Désincarné Auteur du très réussi et original .Neon, assurément une

Désincarné
Auteur du très réussi et original .Neon, assurément une des plus
grandes surprises du metal dit « extrême » cette année, Lantlôs est
en réalité le projet d’un seul homme, Herbst, même s’il s’est entouré
pour ce disque du talentueux Neige (Alcest, Amesoeurs). Déconnecté,
évasif, parfois difficile à suivre mais toujours ouvert, le multiinstrumentiste a tenté de nous dévoiler les dessous de son projet
pour le moins étrange et difficilement identifiable. Un artiste qui est
le reflet fidèle de sa musique, en somme…
Entretien avec Markus « Herbst » Siegenhort (guitare, basse, batterie, composition)
Interview, traduction et édition par Mastema
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Mastema (Rock ‘n Balls) : Salut Herbst, merci pour cet entretien. .Neon est sans
aucun doute une des meilleures surprises de l’année pour moi. D’abord, j’aimerais
savoir comment tu décrirais ce disque à quelqu’un qui ne l’a pas encore écouté.
Herbst : Salut ! Merci du compliment. .Neon s’intéresse au lien entre la réalité et le moi
profond. Lorsque j’avais 17 ans, ma perception des choses a totalement changé. Tout ce
que je perçois aujourd’hui est flou et « filtré ». C’est comme si tu étais en train de
regarder un film. Tu ne contrôles rien, et c’est comme si tu ne foulais pas le même sol que
les autres. Je me sens surréel ; pas dans un sens de supériorité, c’est simplement que ma
relation à la réalité est mauvaise. Les impacts périphériques s’enfoncent dans une
substance floue qui n’existe même pas. Tout ce qui existe l’est en toi, car seul toi peux en
faire l’expérience via toi-même. Il n’y a pas de consensus. J’imagine que tu ne saisis pas
un mot de ce que j’explique [note : c’est exact !]. Il est très difficile de t’expliquer ça car
c’est quelque chose de très particulier. Mais il faut l’imaginer comme un sentiment
constant de rougir. C’est très difficile de gérer ça, car tout change. Tout est gris, il n’y a
pas de contraste, pas de bien et pas de mal. Pas de bonheur ni de tristesse. Juste du gris. Et
des échappatoires. C’est le sujet de .Neon et c’est ainsi que je décrirais l’album [note :
rassurez-vous, écouter l’album est bien plus simple qu’essayer de comprendre un traître
mot de l’explication de Herbst !].
M : Pourquoi Alboîn (chant) et Angrrau (guitare) ont-ils quitté le groupe avant
l’enregistrement de ce disque ?
Herbst : Angrrau a quitté le groupe parce qu’il n’était plus intéressé par la musique et
parce qu’il a trouvé d’autres moyens d’expression. Alboîn est parti parce qu’on ne
parvenait pas à bien travailler ensemble, il pensait simplement différemment de moi.
M : Comment es-tu entré en contact avec Neige (Alcest, Amesoeurs), et comment
décrirais-tu votre collaboration ?
Herbst : En fait, j’ai rencontré Neige un peu par hasard. Lorsque le 10’’ d’Amesoeurs est
sorti [note : Herbst fait référence à l’EP Ruines Humaines, sorti en 2006 mais réédité en
vinyle 10’’ en 2007], nous étions en train d’achever notre premier album, si ma mémoire
ne me trahit pas. Bien sûr, nous avions besoin d’un artwork. J’ai acheté cet EP et j’aimais
son artwork, c’était précisément le genre de choses que je recherchais. Donc j’ai
simplement pris le lien imprimé à l’arrière, sans savoir avec qui j’entrerais en contact. Il
se fait que c’était Fursy [note : Fursy Teyssier, guitariste et bassiste d’Amesoeurs]. A ce
stade-là je ne savais même pas que Fursy jouait dans Amesoeurs et qu’il était proche de
Neige. Mais Fursy aimait notre album, a réalisé un artwork fantastique et l’a montré à
Neige. D’email en email, Neige et moi avons établi un contact. Cela c’est fait aussi
simplement que ça. Sur certains points, on se ressemble beaucoup, surtout en ce qui
concerne les émotions et les choses dont nous avons fait l’expérience. Honnêtement, je
n’ai jamais rencontré quelqu’un qui comprenne aussi bien ma musique que lui. Il est
parfait pour Lantlôs car il comprend ce qu’est Lantlôs, et il peut s’inscrire dans son thème
tout en restant créatif et sans m’ennuyer.
M :Tu as enregistré tous les instruments de l’album, ce qui est assez impressionnant
car le niveau est élevé ! Quand et comment as-tu appris à jouer de tous ces
instruments ?
