dictionnaire pratique arabe-français

Transcription

dictionnaire pratique arabe-français
Dictionnaire pratique
Arabe-français
(arabe maghrébin)
Par Marcelin Beaussier
Mohamed Ben Cheneb
et Albert Lentin
Constitué du Dictionnaire pratique arabe-français de
Marcelin Beaussier dans l’édition de Mohamed Ben
Cheneb (1958) & de son Supplément par Albert Lentin (1959)
Introduction de Jérôme Lentin
Ibis Press
Paris
L’édition de cet ouvrage n’a bénéficié d’aucune subvention directe ou indirecte, publique ou
privée. L’association Alphatis et les éditions Ibis Press ont donc conjugué leurs efforts pour
faire aboutir sa publication.
Alphatis, association laïque fondée en 1976 et située à Paris, dispense des cours d’arabe
maghrébin. Rassemblant des personnes de provenances diverses, qui désirent apprendre à
communiquer dans cette langue à des fins personnelles ou professionnelles, Alphatis constitue
un lieu privilégié de rencontre de cultures et d’apprentissage linguistique. Autour de ses activités
d’enseignement, l’association contribue, par des recherches et la production de supports
pédagogiques, à la création d’outils adaptés au public francophone.
La réédition du dictionnaire de Beaussier répond pleinement à cet objectif.
L’arabe maghrébin, trop souvent déprécié, est la langue du parler quotidien. C’est aussi
une langue de culture pour le cinéma, le théâtre et la chanson. Le dictionnaire Le Beaussier
constitue un outil précieux pour intégrer les mécanismes de dérivation à partir des racines
consonantiques, qui ouvrent sur un champ sémantique étendu, et accéder à l’esprit de la langue
arabe maghrébine.
Informations sur les activités de l’association Alphatis : www.alphatis.fr
© Ibis Press, 2006
ISBN : 978-2-910728-55-7
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Tél. : 01 43 71 28 87 – Fax 01 43 71 22 85
[email protected] – www.ibispress.com
Présentation
C’est à l’heureuse initiative de l’association Alphatis que les éditions Ibis Press
rééditent, en fac-similé, le Dictionnaire d’arabe maghrébin de Marcelin Beaussier et le
Supplément réalisé par Albert Lentin. On ne peut que s’en réjouir, car ces deux ouvrages, qui
étaient depuis longtemps introuvables ou presque, rendront les plus grands services à tous
ceux qui, pour quelque raison que ce soit (histoire familiale, curiosité fraternelle, intérêts
professionnels …) sont désireux d’apprendre un des nombreux dialectes arabes du Maghreb
ou d’approfondir leur connaissance de l’arabe parlé en Afrique du Nord, ainsi qu’à tous ceux
qui, locuteurs natifs de ces dialectes, souhaitent trouver sur eux des informations précises, ou
retrouver le parfum d’un mot enfoui dans leur mémoire ou provisoirement oublié. Les uns
et les autres seront ainsi à même de mesurer l’immense richesse de ces parlers, trop souvent
dépréciés, parfois même méprisés, alors qu’ils sont porteurs de la culture des peuples qui les
parlent. Cette réédition rendra tout autant service aux spécialistes du Maghreb, dialectologues,
ethnologues, sociologues … comme aux spécialistes de la langue arabe car, malgré son âge,
“le Beaussier” reste sans conteste la référence en lexicographie arabe maghrébine, de même
que le Supplément demeure son indispensable complément.
Cette courte présentation est destinée à donner au lecteur – ou plutôt à l’utilisateur –
quelques rapides informations sur les auteurs, leurs ouvrages et leur apport, en les situant
dans l’histoire de la lexicographie du Maghreb, et à lui fournir quelques éléments propres à
lui en faciliter la consultation.
Marcelin Beaussier
Né à Paris en 1821 dans une famille de négociants marseillais dans laquelle on comptait
déjà, au siècle précédent, des consuls, des drogmans et des directeurs de comptoirs
commerciaux en Afrique du Nord, François Louis Marcelin Beaussier fait ses études en
France mais surtout à Tunis où il rejoint dès 1829 son père Marie Etienne Marcelin Beaussier,
qui y réside depuis 1823 comme négociant, et y restera jusqu’en 1854 (son oncle paternel y
est établi, quant à lui, depuis 1793).
En 1844, il débute une carrière d’interprète militaire en Algérie, dans laquelle il progressera
rapidement : interprète auxiliaire en 1844, titulaire de 3e classe en 1845, de 2e classe en 1846,
de 1e classe en 1850, il est dès 1854 interprète principal de l’armée d’Afrique. Il est affecté
à différents postes de 1844 à 1859 : à la division d’Alger, au Bureau Arabe (1844- 1846),
dans la colonne expéditionnaire du maréchal Bugeaud, à l’État-major de la subdivision puis
au Bureau Arabe d’Orléansville (1846-1847), à Blida auprès du général commandant la
C’est pour moi un devoir plus qu’agréable de remercier mon père, André Lentin, pour tout ce qu’il m’a
dit et raconté sur son père Albert Lentin. Je tiens aussi à remercier Alain Messaoudi qui a généreusement
mis à ma disposition les nombreuses informations – abondamment utilisées ici – qu’il a rassemblées sur
Marcelin Beaussier, Albert Lentin et C. L. Sonneck, lors du travail de préparation de sa thèse en cours (sous la
direction de Daniel Rivet, Paris 1), intitulée Savants, conseillers, médiateurs : les arabisants, la connaissance
du monde arabe et le service de l’État dans la France coloniale (vers 1830-vers 1960).
division d’Alger (1847- 1858), et enfin auprès de la direction divisionnaire des affaires arabes
de la même division (1858-1873). Dans ces différents postes, il prend part activement à de
nombreuses campagnes militaires aux quatre coins de l’Algérie, et il est cité plusieurs fois à
l’ordre du mérite, pour son courage au combat ou, en 1859, pour avoir affronté le choléra qui
décimait les troupes lors d’une campagne sur la frontière du Maroc.
“Épuis[é] avant l’heure”, il doit “renoncer à la vie active” et, à partir de 1859-1860, il se
consacre à la recherche et principalement à la rédaction de son Dictionnaire pratique arabefrançais, qui paraît en 1871. Il meurt à Alger en février 1873. C’est son ami Féraud qui, à
ses obsèques, lui rend hommage.
Le Dictionnaire de Beaussier et la révision de Ben Cheneb
C’est donc en 1871, deux ans seulement avant sa mort, que paraît chez Bouyer à Alger
le Dictionnaire pratique arabe-français contenant tous les mots employés dans l’arabe
parlé en Algérie et en Tunisie ainsi que dans le style épistolaire, les pièces usuelles et les
actes judiciaires de Beaussier. En 1887 paraît, chez Adolphe Jourdan cette fois, une seconde
édition, inchangée (seuls les Errata et additions sont disposés sur un plus petit nombre de
pages).
