fiche-10 - Agri 44

Transcription

fiche-10 - Agri 44
10
Mon salarié a été déclaré inapte
par le médecin du travail :
quelles conséquences ?
9-53-72-85
44-4
Sauf en cas de danger immédiat pour le salarié,
l’inaptitude ne peut être constatée par le médecin du
travail qu’après deux examens médicaux. À l’issue de
chacun de ces examens, le médecin du travail envoie
l’avis d’inaptitude (ou d’aptitude partielle) à l’employeur
par lettre recommandée avec accusé de réception.
Ce dernier doit immédiatement réagir : il ne dispose
que d’un délai d’un mois pour reclasser le salarié ou, en
cas d’impossibilité de reclassement, pour le licencier.
Définitions
En Bref
L’inaptitude au travail est une impossibilité physique ou mentale du salarié à exercer tout ou partie de ses fonctions.
L’inaptitude peut être « totale » ou « partielle », « définitive » ou « temporaire ».
L’inaptitude est d’origine professionnelle
lorsqu’elle fait suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, et
d’origine non professionnelle si elle résulte
d’une maladie ou d’un accident non professionnel. La procédure à suivre et les
droits du salarié diffèrent dans ces deux
situations.
Réactions
La recherche
d’un reclassement
Quel que soit le degré de l’inaptitude figurant dans l’avis du
médecin du travail (totale, partielle, temporaire ou définitive),
l’employeur a l’obligation de
rechercher une possibilité de
reclassement soit dans l’entreprise, soit (le cas échéant) au
sein du groupe auquel elle
appartient. En effet, une inaptitude à tout emploi dans
l’entreprise ne signifie pas inaptitude au travail et un licenciement prononcé sans recherche
effective de reclassement serait
abusif.
La recherche de reclassement
ne doit pas se limiter aux postes
disponibles existants : elle peut
supposer la mise en œuvre de
mesures telles que mutations,
transformation de poste ou
aménagement du temps de travail.
La recherche sérieuse et effective de reclassement devra
pouvoir être démontrée en cas
de contentieux (fréquents sur
ce sujet) et cette recherche
demande un certain temps.
Il est donc essentiel pour l’employeur de s’y consacrer dès la
réception du 1er avis d’inaptitude, même si seules les
recherches de reclassement
compatibles avec les conclusions du médecin du travail
émises au cours de la deuxième
visite peuvent être prises
en considération pour apprécier si l’employeur a bien
respecté son obligation de
reclassement.
La jurisprudence est particulièrement contraignante sur ce
sujet à l’encontre des
employeurs. Il convient par
conséquent de prendre le maximum de précautions pour éviter une requalification de la
rupture en licenciement sans
cause réelle et sérieuse.
Sans que cette méthode puisse
garantir une totale absence de
risque, nous préconisons à
l’employeur qui reçoit un avis
d’inaptitude de suivre les étapes
suivantes :
1. Faire la liste exhaustive de
l’ensemble des postes de travail
existant dans l’entreprise. Peu
importe que ces postes soient
déjà pourvus ou à temps partiel.
2. Demander au médecin du
travail de venir sur l’entreprise
afin qu’il puisse apprécier par
lui-même la capacité du salarié à tenir l’un ou l’autre de ces
postes (à défaut de disponibi-
lité du médecin du travail :
lui adresser un courrier comportant la liste des postes établie et lui demandant son avis
sur les capacités du salarié à
tenir l’un ou l’autre de ces
postes).
3. Au cas où le salarié serait
considéré comme apte par le
médecin du travail à tenir un
poste déjà pourvu sur l’entreprise : rencontrer le salarié
concerné afin de savoir s’il
accepterait ou non de changer
de poste de travail.
4. Prendre l’avis des délégués
du personnel (s’ils existent)
AVANT toute proposition de
reclassement au salarié inapte
(cette obligation ne concerne
que les inaptitudes d’origine
professionnelle).
5. Dans l’hypothèse où un ou
plusieurs postes (même à
temps partiel) peuvent être proposés au salarié : établir un
courrier lui proposant ces
postes (courrier par LRAR ou
remis en main propre contre
décharge).
6. Dans l’hypothèse où aucun
poste ne peut être proposé au
salarié : lui adresser un courrier justifiant des recherches
de reclassement et en établissant l’impossibilité (courrier
par LRAR ou remis en main
propre contre décharge).
La réponse du salarié
pour le poste proposé
Le salarié doit disposer d’un
délai raisonnable pour faire
connaître sa réponse à l’employeur.
Si le salarié accepte le poste
proposé par l’employeur pour
le reclassement, il est indispensable d’établir un avenant
au contrat de travail. En effet,
dès lors que le reclassement
entraîne une modification du
contrat de travail, l’acceptation
ne peut en aucun cas résulter
de la seule poursuite de l’activité par l’intéressé.
En cas de refus du salarié, il
faut vérifier que le poste proposé est bien conforme aux
conclusions du médecin du travail. En cas de doute, il appartient à l’employeur de solliciter l’avis du médecin du travail.
Attention, c’est à l’employeur
qu’il revient de prouver qu’il a
respecté les prescriptions du
médecin du travail.
Dans l’hypothèse où le poste
refusé est bien conforme aux
prescriptions du médecin du
travail, l’employeur pourra
licencier le salarié s’il justifie
qu’il ne dispose d’aucun autre
poste compatible avec l’inaptitude du salarié et s’il a fait
connaître par écrit au salarié,
les motifs qui s’opposent au
Réactions (suite)
reclassement.
