5© Cent. oe Louis-Otaries ROYER

Transcription

5© Cent. oe Louis-Otaries ROYER
m° ai
PRIX EXCEPTIONNEL :
5© Cent.
12 Juin 1932.
Lire, pages 8 et 9, le début du sensationnel reportage
oe Louis-Otaries ROYER
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Remboursés, en grande partie, par de superbes primes.
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FRANCE... ... s Un an (un* prime) . 37 fr.
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HISTOIRES DE CARAMBOUILLAGE
Les histoires de caramboui liage se
suivent et se ressemblent. Cependant il
y en a de plus compliquées les unes que
les autres. On sait en quoi consiste ce
genre d'escroquerie : Dupont achète à
crédit à Durand une marchandise qu'il
revend comptant à Dubois. Tout le bénéfice de la combinaison est pour Dupont,
qui ne paiera jamais à Durand. On voit
que la comédie se joue à trois personnages,
qui figurent les trois boules de ce carambolage commercial. Le mot s'est changé
— on ne sait pourquoi — en. carambouillage, au lieu de carambolage.
Il y a de petits et de grands carambouillages : on en a vu porter sur plusieurs
millions. Parmi ces derniers, citons le
plus récent :
Charles Rubin, vingt-sept ans, confectionneur, demeurait 59, rue Lamarck, et
avait ses ateliers 20, rue Hérold, et 5, rue
Coq-Héron. Il commanda à plusieurs
reprises des tissus, des draps et des soieries à diverses maisons de Lyon ou du
Sentier.
Rubin, qui était établi sous la raison
sociale « Charbin et C'e », revendit ces
marchandises au comptant.
Mais, lui, ne réglait pas ses vendeurs
ou leur envoyait des chèques sans provision.
Le montant de ses «carambouillages »
est évalué à plus de 1 200 000 francs.
Le 24 novembre dernier, l'escroc fut
déclaré en faillite et disparut. Il se réinstallait cependant peu après 1, rue de la
Réale, sous le nom de Sofraco.
C'est là qu'il fut arrêté, à la suite de
plusieurs plaintes déposées au
commisariat des Halles.
Chaque jour amène devant les tribunaux des affaires de cette sorte. En voici
une qui nous a été racontée par la victime et qui présente un certain caractère.
En l'espèce, le carambouilleur a pris pour
complice, mais à son insu, son propre
frère. Cet escroc achetait des marchandises à crédit et les faisait déposer chez
son frère, honorable commerçant : il
réglait la première livraison pour inspirer tout à fait confiance ; puis il passait
la forte commande payable à crédit. Les
fournisseurs, qui avaient recueilli d'excellents renseignements sur le frère, n'hésitaient pas à livrer. L'escroc retirait les
marchandises entreposées chez son frère
et les réalisait à son profit. On devine ce
qui s'est passé : les fournisseurs se retournent Vers le frère et lui réclament le montant des livraisons. Le malheureux, tout
a fait étranger aux louches tractations de
son frère, proteste et argue de sa bonne
foi : c'est sans qu'il le sache que les marchandises ont été apportées chez lui,
réceptionnées par son frère et revendues.
' Dans cette affaire, comme on peut le
constater, il y a quatre personnages au
lieu de trois. Le parent de l'escroc se voit
impliqué malgré lui dans l'affaire, et ce
qui complique son cas, c'est que, bien
qu'innocent, il est considéré par les fournisseurs comme le grand coupable, puisque c'est chez lui que les marchandises
ont été livrées. Quant au carambouilleur, il s'éclipse prudemment en emportant la forte somme fruit de son méfait
et laisse son frère se débrouiller tout seul.
C'est ce qui s'appelle avoir l'esprit de
famille I L'escroc a évidemment accumulé les faux, imité des signatures, etc.
A tel point que les tribunaux ne savent
qui croire.
Finalement, cet individu s'est vu déclaré en faillite, ce qui n'est pas pour
éclaircir la situation.
Comme tout carambouilleur, ce dernier s'est montré éclectique : ses commandes ont porté sur les marchandises
les plus variées : tissus, boîtes de conserves, phonos, chaussures, etc. L'article
importe peu pourvu qu'il soit rapidement
solvable et permette de réaliser d'illicites bénéfices.
On nous a raconté un autre carambouillage qui ne manque pas de saveur.
En la circonstance, la pièce se joue entre
deux personnages : Dupont achète à
crédit à Durand pour 100 000 francs de
marchandises, des coupons de soie. Il
maquille ces derniers, et, avec une audace incroyable, se présente chez Durand
et lui dit :
— Je vous ai acheté de la soie et j'entends, comme convenu, vous solder aux
échéances fixées. Mieux, sur les 100 000
francs que je vous dois, je puis vous
en verser immédiatement sous forme de
2
marchandises, car je viens de conclure
un marché intéressant.
Et le carambouilleur offre à sa victime
sa propre marchandise habilement camouflée. L'autre n'y voit que du feu, comme
on dit. Il croit avoir réalisé une double
bonne affaire : la vente à Dupont de
100 000 francs de marchandises et l'achat
d'un lot de tissus au prix de 50 000 francs,
bien inférieur au taux courant. Tout le
monde est content durant quelques
semaines ; mais le dupé a vent de la dure
réalité lorsque les premières traites signées Dupont reviennent impayées et
que le carambouilleur demeure introuvable.
Ce i truc » a été pratiqué avec succès
dans l'industrie de l'automobile, où de
hardis carambouilleurs s'étaient organisés pour un trafic fructueux. La bande
noire achetait des autos, échangeait les
carrosseries, intervertissait les marques
avec une si grande dextérité que les plus
malins revendeurs s'y laissaient prendre
et achetaient souvent leur propre marchandise.
En aucune manière, la jurisprudence
n'est plus flottante que dans les procès
relatifs aux ventes à crédit ou aux loca-
tions-ventes. Ce sont, en effet, les opérations qui se prêtent le mieux au a carambouillage ».
Un avocat qui s'est intéressé aux affaires
de earambouillage, Me Louis
Schrnoll, avocat à la Cour, nous disait
sur ce sujet qui intéresse des milliers do
commerçants :
—• Généralement, les carambouilleurs
acceptent des traites en paiement de leur
achat. Lorsqu'ils sont poursuivis, ils
déclarent qu'ils étaient propriétaires de
la marchandise, les traites constituant un
paiement et que, par suite, ils avaient
le droit d'en disposer comme de choses
leur appartenant.
Ils ajoutent qu'aux termes de l'article 1583 du Code civil : «e La vente est
parfaite entre les parties, et la propriété
est acquise de droit à l'acheteur à l'égard
du vendeur, dès qu'on est convenu de la
chose et du prix, quoique la chose n'ait
pas encore été livrée ni le prix payé. »
Il est donc assez difficile d'établir juridiquement un délit réprimé par le Code
pénal, lorsqu'on se trouve en face de
carambouillages bien organisés. Le Parquet s'efforce de rechercher si la remise de
la marchandise n'a pas été obtenue au
Un jeune homme courageux
Rassurez-vous ! Bien que nous soyons
à la prison de Sing-Sing, et que ce soit
la chaise électrique dans laquelle ce
jeune homme est bel et bien assis, il ne
mourra pas !
Cependant le courant passe ! Cet hérissement subit des cheveux en fait foi. Seulement encore que 200 000 volts se précipitent au travers du corps de cet étudiant
en médecine assez courageux pour avoir
pris place dans le « fauteuil suprême »,
cela ne lui fera rien du tout. Parce que,
en matière d'électrocution, ce n**est pas le
voltage qui tue, mais l'ampérage. Et ici
le courant est heureusement privé d'ampérage. Quand il s'agit sérieusement de faire
passer de vie à trépas quelque gangster,
le
courant
ne dépasse
pas
1 850
volts. Seulement l'ampérage y est. En
deux minutes, le supplicié n'est plus
qu'un bloc inerte et atrocement brûlé.
Pourquoi le jeune étudiant en question
a-t-il voulu goûter ce plaisir étrange ?
Expérience médicale ? Sans doute. Mais
imaginez-vous convié à passer la tête
dans la lunette ^ie la guillotine ? Je gage
que vous n'en éprouveriez aucun bonheur
particulier. Comme, ici, cela revient exactement au même, il est permis de se demander
pourquoi ce courageux hurluberlu a cru
devoir revêtir la traditionnelle tenue des
forçats yankees, arborer un numéro de
condamné et s'installer enfin dans le siège
définitif, où, comme Jupiter, la foudre
est dans vos mains ? Mais quel cliché
unique, par contre, pour messieurs les
photographes. Et quelle interview pour
les reporters 1 Croyez-moi : au fond, tout
cela se traduit par un seul mot : publicité.
(W. W.)
moyen de manœuvres frauduleuses, en
quel cas il poursuit pour escroqueries :
mais les carambouilleurs sont souvent
assez adroits pour éviter cet écueil.
Quant à l'abus de confiance, on ne peut
le relever en cette matière qu'à la condition que la marchandise ait été confiée
en vertu d'un des contrats prévus par
l'article 408 du Code pénal, c'est-à-dire
à titre de louage, de dépôt, de mandat,
de nantissement ou de prêt à usage. C'est
pour cette raison que les vendeurs, au lieu
de conclure simplement une vente à crédit, agissent sagement lorsqu'ils la font
précéder d'une location, en confiant l'objet à leur futur acheteur à titre de louage,
jusqu'à ce que le paiement des mensualités de location ait atteint l'équivalent du
prix de vente, vente ne devenant parfaite qu'à ce moment-là. C'est en vertu
d'un contrat de ce genre qu'à été prononcé
récemment un jugement du Tribunal de
commerce de la Seine, dont il convient
de citer le passage suivant :
« Attendu que A... soutient que, suivant conventions intervenues entre lui
et B..., la voiture a été donnée en location
par lui à B...
« B... s'engageant à la restituer immédiatement à A... en cas de non paiement
d'une seule mensualité à son échéance ;
« Attendu qu'il échet d'observer, ainsi
que le fait plaider A...,que deux contrats
sont intervenus entre les parties aux termes desquels B... louait une voiture désignée aux dits contrats, moyennant le
paiement de la somme de 1916 francs
par mois par traites accèptées ; qu'il était
stipulé qu'en cas de non-paiement d'une
seule mensualité, il reprendrait immédiatement possession de la voiture et que le
contrat serait résilié de plein droit ; que
s'il peut être exact qu'une promesse de
vente qui sera enregistrée avec le présent
jugement soit intervenue entre les parties, cette promesse de vente était tout à
fait distincte de l'acte de location, que
pendant toute la durée de la location,
moyennant paiement de la somme fixée,
B... pouvait s'en rendre acquéreur, mais
qu'il n'était toutefois pas propriétaire de
la voiture tant qu'il ne l'avait pas intégralement payée :
«Que, la propriété de la voiture ne devant
être transférée à B... que lorsqu'il aurai!
effectué le paiement intégral, il échet de
remarquer que, jusqu'à l'avènement de
cette condition, B... demeurait tenu des
obligations dérivées du contrat de louage,
etc. »
De son côté, la Cour d'appel de Paris
a rendu un arrêt dans une affaire non
moins intéressante. Il s'agissait d'un contrat aux termes duquel une société d'automobiles avait vendu une voiture pour le
prix de 63 000 francs, payable 19 752
francs comptant et le reliquat par six
' traites mensuelles de 7 208 francs. Il était
stipulé que la vente était conclue sous
condition suspensive, le véhicule restant
la propriété du vendeur jusques et y
compris le paiement de la dernière traite,
l'acheteur s'interdisant formellement de
sortir la voiture de France, de la vendre,
de la céder, d'en disposer ou de la remettre
en gage avant le complet paiement du
prix.
Malgré ces engagements, l'acheteur avait
revendu la voiture un mois après.
La Cour a décidé qu'il résultait des
termes du contrat que cet acheteur ne
détenait la voiture qu'à titre de locataire
jusqu'à parfait paiement du prix, et que
la translation de propriété ne devait
s'opérer qu'après le règlement de la dernière traite, le vendeur demeurant jusquelà seul et unique propriétaire du véhicule.
Elle a estime qu'ainsi l'acheteur avait
commis un abus de confiance et elle l'a
condamné.
Les tribunaux, ainsi que nous venons
de le voir par les deux décisions qui précèdent, ont une tendance de plus en plus
marquée à juger conformément aux règles
de l'équité, c'est-à-dire à condamner les
carambouilleurs pour escroquerie ou pour
abus de confiance, malgré toutes les objections juridiques. En fait, ils ont raison.
En droit, font-ils ainsi une application
exacte de nos lois ? C'est ce qu'aura à
décider la Cour de cassation.
Comme on le voit, les affaires de earambouillage sont, parmi les escroqueries
caractérisées, les plus difficiles à établir
et les filous, qui le savent, en profitent.
' PIERRE
DEMOURS.
LES "SNATCHERS"
Valeurs* d'Hommes, de femmes et d'enfants avtx U. S. A.
■
mmmmmmm
La célèbre star de cinéma Ann Harding et sa fille Jane Bannister, âgée de trois ans. L'enfant
fut pendant vingt-quatre heures surveillée par les policiers, car ces derniers suspectaient un
complot des « kidnapers ». (I. N.)
Cet article constitue un document inédit, sensationnel et
rigoureusement exact mur le
fonctionnement «tes organisation» de « Snatchers », aux
17. s. A. Nos collaborateurs gai
rentrent d'Amérique ont été
renseignés directement jpar
les services de la police américaine spécialement chargés
de traquer les « Snatchers ».
L'enlèvement suivi d'assassinat du fils
de Lindbergh a rendu familier au public le
terme de « Kidnapers », qui veut dire en
effet : «Voleurs d'enfants «.Mais ce n'est pas
par le terme de « Kidnapers » que les auteurs
de rapts divers se qualifient. Ils s'intitulent « snatchers », mot d'argot américain qui correspond plutôt au mot français :
« enipeur ».
*
Les « snatchers » sont aussi solidement
organisés que les « bootîeggers », ou contrebandiers d alcool, et ils sont d'une classe
beaucoup plus dangereuse, parce que
leurs risques sont plus grands. Il faut tout
de même, dire, en faveur de cette police
terriblement gangrenée qu'est la police
américaine à tous les échelons, que si elle
ne donne que bien mollement la chasse au
« bootîeggers », les « snatchers », eux, sont
l'objet d une répression rigoureuse. En
effet, quand le petit marteau d'ivoire du
juge tombe sur sa table, les « snatchers »
se voient adjuger des « doses », comme ils
disent, particulièrement salées. Quand la
police réussit, avant leur capture, à délivrer
leurs victimes vivantes, le tarif varie de
vingt à trente-cinq, oui, nous disons bien
trente-cinq ans de pénitencier. Mais si le
« chipé », le « snatched », est mort, alors une
seule solution s'applique à ses bourreaux,
The morning vvalk, ou promenade matinale, qui se termine par quelques instants
de repos sur The hot chair, autrement
dit la chaise brûlante...
Quand nous affirmons que les « snatchers»
sont aussi solidement organisés que les
« bootîeggers », nous n'exagérons rien.