Le volume commence par un Avant-Propos (p. 5-7, = p. 5-8 de l’édition de 1931), puis
une Esquisse des caractères spéciaux à la langue parlée (p. 8-9), que suivent De quelques
difficultés qui se présentent dans les lettres et pièces arabes (p. 9 bas-10) et Quelques mots
sur la transcription de l’arabe en caractères français (p. 10-12). La numérotation repart alors
et l’Explication des abréviations et des signes (p. 1-2) précède le Dictionnaire proprement
dit (p. 3-764), dont on peut estimer grossièrement qu’il traite au moins 30 000 mots. En fin
de volume se trouvent les Errata et additions, p. 1 à 8, très inégalement répartis : alors que
ceux des p. 1 à 7 portent sur les p. 2 à 157 du dictionnaire, ceux de la seule p. 8 (séparée en
deux colonnes où cependant chaque ligne est à lire de gauche à droite sans tenir compte de
cette division) concernent les p. 172 à 747. En 1880, Louis Machuel (1848-1922), chargé
par les héritiers de Beaussier (mort célibataire) de réviser le dictionnaire, n’obtient pas du
ministère de l’instruction publique la mission qu’il projetait à Constantine afin de recueillir
du lexique de l’est algérien, insuffisamment représenté dans l’ouvrage. Une édition révisée
est cependant annoncée par Jourdan en 1887, dont un fascicule semble avoir paru.
C’est finalement Mohamed Ben Cheneb (1869-1929) qui entreprend de réviser et d’augmenter
le Dictionnaire. Son travail paraît à Alger, chez Jules Carbonel, en 1931, soit deux ans après
Nécrologie de Marcelin Beaussier, Revue Africaine, 17, 1873, p. 76-77. En 1872, un rapport d’inspection, qui
loue son excellente connaissance de l’arabe, parle de sa “constitution délabrée”.
Laurent-Charles Féraud (1829-1888), lui aussi membre, de 1848 à 1860, du corps des interprètes de l’armée
d’Afrique auxquels il a consacré un ouvrage (Les interprètes de l’armée d’Afrique (Archives du Corps).
Alger, Jourdan, 1876), mais aussi historien, peintre orientaliste et diplomate.
Il publie aussi, en 1924, une édition revue et corrigée du Dictionnaire d’arabe parlé de son maître Belkassem
Ben Sedira.
II
sa mort. C’est véritablement à un nouveau Dictionnaire qu’on a désormais affaire, car le savant
algérien l’a considérablement enrichi. Né à Médéa, et ayant vécu à Constantine (où il avait
été, de 1898 à 1901 professeur à la médersa) ainsi qu’à Alger (où il est professeur à la Faculté
des Lettres à partir de 1924), on peut penser que ses ajouts proviennent essentiellement de ces
villes (de même qu’il précise, dans l’introduction de ses Proverbes arabes de l’Algérie et du
Maghreb qu’il les a “recueillis personnellement surtout à Alger et à Médéa”). Quantitativement,
son apport est difficile à évaluer précisément : entièrement recopié (par deux mains différentes,
comme il apparaît nettement lorsqu’on passe, à la page 385, à une calligraphie plus claire), le
texte prend souvent plus d’espace que l’autographe de Beaussier, ce qu’on constate aisément en
comparant les deux textes lorsqu’ils coïncident exactement. Des sondages permettent cependant
de penser que les ajouts de Ben Cheneb représentent une augmentation de près de 20% de la
matière lexicale par rapport au travail original de Beaussier. On peut constater aussi que les
“observations” que William Marçais (1872-1956) avait publiées en 1905 (v. plus loin) ont été,
pour l’essentiel, intégrées. C’est cette édition corrigée et augmentée par Mohamed Ben Cheneb
qui est devenue classique, et les louanges unanimes qui, dans le milieu arabisant, avaient
accueilli la parution du travail de Beaussier, s’étendront comme naturellement à la version
remaniée par Ben Cheneb, dont l’important travail – pourtant mis en valeur par Jules Mirante
dans sa Préface, mais nulle part présenté avec précision –, n’a peut-être pas toujours été reconnu
à sa juste valeur. C’est cette édition, bien sûr, qui est rééditée dans le présent volume.
Albert Lentin
Albert Désiré Jean Lentin naît à Aïn Abid (Constantine) en 1884. Après avoir passé sa
petite enfance à Mansourah des Bibans, il grandit (de 1893 à 1903) à El Hassi, près de Sétif,
dans une ferme dont son père, retraité de la gendarmerie, avait pris la gérance ; ses parents
sont les seuls européens du village. Après des études secondaires au collège de Sétif, il est
bachelier à Constantine (1901-1902). Dans l’obligation de gagner immédiatement sa vie, il
entre brièvement aux Ponts et Chaussées puis se tourne vers des études d’arabe. Il obtient
le brevet d’arabe (1904) et part comme répétiteur au collège de Mostaganem (1905-1906).
En congé d’inactivité, il prépare le diplôme d’arabe à Alger qu’il obtient en 1907. Il est
successivement répétiteur au collège de Bône (1907-1908), au collège de Sétif (1908-1911
– où il est un an remplaçant en qualité de professeur), délégué pour l’enseignement de l’arabe
au collège de Philippeville (1911) puis à nouveau à Sétif (1911). Nommé professeur délégué
de sciences à la médersa de Tlemcen (juin 1912), il ne prend pas le poste car, admis au
certificat d’aptitude à l’enseignement de l’arabe dans les lycées et collèges en juillet 1912, il
Avec peut-être quelque retard, comme le laisse supposer ce qu’écrit en 1881 un autre grand lexicographe
de l’arabe, Reinhart Dozy, à la p. xii de la préface à son Supplément aux dictionnaires arabes, 2 vol., Brill,
Leiden, 1881 : “une de ces œuvres qui ne sont pas connues autant qu’elles le méritent, faute d’avoir été
signalées en son temps par quelque vigilante senti­nelle de la science”.
Qu’il pourra mener à bien grâce à un prêt privé.