Herbest : Merci beaucoup ! J’ai commencé par jouer de la basse vers 13 ans et lorsque j’ai
rencontré Angrrau, je me suis également mis à la guitare. C’était il y a 6-7 ans. Je suis
aussi passé par une petite période d’apprentissage de la guitare classique, afin d’étudier la
technique et les bases, mais ça m’a ennuyé. Quant à la batterie, j’ai appris à en jouer pour
la bonne et simple raison que nous ne parvenions pas à trouver un batteur. Je me suis alors
entraîné pour savoir jouer ce dont on avait besoin.
« Je me sens surréel ; pas dans un sens de supériorité, c’est
simplement que ma relation à la réalité est mauvaise. » (Herbst)
M : Et apprécies-tu cette situation où tu enregistres chaque instrument tout seul ?
Herbst : C’est tantôt une malédiction et tantôt une bénédiction. Par exemple, je déteste
jouer la batterie quand il s’agit de metal, ce n’est pas amusant du tout. Mais bien sûr,
jouer à ma façon m’apporte beaucoup de liberté et de possibilités différentes.
M : Je trouve qu’il est intéressant que ton chemin ait croisé celui de Neige, car ses
projets Alcest et Amesoeurs sont assez proches, dans l’esprit, de Lantlôs. Que
penses-tu de ces groupes ?
Herbst : Je ne pense pas qu’il y ait tant de ressemblances. Le sujet d’Alcest, ce sont les
souvenirs d’un endroit trop beau que pour être exprimé. Il s’agit d’innocence, de chance
et d’un propos globalement positif, alors que Lantlôs est destructeur, gris et triste. A mon
avis, il est logique qu’on nous place ensemble dans le même genre, mais si tu compares
l’expression générale et l’atmosphère, alors ces deux groupes sont presque opposés. Je ne
pense pas non plus que la musique se ressemble d’une formation à l’autre. Lantlôs est
bien plus brutal et puissant qu’Alcest. Ne me comprends pas mal, je respecte énormément
ce que Neige fait avec Alcest, mais je suis personnellement davantage attiré par de la
musique plus sombre et nihiliste. C’est pourquoi je préfère Amesoeurs, surtout le premier
EP et le split [note : Valfunde/Amesoeurs, sorti en 2007]. Excellent, vraiment excellent !
M : Lantlôs propose une interprétation très innovante du black metal, avec pas mal
d’éléments rock et un côté léger mais mélancolique. Penses-tu que cela pourrait
ouvrir une nouvelle voie pour le black metal ? Fais-tu partie d’une « nouvelle
école » ?
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Herbst : Je pense que la porte était déjà ouverte, elle a toujours été ouverte.
M : Es-tu d’accord de dire qu’il y a dans .Neon de solides influences rock ?
Herbst : Oui je suis assez d’accord, mais je ne qualifierais pas ça d’influences « rock ». Je
dirais plutôt qu’il s’agit d’un genre personnel de black metal. Il m’est honnêtement
difficile de dire quels sont les autres ingrédients. Il y a du jazz, de l’indie, un peu de post
rock, mais c’est clairement plus que du simple rock.
M : Quelle est la signification du titre de l’album ?
Herbest : Le titre fait référence à la même sensation de perception altérée de la réalité
dont je t’ai déjà parlé. Il est lié à une nuit où j’étais dans un délire total, très soûl etc. Je ne
savais pas qui j’étais, ce que j’étais et où j’étais. J’étais littéralement aveugle et
complètement désorienté. Il n’y avait que des couleurs et des lumières de néons. C’était
un moment important de ma vie, car étrangement, je me sentais chez moi. J’étais comme
désincarné, je n’étais entouré que de sentiments essentiels. Je me sentais très destructeur
et, peut-être grâce à cela, vraiment bien pendant un moment.
« Le sujet d’Alcest, ce sont les souvenirs d’un endroit trop beau que
pour être exprimé. Il s’agit d’innocence, de chance et d’un propos
globalement positif, alors que Lantlôs est destructeur, gris et triste. »
(Herbst)
M : Comment travailles-tu sur les morceaux ? Est-ce un long processus ?
Herbst : Je ne supporte pas l’ennui et ne rien faire. Donc je joue de la guitare presque tout
le temps, dès que j’ai un moment. Non, ce n’est pas un long travail. A peu près tous mes
morceaux sont le fruit d’improvisations, ils sont écrits instantanément.
M : Neige a-t-il eu un impact créatif ou as-tu dirigé même le chant ? Neige pourraitil avoir davantage de poids sur le prochain opus ?
