les anticipations ». Enfin, si des pressions financières
venaient à persister, l’une des solutions les plus
simples pour la BCE serait probablement de lancer
une nouvelle série d’opérations de refinancement à
plus long terme (LTRO), potentiellement sur des
maturités plus longues pouvant aller jusqu’à 5 ans et
avec un nouvel assouplissement des collatéraux.
Des achats d’actifs supplémentaires ne peuvent pas
être exclus non plus. Après tout, la BCE a déjà mis en
œuvre des plans de rachat de titres de dette publique
(dans le cadre du programme SMP) et de dette privée
(au travers de deux programmes visant les covered
bonds). D’autres titres de dette privée pourraient être
visés dans le cadre d’une nouvelle opération destinée à
contourner le secteur bancaire. Cependant, dans
l’ensemble, la BCE reste sceptique sur l’impact des
achats directs d’actifs. Des interventions à grande
échelle se heurteraient probablement à une vive
opposition de la part du Conseil des gouverneurs. Pour
le moment, la BCE a exprimé son intention de
concentrer ses efforts sur la restauration des
canaux de transmission de la politique monétaire au
profit des PME, qui sont confrontées à un
alourdissement des coûts d’emprunt, en particulier dans
les pays de la périphérie. La BCE a insisté à plusieurs
reprises sur l’importance des PME pour la structure de
financement et le marché du travail de la zone euro.
Dans ce contexte, la question qui se pose est la
suivante : la BCE est-elle prête à prendre davantage de
risques et, si c’est le cas, cela sera-t-il suffisant ?
Le programme de financement de la Banque
d’Angleterre (Funding for Lending Scheme ou FLS) est
souvent cité en exemple pour illustrer ce que la BCE
N° 13/34 – 6 mai 2013
devrait faire – fournir des liquidité bon marché
conditionnées au financement de prêts aux PME. La
BCE pourrait ainsi laisser les taux d’intérêt varier en
fonction de l’offre de crédit, mais elle pourrait également
procéder à un ajustement du collatéral utilisé par les
banques (créances privées), via un assouplissement des
décotes et des seuils de notations retenus. Cependant,
une version harmonisée du FLS serait difficile à
mettre en place pour les 17 Etats membres tant les
pratiques réglementaires et les différences structurelles
sont grandes entre secteurs bancaires nationaux. Les
mesures prises en décembre 2011 en termes de gestion
décentralisée des règles de collatéral, notamment
l’acceptation de créances privées au niveau national,
n’ont pas été complètement mises en œuvre par tous les
Etats membres principalement en raison de ressources
d’évaluation du risque inégalement répartis dans les 17
pays membres de l’UEM. En pratique, la BCE pourrait
prendre d’autres mesures pour faciliter l’utilisation
par les banques de titres adossés à des actifs
(asset-backed securities ou ABS) avec pour sousjacent de nouveaux prêts aux PME, pour encourager
le développement d’un marché de taille relativement
réduite en Europe. Cela pourrait représenter une
première étape acceptable d’un point de vue politique.
Peter Praet fait remarquer dans une autre intervention
qu’une « réouverture du marché des ABS pourrait être
l’un des moyens d’améliorer les conditions de
financement des PME » ajoutant que l’Initiative
concernant les prêts sous-jacents aux titres adossés à
des actifs récemment lancée par l’Eurosystème va
améliorer la transparence et l’évaluation des risques
afférents aux ABS, à la fois pour les titres adossés à des
créances hypothécaires résidentielles et les prêts aux
PME. La BCE pourrait ainsi décider d’accroître le
degré de « décentralisation » de la politique
monétaire en accordant aux banques centrales
nationales une plus grande marge de manœuvre
concernant les titres admis en garantie. Cela
permettrait de surmonter les obstacles imposés par le
Traité et d’induire une sorte de « renationalisation » de
la politique monétaire même si la politique en matière de
garanties et la gestion du mécanisme ELA (Emergency
Liquidity Assistance ou soutien exceptionnel à la liquidité
bancaire) impliquent d’ores et déjà une telle dimension
nationale. La BEI – une contrepartie de la BCE –
devrait également être partie prenante à tout
programme général visant à soutenir les PME et
l’investissement public. Enfin, solution de dernier
recours, la BCE pourrait envisager des achats directs
d’ABS ou autres créances titrisées du secteur privé,
nonobstant le risque de crédit correspondant. Plusieurs
membres du Conseil des gouverneurs ont déjà fait part
de leur réticence à prendre un tel risque. Toutefois, en
cas de d’aggravation du credit crunch dans la périphérie,
ce serait là une solution radicale que la BCE pourrait
bien être contrainte d’envisager. 
14
Le principal défi pour la BCE consiste à restaurer les canaux de
transmission de la politique monétaire : taux d’intérêt sur les prêts
conventionnels aux PME (jusqu’à 1 M EUR et à échéance 5 ans)
%
7.0
6.0
5.0
4.0
12M Euribor
3.0
2.0
Refi rate
1.0
0.0
03
04
05
06
Germany
07
08
Spain
09
10
11
France
12
13
Italy
Source : BCE, Crédit Agricole CIB
Conclusion
Les outils de politique monétaire et l’ampleur de la
réponse des grandes banques centrales à la crise
reflètent les différences au niveau des institutions et des
structures économiques entre les différents pays. Les
réponses politiques ont évolué au point qu’on peut
désormais parler de nouveaux régimes dans la
politique des banques centrales. Ces nouveaux outils
font apparaître de nouveaux risques et nécessitent une
meilleure communication de la part des banquiers
centraux pour garantir l’efficacité de leurs politiques et la
crédibilité des institutions.
L’abaissement simultané des taux directeurs jusqu'à des
niveaux historiquement bas, conjugué à l’adoption d’un
guidage plus explicite des anticipations et à d’autres
mesures d’assouplissement monétaire auront un impact
sur les marchés de taux et les marchés de change. Ces
politiques entraînent une baisse des taux et un
aplatissement des courbes de taux spot et à terme. À
plus long terme, toutefois, la baisse ex ante des primes
de terme semble indiquer que, lorsque les anticipations
monétaires se retourneront, une correction brutale des
rendements pourrait se produire sur les parties
intermédiaire et longue de la courbe. Les variations de
change refléteront l’ampleur et la détermination des
politiques monétaires mises en œuvre ainsi que par la
performance relative de ces économies sous l’effet de
ces politiques. Compte tenu de notre analyse de ces
deux facteurs, l’euro présente un potentiel d’appréciation
limité à court terme. De même, une appréciation
significative de la GBP paraît peu probable. En
revanche, le JPY devrait se déprécier davantage par
rapport à l’USD en réponse aux mesures toujours plus
radicales mises en œuvre par la Banque du Japon. 
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N° 13/34 – 6 mai 2013
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