III
obtient une chaire d’arabe comme professeur certifié délégué dans les fonctions de professeur
d’arabe au collège de Médéa (1912-1914), puis (remplacé à Médéa par E. Lévi-Provençal) au
collège de Philippeville (1914-1920), où il comptera parmi ses élèves Ferhât ‘Abbâs (18991985). C’est à cette époque qu’il séjourne souvent à la ferme de Cherfa (au nord de Sétif, en
bordure de la Petite Kabylie) dont son beau-père est propriétaire. Il y recueille du folklore et
de nombreux faits linguistiques. Malade des bronches, il n’est pas mobilisé en 1914 malgré
ses efforts. Il obtient le Diplôme supérieur d’arabe à Alger en février 1915. Il donne des cours
complémentaires à l’école secondaire de jeunes filles (1914-17) et à l’école d’agriculture
(1914-1916). En 1921, après une année comme professeur adjoint au Lycée d’Alger, il
est affecté au lycée de garçons de Constantine, où il restera jusqu’à sa retraite en 1945. Il
enseigne également à l’école normale de jeunes filles (1922-1923) et au lycée de jeunes filles
(1924-1926 et 1930). Il est souvent sollicité pour faire passer divers examens ou concours
comme les “Primes d’arabe” de première et seconde classe, importantes dans la carrière des
fonctionnaires. Enfin, il succède à Auguste Cour (né en 1866)10 à la chaire publique d’arabe
de la ville (rattachée à la Faculté des Lettres d’Alger) où il est chargé de cours de 1933 à 1946,
année où il quitte l’Algérie et s’installe à Paris. C’est pendant sa retraite qu’il rédigera son
Supplément au dictionnaire de Beaussier, fruit d’une collecte menée tout au long de sa carrière
itinérante en Algérie. C’est l’œuvre principale qu’il a laissée. Ses autres travaux (traductions,
études …) ont été publiés dans des recueils collectifs ou dans des journaux ; de façon plus
discrète encore, ils étaient souvent “en vente chez l’auteur”. Il faut dire qu’Albert Lentin ne
se sentait doute pas au départ une vocation d’arabisant : ce sont surtout les circonstances, on
l’a vu, qui l’ont conduit à utiliser professionnellement ses connaissances en arabe ; en fait, il
aurait désiré être germaniste. Par ailleurs et surtout, il se considérait comme un poète11. Il a
publié d’ailleurs, tout au long de sa vie, de nombreux recueils, en Algérie ou en France12.
Qui, bien plus tard, éprouvant des difficultés à faire des discours publics en arabe moderne, aurait déclaré
à son ancien professeur : “Ah ! Vieux Cheikh, j’aurais mieux fait de vous écouter et de travailler davantage
mon arabe !”.
En particulier des Contes algériens de la région du Mégris, que l’auteur de cette présentation espère publier
prochainement. Albert Lentin, qui n’était pas berbérisant, a travaillé dans la zone arabophone, où on note une
influence berbère certaine. C’est de cette région que proviennent par exemple les Contes de la tradition orale
kabyle - Dits par Helima Laâdj , transcrits et adaptés par Larbi Rabdi, L’Harmattan, Paris, 2006.
Il se présentera sans succès à l’agrégation d’arabe en 1921, 1922 et 1923. Ces échecs ont-ils à voir avec un
certain antagonisme entre arabisants “locaux” et universitaires de la métropole ?
10 Auteur entre autres de L’établissement des dynasties des chérifs au Maroc et leur rivalité avec les Turcs
de la régence d’Alger : 1509-1830, Leroux, Paris, 1904 (rééd. Bouchêne, 2004) ; Catalogue des manuscrits
arabes - Médersa de Tlemcen, Alger, 1907 ; Un poète arabe d’Andalousie : Ibn Zaïdoün, Constantine, M.
Boet, 1920 ; “La poésie populaire politique au temps de l’émir Abdelqader”, Revue Africaine 59 nos 296-297,
1918, p. 458-493 ; “Constantine en 1802 d’après une chanson populaire du Cheikh Belqasem Er-Rahmouni
El-Haddad”, Revue Africaine 60 n° 299, 1919, p. 224-240.
11 En 1935, un inspecteur d’académie clairvoyant note qu’il est “un littéraire et un poète”.
12 Voir aussi par exemple l’Anthologie des poètes contemporains, t. III, 1921 et t. IV, 1922, éditions de la
Revue artistique et littéraire, Paris ou Le Nouveau Romantisme, numéro hors-série (16e année, 1950).
IV
Deux hommes et leur œuvre
Comme on l’a vu, rien ne rapproche particulièrement l’auteur du Dictionnaire de celui du
Supplément. Beaussier a disparu depuis plus de dix ans quand Lentin voit le jour, et ils meurent
à un siècle d’intervalle. Le premier participe aux débuts de la colonisation de l’Algérie et, interprète de l’armée d’Afrique, prend même part aux combats. Le second fait une très honorable
carrière de professeur d’arabe13, achevée dans l’enseignement supérieur. Les deux hommes
ont pourtant deux traits au moins en commun. On relèvera tout d’abord que, franc-maçon,
Beaussier avait dû renoncer, en 1850, ses idées étant jugées trop “avancées” (il était considéré
comme le chef de file des “démocrates et socialistes”), à être vénérable de la loge de Blida. Si
Lentin n’appartint que très fugitivement, dans sa jeunesse, à la franc-maçonnerie, il appartint
pendant plus de vingt ans à la société théosophique de France. Ses préoccupations spiritualistes l’inclinaient au syncrétisme entre les grandes religions de l’humanité (avant de le ramener,
dans la dernière période de sa vie, au christianisme) et, sur le plan politique, il était, comme
beaucoup à l’époque, d’une sensibilité radicale-socialiste. Plus frappant est le fait que les deux
hommes, excellents arabisants l’un et l’autre, appartiennent de fait à cette “terre d’Afrique”,
pour reprendre le vocabulaire de l’époque. L’un y est venu encore enfant, l’autre y est né, a
grandi dans un village où tous ses compagnons de jeu étaient des petits algériens, comme on
ne disait pas encore. Il serait exagéré de parler de mixité sociale, et encore moins de rapports
égalitaires ; il n’en reste pas moins qu’il y avait là, à bien des égards, plus qu’un commerce,
une réelle intimité14, en particulier sur le plan linguistique qui nous intéresse ici. Beaussier et
Lentin sont bilingues (français et arabe dialectal). S’ils ont aussi étudié la langue “savante”, ce
ne sont pas des arabisants formés uniquement en bibliothèque, mais des arabisants “de terrain”.
