Le combat d`une vie... - Extrait

Transcription

Le combat d`une vie... - Extrait
Gaëtan Khélifa
Le combat d’une vie
roman
À Keira & Miley.
L’extrait présenté ici par l’auteur ne comporte pas les deux chapitres de Prologue.
Première partie
La mauvaise surprise
1
‘‘La mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure.’’
Saint Augustin
Paris, XIe arrondissement
Avril 2012
Le réveil venait de sonner ‘‘everytime’’ de Britney Spears.
Après l’avoir éteint je me retournais à nouveau vers ma
femme qui était allongée sur le dos. Comme tous les matins,
avant de me lever, mon bras gauche l’enlaçait. Ma main
parcourait lentement les courbes du corps de Léa. Je
caressais ses cuisses, son ventre, encore resté plat — après
les deux accouchements qu’elle avait subis — le début de sa
poitrine, son épaule et son cou avant d’y déposer un doux
baiser. Son bras était encore frais de la nuit passée. En
remontant la couverture sur elle, je lui murmurais au creux
de l’oreille quelques mots d’amour et lui indiquais que
j’allais prendre ma douche.
Léa, comme à son habitude, me répondit d’un simple
signe de la tête. Elle me rendait mon baiser et se retournait
pour finir sa nuit encore quelques minutes avant de se lever
à son tour.
Je me levais enfin. Dans la douche, je me remémorais
encore ces instants magiques de complicité de la nuit
d’amour passée, de nos mots tendres et de la chaleur de nos
corps entrelacés.
Tandis que je terminais de me préparer dans une salle de
bain embuée par les vapeurs d’eau, Léa s’était déjà levée,
avait enfilée un peignoir en satin rouge et avait préparé
mon petit déjeuner sans faire de bruit, pour ne pas réveiller
nos filles encore endormies.
Un moment de calme et de douceur flottait encore. Notre
appartement surprenait encore par la tendresse qui s’en
dégageait.
Situé au dernier étage d’une copropriété bourgeoise de
1980. En double exposition, il comportait une large terrasse
qui donnait sur un jardin privatif. Du haut du septième
étage, il offrait une vue imprenable sur le sacrée cœur, qui
donnait un sentiment de protection et d’apaisement.
L’intérieur se composait d’un salon-cuisine à l’américaine,
entièrement équipée, qui pouvait faire rugir de jalousie
n’importe quel grand chef étoilé. D’un dressing, de deux
grandes chambres et d’une vaste salle de bains avec fenêtre.
Le sol était en parquet blond à lattes élargies, celles de la
salle de bains étant bleutés. Les murs blancs étaient ornés
de tableaux de grands maîtres.
La pièce principale quant à elle arborait un design
contemporain. Le mobilier était soigné, une immense
bibliothèque longeait l’un des murs. Des centaines
d’ouvrages élégamment reliés garnissaient les étagères. Des
œuvres philosophiques de Platon, René Descartes ou bien
Karl Marx.
En tête de colonne, Qu’est-ce que la littérature ? de JeanPaul Sartre et le Dictionnaire philosophique de Voltaire
prenaient place sur la plus haute des étagères. Quelques
livres culinaire ainsi qu’une multitude de romans en tout
genre était perdus au beau milieu de tout ça. Au pied de
cette somptueuse bibliothèque, deux fauteuils Charleston
invitaient à une assise profonde. Ils donnaient une
irrésistible envie de s’y affaler, un bouquin à la main, et
s’abandonner pour le monde de la quiétude et de la
réflexion.
Une table-basse blanche nacrée à pieds métalliques, un
fauteuil trois places en cuir noir étaient installés sous un
tableau de Marilyne Monroe conçu par Andy Warhol et Les
amants bleus de Marc Chagall — comme pour contredire
l’esprit apaisant du lieu —. Quelques luminaires en
aluminium éclairaient la pièce à vivre.
Sans un seul mot, sans aucun bruit, nous nous
comprenions d’un simple regard elle et moi.
Perché sur le tabouret qui accompagnait le bar sur lequel
nous prenions nos petits déjeuners quotidiens, elle était
assise en face de moi. Au bord de ses lèvres elle esquissait
un petit sourire en coin tout en buvant son chocolat chaud.
Au bout de dix minutes, une biscottes brisa enfin le
silence. Nous entendions le son de nos voix pour la
première fois de la journée.
- Dommage, tu aurais presque pu prendre ton petit dej’
sans casser une biscotte ! Lançais-je d’un air taquin.
Son regard s’éveillait enfin.
- Dommage, tu aurais presque pu prendre ton petit dej’
sans bruit ! Rétorqua-t-elle en souriant.
- Bien dormi chérie ? Lui demandais-je enfin.
- Toujours dans tes bras. Nous nous sommes vite
endormis hier soir, enfin, surtout toi.
- Tu plaisante là, c’est toi qui t’es endormie dans mes
bras, lui lançais-je pour répondre à son attaque matinale
tout en descendant de mon tabouret pour l’embrasser.
Nous venions de finir le petit déjeuné qu’elle nous avait
préparé — typiquement anglo-saxon — et je m’aperçus que
j’allais être officiellement en retard dans quelques minutes.
Sur le pas de la porte, j’embrassais la femme de ma vie et
lui souhaitais une bonne journée en compagnie de nos deux
filles.