Ces « gangs » vraiment spéciaux font
entièrement bande à part. On trouve parfois des « safe-breakers », ou briseurs de
coffres-forts, qui s'essaient au « bootlegging », et des « bootîeggers » qui^ à leurs
moments perdus, consentent à donner le
coup de main pour assaillir une banque,
mais les « snatchers », eux, gardent l'esprit
corporatif et n'utilisent leurs puissants
moyens que pour enlever des hommes, des
femmes, ou, hélas, des enfants. On les
ff
appelle les « snatch artistes », c'est tout
dire. Voici comment une bande de « snatchers » fonctionne aux U. S. A.
Big Bill Harman —• ce nom lui ira aussi
bien qu'un autre — est dans « les affaires ».
Il a cinquante ans, un peu de ventre, une
belle résidence dans les environs de la
Cinquième avenue, une grosse voiture et
une jolie femme. Ses domestiques sont bien
stylés, sa table est plantureuse, sa cave
fine, — car on ne boit pas que de l'eau de
Cologne ou de l'alcool à brûler au pays de la
prohibition —, enfin ses cigares craquent
bien et font de la fumée qui sent bon.
Toutes ses richesses lui valent pas mal
d'amitiés, les unes vraies, les autres fausses, comme vont toutes les amitiés en ce
bas monde.
Maintenant, n'allez pas croire que Big
Bill Harman soit un « gangster ». Non, Big
Bill Harman est dans les affaires, comme
nous l'avons dit. Il achète indifféremment
du bois, du fer, de l'aluminium, de la
conserve, du coton, du blé ou de la soie. Il
connaît beaucoup de monde, et les amitiés
que sa très large hospitalité lui vaut lui
permettent de se tenir au courant de l'état
de fortune de l'un et de l'autre. Et, de temps
à autre, Big Bill Harman met ses connaissances à profit, à très gros profit même,
car, vous l'avez deviné, Big Bill n'est autre
chose qu'un chef de « snatchers » qui a
droit, dans leur argot particulier, au titre
de The Brain, c'est-à-dire le cerveau.
Donc l'homme repère une de ses connaissances, connaissance dont l'état de prospérité est, pour le moment tout au moins,
particulièrement solide. Et il décide de lui
« mettre le snatch ».
Ça y est T Le bouton est pressé, le déclic
a joué, et l'organisation puissante est mise
en marche, par la première décision du
a cerveau ».
Maintenant, c'est au tour de la deuxième
décision : la future victime a une femme,
un ou plusieurs enfants. Lequel de ces
êtres est destiné à être enlevé ?
, Big Bill Harman réfléchit, tout en mâchonnant un gros cigare.
Il écarte, presque toujours — les statistiques sont là — l'idée de l'enlèvement de
la femme. C'est à croire que les « snatchers » ont une piètre idée de l'amour
que leurs concitoyens éprouvent pour leurs
épouses. Mais qu'on ne s'y fie pas. Ils
savent que lorsqu'ils enlèvent une femme
le mari perd tout contrôle de lui-même,
s'affole, court à droite et à gauche, mobilise la police, mais n'obtient pas toujours
la somme suffisante pour la rançon. Ils
savent au contraire que la femme dont le
mari a été « chipé », après le premier
moment d'affolement passé, retrouvera son
calme, dédaignera de mobiliser une armée
de tuniques bleues, et, son sens pratique
aidant, remuera efficacement ciel et terre,
pour avoir les dollars nécessaires à la restitution de son mari.
Il écarte aussi, chaque fois que cela lui
est possible, l'enlèvement de l'enfant, non
pas par un sentiment quelconque d'humanité qui ne saurait exister chez ce gibier
de fauteuil électrique, mais bien parce qu'il
sait qu'/Z ne pourra pas agir, pendant sa
détention, sur l'enfant qui ne comprendra
rien à ce qui lui est arrivé.
Néanmoins, les rapts d'enfants ne sont
pas rares aux U. S. A., c'est tout à fait
exact, mais on peut être sûr que chaque
fois qu'un enfant est enlevé, c'est parce
que l'enlèvement du père présentait trop
d'inconvénients. Ceci est un fait archiprouvé, indiscutable.
Big Bill Harman choisit donc le père de
famille, et, automatiquement, le « snatching » s'opère.
Nous répétons que Big Bill Harman n'est
pas un « gangster ». Personne, aucun
témoin à charge — témoin d'État, comme
ils disent là-bas — ne pourrait jurer qu'il
l'a vu dans un quelconque « speakeasy »,
buvette soi-disant clandestine de Bowery
ou du Bronx. Seulement, parfois, il reçoit
un drôle de visiteur. Il ne le reçoit, d'ailleurs, qu'à son bureau. Ce visiteur est son
second. Il est du « milieu », lui, tout à fait
du milieu. Mais il est impeccablement
habillé, et ses mots sont choisis comme s'il
les ramassait dans un tamis. Cet homme,
ce « second », est le doigt, The Finger.
C'est à lui que le « cerveau » donnera les
indications sur la victime choisie. Ces indications seront complétées par le « doigt »
lui-même, qui se renseignera sur les allées
et venues de l'homme promis au « snatch »,
sur ses heures d'entrée et de sortie de sa
résidence, sur la vitesse de sa voiture, etc.
Ces renseignements réunis, l'heure du
« snatch » choisie, le « doigt » va mériter
son appellation. En effet, c'est lui qui montrera au restant de l'équipe, les musclemen, ou hommes musclés, la victime
choisie.
Et l'homme est enlevé.
Voici, généralement, comment ça se
passe.
. Au volant de sa voiture, l'homme, qui,
naturellement, ne se doute de rien, entend
derrière lui un coup de klaxon. Il appuie
sur le bon côté. Aussitôt l'autre voiture,
profitant de ce léger changement de direction, le. coince sur le bord du trottoir. On
stoppe en chœur, et le malheureux, médusé,
se rend compte de sa situation en voyant
rançon de 1 000 doltars. (W. "W.)
3
quatre ou cinq « gorilles » (autre surnom
des hommes aux muscles forts) qui le
regardent, la main dans la poche de leur
veston, le doigt chatouillant délicatement
la gâchette de leur « colt ».
Une minute plus tard, le « chipé » a
changé de voiture. Allongé dans le fond
de l'auto des « snatchers », un sac sur la
tête, il se laisse emporter, et c'est tout ce
qu'il peut vraiment faire.
Derrière, à quelques dizaines de mètres,
suit sa propre voiture. Seulement, c'est un
« gorille » qui tient le volant !
La première manche du « snatch » est
donc |buée, et, à part de très rares exceptions — car il est arrivé à des équipes
de rater par-ci par-là un enlèvement et de
filer avec deux ou trois « gorilles » souffrant
d'une indigestion de plomb, là manche a
été gagnée par les « snatchers ».
La voiture a roulé longtemps, très longtemps, le « chipé » a perdu toute orientation, et quand enfin on lui enlève le sac
qui lui recouvre la tète, il se trouve en
pleine campagne, dans la chambre d'amis
d'une maison parfaitement bien isolée.
Cette chambre au mobilier plus que
sommaire est aérée par l'ouverture de la
porte, car la fenêtre est solidement barricadée. L'homme, courbaturé par le
hideux voyage, s'assied sur le lit et attend.
Il n'attend pas longtemps.
Les « snatchers », qui n'aiment pas perdre
de temps, vont incontinent l'initier aux
nouveautés du «business », et si l'on songe
que dans l'argot spécial du « snatch »
business veut dire fortune, on aura une idée
de ce qui peut attendre l'infortuné.
Ils ne torturent pas leur victime par
plaisir ou par sadisme, non. Ils la torturent par méthode, parce qu'ils savent qu'après quatre ou cinq jours d'enfer, rien ne
comptera plus pour le prisonnier, hormis
une seule idée fixe : cesser de souffrir.
Et la séance commence.
L'homme est là, sur le lit. Il pense que
tout à l'heure les « torpilleurs » (troisième
surnom pour les hommes aux muscles de
fer) vont lui demander d'écrire chez lui
pour faire verser une somme quelconque,
et déjà il songe à débattre le prix, quand
soudain un des hommes lui dit :
— Alors, on vous a mis le « snatch ■» ?
— Ça m'en a tout l'air, répond-il, en
homme qui comprend que ce n'est pas le
moment de discuter.
— Et il ne faut pas le prendre à la rigolade, parce que nous n'aimons pas qu'on se
paie notre tête !
— Mais...
Il n'achève pas, le malheureux. Le « torpilleur » lui a coupé la parole avec son poing
lancé en pleine figure.
Dompté, il tire piteusement son mouchoir
et en essuie ses lèvres saignantes.
— Et ce n'est qu'un petit commencement, fait l'assaillant en ricanant.
De fait, il a raison, ce n'est qu'un petit,
commencement. Pendant les jours qui
suivront, il encaissera, outre les coups de
poing, des giflés lancées à pleine volée, des
piqûres d'épingles, des écrasements d'orteils, il aura les yeux pochés, le nez saignant,
des dents cassées, on triplera le sel de sa
nourriture et on.le laissera souffrir de la
soif. Nuit et jour, la lumière restera allumée,
et les «gorilles », se relayant de deux heures
en deux heures, feront assez de bruit à ses
côtés pour l'empêcher de trouver un court
oubli dans le sommeil. On lui fera avaler
des décoctions qui le jetteront sur le plancher, le ventre douloureux, on s'amusera
à lui brûler l'épidémie avec la cendre des
cigarettes, on l'obligera à rester à genoux
sur le plancher pendant de longues heures,
ou on le ficèlera comme un saucisson et on
le jettera sur le lit...
Pendant ces longues journées, le malheureux ne vivra qu'avec la hantise du prochain tourment.
Enfin, on le jugera « mûr », et, un beau
matin, un des « gorilles » lui dira, tout en
posant négligemment sur sa main déjà
maintes fois meurtrie sa cigarette allumée :
—• Combien pouvez-vous réunir d'argent ?
Le chipé répondra aussitôt et annoncera
de suite une somme maximum, qui, malgré
cela, pourra ne pas plaire aux gredins, qui
en exigeront peut-être davantage.
Ils jouent, comme on dit, sur le velours.
Ils savent que leur victime ira jusqu'à
l'extrême limite de ses possibilités. Cet
homme, qu'ils tiennent à leur merci, avec
son corps sale et courbaturé — car on lui a
également supprimé t oute hygiène —, avec
sa pauvre face mal rasée, toute meurtrie
On accuse, on plaide, an juge...
de coups, avec ses mains brûlées, cet
homme-là ne peut avoir une seule minute
l'idée de « défendre son argent ». Il ne peut
MLa femme a ta valise «fe
demander qu'une seule chose : la libertécette liberté qui va représenter pour lui un
stupéfiants e-n <rorrecttanbain, des soins pour ses meurtrissures, un
nelte.
vrai lit...
Etrange couple, en vérité, que celui
Quand il déclare la somme maximum
formé par Henriette Pierre et Philibert
qu'il pense qu'on pourra réunir pour lui,
les « gorilles » savent qu* cette somme -Appruzèze : elle, ex-jolie femme que la
quarantaine a depuis longtemps effleurée
représente pour l'enlevé la limite de ses
sans trop l'abîmer, lui, un beau Romain,
possibilités.
aux yeux de feu, aux cheveux semblables
— Bon, lui disent-ils. Ecrivez à votre
à du vieux palissandre bien ciré, avait quitté
femme.
les bords du Tibre pour ceux de la Seine,
Écrire à sa femme 1 Mais il ne demande
espérant trouver dans ce Paris hospitalier
que ça, le malheureux! Vite, qu'on lui
une proie facile.,. Il avait alors rencontré
donne un stylo et du papier. Il va écrire,
Henriette Pierre, avec laquelle il vécut
Il va demander à sa femme de réunir tout
quelque temps, puis, à la suite d'une conce qu'elle pourra... il va au besoin lui
damnation, U dut quitter la France et sa
demander de tout vendre pour le sauver... il
sait bien qu'elle fera l'impossible...
tendre amie.
Alors les tortures cessent. Les négociations commencent.
Si la femme est prudente, et qu'elle ne
montre sa lettre ni à la police ni à la presse
— un seul article obligeant la police à
marcher —-, si, d'autre part,' elle réussit à
réunir la somme" nécessaire et à la remettre
à l'endroit convenu, en un mot si tout
marche bien au gré des bandits, alors elle
aura une chance de revoir son mari vivant.
Un rendez-vous sera fixé. Elle verra arriver
une voiture, qui s'arrêtera près d'elle une
bref instant, le temps, pour les occupants,
de jeter à terre un colis ficelé et portant
un sac sur la tête. Puis la voiture démarrera aussitôt, et la pauvre femme se penchera vers le compagnon auquel elle aura
tout sacrifié...
Maintenant, si l'affaire a mal marché, si
la police a été par trop indiscrète, ou simplement si la femme de l'enlevé n'a pu,
malgré tous ses efforts, arriver à trouver la
somme suffisante, alors c'est infiniment
triste :
— Habillez-vous. On va vous emmener
faire une promenade en voiture. Les négociations pour vous n'ont pas rendu. Pas de
chance. On va prendre un peu l'air.
L'homme se raidit. Il a compris. Il
s'habille et sort avec ses bourreaux. Cette
fois, plus de sac, plus de cordes. Il peut
reconnaît re le paysage, ça n'a aucune imporLe maire de New- York, James J. Walker, est
tance. Dans cinq minutes, il ne sera plus
accusé d'avoir reçu de l'argent de certaines
qu'un cadavre.
compagnies en échange de privilèges qu'il leur
Peut-on s'imaginer ce que ces cinq — ou
aurait accordés. (W. W.)
dix, ou quinze — minutes peuvent représenter pour le condamné à cette exécution
Il n'abandonna cette dernière qu'après
roulante qui se pratique là-bas on peut
lui avoir dérobé ses économies, qui étaient
dire tous les fours ?
lourdes et abondantes ; en guise de monnaie
Assis sur un strapontin, face aux deux
d'échange, il laissa chez Henriette Pierre
ou trois « gorilles » qui vont le mettre à
un colis compromettant auquel il était
mort, l'homme attend...
vraiment difficile de faire passer la fronLe paysage défile... le "ciel est bleu, comme
tière : une large et longue valise emplie à
on dit, les oiseaux chantent...
craquer de plusieurs kilos de cocaïne, d'héLes minutés paraissent des siècles.
roïne et de morphine ; de quoi ouvrir à des
Posément, sans hâte, les « gorilles »
centaines d'amateurs de paradis artifitirent leurs pistolets. La voiture ralentit
ciels la porte dorée du rêve et de l'oubli.
légèrement. L'un des hommes fait un
Une petite balance destinée à peser les
signe.
livraisons à faire aux clients se trouvait
Les larges museaux des onze millimètres
aussi dans la valise, de même qu'un paquet
crachent un bref jet de flamme, puis
d'acide borique destiné à être mélangé
encore un, puis encore un autre. Le peu de
aux drogues.
fumée est emporté par le vent. L'assasM me pierre, dépouillée de ses francssiné a glissé à terre... Son pauvre corps
papier, songea alors à vendre tout ce qui
tressaute encore...
se trouvait dans la valise, véritable boîte
Une dernière détonation éclate. C'est
de Pandore, dispensatrice de joie et d'amerle coup de grâce.
tume... Et c'est, ainsi que l'amie abanToutes les balles ont porté à la tête.
donnée de Philibert Appruzèze s'installa
La figure n'est plus qu'un trou rouge,
marchande de stupéfiants ; elle tint ses
méconnaissable.
assises dans un café de Montmartre, où
La voiture traverse un pont. A nouveau
elle reçut bientôt toute une clientèle aussi
elle ralentit. Le corps, basculé, tombe dans
variée que bizarre : danseurs mondains,
l'eau lourdement.
modèles qui veulent oublier leurs chagrins
Quelques instant plus tard, la voiture est
d'amour, banquiers exotiques, femmes du
lavée, et les « gorilles », assis à l'ombre,
trempent leurs mufles de brutes dans des
verres remplis de whisky de contrebande.