À noter : lorsque la proposition de reclassement faite par
l’employeur est conforme à ses
obligations, le refus du salarié
peut éventuellement être considéré comme abusif. Dans ce
cas, le salarié perd le bénéfice
de l’indemnité spéciale de licenciement (voir fiche n° 11).
Exemple : la jurisprudence
considère comme abusif le refus
d’une proposition de reclassement par un salarié lorsque celleci n’entraîne qu’un simple changement des conditions de travail.
Il en va de même lorsque le salarié refuse sans motif légitime un
poste approprié à ses capacités
et comparable à l’emploi précédemment occupé.
Possibilité
de contestation
L’employeur, comme le salarié,
ont la possibilité de contester
l’avis du médecin du travail
devant l’inspecteur du travail.
Ils disposent à cet effet d’un
délai de 2 mois. La contestation doit être réalisée par
LRAR.
Points de vigilance
L’avis des délégués du personnel (DP)
Le code du travail n’impose pas que l’avis des DP soit recueilli collectivement au cours
d’une réunion. L’employeur peut donc également recueillir cet avis individuellement
auprès des DP, même si cette pratique ne semble pas la mieux adaptée.
En revanche, et quel que soit le mode de consultation des DP, l’employeur a l’obligation de leur fournir toutes les informations nécessaires au reclassement du salarié
inapte pour leur permettre de donner un avis en connaissance de cause. A défaut, la
consultation serait irrégulière.
Ainsi, l’employeur doit notamment communiquer aux DP les conclusions du médecin
du travail sur les possibilités de reclassement du salarié.
Par ailleurs, la consultation des DP ne doit intervenir ni trop tôt (après le deuxième examen médical) ni trop tard (avant la convocation à l’entretien préalable au licenciement
s’il n’y a pas de reclassement).
Attention : l’absence de consultation des DP rend le licenciement sans cause réelle et
sérieuse et l’employeur sera passible du paiement d’une indemnité qui ne peut être
inférieure à 12 mois de salaire.
La même sanction est encourue lorsque l’employeur, tenu d’organiser des élections (au
moins 11 salariés), n’a pas respecté son obligation ou n’est pas en mesure de justifier
d’un procès verbal de carence.
Une lettre au salarié
Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié
inapte (origine professionnelle), l’employeur est tenu de lui faire connaître par écrit les
motifs qui s’opposent au reclassement. Attention, une notification verbale ne peut pas
remplacer l’écrit qui est exigé par le code du travail.
À défaut d’écrit, l’employeur pourra être condamné à payer des dommages et intérêts
à son salarié.
Conséquences pour l’entreprise
Voir aussi
• Fiche n° 11 :
Je dois licencier mon
salarié pour inaptitude :
quelle procédure mettre en
place ? Quel coût ?
Un coût pour l’entreprise qui peut être important
L’avis d’inaptitude d’origine professionnelle peut avoir des conséquences financières
importantes pour l’entreprise lorsque le reclassement s’avère impossible (indemnité de
licenciement doublée, préavis payé mais non effectué).
Une réorganisation du travail
Dans certaines situations, l’obligation de recherche de reclassement pourra avoir pour conséquence une réorganisation du travail dans l’entreprise (aménagement de poste, changement de titulaire de poste de travail, etc.).
( (
Témoignage Aurélie
Élevage (Sarthe)
« Notre salariée était en arrêt depuis plusieurs
mois suite à un accident du travail survenu
lorsqu'elle était sur le marché. Lors de sa
reprise, elle a passé une première visite médicale auprès du médecin du travail. Elle a
passé une deuxième visite médicale environ
deux semaines après. Entre temps, le médecin du travail est venu faire une étude de son
poste de vendeuse sur le marché. Suite à la
deuxième visite, le médecin a déclaré que
notre salariée était inapte à reprendre son
poste de travail. Elle ne pouvait plus élever les
bras au-dessus de l'axe du cœur. Il était donc
impossible de pouvoir aménager son poste.
La taille de l'exploitation ne permettait pas
non plus de la reclasser sur un autre poste.
Nous avons alors été contraints de la licencier. »
Un risque de sanctions lourdes en cas de non-respect
de la procédure
Le non-respect de la procédure par l’employeur (par exemple : défaut de
recherche de reclassement ou recherche trop superficielle, omission de prise
de l’avis des DP, absence de lettre au salarié en cas d’impossibilité de reclassement) peut entraîner des condamnations très lourdes financièrement
(jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’euros) en cas de contentieux prud’homal. Il est donc essentiel pour l’employeur de prendre le temps nécessaire
pour que la procédure soit conforme.
Un délai d’un mois
L’employeur ne dispose que d’un délai d’un mois entre la deuxième visite
médicale et la proposition de reclassement ou la notification du licenciement. Ce délai est court et ne peut pas toujours être tenu. Dans ce cas, l’employeur devra reprendre le paiement du salaire au terme de ce mois et
jusqu’au reclassement ou au licenciement du salarié.
Une indemnité temporaire d’inaptitude
Pour éviter une absence totale de rémunération entre la deuxième visite
médicale et la date du reclassement ou du licenciement, le salarié inapte
(d’origine professionnelle) a la possibilité de demander à bénéficier d’une
« indemnité temporaire d’inaptitude ». La demande doit être faite par
le salarié sur un formulaire spécifique disponible auprès de la caisse
de MSA. Un exemplaire de la demande doit être envoyé à l’employeur.
Octobre 2012