Lorsqu’elle me rattrapa au vol :
- Au fait, n’oubli pas de me laisser les clés de la voiture ce
matin. Je te rappelle que nous sommes mercredi, il n’y a
pas école. Alors je vais aller passer la journée chez ta
tante ! Me rappelait Léa soudainement.
- Ah oui… Et bien… Pourquoi pas après tout ça leur fera
plaisir.
Je lui tendis les clés de ma voiture, ainsi que ma carte de
crédit pour qu’elle puisse faire le plein d’essence.
- Bon, je suis vraiment en retard, lançais-je en regardant
ma montre, et je vais devoir prendre le métro. Embrasse
Kim et Hannah de ma part, je n’ai vraiment plus de
temps ! Dis-leur que je les aiment fort et que je me
rattraperais ce soir. Nous fêterons ensemble les cinq mois
d’Hannah.
Je fis un dernier baiser à Léa et refermais la porte derrière
moi en prenant soin de ne pas la claquer trop fort pour ne
pas réveiller mes filles.
En descendant les escaliers de notre immeuble, je
ressentais soudainement comme un malaise, des vertiges,
une envie de vomir comme jamais. Sans y prêter
véritablement attention, je respirais profondément l’air libre
et me répétais que ce n’étais sans doute rien de grave. Un
petit rien du tout.
Je ne vais pas rater une journée de travail juste pour ça…
D’habitude, lorsque je prenais les transports en commun
pour me rendre à mon bureau, j’envoyais des SMS à Léa sur
le trajet. Parfois je l’appelais même pour lui indiquer les
dernières actualités lues dans le journal que je recevais
dans la boite aux lettres tous les matins. Nous débattions
souvent ensemble sur les différents faits marquants, les
nouvelles technologies, les derniers produits et dernières
mises à jours lancées par Apple, les disparitions de célébrités
mortes dans la nuit... Puis avant de passer les portes de ma
société, je lui souhaitais une excellente journée et lui
demandais de ne pas hésiter à m’appeler si il arrivait
quelque chose à nos enfants ou elle-même. Je terminais
toujours nos conversations par un «je t’aime chérie».
Ce matin là, ni SMS, ni appels. Je n’étais pas dans mon
assiette. Je n’avais même pas ouvert le journal, il faut dire
que son gros titre ne m’inspirait pas beaucoup.
J’avais mis mes écouteurs et laissais mon iPhone me
transporter dans les bienfaits musicaux. Pascal Obispo me
rappelait comme il était bon d’être un père en chantant
Millésime et je fermais les yeux dans le premier métro de la
ligne 8 pour me laisser porter par les instruments à cordes
et la mélodie.
Pas un mot n’était sorti de ma bouche depuis le départ de
mon domicile. J’avais pourtant bousculé quelques
personnes se jetant à peine perdue dans la rame, pour ne
pas manquer leur métro. Pas un regard autour de moi, je
fixais longuement le bout de mes chaussures.
Arrivé à la Bastille, je regagnais le métro 1 et m’arrêtais à
l’esplanade de la Défense où se trouvait le siège européen
de ma société.
Je traversais le parvis, passais à proximité de la grande
arche et entrais dans une immense tour vitrée d’environ
deux-cent trente mètres de haut, abritant pratiquement cinq
mille cadres, toutes entreprises confondues.
Le siège de ma société était domicilié au vingt-sept et
vingt-huitième étage de cette «first tour». Pour regagner
mon nouveau bureau, je me dirigeais vers l’un des dix-huit
ascenseurs qui éjectaient les employés tous les cinq étages,
tels une pieuvre.
Toujours les écouteurs dans les oreilles, la liste de lecture
des musiques de mon iPhone n’était décidément pas
propice à la bonne humeur aujourd’hui. Je traversais le hall
d’entrée sans adresser un bonjour à mes collègues. Je fixais
au loin la porte transparente de mon bureau comme un
objectif à atteindre coute que coute. Je n’avais pas envie de
discuter, de demander mon agenda pour la journée,
consulter la liste des rendez-vous, des objectifs, et encore
moins envie que mon assistante ne vienne me déranger
pour m’apporter la revue de presse du jour et mon moka
blanc quotidien.
Seulement quelques minutes après m’être affalé sur mon
grand siège en cuir grainé, on frappa à ma porte.
Anaïs Penna, petite brune de vingt-trois ans à l’allure
longiligne et au regard bleu ciel. Habillée d’un tailleur noir
à liserées rouge vif de chez Chanel. Ses talons hauts Christian
Louboutin lui faisait gagner douze centimètres à son mètre
soixante-huit. Sa petite taille d’origine n’était pas un
handicap aujourd’hui puisqu’elle me dépassait grâce à ce
subterfuge typiquement féminin.
Mon assistante jonglait, tenant d’une main le breuvage
journalier encore chaud, de l’autre une dizaine de journaux
nationaux et internationaux : Le Monde, Le Canard Enchainé,
Le Figaro, L’équipe, The New-York Times...
- Vas-y, entre Anaïs. Lui lançais-je en soufflant de manière
exaspéré.
- Merci. Comment allez-vous aujourd’hui ? Je vous
apporte votre Moka et la revue de presse. J’ai également
mis à jour votre calendrier pour la fin de semaine. Vous
pourrez le consulter sur votre téléphone professionnel, sur
votre ordinateur et sur votre iPad.