L'affaire a été manquèe. Ça ne fait rien.
Tant qu'un dick (détective) ne leur a pas
mis la cold euff ou bracelet froid des
menottes à crémaillère, ils ne s'en font pas.
Le. « cerveau » paiera les frais de l'expédition ratée. Ils ne le connaissent pas, eux,
le « cerveau », ils ne connaissent que le
« doigt », mais ils savent que c'est lui qui
paie les frais, comme ils savent que c'est
lui qui touche la part du lion.
CONAN DOYLE
Car il la touche, cette part du lion,
M. Big Bill Harman, gros bonnet de Wall
Aventures de Sherlock Holmes.
Street auquel les agents de service dans les
Nouvelles
Aventures de Sherlock Holmes.
environs de son bureau touchent leur
Souvenirs de Sherlock Holmes.
casquette quand il passe devant eux...
Ce qui tend à expliquer, peut-être,
Nouveaux exploits de Sherlock Holmes.
la raison pour laquelle il est si difficile
Résurrection de Sherlock Holmes.
de capturer les yoleurs d'hommes, de
femmes et d'enfants au pays de la soif
Sherlock Holmes triomphe.
mal apaisée.
Est-ce &amia? Est-ce
Lucienne Bayer ?
Mœe R..., paisible rentière parisienne,
aime le phonographe —« ce qui est son droit
— et, l'hiver dernier, elle en acheta un, à
crédit, payable par mensualités.
D'abord, tout alla bien... Mme R..., éprise
de musique langoureuse comme de mélodies faciles et aussi de chansonnettes gaies,
écouta tour à tour Carmen, Thaïs, Quand
l'amour meurt, etc., elle écouta aussi des
tangos entraînants et parfois un jazz aux
stridences irritantes.
Et puis, au bout de cinq mois — la propriétaire du phonographe avait déjà
payé cinq traites de cinquante francs chacune —-, ledit phonographe se mit à divaguer, s'il est possible de dire... La voix féminine devenait rauque, la voix masculine devenait aiguë et les disques indiquaient des titres que la machine parlante
et chantante répétait de façon incompréhensible.
MMER..., désolée, refusa de payer le solde
dû au vendeur, lequel l'assigna" en justice
de paix.
—• Voyons, madame, dit le juge de paix,
vous avez acheté un phonographe, vous
devez donc le payer !
— Que non pas ! répliqua la dame, pourquoi paierais-je un appareil qui fonctionne
mal !
Et, à titre d'exemple, elle indiqua :
—- Quand j'espère entendre une chanson de Damia, c'est la voix de Lucienne
Boyer qui semble sortir de l'appareil...
Quand j'ai mis un disque au nom de Lucienne Boyer, je crois que c'est Damia... Je
ne sais si j'entends Alibert ou Perchichot,
et je confonds, tant les voix sont confuses,
Chaliapine et Dranem I
Le juge de paix estima que la dame mélomane ne pouvait, en effet, payer un phonographe qui se permet de tels écarts de...
voix et il chargea un expert de constater si
Damia, Alibert et Chaliapine forment,
dans l'appareil incriminé, un discordant
chaos.
Rôle aies assises de ta Seine.
Vendredi 10 juin. —'Arnold Baud'huin :
abus de confiance par commis. Défenseur :
e
M Raymond Hubert.
Samedi 11 juin.— Dyarine Kebrime : tentative de meurtre. Défenseur : Me Joseph
Python.
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monde et du demi, gentilshommes authentiques, princesses plus ou moins russes, etc.
A tous et à toutes, Henriette Pierre
dispensait la manne consolatrice qu'elle
vendait soixante francs... le gramme :
cela remet évidemment la consolation
à très cher ( Quoi qu'il en soit, la vendeuse
ne subit pas la crise, l'inexorable crise qui
sévit sur les divers commerces, sauf, sans
doute, sur les trafiquants de stupéfiants.
Mais le guet veillait sous la forme d'agents
de la sûreté qui, étonnés de voir chaque
jour cette femme et cette valise, suivirent
l'une portant Vautre et découvrirent le pot
aux roses,
La Xe chambre correctionnelle, chargée
de juger Henriette Pierre, lui fut tout de
même indulgente, peut-être par égard à
ses économies envolées en même temps que
son amour; et ne la condamna, après une
excellente plaidoirie de M* Thaon, qu'à
treize mois de prison...
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Saint-Lazare, PARIS (IXe). — AUCUN ENVOI CONTRE REMBOURSEMENT.
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CHAQUE VOLUME COMPREND 256 PAGES,
IMPRIMÉES SUR
BEAU PAPIER,
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LA RENAISSANCE DU LIVRE
LES LACUNES DE L'IDENDITÊ JUDICIAIRE
L'homme qui fabrique les empreintes digitales
Un procédé ignoré de reconnaissance x les empreintes labiales
Monsieur, je vous conseille d'être prudent
si, un jour, .vous assistiez en qualité de juré à
une affaire criminelle où, seules, les empreintes digitales constitueraient des preuves
contre l'accusé...
Dois-je avouer que je lisais cette lettre
avec un certain scepticisme ? L'infaillibilité du système anthropométrique n'est
plus à démontrer.
Après trente ans de certitude, comment une lettre inconnue eût-elle pu faire
douter d'une vérité qui avait fait ses preuves par la rare méthode du consentement
universel ?
Seulement, cette même missive ajoutait à
ce conseil un corollaire à la fois énigmatique
et précis, bien digne de piquer la curiosité
du reporter :
... En effet, j'ai trouvé un procédé permettant de se servir des empreintes digitales
d'autrui dans n'importe quel cas, à l'insu du
titulaire de ces empreintes et sans sa présence
effective...
Son nom seul était le garant de sa sincérité.
Mais un reporter prudent peut se garder
de l'enthousiasme, dés inventeurs. J'écrivis
d'abord à M. Diou.
Sa réponse devait affoler, la curiosité de
celui qui fait métier de tenter d'intéresser
le public.
i Envoyez-moi vos empreintes digitales,
m'écrivit-il. Et je compte prouver aussitôt
que vous avez commis un crime chez moi,
où vous n'êtes jamais venu...
Je décidai de venir et d'apporter non
point mes empreintes, mais mes doigts
eux-mêmes. Et alors, désormais, qu'on me
permette de conter objectivement les conversations, les observations, lés constatations, issues de mes entrevues avec M. Diou.
C'est la certitude même du système des
empreintes digitales qui, par un singulier
paradoxe, en fait le danger. Et peut-on,
désormais, sans frémir, envisager qu'il y
a peut-être au bagne des innocents expiant le crime d'un autre. Car, comme
l'écrivait encore M. Diou : Ce que j'ai
trouvé, un criminel a pu le découvrir aussi
et en faire un mauvais usage...
Empreintes digitales relevées directement.
Empreintes digitales transposées. Elles sont rigoureusement identiques.
Et pourtant elles sont fausses
L'infaillibilité de la méthode
Bertillon
Les deux propositions d'un
inventeur
Qu'on m'excuse, au cours de la narration
qui va suivre, d'employer le « moi » haissablé. Je suis bien contraint de parler ici à
la première personne, parce que c'est la
seule façon pertinente d'apporter un témoignage personnel.
Ceci n'est pas l'exposé d'une théorie.
C'est le scrupuleux récit d'expériences auxquelles j'ai assisté, que j'ai vu accomplir
sous mes yeux, que j'ai moi-même exécutées.
L'auteur de la lettre la signait de son
nom. Je connaissais le nom : Diou. Je savais que M. Diou était un inventeur dont
les découvertes, le plus souvent, étaient
marquées d'une vive ingéniosité et d'une
rare originalité. Mais celles de M. Bertillon...
Récemment encore, ici-même, notre
correspondant John Pearson, dans un article
documenté, rappelait que le système dont
M. Bertillon est l'inventeur est appliqué
aux États-Unis, avec seulement quelques
variantes de classification. Et, puisque le
sujet exige que je prenne la parole, le
principe de l'Identité judiciaire éveillait en
moi des souvenirs certains.
En 1912, M* Alexandre Zévaès plaidait
aux assises pour un accusé qui était exactement dans le cas présumé par M. Diou.
Contre lui, une seule charge : identité
d'empreintes digitales. En ce temps-là,
on n'admettait pas encore avec ferveur
le dogme du « bertillonnage ». Me Zévaès
opposa à la thèse officielle un scepticisme
qui était son seul système de défense possible. M. Bertillon, pris à partie avec
quelque vivacité, ne se formalisa pas de
l'attaque. Après l'audience, il tenta, avec
douceur, de convaincre le défenseur et le
convia à visiter ses services. Le hasard fit
que j'assistai à cette visite. Et je pense que
Me Zévaès ne me démentira pas si je révèle
qu'en redescendant le petit escalier du service de l'Identité judiciaire, il était beaucoup plus hésitant.
Déjà, lors du procès dés bandits tragiques, Carouy avait été identifié comme
auteur du crime de Thiais par ses empreintes digitales. Et je me rappelle encore
l'un de ses défenseurs, le regretté Emile
Michon, déclarant dans les couloirs : « Il
n'y a pas d'erreur judiciaire dans l'affaire.
Carouy a avoué. Mais la preuve est fausse.
U m'a affirmé avoir opéré avec des gants.
Le système n'est donc pas infaillible...
Il est donc dangereux... » Mais, le lendemain, Carouy, qu'il interrogeait encore par
un scrupule de conscience, se rappelait
soudain qu'il avait, une minute, déganté
une seule main pour déboucher une bouteille.
De tels exemples sont nombreux.
Mais, d'ailleurs, à la bien relire, la lettre
de M. Diou ne prétendait point à la faillibilité de l'invention de M. Bertillon.
M. Diou est une sorte de méridional du
Nord. Il est brun, alerte, vif comme un
fils de Phocée.
La première déclaration par quoi il
m'a conseillé est celle-ci :
— Je prends vos empreintes digitales et
je les transporte sur n'importe quel objet.
Si je n'ai pas vos empreintes digitales, j'en ai d'autres, de vous, qui suffiront à vous identifier.
Alors, je tente d'engager plus avant la
conversation. Mais M. Diou me parle
d'autre chose, de la politique ou du temps
qu'il fait — sujets dont la nature est également variable.
— Un porto ?
— Volontiers.
Nous prenons le porto.
— Revenez me voir. Vous verrez ?
— Quand ?
— Je vous écrirai.
Je peux me servir des empreintes
digitales d'autrui..
Comment ? Il paraissait intéressant de le
savoir. M. Diou habite le Nord de la France.
La
d'incrédulité, est une invitation à poursuivre, M. Diou expose gravement :
—■ De plus en plus, les cambrioleurs, au
cours de leurs «cassements », font emploi du
gant de caoutchouc, grâce auquel ils ne
laissent pas de trace. Moi, je prétends qu'ils
en laissent, et que je les retrouve. Elles
sont aussi sûres, aussi « sélectives » que
les empreintes digitales.
—• Sérions les questions, dis-je. D'une
part, vous faites une découverte capable
d'égarer la justice et, d'autre part, vous
inventez un principe qui la sert.
—■ Je la sers dans tous les cas : en lui
enseignant qu'elle peut éviter de frapper
un innocent et en lui permettant de découvrir un coupable.
—■ Maintenant, la démonstration.
— Alors, un second porto, sans gants.
Et un autre verre.
Et, aussitôt, la démonstration. M. Diou
a apporté près de moi trois petites boîtes.
Il les ouvre. L'une contient une poudre
grise. L'autre, une poudre plus foncée. La
dernière, une poudre noire.
—■ Essayons.
transposition des empreintes
Nouvelle lettre de M. Diou :
Monsieur, en marge de cette lettre, que
vous n'avez pas écrite, sur ce papier que vous
n'avez jamais touché, voici vos empreintes
digitales, celles de votre pouce, de l'index et
du majeur de votre main droite...
En effet, dans la marge, il y a trois
empreintes noires, bien nettes.
Je m'empresse de prendre mes propres
empreintes. Je les observe avec une forte
loupe sous un grossissement puissant. Je
les compare à celles que m'expédie M. Diou.
Ce sont les mêmes, fidèlement, scrupuleusement.
Seconde entrevue.
— Etes-vous convaincu ?
—■ Je suis surtout surpris.
—■ Rien de plus simple. Rappelez-vous
le verre de porto. Vous avez quitté vos
gants pour le boire. J'ai gardé votre
verre. J'ai voulu ainsi, tout de suite, éviter
l'objection que vous m'auriez inévitablement posée : « Pour employer les empreintes
de l'innocent que vous voulez compromettre en le chargeant du crime que vous
auriez commis, il faut d'abord que vous les
possédiez. Comment pouvez-vous le faire ?
Je l'ai fait, vous le voyez,'de la façon la
plus simple du monde.
— Et comment avez-vous pu reporter
ces empreintes, qui sont miennes, sur ce
papier qui m'est étranger ?
—• Vous allez le savoir...
M. Diou me tend un autre verre de porto.
Avec quelque malice, cette fois, je ne quitte
pas mes gants.
—■ Ce geste-là, me dit M. Diou, est celui
d'un coupable. Vous prenez vos précautions. Mais même si vous ne vous dégantez
pas, comme fit inopportunément Carrouy,
dont vous avez entendu parler, j'aurai de
vous, comme j'en aurais eu de lui, des
empreintes certaines.
—■ Lesquelles ?...
— A votre santé.
— Mais, ces empreintes ignorées...
—■ Ça y est... je les ai... Merci !
A mon sourire qui, moins qu'un signe
Avec un tube vaporisateur où il souffle,
M. Diou projette la poudre grise sur le
second verre. A l'endroit où elle frappe le
rebord apparaissent les traces de mes
doigts. J'ai pris le sqin de ne pas serrer le
verre. M. Diou prend alors la seconde boîte.
Nouvelle insufflation. Cette fois, les empreintes apparaissent avec une singulière
netteté.
— Sur quoi voulez-vous que je les reporte ?
—■ Sur un autre verre.
—■ C'est facile... Revenez demain.
Le lendemain, M. Diou me présente l'un
de -ces clichés que font les photograveurs
pour permettre la reproduction des dessins
dans les journaux.
—• Vous connaissez cela ?
—■ Professionnellement.
Ces clichés ne sont pas autre chose que
des photographies positives sur une plaque
de zinc, où les traits sont en relief.
— J'ai deviné, dis-je. Et ce n'était pas
difficile. Vous avez fait clicher mes empreintes. Et maintenant vous allez les
appliquer, grâce au cliché, sur un autre
verre.