C’est ce qui donne à leur profonde connaissance de l’arabe parlé sa richesse, sa fiabilité, et
leur confère aussi cette capacité à distinguer les registres : la vision nuancée, et dénuée de tout
purisme, qu’ils donnent, dans leurs dictionnaires, de la complexité sociolinguistique de cette
langue est tirée d’une longue et directe expérience. On ajoutera que la multiplicité des lieux
qu’ils ont connus, du fait de la vie itinérante imposée par leur profession, enrichit d’autant
l’information lexicale qu’ils nous livrent (de ce point de vue, le Dictionnaire et son Supplément
se complètent heureusement). Une connaissance si intime de la langue ne peut s’acquérir, il
importe de le souligner, sans un réel intérêt15 pour les gens qui la parlent. La situation coloniale
et ses violences, la conviction paternaliste d’apporter la “civilisation” aux populations “indigènes” ne l’exclut pas en effet, pour paradoxal que cela puisse paraître ; sans lui, on imagine
d’ailleurs difficilement une attention si constante et si soutenue. Ainsi nos auteurs nous ont13 Dans sa Préface au Supplément, Philippe Marçais évoque (p. III) un “maître plein de modestie”.
14 Dont, pour ce qui concerne Albert Lentin, on peut juger de la nature et des limites en lisant les souvenirs,
intitulés “Jours d’el-Hassi (1893-1903)”, qu’il a publiés dans la Revue africaine (n° 105, 1961, p. 49-97 et
251-293).
15 “Il paraît difficile d’être un bon dialectologue sans nourrir une certaine vocation de contacts humains”
(Préface de P. Marçais, p. III). Par ailleurs W. Marçais, inspectant Albert Lentin en 1935, appréciait déjà
qu’il “s’intéresse à l’évolution de la société indigène et aux courants d’idées qui traversent les jeunes
générations”.
ils légué, dans le domaine de la lexicographie de l’arabe maghrébin – comme d’autres dans
d’autres disciplines – une somme de connaissances et des instruments de travail précieux, qui
transcendent l’époque qui les a vu naître, et dont il convient, comme on le fait heureusement
de plus en plus aujourd’hui, d’analyser les complexes et diverses motivations en se gardant des
procès d’intention.
La lexicographie maghrébine avant et après Beaussier
L’état de la discipline est décrit à la page 6 de l’Avant-Propos de Beaussier, brièvement
mais à peu près complètement. Si W. Marçais, introduisant ses propres Observations sur le
Dictionnaire (v. ci-après), emploie, pour louer l’ouvrage de Beaussier, des termes sans doutes
trop sévères pour ses prédécesseurs16, il est vrai que, malgré les mérites des dictionnaires de
T. Roland de Bussy, d’A. Paulmier (français-arabe), et de quelques autres, dont J.-J. Marcel
(français-arabe également)17, non cité dans l’Avant-Propos, on ne disposait pas d’un grand
dictionnaire arabe-français pour l’arabe dialectal d’Afrique du Nord, ou même de l’un de ses
pays18. Le Gouvernement, conscient de cette situation, institua fin 1852, comme le rappelle
Beaussier, deux prix de 5 000 francs chacun, destinés aux deux meilleurs dictionnaires françaisarabe et arabe-français , “cet essai infructueux”, conclut-il non sans ironie, “fut le seul tenté
par l’administration”. On voit que même s’il avait quelques devanciers, le Dictionnaire de
Beaussier, fruit, comme la plupart des ouvrages de ce type, d’une initiative individuelle, fut
non seulement un ouvrage pionnier, mais marqua de façon décisive les études lexicographiques
maghrébines, pour lesquelles, comme on l’a dit, il reste, plus d’un siècle après sa parution
– dans la version augmentée par Ben Cheneb – un instrument de travail fondamental.
Il faut signaler ensuite, du côté de la lexicographie algérienne, la parution, l’année suivant
celle du Beaussier, soit en 1872, du Dictionnaire français-arabe pour la conversation en
Algérie, d’Auguste Cherbonneau (1813-1882), qui comporte une transcription phonétique
– dans les limites de l’époque – des mots arabes. Mais il s’agit donc là encore d’un
dictionnaire français-arabe. Bientôt paraissent les premières éditions des dictionnaires (arabe
(algérien)-français en 1882 et français-arabe algérien en 1886) de Belkassem Ben Sedira
(1846-1901), qui seront augmentés et plusieurs fois réédités. Pour l’Algérie et la Tunisie, un
autre dictionnaire français-arabe a été publié en 1908 par A. Bakir-Khodja.
16 “Ce gros ouvrage émerge magnifiquement du flot des “méthodes pratiques”, des “ vocabulaires” […] qui
inonda de façon si fâcheuse, pendant de longues années, le domaine de l’orientalisme algérien.” (Marçais
Quelques observations …, p. 4/410).
17 L’orientaliste Jean-Joseph Marcel (1776-1854) avait fait partie de l’expédition d’Égypte où il avait été
chargé de diriger l’imprimerie établie au Caire pendant l’occupation française. Essentiellement historien et
numismate, et directeur de l’imprimerie du Gouvernement jusqu’en 1814, il publia en 1830 puis, en 1837,
augmenté et étendu à l’Égypte, un Vocabulaire franco-arabe des dialectes vulgaires africains … qui connut
par la suite, cette fois comme Dictionnaire français-arabe …, de nombreuses rééditions augmentées (sous des
titres parfois légère­ment différents), y compris après sa mort.
18 R. Dozy, ajoutait bien, à la suite du passage cité ci-dessus note 4 : “c’est le meilleur des dictionnaires de la
langue moderne qui ont l’arabe avant le français”.
VI
Sinon, après la parution du Beaussier, et durant toute une période où fleurit la dialectologie
maghrébine, œuvre essentiellement, pour des raisons évidentes, de savants français (mais on
ne saurait oublier les travaux de savants comme H. Stumme ou A. Fischer), les nouveaux
apports à la lexicographie maghrébine seront constitués des lexiques, parfois importants,
que les arabisants adjoignaient à leurs monographies, quand ils ne se contentaient pas
de recenser simplement les mots qui ne figuraient pas dans le Beaussier, ou y figuraient
avec d’autres significations. Pour leur usage personnel, ils ne manquaient pas “de couvrir
d’utiles annotations les marges de [leur] exemplaire de travail” (W. Marçais, Quelques
observations…, p. 4/410)19. En 1905, William Marçais publie Quelques observations sur le
Dictionnaire pratique arabe-français de Beaussier, d’abord dans un recueil collectif, puis
en volume indépendant. En une petite centaine de pages, il y donne d’intéressants et utiles
compléments, avec de nombreuses références. Pour l’essentiel, on l’a dit, ces Observations
seront incorporées par Ben Cheneb dans son édition.
Pour l’Algérie en particulier, on ne dispose guère, aujourd’hui encore, et malgré les efforts
des uns et des autres, d’un nouveau dictionnaire qui ferait en quelque sorte le bilan cumulatif
de tous ces apports. On signalera cependant la parution récente (2003) d’un bon dictionnaire
arabe-français, basé sur le dialecte de Sidi Bel Abbès, par J. Madouni-La Peyre, qui d’ailleurs
précise soigneusement si les mots qu’elle a recueillis figurent ou non dans le Beaussier.