- Très bien, pose tout sur la table. Nous avons des
réunions ce matin ?
- Nous en avons une seule oui. Toujours pour le même
dossier, concernant la restructuration de notre succursale
aux Etats-Unis.
- Ah oui ; le contraire m’aurait étonné. Je ne vis que pour
les américains dans cette boite depuis que je suis à ce
poste. Bon laisse moi consulter ma boite mail et je t’appelle
après pour qu’on puisse préparer cette foutue réunion en
bois. Et, au fait, arrête avec le vous. Je t’ai déjà dis une
bonne dizaine de fois que nous avons presque le même
âge. Ce n’est pas pour trois ans de plus que je mérite
qu’une jeune femme me vouvoie.
- Ok, je vais essayer Sean. Très belles chaussures au fait,
elles sont nouvelles ?
Je n’eus pas le temps de répondre à sa question, qu’Anaïs
avait déjà refermé la porte derrière elle.
2
‘‘Les femmes sont faites pour être aimées,
pas pour être comprises.’’
Oscar Wilde
Cela faisait à peine dix minutes que Sean était parti. Léa
fila ranger les quelques assiettes, bols et verres utilisés pour
le petit déjeuné dans le lave-vaisselle. Elle se dirigea d’un
pas décidé vers la chambre puis sortit une grande valise à
roulettes monogramme, accompagnée de son vanity assorti.
Elle commença à vider chaque tiroirs de sa commode puis
elle s’attaqua à une grande partie de la penderie d’une
immense armoire située juste à côté du lit conjugal.
Tout était à présent jeté sur le lit. Jean’s, pantalons, tshirts, vestes, sous-vêtements griffés. L’ensemble des
vêtements qui commençaient à remplir considérablement la
valise.
Léa alla dans la salle de bains pour prendre l’ensemble de
ses produits de beautés et parfums. Une véritable valse des
plus grands couturiers, Dior, Chanel, Thierry Mugler, Louis
Vuitton, Guess... Il fallait maintenant pour elle faire un choix
décisif pour les paires de chaussures, escarpins, bottes,
ballerines et autres paires de talons hauts. Finalement, elle
ne trancha pas beaucoup et mis une multitudes d’affaires
dans une nouvelle valise à roulette, plus petite que la
précédente, mais tout aussi utile à ce moment là.
Il fallait maintenant qu’elle aille chercher ses documents
administratifs. Elle prit ses papiers, actes de naissances de
Kim et Hannah, acte de mariage, livret de famille, bulletins
de salaires, ordonnances médicales, radiographies et
échographies, quelques relevés de comptes, les avis
d’impositions des quatre dernières années et contrat de
vente du récent véhicule acheté.
Léa pensait avoir tout organisée dans les moindres détails
pour préparer sa fuite sans que son mari ne puisse se
douter de quoi que ce soit.
Ses deux valises étaient bouclées. Elle se dirigea à présent
dans la chambres de ses enfants. Kim et Hannah dormaient
encore à point fermé. Paisiblement allongée sur le dos,
Hannah, la cadette respirait tout à coup de plus en plus fort
et malgré les efforts de leur mère, pour ne faire aucun bruit
en entrant dans la pièce, Kim se réveilla soudainement.
- Tu fais quoi maman ? Demanda la fillette de trois ans,
encore à moitié endormie.
- Rien ma chérie, ne t'inquiète pas je t'expliquerais après.
Là, je dois prendre ton sac de voyage et tes affaires, ainsi
que celle de ta petite sœur. Lui répondit Léa en
chuchotant.
Hannah venait de se réveiller à son tour.
Il n'y a pas d'âge pour ressentir certaines choses, et les
deux sœurs étaient tellement liées l'une à l'autre, qu'elles
s'étaient rendus compte que quelque chose allait changer
dans leur vie et que ce changement interviendrait
aujourd'hui.
Léa n’avait plus d'autre choix que d'ouvrir le volet
mécanique qui laissait passer les premiers rayons de soleil
d'une journée qui s'annonçait être l'une des plus chaude du
mois d'avril.
Ni une, ni deux, un sac de voyage rose fuchsia aux motifs
arrondis était sorti d’un placard prés à être rempli. La jeune
mère commença à ouvrir les armoires et les commodes de
ses deux petites filles.
Elle y sortit une grosse partie des affaires de Kim et
Hannah. Pantalons, pulls, t-shirts, sous-vêtements, vestes,
chaussures et chaussettes s’entassaient mélangés dans le
sac. Un cabas allait servir pour y accueillir les doudous et
quelques jouets, ceux qu’affectionnés tout particulièrement
Kim et Hannah.
Une fois toutes les affaires réunies dans le hall d’entrée,
Léa alla préparer ses deux filles pour le grand voyage qui
les attendaient.
Kim ressemblait trait pour trait à son père Sean — en
beaucoup plus féminin et gracieux — ses petits yeux de
couleur marron foncé et son regard en amande lui donnait
ce côté espiègle, intrépide et maligne. Les cheveux de la
petite fillette étaient châtain foncé avec quelques mèches
plus claires et son teint était à la fois mat mais pâle
d’inquiétude ce matin là. Elle portait un t-shirt à manches
longues rouge aux motifs de petits lapins blanc, un jean
bleu brut et une paire de basket nike noire. Toujours dans
les «jambes de son papa», Kim avait hérité du caractère
particulier de Sean qui en faisait sa fierté. Les gens disait
d’elle que c’était une petite fille extrêmement bien élevé,
polis, gentille, souriante et très intelligente.