—■ Non. Ce métal dur ne « prendrait »
pas sur le verre et laisserait sur une matière
molle une trace mécanique. Et puis, l'empreinte que je dois laisser doit être faite de
cette matière grasse qui est un « exsudât »
de la peau. Ce cliché ne pourrait, pas l'appliquer directement. Autre chose : regardezle bien. Ce cliché a été fait à l'envers. Cette
précaution était nécessaire pour que votre
empreinte ainsi reproduite ne fût pas inversée.
M. Diou a pris le cliché. U le frotte contre
Empreintes labiales, telles qu'on peut les relever sur un verre, chaque fois qu'un homme y
a bu. Les sillons et les lignes de ces empreintes
accusent, au grossissement, une variété et une
diversité égales aux caractères sélectifs des
empreintes digitales.
sa paume, afin de l'imprégner de la substance grasse qui filtre par les pores de la
peau. Il a introduit sa main droite dans un
gant de caoutchouc. Puis il appuie successivement les trois doigts de la main droite
sur les parties correspondantes du cliché.
Ensuite, de cette main gantée, il a pris un
verre. Quand il le lâche, il me fait remarquer une trace d'empreinte visible, sur le
verre, avec cette apparence grasse qu'on
connaît.
Il a repris le vaporisateur, projeté la
, poudre • sombre. Les empreintes —• mes
empreintes —■ sont nettes sur le verre que je
n'ai pas touché. Mais je ne veux pas me
rendre aussi vite. J'objecte, non. sans raison d'ailleurs :
M. Diou, qui fabrique les empreintes digim
taies et qui a découvert les empreintes labiales.
•!-— Votre procédé suppose un complice
ou, ce qui est plus dangereux encore, un
témoin. Il y faut la collaboration d'un
photograveur. Ceci lui enlève — et c'est
fort heureux -— toute possibilité d'application pratique.
L'application pratique de la
fabrication des empreintes
— Apprenez qu'avec un appareil photographique, une plaque de zinc et quelques produits chimiques, il n'est pas impossible de s'improviser, pour un seul cliché,
par hasard, photograveur. Mais j'avais
prévu votre observation. Ce que vous voyez
là, c'est la phase du début de mes recherches. J'ai simplifié tout cela. Regardez.
M. Diou me tend le verre où, à la première rencontre, il avait fixé mes empreintes. Elles apparaissent en noir.
—• Touchez.
Je touche. Elles sont à la fois poisseuses
et dures.
— J'ai compris. Vous n'avez plus qu'à
les appliquer sur l'objet choisi.
— Non. Parce qu'elles seraient inversées. Et parce qu'elles sont ici moulées en
creux. Elles me servent à prendre un relief.
Sur une plaque de verre, M. Diou m'a
présenté un moulage en relief, en tous points
pareil à celui du cliché. Nouvelle application sur les doigts correspondants revêtus
de caoutchouc. Frottement sur la peau
pour obtenir la couche graisseuse naturelle. Apposition sur un verre, puis sur le
bois verni d'un meuble. Apparition de mes
empreintes. Le grossissement à la loupe
n'accuse aucune différence essentielle avec
les empreintes directes.
— Ainsi, un homme qui commet un
crime peut apposer dans la maison du crime
les empreintes qui ne sont pas celles du criminel.
Je remarque :
— Sans doute. Mais ces manipulations
ne sont-elles pas bien compliquées ?
N'exigent-elles pas des produits chimiques
spéciaux.
—• Ces produits dont le mélange est mon
secret sont des substances simples, naturelles, et dont la nature vous étonnerait.
Je peux vous confier le secret. Je vous demande de ne pas le révéler, puisque la révélation peut en être dangereuse.
Comment ne serais-je pas convaincu ?
Et n'allons-nous pas entendre désormais les
avocats, longtemps vaincus par la science
officielle, insinuer : « Etes-vous sûr que ces
empreintes ont été effectivement apposées
par le prévenu ?... »
. N'est-ce pas une lacune dans la certitude,
jusqu'ici entière, des empreintes digitales ?
Une
découverte d'empreintes
Ignorées
Une lacune ? Je me rappelle aussi la
promesse de M. Diou.
— Et ce cambrioleur qui n'a pas quitté
ses gants et que vous prétendez identifier
quand même ?
M. Diou me tend une liasse de coupures
de journaux. Toutes, elles relatent des
affaires de cambriolages.
—■ Aucun des auteurs de ces méfaits n'a
été arrêté, m'explique M. Diou. Pas de
traces digitales. Mais lisez. Un fait commun
à tous ces cambriolages. Partout, les voleurs ont bu, au cours de leur travail
— Alors ?
—• Alors, voyez !
M. Diou a pris mon verre, celui où j'ai
bu en gardant mes gants. Vaporisation de
poudre noire vers les bords. Apparition de
traces visibles.
— Empreintes labiales, me dit M. Diou.
Observez-les. J'en ai examiné des milliers.
Toutes diffèrent, presque autant que les
empreintes digitales. Elles offrent un jeu
de lignes et de sillons essentiellement différent chez chaque homme.
— Et la justice n'a jamais utilisé cette
ressource ?
— Elle n'y a pas pensé...
Mais, puisque M. Diou y a pensé, ne
pourrait-elle y penser après lui ? L'inventeur, qui a voulu me réserver la primeur de
ses ingénieuses découvertes, n"a pas d'autre
intérêt ni d'autre but. Mais il pourrait bien,
en toute simplicité, bouleverser les méthodes de l'Identité judiciaire et les habitudes de la Justice. MAURICE CORIEM.
5
il est d'usage qu'une maison soit payée en
un an par ses propres revenus, et c'est en
effet les bénéfices approximatifs que nous
réalisons. Vous voyez que nous sommes
loin des quatre millions et demi que votre
règle de trois composée semblait vous affirmer mathématiquement t
Et elle précise :
— C'est que les frais sont énormes. En
premier lieu, la patente—en passant, et pour
votre gouverne, je vous signale que celle-ci
est à mon nom. En effet, si, en France, les
tôliers sont reconnus, en Argentine, les
femmes seules ont le droit d'ouvrir et diriger un lupanar.
Et elle conseille :
— Notez ça, c'est très important !
Puis elle reprend :
— Donc la patente : une cinquantaine de
mille francs, le droit de débiter vins et boissons alcoolisées : vingt-cinq mille... les
petits avantages au docteur : vingt-cinq
mille... les cadeaux à la municipalité :
cinquante mille... Et tout cela ne serait
rien sans les deux grosses sangsues que sont
la police et la politique 1
Soudain, elle s'arrête et, nerveusement,
éclatant de rire, me demande :
— A votre avis, combien pensez-vous
que leurs grandes goules insatiables nous
ont soutiré l'an dernier ? Et n'oubliez pas,
pour étayer votre supposition, que les souteneurs sont officiellement tolérés à Rosario et que, naturellement, on nous fait payer
assez cher leur droit à la tranquillité.
La question est délicate pour un profane.
Je balbutie :
— Mon Dieu, je ne sais pas trop. Cent
mille francs, peut-être...
Cette fois, c'est du délire. La tenancière
se pâme littéralement.
Cent mille francs ! ironise-t-elle. Ah !
ça, c'est amusant ! Plût au ciel que nous
n'ayons payé que cent mille francs !... En
réalité, c'est cinq cent mille que nous avons
distribués !... Oui, monsieur, un demimillion !... Une paille, n'est-ce pas ?
L'hilarité de cette femme, son attitude
et ses gestes moqueurs ont le don de chatouiller ma sensibilité un peu trop susceptible, je l'avoue, et à mon tour je raille :
—• Cependant, si je totalise toutes ces
sommes énormes, épandues largement et
avec à-propos, je suis loin encore du premier million...
Ma brusque contre-attaque surprend la
belle Ginette, qui, atteinte un peu durement,
demeure un moment sans voix, comme
assommée.
Mais cette émotion n'est qu'apparente,
car déjà elle s'est ressaisie et se cabre.
—• Ah ! pardon et permettez ! s'exclamet-elle, si votre raisonnement est juste, vos
prémisses sont fausses, partant votre résultat ne peut être qu'erroné. Vous admettez
bien que certaines lois naturelles imposent
à la femme un repos* mensuel obligatoire ?
Donc, mon cher monsieur, le mois de travail dans nos maisons n'est en réalité que de
vingt-deux jours et, de ce fait, l'année commerciale d'un bordel ne comporte que deux
cent soixante jours de travail effectif...
C'est pourquoi, en tenant compte des
périodes creuses, la recette annuelle ne
dépasse guère trois millions et demi, recette
brute bien entendu, y compris le produit
de la vente du Champagne et autres boissons.
Et elle ajoute, un tantinet narquoise :
—; A cela, rien à dire, n'est-ce pas, c'est
la logique même, et j'espère.que cette fois
nous sommes bien d'accord. Or, je vous ai
énuméré déjà sept cent cinquante mille
francs de dépenses extraordinaires, laissezTous les clients des maisons de Rosario ne sont pas des hommes du monde...
moi maintenant vous parler des autres
frais réguliers inhérents à la bonne marche
Trianon est estimé deux cent cinquante de la maison.
Je n'ai pas le temps d'esquisser un geste
La tenancière reprend alors son grand
mille pesos, mais comptons en francs, vous
de protestation que déjà elle est partie.
comprendrez mieux, ça fait donc un million livre qu'un moment, elle avait posé sur le
— Si, si, affirme-t-elle, je tiens absoluet demi. Or, dans notre genre de commerce, piano et revient en sautillant près de moi.
ment à vous renseigner. Et d'abord, le
6
Je la devine décidée à en finir en m'écrasant définitivement sous le faisceau de
preuves indiscutables.
— Voici la liste des femmes de ma maison, dit-elle, mystérieuse, faites-moi la
grâce de me désigner au hasard trois
noms ?
— Mais...
Elle me rabroue gentiment :
— C'est curieux, vous voulez toujours
tout comprendre avant qu'on vous explique 1
Les « messieurs de Buenos-Ayres », à l'arrivée
de chaque paquebot, viennent attendre les
camarades redour de remonte.
— En effet, pourquoi trois noms ?
Mon hésitation énerve la jolie fille qui à
brûle pourpoint me demande :
—■ Quel est votre prénom ? — Mon... prénom ?
— Ouil
— Claude.
— C'est bien, merci 1
Elle a refermé son grand livre d'un coup
sec, me tourne brusquement les talons et
sonne...
Je suis ahuri.
Solange, la sous-maîtresse, apparaît.
— Appelez-moi, Clo-Clo, Colette et
Catherine ! ordonne la patronne du Trianon.
Un silence. La gouvernante sort.
Mme Ginette, un moment encore, demeure
immobile, toujours dédaigneuse, puis elle
s'exclame avec une joie contenue :
— Cher monsieur, dans quelques instants, trois de mes pensionnaires seront ici.
J'ai tenu à entourer cette entrevue de toutes
les garanties désirables et vous ne pourrez
même pas taxer ces filles de complaisances
à mon égard, puisque je les ai prises au
hasard en choisissant celles dont le prénom
commence par la lettre C, comme le vôtre.
Sur les trois, deux sont Françaises, l'autre
est créoleLa patronne achève à peine l'explication de cette mise en scène quelque peu
vaudevillesque que les trois phénomènes
font leur apparition sur le plateau.
Elles sont en tenue de travail.
' Instinctivement, toutes trois se sont rapprochées et, immobiles, au garde-à-vous,
nous regardent, épatées.
Je le suis autant qu'elles.
L'interrogatoire commence :
LA TENANCIÈRE. — Cloclo, où étiez-vous
avant de venir au Trianon ?
CLO-CLO. — J'étais à Mendoza, madame.
LA TENANCIÈRE. — Et vous, Catherine ?
CATHERINE. — A Montevideo 1
LA TENANCIÈRE. — Colette ?
COLETTE. — A Buenos-Ayres !
LA TENANCIÈRE. — En quelle classe
avez-vous voyagé ?
LE CHŒUR DES FILLES (avec un ensemble
parfait). — En wagons-lits, madame I
La patronne me foudroie d'un regard.
LA TENANCIÈRE. — Qui a payé vos
billets ?
LE
CHŒUR
(toujours à l'unisson).
—
C'est M. Henri 1
La patronne me refoudroie d'un regard.
LA TENANCIÈRE. — Etes-vous satisfaites
de la cuisine ?
CATHERINE. — Mais certainement, puisque Madame nous fait servir des mets
créoles.
COLETTE ET CLOCLO (ensemble). — Et
à nous de la cuisine française I
Re-re-regard de la patronne qui me
re-re-foudroie.
'
Moi (agonisant). — Assez !... Je vous
en prie... je vous crois...
LA TENANCIÈRE
— C'est
tecteur).
(d'un geste large et pro-
bien, mes filles, laissez-
nous !
LE CHŒUR (en se bousculant vers la sortie). — Au revoir, madame ! .. Au revoir
monsieur !...
Dans son salon, M™* Ginette triomphe
comme une vedette dans sa loge au milieu
Colette.
(Composition de R. Giffey.)
des gerbes de fleurs et de ses adorateurs.
Moi, je me remets doucement.
Par la fenêtre entrouverte, un rayon de
soleil indiscret s'est faufilé sans bruit et,
guilleret, s'est réfugié dans la blondeur frivole de mon bourreau qui jouit en silence
de sa victoire facile... Mais voilà que le
plaisantin se fait entreprenant et pose un
baiser brûlant sur les lèvres de la jolie fille
qui, surprise, recule... cependant que le
polisson, bien décidé, développe encore son
attaque et caresse les seins...
C'en est trop.
M»« Ginette s'est levée.
— Quel taquin ! fait-elle en riant.
Puis elle se rapproche de moi doucement
et, à mi-voix, propose :
Faisons les comptes, voulez-vous ?
Je murmure :
— A quoi bon, j'ai compris... et je fais
amende honorable.
Mais elle sourit encore de tout son regard
bleu.
— Vous avez compris... pour ces dames,
peut-être, mais vous oubliez ces messieurs l
— Comment ça, les hommes
émargent au budget ?
— Dame ! Ils n'ont pas droit à la table,
certes, mais ils sont logés ; et que ce soit en
ville ou à la Private (1), c'est toujours à
nos frais. De plus, tous les lundis, ils touchent un bouquet de dix-sept pesos.
— Un bouquet ?
— Hé oui ! m'explique la tenancière,
c'est une redevance, sorte de cadeau qui fut
imposé aux tenanciers après une grève des
hommes qui entendaient être nourris au
même titre que leurs femmes. Un compromis intervint, et il fut décidé que ces messieurs toucheraient une indemnité, un bouquet, suivant le mot, de dix-sept pesos par
semaine.
— Mais si la femme tombe malade ?
— Le cas est assez rare, il est prévu
cependant. Aux premiers symptômes, la
fille reste à la Private avec son homme
et le ménage est à notre charge pendant un
mois. Ainsi en a décidé la loi du milieu.
L'homme touche alors deux bouquets par
semaine. Si la maladie se prolonge, le deuxième mois, seul le souteneur touche son
bouquet, mais généralement mon mari se
montre généreux... et d'ailleurs, je vous le
répète, les cas de maladie sont très rares au
Trianon.