Pour la Tunisie, les dictionnaires arabe-français et français-arabe d’A. Nicolas, qui datent de
la fin des années trente, sont utiles, mais de dimensions relativement modestes. C’est de 1958
à 1961 que paraît, en huit volumes et près de 4500 pages le monumental Glossaire des Textes
arabes de Takroûna de William Marçais et Abderrahman Guîga. Cette contribution à l’étude
du vocabulaire arabe, comme l’indique son titre, est une véritable mine ; il faut cependant
remarquer que même si leur ouvrage est d’une incomparable richesse, et dépasse de loin la
plupart des dictionnaires existants, il ne s’agit pas stricto sensu d’un dictionnaire, les auteurs
ayant traité seulement des mots qui apparaissent dans leurs textes. Sont encore à mentionner,
outre les travaux d’A. Louis, le lexique que G. Boris a consacré au parler arabe des Marazig
(1958) ou, plus récemment, un intéressant dictionnaire du parler de Sfax (Al-Zawarî et AlŠarfî, 1998).
19 À ce propos, signalons au lecteur l’existence, à la Bibliothèque Interuniversitaire des Langues Orientales
(4 rue de Lille 75007 Paris), sous la cote ARA.I.81, d’un exemplaire de la 1e édition du Beaussier (Alger,
1871) ayant appartenu à C. L. Sonneck, entièrement interfolié et comportant, de sa main, de nombreuses
additions. Arrivé en Algérie peu après sa naissance, Constantin Louis Sonneck, (Paris, 1849 – Paris, 1904)
y sera interprète militaire à partir de 1867 (il sera interprète principal en 1888), affecté à divers postes
(Dra el Mizan, Boghar, Laghouat, Ténès, Sétif, Bou Saada, Cherchell, d’Aumale, Dellys, Alger, Miliana,
Constantine, Blida), avant de terminer sa carrière à Paris à l’État-major de l’armée et aux services de l’Algérie
du Ministère de l’Intérieur, et d’enseigner l’arabe à l’École coloniale. On connaît particulièrement, parmi ses
travaux, “Six chansons arabes en dialecte maghrébin, publiées, traduites et annotées” (Journal asiatique, 9e
série, 1899, vol. 13, p. 471-520 ; vol. 14, p. 121-156 et 223-257) et surtout Chants arabes du Maghreb, étude
sur le dialecte et la poésie populaire de l’Afrique du nord, Paris : J. Maisonneuve, 1902, 1904 et 1906 (I.
Texte arabe ; II. Fasc. 1. Traduction et notes ; II. Fasc. 2. Introduction et glossaire), dont la publication sera
achevée par O. Houdas.
VII
Pour le Maroc, les dictionnaires arabe-français et français-arabe d’H. Mercier, parus
d’abord dans les années quarante, puis réédités, sont consistants. Mais c’est à partir de 1993
seulement que paraît, grâce aux soins de Z. Iraqui-Sinaceur, le grand Dictionnaire Colin
d’Arabe dialectal marocain. La matière de ce dictionnaire – les fichiers laissés par G.-S.
Colin – sera reprise, et augmentée des apports des travaux de nombreux dialectologues, par
A.-L. de Prémare dans Langue et culture marocaines - Dictionnaire arabe-français, qui
paraît entre 1993 et 1999.
Pour la Mauritanie enfin, on dispose maintenant de l’important Dictionnaire hassâniyyafrançais de Catherine Taine-Cheikh (8 volumes parus, jusqu’à la lettre ghayn, depuis 1988).
Ce rapide tour d’horizon, nécessairement incomplet, montre assez que, même si les efforts
n’ont jamais cessé et même si, heureusement, ils ont repris depuis une vingtaine d’années,
augmentant très sensiblement nos connaissances, le Dictionnaire de Beaussier reste, avec son
Supplément, indispensable à quiconque s’intéresse au lexique des parlers arabes du Maghreb
comme seul véritable dictionnaire “généraliste”, à la fois très complet et maniable20.
Grands mérites et petits défauts du Beaussier ; pour faciliter la consultation
La matière recensée par Beaussier dans son dictionnaire est considérable : chaque page
contenant en moyenne 25 mots (et nombre de locutions), il comporte au moins, on l’a dit,
quelque 30 000 mots.
L’auteur indique bien dans son Avant-Propos, la façon dont il a procédé, et la nature et la
provenance de sa documentation. On ne reprendra donc pas ce qu’il dit, mais on fera observer
que le matériau qu’il livre est plus vaste que ce que sa modestie l’amène à en dire : tout ce
qu’il a récolté lui-même, en Algérie et en Tunisie, et auprès de nombreux collègues, fait que
son dictionnaire couvre bien ces deux pays, mais aussi dans une mesure non négligeable, le
Maroc (les mots marocains sont d’ailleurs dûment signalés, et ils ne sont pas rares) et même,
dans une moindre mesure, la Tripolitaine libyenne. Par ailleurs, on remarquera, entre autres,
la richesse de l’information botanique (en regrettant que pour beaucoup de plantes il ne
donne que le nom savant, en latin).
Le titre complet : Dictionnaire pratique arabe-français contenant tous les mots employés
dans l’arabe parlé en Algérie et en Tunisie ainsi que dans le style épistolaire, les pièces usuelles
et les actes judiciaires indique bien le champ lexical couvert : d’abord bien sûr le lexique
de la langue parlée, mais aussi – qu’on pense au contexte de l’époque, et au public à qui il
s’adressait – celui utile à un fonctionnaire de l’administration coloniale ou, plus généralement,
à tous ceux qui étaient amenés à pratiquer l’arabe, dans sa variante parlée et dans son usage
écrit dans certains actes de la vie sociale.
20 Surtout dans le format de l’édition de 1958, reconduit ici ; dans les deux premières éditions, l’ouvrage se
pré­sentait sous la forme d’un grand in 4° (24 x 31,5 cm).
VIII
On ne peut bien sûr s’attendre, vu la date de composition, à trouver dans le diction­naire
des mots désignant des objets de la vie quotidienne apparus depuis, comme les récepteurs de
télévision. Les curieux attentifs repéreront pourtant bien des termes qu’ils ne s’attendraient
peut-être pas a y trouver déjà, et qui pour certains se sont maintenus dans l’usage. Ceux qui
ont disparu constituent un témoignage historique, ce qui fait un des charmes certains de
l’ouvrage. On trouve aussi dans le dictionnaire une grande quantité d’emprunts à diverses
langues, dont bien sûr le français, qu’on a trop souvent tendance à supposer récents, alors
qu’ils étaient déjà adoptés, certains d’ailleurs depuis bien longtemps. Les étymologies
données sont cependant, il faut le dire, parfois sujettes à caution, comme le remarquait
déjà W. Marçais dans ses Observations. De même, on remarquera le nombre important des
emprunts à la langue savante (l’arabe littéral), souvent signalés comme tels, ou par un signe
de vocalisation, qui avaient déjà trouvé leur chemin vers la langue de tous les jours, le plus
souvent plus ou moins adaptés, phonétiquement et/ou morpho­logiquement, et bien souvent
aussi sémantiquement.