Hannah, une petite tête ronde, des yeux vert foncé,
toujours souriante et beaucoup plus gracieuse que son ainé
au même âge d’après ses parent. Elle avait de petits
cheveux châtains clairs et quelques mèches blondes. La
benjamine portait quant à elle un t-shirt blanc et d’un petit
survêtement rose et blanc adidas. La paire de converse rose
lui donnait un aspect chic et décontracté du haut de ses cinq
mois. Elle était considérée comme une véritable «star» par
ses parents.
Il était temps pour Léa d’affiner les préparations du
départ. Elle se jeta sur le téléphone mural pour y composer
le numéro de téléphone de Nikolai mais personne ne
répondait. Léa raccrocha puis fit à nouveau un autre
numéro et une voix féminine répondit.
- Allo...
- Oui, allo Valeria ? C’est Léa !
- Ah oui, comment vas-tu petite sœur ?
- Ca va, je t’appelle que quelques secondes. C’est bon, ça y
est, je pars...
- Comment ça tu pars ? Tu quitte Sean ? Tu as bien réfléchi
pour les petites ? Ton mari est au courant ? Ne me dit pas
que tu est en train de faire ce que tu m’as annoncé la
dernière fois !
- Oui, je le quitte, il n’est pas au courant. Je ne lui ai rien
dit, il le découvrira par lui-même. Il était tellement sûr que
je ne pourrais jamais le quitter et partir comme ça. Ça lui
fera un drôle de choc ! Bref, je t’ai appelé pour te dire que
j’allais prendre la route avec les petites. J’ai demandé à
Kim si elle souhaitait rester ici avec son père ou venir avec
moi et sa petite sœur. Elle vient avec moi. Au moins on ne
pourra pas me reprocher de ne pas avoir laissé le choix à
ma fille de choisir entre son père et moi.
- Oui enfin, elle n’a que trois ans. Alors pour lui laisser le
choix c’est un peut facile tu ne trouves pas. Elle choisira
toujours la personne qu’elle a en face d’elle. Tu imagines
un peu, si elle te dit vouloir rester avec son papa, tu la
laisserais toute seule dans la maison toute la journée ? Bref.
Mais tu vas où ?
- Ce n’est pas le cas donc pas la peine d’en parler ! Je vais
rejoindre Nikolai. Je vais chez lui, il m’attend. J’ai tout
préparé ne t’inquiète pas, je sais ce que je fais.
- Mais tu ne le connais même pas ce type... Ca fait plus de
dix ans que vous ne vous êtes pas revu. Il a pu te raconter
n’importe quoi sur Facebook.
- Je lui fais confiance, je l’aime !
- Je ne sais pas comment tu peux tomber amoureuse d’un
mec que tu n’as jamais vu. La dernière fois vous n’aviez
pas dix ans. Et puis de ce que tu m’a déjà raconté, il a une
drôle de vie, moins sereine que celle que tu as
actuellement. Et puis il faut dire la vérité, tu n’auras plus
la même vie... Enfin je veux parler de confort matériel et
financier, tu en as conscience ?
- Oui, je le sais, j’y ai réfléchi. Je lui parle seulement
depuis dix jours et il a su m’écouter et me dire ce que mon
mari ne me disait plus dit depuis quelques temps déjà.
- D’accord mais ce n’est pas tout. Et... quand et comment
vas-tu annoncer le divorce à Sean ? Tu penses qu’il le
prendra comment ?
- Je ne sais pas encore comment il va le prendre. Très mal
je suppose car je pars avec les petites à brule pour point.
Mais bon je verrais bien. De toute façon ma décision est
prise et je ne reviendrais pas dessus.
- Ok ok, ne t’énerve pas, c’est ton choix, tu verras bien par
la suite, après tout.
- Je voudrais te demander un dernier service, c’est
important.
- Vas-y, je t’écoute.
- Si Sean t’appelle, ne lui dis pas où je suis, ne lui dis pas
que je suis chez Nikolai, ni l’adresse, ni la ville.
- Je n’aime pas ça pour Kim et Hannah. Tu as seulement
imaginé, si «ton» Nikolai était un fou comme on en entend
parler au journal télévisé et qu’il t’a séduite juste pour faire
du mal à toi et aux petites ?
- Arrête un peut, je sais ce que je fais je t’ai dit ! Alors
promet-moi de ne rien lui dire s’il t’appelle. Je sais qu’il le
ferra.
- Pfff, ok... Je veux bien le faire mais à une condition, tu
me donnes de tes nouvelles une fois arrivé chez lui. Et les
jours suivants aussi. Autre chose, si Sean m’appelle,
comme tu le dis, et qu’il sait quelque chose pour toi et
Nikolai.
- Tu improviseras.
- Je ferai ce qu’il me semble juste.
- Ok, bon j’y vais. Bisous Val.
Le téléphone raccrocha avant même que Valeria ne puisse
répondre à sa petite sœur qui avait préparé sa fuite depuis
une semaine.
Léa recomposa le numéro de téléphone de son amant
avant de descendre les affaires dans la voiture et prendre la
route. Au bout de trois sonneries le jeune gigolo répondit
d’une voix ensommeillée.