Herbst : J’ai tout fait sauf le chant. Ca, c’est complètement son affaire et je ne lui dis pas
« fais ceci, fais cela ». C’est un excellent chanteur et c’est pour cette raison qu’on travaille
ensemble. Non, il n’aura pas plus d’influence sur le troisième album. Ca ne changera pas,
je pense, car après tout c’est toujours mon groupe.
M : Le titre « Neon » possède une puissance d’évocation impressionnante et pourrait
même figurer dans un film. C’est une expérience qui te tenterait ?
Herbst : Ca serait vraiment génial ! La musique et les images sont dix fois plus
évocatrices lorsqu’elles travaillent main dans la main.
M : Lantlôs restera-t-il un projet studio ou prévoyez-vous de tourner ?
Herbst : Nous sommes actuellement en train de former un line-up de concert, et je suis
très impatient de me produire sur scène. Mais pour l’instant, il n’y a pas encore de projets
concrets.
M : Dernière question traditionnelle chez Rock ‘n Balls : quel est ton top-3 des
albums de tous les temps ?
Herbst : Ouh la, vraiment trop difficile à dire. Mais je peux te citer mes favoris actuels.
1. The Cure – Disintegration. Excellent album. Un de mes classiques, je dirais.
2. Ved Buens Ende – Written In Waters. Je viens de découvrir ce groupe hier et j’ai
commandé l’album.
3. Circle Of Ouroborus – Shores. Tant de souvenirs sont liés à cet album. Il représente
beaucoup pour moi!
Quant aux raisons qui motivent mes choix…il n’y en a pas, c’est juste de la musique que
j’aime !
M : Merci beaucoup pour cet entretien, Herbst. A bientôt !
Herbst : Un grand merci pour ton intérêt et ton soutien !
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Disembodied
.Neon must be one of the biggest surprises this year in what we –
imperfectly – call the « extreme metal » genre. This amazing and
original record is the work of Lantlôs, which is actually Herbst oneman band, even though this time he surrounded himself with the
very talented Neige (Alcest, Amesoeurs). Disconnected, evasive,
sometimes difficult to follow but nevertheless open, the multiinstrumentalist tried to reveal some secrets about his strange and
mesmerizing project. This artist is definitely a reflection of his
music...
Conversation with Markus « Herbst » Siegenhort (guitar, bass, drums, composition)
Interview and editing by Mastema
Mastema (Rock ‘n Balls): Hello Herbst, thank you for this interview. “.Neon” clearly
is one of the best surprises I’ve had this year. Firstly, I’d like to ask you how you
would describe the album to someone who never had the chance to hear it.
Herbst: Hi! Thanks a lot for the kind words. .Neon is about the relation between reality
and the inner core. When I was 17 my perception completely shifted. Everything I percept
is kind of blurry and "filtered". It is as if you were watching a movie. You don't have
control about anything. It is as if you were not going the same ground as others. I feel
surreal. Not in a superior sense, but just that my relation to reality is wrong. The outlying
impacts descend into a blurry substance that doesn’t even exist. Everything that exists is
within yourself, because you only can experience via yourself. There is no consensus. I
guess you won't get an idea about what I am talking about. And it is very hard to explain
it to you, because it is something very special. But you can imagine it as a constant feeling
of having a flush. This is extremely complicated to cope with. Because everything
changes. Everything is grey, there are no contrasts, no good, no bad. No happiness, no
sorrow. Just grey. And escapes. That's what .Neon is about and how I tend to describe it.
M: Why did Alboîn and Angrrau leave the band before the recording of this album?
Herbst: Angrrau left the band because he lost interest in music and because he found
different ways to express himself. Alboîn left because both of us weren't working too
good together. He was just thinking in a different direction than I do.
M: How did you get in contact with Neige (Alcest, Amesoeurs), and how would you
describe your collaboration?
Herbst: I met Neige quite by chance to be honest. When the Amesoeurs 10” was coming
out, we were finishing our first album, if I remember correctly. And of course we were in
need for an artwork. So I got this EP and I really liked the artwork, because it was exactly
the kind of what I was looking for. So I just checked for the URL that was printed on the
back, without knowing who I was contacting. It turned out to be Fursy. I didn't even know
that Fursy was playing in Amesoeurs and about his close relationship to Neige. However,
he liked the album, did a fantastic artwork and showed it to Neige. Via several mails we
somehow found our way together. That's basically it. In some points we are very similar,
especially when it comes to emotions and things we have experienced in our lives. To be
honest, I've never met someone who actually understood my music as good he does. He's
perfect for Lantlôs, because he understands what Lantlôs is about and he can stay within
the theme and be creative at the same time without annoying me.
