Comment optimiser le report modal
Transcription
Comment optimiser le report modal
Comment optimiser le report modal ? Débat du mardi 5 juin de 14h00 à 15h30 Intervenants Michel Bleitrach, Président de l’UTP, Président de Keolis Jean-Marc Janaillac, Directeur général au Développement du Groupe RATP, Président du Directoire de RATP Développement, Vice-Président de l’UTP Pierre Mathieu, Vice-président de la région Champagne-Ardenne, Viceprésident du GART Christian Parra, vice-président en charge des transports de la Communauté Urbaine du Grand Nancy, Vice-président du GART Patrice Plojoux, Président des Transports Publics Genevois (Genève) Roland Ries, Président du GART Modérateur : Guillaume Dubois, Directeur Strategy & Operations de Kurt Salmon L’offre, la tarification et l’aménagement urbain sont les trois leviers qui participent au report modal. Pour autant, chacun d’entre eux impacte les recettes commerciales, donc les finances publiques. Comment, dans ce contexte, atteindre un équilibre entre économie et mobilité durable ? Alors que la mobilité augmente de façon continue, le véhicule individuel reste largement en tête des modes de déplacement utilisés. D’où la nécessité d’inciter au report modal, mais pas à n’importe quel prix. C’est d’autant plus vrai à l’heure où les collectivités locales sont à la fois tenues de mener des politiques de développement durable des transports publics, tout en maîtrisant leurs finances, car la situation financière du secteur est critique avec un ratio recettes sur dépenses qui atteint à peine 36 % en 2011, contre 44 % en 2000. «Le transport est le seul service public en France qui a subi une baisse tarifaire moyenne de 9 % en dix ans », note Michel Bleitrach, président de l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP) et du Groupe Keolis. Pourtant, ce secteur ne cesse d’investir pour développer l’offre (+24 % entre 2000 et 2010) et améliorer la qualité de service. En 2011, ce sont 20 milliards d’euros qui ont été investis : 9 milliards en Ile-de-France, 6 milliards dans le transport urbain de province, 3 milliards dans le ferroviaire et 2 milliards dans l’interurbain. Rééquilibrer les modes « La plupart des collectivités souhaitent avoir un meilleur équilibre entre les modes, à savoir augmenter la part de marché des transports publics et réduire celle de la voiture », rappelle Roland Ries, président du GART et maire de Strasbourg. Une agglomération qui fait figure d’exemple avec sa politique de développement des transports en commun visant à lutter contre le tout voiture. « Nous avons agi sur l’offre de transport afin de proposer une réelle alternative de déplacement. Nous avons également agi sur les tarifs pour que les transports collectifs soient attractifs et sur les aménagements urbains en réduisant le nombre de places de parking. Car plus il y a du stationnement, plus on incite les gens à prendre leur voiture. » Résultat de cette politique : la part modale de déplacements réalisés en voiture est passée en dessous de la barre des 50 %. Autre exemple, celui du Grand Nancy. Cette agglomération a revu et optimisé l’organisation du réseau urbain. Première étape : la réunion de trois autorités organisatrices au sein d’un syndicat mixte pour simplifier la gouvernance et coordonner les différents modes. La seconde étape a consisté à développer du transport à la demande sur les lignes peu fréquentées. Enfin, une carte unique de transport multimodale a été créée et permet d’utiliser aussi les TER dans le périmètre urbain. « Nous avons également renouvelé le parc. C’est non seulement un élément de confort et d’attractivité pour nos clients, mais c’est aussi un moyen de réduire les coûts de maintenance et de consommation de carburant », explique Christian Parra, Vice-président en charge des transports au sein de la Communauté urbaine du Grand Nancy. Agir sur les prix Si l’amélioration de l’offre est un facteur contribuant à accroître l’attractivité des réseaux de transport collectifs, la tarification est également un élément clef des politiques de transport. Si, en France, les recettes commerciales ne couvrent que 20 % du coût total du transport, elles restent une source de revenus non négligeable pour financer les investissements nécessaires au développement de l’offre. C’est pourquoi la question de l’augmentation des prix est de plus en plus prégnante. Les Transports publics genevois (TPG) ont franchi ce pas en 2011 en augmentant leurs tarifs de 5,6 %. «En sachant que le prix n’est pas le facteur le plus important pour les clients », affirme Patrice Plojoux. « Ils veulent avant tout des transports rapides, fluides et confortables ». D’où la nécessité de poursuivre les investissements. C’est particulièrement vrai dans le canton de Genève où, d’ici à 2020, les TPG devront relever un défi colossal en matière de mobilité. En effet, alors que les déplacements vont progresser de 40 %, les transports publics devront en absorber 65 %. Pour cela, l’offre kilométrique va bondir de 35 %. « Nous voulons fidéliser notre clientèle et capter une majorité de transfrontaliers ». Pour cela, une communauté tarifaire a été créé et regroupe l’ensemble des transports publics franco-valdo-genevois. Par ailleurs, les TPG ont développé une nouvelle stratégie marketing : « nous essayons de vendre de la mobilité en créant un style de vie », explique Patrice Plojoux. Pour cela, les TPG ont passé des accords avec plusieurs acteurs économiques : l’aéroport international de Genève, les hôteliers, les commerçants qui ont ainsi permis l’édition d’un guide des bonnes adresses où se rendre en bus ou en tramway, la livraison gratuite des courses pour tout abonné du TPG ou encore l’intégration d’un titre urbain dans les billets d’avion. Priorité aux transports en commun En matière ferroviaire, la donne est différente. Les Régions, autorités organisatrices pour les TER, ne fixent pas les tarifs. « Nous ne pouvons intervenir qu’à la baisse », déplore Pierre Mathieu, Vice-président du Conseil régional de Champagne-Ardenne. « Le moyen pour augmenter les recettes commerciales consiste à mettre plus de monde dans les trains, notamment pendant les heures creuses. Pour cela il faut développer les abonnements. Ainsi, à dépenses constantes, nous augmentons la fréquentation ». Enfin, parmi les leviers à actionner pour développer la part des transports publics dans les agglomérations figurent les aménagements urbains. Priorité aux feux et construction de sites propres sont des solutions contribuant à extraire les bus des embarras de la circulation. «Si on donne la priorité aux bus, l’automobiliste se dira que ce mode va plus vite », rappelle Roland Ries. De plus, les aménagements de voirie participent à l’augmentation de la vitesse commerciale, donc garantissent la fiabilité et la régularité du système. « En moyenne, la vitesse commerciale d’un bus est de 17 Km/h. Avec un site propre, elle passe à 22 Km/h. Or, dans une agglomération d’un million d’habitants, gagner 1 Km/h réduit d’un million d’euros l’investissement lié à l’offre », indique Michel Bleitrach. Christine Cabiron Revue Transport Public