- Allo...
- Chéri, c’est moi ! C’est bon je pars.
- Ah... Heu... Ok ! Mais... Tu pars quand... Chérie.
- Et bien maintenant. Mes filles sont prêtes, les affaires
prêtes à être transportées dans la voiture. C’est bon, tout
est ok ! Il faut que je fasse vite maintenant. J’ai peur que
mon mari ne se soit déjà douté de quelque chose. Il était
bizarre depuis quelques jours, j’espère qu’il n’a rien vu. Il
m’a simplement embrassé tout à l’heure comme si il
préparait un coup. Je serais plus tranquille lorsque je serais
dans la voiture avec les petites et dans le trajet.
Pour le reste, tout a fonctionné comme prévu. Il m’a
facilement laissé les clés de sa voiture et j’ai même eu le
droit à un «bonus», sa Gold.
- Il t’a donné sa carte-bleue ?
- Oui, répondit Léa d’un ton enjoué. Pour faire l’essence,
ça tombe bien il va en falloir pour te rejoindre et sans
compter le péage. Et puis j’ai pris tout ce que j’ai pu,
comme tu me l’as demandé. Il reste encore mes affaires
d’hiver et ceux des petites mais bon, je trouverais bien le
moyen pour qu’il me les rapportent. Il aime trop ses filles
pour les laisser dans le besoin. Tu as raison, comme tu
m’as dit la dernière fois, le point de pression pour avoir ce
que je veux c’est de jouer sur la relation qu’il a avec Kim et
Hannah. Pour elles, il fera tout ce que je veux.
Par contre je laisse certaines choses pour Hannah. Tu as
bien tout ce qu’il faut, pas besoin de prendre de la
nourriture, le lit-parapluie, le transat...
- Oui ! Répondit voilement Nikolai en lui coupant la
parole. Je t’ai déjà dit que j’avais tout. Et bien tant mieux
chérie. Je t’attends ce soir alors. Il est au courant que tu le
quittes ?
- Oui il va être au courant ! Je lui ai écrit un mot et
lorsqu’il m’appellera je lui dirais une nouvelle fois.
- Bien. Alors tout est bon. Vivement ce soir que tu arrives.
A tout à l’heure, je te laisse j’ai des trucs à faire. Bisous.
- D’accord, bisous chéri, je t’...
La tonalité d’occupation sonnée déjà alors que Léa n’avait
pas fini de faire entendre son récent amour à l’homme
qu’elle était sur le point de rejoindre.
3
‘‘Le destin, c’est le caractère.’’
Novalis
Je décidais de quitter mon bureau un peut plus tard qu’à
l'accoutumé. Il était dix-huit heure passé de quelques
minutes lorsque je fermais consciencieusement la porte
vitrée de mon tout nouveau bureau.
Je sortis mon téléphone portable pour envoyer les
premiers SMS de la journée à ma femme...
06 avr. 2011 18:02
Chérie tu fais quoi ?
Chérie ? Ça va ? Pourquoi
tu ne réponds pas, je
m’inquiète.
... Je ne reçus, aucune réponse de la part de Léa. Je
décidais donc de tenter de l’appeler sur le téléphone de
notre domicile. D’habitude, si elle n’avait pas entendu son
mobile, elle répondait aux appels émis sur le téléphone fixe.
A trois reprises, je tombais enfin sur sa douce voix :
«Bonjour.
Bienvenue chez Sean et Léa. Nous sommes
actuellement absents.
Laissez-nous vos coordonnées et
l’objet de votre appel.
Nous ne manquerons pas de vous rappeler
dès que possible.
A bientôt.»
Hormis, celle qui avait enregistré le message du
répondeur, indiquant qu’il n’y avait personne chez nous...
Je commençais alors à m’inquiéter de plus en plus et
imaginais le pire. Une multitude de scénarios catastrophes
se percutaient dans mon esprit. J’espérais qu’il ne soit rien
arrivé à Kim ou Hannah. J’imaginais ma femme qui avait
glissé en sortant de la douche et mes filles apeurées, seules
toute la journée à hurler au secours, à pleurer, sans manger,
sans boire.
Complètement traumatisé à ces idées, j’allongeais le pas
sachant que je ne pourrais pas être à la maison avant au
moins trente minutes.
Je prenais le premier métro en direction de notre domicile
et arrivé à la Bastille, je pris à nouveau mon mobile pour
appeler ma tante.
Mais oui, enfin. Quel imbécile je fais. Il était prévu que Léa et
les enfants passent la journée chez elle. Il n’y a pas de quoi
s’inquiéter donc...
Pour me rassurer je composais tout de même le numéro
du domicile de mon oncle.
Au bout du fil, ma tante, surprise de m’avoir au
téléphone prenait de mes nouvelles avant que je ne
l'interrompe pour lui demander si ma femme était déjà
partie et était en route pour notre appartement ou si elle
était encore chez elle, accompagnée de mes deux filles. La
surprise fut de tel qu’elle me prit pour un fou...
- Tu t’es mis à boire ou fumer Sean ? Léa n’est jamais
venue à la maison aujourd’hui et elle ne m’a pas appelé
pour me prévenir qu’elle viendrait avec Kim et Hannah,
me répondit-elle d’un air décontracté avant d’ajouter : Je
demande à ton cousin si il a reçu un texto de sa pars et si il
est au courant de quelque chose.