— Mais alors, c'est un véritable contrat
que vous avez avec chacune de vos pensionnaires ?
— Un contrat tout moral, rectifie la belle
Ginette, toujours aimable. Dans le milieu,
on ne connaît pas les feuilles de papier timbré ni les écritures, encore moins les signatures, la parole suffit. Mon homme traite
avec les hommes 1
— Cependant, vos engagements ne sont
faits que pour trois mois.
,— Pour trois mois, mais renouvelables,
précise-t-elle. J'ai ici des femmes depuis
cinq ans et qui s'y plaisent. Que voulezvous, leur travail est automatique maintenant ! Il est même curieux d'observer que
le rendement des anciennes est d'une régularité toute mathématique.
Et comme elle se plaît à .appuyer son
argumentation sur des faits précis, elle
reprend aussitôt son grand livre et propose :
•
— Prenez au hasard parmi mes vieilles
gardes, tenez, Mado, par exemple, qui est
au Trianon depuis plus de six ans, et
examinons ses gains hebdomadaires durant
les derniers mois. Que constatons-nous ?
(Suite page 14.)
CLAUDE VIN CELLE.
(1) Propriété ordinairement attenante à la
maison close, où les hommes habitent en commun.
Je regardai par la fenêtre qui donnait
sur le boulevard de l'Opéra. Il était 2 heures
après-midi, l'heure où les Viennois commencent à songer au déjeuner.
— Où s'arause-t-on à
Sur la chaussée, large comme nos ChampsVienne ?
Élysées, les autos et les tramways rouLa jeune femme rose
laient ; les passants circulaient ; de luxueux
et potelée à qui j'avais
magasins présentaient, sur fond de velours,
posé la question prit un
des robes claires et des bijoux étincelants ;
temps, aspira une bouffée
l'air était léger, le soleil d'avril déjà chaud
de tabac autrichien, aussi
et l'odeur d'innombrables violettes monblond mais moins parfutait jusqu'à nous. Pour une morte, Vienne
mé qu'elle, et renvoya,
me sembla se porter encore assez
du même soupir, la
bien.
fumée et la réponse :
C'est ce que je tentais d'exprimer, avec
— Nulle part. La
précaution ; car les Viennois sont aussi
ville est morte; la
intransigeants sur leur indigence actuelle
guerre l'a tuée.
que
sur leur splendeur
Ci-dessous : Les cartes passée.
dont parle notre colPrécaution inutile. La
laborateur
Louis- dame haussa les épaules et
Charles Roger dans eut un mouvement de ses
son article.'
jambes croisées qui fit tomber sa mule de satin.
Ainsi m'apparut, délicatement veiné de bleu, le
pied le plus blanc, le plus
mignon : le pied de Cendrillon.
Je
remis
la
mule en baisant humI
Cafést dc iv«i*e*<
Sur chaque table, une part'
carte portant
un nom de
ville.
8
b le ment le trésor
mis à jour.
La paix était
laite.
— Écoutez, Qt enfin la dame radoucie, mon frère, qui
est un chenapan,
vous donnera les
adresses d'endroits
comme vous en cherchez. Moi, bien entendu, je les ignore.
— Bien entendu.
— Pourquoi riezvous ?
— Je ne ris pas ;
mais vous savez peutêtre, tout de même,
quel est le genre de
ces établissements ?
Une
hésitation,
puis :
— €e sont des
cafés de veuves.
— De ?
— De veuves.
Oui.
— Drôle de nom
pour un endroit gai ;
c'est vrai qu'il y a
une opérette, très
viennoise, qui s'appelle la Veuve joyeuse.
— Méchant 1 '
La mule retom-
—- Cinquante groschen, dit-elle.
Ces cartes-postales, jaunes, n'étaient
pas même illustrées. Au recto, destiné à
l'adresse, cette indication : Juxpostkarte
(Farce-carte postale) ; le verso, réservé à la
Le soir même, j'étais Johennesgasse, au correspondance, était vierge. C'était sans
doute la seule chose qu'il y eût de vierge
café Schellinghof.
La carte de ce charmant établissement dans l'établissement.
Je n'avais aucun besoin de cartes possignale seulement qu'on y danse et que,
chaque jour, il est le siège de « soirées tales ; mais il faut bien que chacun gagne
sa
vie. Je donnai les cinquante groschen
mondaines ».
On entre dans une salle qui ressemble à (ce n'était pas ruineux : 1 fr. 80) ; puis
tous les cafés de Vienne : du silence, des j'examinai la salle et le public.
Dans le fond, devant le piano et un orjournaux sur toutes les tables ; des fauchestre-jazz réduit, une dizaine de couples
teuils profonds comme des tombeaux.
dansaient sur un carré de linoléum. Des
Mais, à travers de lourdes tentures rouges,
sourdaient les roulades d'un piano. J'écar- fresques galantes décoraient les murs.
Le public comprenait environ trois fois
tai le rideau cramoisi. Un étroit escalier
descendait, rapide, vers un sous-sol. En plus de femmes que d'hommes. Une bonne
moitié
des femmes, bien habillées, trop
bas, une autre salle enfumée, bruyante,
fardées et le regard entreprenant, vencomble. C'était là le café des Veuves.
daient manifestement leurs charmes. Les
autres, de mise et de maintien modeste,
étaient peut-être également des grues ;
mais elles n'en avaient pas l'air.
Imaginez une longue galerie rectangulaire, bordée de box et garnie de petites
tables. Sur chaque table, une pancarte
portant un nom de ville : Paris, Berlin,
J'en étais là de mes réflexions quand la
Prague, Constantmople, Madrid, Varsovie,
vendeuse de cartes-postales remit à côté
Moscou, etc.
de
mon moka un nouveau petit paquet de
Je m'assis à la table de Moscou, qui était
son produit.
la seule libre. Aussitôt accourut une dame,
J'allais le refuser — vraiment, cette
genre ouvreuse, qui mit, d'autorité, decommerçante abusait —- lorsque
vant moi, dix cartes
je la vis s'éloigner sans rien me
postales.
réclamer. Elle se dirigea vers
d'autres tables, sur lesquelles elle
déposa, après y avoir jeté un coup
Dublin esi blonde, le
d'ceil, une ou deux cartes.
teint clair, tes yeux violets. (Willinger.)
ba. Je fus un peu plus long à la chausser à nouveau.
9
J'examinai celles qu'elle m'avait laissées
et m'aperçus seulement alors qu'elles m'étaient adressées — non pas à mon nom,
évidemment, mais à celui de la table :
Moscou — et que des correspondants inconnus y avaient écrit quelque chose à mon
intention.
Je compris alors l'organisation du système. La marchande de cartes-postales
est en même temps un facteur. Elle passe
devant les tables
au besoin, si l'on est
pressé, on l'appelle, -= ramasse les épîtres
libellées par les clients et se charge âe les
remettre aux destinataires.
Mon premier courrier se composait de six
cartes, toutes, évidemment, écrites en
allemand; comme signatures, le nom de la
ville placardé à la table où était installée
l'expéditrice.
Trois des cartes portaient simplement
ces deux mots : Herzliche Grusse, ce qui
signifie : Cordiales salutations.
J'appris par la suite que cette formule
aimable, qui n'engage à rien, est d'un
usage courant. Psychologiquement, cela
peut se traduire ainsi :
— Monsieur qui êtes à la table Moscou,
regardez la table X... où l'on vous veut
du bien.
La quatrième carte disait :
— Dansez-vous? Signé : Dublin.
La cinquième :
— C'est bien triste d'être seul ; tout seul,
aussi... Signé : Lisbonne.
La sixième :
— Vous êtes donc bolchevick pour vous
être installé à Moscou ? Signé : Heidelberg.
Avant de répondre à d'aussi flatteuses
invitations, je regardai les expéditrices.
Je cherchai d'abord (vous l'avez deviné)
la table Lisbonne, où la caille semblait
toute rôtie et prête à me tomber dans le
bec.
Elle était occupée par une petite boulotte, décollettée jusqu'au nombril. Pas
vilaine, mais,hélas, à coup sûr une «professionnelle ». Je réponds :
— Ma solitude ne durera pas ; j'ai un
rendez-vous. Bonne chance.
Était-ce, également, une professionnelle,
cette grande fille mince et brune, coiffée
en bandeaux, qui m'avait traité de bolchevikc? Le regard est hardi,'mais intelligent;
il y a de la distinction dans ses gestes rares,
de la race dans sa silhouette cambrée.
Réponse :
— Non, je ne suis pas un agent des Soviets ; mais vous, jeune Heidelberg, seriezvous, par hasard, une étudiante allemande?
Dublin est blonde, le teint clair, les yeux
violets et — symptôme rassurant —
porte une robe noire toute simple.
J'écris à Dublin :
— Je danse, mais mal. Si vous n'avez
pas peur d'un partenaire maladroit, faitesmoi signe.
Pour Copenhague, Constantinople et
Stockholm, qui m'ont adressé leurs cordiales salutations, je les néglige pour l'instant. Il ne faut pas courir trop de « lèvres »•
à la fois.
J'appelle le facteur et lui remets mes
cartes, qui sont immédiatement distribuées. J'observe les visages pendant la
lecture de mes poulets. Lisbonne est dépitée ; Heidelberg sourit avec malice et Dublin se tord.
Cinq minutes après, j'ai deux réponses.
— Allemande, non ; étudiante peut-être,
mais votre allemand à vous n'est guère correct, répond Heidelberg ; vous êtes étranger,
sûrement. Français ou Polonais ?
Ho 1 Ho ! Assez physionomiste, cette
brune ; mon père est Français et ma mère
Polonaise. Je réponds : Français.
Dublin a écrit quelque chose que je ne
comprends tout d'abord pas. Voici 1
— Je vous réserve la deuxième valse car
f'ai promis la prochaine ; mais je ne suis
pas Leda...
Que diable Leda vient-elle faire ici ?
Je ne me suis pas présenté comme étant
Jupiter.
Une idée me vient ; je me penche vers
l'ami qui m'a conduit ici et me sert aimablement d'interprète pour les mots qui
m'échappent :
— Dites-moi, mon cher, je vous ai demandé comment on disait : signe,, en allemand, et vous m'avez répondu...
— Schwan. Eh bien ?
— Schwan, est-ce signe ou cygne ?
— Cygne, parbleu ; signe c'est Zeichen.
La prochaine fois, j'apporterai un dictionnaire ; ça sera plus sûr.
Une valse. Viennoise, évidemment. J'en
profite pour regarder tourner « Dublin ».
Son partenaire et elle ne font qu'un,
comme ces libellules accouplées qu'on voit
tourbillonner dans le vent d'un soir d'été.
D'ailleurs, ici, tout le monde valse à ravir. Jamais je n'oserai me produire.
Voilà une autre carte d'Heidelberg, qui
récidive. En français, cette fois.
— Puisque vous ne dansez pas, venez causer avec moi au lieu de vous embêter tout
seul.
Je me dirige vers la table Heidelberg.
Les cheveux d'Heidelberg — elle s'appelle Wetti, autant vous le dire tout de
suite — sont noir corbeau ; avec ça des
yeux bleu pastel. Je m'en étonne.
10
—- Toutesles femmes sont blondes, maintenant, déclare Wetti ; si ce n'est pas la
ïaute au bon Dieu, c'est celle du coiffeur.
Moi, je suis blonde naturellement ; mais
je n'aime pas faire comme tout le monde.
Alors, je me teins. C'est idiot, pas ?
— C'est-à-dire, Wetti, qu'il va falloir
retourner, pour vous, une vieille chanson
française.
— Quelle chanson ?
Accompagné par l'orchestre qui persiste,
je fredonné" notre irrévérencieux refrain,
et j'ai J'impression de précipiter dans cette
musique siropeuge un jet pétillant d'eau
de Selz:
Je ne suis pas curieux,
Mais je voudrais savoir
Pourquoi...
Wetti bat des mains :
— Je connais. J'ai chanté ça au d'Harcourt.
-— Au café d'Harcourt ? A Paris ?
— Naturlich. Au Quartier Latin. J'ai
été étudiante, mon cher. Vous ne croyiez
pas si bien dire, hein ?
Les yeux bleu clair s'embrument un
instant. Cette jeune fille galante est plus
intéressante qu'on ne pouvait raisonnablement l'espérer.
— Ober — c'est ainsi qu'on appelle le
garçon — du Champagne. (C'est le seul
moyen d'obtenir des confidences.)
Les confidences sont venues. Wetti,
dont le père était banquier (plus exactement, je crois, employé important, fondé
de pouvoir), vint à Paris en 1923 pour se
perfectionner dans la langue française et
l'art de la peinture.
Elle habita successivement rue de
l'Odéon et rue Campagne-Première. Je ne
crois pas qu'elle ait fréquenté aussi assidûment la Sorbonne et l'académie Julian
que le café d'Harcourt et le bar du Dôme.
En outre — elle en est très fière — elle
a connu l'amour, pour la première fois, à
Paris.
Cela décida de sa vocation. Bien avant
que Marlène Diétrich ne le chantât dans
Y Ange bleu, Wetti se sentait faite pour
l'amour de la tête aux pieds.
Tant que les subsides paternels arrivèrent régulièrement, l'Ange bleu viennois prodigua ses faveurs, si j'ose dire,
« au pair »... Donne-moi de ce que tu as,
je te, donnerai de ce que j'ai.
Quand vint le krach bancaire autrichien,
Wetti reçut, au lieu du chèque habituel,
l'avis de revenir à Vienne.
La perspective de regagner le logis familial, que la ruine n'avait certainement
pas égayé, n'enchantait pas l'étudiante,
qui adorait Paris et aussi un jeune peintre.
Elle resta donc encore une année jusqu'à ce qu'elle fût rassasiée du jeune peintre et de la vache enragée qu'il lui faisait
manger.
Retour à Vienne, grâce à l'obligeant
appui d'un négociant hongrois, dont elle
avait fait la connaissance dans un dancing
dé l'avenue Mac-Manon et qui paya d'un
billet de chemin de fer le plaisir d'avoir
rencontré une aussi agréable interprète.
Voyage en sleeping — le commerçant
hongrois occupe l'autre couchette,—, arrivée à Vienne avec deux cents francs :
soixante shillings. La famille avait émigré
en Tchécoslovaquie. Il fallait vivre. Elle a
vécu. Le café des Veuves était un des moyens
de son existence.
— Et toi ? qu'est-ce qui t'a indiqué le
Schellinghof ? Vous n'avez pas ça, hein,
à Paris ? C'est bien commode ces cartes
postales pour entrer en relations.
J'acquiesce, mais j'avoue que j'aurais
préféré trouver une correspondante moins
attachée au résultat financier de sa correspondance.
— 11 y en a, dit Wetti, qui, bonne fille,
me donne le tuyau ; mais alors viens le
samedi ou le dimanche soir. Tu trouveras
ici ce que vous appelez à Paris des midinettes, qui cherchent un ami, ou, au moins,
des vraies, tu sais, qui s'ennuient. J'en
connais une ; je ne la vois pas ce soir. Si
elle vient, je te la montrerai'. Elle a quarante ans, mais des restes appréciables.
Elle adore les étrangers et ne fait pas attendre ceux qui lui plaisent.
— Dis donc, c'est une concurrente ?