M: You have recorded all the instruments on this record and it’s very impressive
because the musicianship is far from being lazy! When and how did you learn to
play all these instruments?
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Herbst: Thanks a lot! I started off with playing the bass at the age of 13 and when I met
Angrrau I also started to play the guitar. This must be about 6-7 years ago. I had a short
period of taking classes of classical guitar playing to get the technique and the basis, but it
turned out to be rather boring. I learned to play the drums, because of the simple fact that
we were in search of a drummer and weren't able to find anyone, so I practiced a bit to
play everything I need.
“I feel surreal. Not in a superior sense, but just that my relation to
reality is wrong.” (Herbst)
M: And do you enjoy this situation of recording every instrument by yourself?
Herbst: Sometimes it's a curse and sometimes it's a blessing. I hate to play the drums
when it comes to metal drumming. It's no fun at all, to give you an example. But of course
it brings a lot of freedom and possibilities to play all the instruments on you very own.
M: It’s funny Neige has integrated Lantlôs, because I think his projects Alcest and
Amesoeurs are quite close, musically speaking, to Lantlôs. What do you think of
these bands?
Herbst: I don't think that there are a lot of similarities – Alcest is about memories of a
place that is too beautiful to be expressed. It is about innocence and luck and it’s overall
positive, whereas Lantlôs is destructive, grey and bleak. If you ask me, it's okay when
we're put together in one genre, but if you compare the overall expression and atmosphere
it's almost a contrast. And I also don't think that the music is so much alike. Lantlôs is by
far rougher and heavier compared to Alcest. Don't get me wrong, I deeply respect what
Neige is doing with Alcest, but I am more attracted to darker and more nihilistic music.
Therefore I prefer Amesoeurs, especially the first EP and the split. Great, great stuff!
M: Lantlôs displays an original and very innovative interpretation of black metal,
with many rock elements and a light yet melancholic side to it. Do you think this
could open a new door for black metal’s future development? Do you feel part of a
new branch of BM?
Herbst: I think the door is already open and it was open all the time.
M: Would you agree if I said .Neon definitely is black metal but also clearly with
rock roots?
Herbst: Yes, I can agree with that, but I don't think that there are rock influences. I'd
rather say it's quite a personal kind of black metal. I honestly can't really say what the
other ingredients are. There is some Jazz, some Indie, some Post Rock, but it's certainly
more than just plain rock.
M: What does the album title refer to?
Herbst: The title is related to the same feeling of a shifted perception of reality I already
told you about. It is linked to a night I was in a total delirium, very drunk and all that. And
wasn't aware of who I was, what I was and where I was. I was literally blind and totally
disorientated. There were just colours of neon lights. And I felt that this moment was
important in my life, because I somehow felt home. I was disembodied so to speak, just
surrounded by feelings of my core. And felt really destructive and maybe because of that
really good for a moment.
“Alcest is about memories of a place that is too beautiful to be
expressed. It is about innocence and luck and it’s overall positive,
whereas Lantlôs is destructive, grey and bleak.” (Herbst)
M: How do you work on the songs, is it a long process?
Herbst: I can't stand boredom and doing nothing. So basically I play the guitar all the
time, when I'm free. And no it's not a long progress. Basically all my songs are more or
less improvisations and written in a very moment.
M: Did Neige have any creative impact on the record, or did you direct him with the
vocals? Could Neige have more influence on the next album?
Herbst: I did everything except the vocals. That's totally his thing and I don't tell him "Do
this, do that". I mean this is why we work together, because he's a great vocalist. And no,
he won’t have any more influence on the third album. I guess it'll also quite stay this way,
because after all it's still my band.
M: “Neon” (the song) has an amazing evocative power and would even fit into a
movie. Would you like having one of your songs featured in a movie someday?
Herbst: That would be great, really! Music and pictures are ten times more evocative
when they work together!
M: Will Lantlôs be touring or are you guys essentially a studio band?
Herbst: Yeah, we are working on getting a live line-up together and I'm totally looking
forward to play live. But there aren't any real plans yet, though.
M: Last and traditional Rock ‘n Balls question: what is your all-time albums top-3?
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Herbts: Phew, by far too hard to tell. But I can tell you about my current favourites.
1. The Cure – Disintegration. Great album. One of my classics I'd say.
2. Ved Buens Ende – Written In Waters. Just discovered this band yesterday and
ordered the CD.
3. Circle Of Ouroborus – Shores. I have so many memories with this album. It means
a lot to me!
There's no proper reason why. It's just music that I Love!
M: Thank you very much for this interview Herbst. Take care!
Herbst: Thank you so much for your interest and support!