Bien entendu, mon cousin n’avait rien reçu et n’était pas
au courant que ma femme devait passer la journée chez lui.
Bien entendu, tout ceci se révélait être une mascarade pour
cacher les activités journalières de mon épouse.
Il fallait à tout prix que je gagne mon appartement au
plus vite. Je sautais dans le métro qui venait d’arriver pour
m’y engouffrer malgré le nombre impressionnant de
personnes qui étaient déjà à bord de la rame à cette heure-ci
de la journée.
✭
Il ne restait plus que quatre heures de route à Léa et ses
filles avant d’arriver à destination.
L’amant de la jeune maman de vingt-six ans vivait dans
un petit village abandonné du sud ouest.
Une boulangerie, un bar-restaurant qui faisait aussi office
d’hôtel, un petit supermarché et une école. Tous ces
établissements étaient réunis non loin de la place
principale, celle de la mairie.
Une seule route donnait accès aux lieux-dits, quartiers et
autres maisonnettes qui étaient construites en périphérie
du centre-ville.
✭
Nikolai avait vingt-sept ans. Sa vie n’avait jamais était
très simple. Il y a cinq ans, alors qu’il s’était mis en couple
avec une femme, tout ne s’est pas terminé comme prévu.
Ensemble, ils ont eu un petit garçon qui répondait au nom
de Jérémy. Et puis comme dans de nombreux couples, qui
ne s’entendent plus ils sont séparés, fort heureusement,
sans trop de fracas pour protéger leur fils.
Nikolai passait en jugement pour déterminer les
modalités de droit de garde pour son fils qu’il ne voulait
pas à sa charge.
Fier de ne pas avoir la garde de son fils, Nikolai pouvait
librement s’abandonner aux joies du célibat. Passant de
filles en filles, la petite maison individuelle qu’il louait était
devenue l’antre d’une maison close. Avec ses amis il
organisait des soirées privées ou alcools, drogues, femmes
et sexe s’entremêlaient. Initié à la débauche, Nikolai vivait
le moment présent. Sans emploi, il couvrait ses dépenses
grâce à une petite magouille élaborée en famille, avec son
père.
Quelques mois avant sa séparation il avait tout mis en
œuvre pour se faire licencier de son poste de maçon et avait
attaqué son employeur aux prud’hommes. C’est à ce
moment là que son père était entré en jeu. Travaillant pour
l’inspection du travail, il avait négocié avec ses ‘‘collègues’’
une sanction exemplaire envers le patron de son fils. Tout
ceci en catimini.
Un soir de beuverie, Nikolai avait attrapé dans ses griffes
une petite brune à lunette. Il l’avait emmené dans l’une des
pièces de la maisonnette pour faire «ses affaires». Au bout
d’une demie heure, content de sa maigre performance, les
deux comparses se quittaient sans un mot.
La surprise fut de telle, lorsque la fameuse Vanessa
l’appela un après-midi de printemps pour lui annoncer
qu’il allait être papa et qu’il fallait trouver une solution
dans l’urgence. Malgré tout, il n’y avait pas d’erreur,
Nikolai était bien le père et une solution plus que
raisonnable allait être prise. Vanessa alla vivre chez le père
de son futur enfant, qu’elle souhaitait conserver.
C’été une petite fille de 3,520 Kg qui se prénommée
Louna. Contre toute attente, l’attitude de Nikolai n’avait
pas changé, il n’avait jamais était présent pour sa ‘‘copine’’
ni même lors des rendez-vous avec le gynécologue et ne le
sera jamais. Père pour la seconde fois mais cela ne faisait
pas de lui pour autant un homme responsable. Bien au
contraire, il se plaisait à se décrire comme quelqu’un qui
n’était pas câlin, attentionné, doux, serviable, et gentleman
envers la gente féminine.
Au bout de neuf mois de véritable calvaire, Vanessa avait
pris sa décision. Elle quitterait le père de sa fille en pleine
nuit, durant son sommeil car elle avait véritablement peur
de cet homme qui, trop souvent était violent avec elle.
Ce vendredi là, elle attendait que Nikolai rentrait, une
fois de plus, saoul comme un sac de vin. Les seuls mots
qu’il lançait envers sa compagne étaient d’une agressivité
sans compter.
- Hey la pute là, t’es pas encore couchée à cette heure ? Tu
m’attends pour prendre ton coup encore !
La jeune mère ne lui répondait pas. Elle savait qu’il lui
resté seulement quelques heures avant de pouvoir avoir
enfin la paix.
Vers quatre heures du matin, le chien de la maison était
endormi, tout comme son maître. Vanessa pris le sac à
langer, réveilla sa petite fille de dix mois qu’elle emmitoufla
dans une couverture bien chaude.
Avant de partir elle prit soin de faire payer son attitude à
Nikolai en effectuant un virement bancaire sur un compte
externe et lui vider entièrement ses comptes.
- Voilà mon grand, c’est le prix a payer pour le bien être
de ma fille. Tu n’a jamais pris soin de l’élever, sale enfoiré !
Se dit à voix basse Vanessa avant d’éteindre correctement
l’ordinateur qui était posé sur un petit bureau d’appoint.