— Oui, mais quand je suis gênée, elle
m'aide très gentiment.
J'admire cette alliance de l'amour-plaisir et de l'amour-commerce.
Je demande à Wetti si elle connaît la
jeune fille de la table Dublin qui me lance
maintenant des regards courroucés.
— Elle vient quelquefois.
— C'est une professionnelle ?
— Non. Elle est souvent avec ce monsieur âgé qui vient de s'asseoir à côté
d'elle.
— Son amant ?
— Sans doute.
Dublin me paraît de plus en plus intéressante. Je risque une invitation à danser
par carte-postale ; avec la complicité de
Wetti qui corrige mes fautes d'allemand.
Réponse :
Trop tard. Je suis avec mon oncle. Pourquoi ne vous étes-vous pas décidé plus tôt ?
Probablement parce qu'Heidelberg vous
attirait davantage. Et maintenant, elle ne
vous plaît plus?
Wetti répond elle-même :
— Ce monsieur est venu parce qu'il est
Français et que je parle aussi français, mais
tl est désolé de vous avoir peinée et voudrait
obtenir son pardon.
Réponse (je fais travailler le facteur ).
Ce soir, impossible. Je rentre. Dites à
votre compagnon que, s'il tient à me revoir,
il me téléphone demain matin à mon bureau
(ici un numéro). Qu'il demande Mn* Mizzi.
Mais quet d'ici là, il apprenne l'allemand ;
car je ne sais pas un mol de français. Au
revoir, merci pour votre amabilité. Que vous
avez donc, madame, de beaux cheveux noirs t
J'ai téléphoné, j'ai eu, au bout du fil,
Mn* Mizzi, qui m'a donné rendez-vous, au
même endroit, le samedi suivant.
Ah I qui m'eût dit, alors...
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(6*) |
FAMILLE
DAMNEE
Sophie Reins, la sœur aînée deErnst, accepta,
après le crime, de voyager en Italie avec l'assassin, mais, comme on ne put prouver
qu'elle avait été au courant des événements,
elle ne fut pas inquiétée. (W. W.)
Fous ou assassins, tels
furent fous les Eteins.
De notre correspondant particulier de Berlin.
Il n'y a pas longtemps, quelques semaines
à peine, que, dans la prison de Moabit, a été Ernst Reins, qui a l'air d'un jeune étudiant studieux et doux, s'est pourtant rendu coupable
d'un crime difficilement explicable en tuant un facteur de Berlin et en le dévalisant. (W. W.)
pendu un jeune homme nommé Ernst Reins.
Son crime ne fut pas celui d'un vulgaire
assassin, car pour lui plus que pour tout
autre peut-être, l'influence d'une horrible La prison de Moabit, à Berlin, est une des plus anciennes de cette ville, et aussi une des plus
célèbres de l'Allemagne, car c'est dans la cour intérieure de ce sombre bâtiment qu'ont lieu les
hérédité agit sur son cerveau et conduisit sa
main. C'est à ce titre que l'Allemagne tout exécutions capitales. Chaque État allemand, chaque province a son procédé ; certains ont
adopté la guillotine ; d'autres ont recours à la traditionnelle hache du bourreau. A Moabit, on
entière se passionna pour cette affaire décondresse une potence et l'on passe la corde au cou du condamné à mort. (W. W.)
certante à plus d'un point de vue. C'est à ce
titre que les lecteurs de Police-Magazine
pourront y trouver un intérêt particulier.
La destinée de la famille Reins semble
s'être accomplie entièrement. Elle forme un
cycle fatidique dans lequel chacun de ses
membres a été entraîné. Le bilan en est tragique. Outre des enfants décédés en bas
âge, cette famille compte en effet, à l'heure
actuelle, deux assassins, un fils victime de
son propre père, un fou et une jeune fille
condamnée pour complicité louche.
On ne peut pas avoir oublié les détails du
procès de Peter Kurten, le vampire de
Dusseldorf. Lorsque celui-ci comparut
devant ses juges, certains voulurent bien
admettre que le misérable était fou, mais,
même fou, on ne songeait pas à poser la
question de sa responsabilité, et par conséquent à lui rechercher des circonstances
atténuantes. Pour Ernst Reins, au contraire,
le public berlinois, déconcerté par l'absurdité du crime, troublé par les antécédents
que le défenseur analysa minutieusement,
ne fut pas loin d'éprouver une certaine
pitié.
Le cas d'Ernst Reins, cependant, parait,
au premier abord, assez simple si on le compare au cas effroyable de Peter Kurten. Si
l'on examine les faits d'une façon superficielle, on croit y trouver seulement un faitdivers sanglant mais banal.
Et pourtant !
Ernst Reins habitait à Rerlin, où il partageait un modeste appartement avec sa
mère et ses sœurs. Issu d'une famille bourgeoise, il exerçait la profession de dessina*
teur en bâtiment, mais doué d'une vive
intelligence, attiré par les choses de l'esprit, il avait beaucoup étudié et, tout seul,
avait acquis une vaste culture.
Très sentimental, il avait une amie à
laquelle il semblait fort attaché. Sobre, poli,
plutôt timide d'aspect, il donnait l'impression d'un garçon effacé qui ne craint rien
tant que d'attirer l'attention sur lui.
Or, un jour, sans motif apparent, sans
rien dire à personne, il quitta sa famille et se
mit en quête d'une chambre meublée.
Il la trouva dans le Gossowstrasse, en plein
quartier de Westen. Une vieille dame, à
laquelle il donna un faux nom et se présenta
comme étudiant, consentit à lui louer une
Johanna Reins, surnommée Jenny, la seconde
sœur d'Ernst, ne compte que dix-sept ans.
Elle aussi suivit son frère en voyage et profita de ses libéralités. Elle apprit assez vite la
provenance de l'argent, mais continua de vivre
joyeusement. Pour ce fait, le tribunal de
Berlin la condamna comme complice. (Vf. W.)
facteur lui apportant cette modeste somme. Enfin on sonna à sa porte. Il alla ouvrir,
le visage calme, le geste indifférent. L'homme
en casquette demanda si c'était bien ici que
demeurait le destinataire du mandat.
— Oui, c'est moi, dit Ernst Reins.
Le facteur entra. L'autre referma la
porte. Le guet-apens avait réussi.
Tout était prêt pour le crime. Reins n'eut
qu'à saisir une matraque qu'il avait préparée à portée de sa main et à frapper. Le
malheureux tomba, le crâne fracassé.
Autour de lui gisaient à terre les mandats,
les lettres chargées qu'il transportait. Reins
fit main basse sur ce butin, prit son chapeau
et s'en fut le plus tranquillement du monde.
Ce fut la logeuse qui, revenue quelques
instants plus tard, découvrit le cadavre et
'donna l'alarme.
La première enquête ne révéla rien. La
police, devant un crime accompli avec tant
de sang-froid, crut tout d'abord avoir
affaire à un bandit professionnel, spécialiste
de ce genre d'attentats. Pendant trois
semaines, elle chercha de ce côté, vainement.
L'assassin, pendant ce temps, avait
quitté Berlin.
Quelques jours après le drame de Gossowsstrasse, prenant prétexte d'une bonne affaire
réussie, il avait offert à ses deux sœurs de
les emmener en voyage en Italie. Elles
avaient accepté, et tous trois étaient partis,
comme de paisibles touristes.
Or, voici où la question de l'hérédité intervient pour brouiller le jugement : en Italie,
Ernst Reins se comporte tout à coup contre
toute logique. Il agit exactement comme s'il
n'avait jamais tué, comme si nul ne pensait
à lui, comme si la police ne pouvait songer à
le rechercher. Il parle, il raconte tout ce qui
lui passe par la tête, il envoie à sa mère des
cartes postales qu'il signe de son nom, où
il se dit enthousiasmé de son voyage, où il
donne son adresse dans les hôtels.
Ses maladresses ne tardèrent pas à le
signaler à la police italienne qui l'arrêta et le
remit à la police du Reich. On ramena le
coupable à Berlin.
Quelques mois plus tard, ceux qui assistèrent au procès d'Ernst Reins apprirent
enfin, en plus des détails du crime lui-même,
la plus extraordinaire, la plus mystérieuse
série de drames qui puissent accabler une
même famille.
Les parents d'Ernst Reins avaient eu
huit enfants, dont cinq étaient morts tout
enfants. Seuls avaient survécu Ernst et ses
deux sœurs, Sophie et Johanna.
Après de longues années de bien-être, le
père avait vu ses affaires péricliter par
(Suite page 14.)
T. K.
11
Petits Enfants assassinés
UIIIIUIIUIIMIIMIMIIIIIIHIUUUI
Près de' Corbeil, à Saint-Maur, au pont ae Bercy et dans un égout, on
retrouve des restes de petits enfants
Une tète d'enfant a été trouvée dans un égout. Il s'agissait d'un bébé âgé de deux ou trois mois.
C'était une forte fille, -carrée d'épaules,
large de hanches, à la face ronde et aux
traits marqués, comme on en rencontre
l'été parfois sur les routes. Elles reviennent
des champs et dans les plis de leurs robes
sont restés accrochés des brins d'herbe et
de paille.
Elle était de celles-là et suivant les saisons elle allait de ferme en ferme ou de
province en province. Ici pour les vendanges, là pour la moisson, ailleurs pour
la récolte des betteraves. L'existence, pour
des femmes comme elle, n'offre aucune
joie, aucune consolation. La dureté de la vie
les prive d'un foyer, d'un toit, d'une tendresse qu'elles ne pensent même plus à
regretter. Tout le jour, la tâche est âpre,
longue; le soir, le sommeil est de plomb,
parfois, seulement, aux heures des repas,
après quelques verres de gros rouge, les
rires fusent et de lourdes plaisanteries
sont échangées avec les gars de la ferme
ou des ouvriers polonais.
Elle louait la force de ses bras et n'attendait rien du hasard.
Au crépuscule, souvent, après le labeur,
alors qu'une -manière de parfum enivrant
s'exhale de la terre, elle aimait à sentir un
homme à ses côtés. Sans pudeur, elle cherchait soudain du plaisir en s'abandonnant
dans les bras d'êtres frustres.
Un jour, elle comprend qu'elle va être
mère. Peut-être une joie intérieure, très
naturelle, l'a-t-elle effleurée à cet instant?
Puis les mois passèrent. Sans ressources,
tous les jours avec plus de difficultés, elle
continue à peiner à la terre.
L'enfant, que deviendra-t-il ? Il est
déjà une gêne, que sera-ce lorsqu'il sera
né ?
Comment le loger, le nourrir ? Elle ne
sait qui est le père. Au lieu de chercher
une consolation idans la maternité, peu
à peu nait en elle un sentiment monstrueux
contre lequel elle ne peut lutter.
Cette fille très simple, très normale se
laisse aller. L'idée du crime ne l'effraye
pas. Elle hait déjà son enfant.
Elle gardera sa liberté au prix de l'acte
le plus odieux.
Un soir, elle s'éloigne de tous, et seule
met au monde un petit garçon parfaitement constitué.
Le drame se joue alors en quelques
heures, le bébé est né viable, c'est un beau
poupon qui pousse des cris vigoureux. Un
instant son instinct naturel l'emporte, elle
met un lange à l'enfant...
Puis à nouveau la bête apparaît. Il faut
allaiter, donner des soins... C'en est trop,
elle recule lâchement devant les responsabilités et les tracas. Dans une minute qu'il
faut croire faite d'alïolement et d'inconscience et que l'on ne pourrait concevoir
autrement, elle enserre l'enfant dans un
sac de grosse toile et le ligotte avec de la
ficelle * lieuse » dont on se sert au champ.
Un dernier geste, le tragique colis est
jeté dans la Seine qui coule, là, à quelques
mètres.
Un mois après, le père Gaillard, un brave
homme, éclusier au barrage du Coudray,
à quelque six kilomètres en amont de
Corbeil, fait une bien macabre découverte.
Le père Gaillard est éclusier depuis
onze ans, il est bien connu dans le pays ;
le matin du 4 juin, avant que le trafic des
péniches ne devienne trop intense et ne
l'accapare complètement, il fait une courte
promenade sur la berge.
La Seine trace, en cet endroit, une large
courbe et la campagne est luxuriante.
Gaillard fume sa pipe quand soudain, à
moins de 100 mètres du barrage, il remarque,
12
qui flotte au fil de l'eau, un paquet noirâtre.
« Ce doit être un chien », pense-t-il.
La chose n'est qu'à 1 mètre de la rive;
à l'aide d'une galle, il la hisse sur la terre.
Il s'aperçoit qu'une ficelle enroulée six
à sept fois maintient solidement le tout,
devinant que sa découverte est peut-être
plus macabre qu'il ne le Croyait, il appelle
son second, M. Lamort.
—• Hé ! viens vite... viens voir !
Lamort accourt.
Tous deux sont penchés et déballent.
Horreur 1 C'est le cadavre d'un enfant...
Les os du crâne, au touché, se sont
disjoints, le corps est en complet état de
décomposition. Les malheureux restes
sont déposés sur l'herbe du chemin et
Gaillard court au téléphone.
— Allô 1 Allô ! La mairie du Coudray?...
Ici Gaillard, l'éclusier, il y a un instant, il
était 8 h. 30, j'ai repêché dans la Seine
un enfant. Je crois bien qu'il s'agit d'un
crime.
Tout le pays apprend la nouvelle, Gaillard raconte le peu qu'il sait; malgré sa
peau cuivrée et la large moustache blonde
qui barre son visage, on lit une émotion
intense en lui.
— C'est un tout-petit... il a été assassiné, pour sûr... Il en faut du courage I...
vous allez voir, c'est horrible !
A onze heures, dix autos ont déjà suivi
la route défoncée qui, en longeant le fleuve,
vient de Corbeil. Elles ont stoppé devant
la maison de l'éclusier. Le parquet de Corbeil, M. Gabrielli, directeur de la première
brigade mobile. Brancher, commissaire,
et Loret et Régnier, inspecteurs, font les
premières constatations.
Lugubres
débris...
Déjà les gendarmeries des environs ont
été alertées. Jusqu'à Melun et àPonthierry,
des recherches sont entreprises. Ces temps
derniers n'a-t-on pas signalé la disparition
d'un bébé ?
On est allé interroger également l'éclusier de Sitangette, le premier barrage en
amont de celui du Coudray.
L'enfant est si bien formé qu'il est
permis de supposer qu'il a quelques mois,
et le crime n'en paraît que plus odieux.
Enfin, à midi, un docteur arrive sur les
lieux; après un rapide examen, il se prononce :
— C'est un nouveau-né... d'ailleurs le
cordon ombilical n'a même pas été sectionné...
L'enquête doit se poursuivre. La présence de la ficelle « lieuse » fait penser que
la mère pouvait être une ouvrière agricoleMais avec cette seule présomption, comment espérer découvrir un jour la vérité ?
Le calme, après cette matinée de fièvre et
d'émotion, est revenu au Coudray. Personne
ne répondra probablement de la mort de'
cette innocente victime. Et la mère, qui
peut-être est déjà dans une autre campagne
et qui, c'est possible, a déjà oublié son forfait, connaîtra vraisemblablement les premiers remords lorsqu'un journal lui tombera sous les yeux.
