28.02.2012 / Journal du Jura (Interview)

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28.02.2012 / Journal du Jura (Interview)
RENNWEG 26 L’humoriste Carlos Henriquez présente son tout premier spectacle en dialecte,
«I bi nüt vo hie», en grande première à Bienne. Rencontre avant de monter sur les planches
«Le rire est une soupape de sécurité»
PROPOS RECUEILLIS PAR
MARJORIE SPART
L’humoriste Carlos Henriquez,
surtout connu pour son rôle
dans le trio des Peutch, se confie
avant la première de son tout
nouveau spectacle «I bi nüt vo
hie». Ce one man show en
suisse-allemand sera présenté au
public dès vendredi. Entretien.
Carlos Henriquez, à quelques
jours de la première de votre
premier one man show, comment vous sentez-vous?
Je suis prêt depuis le mois de
décembre déjà. J’ai eu le temps
de me rassurer. Maintenant, il
faut que ça sorte!
Ce spectacle est une double
première: vous jouez seul et
vous le faites en suisse allemand. Un peu maso, non?
Oui! Je me suis dit, autant relever tous les défis en même
temps! En fait, c’est plutôt une
coïncidence. Dans le cadre de
matches d’improvisation, j’ai été
invité plusieurs fois à Berne où je
me suis produit en dialecte.
Ayant une partie de ma famille
en Suisse alémanique, je parle
quelques mots de dialecte.
Comme le public réagissait bien,
je me suis senti capable de faire
un spectacle entièrement en
CARLOS HENRIQUEZ
PARCOURS Carlos Henriquez est
né en 1969 à La Chaux-deFonds, mais a grandi à Bienne.
Sa mère est Suisse allemande,
son père Espagnol. Depuis la fin
de ses études de lettres
(Université de Neuchâtel), il vit
essentiellement de la scène.
Autodidacte, il n’a jamais pris de
cours de théâtre. Il a commencé
l’improvisation durant ses
études, puis a monté la troupe
des Peutch avec des copains
d’improvisation.
SPECTACLE «I bi nüt vo hie» est
à découvrir au Rennweg 26, les
2, 3, 4, 9 et 10 mars. Infos sur le
site www.carlos.li. Réservations:
[email protected] ou au
tél. 078 708 12 75
suisse-allemand. Finalement, je
n’ai rien à perdre, puisque le public alémanique ne me connaît
pas.
Et le soir de la première, le comique Emil, qui vous a un peu
coaché, sera là...
Oui et pour couronner le tout,
le spectacle sera enregistré! J’aurai vraiment la pression. Mais
plus le trac est fort, plus le bonheur est grand.
Avez-vous suivi une préparation particulière pour ce spectacle?
Je voulais y aller le plus naturellement possible, mais j’ai tout de
même effectué un gros travail
sur moi. Je répétais le matin, face
à la caméra et, l’après-midi, je me
repassais la vidéo et faisais mon
autocritique. Il s’agissait surtout
d’adapter mon rythme et celui de
mes gags à ce qui se fait en Suisse
alémanique.
Romands et Alémaniques ontils le même humour?
Non. J’ai pu constater que les
Alémaniques sont d’abord étonnés par mon humour. Il leur faut
du temps pour l’accepter. Le public germanophone est habitué à
une mise en contexte, et non à
une avalanche de blagues. Dans
mon spectacle, le choc est d’autant plus grand que je commence par leur dire que les Romands les détestent!
De plus, mon style est de
m’adresser au public, de le faire
parler et réagir. A ce qu’on m’a
dit, cela ne se fait pas tellement
de l’autre côté de la Sarine. Mais
je vais quand même le faire!
«I bi nüt vo hie» comporte une
grosse faute de langue dans
son titre (nüt au lieu de nid).
Cela risque d’en refroidir certains, non?
C’est un peu un avertissement.
Que ceux qui ne veulent pas de
fautes de langue dans le spectacle ne viennent pas! Parce que je
parle un peu comme je le ressens. Pour moi, l’essentiel est que
l’idée principale soit comprise.
Peu importe que je l’aie expri-
Carlos Henriquez présente pour la première fois un spectacle en suisse allemand. LDD/MITCH
mée correctement ou non.
D’ailleurs, c’est triste que de
nombreuses personnes n’osent
simplement pas parler une langue étrangère de peur de faire
des fautes.
Vous présentez la première de
votre spectacle à Bienne.
Etait-ce important pour vous
qui avez grandi ici?
Cela me fait très plaisir d’être
ici. Mais c’était surtout une demande du Forum du bilinguisme, qui soutient mon spectacle. Le public biennois connaît
peut-être trop les Romands et ne
les stigmatise pas, ce que je fais
abondamment dans mon specta-
cle. Je pense qu’il s’adresse davantage à des Alémaniques de SaintGall ou Lucerne...
Vous surfez sur quel genre
d’humour?
J’aime l’humour noir, décalé,
ainsi que le comique de situation. Par contre, dans mon spectacle, je joue surtout avec et sur
les mots. Parfois, je pars dans
l’absurde, lorsque j’évoque par
exemple le Flughafen, moi j’imagine tout de suite des singes volants...
Qui sont vos modèles?
Quand j’étais petit, j’ai beaucoup ri en regardant Coluche et
Roland Magdane. Mais je suis
très bon public. J’apprécie la diversité de l’humour. Et je ne voudrais surtout pas ressembler à un
autre humoriste. C’est pourquoi
je ne me compare pas aux autres.
Peut-on rire de tout?
Oui, évidemment! On peut se
moquer de toutes les situations.
par contre, je ne me moque pas
des gens. Je ne veux surtout pas
blesser ou rendre malheureux.
Pour moi, le rire est optimiste et
doit être utilisé de manière bienveillante. Combien de fois a-t-on
assisté à des fous rires lors d’enterrements? Le rire est une soupape de sécurité.