Elle prit dans ses bras la fillette encore endormie, lui vissa
un petit bonnet sur la tête, ouvrit ensuite délicatement la
porte d’entrée puis l’une des deux portes en bois qui
suivait. Une fois dehors, elle repoussa les portes derrière
elle et ferma d’un tour de clef la porte en bois. La mère et
son bébé n’étaient plus qu’à quelques mètres de la liberté.
Une dizaine de pas dans le petit jardin puis, dans cette nuit
noire, sans aucun éclairage aux alentours, un bruit déchira
le silence. C’était celui du cliquetis du portillon qui se
trouvait au bord de l’allée centrale du lieu-dit.
- Plus que quelques minutes et nous serons libres de cette
vie de merde ma chérie, chuchotait à nouveau Vanessa aux
oreilles endormies de sa fille.
Il était 04h39 du matin lorsque la voiture de Vanessa
prenait la route en direction de chez ses parents. L’idée que
lui avait prodiguée sa tante avait marché.
Nikolai allait devenir fou lorsqu’il se lèverait avec la
gueule de bois le lendemain.
Il avait mis du temps avant de se rendre compte que sa
compagne était partie avec sa fille.
Un mois plus tard, un nouveau jugement au profit de
Nikolai — qui commençait à être coutumier du fait — allait
lui donner la possibilité de voir sa fille un weekend sur
deux, une fois de plus.
Mais malgré tout, Vanessa en avait décidé autrement et
elle ne voulait pas respecter ce jugement. Pour elle,
l’attitude du père ne permettait pas de s'occuper
convenablement d’un enfant âgée d’à peine onze mois.
Durant six mois, Nikolai faisait régulièrement constater
par les services de gendarmeries de la commune, le fait que
la mère de sa fille ne voulait pas lui présenter son enfant.
4
‘‘La surprise est l’épreuve du vrai courage’’
Aristote
J’arrivais enfin devant la résidence et hésitais encore à accéder
dans un premier temps au parking sous-terrain afin de voir si ma
Peugeot 207, toute neuve, était encore là, ou monter directement les
étages pour accéder à mon appartement. Mon intuition me disait de
monter. Pour ne pas rester coincé dans ce vieil ascenseur — s’il avait
décidé de tomber en panne juste aujourd’hui — je décidais
d'emprunter la cage d’escaliers. Durant les cent vingt marches, mon
cœur ne cessait de battre de plus en plus fort, toutes les mises en
scènes de scénarios catastrophes défilaient dans ma tête, et puis...
Un flash ! Je ralentissais mes pas, plus besoin de me presser. Pour
moi tout devenait évident. Lorsque je rentrerais chez moi je n’aurais
qu’à tourner la tête en direction du bureau de Léa. Si l’ordinateur
portable que je lui avais offert à Noël dernier n’était plus là, cela
voudra dire qu’elle était partie...
Je rentrais lentement la clef dans la serrure du haut de la porte,
habituellement lorsque nous quittions l’appartement nous fermions
le verrou à double-tour. Cette fois-ci un seul tour avait été donné.
J’ouvrais doucement la porte et pouvais constater que les volets
avaient été fermés, toutes les pièces étaient sombres mais je pouvais
encore distinguer le mobilier.
Chérie... Kim... Hannah ? Il y a quelqu’un ? Vous êtes là, répondezmoi...
Mon premier reflex aurait été d’appeler, mais aucune réponses. En
allumant la lumière du hall d’entrée, devant mes yeux ébahis un
parterre de sacs plastiques jonchait le sol, j’avançais alors vers la
pièce principale et tournais ma tête en direction du bureau vitré de
Léa pour avoir le verdict de mon intuition.
L’ordinateur portable blanc nacré n’était plus là.
Putin, putin, putin... C’est pas possible... Je rêve bordel ! Mon dieu,
dites-moi que c’est un rêve, je vais me réveiller...
Je courrais vers ma chambre. Tous les tiroirs de la commode
étaient restés ouverts ; et vide. Un tas de vêtements appartenant à
Léa étaient encore sur le lit — qui n’avait même pas était fait — et
jonchait le sol. La pièce était dévastée comme après un cambriolage.
Complètement éreinté, je portais tant bien que mal mon corps en
direction de la chambre de Kim et Hannah pour y constater que l’on
n’avait même pas pris le soin de fermer les portes des armoires de
mes filles.
Je retrouvais des jouets leur appartenant ici et là, dans toutes les
pièces de mon immense appartement.
Comme je l’avais pressenti, ma femme était bel et bien partie. Il
était temps que les questions se bousculent au plus profond de moi.
Pourquoi est-elle partie comme ça, sans rien dire ?
Pourquoi ne pas m’avoir prévenu ?
Où sont mes filles ? Où est partie ma femme ? Où se trouvent-elles
maintenant ?
Qu’ai-je fait pour mériter de vivre ces instants si durs ?
Voilà à quoi ça sert de prendre soin de sa femme, de l’aimer plus que tout
si c’est pour avoir ce remerciement…
Je n’avais pas la moindre idée des réponses et n’en aurais peut
être jamais.
Mon téléphone avait dû sonner une bonne vingtaine de fois
depuis mon arrivée et ma sinistre découverte. Je n’avais pas
répondu.
Ne pouvant plus lutter j’avais laissé mon corps s’évanouir sur le
sol, la tête frappant contre le bas du canapé d’angle du salon. Sans
doute quelques longues minutes défilèrent et je m’endormis.