« Un nouveau-né a été repêché au Coudray, il séjournait dans l'eau depuis environ
un mois.
« Il s'agit sans nul doute d'un crime,l'en-,
fant avait été ficelé dans un gros sac de
toile. »
U est difficile d'imaginer crime plus
révoltant que celui "du père ou de la mère
Il s'agissait d'un bébé âgé d'environ deux
à trois mois. La tête avait été sectionnée
franchement au milieu du cou et portait
à son sommet une large ouverture béante.
La tête paraissait avoir séjourné une
dizaine de jours dans l'eau.
Depuis on a cherché à retrouver le reste
du corps, l'égout a été visité avec minutie,
mais sans résultat.
L'hypothèse que l'on envisage est la
suivante : l'enfant a été tué, puis dépecé,
et les morceaux du cadavre ont été jetés
en divers endroits par les criminels, qui
espéraient ainsi n'être jamais-découverts.
On ne peut déterminer non plus l'endroit où fut jetée la tête, celle-ci a été
trouvée dans une canalisation importante
et elle peut être venue, entraînée par le
courant, de plusieurs égouts situés en
amont... Les recherches entreprises aboutiront-elles ?
Cette triste série est peut-être close, mais
déjà, ainsi, n'est-elle pas trop importante ?
N'est-ce pas une des sensations les plus
pénibles que de savoir que les petits
n'échappent pas aux instincts meurtriers
de certains.
PHILIPPE
ARTOIS.
A la hauteur du pont de Bercy, un passant remarquait un volumineux paquet abandonné.
ôtant la vie à leur enfant. Il semble que ces
crimes soient rares. Il semble qu'une telle
cruauté ne puisse qu'être le fait de malheureux fous sans excuse, cependant, en
recherchant dans les annales criminelles,
les exemples de ces sortes de meurtres ne
manquent point.
La semaine dernière a même été marquée
par une série de sanglantes découvertes.
Et ces découvertes paraissent prouver une
fois de plus que les enfants et les nouveaunés ne bénéficient pas de la pitié que leur
innocence et leur faiblesse devraient inspirer même aux moins sensibles.
Outre le crime certain de Corbeil, une
tête d'enfant a été trouvée dans un égout,
un nouveau-né a été découvert dans une
vespasienne, et le pied sectionné d'un petit
garçon a été repêché dans la Marne...
Cette trop longue liste n'est pas le fruit
d'une imagination malfaisante, elle correspond malheureusement à la réalité.
On remarquera la coïncidence qui veut
que tous les meurtriers aient cherché à
faire disparaître la trace de leur crime en
précipitant les enfants quelque part, où
leur corps pouvait être entraîné soit parles
flots, soit par un courant.
Le même samedi où le corps d'un bébé
était repêché au Coudray, à 18 heures, des
mariniers découvraient le pied gauche d'un
enfant. Il flottait dans les eaux de la Marne,
à Saint-Maur, à quelques mètres à peine en
amont du pont d'Alfort.
Après examen du pied, qui avait été
sectionné au-dessus de la cheville, on sut
qu'il s'agissait d'un enfant de sept à huit
ans. L'immersion remontait à dix jours
environ.
Une enquête est ouverte. Y a-t-il crime?
ou est-ce simplement un malheureux petit
noyé dont l'hélice d'un bateau aurait
ainsi arraché le pied du reste du corps ?
Le lendemain, le dimanche 5 juin, à la
hauteur du pont de Bercy, un passant
remarquait un volumineux paquet abandonné. Les agents avertis découvrirent
ainsile corps d'un fœtus presque à maturité.
Enfin, trois jours avant, des ouvriers
électriciens qui effectuaient des travaux
dans un égout sous la rue des Archives,
découvraient dans une canalisation, à peu
près à hauteur du n° 70 de la rue, une tête
d'enfant en état de décomposition avancée.
Des balles somnifères
Les bandits américains sont à l'affût de
toutes les inventions susceptibles d'augmenter leur criminelle activité.
A peine un savant yankee avait-il inventé
des balles de fusil et de revolver émettant
des gaz pouvant mettre un homme hors de
combat en l'endormant, qu'ils en ont fait
usage.
L'autre jour, en plein Broadway, ils
attaquèrent un riche banquier qui refusait
de se plier aux menaces de chantage dont
il avait été l'objet. Atteint par une de ces
balles, le financier s'affaissa et demeura de
longues heures en léthargie.
Quelques jours plus tard, dans spn courrier, il. trouvait une missive étrange lui
apprenant que :
C'est notre dernier avertissement. Si nous
avions voulu, une balle en plein cœur t'envoyait dans un autre monde. Que cet avertissement t'incite à ne pas différer plus longtemps les mesures que nous attendons de toi !
La presse américain- ne nous a pas dit
si le banquier s'était (fin exécuté. Il est
fort probable q^ue oui et que l'expérience des
balles somnifères aura mis bas définitivement sa résistance.
o
o
o
Pour éviter les faux
On sait qu'il est très facile pour un faussaire d'imiter une signature en utilisant une
feuille de papier buvard ayant gardé l'empreinte de la griffe du signataire.
C'est un procédé classique utilisé aussi
par les policiers au cours de leurs enquêtes.
Un simple miroir placé devant le buvard
permet de lire normalement le texte imprimé à l'envers sur la feuille.
Pour se défendre contre les agissements
des faussaires et se protéger contre les
indiscrétions, un ingénieur français vient
de prendre un brevet pour un papier buvard
de couleur noire, dont on préconiserait
l'emploi dans les banques, les études de
notaire, les bureaux de poste, etc.
Ce serait un moyen sûr d'éviter un grand
nombre de faux, bien que l'ingéniosité des
faussaires soit très grande, on le sait.
LES FAUSSES TRAITES
M. Lacan et ses complices comptaient-ils
toucher des fausses traites signées des noms
les plus célèbres du théâtre ?
C'est une bien singulière affaire que celle
de la fausse traite de 4 millions, 4 millions
que des escrocs essayèrent de s'approprier
au préjudice du baron Henri de Rothschild. Tant par l'audace des faussaires
que par la personnalité choisie comme victime, cette histoire d'escroquerie mérite
d'être contée, d'autant que toute la lumière
semble ne pas encore avoir pu être faite.
Voici plus d'un an et demi, M. Camoin,
directeur du théâtre Pigalle, se tuait dans
un terrible, accident d'auto, près de Montélimar, alors qu'il ralliait une petite propriété qu'il avait dans le Midi.
M. Lacan, un courtier en vins, âgé de
trente-huit ans, demeurant à Marseille,
un homme petit et sympathique, à la
parole facile, était de ses amis.
M. Camoin avait alors entreposé, dans
un garde-meuble de Marseille, différentes
caisses, dont l'une contenait diverses pièces
et dossiers très importants.
A la mort de M. Camoin, M. Lacan, qui
se montra d'un grand dévouement, proposa
aux héritiers du directeur du théâtre
Pigalle, M. et Mme Fouilloux, son gendre
et sa fille, de retirer du garde-meuble cette
précieuse caisse et de la leur faire parvenir.
Mme Fouilloux accepta ; cependant, quand
elle la reçut à Paris, elle remarqua qu'elle
avait été fouillée. Sans inventaire de ce
qu'elle contenait, il fut impossible de
déceler si quelque pièce avait été dérobée.
Un an se passe.
Or, il y a quelques jours à peine, deux
hommes se présentaient aux guichets de
la succursale de la Banque de France, à
Tarascon. Ils étaient porteurs d'une traite
de quatre millions, signée « Henri de Rothschild ».
Les deux compères espéraient que la
traite présentée par la Banque de France
à la banque Rothschild serait facilement
payée.
Cependant, l'importance de la somme
éveilla l'attention des services qui étaient
chargés d'avaliser le billet. M. de Rothschild reconnut sa signature, mais le nom
porté à ordre de paiement lui était totalement inconnu.
Plainte fut déposée. M. Aubry, juge d'instruction, fut chargé de l'affaire. Rapidement,
l'enquête permit d'établir que les deux
escrocs n'étaient autre que M. Lacan luimême et un de ses amis, M. Antonin Pascal,
demeurant également à Marseille.
Pendant l'année écoulée, les deux hommes
avaient eu tout le temps pour falsifier une
pièce trouvée dans la fameuse caisse de
M. Camoin, pièce dont ils ne gardèrent que
la précieuse signature : « Henri de Rothschild ».
Avec une adresse remarquable, ils
lavèrent à l'acide un « aval » que le baron
de Rothschild donnait à M. Camoin chaque
fois que, pour son compte, il traitait une
affaire de théâtre.
La pièce était si habilement maquillée
qu'il faut croire que la fraude aurait passé
inaperçue si 'a somme marquée avait été
moins importante.
Sur mandat d'amener, la police judi-
ciaire arrêta, à Marseille, Lacan et PascaL
Tous deux protestèrent de leur innocence,
mais un examen de la traite aux rayons
ultra-violets avait décelé la vérité.
Les deux complices furent arrêtés au
moment où ils téléphonaient à la Banque
de France de Tarascon pour demander si
le billet avait été payé... Le système de
défense des deux inculpés s'avéra invraisemblable, mais ils surent si bien brouiller
les cartes qu'à l'heure actuelle encore, on
ne sait s'ils ont agi seuls ou avec l'aide d'un
troisième complice.
Lacan déclara :
— Je connaissais bien Camoin. Avant sa
mort, un jour où je le rencontrai, il cherchait à emprunter 3 600 000 francs. Je
lui proposai de trouver cette somme, grâce
à l'entremise de Pascal. Notre commission
devait être de 400 000 francs ; j'ignorais
que le billet signé Henri de Rothschild
était un faux !...
Lacan ne craignait pas, après avoir été
l'instigateur d'une excroquerie qui devait
lui rapporter 4 millions, de se présenter
sous le jour d'un honnête intermédiaire.
— Dans ce cas, qui a fourni l'argent ?
— Il m'est impossible de vous répondre,
je suis lié par le secret professionnel...
Et, dans toutes leurs déclarations, Pascal
et Lacan parlèrent, sans jamais le nommer,
de ce mystérieux prêteur. On crut un instant qu'il ne s'agissait que d'un personnage
imaginé pour les besoins de la cause ;
cependant, il se pourrait qu'il existât,
mais son rôle serait tout autre.
Un garagiste d'Arles qui, plus d'une fois,
a déjà eu affaire à la police fut soupçonné,
puis on songea que Lacan, dont les affaires
périclitaient depuis des mois, avait peutêtre été contraint à son escroquerie par
un créancier sans scrupules.
Si le mystérieux prêteur n'existe pas,
les enquêteurs ne sont pas certains que
Lacan et Pascal n'aient pas eu de complice.
Les amis de M. Lacan croient que le
courtier a agi sous l'instigation de quelqu'un, ou dans un moment de grande
dépression.
— N'oubliez pas, disent-ils, que c'était
un excellent homme, mais il était gazé et
d'une santé précaire ; de plus, sa situation
financière était désespérée.
« Ses pertes d'argent, son état de santé
n'auraient-ils pas troublé son cerveau déjà
malade ?
Le plus étonnant est que M. Lacan, en
possession de diverses pièces ayant appartenu à M. Camoin, pièces "signées par
différentes personnalités du monde du
théâtre, semble avoir voulu profiter, sur
une plus grande échelle encore, de ces
signatures célèbres.
M. Quinson, directeur du Palais-Royal,
ne fut-il pas prévenu mystérieusement,
il y a quelques semaines, qu'on allait
essayer de lui dérober un million à l'aide
d'une fausse traite ?
Faut-il voir là une nouvelle preuve de
la culpabilité de Lacan, ou est-ce un fait
ne se rattachant en rien à la traite Rothschild ? L'enquête nous l'apprendra vraisemblablement dans peu de temps.
BERNARD
UN ATTENTAT MANQUÉ PIERRE SEGUY CONDAMNÉ
CONTRE MUSSOLINI
A CINQ ANS DE BAGNE
Voici, au cours du transport des cendres
d'Anita Garibaldi, le Duce Mussolini,
à la tête de son état-major fasciste. (K.)
LAUZAC.
Le Duce — rançon des honneurs et du
pouvoir — a failli être la victime d'un
attentat politique. Ce n'est pas la première
fois, au reste, que le dictateur italien est
en butte à de pareilles tentatives.
On a arrêté, place de Venise, un suspect
nommé Sbardelloto Angelo, qui était porteur de deux bombes de grande puissance
et d'un revolver chargé. Cet individu a
avoué qu'il voulait atteindre le chef du
gouvernement.
Sbardelloto, n'ayant pas pu mettre à
exécution son projet lors de la translation
des cendres d'Anita Garibaldi, attendait
une occasion plus favorable. Il était revenu
tout exprès de l'étranger. On s'attend à
d'autres arrestations. (K.)
Séguy avait dix-huit ans. Il rêvait de
«vivre "sa vie». Le 13 novembre dernier,
dans le rapide de Paris à Dieppe, il entreprit de rançonner les voyageurs.
« Haut les mains 1 » A l'américaine...
revolver au poing.
Séguy était mal tombé. M. Forné, commissaire spécial de la Sûreté générale,
sommé de donner son argent, se mît à
rire. Mais un autre voyageur, M. Ortiz,
ayant voulu intervenir, reçut une balle
dans le ventre. Poursuite... M. Forné
encaissa encore une balle au bras, et Séguy,
pendant ce temps, sautait du train en
marche.
Arrêté, le précoce bandit a eu une attitude pleurarde à l'audience. Il a récolté
cinq ans de travaux forcés, bénéficiant
de circonstances atténuantes : sa jeunesse,
sa folie... Les jurés n'ont pas été impitoyables. (R.)
LE REFUS DE DUNIKOWSKI
U ingénieur polonais Dunikowski, convié une (ois de plus à extraire de Cor de la pechblende,
a refusé sous différents prétextes. Il passera donc en correctionnelle. (R.)
LA FIN MISÉRABLE D'UN GRAND VOLEUR UN DRAME MONDAIN A LONDRES
fièvre ; Lasternas avait des maîtresses,
Pierre Lasternas, le premier clerc de
notaire de M« Girardin, avait toute la
confiance de son patron, chez qui il était
depuis de nombreuses années. Sa conduite
paraissait excellente, sa vie régulière.
Voici, avec un de ses avocats Mv Dolmann,
dans les couloirs du Palais- de justice,
Pierre Lasternas, mort de tuberculose à
Vinfirmerie de la prison dans les conditions
que relate notre article. Fin misérable de
qui escroqua 19 millions. (L.)
Un beau jour, Pierre Lasternas vint
avouer au commissaire de police du quartier Opéra qu'il avait détourné dix-neuf
millions...
Personne ne voulut le croire ; on parla
de folie subite. Hélas ! une vérification des
livres devait permettre de laire constater
la réalité des détournements.
Lasternas jouait aux courses, avec
des automobiles, une vie en partie double.
L'escroc s'était si bien entendu à cacher
son jeu, que sa femme, que ses enfants,
écrasés de chagrin et de honte à cette
nouvelle, ne s'étaient jamais doutés de
rien ! On le considérait comme un bon
mari, comme un bon père de famille.
Naturellement, Lasternas, que M" Campinchi avait accepté de défendre, fut incarcéré. Au bout de quelque temps, sa santé
donnant des inquiétudes, on le transféra
à l'infirmerie de la prison de Fresnes.