La vocalisation (notation des voyelles, ou de l’absence de voyelle) des mots, justement,
est sans doute insuffisante : en particulier, elle n’affecte que rarement les mots proprement
dialectaux (c’est-à-dire l’essentiel du matériau recensé), et l’on est de fait contraint d’une
part de savoir lire la graphie arabe et, d’autre part, de connaître les bases au moins de la
morphologie de l’arabe dialectal pour savoir comment prononcer les mots, pour lesquels
n’est qu’exceptionnellement donnée une transcription en caractères latins (voir par exemple
la liste de prénoms donnée à l’article ‘abd, p. 629). La transcription utilisée à l’époque, et qui
donnait d’ailleurs lieu à de vives discussions, était fort imparfaite. Sur les choix de Beaussier
(explicités aux p. 10-12 de la 1re édition, non reproduites dans l’édition de 1931 ni donc ici), on
pourra voir par exemple ses remarques sous khâ’ p. 262. La graphie arabe est “maghrébine”,
c’est-à-dire que le fâ’ est noté avec un point au dessous ( ) et le qâf ( ) avec un point au
dessus. Le gâf (g) est noté ‫ ڤ‬. Le shîn avec trois points au dessous (en plus des trois points au
dessus) : ‫ چ‬ou sont utilisés pour noter č (c’est-à-dire en français tch). Le yâ’ final (‫ )ي‬est
noté sans points (‫)ى‬.
Les mots sont classés par racines ; l’ordre alphabétique des racines est parfois approximatif,
et on en trouvera certaines, le plus souvent sans trop de difficulté, ailleurs que là où on
les aurait attendues. Quand il s’agit de racines quadriconsonantiques à dernière consonne
y, ce y est considéré comme radical, et se trouve donc normalement à sa place dans l’ordre
alphabétique. Par contre, les racines dites “sourdes” (à deuxième et troisième consonnes
radicales identiques) sont classées, dans l’ordre alphabétique, sans tenir compte de la
troisième consonne.
L’indispensable liste des abréviations et des signes utilisés par Beaussier, qui figurait dans
la première édition, n’a pas, inexplicablement, été reprise dans l’édition refondue par M. Ben
Cheneb. On a donc jugé utile de la donner ci-dessous, assortie de quelques compléments et
éclaircissements.
IX
Le Supplément d’Albert Lentin
Albert Lentin explique sobrement, dans son Avertissement (p. v-vi) comment il a procédé
pour confectionner son Supplément ; une carte (p. ii) indique utilement les “principales
localités citées dans le « Supplément »”. Celui-ci a en effet, entre autres mérites, celui de
citer, plus systématiquement encore que Beaussier, la provenance précise des mots recensés,
comme le relève, dans sa Préface (p. iii-iv), Philippe Marçais, qui met bien en lumière les
principales qualités de l’ouvrage. On remarquera aussi la mention régulière de synonymes,
et les renvois nombreux. La vocalisation de l’arabe est, sinon systématique, très fréquente ;
on peut regretter par contre l’absence de transcription phonétique. Au total, le Supplément
comporte, à raison d’une vingtaine de mots par page en moyenne, un total de plus de 6 000
mots. Parmi les secteurs d’un intérêt particulier, on citera par exemple les mots ayant trait
aux jeux d’enfants, ou aux diverses variétés de dattes. Mais plus généralement, on ne
saurait trop conseiller aux utilisateurs du Beaussier de recourir systématiquement, lorsqu’ils
cherchent un mot, au Supplément, d’autant qu’ils ont la chance de les avoir désormais en
main commodément rassemblés.
Références des principaux ouvrages cités par Beaussier dans son Avant-Propos
ou signalés dans cette présentation
Marcelin Beaussier
Beaussier Marcelin : Dictionnaire pratique arabe-français contenant tous les mots employés dans l’arabe
parlé en Algérie et en Tunisie ainsi que dans le style épistolaire, les pièces usuelles et les actes judiciaires.
Alger, Imprimerie typographique et lithographique Bouyer, 1871, xii + 764 + xvi p. (2e édition Alger,
Librairie Adolphe Jourdan, Imprimeur-éditeur, 1887, 12 + 764 + 8 p.).
[Beaussier Marcelin : Étude sur l’arabe parlé dans les états barbaresques : dictionnaire arabe-français,
vol I. Rév. L. Machuel, S.l., s. éd., s.d., xl-152 p.]
Nouvelle édition revue, corrigée et augmentée par M. Mohamed Ben Cheneb, avec une Préface de M.
Mirante, Alger, Jules Carbonel (ancienne Maison Bastide-Jourdan), 1931, 10 + 1093 p.
Réédition (sans la préface de Jules Mirante) : Imprimeries La Typo-litho et J. Carbonel réunies, Alger
- La Maison des Livres, Alger, 1958, 8 + 1093 p.
Marçais William : “Quelques observations sur le Dictionnaire pratique arabe-français de Beaussier”,
dans Recueil de Mémoires et de Textes en l’honneur du XIV e Congrès des Orientalistes, Alger, Fontana,
1905, 409-503. [Publié aussi en volume, Alger, Imprimerie Orientale Pierre Fontana,1905, 97 p. + 1 p.
d’Errata]
Quéméneur Jean : Notes sur quelques vocables du parler Tunisien figurant au “Supplément” de A.
Lentin, IBLA [Revue de l’Institut des Belles-Lettres Arabes, Tunis], 24e année, n° 93, 1961, p. 1-22 et
167-181.
Mohamed Ben Cheneb
Ben Cheneb Mohamed : Proverbes arabes de l’Algérie et du Maghreb recueillis, traduits et commentés,
Publications de l’École des Lettres, Alger, 1905-1907, et Paris, Leroux, 1908 (réédition Maisonneuve
& Larose, Paris, 2003).
Mohamed Ben Cheneb, 1869-1929 : un trait d’union entre deux cultures, Institut du monde arabe Bibliothèque, Mai 2004, 141 p.