✭
Depuis plus de cinq minutes, Marie Ruffino tambourinait sans
relâche à la porte d’entrée.
- Sean ! Ouvre-moi, je sais que tu es la ! Où est Léa ? Où sont les
petites ?
Ne donnant aucune réponses, Marie sortit un double des clés,
celui que j’avais volontairement laissé chez la concierge au cas où un
jour je perdrais mon trousseau je ne sais où. Elle fit glisser la
première clef dans le mauvais verrou, la peur de voir l’inimaginable
derrière cette porte la faisait trembler. La deuxième clef était la
bonne pour pénétrer dans l’appartement.
J’étais plongé dans la pénombre en position fœtal, totalement
blafard, commotionné.
- Sean, réveille-toi ! Cria Marie en se portant à mon chevet.
- Qu’est-ce que tu fous chez moi ? Marmonnai-je.
- Mais je me suis inquiété, Sean ! Je t’ai appelé au moins dix fois
depuis que je t’ai eu au téléphone à ta sortie de boulot. Tu avais
l’air désemparé lorsque je t’ai dit que Léa n’était pas venue avec les
petites. D’ailleurs où sont-elles ?
- Je n’en sais rien et c’est mon problème. Lui décrétai-je en me
redressant.
- Comment ça tu n’en sais rien ? S’étonna-t-elle.
Toujours assis au sol, contre le canapé, le visage dans les mains,
j’eus un haussement d’épaules, j’étais désespéré et ne savais pas par
où commencer.
- Je ne sais pas où est ma femme, où sont mes filles ! Je suis rentré
à la maison avec une bougie pour fêter les cinq mois d’Hannah
dans les mains. Léa n’a pas répondu à mes SMS, elle était sensée
passer la journée chez toi avec nos filles. Au final, voilà dans quel
état je retrouve mon domicile : vide et sans les femmes que j’aime.
Je n’en sais pas plus, fin du résumé de l’épisode, tu es contente ?
répondis-je avec virulence tout en me levant difficilement.
Pris de vertiges, j’avais du mal à rester debout.
Soudain, une idée me traversa l’esprit. Encore assommé par ce
qu’il venait de m’arriver, je me dirigeais vers mon bureau en
vacillant. Posé à côté de mon ordinateur je pouvais apercevoir qu’il
y avait une feuille de papier pliée en deux ainsi qu’un objet
scintillant posé dessus. Je me frottais les yeux et m’approchais en me
tenant aux murs.
C’était un mot de Léa…
Sean,
Je pars avec les petites.
plus confiance, etc...
Cette vie ne me convient plus,
Je serais sur MSN ce soir. A+
Léa.
... Il était accompagné de sa bague de fiançailles et de son alliance.
Cette fois-ci c’était bien la fin de notre histoire. Les mêmes questions
revinrent dans ma tête comme un boomerang. J’avais envie de
vomir et à la fois de pleurer de tristesse, du manque de mes filles, du
manque de ma femme. Je pensais tout à coups à tout ce qui allait
changer dans ma vie.
- Tu voulais savoir où est passée Léa, et bien voilà. Elle est partie
avec Kim et Hannah, elle m’a quitté et j’en serais peut-être plus
dans la soirée mais je n’y compte pas. Lançais-je à ma tante qui
venait de s'assoir.
- J’en reviens pas, me dit-elle bouche bée. Je sais que cela ne me
regarde pas et tu n’es pas obligé de me répondre, mais... vous aviez
des soucis dans votre couple ?
- Non ! Aucun souci apparent de mon côté. J’ai même été voir un
concessionnaire la semaine dernière pour qu’il reprenne mon
véhicule cet été. Nous voulions changer pour prendre plus grand.
On envisageait d’avoir un troisième enfant, nous voulions essayer
d’avoir un garçon ! Rétorquais-je d’un air désemparé.
- Tu veux que je reste ici ce soir, tu n’as pas l’air bien.
- Non !
- Tu es sure, je ne voudrais pas que tu fasses une bêtise.
- Mais non ne t’en fait pas, je ne suis pas encore assez stupide pour
me foutre en l’air pour une femme. Et puis il y a mes filles. Je ne
vais pas les abandonner comme ça.
Marie avait enfilé son gilet bleu et ajouta avant de partir :
- Si tu as besoin de quoi que ce soit même durant la nuit, n’hésite
pas à m’appeler.
Je n’avais pas besoin de quoi que ce soit. Tout ce que je désirais
n’était plus là. Ce que j’avais besoin à cet instant était ma femme et
mes enfants.
J’allais m’installer dans ce fauteuil en cuir lorsque, le regard dans
le vague, je fixais le tableau magnétique accroché sur le mur près de
mon bureau, je m’approchais comme si je venais de découvrir un
trésor.
Scotché dans l’un des angles supérieur droit du tableau, une puce
téléphonique d’un abonnement prépayé avait disparu.
Mais oui, suis-je bête ! J’avais laissé cette puce ici au cas ou un jour nous
avions besoin d’un numéro de téléphone en urgence. C’est pour cela que
personne n’arrive à joindre Léa sur son numéro habituel.
Je saisissais mon iPhone afin de composer le numéro que j’avais
pris soin de sauvegarder sur mon carnet d’adresse, au cas où…
TUUUT... TUUUT... TUUUT...