C'est là que, rongé par la tuberculose,
miné peut-être
aussi par le remords,
l'ancien clerc de notaire vient de mourir.
Fin misérable entre toutes d'un homme
qui avait mené la vie à grandes guides,
qu'un vertige soudain, inexplicable, avait,
un jour, jeté hors la route droite. Lasternas,
au dire de tous ceux qui l'approchèrent,
fut une victime à la fois du jeu et de l'amour.
Son patron, lui-même, ne s'est jamais
expliqué tout à fait l'épouvantable défaillance de celui que si longtemps ii avait pu
estimer.
L'action judiciaire, du fait de cette disparition, est close. Seul, le restaurateur
Symphorien Azémar, qui prenait les paris
de Lasternas, et le beau-frère de l'escroc,
Urbain Labeylié, qui servit d'intermédiaire,
comparaîtront en justice.
Abandonné de tous, sans une parole de
consolation, sans le secours de la famille
ou de la foi, le voleur Pierre Lasternas s'en
est allé. Dénouement bien digne de ce
qu'avait été sa vie. dénouement qui
conserverait toute sa valeur d'exemple
s'il pouvait arrêter, sur la pente fatale,
beaucoup de ceux qui veulent « vivre leur
vie ».
Après une cocktail-party, Michell Scott Siephen a été trouvé assassiné dans la demeure de
m
M * Atvira Dolorès Barneg, sa maîtresse (à gauche). Voici (à droite) fa maison de AF»*
Alvira Dolorès Barneg, dans Vune des banlieues les plus agréables de Londres, où s'est déroule
ce crime mystérieux, sur lequel la police observe toute discrétion (W. W.)
13
lectures philosophiques ; avec cela économe.
Puis,brusquement,éclate la crise sanguinaire *
il
tue. Mais aussitôt, il redevient comme aupa-'
(Suite de la page 11.)
ravant. L'argent dérobé, il en donne une
grande partie à sa mère et à ses sœurs.
suite de la crise ; pour se consoler, il s'était
Avec la même sentimentalité, il va embrasser
adonné à la boisson, était tombé malade
son amie qui ne se doute de rien. Pas un
et, finalement, avait été interné dans une
instant, son sang-froid ne l'abandonne, et
maison de santé comme fou dangereux.
quand on lit les descriptions de son voyage,
L'oncle du meurtrier, à cette époque,
était lui-même enfermé depuis longtemps envoyées par Ernst à certains de ses amis,
on se demande si le souvenir du crime
à la prison de Magdebourg. C'était un assasin, lui aussi : il avait tué son propre fils. Il n'est pas entièrement effacé de son cerveau.
Devant le tribunal enfin, il dépose d'une
l'avait tué « pour le sauver de la passion
voix basse mais calme, dans un style clair et
irrésistible de verser le sang, passion dont,
posé. Il est pâle, mais il l'a toujours été. Son
disait-il, toute la famille était atteinte ».
dos est un peu voûté, par habitude, non par
Poussé par cet instinct sanguinaire, cet
remords.
oncle, pendant plusieurs années, avait attaPrès de lui, deux femmes sont assises au
qué les promeneurs solitaires, qu'il guettait
banc des accusés, sa mère et sa plus jeune
dans les montagnes du Harz. Il éprouvait
sœur, Johanna, inculpées de complicité
une joie sadique à leur plonger son couteau
pour recel.
dans le corps et à voir jaillir le sang. Et,
La tête du coupable se joue.
quand il commettait cet acte, il savait qu'il
Les experts viennent déclarer que, malgré
obéissait à une sorte de folie, mais il le commettait tout de même... et c'est pour que son le lourd atavisme de la famille Reins, ils ne
se reconnaissent pas le droit d'invoquer la
fils n'en fît pas autant qu'il l'avait tué !
moindre irresponsabilité. Le ministère
Dans sa cellule de Magdebourg, l'oncle
public
est bref : il demande la mort. Le
meurtrier n'avait maintenant qu'une occudéfenseur fait appel à la pitié en rappelant
pation : analyser son propre cas, le discuter
avec uné lucidité effrayante et chercher dans l'histoire de la famille damnée. Ernst ne
trouve pas un mot pour se défendre.
les livres de savants comme Lombroso,
Il est condamné à mort.
Dostojewsky ou Forel, des explications qui
Et tandis que dans la prison de Moabit
le satisfassent.
on apprête la corde pour le pendre, dans sa
De tels éléments héréditaires prouvent-ils
cellule de Magdebourg, l'assassin des monque le jeune Ernst ne pouvait échapper à la
tagnes
du Harz ajoutait un chapitre noufatalité familiale ?
veau à l'histoire fatidique de la famille
Jusqu'à l'heure du crime, il s'était montré
doux, paisible, aimant les plaisirs raffinés, se ' Reins.
T. K.
plaisant à des excursions poétiques, à des
MARCHÉS D'ESCLAVES AD CONTINENT NOIR UNE FAMILLE DAMNÉE
On sait que, sous une forme déguisée ou
non, l'esclavage n'a pas complètement disparu du continent noir. On vend encore
des esclaves. Cela se pratique, comme de
juste, de façon plus ou moins secrète. Mais
>il est des régions où, en dépit de leurs efforts,
les blancs qui se sont attelés à la solution
■du vieux problème de l'esclavage ne
peuvent encore faire entendre, peu nombreux qu'ils sont, la voix de la raison et de
la justice.
Seraient-ils d'ailleurs compris ? II est
permis de se poser la question lorsqu'on
voit, comme sur notre document, un marché de chair d'ébène dans la Haute-Volta.
Cette photographie, prise à la dérobée,
donnera une idée de ce qui reste à faire,
en matière de police coloniale, pour arriver
à l'abolition totale de cette plaie du monde
moderne qu'est le trafic des esclaves.
Tous cés noirs des deux sexes, ramassés
dans leurs villages et concentres, .de par
la volonté de leurs chefs, sur une place
publique vont être vendus. Les personnages
du premier plan, qui sont des chefs de
tribus, marchandent entre eux, pendant
des journées entières, avant de se mettre
d'accord sur un prix total. Car il ne s'agit
pas de trafiquer des noirs pris un à un : on
s'est modernisé en Haute-Volta ; on travaille en stock. C'est par groupes de cent
ou de mille, en vrac, que l'on ramasse des
captifs et qu'on les emmène en échange de
quelque monnaie.
La valeur d'un esclave du sexe mâle est
d'ailleurs des plus minime. Vous pouvez
avoir un garçon de vingt ans, bien bâti,
robuste, apte aux plus dures besognes,
pour vingt sous. Une femme, elle, vaut
dix sous au maximum, parce que moins
résistante.
Quand un négrier a conclu le marché,
il n'a pas le droit de choisir. Dans la
masse grouillante et résignée, on sépare,
par tranches, autant de bétail humain
qu'il lui en faut : avec une longue corde
mince, on attache les hommes, l'un à
l'autre, par le poignet. Et la sinistre caravane prend la piste, pour aller travailler,
parfois, à plusieurs centaines de kilomètres.
Bien entendu, tant pis si les hasards
vous sépare de votre femme ou de votre
enfant f Tant pis si l'un part par le chemin
de droite, l'autre par le chemin de gauche.
Jamais les époux séparés ne se retrouveront. Ils ne pourront que gémir, loin l'un
de l'autre, si le fouet du gardien leur en
laisse le loisir.
Que peuvent les blancs contre ce commerce horrible, survivance d'un autre
âge ? Nous le répétons : pas grand'chose.
Dans ces régions, d'une part, les palabres
d'esclavage sont tenus secrets ; d'autre
part, que l'on s'occupe de leurs affaires et
ils vous le font bien voir. Il faudrait, pour
mettre fin à de pareils agissements, une
police internationale, puissante, organisée
sûr des bases solides. On y viendra sans
aucun doute.
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CES DAMES DE L'ARGENTINE
(Suite de la page 7.)
Que, du 6 au 12 avril, elle a rapporté 950
pesos, du 13 au 19 : 945 pesos, du 20 au 26 :
955 pesos, du 26 avril au 3 mai : 935, du
3 au 9 mai...
Et l'énumération continue...
Décidément, cette patronne est merveilleuse.
Tandis que je l'admire, elle me confie
encore :
— C'est que, voyez-vous, Mado s'est
spécialisée dans la magistrature. Etudiants
en droit, avocats, huissiers, greffiers,
juges au tribunal, forment le fonds de sa
clientèle. Dans le même milieu, on se fait
toujours des confidences. Quand une
femme est contente de sa modiste, elle la
recommande volontiers à ses amies et leur
dit : « allez-y de ma part, elle vous fera un
chapeau merveilleux, elle a des doigts de
fée ! » Quand un homme est satisfait d'une
de nos pensionnaires, c'est un peu la même
chose. Entre deux plaidoiries, le maître
confie à son confrère : « J'ai vu hier au
Trianon une petite femme, ah ! mon
cher, je ne vous dis que ça !... Une heure
après, l'autre est à la maison !
Et elle conclut, un peu cynique :
— Que voulez-vous, dans tous les métiers,
les spécialistes ont toujours fait fortune !
C'est sur ce mot que je prends congé de
la délicieuse petite Ginette, patronne «du
Trianon.
CHAPITRE VI
L,a ville maudite,
Jacquot la Rose brusquement a posé
son cocktail.
— Ah ! non, mon cher, s'écrie-t-il, tout
ce que vous voudrez, mais pas ça ! Demandez-moi plutôt de rentrer en France, mais
vous accompagner à Tucuman, jamais !
Je risquerais ma peau en la circonstance,
et la vôtre par-dessus le marché !
— A Tucuman ?
—. Oui, monsieur !
Et, repoussant les verres, il s'inclina vers
moi, mystérieux :
— Vous ne savez donc pas qu'il n'y a
plus un barbeau là-bas ? que le gouverneur
de la province et les autorités policières ont
pris des mesures terribles contre la corporation ? que la loi de Vaganze, qui réprime le
vagabondage spécial, ne badine pas, et que
c'est le cachot à perpétuité ? Alors, pardon,
et très peu, je ne suis pas bon !
14
— C'est dommage, dis-je, l'excursion à
deux eût été plus agréable.
Et je déclare, catégorique :
— Tant pis, j'irai donc seul !
Mon compagnon a tressailli légèrement.
Ses paupières clignotent, rapides.
— A quoi bon ? répond-il, essayant
encore de me convaincre de l'inutilité d'un
tel déplacement. Il n'y a rien d'intéressant
à Tucuman. Vous n'y trouverez que des
tôles dirigées par des femmes et vous en
reviendrez écœuré.
Mais ses arguments ne font qu'aviver ma
curiosité et je rétorque :
— Je ne suis pas de votre avis, j'estime
au contraire que je dois une visite à cette
ville originale. Son esprit de réaction m'intéresse. De plus, vous savez bien que je suis
venu en Argentine pour vivre dans l'atmosphère de tout ce qui forme la traite. Alors?..,
Et voilà que brusquement ses yeux s'illuminent.
—• Eh bien, après tout, vous avez raison.
Allez-y! fait-il, la voix un peu acide. Mais
si vous êtes un « vrai », un « pur », et que
vous regardiez de tous vos yeux Tes tôles
de Tucuman et leur misère, vous ne pourrez
jamais écrire que les hommes font le malheur des femmes en Argentine.
Je le rassure aussitôt.
—■ C'est justement pour toutes ces
raisons que je décide aujourd'hui de partir
au plus tôt pour cette cité intéressante ou
les filles ne sont plus présentées en cage
mais bel et bien en liberté.
Et tandis que mon compagnon ricane,
j'insinue :
— Seulement, il m'était très agréable,
avant mon départ, d'avoir quelques précisions sur le glorieux passé de cette province,
je vous avoue que j'avais beaucoup
compté sur vous.
Jacquot la Rose a pâli légèrement et
son regard d'une fixité étrange me laisse
comprendre qu'il relit en ce moment une
page de son histoire misérable. Un moment,
il reste silencieux, comme assommé. Puis,
soudain, il se redresse et d'une voix sourde,
comme saturée du fiel qui déborde jusque
sur ses lèvres, s'exclame :
— Tucuman !... Ah 1 oui, Tucuman !...
Quels souvenirs ! Mais aussi quelle tristesse 1
Quand on pense qu'il y a dix ans, c'était la
place la plus recherchée, et que maintenant, quelle boue ! Et vous voulez son histoire ! Elle est tragique dans sa simplicité.
« Ecoutez donc, la voici.
(A suivre.)
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15
V
POUCE-MAGAZINE
A Drancy, dans une crise de jalousie, un boucher, Eugène Van der Schumacher, a tué sa femme de deux coups de revolver, puis s'est fait justice.
Voici, à gauche, le meurtrier et, à droite, sa victime. Schumacher ne se tua
que plusieurs heures après sa femme. (R.)
L'enquête est officiellement ouverte en ce qui concerne l'incendie du
Georges-Philippar. On voit, sur notre cliché, le bateau en flammes,
pendant le sauvetage des passagers. (R.)
L'espion allemand Fritz Duquesne, dont nous parlions dans le
dernier numéro, assassin présumé de Kitchener, arrêté à NewYork, est emmené sous bonne garde au poste de police. Il n'a
pas parlé! (W. W.)
Un Australien, James Willson, avait
été ■ soulagé » à Paris de quatre
millions. La police a, identifié un
voleur, James Mùson, en fuite. (R.)
Bettina Hraunstein, étudiante en
médecine, soigna, pour appendicite
une jeune fille atteinte de congestion,
qui mourut. Beltina a été arrêiée. (R.)
Voici avec sa fille la célèbre star de cinéma
Marlène Diélrich. Elle est menacée par des
gangsters de se voir ravir l'enfant. (K.)
Ernest Lecture, employé dans une
agence du Paris Mutuel Urbain, a
disparu avec cinquante mille francs.
(R.) "
Le maire de Seiv- York, James Walker, accusé d'avoir louché des
sommes formidables à divers titres, est appelé à * s'expliquer »
devant la justice. Explications assez embrouillées, parait-il. (I. N.)
Une jeune femme, Marie Liévin, avait tué à coups de hache son beau-père, Gaston Perrin, qui la poursuivait de ses
assiduités. Elle a été condamnée à deux ans de prison. A gauche, au-dessus : l'arme du crime ; au-dessous : la meurtrière à l'audience; à droite : A/me Perrin, mère de Marie Liévin, déposa sans animosité, et chargea plutôt son défunt
mari, ivrogne et brutal. (R.)
IZétrange individu qu'est le Tchéco-Slovaque Symdra Prajzer a
comparu devant les Assises. Il avait tué un homme à coups de
revolver dans un débit de vins. Espion, trafiquant de coco, pourvoyeur de Buénos-Ayres. Cinq ans de réclusion. (H. M.)
Un billet de consigne perdu par M. Paul Duten
fut trouvé par un inconnu qui retire une valise
contenant quatre tableaux, dont Le Courbet,
(ci-dessus).
En Amérique, à Washington, la police vient de mettre en service
des automobiles blindées, d'un armement et d'une vitesse formidables pour la lutte contre les gangsters de plus en plus
dangereux. (I. N.)