Albert Lentin
Lentin Albert : Supplément au “Dictionnaire pratique arabe-français” de Marcelin Beaussier. Préface de
Philippe Marçais. Alger, Carbonel-La Maison des Livres, 1959, vii + 312 p. [comptes rendus : R. Blachère,
Arabica 7, 1961, p. 101 ; L. Brunot, Hespéris-Thamuda 1, 1960, p. 586-587]
Lexicographie maghrébine avant et après Beaussier
Algérie
Ben Sedira Belkassem
– Petit dictionnaire arabe-français de la langue parlée en Algérie contenant les mots et les formules
employés dans les lettres et les actes judiciaires. Alger, Jourdan, 1882, xii + 608 p. [Réimpression sous
le titre Dictionnaire arabe-français, Genève, Slatkine Reprints, 1979]
– Dictionnaire arabe-français : langue, lettres, conversation : contenant 20000 principales entrées et
acceptations employées dans la littérature arabe, dans la conversation et dans les documents et procès
judiciaires, plus atlas des pays arabes et continents, réimpression Beyrouth, Librairie du Liban, 1990.
– réédition revue et corrigée par Mohamed Ben Cheneb du Dictionnaire d’arabe parlé, Alger, Jourdan,
1924, 1045 p.
– Dictionnaire français-arabe (algérien). Paris, 1965, 1323 p.
– Dictionnaire français-arabe de la langue parlée en Algérie, Alger, A. Jourdan, 1886, lxiv + 928 p.
(édition refondue et augmentée du Petit Dictionnaire Arabe-Français ; éditions ultérieures Alger,
Jourdan, 1910, lvi + 790 p. (reproduit en fac-similé sous le titre Dictionnaire français-arabe, Genève,
Slatkine, 2001, lxiv + 756 p.).
Cherbonneau Auguste : Dictionnaire français-arabe pour la conversation en Algérie, Paris, Hachette et
Cie - Imprimerie Nationale, 1872, xxiii + 629 p. (réimpr. Albouraq, Beyrouth, 2004).
Paulmier Ad. : Dictionnaire français-arabe (idiome parlé en Algérie), Paris, Librairie française et
étrangère, 1850, xx + 911 p. [2 e édition Hachette et Cie, 1860, xx + 911 p].
Roland de Bussy Théodore
– L’idiome d’Alger ou dictionnaires français-arabe et arabe-français précédés des principes grammaticaux
de cette langue, Alger, Brochet & Bastide, 1838, 370 p. [2e éd. 1843, 479 p.]
– Petit dictionnaire français-arabe et arabe-français de la langue parlée en Algérie suivi de petit dialogues
usuels, Alger, Jourdan, [1836] 1910, 607 p.
Madouni-La Peyre Jihane : Dictionnaire arabe algérien-français - Algérie de l’Ouest, Paris, L’Asiathèque,
2003, 549 p.
Tunisie
Marçais William & Abderrahman Guîga : Textes arabes de Takroûna II. Glossaire, contribution à l’étude du
vocabulaire arabe. Tomes I-VIII. Paris, Imprimerie Nationale / CNRS, 1958-1961, 4451 p.
Nicolas Alfred
– Dictionnaire arabe-français, idiome tunisien, Tunis, Abella-Namura, 1938, v + 334 p.
– Dictionnaire français-arabe, idiome tunisien, Tunis, Namura-J. Saliba & Cie, 1938, vi + 392 p.
Boris Gilbert : Lexique du parler arabe des Marazig, Paris, Imprimerie Nationale-Librairie Klincksieck
(Études arabes et islamiques, Études et documents, I), 1958, xvi + 687 p.
Al-Zawârî, cAlî & Yûsuf Al-Šarfî : Mucjam al-kalimât wa al-taqâlîd al-šacbiyya bi-Šfâqs, Sfax, 1998,
794 p.
Louis André, seul ou en collaboration, articles dans IBLA [Revue de l’Institut des Belles-Lettres Arabes,
Tunis] ; du même auteur : Documents ethnographiques et linguistiques sur les Îles Kerkena. Textes en
arabe dialectal avec traduction, commentaire et glossaire, Alger, 1961-1962, 305 p.
XI
Algérie + Tunisie
Bakir-Khodja Ammar ben Hossein : Dictionnaire pratique français-arabe contenant les mots employés
dans l’arabe parlé en Algérie et en Tunisie, ainsi que le style épistolaire, les pièces usuelles et les actes
judiciaires, Constantine, M. Boet, 1908, 812 p.
Maroc
Dictionnaire Colin d’Arabe dialectal marocain, sous la direction de Zakia Iraqui-Sinaceur, Rabat, Editions
al-Manahil, 8 volumes, 1993 —
4
Mercier Henry
– Dictionnaire arabe-français (Méthode moderne d’arabe parlé marocain, iv), Rabat, Éditions La Porte,
1951, 280 p.
– Dictionnaire français-arabe (Méthode moderne d’arabe parlé marocain, iii), Rabat-Tanger, Éditions
La Porte- Éditions Eurafrique, 1959, 508 p.
Prémare Alfred-Louis et collaborateurs, Langue et culture marocaines - Dictionnaire arabe-français,
Paris, L’Harmattan, 12 tomes, 1993-1999.
de
Algérie + Tunisie + Maroc
Marcel Jean Joseph
– Vocabulaire français-arabe du dialecte vulgaire d’Alger, de Tunis, de Marok à l’usage des militaires
français, contenant les mots principaux et d’un besoin plus journalier dont la prononciation est
représentée en caractères français, suivi des dialogues et des locutions les plus nécessaires. Paris,
1830.
– Vocabulaire francais-arabe des dialectes vulgaires africains ; d’Alger, de Tunis, de Marok et d’Egypte
avec la prononciation figurée en lettres latines, Paris, Charles Hungray, 1837, xvi + 574 p.
– Dictionnaire Français-Arabe des dialectes vulgaires d’Alger, d’Egypte, de Tunis et de Maroc,
Paris, Maisonneuve et Cie, 1869, 572 p.
– Dictionnaire français-arabe des dialectes vulgaires d’Algérie, Tunisie et du Maroc, et d’Egypte...,
5e éd. revue et corrigée, Paris, Maisonneuve, 1885, xiv + 584 p.
Mauritanie
Taine-Cheikh Catherine : Dictionnaire hassâniyya-français. Dialecte arabe de Mauritanie, Paris,
Geuthner, 1988 —
4 (8 volumes parus, juqu'à ghayn inclus).
Jérôme Lentin
XII
Signes et abréviations
N. B. Un ordre alphabétique strict a été rétabli.
Entre crochets figurent soit des signalements ou des abréviations
omis dans la liste de Beaussier, soit des explications ou des commentaires.
(act.) Mot, phrase, employés dans les actes
judiciaires, les titres.
adj. Adjectif
adj. v. Adjectif verbal [distingué du p. pr.
= Participe présent (que nous appellerions
aujourd’hui “participe actif”) et des emplois
substantivés]
adv. Adverbe
(Alg.) mot employé à Alger.
alt. Altération de.
aor. Aoriste. [c’est-à-dire “présent-futur”, ou
plus justement inaccompli]
(ar.) Mot employé par les Arabes [c’est-à-dire
les nomades], peu compris ou même pas
compris dans les villes.
arab. Arabisme.
av. ‫ ﺏ‬, ‫ﻓﻰ‬ Le verbe, le mot doit être suivi de la
préposition ‫ ﺏ‬ou de ‫ ﻓﻰ‬, etc.
[du berb. Mot tiré du berbère]
[Blida Mot employé à Blida]
[Bousada. Mot employé à Bou Saada]
coll. Collectif.
comp. Comparez à.
(Const.) Mot employé à Constantine.
cont. de Contraction de.
dict. Dicton.
(de l’Esp.) Mot tiré de l’Espagnol.
(Est) Mot employé à l’Est, dans la province de
Constantine.
Ex. Exemple, par exemple.
Excl. Exclamation.
f. Féminin.
Fam. Terme familier.
Fig. Au figuré.
(Form.) Formule épistolaire.
[du français Mot tiré du français]
En gén. En général.
Hme Homme.
Idiot Idiotisme.
Imp. Impératif.
Ind. Indéterminé.
Int. Interjection.
de l’It. De l’Italien. [aussi noté parfois : de
l’ital.]
[Kabylie Mot employé en Kabylie]
Lagh. Laghouat.
[lang. Parlée = considérée comme appartenant
en propre à la langue parlée, et comme un
dialectalisme caractérisé dans tout autre
contexte, par exemple p. 105 pour le nom de
nombre “19”]
Litt. Littéral, mot qui n’est pas utilisé dans
le langage. [c’est-à-dire appartenant à la
langue savante, et non employé dans la
langue parlée]
Litt. [employé aussi comme abréviation de
“littéralement”]
Loc. Locution.
M. Masculin.
[Maroc Mot employé au Maroc]
[Médéa Mot employé à Médéa]
Même sign. Même signification.
Mod. Mot moderne, introduit dans le langage
depuis l’occupation. [= l’occupation
française de l’Algérie]
N. card. Numératif cardinal.
N. d’act. Nom d’action.
[Nédroma Mot employé à Nédroma]
N. gén. Nom générique.
N. ord. Numératif ordinal.
N. p. f. Nom propre féminin.
N. p. m. Nom propre masculin.
[N. pr. Nom propre]
N d’un. ‫ﺓ‬ Le nom d’unité se forme par
l’adjonction d’un ‫ ﺓ‬au mot collectif.
[nom. Nominatif]
Opp. Opposé à.
(Ouest.) Mot employé dans l’Ouest, dans la
province d’Oran.
Par. Paragraphe.
Par opp. à Par opposition à.
Part. int. Particule interrogative.
Pl. Pluriel.
Pl. ‫ﺍﺕ‬ Le pluriel se forme en changeant le ‫ ﺓ‬final
en ‫ﺍﺕ‬, ou en ajoutant ‫ ﺍﺕ‬à la dernière lettre du
singulier.
Pl. ‫ﺓ‬ Le pluriel se forme en ajoutant un ‫ ﺓ‬à la
dernière lettre du mot.
Pl. ‫ﻴﻦ‬ Le pluriel se forme en ajoutant ‫ ﻴﻦ‬à la
dernière lettre du mot.
p. p. Participe passé.
p. pr. Participe présent.
Poét. Poétique. [mot employé en poésie, en
général avec un sens particulier, et non dans le
langage quotidien]
au pr. Au propre
[pr pour (à la place de)]
Pr. et f. Au propre et au figuré. [aussi abrégé en :
au p. et fig]
Pr. ind. Pronom indéfini.
Pr. pers. Pronom personnel.
Pr. poss. Pronom possessif.
(Prax) Tiré du rapport du voyageur Prax.
Prob. Probablement.
Prov. Proverbe.
q. q. Quelqu’un.
qque Quelque.
[rac. Racine] (Reb.) Docteur Reboud.
Rég. Régulièrement.
Rép. Réponse.
S. Substantif.
S. coll. Substantif collectif.
(Sah.) Mot employé dans le Sahara.
(Sah. occ.) Sahara occidental.
(Sah. or.) Sahara oriental.
Louis Prax, un saint-simonien, est cité parmi ses sources
par Beaussier dans son Avant-propos (p. 7) ; voir aussi
Dozy I, xxvi.
Voir l’Avant-propos p. 7. Le docteur Reboud, bo­taniste,
a publié aussi des travaux d’orientalisme (par exemple un
Recueil d’inscriptions libyco-berbères dans les Mémoires de
la Société Française de Numismatique et d’Archéologie.
Serm. Formule de serment.
[sing. Singulier] [sous-ent. Sous-entendu]
Spéc. Spécialement.
Subst. Substantivement.
(Sud.) Mot employé dans le Sud.
Syn. Synonyme.
Syst. barb. Système barbaresque.
Syst. or. Système oriental.
[T. Terme]
T. bas Terme bas.
T. lég. Terme légal
[Tlemcen Mot employé à Tlemcen]
(Tougg.) Touggourt.
T. Tr. Terme trivial.
[Tripolit. Mot employé en Tripolitaine]
Tun. Mot employé à Tunis.
[du Turc Mot tiré du turc]
V. Verbe.
Val. num. Valeur numérique.
(villes) Mot employé dans les villes.
voy. Voyez.
2e, 3e, 4e Deuxième, troisième, quatrième
forme du verbe, etc. [c’est-à-dire les
formes verbales dérivées, aujourd’hui
numérotées en général, dans les
grammaires occcidentales, de I à X.]
9e mod. Neuvième forme modifiée. [il s’agit
de la forme liée aux adjectifs “de couleur
et de particularités physiques”, par
“noircir, devenir
exemple p. 500 noir”]
|| Signe de séparation.
+ Annonce que la racine ne se trouve pas
dans le Dictionnaire de Golius, et par
conséquent n’est pas littéral.
Cette abréviation est indiquée dans les Errata et
additions.
Il s’agit du Lexicon Arabico-Latinum contextum ex
probatioribus orientis lexicographis, accedit index
Latinus copiosissimus, qui lexici Latino-Arabici
vicem explere possit, Leiden, Typis Bonaventuræ
& Abrahami Elseviriorum, 1653. Ce dictionnaire
(v. l’Avant-propos de Beaussier p. 6 col. 1) avait été
“réédité par Freytag et traduit plus tard en français
par M. Kasimirski”.